F. de Sales, Lettres 964


LETTRE CCLVI.

S. FRANÇOIS DE SALES, A MONSEIGNEUR HILDEBRAND-JOSSE, ÉVÊQUE DE SION.

Il lui promet d'aller le trouver un jour qu'il lui marquera pour le consacrer évêque.

Après le 22 février 1614.

Gratissimum mihi semper erit, si vestrae am-plissimae et reverendissimae dominationi obse-quium aliquod proestare contingat : id cnim à me Deus Salvator, qui nos nobis invicem finitimos constituit, ut invicem alter alterius, quoad fleri potest, onera portemus; id vestrae domiriationis ergà me jampridem contestata benevolentia, id vester ergà rempublicam catholicam optimus et constansanimus, jure suo postulare videntur.

Quare ubi dum vestra dominatio reverendis-sima condixerit, non deero quin lubentissimè offlcio consecrationis suae, amantissimi utinam et amatissimi promotoris munere fungar. Sic eniin apud me constitutum est, dominationem vestranr illustrissimam et reverendissimam omni venera-tione ac sincerâ dilectione semper et ubique prosequi. Intérim vale in Christo, illustrissime ae reverendissime proesul, et eumdem Dominum Salvatorem habeto propitium. Dominationis ves-tras illustrissimoe et reverendissimae, etc.



Monseigneur, ce sera toujours pour moi une chose très-agréable de me trouver dans le cas de rendre quelque service à votre seigneurie illustrissime et révérendissime : au reste, je ne ferai rien en cela qui ne soit selon l'intention et la volonté de Dieu notre Sauveur, puisqu'il n'a permis que nous fussions si voisins qu'afm que nous supportassions mutuellement les fardeaux l'un de l'autre. Je vous le dois encore, monseigneur, à titre de reconnaissance, à cause île la bienveillance que vous me témoignez depuis si longtemps. Enfin, pourrois-je me dispenser d'obliger, en toutes façons une personne qui a toujours eu une souveraine affection et un attachement constant et inviolable pour l'Église catholique ?

C'est pourquoi, aussitôt que votre seigneurie illustrissime et révérendissime m'aura assigné un jour, je ne manquerai pas de me rendre auprès d'elle pour faire sa consécration, et de m'y transporter avec tout le zèle dont je suis capable. C'est ainsi qu'en toute occasion je prétends vous donner des preuves de mon amitié sincère, et du respect que je vous porte.

Cependant je supplie Jésus-Christ notre Sauveur de vous être toujours propice. J'ai l'honneur d'être votre, etc.



LETTRE CCLVII, A M. DESHAYES.

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(Tirée du monastère de la Visitation de la ville de Rouen.)

Il lui envoie un mémoire dans lequel est exposé que madame d'Angoulême retenait injustement la moitié de la légitime de la mère de la demoiselle de Charansonay, sa parente. Celle-ci établit son droit dans le mémoire, et prie M. Deshayes de l'appuyer. Elle avait promis, si elle réussissait, d'en consacrer la moitié en oeuvres pieuses, dont le saint évéque en aurait l'administration. M. de Charmoisy était rendu à Chambéri, et mis en liberté.

17 mars 1614.

Monsieur, c'est à tout propos, et pour cela presque hors de propos, que je vous importune des occurrences qui me viennent; mais la faveur de votre bienveillance m'assure. Je vous supplie de voir le mémorial ci-joint, et de considérer si on pourrait en quelque sorte faire ressentir à madame d'Angoulême l'obligation qu'elle aurait de tenir compte à la seconde soeur de la demoiselle de Charansonay, de la moitié de la légitime de sa mère ; car, selon l'avis que vous prendrez la peine, s'il vous plaît, de m'en donner, je verrai si ce sera chose qui se puisse entreprendre.

Or, la demoiselle qui prétend est ma parente ; et pour me porter encore davantage, elle me veut donner la moitié de ce qu'elle pourrait avoir, pour être employée en oeuvres pies. Mais pourtant j'ai une telle aversion de telles affaires, que sinon qu'il y eût grande apparence et de la facilité, je ne voudrais pas y penser. Je vous supplie donc, monsieur, de me faire la grâce de me faire savoir si, toutes choses considérées, c'est une prétention digne d'être relevée. Je vous écrivis il n'y a que trois jours, et à M. de Charmoisy, qui me retiendra de vous entretenir davantage, étant mêmement pressé du départ de ce jeune gentilhomme, qui, par sa courtoisie, m'offre bien de retarder, mais il n'est pas raisonnable. Je suis à jamais et par mille sortes de devoirs, monsieur, votre, etc.

Monsieur, je salue très-humblement madame votre femme, et suis son très-humble serviteur.

M. de Charmoisy est à Chambéri, où il s'est rendu pour le passage du cardinal d'Est, et se porte fort bien, qui est tout ce que je pourrai dire de plus agréable à madame de Charmoisy sa femme, ma cousine, que je salue ici avec votre permission.




LETTRE CCLYIII.

S. FRANÇOIS DE SALES, A UNE NIÈCE.

(Tirée du premier monastère de la Visitation de la ville de Rouen.)

Il loue une de ses nièces de la ferveur de sa dévotion; il l'encourage à persévérer, et la console sur des tentations d'amour-propre qu'elle éprouvait.


11 avril 1614.

J'aime mieux vous écrire sans loisir ni commodité, que de l'attendre plus longtemps, ma très-chère nièce, ma fille. Votre lettre m'a fort plu, parce que j'y vois les marques de votre résolution de persévérance au dessein de servir à jamais notre Seigneur avec toute la pureté et fidélité que vous pourrez. Que bienheureux est un coeur, ma chère fille, qui se dédie à une affection si juste et si sainte. Plus nous irons avant, plus nous reconnaitrons la grandeur de la grâce que le Saint-Esprit nous fait de nous donner ce courage.

Et, bien que quelquefois vous receviez des secousses de l'amour-propre et de votre imbécillité, ne vous en troublez point; car Dieu le permet ainsi, afin que vous lui serriez la main, que vous vous humiliiez et réclamiez son secours paternel.

L'espérance de vous voir avec madame la première.... m'excuse de vous parler plus long par écrit, principalement pressé comme je suis. Saluez, je vous prie, de ma part madame de la Fié-chère, et toutes deux ensemble madame de N., si elle est là.

Je suis sans réserve, d'un coeur tout fidèle, votre, etc.



LETTRE CCLIX, A MADAME D'ESCRILLES

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Il console une dame, en lui faisant envisager les croix comme le chemin delà perfection, et il l'engage d'en profiter par l'exemple de Jésus-Christ.

30 avril 1614.

L'autre jour que la bonne M. de Treverney fut icy, je sçeu plus amplement la variété des travaux parmi lesquels vous vivez, ma très-chère seur ma fille, et certes, j'en eus de la compassion mais plus de consolation encores, sur l'espérance que j'ay.,. que Dieu vous tiendra de sa main, et vous conduira (cf.
Ps 73,24) par ce chemin qu'il a frayé, à beaucoup de perfection, car je veux croire, ma chère seur, que vous voulez demeurer éternellement liée à la très-sainte volonté de cette divine majesté, et que vous luy avez consacré toute vostre vie ; m.

et cela étant ainsy, quelle grâce d'être non-seulement sous la croix, mais sûr la croix et au moins un peu crucifiée avec nostre Seigneur. Ayez-bien courage, ma chère seur, convertissez la nécessité en vertu, et ne perdez pas l'occasion de bien témoigner vostre amour envers Dieu parmi les tribulations, ainsy qu'il témoigna le sien envers nous parmi les espines. Mon âme souhaite le comble de toute sainteté à la vostre, et suis d'une affection invariable vostre humble tres-affectionné frère et serviteur.

Le porteur va prendre M. de Charmoysi à une journée de Masan.



LETTRE CCLX, A MADAME DE CHANTAL.

975
Réflexions religieuses sur le saint-suaire.

4 mai 1614.

En attendant de vous voir, ma très-chère mère, mon âme saine la vôtre de mille-et mille souhaits, que Dieu la remplisse toute de la vie et mort de son fils notre Seigneur.

J'étais il y a un an, et environ ces heures, à Turin; et montrant le saint-suaire parmi un si grand peuple, plusieurs gouttes de la sueur qui tombait de mon visage rencontrèrent dedans le saint-suaire même ; et notre coeur sur cela fit ce souhait : Hé! plaise à vous, Sauveur de ma vie, mêler mes indignes sueurs avec les vôtres, et détremper mon sang, ma vie, mes affections dedans les mérites de votre sacrée moiteur!

Ma très-chère mère, le prince cardinal se cuida fâcher de quoi ma sueur dégouttait sur le saint-suaire de mon Sauveur : mais il me vint au coeur de lui dire que notre Seigneur n'était pas si délicat, et qu'il n'avait point répandu de sueur ni de sang que pour les mêler avec les nôtres, afin de leur donner le prix de la vie éternelle. Ainsi puissent nos soupirs s'allier aux siens, afin qu'ils montent en odeur de suavité devant le Père éternel !

Mais de quoi me vais-je souvenir? J'ai vu que quand mes frères étaient malades en leur enfance, ma mère les faisait coucher dans la chemise de mon père, disant que les sueurs des pères étaient salutaires aux enfants. O que notre coeur se couche en cette sainte journée dans le suaire de notre divin père, enveloppé de ses sueurs et de son sang ; et que là il soit, comme la mort même de ce divin Sauveur, enseveli dans le sépulcre d'une invariable résolution de demeurer toujours mort en soi-même, jusqu'à ce qu'il ressuscite en la gloire éternelle. Nous sommes ensevelis, dit l'a- pâtre, avec Jésus-Christ en la mort d'icelui, afin que nous ne vivions*plus de la vieille vie, mais de la nouvelle (
Rm 6,4). Amen.




LETTRE CCLXI, AU DUC DE SAVOIE, CHARLES EMMANUEL I.

978
Il lui témoigne sa satisfaction de ce que le duc de Savoie, ayant consenti à établir les chartreux dans son diocèse, leur destine l'abbaye de Ripaille, et le presse d'exécuter son projet au plus tôt.

Annecy, 12 juin 1614.

Monseigneur, lorsque j'eus l'honneur de faire la révérence à votre altesse, il y a un an, je lui proposai de faire loger les révérends pères chartreux en l'abbaye de Filly en Chablais, pour l'accroissement de la dévotion qu'un si saint ordre ferait en ce pays-là, et pour l'ornement que la réparation d'une abbaye si remarquable y apporterait.

Mais depuis, ayant su que votre altesse avait jeté ses yeux et son désir sur Ripaille pour le même effet, je m'en suis infiniment réjoui; et en toute humilité je la supplie d'en ordonner au plus tôt l'exécution, afin que nous voyions en nos jours la piété rétablie en un lieu qui a été rendu tant signalé par celle que messeigneurs les prédécesseurs mêmes de votre altesse y ont si saintement et honorablement pratiquée.

Assurant qu'en meilleures mains le généreux et pieux dessein de cette restauration ne pourrait être confié qu'en celles d'un ordre si ferme et constant, comme ost celui des chartreux, lequel, ayant toujours, été dès son commencement fort obligé à la sérénissime maison de votre altesse, lui a aussi réciproquement-toujours été et est très-affectionné et dédié. Et tandis je continue de supplier incessamment la divine majesté qu'elle répande à jamais toutes ses plus chères bénédictions sur la personne et la couronne de votre altesse, de laquelle je suis, monseigneur, très-humble, etc.




LETTRE CCLXII, A Mme DE LA FLÉCHERE.

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(Communiquée par M. de La Garde, auditeur des comptes.)

Nouvelles de choses temporelles.

Annecy, 13 juin 1614.

Ce billet écrit à l’impourvu vous saluera, ma très-chère fille, de la part de mon âme, qui aime parfaitement la vôtre en notre Seigneur. Je n'ai eu nul moyen de répondre à vos lettres jusqu'à présent. Mercredi nous allons faire le baptême du petit neveu, et la grande nièce se porte beaucoup mieux.

Nous pensons y avoir monsieur et madame de Charmoisy ; car, encore que mon frère ne le sache pas, étant néanmoins tous les deux à Dalmaz, pour les noces de mademoiselle de Dalmaz, il y a de l'apparence qu'ils viendront à Prêtez, où étant, il n'y aurait pas de l'apparence de ne les suppléer pas, principalement parce que nous n'avons encore point vu la chère cousine.

Or sus, cependant allez bien doucement sur le pavé de Chambéri à la sollicitation de votre affaire; mais je dis bien doucement, car c'est l'importance.

Madame notre soeur de Bons est à la Visitation, mais je ne l'ai encore point vue. Madame de Creville pense être reçue le jour de la Visitation. Saluez, je vous prie, de tout mon coeur notre soeur madame de Bressieu, et M. de la Valbone, et M. d'Aguebelette. Je suis sans fin tout vôtre en notre Seigneur.



LETTRE CCLXIII, AU DUC DE BELLEGARDE, HOMME DE LA COUR.

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Il l'encourage à persévérer dans la sainte résolution qu'il avait prise de servir Dieu.

Annecy, 31 juillet 1614.

Monsieur,

1. j'ai reçu la lettre par laquelle votre grandeur s'abaisse jusqu'à me conjurer que désormais je l'appelle mon fils : et ma petitesse s'élève bien aussi jusque-là que de le vouloir faire; et pensez que je le puis sans faire tort à ce que vous êtes.

Bien qu'à la vérité ce sera chose rare de voir la disproportion d'un si chétif père avec un enfant si relevé; mais la nature même, qui est si sage, a bien fait une pareille singularité en une plante que les arborâtes nomment communément le fils avant le père (1), parce qu'elle pousse son fruit avant ses fleurs.

Et puis vous ne regardez pas, comme je pense, ma personne, mais cet ordre sacré duquel elle est douée, qui est le premier de tous les ordres en l'Église, de laquelle vous avez cet incomparable honneur et bonheur d'être un membre vivant (cf.
Ep 5,30), et non-seulement vivant, mais animé de l'amour sacré, qui seul est la vie de notre vie, comme vos bons désirs le témoignent.

Or sus donc, monsieur, je vous appellerai désormais mon fils ; mais parce que vous seriez ennuyé de voir toujours des protestations du respect avec lequel j'userai de ce terme d'amour, je vous veux dire une fois pour toutes que je vous nommerai mon fils avec deux différentes mais accordantes affections, dont Jacob appela deux de ses enfants, fils.

Car voyez-vous, monsieur, il appela son cher Benjamin son fils avec un coeur si plein d'amour, que pour cela on a depuis appelé ainsi tous les enfants bien-aimés de leurs pères.

Mais son cher enfant Joseph, devenu vice-roi en Egypte, il l'appela son fils avec un amour si plein d'honneur, que pour ce grand honneur il est dit que même il l'adora (cf. Gn 37,9): car si bien ce fut en songe, ce ne fut pas en mensonge, mais en vérité, que ce grand gouverneur d'Egypte avait vu, lors de son enfance, que son père, sous le signe du soleil, lui faisait une profonde révérence que l'Écriture sainte appelle du nom d'adoration (cf. Gn 37,9).

2. Voilà donc comme je proteste de vous appeler mon fils, et comme mon Benjamin d'amour, et comme mon Joseph d'honneur. Ainsi ce mot de fils sera plus plein d'honneur, de respect et de révérence que celui de monsieur, mais d'une révérence toute détrempée en l'amour, pour le mélange duquel elle répandra en mon âme une suavité qui n'aura point d'égale. C'est pourquoi, je n'ajouterai point au nom de fils celui de monsieur, sinon quelquefois, parce qu'il n'en sera pas besoin, l'un étant plus exquisement compris en l'autre qu'il ne saurait être exprimé.

Que d'aise, mon cher fils, quand on me dit que vous êtes le seigneur au grand coeur, qui, emmi ces vaines vanités de la cour, demeurez ferme en la résolution que ce coeur a prise de contenter celui de Dieu! Hé! si faites, mon cher fils, persévérez à communier souvent, et à faire les autres exercices que Dieu vous a si souvent inspirés.

3. Le monde croit vous avoir déjà perdu : il ne vous tient plus des siens. Il se faut bien garder qu'il ne vous regagne ; car ce serait vous perdre du tout, que de vous laisser gagner à cet infortuné, que Dieu a perdu et perdra éternellement. Le monde vous admirera, et, malgré sa mauvaise humeur, il vous regardera par honneur quand il vous verra emmi ses palais, ses galeries, ses cabinets, conserver soigneusement les règles de la dévotion, mais dévotion sage, sérieuse, forte, invariable, noble et toute suave. Ainsi soit-il, mon cher fils, qu'à jamais Dieu soit votre grandeur, et le monde votre mépris: et je suis ce père qui vous aime comme son Benjamin, et vous honore comme son Joseph.

(1) Filius ante patrem, c'est le nom sous lequel on désigne quelquefois le tussilage ou pas d'âne, qui a effectivement cette propriété.


LETTRE CCLXIV, AU ROI DE FRANCE LOUIS XIII (minute).

974
Le Saint le remercie d'une aumône qu'il avait faite à l'église de Gex.

Annecy, février-mai 1614

Sire, rien n'est caché à la chaleur du soleil en ce monde (cf.
Ps 18,7): rien non plus n'est éloigné du soin des bons rois en leurs monarchies. C'est pourquoi votre majesté a regardé l'église de Gex, qui est sur le fin bord du royaume, et, la voyant extrêmement misérable, lui a ordonné aumône de trois cents écus, pour laquelle je vais maintenant en esprit, avec tous les catholiques de ce lieu-là, en faire action de grâce à votre charité royale, sire, laquelle nous supplions en toute humilité nous vouloir donner la jouissance de ce bienfait, duquel nous avons déjà la concession, pour laquelle nous implorerons à jamais la souveraine bonté de notre Seigneur, qu'elle conserve et prospère votre majesté en l'abondance des grâces célestes. C'est le souhait perpétuel, sire, de votre très-humble, etc.



LETTRE CCLXV, AU ROI DE FRANCE LOUIS XIII.

987
(Tirée du séminaire d'Issy près Paris.)

Il le remercie d'une gratification de trois cents écus que sa majesté avait donnés pour la réparation de quelques églises du bailliage de Gex.

Annecy, 31 juillet 1614.

Sire, les catholiques de Gex et moi avons reçu les trois cents écus d'aumône que votre majesté a donnés pour la réparation des églises, avec une très-humble révérence et action de grâces, non-seulement parce que les faveurs qui proviennent de si haut lieu sont toujours de grand estime, mais aussi parce que ce sont comme des arrhes de plus grands bienfaits pour l'avenir, dont nous en espérons que la royale bonté de votre majesté regardera de son oeil propice la misère à laquelle l'hérésie a réduit ce pauvre bailliage, pour répandre à son secours les grâces et assistances qui lui peuvent servir de remède. Ainsi Dieu soit à jamais le protecteur de votre majesté, sire, pour la combler des saintes bénédictions que lui souhaite votre très-humble, etc.



LETTRE CGLXVI, A DON BRUNO D'AFFRINGUES, GENERAL DES CHARTREUX.

992
(Tirée du monastère de la Visitation de Loudun.)

Il lui demande une lettre de recommandation pour une demoiselle qui postulait une place.

Annecy, 7 août 1614.

Mon très-révérend père, outre l'humble remerciement que je dois et fais à votre révérence, pour le bon accueil qu'il vous plut de faire à la supplication que je vous présentai il y a quelque temps en recommandation de la fille de M. de Lornay des Costes, j'ajoute encore mon intercession à meme intention, afin qu'il vous plaise faire le billet requis au père dom vicaire de Melun, qui a dit audit sieur de Lornay, que, moyennant cela, sa fille serait assurée de sa place.

Or sus, je ne fais, nulle difficulté de m'obliger à votre bonté de plus en plus, parce que aussi-bien vous dois-je déjà tout ce que je suis et puis être, à raison de tant de faveurs que vous m'avez départies ci-devant, et surtout pour cette rare bienveillance de laquelle vous rendez tant de témoignages à mes amis, qu'ils m'en glorifient tous extrêmement, que je vous conjure de me continuer, puisque,vous souhaitant sans fin toutes sortes de saintes félicités, je suis d'une affection très-parfaite, mon très-révérend père, votre très-humble, etc.



LETTRE CCLXVII, A MADAME CLAUDINE DE BLONAY, ABBESSE DE SAINTE CLAIRE D'EVIAN.

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Il la félicite de ce que l'exercice de l'oraison mentale a été introduit dans son monastère, parce que sans cela les trois voeux de religion ne peuvent être que mal gardés. Avantages de la lecture des oeuvres de sainte Thérèse. Un bon confesseur peut faire un grand bien dans une communauté.


Annecy, 18 août 1614.

Ma très-chère soeur,

1. à cette première fois que je vous écris, je vous veux dire deux ou trois mots de préface, qui puissent servir pour toutes les lettres que je vous enverrai désormais selon les occurrences.
1. Que ni vous ni moi n'y fassions plus aucune, préface ; car l'amour de Dieu que vous avez sera une préface envers vous ; et le désir que j'ai de l'avoir sera votre préface envers moi.
2. En vertu de ce même amour ou possédé ou désiré, assurez-vous, ma chère soeur, que vous et toutes nos filles trouverez toujours mon âme ouverte et dédiée au service des vôtres.
3. Mais tout cela sans cérémonies, sans artifices, d'autant qu'encore que nos vocations soient différentes en rang, ce saint amour auquel nous aspirons nous égale et unit en lui.

2. Certes, ma très-chère soeur, et vous et vos filles êtes très heureuses d'avoir enfin rencontré la veine de celle eau vivante qui rejaillit à la vie éternelle (
Jn 4,10-15), et de vouloir en boire de la main de notre Seigneur, auquel, avec Ste Catherine de Gênes, et la bienheureuse mère Thérèse, il me semble que vous faites cette prière Seigneur, donnez-moi de celle eau (Jn 4,15).

Qu'à jamais cette bonté divine soit louée, qui lui-même s'est rendu une source d'eau vive au milieu de votre compagnie : car à ceux qui s'adonnent à la très-sainte oraison de notre Seigneur est une fontaine en laquelle on puise par l'oraison l'eau de lavement, de réfrigère, de fertilité et de suavité.

Dieu sait, ma très-chère soeur, quels sont les monastères èsquels ce saint exercice n'est point pratiqué ; Dieu sait quelle obéissance, quelle pauvreté et quelle chasteté y est observée devant les yeux de sa divine providence, et si les assemblées des filles ne sont plus plutôt des compagnies de prisonnières que de vraies amoureuses de Jésus-Christ.

Mais nous n'avons pas tant besoin de considérer ce mal-là, que de peser au juste poids le grand bien que les âmes reçoivent de la très-sainte oraison. Vous n'êtes donc point trompées de l'avoir embrassée; mais trompées sont les âmes qui, s'y pouvant appliquer, ne le font pas.

Et néanmoins en certaine façon (à ce que je vois) le doux Sauveur de vos âmes vous a trompées d'une tromperie amoureuse, pour vous tirer à sa communication plus particulière, vous ayant liées par des moyens que lui seul a su trouver, et conduites par des voies que lui seul avait connues. Relevez donc bien haut votre courage, pour suivre soigneusement et saintement ses attraits ; et, tandis que la vraie douceur et humilité de coeur régneront parmi vous, ne craignez point d'être trompées.

3. Le frère N. est un vrai ignorant, mais ignorant qui sait plus que beaucoup de savants : il a les vrais fondements de la vie spirituelle, et sa communication ne vous peut qu'être utile ; je m'assure que son supérieur ne vous le refusera pas tandis que vous en userez avec discrétion, et sans lui donner trop de distraction.

Je n'ai pu encore lire les livrets que vous m'avez envoyés, ce sera à mon premier loisir.

Vous avez bien fait de vous apprivoiser avec la bienheureuse mère Thérèse, car en vérité ses livres sont un trésor d'enseignements spirituels :

4. surtout, faites régner entre vous la dilection mutuelle, franche et spirituelle ; la communauté parfaite tant aimable et si peu aimée en ce siècle, même ès monastères que le monde admire ; la sainte simplicité, la douceur de coeur et l'amour de la propre abjection : mais ce soin, ma très-chère soeur, il faut qu'il soit diligent et ferme, et non empressé, ni à secousses.

Je serai bien aise de savoir souvent de vos nouvelles, et ne doutez point que je ne vous réponde. M. N. me fera tenir prou vos lettres.

5. En particulier, ce m'a été de la consolation de savoir la bonté et vertu de votre père confesseur, qui, avec un esprit vraiment de père envers vous, coopère à vos bons désirs, et est encore bien aise que les autres y contribuent. Plût à Dieu que tous les autres de votre ordre fussent aussi charitables et affectionnés à la gloire de Dieu ; les monastères qui sont en leur charge seraient plus parfaits et plus purs.

Je resalue mes chères soeurs Anne et Marie-Salomé, et me réjouis de quoi elles sont entrées en cette religion en un temps auquel la vraie et parfaite piété commence à y refleurir; et pour leur consolation, je leur dis que leur parente madame Des-crilles, qui est maintenant novice à la Visitation, tache aussi fort de son côté de s'avancer en notre Seigneur.

Ma très-chère soeur, je vous écris sans loisir, mais non pas sans une infinie affection envers vous et toutes vos filles, que je supplie toutes de recommander mon âme à la miséricorde de Dieu, comme de ma part je ne cesserai point de vous souhaiter bénédiction sur bénédiction, et que la source de toute bénédiction vive et règne à jamais au milieu de vos coeurs. Amen.

Je suis, d'un amour tout cordial, votre très-humble, etc.



LETTRE CCLXVUI, A M. JEAN-PIERRE CAMUS, ÉVÊQUE DE BELLEY.

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Il l'encourage à soutenir l'embarras des procès pour la conservation des biens et des libertés ecclésiastiques, et lui recommande les intérêts du diocèse de Genève aux états de Bourgogne, où il allait assister.

 Annecy, 22 août 1614.

Monseigneur,

1. je me réjouis, certes, de vos victoires ; car, quoi que l'on sache dire, c'est la plus grande gloire de Dieu que notre ordre épiscopal soit reconnu pour ce qu'il est, et que cette mousse des exceptions soit arrachée de l'arbre de l'Église où l'on voit qu'elle a fait tant de mal, ainsi que le saint concile de Trente a fort bien remarqué.

Mais je regrette pourtant que votre esprit pâtisse tant en cette guerre, en laquelle, sans doute, il n'y a presque que les anges qui puissent conserver l'innocence : et qui tient la modération emmi les procès, le procès de sa canonisation est tout fait pour lui, ce me semble : Sapere et amare vix diis conceditur ; mais je dirais plus volontiers : Litigare et non insanire vix sanctis conceditur. Néanmoins, quand la nécessité le requiert, et que l'intention est bonne, il faut s'embarquer sous l'espérance que la Providence méme, qui vous oblige à la navigation, s'obligera elle-même à vous conduire.

Tout mon plus grand déplaisir, c'est de voir qu'enfin cette amertume de coeur, que vous me dépeignez, vous ravira d'auprès de nous, et me ravira une des plus précieuses consolations que j'eusse, et à ce peuple un bien inestimable : car des prélats affectionnés, il y en a si peu : apparent rari nantes in gurgite vasto (1 ). Salvum me fac, Domine, quoniam defecit sanctus (
Ps 11,1).

2. Je vois bien, monseigneur, par votre lettre et par celle de M. de N., qui, eu vérité, est fort mon ami, et bon père très-singulier, que nous ne saurions conserver les libertés ecclésiastiques que les ducs nous avaient laissées es pays étrangers. 0 ! Dieu bénisse la France de sa grande bénédiction, et y fasse renaître la piété qui régnait du temps de S. Louis.

Mais cependant, monseigneur, puisque ce pauvre petit clergé de votre évéché et du mien a le bonheur que vous parliez en son nom aux États, nous serons délivrés de tout scrupule, si après nos remontrances nous sommes réduits en la servitude ; car que pourrait-on faire davantage, sinon crier au nom de l'Église : Vide, Domine, et considera, quoniam facta sum vilis (Lm 1,11). Quelle abjection que nous ayons le glaive spirituel en main (cf. Ep 6,17), et que, comme simples exécuteurs des volontés du magistrat temporel, il nous faille frapper quand il l'ordonne, et cesser quand il nous le commande ; et que nous soyons privés de la principale clef de celles que notre Seigneur nous a données (cf. Mt 16,19), qui est celle du jugement, du discernement et de la science en l'usage de notre glaive ! Manum suam misit hostis ad omnia desiderabilia ejus ; quia vidit gentes ingressas sanctuarium tuum, de quibus praeceperas ne intrarent in ecclesiam tuam (Lm 1,10).

Ce n'est pas avec un esprit d'impatience ni de murmuration que je dis ceci ; je me ressouviens toujours que ista mala invenerunt nos, quia peccavimus, injuste egimus. Or sus pourtant, monseigneur, vous verrez nos articles, et ferez, je m'assure, tout ce qui se pourra pour la conservation des droits de Dieu et de son Église ; et tandis que notre Josué sera là, nous tiendrons les mains haussées (cf. Ex 17,10-12), et prierons qu'il ait une spéciale assistance du Saint-Esprit ; nous invoquerons les anges protecteurs, et les saints évéques qui nous ont précédés, qu'ils soient autour de vous, qu'ils animent vos remontrances.

De vous envoyer quelqu'un de la part de mon diocèse, il n'en fut jamais question. Mon diocèse n'est-il pas vôtre, puisque je le suis si parfaitement : Populus meus, populus tuus. Vous verrez le père dom Jean de Saint-Malachie à Saint Bernard ; si vous le hantez, vous trouverez en lui une veine féconde de piété, de sagesse, et d'amitié pour moi, qui l'honore réciproquement bien fort. De madame Falin dites-moi un jour à loisir l'histoire, parce que gloriam regis annuntiare justum est. Dieu soit à jamais le coeur de nos âmes. Je suis, monseigneur, votre, etc.


(I) Virg, Énéid.



LETTRE CCLXIX, A SON ALTESSE MADAME MARGUERITE, INFANTE DE SAVOIE, VEUVE DE M. LE DUC DE MANTOUE (minuta).

935
Il la supplie de prendre sous sa protection spéciale les dames de la Visitation de la ville d'Annecy, de leur procurer les lettres-patentes, et de permettre que la première pierre de leur oratoire soit posée en son nom.



Annecy, fin novembre 1613 - Avant le 18 septembre 1614.

Serenissima signora,

1. si è fatta in Annecy una congregazione di dame honoratissime, parte vedove, parte zittelle, leq uali scariche delle cose del mondo, attendono con grandissima pietà e edificazione al servizio del Signor Iddio, recitando ogni di le ore della sacratissima Vergine insieme nel suo coro, facendo ogni di l'orazione mentale, vivendo in ubbidienza, sotto il governo di una superiore, che esse hanno eletta, e osser-vando una esattissima abnegazione délle cose terrene, come si suole nelli monasterii più rifor-mati. Le giovani non escono mai délia casa, nella quale non v'entrano noinini : ma solamente le vecchie e mature, per soccorso degfinfermi, massime donne, le quali quando sono pôverc, paliscono molto in quella cita, non essendovi se non un pouvero ospitale, che non lia modo di fare molta carità a dette inferme.

2. Ora essendosi formata quella congregazione a similitudine d'altre simili, stabilité in Milano, dal gran servo d'Iddio S. Carlo, ed avendo com-prata una casa, e desiderando tuttavia, fabbricar un oratorio al nome della santissima visitazione délia beatissima Vergine, nel quale pur vi sia una capella, che si dedicherà sotto il nome del beato Amedeo, quando sara canonizzato, si supplica V. A. serenissima, che si degni accetave, et recevere detta congregazione nella sua specialissima pro-tezione, acciô che sotto l'ombra del suo serenis-simo nome, e col favor della sua carità, possa con tranquillità e pace interiore et esteriore attendere alle cose celesti, per il che sarebbe necessario.

I° Che V. A. serenissima, oper lettere patenti, o per lettere chiuse, manifestasse che ella riceve c piglia in protezione detta congregazione e cias-cheduna délie sorelle, o sia no dame, che in essa saranno, adesso e per l'avvenire.

II° Che V. A. serenissima faccia con lettere saper questa sua intenzione al signor march. di Lans, e al senato di Savoja, acciô dove occorrerà essi ahbiano cura di detta congregazione.

III° Sarebbe anco conveniente, che simili lettere si scrivessero dall altezza del serenissimo signor duca nostro signore, per le quali facesse sapere che detta congregazione essendo per ordine suo nella protezione di V. A. vuole che sia negli stati suoi, favorita e conservata.

Il che è tanto più ragionevole, che detta congregazione non mendica, anzi si stabilisse a spese delle dame congregate, ne prétende giammai aver entrata, se non per mantener gli edifici, la sacrestia, il cappellano, e pagar il medico loro, o per via de censi perpetui, o in altre manière che non facciano aggravio a nessuno, ne diano impedimento alcuno alli dazii, overo taglie del serenissimo duca. Anzi detta congregazione essendo, come si spera, fra pochi anni dotata di quella en-trata per quelle cose comuni, le vedove scariche di figlioli, e le vergini che vorranno in castità, ubbidienza, et pietà servir il Signor Iddio, avranno grandissima comodità di ciô fare, perche saranno ricevute in detta congregazione, mediante una sola pensione assegnatale dalla casa loro, mentre viveranno.

Onde V. A. serenissima farà cosà gratissima alla maestà divina, e alla sua santissima Madré nostra Signora, se ricevendo questa pia congregazione nelle braccia della sua protezione, essa si degna chiamare signora, patrona e madré.

3. E perché ben presto spera detta congregazione di fabbricare l'oratorio suo, e clic le sarebbe uu'onor e consolazione d'importanza, che à nome di V. A. serenissimasi mettesse la prima pietra ; si supplica per fine, che degni commandar a qual-che dama di quelle bande, di venir costi da parte di V. A. ed assistere alla posizione di detta'pietra, îiiettendovi la medaglia solita, taie che V. A. si compiacerà di no tare.

Che cosi V. A. avrà sempre ottima parte in tutte le bone opère che in detta congregazione, c detto oratorio si faranno, massime nelle ora-zioni di quelle dame, che giorno e notte invo-cheranno lo Spirito santo per l'eterna consolazione di V. A.



Madame, nous avons en cette ville d'Annecy une congrégation de très-honorables dames, les unes veuves, les autres filles, qui, n'ayant que du dégoût pour le monde, s'adonnent au service de Dieu avec une très-grande piété et une singulière édification. Elles récitent toutes ensemble au choeur les heures de la très-sacrée Vierge, font l'oraison mentale, et vivent dans l'obéissance sous le gouvernement d'une supérieure qu'elles ont élue. De plus, elles observent une très-grande abnégation des biens de la terre, comme il se pratique dans les monastères les plus réguliers. Les jeunes ne sortent point de la maison (où les hommes, d'ailleurs, n'entrent jamais sous aucun prétexte), mais seulement les plus âgées et les plus sages, et c'est pour le secours des infirmes, principalement des pauvres femmes, qui, ayant de grands besoins, ont beaucoup à souffrir en cette ville, où il n'y a qu'un pauvre hôpital, qui n'a pas assez de revenu pour faire de grandes charités.

Cette congrégation s'est formée sur le modèle d'autres semblables établies dans le Milan par ce grand serviteur de Dieu, le glorieux S. Charles. Elles ont déjà une maison ; mais, désirant néanmoins faire construire un oratoire en l'honneur de la très-sainte Visitation de la bienheureuse Vierge, dans lequel il y aura une chapelle sous le nom du bienheureux Amédée, lorsqu'il sera canonisé, votre altesse sérénissime est très-humblement suppliée de prendre cette congrégation sous sa protection spéciale, afin, qu'à l'ombre de son nom et à la faveur de sa charité, elle puisse vaquer aux choses célestes avec tranquillité, n'ayant rien qui la trouble ni au-dedans ni au-dehors.

A quoi il sera nécessaire,

1° Que votre altesse sérénissime déclare par lettres patentes, ou par lettres de cachet, qu'elle reçoit et prend sous sa protection cette congrégation en entier, et chacune des soeurs ou dames en particulier, tant pour le présent que pour l'avenir ;

2° Que votre altesse sérénissime fasse savoir son intention à M. le marquis de Lans et au sénat de Savoie, afin que dans les occurrences ils prennent les intérêts de ladite congrégation;

5° Il serait encore à propos que son altesse sérénissime monseigneur le duc de Savoie envoyât de semblables lettres, par lesquelles il signifiât que cette congrégation s'étant mise sous la protection de votre altesse, c'est aussi sa volonté qu'elle soit favorisée et conservée en ses états.

Et cela est d'autant plus raisonnable, que cette congrégation ne mendie point d'aumônes, mais s'établit en telle sorte que les dames qui s'y rendent ne prétendent pas y avoir entrée, sinon pour contribuer aux entretiens, tant des bâtiments et de la sacristie; que du chapelain et du médecin,, soit par le moyen des rentes perpétuelles, soit par toute autre voie semblable, qui ne fasse aucun dommage à personne, et qui ne mette nul empêchement aux dasces ou tailles du sérénissime duc ; et même ladite congrégation sera, comme j'espère, dans peu d'années, dotée de revenus suffisants pour l'entretien de la communauté: si bien que les veuves qui seront sans enfants, et les filles qui voudront servir Dieu dans la chasteté, l'obéissance et la piété, auront une grande facilité à y entrer, y étant reçues moyennant une pension que leur famille leur assignera leur vie durant, sans qu'on en exige rien de plus.

Cela étant ainsi, votre altesse sérénissime fera une chose très-agréable à là divine majesté et à sa très-sainte Mère-Notre-Dame, si, recevant cette dévote congrégation entre les bras de sa charité, elle daigne s'en avouer la dame, la patronne et la mère.

Et parce que ladite congrégation espère bientôt bâtir l'oratoire, ce lui sera un grand honneur et une grande consolation que la première pierre soit posée au nom de votre altesse sérénissime ; c'est pourquoi je la supplie, en finissant, qu'elle daigne envoyer quelque dame de sa cour pour assister à la cérémonie, et y mettre la médaille accoutumée, telle qu'il plaira à votre altesse de la marquer.

Ainsi elle aura toujours la meilleure part dans toutes les bonnes oeuvres qui se feront en ladite congrégation et dans l'oratoire, principalement aux oraisons de ces dames, qui jour et nuit invoquent le Saint-Esprit pour l'éternelle consolation de votre altesse, de laquelle j'ai l'honneur d'être, madame, le très-humble, etc.




F. de Sales, Lettres 964