Augustin, de la correction et de la grâce. - CHAPITRE XII. QUE CELUI QUI SE GLORIFIE SE GLORIFIE DANS LE SEIGNEUR.

CHAPITRE XII. QUE CELUI QUI SE GLORIFIE SE GLORIFIE DANS LE SEIGNEUR.


33. Nous ne saurions dès lors étudier avec trop de soin la différence qui existe entre ces deux propositions: pouvoir ne pas pécher, et ne pouvoir pas pécher; pouvoir ne pas mourir, et ne pouvoir pas mourir; pouvoir ne pas quitter le bien, et ne pouvoir pas quitter le bien. En effet, le premier homme pouvait ne pas pécher, il pouvait ne pas mourir, il pouvait ne pas abandonner le bien. Mais serait-il vrai de dire: Doué comme il l'était du libre arbitre, il ne pouvait pécher? ou bien, il ne pouvait mourir, lui à qui il avait été dit: Si vous péchez, vous mourrez de mort (1)? ou bien, il ne pouvait abandonner le bien, quand il l'a réellement abandonné en péchant, et a mérité la mort? La première liberté de la volonté était donc de pouvoir ne pas pécher; la dernière et cette fois beaucoup plus grande, sera de ne pouvoir pas pécher. La première immortalité était de pouvoir ne pas mourir; la dernière et cette fois encore beaucoup plus grande, sera de ne pouvoir pas mourir. La première puissance de la persévérance était de pouvoir ne pas quitter le bien; la dernière félicité de la persévérance sera de ne pouvoir pas quitter le bien. Parce que ces derniers privilèges seront beaucoup plus grands et plus précieux, s'ensuit-il que les premiers n'avaient ni prix, ni importance?


34. Nous avons à établir la même distinction parmi les secours qui nous sont accordés. Autre chose est le secours sans lequel telle


1. Gn 2,17

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oeuvre ne se fait pas, et autre chose est le secours avec lequel cette oeuvre s'accomplit. Sans aliments aucuns nous ne pouvons vivre, et cependant la présence de ces aliments ne saurait faire vivre celui qui veut mourir. Par conséquent, les aliments sont un dé ces secours sans lesquels telle couvre ne se fait pas, et non pas de ceux par lesquels telle couvre s'accomplit. S'il s'agit de la béatitude, tel homme pouvait en être privé, mais il suffit qu'elle lui soit accordée, pour que ce même homme soit heureux. Par conséquent, la béatitude est un secours sans lequel telle couvre ne se fait pas, et par lequel telle couvre s'accomplit. Il participe donc à la double efficacité du secours, car si la béatitude est accordée à l'homme, aussitôt il devient heureux; et si elle lui est refusée pour toujours, jamais il ne sera heureux. Il n'en est pas de même des aliments, ils ne font pas nécessairement que l'homme vive, et cependant sans eux l'homme; ne saurait vivre.

Quant au premier homme, qui avait été créé dans la rectitude du bien, et qui possédait le pouvoir de ne pas pécher, de ne pas mourir et de ne pas quitter le bien, il avait aussi reçu le secours de la persévérance, non pas ce secours qui l'aurait fait persévérer, mais ce secours sans lequel il ne pouvait persévérer même avec son libre arbitre. S'il s'agit des saints qui sont prédestinés au royaume éternel par la grâce de Dieu, le secours qu'ils reçoivent en vue de la persévérance est tel, que c'est la persévérance elle-même qui leur est accordée; non-seulement en ce sens qu'en dehors de ce don ils ne puissent persévérer, mais encore en ce sens que par ce don ils persévéreront infailliblement. En effet, si le Sauveur a dit: «Sans moi vous ne pouvez rien faire», il a dit également: «Ce n'est pas vous qui m'avez choisi, mais c'est moi-même qui vous ai choisis et placés afin que vous alliez et que vous portiez des fruits, et que vos fruits demeurent (1)». Ces paroles prouvent clairement que le Sauveur leur avait donné, non-seulement la justice, mais encore la persévérance dans la justice. Quand on voit le Sauveur les placer afin qu'ils aillent, qu'ils portent des fruits, et que leurs fruits demeurent; qui donc oserait dire: ils ne demeureront pas? qui oserait dire: Peut-être ne

1. Jn 15,5-16

demeureront-ils pas? «Les dons et la vocation de Dieu sont sans repentante (1)», j'entends la vocation de ceux qui sont appelés selon le décret. Puisque c'est pour eux que Jésus-Christ intercède, afin que leur foi ne défaille point, n'est-il pas certain qu'elle ne défaillira jamais? par conséquent elle persévérera jusqu'à la fin, c'est-à-dire jusqu'au moment où elle sera remplacée par la vue intuitive dans la gloire éternelle.


35. Contre ces tentations si grandes et si nombreuses que nous subissons aujourd'hui, et qui n'étaient point connues dans le paradis terrestre, nous avons besoin d'une plus grande liberté, fortifiée et soutenue par le don de persévérance, pour nous assurer la victoire sur ce monde, ses séductions, ses terreurs et ses mensonges. Telle était la doctrine des saints martyrs. D'un côté, personne ne tentait d'essayer la terreur contre le premier homme; de l'autre côté, Dieu lui avait intimé ses ordres et leur terrible sanction, et cependant; s'inspirant de son libre arbitre, Adam ne sut pas persévérer dans son bonheur et dans l'extrême facilité où il était de ne pas pécher. Nos martyrs, au contraire, bravant, non pas seulement les menaces, mais la barbarie et les persécutions du monde, restèrent inébranlables dans la foi, n'ayant pour se soutenir que l'espérance de biens futurs qu'ils ne voyaient pas, tandis que le premier homme pouvait contempler tous ces biens présents que son crime allait lui ravir. Pouvons-nous expliquer cette différence sans remonter à ce Dieu de qui nos martyrs ont obtenu miséricorde afin d'être fidèles (2); de qui ils ont reçu l'esprit, non pas de crainte, pour faiblir devant leurs persécuteurs, mais l'esprit de force, de charité et de continence (3), pour triompher de toutes les menaces, de toutes les séductions, de tous les tourments? Adam, sans péché, reçut la volonté libre avec laquelle il fut créé, et cette volonté il l'a fait servir au péché; la volonté des martyrs avait été primitivement asservie au péché, mais elle fut ensuite délivrée par Celui qui a dit: «Si le Fils vous délivre, vous serez véritablement libres (4)». Cette grâce leur avait conféré une si grande liberté que, malgré la nécessité où ils se trouvaient en cette vie de combattre contre les convoitises du péché et les défaillances


1. Rm 11,29 - 2. 1Co 7,25 - 3. 2Tm 1,7 - 4. Jn 8,36

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accidentelles qui chaque jour leur arrachaient cette prière: «Pardonnez-nous nos offenses (1)», jamais cependant ils ne devinrent les esclaves de ce péché qui conduit à la mort, et dont l'apôtre saint Jean nous a dit: «Il est un péché qui va à la mort, et je ne dis pas que l'on doive prier pour lui (2)». Comme cette espèce de péché n'est point déterminée, les opinions peuvent se former aussi nombreuses que variées; pour moi, ce péché consiste à renoncer jusqu'à la mort à cette foi qui opère par la charité. Ceux qui se rendent coupables de ce péché ne jouissent pas, comme Adam, de la liberté primitive; ils ont dû être délivrés dans le second Adam par la grâce de Dieu, et cette rédemption leur a conféré le libre arbitre pour servir le Seigneur et non pour se constituer les esclaves du démon. Ayant donc été affranchis du péché, ils sont devenus les serviteurs de la justice (3), dans laquelle ils persévéreront jusqu'à la fin par l'efficacité de cette persévérance qui leur a été donnée par Celui qui les a connus dans sa prescience, les a prédestinés, appelés selon son décret, justifiés et glorifiés. Car toutes ces promesses qui regardaient l'avenir sont déjà pour eux réalisées. Ne lisons-nous pas: «Abraham crut» à ces promesses, «et sa foi lui fut imputée à justice?» Car il rendit gloire à Dieu, étant pleinement persuadé qu'il est tout-puissant pour accomplir a tout ce qu'il a promis».


36. Ainsi donc, Dieu rend bons ses élus afin qu'ils fassent le bien. Quand Dieu promettait à Abraham que de nombreux élus sortiraient de sa race, était-ce parce que dans sa prescience il voyait que ces élus se sanctifieraient par leur propre vertu? Dans ce cas, ce n'était point son couvre qu'il aurait annoncée, mais celle de ces élus. Or, tel ne fut point l'objet de la foi d'Abraham, car « il ne fut pas ébranlé dans sa foi, mais il rendit gloire à Dieu, étant pleinement persuadé qu'il est tout-puissant pour accomplir ses promesses (4)». L'Apôtre ne dit pas que Dieu peut promettre ce qu'il a prévu, ou qu'il peut montrer ce qu'il a prédit, ou qu'il peut connaître par sa prescience ce qu'il a promis; il affirme hautement «qu'il est tout-puissant pour accomplir ses promesses». C'est donc Dieu lui-même qui fait persévérer dans le bien ceux


1. Mt 6,12 - 2. 1Jn 5,16 - 3. Rm 6,18 - 4. Rm 4,19-21

qu'il a rendus bons. Quant à ceux qui tombent et périssent, ils ne furent jamais du nombre des prédestinés. Ces autres paroles de l'Apôtre . «Qui êtes-vous donc pour oser ainsi condamner le serviteur d'autrui? s'il tombe ou s'il reste debout, cela regarde son maître», s'appliquent sans doute à tous ceux qui sont régénérés et qui vivent chrétiennement; toutefois sa pensée se reporte aussitôt sur les prédestinés, et il ajoute: «Mais il restera debout, parce que Dieu est tout-puissant pour l'affermir (1)». La persévérance nous vient donc réellement de Celui qui est tout-puissant pour affermir ceux qui sont debout et les conserver dans cet heureux état, ou relever ceux qui sont tombés; car c'est Dieu qui relève ceux qui tombent (2).


37. Sans avoir reçu de Dieu ce don précieux, c'est-à-dire la persévérance dans le bien, le premier homme était libre de persévérer ou de ne pas persévérer, car sa volonté avait pour cela les forces nécessaires, puisqu'elle avait été créée dans l'innocence, et qu'elle n'avait à lutter en elle-même contre aucune concupiscence. Par conséquent, à son libre arbitre était confié le soin de conserver les effets de cette immense bonté de Dieu, et la facilité si grande qu'il avait de vivre dans la justice et l'innocence. De son côté, Dieu savait dans sa prescience que l'homme ferait le mal; il le savait, mais il ne l'y forçait pas; il savait en même temps de quel juste châtiment il punirait sa faute. Aujourd'hui cette grande liberté a été perdue par le fait du péché; il ne nous est resté qu'une immense faiblesse qui a besoin de secours plus puissants et plus nombreux. En effet, Dieu s'est plu à étouffer l'orgueil de la présomption humaine, «afin que toute chair», c'est-à-dire tout homme, «ne pût désormais se glorifier en sa présence». De quoi donc pouvait-elle se glorifier, si ce n'est de ses propres mérites? mérites qu'elle a pu avoir, mais qu'elle a perdus, et perdus par son libre arbitre, comme c'est par son libre arbitre qu'elle avait pu les acquérir. Voilà pourquoi il ne reste d'autre espérance de rédemption que dans la grâce du Libérateur. Voilà pourquoi toute chair a cessé dé se glorifier en présence du Seigneur.

Les pécheurs ne se glorifient pas; et de quoi donc pourraient-ils se glorifier? Les justes ne se glorifient pas davantage, car par


1. Rm 14,4 - 2. Ps 146,8

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eux-mêmes ils n'ont rien, ils n'ont d'autre gloire que Celui à qui ils disent: «Vous êtes ma gloire et l'ornement de mon front (1)». C'est donc à tous les hommes que s'appliquent ces paroles: «Nulle chair ne doit se glorifier en présence du Seigneur». Et aux justes il est dit: «Que celui qui se glorifie, se glorifie dans le Seigneur». Telle est bien la pensée de l'Apôtre, car après avoir dit: «Que nulle chair ne se glorifie en présence du Seigneur», craignant sans doute que les saints ne se crussent restés sans aucune gloire, il ajoute aussitôt: «C'est par cette voie que a vous êtes établis en Jésus-Christ, qui nous a été donné de Dieu pour être notre sagesse, notre justice, notre sanctification et notre rédemption, afin que, selon ce qui est écrit, celui qui se glorifie ne se glorifie que dans le Seigneur (2)». Voilà pourquoi, dans ce lieu de misères, sur cette terre où la vie de l'homme n'est qu'une épreuve et un combat (3), «la vertu se perfectionne dans la faiblesse (4)»; et cette vertu, quelle est-elle, si ce n'est que celui qui se glorifie ne doit se glorifier qu'en Dieu?»


38. Quant à la persévérance dans le bien, Dieu pouvait-il permettre à ses saints de se glorifier dans leurs propres forces, et non pas uniquement en lui-même? En effet, il leur donne le même secours qu'il a donné au premier homme, et sans lequel ils ne pourraient persévérer, lors même qu'ils en auraient la volonté; mais il opère en eux le vouloir lui-même. Si donc il est certain qu'ils ne persévéreront qu'autant qu'ils en auront le pouvoir et la volonté, il n'est pas moins certain que le pouvoir et la volonté de persévérer leur sont accordés par la munificence de la grâce divine. Leur volonté se trouve tellement enflammée par le Saint-Esprit, qu'ils peuvent précisément parce qu'ils veulent, et ils veulent parce que Dieu opère en eux le vouloir. Nous savons d'ailleurs que la faiblesse dont nous souffrons en cette vie était nécessaire pour perfectionner la vertu en réprimant l'orgueil; or, si dans cette grande faiblesse Dieu abandonnait les hommes à leur propre volonté, de telle sorte que, s'ils le voulaient, ils demeurassent dans le secours de Dieu sans lequel ils ne pourraient persévérer, et que Dieu cessât d'opérer en eux le vouloir, n'est-il pas évident qu'au sein de toutes ces tentations


1. Ps 3,9 - 2. 1Co 1,29-31 - 3. Jb 7,1 - 4. 2Co 12,9

leur volonté succomberait sous le poids de sa propre faiblesse? N'est-il pas évident qu'ils ne pourraient persévérer, parce que, succombant sous le poids de cette faiblesse, ou bien ils ne voudraient pas, ou bien leur volonté serait tellement faible qu'ils n'auraient par elle aucun pouvoir?

Le Seigneur a donc pourvu à la faiblesse de la volonté humaine, en lui prodiguant la grâce divine à l'aide de laquelle cette même volonté devient persévérante et invincible. Par elle-même, sans doute, elle reste toujours faible, et cependant avec la grâce elle est loin de défaillir ou de se laisser vaincre par l'adversité quelle qu'elle soit De là vient que la volonté humaine, malgré son impuissance et sa faiblesse, pourrait, par la vertu de Dieu, persévérer dans un bien si léger fût-il, tandis que la volonté du premier homme, malgré sa force et son intégrité natives, malgré la puissance intégrale de son libre arbitre, n'a point persévéré dans un bien dont l'importance était pour lui plus sensible et plus grande, Ajoutons qu'Adam avait reçu de Dieu ce secours sans lequel il n'aurait pu persévérer, s'il l'eût voulu; tandis qu'il était privé de cela autre secours par lequel Dieu aurait opérées lui le vouloir. Comme Adam était très-fort, Dieu l'abandonna quelque peu à lui-même et le laissa faire ce qu.'il voudrait; aux saints qui étaient si faibles, il donna la grâce de vouloir invinciblement ce qui était bien et de refuser invinciblement de quitter ce bien. Le Sauveur a dit: «J'ai prié pour toi afin que ta foi ne défaille point (1)»; comprenons que cette parole s'adressait à celui qui est édifié sur la pierre. Par conséquent cet Apôtre devenu l'homme de Dieu, non-seulement parce qu'il avait obtenu miséricorde pour être fidèle, mais encore parce que sa foi n'a jamais failli, devait s'appliquer cette parole: «Que celui qui se glorifie, se glorifie dans le Seigneur».



CHAPITRE XIII. LE NOMBRE DES ÉLUS EST DÉTERMINÉ.


39. Ces paroles s'appliquent à ceux qui soul! prédestinés au royaume de Dieu, et dont le nombre est tellement précisé qu'il ne sera mi augmenté, ni diminué d'un seul homme. Mais je ne veux nullement parler de ceux qui après la promulgation solennelle de la


1. Lc 22,32

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révélation, se sont multipliés au-delà de tout calcul (1). De ces hommes on peut dire qu'ils sont appelés, mais non pas qu'ils sont élus, car ils n'ont pas été appelés selon le décret. Quoiqu'il en soit, il est certain que le nombre des élus ne sera ni augmenté ni diminué, malgré la contradiction apparente qui semblerait résulter de ces paroles du Précurseur: «Faites donc de dignes fruits de pénitence et gardez-vous de dire en vous-mêmes, nous avons Abraham pour père; car Dieu pourrait avec les pierres se former des enfants d'Abraham (2)». Saint Jean voulait montrer que ces Juifs devaient être rejetés, s'ils ne faisaient pas de dignes fruits de pénitence, de telle sorte cependant que le nombre des enfants promis à Abraham resterait complet. Cette pensée est plus clairement formulée dans l'Apocalypse: «Conservez ce que vous avez, dans la crainte qu'un autre ne reçoive la couronne qui vous était destinée (3)». Si un autre ne reçoit cette couronne qu'autant qu'elle aura été perdue par celui à qui elle était destinée, n'est-ce pas une preuve que le nombre des élus est parfaitement déterminé?


40. D'un autre côté, quand il s'agit des saints qui doivent persévérer, nous voyons la sainte Ecriture leur parler comme si leur persévérance était incertaine et douteuse. Mais le but de ces paroles est de nous défendre de porter trop loin nos investigations et de nous déterminer à faire notre salut avec crainte et tremblement (4). En effet, tant qu'il vit au sein de notre malheureuse mortalité, quel fidèle oserait lui-même se ranger au nombre des prédestinés? Cette prédestination reste un secret pour nous sur cette terre, car notre ennemi le plus redoutable c'est l'orgueil, et ne voyons-nous pas le grand Apôtre souffleté par l'ange de Satan, Dieu le permettant ainsi pour lui ôter jusqu'à la moindre pensée d'orgueil (5)? De là cette parole du Sauveur à ses Apôtres: «Si vous demeurez en moi (6)», et cependant il savait fort bien que ses Apôtres demeureraient en lui. Le Prophète disait également: «Si vous voulez et si vous écoutez ma parole (7)»; et cependant le Seigneur connaissait ceux en qui il opérait le vouloir (8).

Des oracles de ce genre se rencontrent fréquemment dans les saintes Ecritures. Car la


1. Ps 39,6 - 2. Mt 4,8-9 - 3. Ap 3,11 - 4. Rm 11,20 - 5. 2Co 12,7 - 6. Jn 15,7 - 7 Is 1,19 - 8. Ph 2,13

prédestination, en restant un secret pour nous, devait avoir pour effet de nous soustraire à toute pensée d'orgueil et de laisser sous l'heureuse influence d'une crainte légitime ceux mêmes qui courent la carrière de la justice, puisque le but pour eux est toujours incertain. Grâce au secret de la prédestination, nous devons croire que certains enfants de perdition, privés du bienfait de la persévérance finale, commencent par moments à vivre de cette foi qui opère par la charité, arrivent même parfois jusqu'à la fidélité et la justice, retombent ensuite et sont frappés par la mort avant d'avoir pu se convertir. Si ces cruelles alternatives ne se présentaient jamais, cette crainte religieuse et salutaire que l'Esprit-Saint nous offre comme le seul remède au vice de l'orgueil, n'aurait de prise sur les hommes que jusqu'au moment où ils auraient obtenu la grâce de Jésus-Christ pour vivre chrétiennement; cela fait, ils resteraient dans une entière sécurité et regarderaient tonte chute comme absolument impossible. Or, dans ce lieu d'épreuves, avec la faiblesse qui nous caractérise, le plus grand danger pour nous résulterait précisément de cette présomption et de cette sécurité si favorables à l'orgueil. Oui, sans doute, nous aussi, comme les anges, nous serons un jour confirmés en grâce, mais ce sera seulement lorsque l'orgue il ne pourra plus nous atteindre. Quant au nombre des élus, prédestinés par la grâce de Dieu au royaume éternel, et gratifiés de la persévérance finale, il arrivera tout entier au séjour de la gloire, et y possédera le bonheur suprême; et après avoir joui ici-bas de la miséricorde du Sauveur soit pour opérer leur conversion, soit pour soutenir les combats du Seigneur, ils la béniront à jamais sous l'éclat de la couronne immortelle.


41. Que cette couronne soit pour eux l'effet de la miséricorde divine, c'est ce que nous atteste la sainte Ecriture, quand elle met sur les lèvres de David ces belles paroles qu'il adresse à son âme pour la gloire de son Dieu: «Qu'il te couronne dans sa bienfaisance et sa miséricorde (1)». L'apôtre saint Jacques nous dit également: «Un jugement sans miséricorde attend celui qui n'aura pas fait miséricorde (2)»; ce qui nous prouve que dans ce jugement qui décernera la récompensa; aux justes et le châtiment aux pécheurs, les


1. Ps 101,4 - 2. Jc 2,13

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uns seront jugés avec miséricorde et les autres sans miséricorde. De là cette parole de la mère des Macchabées à l'un de ses enfants: «Afin que dans cette miséricorde il vous reçoive avec vos frères (1)». Nous lisons ailleurs: «Lorsque le roi dans sa justice aura pris place sur son trône, le mal ne pourra a supporter sa présence. Qui donc se glorifiera de la chasteté de son coeur? qui donc se flattera d'être pur de tout péché (2)?» Par conséquent, celui à qui Dieu n'aura imputé aucun péché devra trouver encore dans la miséricorde divine le principe et la cause de son bonheur.

Toutefois, il est vrai de dire que dans ce juste jugement la miséricorde elle-même sera accordée selon le mérite des bonnes oeuvres. «Un jugement sans miséricorde attend celui qui n'a pas fait miséricorde»; ces paroles prouvent qu'un jugement miséricordieux est réservé à tous ceux qui présenteront des oeuvres de miséricorde; d'où il suit que la miséricorde elle-même sera proportionnée aux mérites des bonnes oeuvres. Il n'en est pas de même en cette vie, car sans aucun mérite antérieur de leur part et souvent même après de nombreux péchés commis par eux, nous voyons la miséricorde prévenir les hommes pour les délivrer des fautes qu'ils ont commises et de celles mêmes qu'ils auraient commises s'ils n'avaient pas été régénérés par la grâce de Dieu; et par là même elle leur épargne les châtiments éternels qu'ils auraient subis s'ils n'avaient pas été arrachés à la puissance des ténèbres et transférés dans le royaume du Fils bien-aimé de Dieu (3).

N'oublions pas, cependant, que la vie éternelle, qui sera la récompense des bonnes oeuvres, nous est elle-même désignée par l'Apôtre comme étant une grâce de Dieu (4), c'est-à-dire un don purement gratuit, et non pas une dette de rigoureuse justice acquise par des mérites exclusivement personnels. Par conséquent, la vie éternelle reste une grâce, puisqu'elle n'est que la récompense des mérites que la grâce a conférés à l'homme. C'est elle qui nous est clairement désignée par ces mots de l'Evangile: «La grâce pour la grâce (5)», c'est-à-dire pour les mérites que nous aurons acquis par la grâce.


42. Quant à ceux qui ne sont pas du nombre


1. 2M 7,29 - 2. Pr 20,8-9 selon les Sept. - 3 Col 1,13 - 4. Rm 6,23 - 5. Jn 1,16

des prédestinés que la grâce de Dieu conduit au royaume éternel, soit qu'ils n'aient pu faire usage de leur libre-arbitre (1); soit qu'ils aient correspondu à la grâce par leur volonté devenue véritablement libre, puisqu'elle avait été délivrée par la grâce; ceux donc qui ne sont pas de ce nombre fixe et bienheureux des prédestinés, subiront le juste jugement qu'ils auront mérité. En effet, ou bien ils sont encore sous le joug du péché originel, et alors ils seront traités comme solidaires d'un crime qui n'a pas été effacé par la régénération;ou bien ils ont commis d'autres fautes volontaires et personnelles sous l'influence de leur propre volonté; volonté libre, mais non pas délivrée; libre au point de vue de la justice, mais esclave du péché dans lequel ils se sont jetés plus ou moins pour satisfaire leurs passions criminelles; tous ces hommes sont coupables et leurs châtiments seront proportion nés à la gravité de leurs fautes. Peut-être reçoivent-ils la grâce de Dieu, mais ce n'est que temporairement, et ils ne persévéreront pas; ils se séparent du Seigneur et le Seigneur les abandonne. Par un juste et mystérieux des sein de Dieu, ils sont laissés à leur libre arbitre, sans avoir reçu le don de la persévérance.



CHAPITRE XIV. DIEU SEUL PEUT RENDRE LA CORRECTION EFFICACE ET SALUTAIRE.


43. Que les hommes se laissent donc corriger quand ils pèchent, et que la correction ne leur donne pas lieu d'accuser la grâce, pas plus qu'ils ne doivent s'appuyer sur la grâce pour incriminer la correction. En effet, tout péché mérite son châtiment; or, à ce châtiment appartient une juste correction, laquelle a toujours une vertu médicinale, alors même que la vie du malade paraît incertaine et compromise. Quand donc celui qui reçoit la correction appartient au nombre des élus, la correction devient pour lui un remède sala taire; s'il n'est pas du nombre des prédestinés, la correction conserve encore pour lui son caractère de tourment pénal. Devant une semblable incertitude, on doit toujours faire preuve de charité, quelque douteux que puisse paraître le résultat; mais à la correction il faut toujours joindre la prière. Or, lorsque la correction a pour effet d'amener


1. Comme les enfants morts après leur baptême.

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ou de ramener les hommes dans la voie de la justice, quel autre opère réellement le salut dans le coeur, si ce n'est Celui qui seul peut donner l'accroissement, c'est-à-dire Dieu lui-même, à l'exclusion de celui qui plante ou de celui qui arrose, de celui qui cultive les champs ou taille les arbrisseaux? Quand donc Dieu dans ses décrets a voulu le salut d'un homme, rien ne saurait empêcher sa volonté. Libre à Dieu de vouloir ou de ne pas vouloir, mais dans l'un ou l'autre cas la volonté divine ne saurait être entravée ni vaincue. Le Seigneur ne fait-il pas ce qu'il veut de ceux-là même qui ne font pas ce qu'il veut?


44. Il est écrit que Dieu a veut que tous les «hommes soient sauvés (1)», et pourtant en réalité tous ne sont pas sauvés. Ce passage est susceptible d'interprétations différentes que nous avons indiquées dans un certain nombre de nos ouvrages (2). Ici je me bornerai à une seule- réflexion. Ces paroles: «Dieu veut que tous les hommes soient sauvés», ne doivent s'entendre que des prédestinés; car ils renferment toutes les classes de l'humanité. Le Sauveur disait aux Pharisiens: «Vous donnez la dîme de toutes les récoltes (3)»; ce qui doit s'entendre de toutes les récoltes qui leur appartenaient; car ils ne donnaient pas la dîme de toutes les récoltes produites sur toute la face de l'univers. C'est dans le même sens qu'il est dit: «Comme je tâche moi-même de plaire à tous en toutes choses (4)». Est-ce que l'Apôtre qui tenait ce langage plaisait également à ses nombreux persécuteurs? Non, sans doute, mais il plaisait au genre humain réuni dans le sein de l'Eglise de Jésus-Christ et composé de ceux qui étaient déjà convertis et de ceux qui devaient se convertir.


45. Il n'est pas douteux que Dieu, qui a fait dans le ciel et sur la terre tout ce qu'il a voulu (5), et qui même a déjà fait ce qui doit arriver (6), peut imposer sa volonté à toutes les volontés humaines et faire tout ce qui lui plaît; car il fait toujours ce qu'il veut, lorsqu'il le veut, des volontés humaines. Je ne citerai que fort peu d'exemples. Quand Dieu voulut donner l'empire à Saül, les Israélites étaient-ils si parfaitement libres de se soumettre ou de ne pas se soumettre à ce roi, qu'ils


1. 1Tm 2,4 - 2. Enchirid. chap. CIII; Cité de Dieu, liv. 22,ch. 1,II; Contre Julien, liv. 4,ch. 8,etc. - 3. Lc 11,42 - 4. 2Co 10,33 - 5. Ps 134,6 - 6 Is 45 selon les Sept.

eussent le pouvoir de résister à Dieu? Il est vrai, cependant le Seigneur, avant de prendre cette mesure, voulut consulter les dispositions de son peuple, quoiqu'il eût plein pouvoir d'incliner les coeurs de quelque côté qu'il eût voulu. Voici ce que nous lisons: «Samuel congédia le peuple et chacun retourna à sa demeure; de son côté, Saül se retira dans sa maison de Gabaa, et les principaux, dont Dieu avait touché le coeur, se mirent à la suite de Saül. Et les opposants s'écrièrent: «Qui donc nous sauvera? Sera-ce cet homme? Et ils le couvrirent d'outrages, et refusèrent de lui offrir des présents (1)». Dira-t-on que de tous ceux dont Dieu avait touché le coeur, personne ne dut accompagner Saül; ou bien qu'il fut accompagné par un seul des opposants dont Dieu n'avait pas touché le coeur?

Au sujet de David, dont les glorieuses victoires avaient constaté le choix que le Seigneur avait fait de lui pour monter sur le trône, nous lisons également: «Et David marchait de triomphe en triomphe; sa gloire allait toujours en croissant, et le Seigneur était avec lui (2)». Cela posé, le texte sacré ajoute aussitôt: «Alors Amasa, qui était le premier entre les trente, tout transporté par l'Esprit-Saint, lui répondit: Nous sommes à vous, ô David, et nous serons toujours avec vous, ô Fils de Jessé. La paix, la paix soit avec vous et avec ceux qui prennent votre défense, car Dieu vous protège». Est-ce que cet Amasaï pouvait s'opposer à la volonté de Dieu, et ne pas obéir à Celui qui avait agi sur son coeur par l'action directe de l'Esprit-Saint dont il fut revêtu et qui lui inspirait de vouloir, de parler et d'agir en ce sens? Un peu plus loin nous lisons: «Tous ces guerriers qui ne demandaient qu'à combattre, vinrent avec un coeur parfait trouver David à Hébron, pour l'établir roi surtout Israël (3)». C'est donc bien par leur propre volonté qu'ils choisirent David pour leur roi. Qui ne le voit pas? Qui pourrait le nier? Ce qu'ils firent dans toute la paix de leur coeur, l'ont-ils fait malgré eux et par force? Et pourtant cette détermination leur fut réellement inspirée par celui qui agit à sa volonté sur le coeur des hommes. De là ces paroles déjà citées: «David faisait tous les jours de nouveaux progrès; sa gloire allait toujours croissant, et le Seigneur était avec lui». Or, ce Dieu


1. 1S 10,25-27 - 2. 1Ch 11,9 - 3. 1Ch 12,18-38

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tout-puissant qui était avec David inspira à ces Israélites la volonté de se choisir pour roi le fils de Jessé. Et comment donc leur inspira-t-il cette volonté? Est-ce par la contrainte et en les chargeant de chaînes corporelles? Il agit intérieurement, il s'empara de leur coeur et les entraîna par la force même des résolutions qu'il avait fait naître dans leur volonté. Si donc, lorsqu'il veut établir des rois sur la terre, Dieu est plus maître des volontés des hommes qu'ils ne le sont eux-mêmes, quel autre que lui peut rendre la correction efficace et salutaire; quel autre que lui peut donner à la correction d'un coupable la vertu de le placer dans le royaume des cieux?



CHAPITRE XV. DIEU VEUT QUE TOUS LES HOMMES SOIENT SAUVÉS.


46. Que des frères se soumettent donc avec docilité à la correction que leur infligent des supérieurs guidés en cela par la charité, et s'efforçant de proportionner toujours cette correction à la gravité plus ou moins grande des fautes de leurs subordonnés. Il n'est pas même jusqu'à l'excommunication portée par un évêque et regardée dans l'Eglise comme la peine la plus grave, qui ne puisse, si Dieu le veut, devenir un puissant moyen de salut pour ceux qui l'ont méritée. En effet, savons-nous ce qui nous arrivera le jour suivant? Tant qu'un homme est en vie, devons-nous désespérer de son salut? Peut-on empêcher Dieu de jeter un regard miséricordieux sur tel coupable, de lui accorder la grâce de la pénitence, d'accepter le sacrifice d'un esprit troublé et d'un coeur contrit, de l'absoudre d'une condamnation méritée, et de lever la sentence de condamnation sur un condamné? N'oublions pas cependant qu'il est du devoir d'un pasteur d'arrêter: la contagion du mal, et de soustraire les brebis saines au contact d'une brebis galeuse; ce qui ne veut pas dire cependant qu'il soit impossible à Dieu de ménager dans cette séparation même un remède efficace pour la brebis malade. Nous ignorerons toujours que tel homme appartienne au nombre des prédestinés, et que tel autre ne lui appartienne pas; et par conséquent la charité nous fait un devoir et un besoin de Vouloir efficacement le salut de tous.

En vertu de ce principe, nous devons accueillir tous ceux qui se présentent, et nous efforcer de leur procurer la justification par la foi et la paix avec Dieu (1), cette paix que l'Apôtre prêchait en ces termes: «Nous remplissons donc la charge d'ambassadeurs de Jésus-Christ, et c'est Dieu qui vous exhorte par notre bouche. Ainsi, nous vous conjurons, au nom de Jésus-Christ, de vous réconcilier avec Dieu (2)». Or, se réconcilier avec Dieu, n'est-ce pas rentrer en paix avec lui? C'est en parlant de cette paix que le Sauveur disait à ses disciples: «Dans quelque maison que vous puissiez entrer, dites d'abord: Que la paix soit dans cette demeure; et s'il y a là un enfant de la paix, votre paix se reposera sur lui; autrement elle vous reviendra (3)». Lorsque cette paix nous est annoncée par ces hommes dont il est dit: «Qu'ils sont beaux les pieds de ceux qui annoncent la paix, qui annoncent les biens (4)!» chacun de nous devient l'enfant de la paix, pourvu qu'il obéisse à l'Evangile, qu'il embrasse la foi, qu'il reçoive la justification par la foi, et qu'il rentre en paix avec Dieu. Selon l'ordre de la prédestination divine, cet homme était déjà l'enfant de la paix.

Remarquons, en effet, qu'il n'est pas dit: Celui sur qui se reposera votre paix deviendra l'enfant de la paix; mais: «S'il y a là un enfant de la paix, votre paix se reposera sur cette demeure». Avant donc que la paix lui fût annoncée, cet homme était déjà l'enfant de la paix, en vertu de la connaissance et de la prescience qu'avait de lui, non pas l'évangéliste, mais Dieu lui-même. Pour nous, qui ne savons si tel homme est ou n'est pas enfant de la paix, il ne nous appartient de faire aucune exception, ni aucun discernement parmi les personnes, et nous devons vouloir, le salut de tous ceux à qui nous prêchons la paix. Quand, sans le savoir, nous prêchons cette paix à un homme qui n'est pas l'enfant de la paix, ne craignons pas qu'elle soit perdue pour nous, car elle nous revient; c'est-à-dire que pour nous cette prédication porte tous ses fruits, tandis qu'elle reste inutile pour celui à qui elle s'adresse. Et. si cette paix se repose sur lui, elle profite en même temps et à lui et à nous.


47. Puisque nous ne connaissons pas celui qui seront sauvés, Dieu nous ordonne de vouloir le salut de tous ceux à qui nous


1. Rm 5,1 - 2. 2Co 5,20 - 3. Lc 10,5-6 - 4 Is 53,7

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prêchons cette paix, et lui-même opère en nous cette volonté en répandant la charité dans nos coeurs par le Saint-Esprit qui nous a été donné (1). Ces paroles: «Dieu veut que tous les hommes soient sauvés», pourraient donc également s'interpréter en ce sens que Dieu nous fait vouloir ce salut de tous les hommes; c'est ainsi que ces mots: «Il a envoyé l'Esprit de son Fils criant Abba, Père (2)», signifient que cet Esprit nous fait crier: Abba, Père. Parlant de ce même Esprit, l'Apôtre nous dit encore: «Nous avons reçu l'Esprit d'adoption des enfants, dans lequel nous crions: «Abba, Père (3)». C'est nous qui crions; mais parce que c'est l'Esprit qui nous fait crier, nous disons qu'il crie lui-même. Si donc la sainte Ecriture a pu dire de l'Esprit-Saint qu'il crie lui-même, parce qu'il nous fait crier, ne peut-on pas dire également de Dieu qu'il veut, parce qu'il nous fait vouloir? Et parce que, dans toute correction, nous ne devons avoir d'autre but que d'empêcher les coupables de s'éloigner de Dieu ou de les ramener à Dieu, n'est-ce point pour nous une obligation réelle de repousser de nos oeuvres toute pensée de désespoir? Si celui que nous corrigeons est l'enfant de la paix, notre paix se reposera sur lui, autrement elle nous reviendra.


48. On dira, sans doute, que, malgré le dépérissement de la foi dans un certain nombre de chrétiens, les décrets de Dieu restent inébranlables, car Dieu connaît ceux qui sont à lui. Toutefois, rien de tout cela ne nous autorise à nous montrer paresseux et négligents dans la répression de ceux qui doivent être corrigés. Car ce n'est pas en vain qu'il a été dit: «Les mauvais discours corrompent les bonnes moeurs (4)»; et encore: «Vous perdrez, avec votre science, votre frère encore faible pour qui Jésus-Christ est mort (5)». Pour échapper à ces, préceptes et à cette terreur salutaire, gardons-nous de dire: Si les discours mauvais corrompent les bonnes moeurs, et si notre frère périt, que nous importe? Les décrets de Dieu restent inébranlables, et il n'y a pour périr que l'enfant de perdition.


1. Rm 5,5 - 2. Ga 4,6 - 3. Rm 8,15 - 4. 1Co 15,33 - 1Co 8,11




Augustin, de la correction et de la grâce. - CHAPITRE XII. QUE CELUI QUI SE GLORIFIE SE GLORIFIE DANS LE SEIGNEUR.