Bernard Opuscules 219

QUATRIÈME PARABOLE.

Le Christ et l'Église.

220 1. « Le royaume des cieux est semblable à un roi qui fit des noces à son fils (Mt 22,2). » Et comme le jour des noces approchait, le père consulta son fils et lui demanda qui il voulait épouser. Il lui répondit qu'il s'était choisi dès le commencement des siècles, et prédestiné l'Église pour épouse. Le père lui répondit : Mais elle est captive en Egypte, où elle est employée aux divers travaux de mortier et de briques (Ex 1,14), et vendue au péché. Le coeur de Pharaon s'est endurci et sa main appesantie sur elle, et il ne la laissera partir que si une main plus forte que la sienne la lui ravit (Ex 3). Eh bien, reprend le fils, moi qui suis votre main et le bras de votre force, j'entrerai en Égypte avec une main forte et le bras étendu, et je la délivrerai. Et, pour fermer la bouche à ceux qui disent des choses injustes, je la rachèterai des calomnies des hommes. Je mettrai dans ma balance d'un côté le poids qu'elle a été vendue sous le péché, je veux dire le poids de la volonté du péché, et de l'autre le prix de mon sang; celle-là sera trouvée trop légère et mon jugement l'emportera. Mais le père repartit : Oui, j'en conviens, il l’emportera, mais la loi du mariage veut qu'on s'assure du consentement de l'épouse. On s'en assurera, répond le fils. J'ai David, un serviteur selon mon coeur, je l'enverrai avec sa guitare pour parler à son. coeur, pour l'appeler, pour charmer son esprit habitué aux travaux de terre de l'Égypte et devenu boue avec cette boue. David part, en effet, il arrive en Égypte, et comme il avait préparé un doux chant d'épithalame, il fit entendre de son coeur cette bonne parole : « Écoutez, ma fille, ouvrez les yeux, ayez l'oreille attentive et oubliez votre peupla ainsi que la maison de votre père; alors le roi concevra de l'amour pour votre beauté, parce qu'il est le Seigneur votre Dieu (Ps 44,12 et 13).» Isaïe reçut ordre d'aller aussi la trouver; il le suivit, et, en la voyant dans les liens de la captivité il lui dit : « Levez-vous, levez-vous, armez-vous de la force du bras du Seigneur (Is 51,9) ; lever-vous, levez-vous et relevez-vous, Jérusalem, rompez les chaînes de votre cou, a fille captive, ô Sion (Is 52,2). »

221 2. Et comme beaucoup d'autres patriarches et prophètes, entrant aussi à leur tour, disaient tous la même chose, elle finit par comprendre la

a. — Dans les anciennes éditions cette parabole et la suivante sont placées au nombre des ouvrages apocryphes de saint Bernard.

grâce de Dieu, et, sortant de la poussière elle s'écrie: « Vous vous êtes souvenu de moi, Seigneur, mon Dieu. Vous avez pitié de ceux dont vous avez pitié, et vous faites miséricorde à celui dont vous avez eu pitié. » Et, poursuivant, elle répète les paroles de la sage Abigaïl. « Qui me donnera, dit-elle, d'être au nombre des servantes de mon Seigneur et de laver les pieds mêmes de ses serviteurs (
1R 25,41). » Et, se levant aussitôt comme avait fait Abigaïl, elle monte sur une ânesse, c'est-à-dire, elle se soumet sa chair et suit les serviteurs du roi. Son époux accourt à sa rencontre, plein de joie et de bonheur, et lui prenant la main droite, il la conduit au gré de sa volonté, il la reçoit avec honneur, il la fait entrer dans la capitale de son royaume et l'introduit dans la chambre même de sa mère. Et là, la plaçant sur le petit lit de son amour, il la pare des ornements de sa grâce, puis, lui passant la main gauche sous la tête, il l'embrasse de sa droite et s'écrie: « Je vous adjure, ô fille de Jérusalem, de ne point l'éveiller, de ne point tirer ma bien-aimée de son sommeil avant qu'elle le veuille (Ct 2,7).» Il met soixante vaillants, guerriers d'Israël auprès de ;sa couche, pour la garder. Chacun d'eux avait l'épée au côté, à cause des frayeurs de la nuit. Quant à l'époux, la baisant d'un baiser de sa bouche et lui disant adieu, il s'en va dans un pays lointain recevoir une couronne, avec la pensée de revenir ensuite. Cependant il donne à chacun les ordres en ces termes par le prophète Osée : « Vous m'attendrez bien longtemps, et vous n'aurez ni prêtre, ni sacrifice (Os 3,3). »

222 3. Mais le Pharaon d'Égypte, profitant de son absence, rassemble son armée. Venez, dit-il, je vais la poursuivre, m'emparer d'elle, et nous aurons des dépouilles à partager, mon âme sera satisfaite : je vais tirer l'épée et ma main les massacrera : et se levant dans ces sentiments de malice et de méchanceté, il déclare la guerre à l'Église. Il fond sur son camp, il s'empare de Pierre et d'André son frère qu'il met en croix, il, tranche la tête à Paul, il exile Jean, écorche Barthélemy, lapide Étienne, brûle Laurent et Vincent, et remplit tout de la mort des saints et de tous les genres de morts et de tourments. « On expose les corps morts des serviteurs de Dieu pour servir de nourriture aux oiseaux du ciel, et les chairs de ses saints pour être la proie des bêtes de la terre. On répand leur sang innocent comme l'eau autour de Jérusalem et personne ne leur donnait la sépulture (Ps 78,2-3). » L'Église, en voyant ses défenseurs traités comme des brebis destinées à être mangées, gémit et son âme est plongée dans la plus amère des amertumes. Mais la terre de l'Église, engraissée par le sang des martyrs, reproduit des moissons de fidèles par une sorte de multiplication de la semence qu'elle a reçue; pour un qu'on moissonnait, elle donne cent ou mille autres, et elle vainc par les moyens mêmes par lesquels on espérait la vaincre.

223 4. En apercevant cela, la barbarie du cruel ennemi de l'Église en frémit de rage, et, recourant aux armes bien connues de la ruse, il suspend pour un temps la persécution, il rappelle ses forces, met le glaive au fourreau et change de dessein. Il n'y a rien de pire, dit-il, qu'un ennemi domestique, je vais répandre sur ses chefs, un esprit de contention, je les ferai errer hors des sentiers battus, dans des lieux où il n'y a point de route tracée (Ps 106,40), et quand ils diront : La paix, la paix, il n'y aura point de paix (Jr 6,14). Je soulèverai parmi eux des hérésies et des schismes ; et je brouillerai tout par une sorte de guerre civile : ils se massacreront les uns les autres de leur propre glaive beaucoup mieux que je ne saurais les tuer du mien. Il dit, et aussitôt l'armée de l'Église, qui avait été jusqu'alors terrible à voir en rang de bataille, cessa d'être aussi terrible, parce que le désordre se mit dans son sein. En effet, se déchirant de blessures mutuelles, et se tuant les uns les autres comme de véritables ennemis, sous les yeux de leurs ennemis véritables qui se tenaient à l'écart, et qui riaient de ces excès, tous ces soldats de l'Église se virent en butte aux moqueries et aux insultes de leurs ennemis , en même temps qu'ils faisaient couler les larmes de l'Église et lui causaient une intolérable douleur. En effet, l'amère amertume dont elle s'était vu abreuver auparavant était devenue plus amère encore, à la vue de ses enfants qui lui déchiraient eux-mêmes les entrailles avec une méchanceté de vipères. Mais alors les plus vaillants soldats de la cour chrétienne, s'apercevant que la ruse infernale de l'ennemi avait un plein succès, rappellent tout leur courage et saisissent les armes de la foi et commencent par couper d'une main virile le mal en eux-mêmes; alors on vit un Alexandre tailler en pièces Arius avec plusieurs des siens; un Augustin passer au fil de l'épée Manès et un grand nombre d'autres hérétiques; un Jérôme frapper à mort l'épicurien Jovinien ; on en vit enfin beaucoup d'autres s'élancer sur la peste des hérésies et des schismes, les terrasser vaillamment ou les expulser prudemment du camp, et rendre ainsi la paix et le bonheur à l'Église.

224 5. Mais, hélas, hélas! cette vie ne peut pas plus être exempte de tentation que la mer de flots, il n'y a de paix solide et durable que dans le pays de la paix. En effet, à la vue de ce qui se passe, le pécheur se sent transporté d'envie et de colère, il grince les dents en fureur, la rage le consume, et, tout entier à de nouveaux projets de guerre, il a recours aux esprits de malice. Il rassemble donc les plus fameux de ses capitaines, je veux dire l'esprit de fornication, l'esprit de gourmandise et l'esprit d'avarice. Vous voyez , leur dit-il , que nous n'avançons à rien, voilà tout le monde qui se met à leur suite. Mais je veux encore une fois leur faire sentir la force de notre bras à ces hommes qui se flattent de nous avoir échappé, et d'avoir déjoué toutes nos ruses. Il dit et lance pendant la nuit ses satellites dans le camp de l'Église; comme il le trouve tout entier plongé dans l'ivresse et le sommeil, car ceux qui dorment et sont ivres, dorment et sont ivres pendant la nuit (1Th 5,7), il met le trouble partout. Aussitôt on vit tous les gens de l'Église s'aimer eux-mêmes et ne rechercher que leurs propres intérêts, non ceux de Jésus-Christ. Ils regardent le sanctuaire de Dieu comme leur héritage, et souillent le tabernacle consacré au nom du Seigneur (Ps 73,7). Ce n'est pas Dieu qu'ils servent dans son sanctuaire, ce sont leurs propres volontés et leur plaisir; ils font servir à leur usage tout ce qui est offert ou consacré à Dieu. En effet, se faisant de leurs noms et de leur office en religion, des noms et des titres d'avarice, d'orgueil et de vanité, ils arrachent à l'Église, en dépit de ses cris et de ses efforts pour les retenir, la tunique sans couture et toute d'une pièce de la charité, et le manteau de pourpre de la foi teint du sang du Sauveur, que l'Époux avait jeté sur les épaules de l'Épouse pour couvrir sa nudité; ils lui ravissent de même tous les autres ornements de la religion. Et, après avoir dépouillé, sans se vêtir eux-mêmes, celle qu'ils auraient du garder, ils la laissent toute nue, et l'arrachent au repos. dont elle jouissait, ils la chassent autant qu'il leur est possible, et la forcent à fuir loin de ce monde.

225 6. Mais elle, poussant des cris, versant des larmes, honteuse de la nudité qui expose les endroits secrets de son corps à tous les regards et à toutes les insultes, prie les enfants de son sein d'avoir pitié d'elle, mais c'est en vain : elle les supplie, mais eux se moquent de sa prière. Alors, prenant dans ses deux mains et retenant de toutes ses forces quelques lambeaux de la vie canonique et monastique échappés aux mains rapaces de ceux qui l'avaient dépouillée, elle les serre contre son coeur et contre son sein, en suppliant ses spoliateurs de lui laisser au moins ces pauvres haillons. On ne l'écoute même pas. Bien plus, ces hommes, j'allais dire ses propres gardiens, mais plutôt ces brigands s'efforcent de la dépouiller, afin que, honteuse de sa nudité, elle fuie loin de ce monde ou meure parmi eux du froid de leur malice. Cependant ils feignent quelquefois d'avoir pitié d'elle, et tentent de lui vendre un vêtement tissu à la fois des mains de la dissimulation et de l'hypocrisie ; mais elle le repousse avec mépris et malédiction, elle ne le reconnaît point pour un vêtement digne d'elle. Elle n'en connaît qu'un, il a été tissu des mains de la sagesse, teint et consacré du sang de l'Agneau ; elle l'a reçu des mains mêmes de son époux, mais ses propres enfants le lui ont enlevé. Tout autre, elle ne le connaît pas, elle le repousse, elle le rejette. Voilà pourquoi elle se voit elle-même rejetée, dédaignée, conspuée, et couverte d'opprobres par tout le monde.

226 7. Voilà quels sont les temps où nous vivons, la périlleuse époque où vit maintenant l'Église. Dans ces jours au sein même de la paix dont elle jouit, son amertume est devenue excessivement amère (Is 38,17). Ces trois malheurs passés, il en reste un quatrième, c'est l'ange de satan, qui doit se transfigurer en ange de lumière, s'asseoir dans le temple de Dieu et se montrer aux hommes comme un Dieu (1Th 2,7). Déjà même il fait des miracles d'iniquité et ces hérauts crient dès maintenant partout dans l'Église : « Il est ici, il est là (Mt 14 Mt 15). » Mais, ô épouse du Christ, n'en crois rien, ne sors pas pour le voir. Attends patiemment ton Époux, il n'a point de dédain pour toi, lui du moins, et il ne t'oublie pas dans la tribulation. A la quatrième veille de la nuit, il viendra à toi en marchant sur les eaux de la mer. Ah! venez, Seigneur, venez pour la délivrer, Seigneur Dieu des vertus, vous qui vivez et régnez pendant tous les siècles des siècles. Ainsi soit-il.



CINQUIÈME PARABOLE.

La Foi, l'Espérance et la Charité.

227 1. Notre noble et puissant roi a trois filles qui sont la Foi, l'Espérance et la Charité. Il leur a donné une ville d'une grande beauté, c'est l'âme humaine. Dans cette ville se trouvent trois citadelles, la Rationabilité, la Concupiscibilité et l'Irascibilité ; chacune de ses filles a la sienne : à la Foi il a donné la première, la seconde à l'Espérance et la troisième est le lot de la Charité. La Foi commande donc dans la citadelle de la Rationabilité, attendu que la Foi qui s'appuie sur l'expérience de la raison n'a aucun mérite. L'Espérance gouverne la Concupiscibilité, attendu que nous ne saurions désirer les choses que nous voyons, mais seulement celles que nous espérons. Enfin la Charité gouverne l'Irascibilité, la chaleur commande à la chaleur, en sorte que l'ardeur de la nature se trouve dominée par celle de la vertu. A peine sont-elles entrées chez elles qu'elles établissent et règlent leur demeure chacune suivant son pouvoir. Ainsi pour garder la sienne la Foi place en sentinelle la Prudence, qui doit lui conserver son droit dans la citadelle et main tenir la raison sous les lois et dans les limites que la Foi lui assigne ; mais pour que son action soit bien faite, elle lui adjoint l'Obéissance; puis, voulant donner à celle-ci le moyen de persévérer dans son couvre et lui faire supporter la peine de la fatigue, elle lui donne la Patience pour auxiliaire. Enfin, pour qu'elle pût régir comme il faut et gouverner convenablement toute la domesticité des actes et des sentiments, elle lui donne encore la vertu de discrétion. Voulant que tout se passe chez elle selon le conseil de l'Apôtre, dans l'ordre et l'honnêteté, elle ajoute l'ordre à ses gardiens. Et pour que la malédiction n'entre jamais dans cette demeure, car on sait que toute maison sans discipline est maudite, elle place un dernier gardien à la porte, c'est la Discipline.

228 2. Quant à l'Espérance, elle place à la tête de sa maison, dans la Concupiscibilité, la Sobriété, pour s'assurer la possession de ses droits chez elle et pour forcer les principaux habitants de la citadelle à la servir. Pour lui donner le moyen de gouverner avec discernement toute la famille des volontés et des voluptés elle lui adjoint la Discrétion, puis, pour combattre la concupiscence de la chair, elle lui donne la Continence, pour dompter celle des yeux, elle lui donne la Constance, et pour lutter contre l'ambition du siècle, elle lui donne l'Humilité. Enfin, pour fermer la porte à la pauvreté, se rappelant ce mot de Salomon, «beaucoup de paroles, beaucoup de misère (Pr 14,23), » elle confie la garde de porte au Silence.

229 3. Pour ce qui est de la Charité, elle a placé sa demeure du côté où souffle l'Auster, faisant face au Midi, elle la confie à son amie la Piété, lui remet tous ses droits ou lui donne pour premier serviteur la propreté du corps, puis des exercices appropriés, les lectures, les méditations, les oraisons, et les aspirations de l'âme; enfin, pour empêcher la misère d'entrer dans la maison et d'y semer le désordre, elle confie la garde de la porte à la Paix en personne, la Béatitude des enfants de Dieu qui, placés dans la perfection du bonheur au septième degré, se jouent et goûtent le bonheur dans la maison de la Charité. Leurs habitations étant ainsi réglées, on mit à la tête de la. cité tout entière une sorte de prévôt et d'économe appelé le Libre arbitre.

230 4. Cela fait, les trois filles du roi reviennent dans la maison de leur père. Mais alors survient l'ennemi qui, à la vue de l'ordre et de la gloire de la cité, est saisi d'envie, et machine des embûches contre elle. Dans ses désirs d'y pénétrer il en corrompt deux des principaux citoyens, la discrétion et la dispensation, et, grâce à eux, il fait entrer toute sa détestable armée par les deux portes du Rationalisme et de la Concupiscence. Il charge de chaires et jette au fond d'un cachot, le prévôt de la ville, le Libre arbitre, à qui la garde et l'administration en avaient été confiées, car le père de famille, en s'en allant en voyage, avait donné à tous ses serviteurs le pouvoir de faire chacun ce qui le concerne. Après avoir précipité du haut des murailles du Rationalisme ceux qui. en étaient les gardiens, l'ennemi fait entrer le Blasphème, ennemi juré de la Foi. Avec lui se précipitent dans le donjon les contradictions, les troubles, les confusions et mille autres ennemis du même genre qui, se jetant sur tout ce qu'ils rencontrent, et, n'appropriant tout ce qui leur convient, ne laissent presque rien de la raison dans le Rationalisme; puis après avoir tué le portier, je veux dire la discipline, ils laissent à tout venant la liberté d'entrer et de sortir.

231 5. Quant à la demeure de l'Espérances, la Concupiscibilité, c'est la Luxure qui s'y précipite, elle s'approprie tout ce qu'elle y trouve, elle précipite du haut en bas l'Espérance elle-même, jette la Continence, la Constance et l'Humilité, sous les pieds de leurs ennemis, la Concupiscence de la chair, la Concupiscence des yeux et l'Ambition du siècle, et les expose à leurs insultes. Puis, après avoir tué le Silence qui gardait la porte de la forteresse, elle ouvre la porte à deux battants à quiconque veut entrer ou sortir. Quant à la Sobriété et à ses compagnes, ou bien elles sont mises à mort, ou bien elles sont précipitées au fond d'un cachot, ou enfin envoyées en exil. Puis, montant jusqu'au haut de la citadelle, l'ennemi tue la Paix qui était le portier et le gardien de la souveraine béatitude, elle livre un libre accès à la Misère. Bientôt après, sa Seigneurie l'Orgueil monte dans la citadelle, car « l'orgueil de ceux qui vous haïssent, Seigneur, monte toujours (Ps 73,23), » et d'une main impie renverse la Piété et condamne à la mort ou à l'exil toute la domesticité de la Foi et de la Piété. Après cela, quiconque le veut, entre dans le sanctuaire de Dieu, et tout ce qui s'y trouvé de saint, tout ce qui jusqu'alors n'avait été accessible et visible qu'aux enfants de Lévi, est profané, devient la proie des ennemis, est emporté à Babylone, dont le roi verse à boire à ses concubines dans les vases du temple. Voilà, comment la ville entière fut prise et saccagée : sa honte fut égale à ce qu'avait été sa gloire.

232 6. Tout étant ainsi bouleversé, un messager de la malheureuse cité vint tristement trouver celles qui en étaient les maîtresses. Consternées, celles-ci montent à pied vers leur père et implorent son secours. Celui-ci s'en prenant ail Libre arbitre, chargé de la garde de ces villes, l'accuse de négligence. Mais, ô père, s'écrient les trois filles, que pouvait-il faire sans le secours de la grâce ? Eh bien, dit le roi, je lui donnerai la grâce, mais commençons par envoyer la Crainte en avant, elle la précédera et lui préparera la voie. La Crainte s'éloigne donc de la présence du Seigneur, et s'approche de la cité, le bâton de la discipline à la main, mais elle trouve la porte de la difficulté fermée avec les gonds de fer de la mauvaise habitude. Sur le seuil, elle aperçoit le gardien de la porte, l'arrogante et malhonnête Lasciveté de la chair, l'ennemie déclarée de la Crainte. Elle accueille cette dernière par un torrent d'injures et de provocations. Mais la Crainte, du choc de la Confiance, brise les gonds de la mauvaise habitude, et, renversant la porte de la difficulté, elle s'empare du malheureux portier et le frappe du bâton de la discipline qu'elle tenait à la main, jusqu'à ce que mort s'en suive ; puis, hissant aussitôt au dessus de la porte, l'enseigne de la Grâce qui arrive, elle répand la terreur dans toute la ville. Après la Crainte se présente la Grâce qui entre dans la ville, menant à sa suite toute la troupe des vertus célestes. En un clin d'oeil tous les ennemis ont disparu et les vertus reprennent le poste qui leur était assigné. Alors on vit paraître d'abord la Discrétion et la Dispensation qui reconnaissent qu'elles se sont laissé tromper, et sollicitent leur pardon. Le libre arbitre sort aussi de ses fers et court en toute hôte au devant de sa maîtresse la Grâce, certain sous son règne de vivre en liberté. On prépare un repas aux filles du roi, dans leur demeure, et on dresse des tables pour chacune d'elles; sur celle de, la Foi on voit figurer le pain de la douleur, l'eau de la tristesse, et tous les autres mets de la pénitence. Sur celle de l'Espérance, on voit le pain qui fortifie, l'huile qui réjouit le visage, et tous les autres mets de la consolation. Sur la table de la Charité se trouvent le pain de vie, et le vin qui réjouit le coeur, et toutes les autres délices du paradis. On entre, on se met à table et on place des gardes à l'entrée de la ville, « mais si le Seigneur ne garde une ville, c'est en vain que veille celui qui la garde (Ps 126,2). »


FORMULE DE LA CONFESSION PRIVÉE OU PRIÈRE TRÈS-DÉVOTE D'UNE AME FERVENTE A DIEU, ATTRIBUÉE AVEC QUELQUE RAISON A SAINT BERNARD.

233 1. En union avec votre très-amère douleur, ô seigneur Jésus, vous qui avez pris sur vous la cause de ma douleur, et avez entrepris de satisfaire pour mes péchés, avec tous ceux qui souffrent, avec tous les vrais pénitents et tous ceux qui cherchent la vérité en vous, je vous confesse tous mes péchés, tout le mal que j'ai commis, tout le bien que j'ai omis, ou que j'ai fait sans pureté d'intention, ou avec négligence, selon le nombre, le poids et dans la mesure que vous connaissez mieux que moi; tous les jours de ma vie que j'ai perdus en vous offensant, en diminuant votre gloire, en m'éloignant de vous, qui êtes le souverain bien et en entraînant mon prochain dans ma chute. Recevez donc, Seigneur, les années qui me restent de ma misérable vie; et pour celles que j'ai perdues en vivant mal et pendant lesquelles j'ai vécu en me perdant, ne dédaignez point, ô mon Dieu, un coeur contrit et humble. Mes jours penchent vers leur couchant, ils se sont écoulés sans fruit. Impossible à moi de les rappeler en arrière; mais daignez trouver bon que je les repasse en esprit dans l'amertume de mon âme. Seigneur, l'abîme de ma profonde misère appelle l'abîme de votre profonde miséricorde. Ne renfermez point dans les bornes de votre courroux, vos miséricordes, et ne permettez pas que pour moi la source en soit tarie, à cause de mes péchés, ô vous qui avez pitié de tous les hommes, qui n'avez pas de haine pour aucune des créatures de vos mains, et qui faites comme si vous ne voyiez point leurs péchés dès qu'elles se repentent. C’est à vous, Seigneur, de nous remettre nos péchés; ayez pitié de moi pendant que dure le temps de la grâce et de la miséricorde. Et, puisqu'il est temps encore pour moi de faire pénitence, faites-moi la grâce de mériter la gloire de la bénédiction, et de ne point mériter d'entendre une parole de malédiction me frapper au jour où tout sera consommé.

234 2. Seigneur, faites-moi, je vous en prie, renoncer à mes péchés d’habitude, et faire ce qui vous plait. Donnez-moi de déployer désormais,, pour accomplir votre sainte volonté, le zèle que j'ai mis jusqu'à ce jour à vous offenser. Que votre grâce surabonde là où le péché a abondé. Je vous prie par vous-même et au nom de l'amour de votre très-pieuse mère, la vierge Marie, et par l'intercession de tous les Saints et tous les élus, de me pardonner mes péchés, mes négligences, et mes ignorances, de ne pas me perdre avec toutes mes iniquités et de ne point garder jusqu'à la fin dans votre colère le mal que j'ai fait. Rap pelez-vous, Seigneur, qu'il ne vous convient pas de perdre aucun de ceux que votre père vous a donnés, et que, tout au contraire, c'est à vous de vous montrer toujours plein de miséricorde, nous épargner et de sauver tout le monde, bien loin de perdre personne. Car votre père vous a envoyé dans le monde non pour juger le monde, mais pour que nous eussions la vie par vous, pour que vous fussiez notre propitiation, et notre avocat contre nous-mêmes. Aussi, avez-vous acquitté la dette que nous avions faite, suppléé ce que nous avions négligé de faire.

235 3. Que votre satisfaction abondante ou plutôt surabondante me serve donc, Seigneur, dans l'extrémité où je me vois réduit; que votre mort amère, le prix inestimable de votre sang, la mémoire de votre satisfaction, le vénérable mystère de votre corps et de votre sang qui est offert tous les jours dans l'Église pour le salut de vos fidèles serviteurs et dans lequel vous êtes vous-même le sacrifice et le sacrificateur, celui qui offre, et la victime offerte, que tout cela me serve à me mériter, dans la vie présente, la grâce que je ne mérite point, et, dans la vie future, le repos et la gloire que votre mort si amère a mérités pour moi. Seigneur Jésus, votre oeil a vu mes imperfections; mais vous qui êtes bon, miséricordieux, et secourable pour le pécheur, ne me condamnez point à un supplice éternel, vous qui avez préordonné tout pour le souverain bien et pour le bien parfait avec une bonté, une perfection et une sagesse infinies, ne permettez point que je sois rayé du livre de vie donnez-moi plutôt la part d'héritage qui me revient, grâce au bienfait de votre précieuse passion, par laquelle vous avez voulu avoir l'homme pour cohéritier dans la terre des vivants.

236 4. Seigneur, que la considération de la fragilité humaine touche votre coeur et l'incline à la miséricorde, vous connaissez la substance de l'homme, et vous savez que ce n'est pas en vain que vous l'avez établi sur la terre. Je suis l'oeuvre de votre bonté, conservez-moi. Si vous ne voulez point avoir travaillé en vain à me faire, et que votre sang immaculé n'ait coulé en pure perte pour moi, ô vous qui rendez pur un pécheur, après m'avoir purifié de la souillure de mes péchés et avoir répandu votre lumière sur la face de mon âme, faites-moi la grâce de vous connaître et, vous connaissant, de tendre sans cesse vers vous, afin que j'aie le bonheur d'arriver enfin à vous, Jésus-Christ, mon Dieu et mon Seigneur, qui vivez avec le Père et le Saint-Esprit, etc.





300

OFFICE DE SAINT VICTOR, CONFESSEUR

Composé par saint Bernard, à la demande de Guy, abbé de Moutier-Ramey.

AUX Ières VÊPRES

Antiennes des 1ères Vêpres.

301 1. Ame victorieuse qui, semblable à l'oiseau dans son vol, avez échappé aux filets des chasseurs, faites que par votre protection nous y échappions aussi.

302 2. O soldat émérite qui êtes entré après le combat dans le repos que vous avez mérité, jetez un regard sur nous qui célébrons vos louanges au milieu des glaives des ennemis.

303 3. O Jésus vainqueur, votas qui avez vaincu dans notre Victor, faites qu'au sein de la gloire dont il jouit en nous, il ne nous oublie point.

Capitule.

Saint Victor a été aimé de Dieu et des hommes, sa mémoire est en bénédiction, le Seigneur lui a donné une gloire égale à celle des Saints (
Qo 45,1).

R/. O vrai Victor, vous qui depuis que vous vivez, c'est-à-dire depuis le sein même de votre mère, jusqu'au tombeau, n'avez cessé de vaincre, et de mériter de nouveaux triomphes , obtenez-nous d'être armés de vos armes comme nous nous sentons animés par vos victoires.

V/. Obtenez-nous de pouvoir résister au mauvais jour de la tentation, et demeurer fermes et irréprochables en tout (Ep 6,13).

Hymne (a).

304 La vie de saint Victor, remplie de merveilles, nous offre sur la terre Un homme qui n'a rien de la terre, comme un modèle à imiter descendu du ciel.

C'est le Christ, non pas lui, qui a vécu en lui; cet homme céleste a été un miroir de vie pour les morts de ce monde, et demande des imitateurs.

C'est en professant une vie des plus saintes que Victor s'est fait modèle de sainteté, il a conservé entier et sans corruption tout l'éclat de l'honnêteté.

Aussi lui a-t-il été donné de jouir souvent de la vision de Dieu, il a vu les cieux s'ouvrir à ses yeux ; la vue du ciel exige un regard pur.

a.— Se rappeler les paroles de saint Bernard dans sa lettre 398,n. 3, où il dit que dans les hymnes de cet office, il a sacrifié la mesure au sens.

305 Gloire à la souveraine Trinité qui est Dieu, la gloire des personnes divines est une et triple, elle est tout entière pour chacune et indivise entre les trois, car les trois personnes ne font qu'une seule et même chose.

Antienne de Magnificat.

O Victor, la force de votre Seigneur est grande et sa bonté ne l'est pas moins. Puisse-t-il par vous se montrer aussi propice pour notre salut, qu'il s'est montré magnifique dans la force qu'il vous a donnée !

O Victor, louez le Seigneur qui a fait de grandes choses pour vous, qui vous a fait grand, afin que vous fissiez des merveilles qui vous rendissent merveilleux. Il vous a donné l'occasion de combattre pour vous donner le moyen de vaincre et pour vous couronner après la victoire.

306 Collecte.

Seigneur, exaucez, s'il vous plait, les prières que nous vous adressons en vous suppliant, et faites à ceux qui se félicitent de posséder au milieu d'eux le corps de saint Victor, la grâce d'être protégés de tous côtés par son intercession, par Jésus notre Seigneur, etc.


307

A MATINES.

Invitatoire.

Confiance, Victor a vaincu le monde

Réjouissons-nous dans la victoire pour vaincre à notre tour.

308 Hymne.

C'était justice que cet homme qui réprimait les mouvements de sa chair et menait dans son corps la vie des anges, entendit dans sa chair mortelle les douces voix des anges.

Voilà comment il fallait que celui qui avait été désigné pour être un vase d'honneur, vécût dans la sainteté; sa sainteté avait commencé dès le ventre de sa mère.

En effet, les démons, en voyant sa mère grosse de lui, ne peuvent supporter son approche ; ils s'enfuient épouvantés, ils lui donnent son vrai nom, et le proclament saint, dès le sein de sa mère.

Cependant, bien que dès l'enfance il en fut ainsi pour lui, il n'en mène pas une vie plus exempte de crainte pour cela, il aspire à la gloire, et il s'en amasse un trésor que grossissent sans cesse de nombreux intérêts.

309 Gloire à la souveraine Trinité.

Antiennes du premier nocturne.

310 1. Heureux l'homme qui a aimé la loi et qui n'a point aspiré aux honneurs.

311 2. Il a servi le Seigneur dans la crainte, et maintenant c'est sans crainte qu'il triomphe en lui.

312 3. Seigneur, il a marché à la lumière de votre face, et maintenant cette lumière a imprimé son cachet sur sa face.

313 4. Seigneur, Victor a bu vos paroles par les oreilles et par le coeur, et, par elles, il a vaincu.

314 5. La louange qui s'exhalait des lèvres de Victor était parfaite, parce que la paix qui régnait dans son coeur était continuelle.

315 6. Il avait mis sa confiance dans le Seigneur, aussi, est-ce en vain que ceux qui décochent en secret leur flèche contre les hommes au coeur droit, lui ont tendu des embûches.

I Leçon.

La vie et la gloire de Victor, etc. Comme plus haut, parmi les sermons pour les saints, au 26 février.

316 R/. O homme d'une sainteté remarquable ! il a été saint avant même d'être né, et Victor de fait, avant de l'être de nom ; il était encore dans le ventre de sa mère, et déjà il était victorieux de l'ennemi.

V/. Seigneur, vous l'avez prévenu de bénédictions (), en sorte que, etc.

II Leçon.

Ayons, mes très-chers frères, dans la vie de saint Victor, etc., comme il est dit plus haut, à l'endroit cité.

317 R/. O merveille aussi douce qu'inouïe ! Le lion rugissant fuit à l'aspect d'un petit enfant qui ne peut pas même encore vagir.

V/. Comme la cire fond au feu, que les pécheurs périssent ainsi, devant la face, etc. (
Ps 67,2).

III Leçon.

Mangeons, mes chers amis, nous sommes conviés à la table d'un riche, etc. Comme plus haut, à l'endroit cité.

318 R/. O heureuse mère ! Son sein a senti quelque chose de nouveau que n'avait jamais éprouvé le sein d'une mère depuis les jours de Jean-Baptiste, il n'en a pas été trouvé de pareil à lui.

V/. Depuis les jours, etc.

IV Leçon.

Si donc, mes très-révérends frères, je considère avec soin, etc. Voir la suite à l'endroit indiqué.

R/. O bon Jésus, c'est votre force, c'est votre victoire, qu'un tout petit agneau ait mis en fuite une troupe de loups.

V/. Avant que l'enfant sût nommer son. père et sa mère. Des loups, etc.

Antiennes du second nocturne.

319 1. Le malin a été réduit à néant en sa présence, pour que son nom fût une vérité.

2. Seigneur, Victor se réjouira dans votre force, car il sait que ce n'est pas par sa force à lui qu'il a remporté la victoire.

3. Ce n'est pas en vain qu'il a reçu son âme, lui qui s'est servi de la raison pour gouverner sa vie et c'est pour cela qu'il est monté sur la montagne du Seigneur.

320 4. Seigneur, vous avez arraché l'âme de votre saint à la crainte de l'ennemi. Il a remporté la victoire, et maintenant il n'a plus de combat à livrer.

5. A vous les hymnes de gloire, à vous les louanges, car c'est votre oeuvre si notre Victor, dégagé des liens du corps, a délié un homme de ses liens.

6. Il est bon de rendre gloire au Seigneur; les récompenses des saints sont ses mérites, et saint Victor confesse que c'est à lui qu'il doit d'être saint et victorieux.

321 V Leçon.

Réjouissez-vous dans le Seigneur, mes très-chers, vous qui, etc., comme il est indiqué plus haut.

R/. Un jour que le roi des Français passait non loin de l'endroit où . habitait un ermite, il fut émerveillé de ce qu'on lui rapporta de cet homme.

V/. Que de grandes choses nous avons connues et entendues, et que nos pères nous ont racontées (
Ps 77,3).

Sur ces choses, etc.

322 VI Leçon.

Le soldat émérite s'arrête, et, après ses fatigues, etc., voir plus haut à l'endroit cité.

323 R/. Déjà l'indiscrète renommée avait trahi le secret de ce trésor, et ce qu'elle publiait ne put échapper au roi qui passait par là, et il se détourna donc de la route pour s'approcher de la hutte du pauvre, sur le bruit de sa sainteté.

V/. Pour contempler les OEuvres du Seigneur et ses merveilles au désert.

Excité, etc.

324 VII Leçon.

Mes frères, l'étendue du ciel dilate les coeurs bien loin de les resserrer, etc., voir à l'endroit indiqué plus haut.

R/. Le roi entra dans la hutte du pauvre; son hôte inquiet de n'avoir pas de vin à lui offrir, va puiser de l'eau à la source voisine, la bénit et la change en vin : le roi en but ainsi que toute sa suite.

V/. Tous furent dans l'admiration et dans l'extase, en voyant ce qui était arrivé.

Il but, etc.

325 VIII Leçon.

Petit pour le combat, grand déjà pour la victoire, etc. Comme il est dit plus haut.

R/. Quel nouveau genre de puissance ! L'eau des urnes rougit, et quand on la fait couler, elle a changé de nature.

V/. C'est la droite du Seigneur qui a opéré cette merveille. Le vin, etc.

326 Antienne du III nocturne.

Combien il est pieux, doux et suave, ô Victor, de chanter votre gloire, de vous honorer d'un culte particulier , et de vous adresser des voeux , dans ces lieux d'afflictions et dans ce corps de mort!

R/. Un homme ne craignit point de maltraiter le saint, de lui dérober son blé, qu'il alla cacher dans la terre; mais le malheureux est livré au malin esprit.

V/. Maudit est celui qui cache son blé dans le peuple. Il est livré.

R/. Miracle aussi triste que juste, que celui qui avait cédé aux suggestions du diable fut puni de sa faute par le diable.

V/. Vous êtes juste, Seigneur, et votre jugement est la justice même.

327 En sorte que celui que, etc.

R/. Les mystères d'iniquité se révèlent. Le diable pousse l'homme, et l'homme trahit le diable. Victor placé entre l'un et l'autre, les juge tous les deux ; il met le diable en fuite et rend la santé à l'homme, et recouvre en même temps son blé, dont le voleur même lui apprend la cachette.

V/. C'est la sagesse qui lui est venue en aide contre ceux qui voulaient le surprendre par leurs tromperies et qui l'a fait devenir riche (
Sg 10,11).

Pendant qu'elle chasse le démon, etc.

R/. Victor lève les yeux, voit les cieux ouverts, aperçoit une croix d'or couverte de perles , et il entend une voix qui lui disait : les perles, ce sont les rimes qui ont acquis la gloire de la croix; Dont elles ont porté l'ignominie.

V/. Qu'Israël se réjouisse dans celui qui l'a fait, et que les filles de Sion se laissent aller à l'allégresse dans leur roi.

Il...

328 Antiennes de laudes.

329 1. Victor sur la terre par son corps, dans les cieux par son âme , entendait les anges dans des chants pleins de douceur, tantôt lui annoncer quelque chose, tantôt faire retentir d'ineffables concerts.

2. Dans les cieux où il est entré maintenant, mais qu'il avait naguère contemplés tout ouverts de ses propres yeux, il voit maintenant en réalité et sans voile, la gloire de Dieu.

3. Heureuse vision, que celle où Victor se voit transformé en ce qu'il contemple , de clarté en clarté comme au souffle de l'esprit du Seigneur.

330 4. Oui, ô Victor, votre âme est véritablement une de ces perles qui vous ont apparu sur la croix ; car elle est véritablement attachée à la croix maintenant que enchâssée dans la gloire, elle est toute pénétrée de l'éclat dans lequel elle se trouve.

5. Père tout-puissant, nous avons péché contre vous, nous sommes devenus des enfants dénaturés. Mais nous nous sommes rapprochés de vous dans notre cher Victor, qui après avoir vaincu la cupidité en lui, vaincra votre courroux, et nous rétablira par sa puissance dans votre grâce.

R/. Filles de Jérusalem, c'est une âme sainte qui s'envole ; Sortez à sa rencontre.

V/. Car elle vient avec des transports de joie, sortez, etc.

331 Hymne.

Le vin coule d'une source, non de la vigne, c'est du vin qui ruisselle sous la main qui le bénit, en guise de pressoir.

Soudain l'eau prend un goût nouveau pour elle, elle se voit contrainte à un usage également nouveau ; car au grand étonnement du roi, elle se change en breuvage de roi, là où on ne croyait point en trouver de pareil.

Tourmenté par le démon, un homme dévoile ses fautes, le malheureux confesse son larcin , malgré qu'il en ait. Le bourreau qui le torture est chassé à son tour, quand le voleur s'est fait connaître, et il est torturé lui-même à son tour.

Ce sont autant de preuves ajoutées aux autres des prérogatives de Victor, elles ne sont point petites, car il a été prévenu du Saint-Esprit.

Gloire à la souveraine Trinité, qui est Dieu, etc.

332 Antienne de Benedictus.

Heureuse la race qui a vu la lumière se lever dans les ténèbres. Victor, éclairez de vos rayons ceux qui étaient placés dans les ténèbres et assis à l'ombre de la mort.

Autre antienne de Benedictus.

Béni soit le Seigneur Dieu de Victor qui l'a placé au milieu de nous et l'a élevé parmi nous, comme une corne de salut, puis nous l'a enlevé pour le placer avec les princes, afin d'avoir parmi les hommes un motif de pardonner les péchés des hommes.

333 V/. Voici le jour de sa fête, c'est un jour de joie pour ceux de sa race.

R/. Livrons-nous à la joie et à l'allégresse en ce jour.

Antienne de Prime.

Aujourd'hui, Victor a quitté son corps, le seul obstacle qui semblait l'empêcher d'entrer dans le ciel. Il était riche en mérites, fameux par ses miracles, une fois libre, son âme est entrée dans le Saint des saints, et il est devenu semblable aux saints dans la gloire.

334 A Tierce.

Votre nom et votre mémoire, ô Victor. sont un rayon de miel, aux lèvres des captifs. Allons, courageux athlète, doux patron, avocat fidèle, levez-vous pour venir à notre secours, et vous vous glorifierez d'une victoire complète.

A Sexte.

Celui qui avait animé Victor de son esprit dans la lutte, lui ouvrit son sein après la victoire. Et vous, ô mon Dieu, vous qui êtes partout, inspirez-lui, dans ce séjour, de penser aux malheureux mortels recevez sa prière , Seigneur Dieu , exaucez ses voeux pour des malheureux.

335 A None.

Victor est absorbé dans la gloire du Fils de Dieu. Inspirez-lui sans cesse de se souvenir de nous, qu'il prenne notre cause en main et qu'il la défende à votre redoutable jugement.

Aux secondes Vêpres.

336 1. Saint Victor, qui pourra dignement célébrer vos louanges, dire votre éclatante pureté, la force de votre âme, la sainteté de votre conscience?

2. Saint Victor, qui nous fera la grâce que la droiture de votre vie s'imprime dans nos âmes avec le souvenir de l'abondance de votre douceur ?

337 3. Saint Victor, envoyez-nous du secours du Saint des saints, et, de Sion, protégez-nous, nous qui sur la terre célébrons vos louanges.

4. Saint Victor, plus votre victoire et votre sainteté nous sont salutaires, plus aussi elles vous sont glorieuses.

V/. Voici Victor qui s'approche plein de gloire, apportez-lui bien vite une couronne .

R/. Déjà il entre dans la gloire de son Seigneur.

338 Antienne de Magnificat.

Grand saint Victor, si votre magnificence est élevée au dessus des cieux, que votre munificence n'oublie pas pour cela les pauvres qu'elle a laissés sur la terre.

FIN DU TOME III DE MABILLON.


Bernard Opuscules 219