Augustin, Catéchisme 1013

CHAPITRE IX.

1013
COMMENT INSTRUIRE LES GRAMMAIRIENS ET LES ORATEURS. - DIEU N'ENTEND QUE LE LANGAGE DU COEUR.


13. Il sort aussi des écoles si fréquentées du grammairien et du rhéteur des catéchumènes, qui tiennent comme le milieu entre les ignorants et les philosophes livrés aux spéculations les plus hautes de l'esprit humain. Quand ces hommes, qui semblent avoir sur les autres la supériorité de l'éloquence, se présentent pour recevoir le titre de chrétien, nous leur devons un avis moins nécessaire aux gens sans éducation, celui de revêtir l'humilité chrétienne et d'apprendre à ne plus regarder avec mépris ceux qui aiment mieux éviter les fautes dans la conduite que dans le langage, et d'en venir à ne plus comparer à la pureté du coeur la soup1esse d'une langue déliée, qui leur semblait un don bien supérieur. Il faut surtout leur apprendre à goûter l'Écriture, de peur que ce langage solide, sans emphase, ne les rebute; ils pourraient d'ailleurs s'imaginer que les actions ou les paroles prêtées aux hommes dans ces livres sacrés, ne cachent pas, sous une enveloppe sensible et sous un voile épais, un sens profond qu'il faut dégager; ils pourraient croire qu'il suffit d'entendre le son des flots pour comprendre. Il faut aussi leur faire sentir que le sens caché, d'où vient le mot mystère, et l'obscurité même des symboles, doublent l'attrait de la vérité et dissipent le dégoût qu'inspirent les choses faciles, en leur montrant par quelques exemples, qu'une vérité évidente qui laisse froid, charme quand on la dégage d'une allégorie où elle était renfermée. Le premier besoin de ces esprits est de savoir que la pensée l'emporte autant sur la parole, que l'esprit sur le corps; par conséquent qu'ils doivent préférer dans les discours la vérité à l'éclat, comme ils doivent préférer dans un ami le bon sens à la grâce des traits. Qu'ils sachent aussi que le langage du coeur est le seul qui frappe l'oreille de Dieu, dès lors ils pourront s'apercevoir, sans trouver matière à raillerie, que parfois les évêques et les ministres de l'Église adressent à Dieu des prières entremêlées de barbarisme, de solécisme, et même qu'ils ne comprennent pas ou comprennent vaguement les termes dont ils se servent. Il convient sans doute de faire disparaître ces fautes, ne fût-ce que pour permettre au peuple de répondre Amen avec intelligence; toutefois les esprits cultivés doivent avoir ici de l'indulgence, car les désirs sont dans 1'Eglise ce qu'est l'éloquence au barreau; et, quelque bon que puisse être le langage du barreau, il ne se confondra jamais avec les bénédictions de l'Eglise. Quant au sacrement qu'ils sollicitent, quelques mots suffisent pour leur en montrer la signification, s'ils sont éclairés; mais, s'ils ont l'esprit un peu lourd, il faut recourir à l'amplification, aux comparaisons, de peur qu'ils ne méprisent un mystère dont ils ne verraient que la forme.


CHAPITRE X.

1014
DE L'ENNUI ET DE SES CAUSES: PREMIER MOYEN D'Y REMÉDIER.


14. Tu attends peut-être ici un discours qui puisse te servir de modèle et où j'applique les règles que je viens de te retracer. Avant de te satisfaire, dans la mesure des forces que Dieu me donnera, je dois t'enseigner, selon ma promesse, l'art difficile de charmer. Je m'étais engagé à formuler les règles nécessaires pour instruire le catéchumène qui vient solliciter (68) le titre de chrétien; j'ai rempli, je crois, mon engagement. Tu ne dois pas exiger de moi comme une dette, que je joigne dans ce traité l'exemple à la théorie; si je le fais, ce sera un surcroît; mais, puis-je donner le surcroît avant d'avoir payé ma dette intégralement? Tu t'es plaint à moi d'un défaut d'élévation et de chaleur qui, à t'entendre, gâtait toutes tes instructions aux catéchumènes. Je suis convaincu que ce défaut ne tient ni au manque d'idées sur des sujets dont tu possèdes à fond toutes les ressources, ni à la disette d'expressions; il vient d'un secret ennui, provoqué par différentes causes.
D'abord nous trouvons plus de charme et de beauté dans les muettes conceptions de notre esprit, et, comme je l'ai déjà remarqué, nous avons de la répugnance à faire passer notre idéal dans des sons qui ne le peignent qu'imparfaitement; puis, lors même que nos expressions ne nous déplairaient pas, nous aimons mieux écouter ou lire des discours qui sont plus beaux que les nôtres et ne nous coûtent ni effort ni inquiétude, que d'improviser en appropriant notre langage au goût d'autrui, sans savoir si nous réussirons à voir les paroles couler à souhait ou produire sur les esprits une heureuse impression; d'ailleurs, comme les notions qu'il faut inculquer aux esprits novices nous sont très-familières et ne peuvent guère contribuer à notre avancement, nous nous voyons avec peine obligés d'y revenir sans cesse: notre esprit, fier de ses petites forces, ne trouve plus de charme à s'arrêter sur des vérités élémentaires et qui semblent réservées à l'enfance. L'orateur est encore refroidi par l'air glacé d'un auditeur qui reste immobile, soit parce qu'il ne ressent aucune émotion, soit parce qu'il ne laisse pas voir dans son attitude que l'orateur l'éclaire ou le touche. Sans être passionnés pour la gloire humaine, nous songeons que la parole, dont nous sommes les ministres, est celle de Dieu; plus nous aimons notre auditeur, plus nous désirons le voir captivé par les vérités que nous lui présentons pour le sauver; notre insuccès nous afflige, et, dans le cours même de notre entretien, nous sentons notre ardeur s'affaiblir et s'éteindre, comme si elle s'épuisait en efforts superflus. Il arrive encore qu'on nous arrache à un devoir plus attrayant ou même plus impérieux que nous aurions aimé à accomplir: la recommandation d'une personne à qui nous ne voulons pas déplaire, une prière aussi pressante qu'impossible à décliner nous oblige à instruire un catéchumène; nous entreprenons avec dépit une tâche qui exige le plus grand sang-froid, en déplorant la nécessité où nous sommes d'interrompre la suite de nos occupations et de ne pouvoir suffire à tout;ce malaise se communique à notre discours, qui, sortant d'un fond aride de tristesse, ne peut jaillir avec abondance. Enfin, c'est quelquefois au moment même qu'un scandale nous afflige et nous consterne, que l'on vient nous dire: Voici une personne qui veut embrasser le christianisme, viens l'entretenir. Quand on nous parle ainsi, on ne connaît pas le chagrin intérieur qui nous dévore, et, si nous sommes réduits à ne pas découvrir notre peine, nous entreprenons à contre-coeur de satisfaire au désir exprimé; en passant par les replis d'un coeur sur lequel la tristesse répand ses feux et ses vapeurs, la parole perd son éclat et sa grâce. Voilà les causes de découragement qui troublent la sérénité de notre esprit: avec l'aide de Dieu, nous devons chercher les moyens de les combattre, afin de voir notre coeur s'épanouir, notre âme s'échauffer, et de mettre notre bonheur à remplir en paix un devoir sacré: «Car Dieu aime celui qui donne avec joie (1)».

1015 15. Sommes-nous abattus, en songeant que l'auditeur est incapable de s'élever jusqu'à nos conceptions, et que nous sommes réduits à quitter les crimes de la pensée, pour nous appesantir sur les lentes expressions qui n'en sont qu'un lointain reflet; à tirer de nos lèvres, sous la forme de périodes longues et compliquées, une idée que l'intelligence saisit et dévore par une intuition rapide? En voyant dans le langage une image si infidèle de la pensée, aimerions-nous mieux nous taire que de parler?Réfléchissons alors à l'exemple que nous a laissé Celui dont nous devons suivre les traces (2): car, quel que soit l'intervalle qui sépare le langage de l'intuition, il y a une différence plus profonde encore entre la chair périssable et celui qui est égal à Dieu. Or, «quoique étant dans la forme substantielle de Dieu, il s'est anéanti lui-même, en prenant la figure d'un esclave…; il s'est rendu obéissant jusqu'à la mort de la croix (3)». Pourquoi donc «s'est-il rendu faible avec les faibles, sinon pour gagner les faibles(4)?»

1.
2Co 9,7.- 2. 1P 2,21.- 3. Ph 2,6 Ph 2,8. - 4. 1Co 9,22.

69

Ecoute son imitateur s'écrier ailleurs: «Soit que nous paraissions passer les bornes en nous louant, c'est pour Dieu; soit que nous parlions de nous avec modération, c'est pour vous. Car l'amour de Jésus-Christ nous presse, considérant qu'un seul est mort pour tous (1)». Et comment aurait-il été prêt à se sacrifier pour les âmes, s'il avait eu de la répugnance à se pencher vers leur oreille? Il s'est donc rendu petit parmi nous, comme une nourrice pleine de tendresse pour ses enfants (2). Trouverait-on du plaisir à tronquer, à mutiler les mots, si un pareil jargon n'était inspiré par la tendresse?
Cependant on est heureux de rencontrer un petit enfant pour babiller avec lui. Une mère aime mieux triturer des aliments et les faire passer de sa bouche dans celle de son enfant, que de se rassasier elle-même de mets plus substantiels. Ayons donc toujours devant les yeux cette poule de l'Evangile, qui cache ses petits sous ses plumes tremblantes et, d'une voix fatiguée, rappelle sa bégayante couvée: malheur au poussin orgueilleux qui fuit ses tendres ailes! il devient la pâture des oiseaux de proie (3). L'élévation de la pensée pure a sans doute un vif attrait: mais n'y a-t-il pas aussi un grand charme à songer que, plus la charité sait s'abaisser avec complaisance, plus elle a de force pour se répandre dans le coeur où la ramène le témoignage qu'on se rend intérieurement, de n'aspirer qu'au salut éternel des âmes vers qui l'on s'abaisse?

1. 2Co 5,13-14. - 2. 1Th 2,7. - 3. Mt 23,37.


CHAPITRE 11.

1016
DEUXIÈME CAUSE D'ENNUI: MOYEN D'Y REMÉDIER.


16. Aimerions-nous mieux lire ou entendre des discours travaillés avec soin, plus éloquents que les nôtres, et par suite, ne pouvons-nous sans une certaine répugnance courir les hasards de l'improvisation? Si notre langage, conforme au fond à la vérité, offre à l'auditeur quelques mots qui le blessent, nous avons une ressource commode: c'est de lui apprendre à dédaigner un défaut de netteté ou d'élégance dans les termes, quand ils sont assez clairs pour rendre la pensée. Si au contraire la faiblesse humaine nous égare loin de la vérité, quoiqu'on ne soit guère exposé à ce péril sur le sentier battu qu'il faut suivre pour instruire les catéchumènes; ne manquons pas de prévenir l'impression fâcheuse que pourrait en concevoir l'auditeur; n'attribuons notre méprise qu'à la volonté de Dieu, qui nous a mis à l'épreuve pour voir si nous saurions reconnaître notre erreur avec calme, et pour nous empêcher d'être entraînés dans une erreur plus dangereuse, en faisant notre apologie. Si notre méprise n'a point été relevée, si elle a échappé à l'auditeur et à nous-mêmes, il faut y être insensible à condition de l'éviter à l'avenir. Il arrive assez souvent que, quand notre souvenir se reporte sur nos discours, nous y découvrons quelque erreur, sans pouvoir nous dire quelle impression elle a faite sur les esprits; la douleur est encore plus vive pour un coeur embrasé par la charité, quand il sent qu'une pensée fausse a été accueillie avec plaisir. Dans ce cas, cherchons l'occasion favorable de dissiper peu à peu chez les autres l'erreur que nous nous sommes secrètement reprochée à nous-mêmes: c'est notre parole, et non celle de Dieu, qui a égaré leur esprit. Si quelques méchants, aveuglés par une jalousie insensée, «semeurs de discordes, détracteurs, ennemis de Dieu», triomphent de nos méprises, voyons dans leur joie une occasion d'exercer notre patience et notre charité, «parce que la bonté divine veut aussi les conduire à la pénitence»: car qu'y a-t-il de plus affreux, «de plus capable d'amasser sur nous un trésor de colère pour le jour de la colère et de la manifestation du juste jugement de Dieu (1)», que de triompher, à l'exemple pernicieux de Satan, du mal d'autrui? Parfois encore nôs discours, quoique d'une justesse irréprochable, présentent certaines vérités qui, faute d'être comprises, on parce qu'elles combattent des opinions et des préjugés invétérés, ont un caractère de nouveauté qui déconcerte et choque l'auditeur. S'il nous laisse voir son impression et qu'il consente à se laisser guérir, prodiguons pour l'éclairer les témoignages et les raisonnements; s'il cache son déplaisir et son impression, Dieu lui ouvrira peut-être les yeux: mais s'il regimbe, et qu'il méprise nos avis, cherchons notre consolation dans l'exemple du Seigneur qui, voyant les hommes trouver ses paroles choquantes et étranges, s'adressa aux disciples fidèles et leur dit: «Et vous, ne voulez-vous point aussi me quitter (2)?» Nous devons nous attacher à ce principe solide, indestructible,

1.
Rm 1,30 Rm 2,4-5. - 2. Jn 6,68.

70

qu'à la fin des siècles la Jérusalem captive sera affranchie du joug de la Babylone terrestre, et qu'aucun de ses enfants ne périra; et en effet, tous ceux qui périront ne seront pas ses enfants: car «le fondement que Dieu a posé demeure ferme, tant cette parole pour sceau: Dieu connaît ceux qui lui appartiennent, et tous ceux qui invoquent le nom du Seigneur doivent s'éloigner de l'iniquité (1)».
Convaincus de ces vérités, invoquant sans cesse au fond de notre coeur le nom de Jésus-Christ, nous cesserons de calculer avec crainte l'effet que nos discours peuvent produire sur des esprits ondoyants et divers; que dis-je? nous supporterons avec joie les désagréments attachés à ce ministre de charité, si nous le remplissons sans avoir la gloire humaine en vue: car le caractère des oeuvres véritablement bonnes, c'est de sortir de la charité et d'y rentrer comme dans leur principe et leur foyer. Quant aux lectures qui nous ravissent, aux discours éloquents que nous voudrions entendre et dont l'inimitable perfection, par les efforts mêmes que nous faisons pour la reproduire, communique à nos paroles une froide monotonie, nous y trouverons un délassement à nos travaux, et notre joie intérieure en doublera le prix nous prierons Dieu avec une confiance nouvelle de nous faire entendre le langage que nous rêvons, en consentant aveu joie à servir, selon nos forces, d'organe à sa parole; c'est ainsi que «tout sert au bien de ceux qui aiment Dieu (2)».


CHAPITRE XII.

1017
TROISIÈME CAUSE D'ENNUI: DES MOYENS D'Y REMÉDIER.


17. Si notre ennui a pour cause l'obligation de revenir sans cesse sur des vérités communes et à la portée des plus jeunes enfants, prenons pour le catéchumène un coeur de frère, de père, de mère: la sympathie nous fera voir le lieu commun sous un jour nouveau. Telle est en effet la puissance de la sympathie, qu'elle établit entre les disciples et le maître une communauté de sentiments qui confond Leurs coeurs en un seul: le disciple semble s'exprimer par la bouche du maître, et le maître s'initier avec ses disciples aux vérités mêmes qu'il enseigne. N'est-ce pas ce

1.
2Tm 2,19. - 2. Rm 8,28.

qui arrive, quand nous montrons les monuments d'une ville, les sites d'une campagne, à un ami qui ne les avait pas encore visités? La vivacité de son admiration ne rajeunit-elle pas la nôtre pour des beautés à côté desquelles nous passions avec indifférence? Notre plaisir est d'autant plus vif que nous l'aimons davantage: plus la sympathie est profonde, plus ces merveilles surannées reprennent à nos yeux un air de nouveauté. Si donc nous consacrons nos lumières et notre goût à empêcher nos amis de rester insensibles ou froids en face d'un chef-d'oeuvre du génie de l'homme; si nous sommes enchantés de leur expliquer le plan de l'artiste, et d'élever ainsi leur esprit jusqu'à la beauté et à la grandeur des oeuvres du Créateur, fin suprême et féconde de l'amour; notre enthousiasme ne doit-il pas redoubler, quand on vient apprendre à notre école Celui qui est le but de toute notre science? Un nouvel auditoire ne doit-il pas raviver nos sentiments et nous communiquer une inspiration originale qui ranime notre parole? Nous trouverions un nouveau motif d'allégresse, en songeant à quelle erreur de mort l'homme doit s'arracher pour arriver à la vie de la foi; La politesse nous fait traverser avec plaisir les rues les plus fréquentées pour indiquer le chemin à une personne égarée; quel transport de joie ne devons-nous pas éprouver à parcourir dans la science du salut les points mêmes que notre intérêt ne nous oblige pas à revoir, quand nous avons à guider une âme infortunée, lasse des erreurs du monde, dans les sentiers de la paix, et qu'il nous faut répondre a l'ordre de Celui qui nous les a ouverts?


CHAPITRE XIII.

1018
QUATRIÈME CAUSE D'ENNUI: MOYENS D'Y REMÉDIER. DE L'USAGE, ADOPTÉ DANS CERTAINES ÉGLISES, D'ÉCOUTER ASSIS LA PAROLE DIVINE.


18. C'est une rude tâche, je l'avoue, que d'aller jusqu'à la fin de son discours, quand on a sous les yeux un auditeur immobile, impassible. Est-ce scrupule religieux ou respect humain qui l'empêchent de manifester son approbation de la voix ou du geste? Est-ce défaut -d'intelligence ou dédain? Comme nous ne pouvons lire dans son coeur, il faut recourir à tous les moyens pour l'aimer, et percer en quelque sorte la nuit où il s'enveloppe (71). Refoule-t-il ses pensées en 1ui-même par excès de timidité? Il faut le rassurer par des paroles affectueuses, encourager sa modestie en lui montrant une sympathie toute fraternelle, l'interroger pour savoir s'il comprend, et lui donner assez de confiance pour exposer franchement ses objections. Ne manquons pas non plus de lui demander si ces vérités frappent pour la première fois son oreille, si elles ont perdu à ses yeux l'intérêt de la nouveauté. Sa réponse nous guidera: tantôt il faudra mettre plus de simplicité et de précision dans notre langage, tantôt réfuter les opinions contraires; tantôt nous résumerons ce qu'il sait, loin de nous livrer à d'inutiles développements, et nous choisirons des paraboles, des événements symboliques, dont l'interprétation communiquera à notre entretien une grâce attrayante. S'il manque d'imagination, s'il est incapable de comprendre et de goûter ces beautés exquises, il ne reste plus qu'à le souffrir avec patience; après avoir récapitulé brièvement nos dogmes, il faut insister sur les points essentiels, l'unité catholique, les tentations, la nécessité de se conduire en vue du jugement à venir, en le faisant trembler. Enfin, consacrons plus de temps à parler à Dieu pour lui qu'à lui parler de Dieu.

1019 19. Il n'est pas rare de voir un auditeur, qui semblait charmé au début, se lasser d'être attentif ou de se tenir debout; il n'approuve plus, que dis-je? il se met à bailler et témoigne involontairement l'envie qu'il a de se retirer. Dès qu'on s'aperçoit de sa fatigue, on doit le récréer, soit en lui tenant quelques propos d'un enjouement de bon ton, sans sortir du sujet, soit en lui faisant un récit qui frappe son imagination ou touche sa sensibilité. Qu'on lui parle surtout de lui-même, afin que l'intérêt personnel le tienne en éveil, sans toutefois le blesser par quelque allusion offensante, ni quitter l'accent de tendresse qui peut seul gagner son coeur. On pourrait encore soulager son attention en lui offrant un siége, ou plutôt, il vaudrait mieux qu'il fût assis dès le commencement, autant que la circonstance le permet. Je trouve fort sensé l'usage adopté dans certaines églises d'outre-mer, où l'on voit assis l'évêque qui parle et le peuple qui l'écoute: de la sorte, les personnes trop délicates ne sont pas condamnées à relâcher leur attention et à en perdre les fruits, même à se retirer. C'est déjà un inconvénient qu'un chrétien, quoique incorporé à l'Eglise, soit contraint de quitter une assemblée nombreuse pour reprendre ses forces; mais n'est-il pas cent fois plus fâcheux qu'un catéchumène, qui doit être initié aux mystères, soit réduit à la nécessité impérieuse de se retirer, pour ne pas tomber de faiblesse? La timidité l'empêche d'expliquer la raison qui l'oblige à partir; ses forces épuisées ne lui permettent plus de rester debout. Je parle par expérience: j'ai vu un homme de la campagne me quitter au milieu de l'entretien, et sa conduite m'a révélé le péché que je signale. Eh! n'y a-t-il pas un orgueil révoltant à ne pas laisser s'asseoir en notre présence des hommes qui sont nos frères, que dis-je? dont nous - cherchons à nous faire des frères, et qui, à ce titre, doivent attendre de nous une sollicitude plus empressée? Ne voyons-nous pas qu'une femme était assise en écoutant le Seigneur dont les anges environnent le trône (1)? Si l'entretien doit être court ou que le lieu ne permette guère dé s'asseoir, je le veux bien, on écoutera debout: c'est qu'alors l'auditoire sera nombreux et qu'il ne s'agira pas d'instruire un catéchumène. Mais il y a péril, je le répète, à laisser debout une ou deux personnes qui viennent nous trouver pour s'initier à la foi chrétienne.
Toutefois, si nous n'avons pas pris cette précaution au début, et que nous apercevions des signes d'ennui chez l'auditeur, il faut lui offrir aussitôt un siége, en le pressant de s'asseoir, et lui adresser quelques paroles pour le récréer, ou même dissiper le malaise qui avait troublé son attention. Dans l'incertitude où nous sommes des motifs qui l'empêchent d'écouter, tenons-lui, dès qu'il est assis, quelques propos enjoués ou pathétiques; pour l'arracher aux distractions que lui causent les souvenirs du monde. De la sorte, si nous tombons juste sur les pensées qui le préoccupent, elles disparaîtront pour ainsi dire devant une accusation directe: si nous nous sommes trompés, quelques mots sur ces préoccupations que nous sommes obligés de supposer en lui, par cela seul qu'ils sont inattendus et interrompent la suite de l'entretien, piquent sa curiosité et renouvellent son attention. Du reste, soyons brefs, puisque nous faisons une digression, de peur que le remède ne soit pire que le mal et n'augmente la lassitude que nous avons dessein de combattre. Ayons soin dès lors d'abréger; faisons entrevoir et pressons la fin de notre entretien.


1.
Lc 10,39.

72



CHAPITRE XIV.

CINQUIÈME ET SIXIÈME CAUSES D'ENNUI: DES MOYENS D'Y REMÉDIER.


1020 20. Est-ce le regret de ne pouvoir accomplir un devoir auquel tu t'appliquais, parce que tu le regardais comme plus impérieux, qui cause ton découragement, et sens-tu qu'un dépit secret répand sur tes instructions une teinte de tristesse? Nous savons sans doute que dans tous nos rapports avec le prochain nous devons être inspirés par la bonté et par la charité la plus pure; mais songe que ce principe admis, nous sommes incapables de déterminer les actions qu'il est plus utile d'accomplir, ou plus à propos de suspendre, de sacrifier même. Impuissants à découvrir les mérites que nos obligés ont aux yeux de Dieu, nous ne comprenons pas, nous conjecturons d'après les indices les plus obscurs et les plus vagues, quels sont les services que nous devons leur rendre selon les circonstances. Par conséquent, réglons la suite de nos actions selon la portée de notre esprit. Si nous pouvons accomplir nos devoirs dans l'ordre même que nous nous sommes tracé, applaudissons-nous de voir que nos projets ont été conformes aux desseins de Dieu; survient-il une conjoncture qui dérange notre plan de conduite? plions-nous à la circonstance au lieu de nous décourager, et puisque Dieu a préféré un autre ordre, hâtons-nous de l'adopter. Dieu ne doit pas suivre notre volonté, nous devons nous soumettre à la sienne. L'ordre que nous prétendons suivre à notre gré ne peut être excellent qu'à la condition d'être subordonné à un ordre supérieur. Pourquoi donc nous plaindre, faibles mortels que nous sommes, d'être devancés par la sagesse de ce grand Dieu, Notre-Seigneur tout-puissant, et vouloir tomber dans le désordre par le désir même de nous attacher à l'ordre qu'il nous a plu d'adopter?
Le véritable plan de conduite, c'est d'être résolu à ne jamais lutter contre la puissance de Dieu, et de ne point se passionner pour accomplir un dessein conçu dans une tête humaine: «Le coeur de l'homme conçoit bien des projets, les conseils de Dieu seuls sont immuables et éternels (1)».

1021 21. Notre esprit troublé par quelque scandale ne peut-il trouver des paroles pleines de calme et d'agrément? Concevons pour les âmes que Jésus-Christ a voulu sauver par sa mort et délivrer au prix de tout son sang des fatales erreurs du monde, une charité si vive que, si l'on vient nous avertir de l'arrivée d'un catéchumène, à l'instant où nous sommes tout affligés, cette bonne nouvelle serve à soulager notre douleur et à la dissiper; c'est ainsi que les plaisirs du gain balancent le chagrin que causent les pertes. Un scandale nous afflige à la vue ou à la pensée qu'une âme se perd ou entraîne dans sa perte les âmes faibles; l'arrivée d'un catéchumène dont nous attendons quelque succès, doit affaiblir les regrets que nous causent les âmes infidèles. Si la crainte de voir notre prosélyte devenir fils de l'enfer (2) naît en nous à la pensée des nombreux catéchumènes qui ont fini pardonner les scandales dont nous gémissons, cette triste réflexion doit nous animer au lieu de nous abattre: elle doit nous engager à avertir notre auditeur de ne point imiter ceux qui n'ont de chrétien que le nom, de ne jamais se laisser entraîner, par leur nombre, à les suivre ou à quitter Jésus-Christ pour leur plaire; enfin, de renoncer à entrer avec eux dans l'Eglise de Dieu, s'il n'est pas résolu à ne jamais les prendre pour modèles. Dans ces sortes d'exhortations, la parole qu'anime une douleur encore cuisante, acquiert, je ne sais comment, une vivacité nouvelle: loin d'être froids, nous développons avec verve et enthousiasme un sujet que nous aurions traité d'un ton monotone et languissant, si nous avions été plus calmes; et c'est un bonheur pour nous d'avoir pu trouver l'occasion de faire servir à l'édification des âmes nos sentiments personnels.
Avons-nous commis une erreur, une faute même qui nous accable de douleur? Songeons «qu'un coeur contrit est un sacrifice agréable à Dieu (3)»; songeons surtout que «si l'eau éteint le feu, l'aumône éteint le péché (4)». et que «Dieu aime mieux la miséricorde que le sacrifice (5)». Qu'un incendie nous menace, nous savons courir, aller chercher de l'eau pour l'éteindre, ou remercier les voisins qui nous en apportent. De même, quand le péché

1.
Pr 19,21. - 2. Mt 23,15. - 3. Ps 50,19.- 4. Si 3,33.- 5. Os 6,6.

73

allume dans notre coeur desséché un feu qui nous épouvante, applaudissons-nous de trouver dans une oeuvre charitable, que l'occasion se présente d'accomplir, une source assez abondante pour éteindre l'incendie qui nous consume. Nous ne pousserons pas, j'imagine, la folie jusqu'à croire que le pain avec lequel nous apaisons la faim d'un pauvre, aurait plus de vertu pour relever notre courage que la parole même de Dieu, distribuée à un esprit affamé de l'entendre. A supposer même qu'il n'y eût pas d'inconvénient à se dispenser d'un devoir, d'ailleurs utile à remplir, nous aurions toujours le tort de dédaigner le moyen qui nous est offert d'échapper au péril où notre salut et non celui d'autrui, est malheureusement engagé. Ne connaissons-nous pas cet arrêt terrible du Seigneur: «Serviteur méchant et paresseux, tu aurais dû mettre mon argent entre les mains des banquiers (1)?» Quel serait donc notre aveuglement, si la douleur de nos fautes nous entraînait dans une nouvelle faute, celle de refuser le trésor du Seigneur à qui le demande avec instance?
Voilà par quelles réflexions on peut dissiper l'ennui avec tous ses nuages et se porter tout entier à remplir les fonctions de catéchiste, Voilà comment on réussit à faire doucement entrer dans les coeurs un enseignement qui découle avec autant de facilité que de grâce des sources fécondes de la charité. Ce n'est pas moi qui te tiens ce langage; c'est -plutôt l'amour qui nous l'adresse à tous, «cet amour répandu jusqu'au fond de nos coeurs par d'Esprit-Saint qui nous a été donné (2)».

1. Mt 25,26. - 2. Rm 5,5.


CHAPITRE XV.

1023
NÉCESSITÉ D'APPROPRIER SON LANGAGE AUX CIRCONSTANCES ET AUX PERSONNES.


23. Je t'ai fait une promesse et tu en réclames peut-être l'accomplissement, comme si c'était une dette: il me faut prendre le rôle de catéchiste et composer un entretien qui puisse te servir de modèle. Soit; mais figure-toi bien qu'un écrivain qui compose dans son cabinet pour être lu, se place à un tout autre point de vue que l'orateur qui parle devant un auditoire attentif; et pour l'orateur, que de points de vue divers! Tantôt il donne des instructions en particulier, sans témoins qui contrôlent son langage; tantôt il parle sous les yeux d'une assemblée qui représente les goûts les plus divers. Parle-t-il en public? tantôt il n'adresse ses instructions qu'à une seule personne, et l'assemblée ne fait que le juger ou rendre témoignage à la vérité de ses paroles; tantôt l'auditoire attend un discours qui s'adresse à tous indistinctement. Dans ce dernier cas, la méthode doit encore changer selon que le public est pour ainsi dire réuni en famille et n'attend qu'une conférence, ou qu'il est suspendu en silence aux lèvres de l'orateur, parlant du haut d'une tribune. Et même alors, le ton doit varier, si l'auditoire est plus ou moins nombreux, s'il est composé de savants ou d'ignorants, de gens de la ville ou de la campagne, enfin, s'il représente le peuple entier avec ses différentes classes. En effet, si l'orateur n'est pas capable d'éprouver les émotions les plus diverses, son âme ne saurait se peindre dans son discours ni sa parole exprimer des sentiments assez variés pour répondre aux mille impressions que provoque la sympathie dans une foule nombreuse.
Il n'est ici question que d'initier à la foi des esprits novices: toutefois, je puis t'assurer, d'après mon expérience personnelle, que je ressens une émotion toute différente selon que je vois dans le catéchumène un savant, un ignorant, un étranger, un concitoyen,un riche, un pauvre,un particulier,un magistrat; dignité, famille, âge, sexe, système philosophique, font autant d'impressions sur mon coeur, et, sous l'empire du sentiment que j'éprouve, mon discours commence, se continue et s'achève. On doit à tous une égale charité; mais ce n'est pas une raison pour appliquer à tous le même remède. La charité sait enfanter les uns et se rendre faible avec les autres; elle travaille à édifier ceux-ci, elle a peur d'offenser ceux-là; tantôt elle s'abaisse, tantôt elle s'élève, tour à tour indulgente et sévère, jamais ennemie, toujours maternelle. Quand on n'a point éprouvé ces mouvements de la charité, on croit que notre bonheur est attaché au faible talent qui nous vaut les éloges de la multitude et les douces émotions de la gloire. Mais que Dieu, en «présence duquel montent les gémissements des captifs (1)», voie notre humilité et nos peines, et qu'il nous remette tous nos péchés (2). Si ma parole a eu pour toi quelque agrément, si elle t'a inspiré le désir d'apprendre de moi quelques règles pour vivifier tes discours, je te le répète, tu aurais été plus vite initié à ces secrets en me voyant exercer les fonctions de catéchiste qu'en me lisant.

1.
Ps 79,11. - 2. Ps 24,18.

74



CHAPITRE XVI.

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DISCOURS QUE L'ON PEUT TENIR A UN CATÉCHUMÈNE. EXORDE TIRÉ DE LA RÉSOLUTION QU'A PRISE L'AUDITEUR D'EMBRASSER LA FOI CHRÉTIENNE POUR TROUVER ENFIN LA PAIX: LES HONNEURS, LES RICHESSES, LES PLAISIRS, LES SPECTACLES, NE FONT QUE TROUBLER LE COEUR.


24. Je suppose donc qu'un homme d'un esprit ordinaire, habitant la ville, tel que tu dois en rencontrer beaucoup à Carthage, vienne te trouver dans l'intention de se faire chrétien. Tu lui demandes s'il a pris cette résolution pour jouir de quelque avantage temporel, ou pour goûter la paix qui nous est promise dans l'autre vie; il répond qu'il n'aspire qu'à la paix éternelle; tu peux alors lui tenir à peu près ce discours: Grâces soient rendues à Dieu, mon frère je te félicite d'avoir eu le bonheur de songer à t'assurer un port au milieu des orages si terribles et si dangereux du monde. On se dévoue ici-bas aux plus rudes fatigues pour trouver le repos et la sécurité, mais les passions ne permettent pas d'y atteindre. On veut en effet goûter le repos au sein des choses agitées et passagères, et comme le temps les emporte avec lui, la crainte et les regrets troublent le coeur et ne lui laissent aucun moment de calme. L'homme veut-il se reposer au scindes richesses? elles lui donnent plus d'orgueil que de tranquillité. Que de gens, comme nous l'apprend l'expérience; perdent tout à coup leur fortune ou trouvent la mort, soit en courant après les richesses, soit en voulant défendre leurs trésors contre lui rival plus avare! Lors même que la richesse serait fidèle à l'homme toute sa vie et ne quitterait pas son avide possesseur, il faudrait bien qu'il la quitte en mourant. Et quelle est donc la durée de la vie,même quand on atteint la vieillesse? Désirer la vieillesse, n'est-ce pas désirer une longue maladie? Quant aux honneurs du monde, qu'impliquent-ils sinon l'orgueil, la vanité, la ruine du salut? C'est en ce sens que la sainte Ecriture nous dit: «Toute chair est semblable à l'herbe des champs, et la gloire de l'homme est semblable à la fleur d'une herbe: l'herbe se dessèche, la fleur tombe, «la parole de Dieu seule demeure éternellement (1)». Ainsi, quiconque aspire au bonheur et à la paix inaltérable, doit se détacher des biens passagers et périssables du monde pour ne mettre espoir que dans la parole de Dieu: en s'attachant à l'Etre qui demeure éternellement, il participera à son immutabilité.

1.
Is 40,6-8.

1025 25. D'autres ne songent ni à s'enrichir, ni à briguer le vain éclat des honneurs; ils mettent leur félicité et leur repos à hanter les tavernes ou les maisons de débauche, à fréquenter les théâtres et à jouir de ces représentations frivoles qu'on leur donné gratuitement dans les grandes villes. La passion du luxe triomphe vite de leur pauvreté; et, de la misère ils tombent dans le vol, la rapine ou même le brigandage. Ils se trouvent tout à coup en proie à des craintes mortelles: naguère encore ils chantaient dans la taverne, maintenant ils ne rêvent plus que torture et prison. Quant à la passion des spectacles, elle les change en démons: ils encouragent à grands cris les gladiateurs à se tuer réciproquement; si le sang ne coule pas, ils font naître dans leur coeur des sentiments de rivalité et un ardent désir de plaire à un peuple en délire. S'aperçoivent-ils que les combattants sont de connivence, ils- s'indignent, ils s'écrient qu'on doit les frapper de verges, comme s'ils étaient coupables de collusion; ils condamnent le magistrat, né pour venger la justice, à ordonner cette injustice révoltante. Savent-ils au contraire qu'une haine irréconciliable divise les comédiens et les danseurs, les cochers et les dompteurs d'animaux, et tous les malheureux qu'ils engagent dans des luttes à outrance contre leurs semblables ou les bêtes sauvages? plus ils voient les concurrents animés de sentiments hostiles, plus ils leur témoignent de faveur et d'enthousiasme; ils applaudissent à la fureur de la lutte et provoquent les applaudissements; ils se communiquent leur délire, plus insensés encore que les victimes insensées dont ils stimulent l'aveugle courage: la folie fait tout le charme du spectacle. La paix d'un esprit sain pourrait-elle donc remplir un coeur qui se repaît de querelles et de discorde? La santé n'est-elle pas toujours en rapport avec les aliments?
Enfin, quelque soit le charme attaché à ces joies, si on peut appeler ainsi des joies insensées, que faut-il pour nous rendre insensibles à l'orgueil des richesses, à l'éclat éblouissant des hommes, aux plaisirs ruineux des tavernes, aux luttes sanglantes du théâtre, à la débauche, à l'obscénité des bains publics? Une fièvre légère nous dérobe ces joies, telles qu'elles, et suffit pour saper, même avant la mort, notre prétendue félicité: il ne nous reste qu'un coeur vide et gangrené, qu'attend la justice du Dieu dont il a dédaigné la protection, la sévérité du Maître en qui il n'a pas voulu chercher ni aimer un Père tendre.
Pour toi, mon frère, qui cherches le repos promis aux chrétiens après la mort, tu commenceras à en goûter la douceur dès ici-bas, au sein même des soucis les plus amers de la vie, si tu t'attaches avec amour aux préceptes de Celui qui l'a promis. Tu ne tarderas pas à sentir que les fruits de la justice sont plus doux que ceux de l'iniquité et qu'une conscience pure au milieu des chagrins inspire une joie plus réelle: et plus vive qu'une conscience bourrelée au milieu des voluptés: ce ne sont point en effet les avantages temporels qui t'engagent à entrer dans l'Église de Dieu».



Augustin, Catéchisme 1013