Pie XII 1939 - III


ALLOCUTION AU CONSEIL SUPÉRIEUR DES OEUVRES MISSIONNAIRES PONTIFICALES

(30 avril 1939) 1

Recevant les membres du Conseil supérieur des OEuvres missionnaires pontificales, le Saint-Père leur adressa ces paroles de félicitations et d'encouragement :

S'il Nous est toujours très agréable de recevoir des fils, Notre âme éprouve aujourd'hui une joie spéciale en vous recevant, Nos très chers fils, et en adressant la parole à des fils tels que vous, qui dirigez dans vos différentes nations les oeuvres missionnaires pontificales, ou qui, demeurant à Rome, appartenez au Conseil supérieur des oeuvres pontificales de la Propagation de la Foi et de Saint-Pierre-Apôtre. Représentant sur la terre, tout indigne que Nous soyons, le Pasteur éternel, Nous sentons qu'elles Nous concernent aussi ces paroles qui révèlent l'abondance de son amour pour le genre humain : « J'ai d'autres brebis qui ne sont pas de cette bergerie et il faut que je les amène... et il n'y aura qu'un bercail et qu'un pasteur » (Jn 10,16). Nous remémorant cette parole du très doux Rédempteur, Nous Nous sentons enflammé de ses désirs et Nous implorons le Saint-Esprit par de suppliantes prières, afin qu'il ouvre les voies du salut à ces multitudes d'hommes qui sont encore opprimés par la servitude de l'idolâtrie et enfoncés dans les vieilles erreurs, et les fasse participer à notre espérance et à notre grâce. Prêchant avec l'apôtre saint Paul que « les Gentils sont cohéritiers, membres d'un même Corps, et participants de la promesse (de Dieu) en Jésus-Christ par l'Evangile » (Ep 3,6), Nous n'épargnerons aucune fatigue pour que l'éclat de la religion catholique brille aussi sur les peuples séparés et que la croix, dans laquelle sont le salut et la vie, étende son ombre jusqu'aux rivages les plus éloignés du monde.

Dans ce but, il est très important que l'Eglise soit établie dans chaque peuple et qu'elle soit pourvue d'un grand nombre de ministres sacrés recrutés dans la population indigène. D'un labeur apostolique aussi élevé, vous êtes, Nos très chers fils, les coopérateurs diligents et précieux employant toutes vos forces à l'extension du règne de Dieu. Nous connaissons bien les fruits de votre activité, plus abondants chaque année malgré les multiples et sérieuses difficultés que vous rencontrez. Mais la piété sait vaincre l'âpreté du chemin, et, ainsi qu'il arrive généralement pour les choses importantes et agréables à Dieu, « le champ se verra peu à peu dorer par les tendres épis » 2.

Et comme l'oeuvre pontificale de Saint-Pierre-Apôtre pour le clergé indigène célèbre le cinquantenaire de sa fondation, Nous sommes heureux d'avoir cette occasion de féliciter et d'approuver une aussi bienfaisante entreprise et de lui souhaiter d'importants succès et progrès. Continuez, Nos très chers fils, à consacrer tous vos efforts aux activités missionnaires, et puisque la charité se refroidit malheureusement dans le monde, parce que « les vérités ont diminué parmi les fils des hommes » (Ps 11,2), montrez par votre exemple que les habitants de la terre ne vivent pas pour se combattre, consumés par l'envie, avec des armes fratricides, mais pour que, appelés à l'éternelle félicité, ils sachent, par des liens sacrés, s'unir à Dieu et entre eux.

Le but assigné par Dieu à la communauté humaine, c'est l'amour, c'est la paix, c'est la concorde et l'unité. Puissent-ils donc tous ceux qui portent le nom de chrétien, guidés par votre direction et enflammés par vos exhortations, diffuser largement le parfum de la douceur évangélique ; qu'ils soient, dans la mesure donnée à chacun, « des porte-Dieu, des porte-temple, des porte-Christ » 3, sous les auspices de saint Joseph, époux de la bienheureuse Vierge Marie et patron de l'Eglise, dont nous célébrons, cette semaine, la solennité. C'est lui-même qui tient la Fleur des vallées et le Pain de la vie, qu'il vous tend pieusement, pour que vous le donniez aux autres.

Invoquant toutes sortes de faveurs célestes sur vous, Nos très chers fils, et sur les fidèles qui se dévouent généreusement avec vous a la cause des missions, Nous bénissons de tout coeur vos travaux et vos intentions.



2 Virgile, Egi., IV.

3 S. Ignace d'Antioche, ad Eph., 9, 2.






DISCOURS AUX JEUNES ÉPOUX

(3 mai 1939) 1

JEUNES ÉPOUX

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Le sens de l'attitude de Jésus aux noces de Cana.

Votre présence, très chers époux, rappelle à votre mémoire et à la Nôtre le geste à la fois si délicat et si puissant relaté dans le saint Evangile : le geste de Notre-Seigneur Jésus-Christ qui assiste aux noces de Cana en Galilée et qui opère en cette occasion son premier miracle. Jésus présent à un repas de noces avec sa très sainte Mère et ses premiers disciples : ce n'est certes pas sans de profondes raisons que le divin Maître daigne accepter avec bienveillance pareille invitation. C'est là qu'il donna, pour confirmer sa divine mission et soutenir la foi de ses premiers disciples, le premier signe de sa toute-puissance, et c'est là que commença à se manifester la puissante médiation de Marie auprès de Dieu en faveur des hommes.

Mais lui, le bon Maître, voulut par sa présence apporter une bénédiction toute particulière à ces heureux époux, et comme sanctifier et consacrer cette union nuptiale, de même que lors de la Création le Seigneur avait béni les premiers parents du genre humain. En ce jour des noces de Cana, le Christ embrassait de son divin regard les hommes de tous les temps à venir et en particulier tous les enfants de sa future Eglise ; il bénissait leurs noces et accumulait les trésors de grâces que par le grand sacrement de mariage il allait déverser avec une largesse toute divine sur les époux chrétiens.

Jésus-Christ a béni et consacré aussi vos noces, chers époux, et la bénédiction que vous avez reçue à l'autel, vous voulez la voir confirmée et comme ratifiée aux pieds de son Vicaire sur terre ; c'est à cette intention que vous êtes venus à lui.

Nous vous donnons de tout coeur cette bénédiction, et Nous désirons qu'elle demeure toujours avec vous et qu'elle vous accompagne tout au cours de votre vie. Elle restera avec vous, si à votre foyer vous faites régner Jésus-Christ, sa doctrine, ses exemples, ses préceptes, son esprit ; si, invoquée, vénérée, aimée, la Vierge Marie devient la Reine, l'Avocate, la Mère de la nouvelle famille que vous êtes appelés à fonder et si, sous le doux regard de Jésus et de Marie, vous vivez en époux chrétiens, dignes d'un tel nom et d'une telle profession.






ALLOCUTION A L'AMBASSADEUR DE L'ARGENTINE

(4 mai 1939) 1

Aux paroles d'hommages que lui adressait ce jour S. Exc. le Dr Henri Ruiz Guinazu, nouvel ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République d'Argentine, le Souverain Pontife a répondu ainsi :

Les paroles prononcées par Votre Excellence présentant les lettres de créance, par lesquelles S. Exc. M. le président de la République d'Argentine vous accrédite, en remplacement de M. le Dr Don Carlos de Bstrada si estimé et aimé de Nous, comme ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire auprès du Saint-Siège, sont pour Nous qui professons une affection si paternelle pour le peuple argentin une preuve très agréable que Votre Excellence, avec toute l'ardeur que lui inspire l'amour de sa patrie et les traditions profondément catholiques de ce pays privilégié, aura comme grande préoccupation celle de consolider toujours plus les heureuses relations qui existent entre le Saint-Siège et la nation argentine.

Quand l'Eglise et l'Etat imprègnent leurs mutuelles relations de l'esprit, qui, Monsieur l'ambassadeur, resplendit dans vos paroles, il se crée entre les deux pouvoirs cette atmosphère de cordialité réciproque et de loyal appui qui correspond aux intimes aspirations du très fidèle peuple argentin : de cette collaboration il a recueilli tant de bienfaits dans le passé et elle constitue la base la plus sûre pour son développement ultérieur vers les chemins de la prospérité et de la paix.

Au milieu des graves problèmes qui, à l'heure présente, pèsent sur les peuples et les inquiètent, la noble adhésion de Votre Excellence à l'idée d'une entente internationale pour chercher la solution des divergences qui peuvent surgir dans l'application des principes de la justice et de l'esprit de fraternité, constitue un pronostic dont Nous sommes amené à apprécier à sa valeur l'importance symbolique surtout au moment présent. Nous ne voulons pas manquer d'en exprimer Notre reconnaissance au peuple argentin, à son gouvernement et à Votre Excellence qui les représente si dignement. Pour cela, Nous demandons de tout coeur au Seigneur que cet esprit de compréhension consciente et généreuse trouve des défenseurs et des collaborateurs toujours plus nombreux et plus décidés dans toutes les nations et tous les peuples et facilite toujours davantage le chemin vers la restauration et le perfectionnement de la paix intérieure fondée sur la justice et la charité fraternelle.

Dans le parc de Palermo de la capitale de l'Argentine, durant les jours inoubliables du Congrès eucharistique international que Nous avons présidé comme légat de Notre prédécesseur de glorieuse mémoire, Nous avons imploré au milieu d'une immense multitude cette même paix, tandis que les drapeaux de toutes les nations entouraient le gigantesque autel et que le chef de l'Etat, à la face du monde en une heure bénie entre toutes, consacrait son pays et son peuple au Christ le roi de la paix. C'est en souvenir de ces heures indélébilement gravées dans Notre Coeur, où Nous Nous sentîmes si proches du coeur du peuple argentin, que Nous demandons à Votre Excellence de se faire l'interprète auprès de S. Exc. M. le président de la République, des membres du gouvernement et de toutes les classes sociales de ce peuple si aimé, des sentiments paternels que Nous nourrissons pour eux tous et des voeux fervents que Nous formulons pour le bien et le bonheur de cette très noble nation qui Nous est si chère.





RADIOMESSAGE AU XIIe CONGRÈS EUCHARISTIQUE NATIONAL FRANÇAIS A ALGER

(7 mai 1939) 1

Près de 500 000 personnes ont assisté au XIIe Congrès eucharistique national français qui s'est tenu à Alger, du 3 au 7 mai, sous la présidence de S. Em. le cardinal Verdier, légat pontifical. Cette manifestation en l'honneur de l'Eucharistie se clôtura par le radiomessage du Saint-Père, qui parla en français :

Pour la douzième fois, très chers fils de la noble nation française, vous voici réunis par milliers autour du Christ, présent dans l'Eucharistie, afin de lui offrir ensemble un hommage solennel d'adoration réparatrice.

Au cours des dernières années, l'Afrique a vu déjà plus d'une cérémonie de ce genre. Carthage, se souvenant d'avoir été la glorieuse métropole de l'Eglise nord-africaine et d'avoir abrité dans ses murs plus de trente conciles, donna le branle avec son congrès eucharistique international. Puis, le mouvement s'est étendu en des congrès régionaux ou nationaux, jusqu'à l'Afrique australe, au Congo, à Madagascar, à Tripoli et ailleurs.

Aujourd'hui, c'est sur les côtes, longtemps appelées barbaresques, qu'est célébré le triomphe de l'Hostie, et Notre coeur tressaille de joie, tandis que Nous y prenons part doublement. Car Nous y sommes présent de deux manières : visiblement, en la personne de celui que Nous avons choisi comme légat pour présider, en Notre nom, à ces Journées eucharistiques, Notre très cher Fils le cardinal archevêque de Paris ; invisiblement, mais véritablement aussi, par Nos prières unies à celles de vos foules saintement enthousiastes.

1 D'après le texte français des A. A. S., XXXI, 1939, p. 221.



Ni les flots mouvants de la mer, ni le fracas des armements qui en ébranlait les rivages n'ont pu faire hésiter votre élan mystique : la « bonne Mère de la Garde » vous conduisait vers Notre-Dame d'Afrique et, dans cette Hostie rayonnant sur l'une et l'autre colline, la foi vous montrait le Prince et l'Auteur même de la paix, cette paix si ardemment souhaitée par notre humanité inquiète.

Voilà ce qui vous attirait et encourageait. Voilà ce qui Nous unit intimement à vous en ce mois de mai que Nous voudrions tout entier consacré à la prière universelle (aux prières des enfants surtout, ces privilégiés du Sauveur), pour faire descendre du ciel sur la terre, par les mains de la Vierge immaculée, la paix promise aux hommes de bon vouloir : paix dans les âmes troublées par les appels et les séductions des fausses doctrines, paix entre les nations frémissantes dans une incessante anxiété.

Pourtant, si vous êtes venus ici tenir vos assises eucharistiques, c'est surtout, Nous ne l'ignorons point, afin d'y célébrer le centenaire d'un événement à jamais mémorable pour l'Eglise et pour la France.

Il y a un siècle, en effet, que le premier évêque d'Alger fut installé dans sa cathédrale. Ainsi renaissait après huit cents ans de mort apparente cette province ecclésiastique d'Afrique qui avait jadis compté quelque cinq cents évêques et qui, dans la pléiade de ses martyrs, de ses pontifes et de ses vierges, voit briller à jamais l'incomparable docteur d'Hippone, Augustin, l'un des plus éclatants génies que Dieu ait donné à l'Eglise et au monde.

Mais en 1839, Alger, la ville blanche, dressant ses terrasses sur la mer comme un défi au peuple chrétien ; Alger, la cité des larmes et du sang, où avaient pleuré, prié, souffert et donné leur vie pour le Christ des milliers de captifs, ne comptait plus que quatre prêtres.

Or, voici que sur un des minarets s'élève la croix du Christ et Alger devient soudain la porte lumineuse par où pénétrera chaque jour plus rapidement, jusqu'au coeur du continent noir, le flambeau de la révélation.

Renaissance admirable, vie nouvelle débordant de sève surnaturelle ! Aujourd'hui, de nombreux évêques ou vicaires apostoliques, des centaines de prêtres venus de diverses nations chrétiennes ou issus de familles indigènes, plusieurs millions de fidèles attestent à travers l'Afrique l'éternelle jeunesse de l'Eglise, l'inépuisable fécondité de la grâce divine servie par l'effort humain.

C'est pourquoi Notre Bénédiction s'élance affectueusement vers vous, d'abord, fils de cette France dont il Nous était donné, il y a deux ans, d'évoquer les grandes destinées religieuses sous les voûtes de Notre-Dame de Paris. Mais cette Bénédiction va plus loin encore : vers vous, néophytes et catéchumènes dispersés dans les missions d'Afrique ; vers vous tous, enfin, hommes modestes dont les âmes, comme la Nôtre, ont été rachetées par le sang du Dieu fait homme. A ce Christ Jésus, toutes les nations ont été données en héritage ; et de cet héritage, la Providence Nous a constitué le gardien ; de cette humanité, Dieu Nous a fait le Pasteur et le Père.

Qu'elle descende donc sur tous, la Bénédiction divine, fruit du sang répandu pour tous par le Sauveur caché mais présent dans l'Eucharistie !






ALLOCUTION A LA COLONIE ESPAGNOLE DE ROME

(8 mai 1939) 1

Le 8 mai, à la colonie espagnole de Rome venue lui exprimer ses sentiments de filiale dévotion, Sa Sainteté exprima ses voeux pour une nouvelle ère de paix et de grandeur en faveur de la catholique Espagne.

Nous souhaitons une très cordiale bienvenue à Votre Excellence, Monsieur l'ambassadeur, et à la colonie espagnole de Rome réunie dans Notre maison qui est aussi votre maison paternelle. Vous formez une colonie nombreuse et illustre, qui Nous fait songer avec complaisance à l'imposant cortège d'ambassadeurs vraiment catholiques, de sages théologiens et conseillers, de fils dévoués et généreux qui, au cours des siècles, ont accompagné à Rome le Père commun des fidèles, prenant part à ses peines et à ses joies, et mettant au service du Saint-Siège la saine théologie et le zèle missionnaire de l'Espagne.

Cependant, une circonstance particulière donne un relief particulier à la présente audience. Vous êtes venus pour Nous exprimer votre gratitude au nom de toute votre très noble nation et de son illustre chef pour Notre message radiophonique. Ce fut pour Nous un motif de particulière satisfaction, en premier lieu de pouvoir vous adresser Nos félicitations et Nos salutations à l'heure où l'Espagne, au lendemain de la victoire, inaugurait sa nouvelle époque de pacification et de grandeur. Et maintenant Notre coeur est au comble de la joie d'entendre que Nos félicitations et Notre exhortation à la paix et à de nouveaux destins vraiment catholiques pour l'Espagne ont trouvé un écho si profond et prolongé chez Nos fils et filles très aimés de la nation espagnole.

Votre palais d'Espagne, Monsieur l'ambassadeur, est spécialement lié au culte de Marie Immaculée. La place d'Espagne est la place du monument élevé en l'honneur de l'Immaculée Conception. Nous avons tous à prier en ce mois de mai la Vierge très sainte pour que, en récompense de la vénération et de l'amour qu'on a toujours professés pour elle sur la terre d'Espagne et dans les coeurs espagnols, elle daigne obtenir de son divin Fils bonheur et bénédictions pour vos familles, une jeunesse pure et remplie de saine joie pour vos fils, prospérité et avenir heureux pour votre économie, force et impulsion de l'Esprit-Saint pour votre vie religieuse, et pour toute votre patrie qui Nous est si chère, la paix intérieure et extérieure, totale et durable. En gage de tout cela, Nous vous donnons à vous et à tous les vôtres, à toutes les personnes que vous portez dans votre esprit et dans votre coeur, et à tous les objets que vous avez apportés avec vous à cette audience, la Bénédiction apostolique.






ALLOCUTION A L'ÉPISCOPAT ET AU PEUPLE MARONITES

(9 mai 1939)1

Le 9 mai, le Souverain Pontife recevait en audience une délégation de l'êpiscopat maronite présentée par S. Exc. Mgr Abdallah Kouri, vicaire général du patriarcat d'Antioche des Maronites, à laquelle s'étaient jointes de nombreuses personnalités de la colonie maronite de Rome. A leur adresse de filial hommage, le Saint-Père répondit par ces paroles :

La délégation envoyée vers Nous par Notre Vénérable Frère le patriarche maronite a évoqué le souvenir des rois mages qui, suivant l'étoile miraculeuse, venaient trouver le Roi Jésus à l'aurore de sa vie terrestre.

Comme le Sauveur ouvrit pour les accueillir ses bras et son Coeur, ainsi Nous vous ouvrons bien larges Nos bras et Notre coeur, non pas certes comme aux prémices de la gentilité, mais comme à des fils très chers appelés à faire rayonner toujours davantage en Orient la lumière catholique.

Le très aimé peuple maronite, qui parmi ses rochers et ses cèdres a su garder intact le divin trésor de la foi, héritage de ses pères, voudra, Nous en sommes sûr, répondre à Nos intimes désirs et à Notre appel, en s'efforçant de faire partager à tous ceux qui vivent sur le même sol que lui le bien inestimable de cette foi chrétienne, catholique et romaine. Que votre ferveur contribue à rendre, à ce cher Orient où parut Jésus, la vraie et éternelle Lumière, cette place unique qui fut la sienne à l'aurore de notre rédemption.

Les liens qui depuis si longtemps unissent votre nation à ce Siège de Rome n'ont pas besoin d'être renoués ; comme vos cèdres éternels, ils sont incorruptibles. Mais que ces liens soient toujours plus étroits ! Un saint amour peut toujours grandir, une union toujours devenir plus intime. Et c'est parce qu'il est sûr de vous, que le Père commun reçoit avec joie le témoignage renouvelé de votre fidélité et de votre amour filial.

Unis au pape, c'est-à-dire unis à saint Pierre, unis à vos chefs religieux, patriarche et évêques, vous avez déjà vu et fait de grandes choses. Nous en attendons de plus grandes encore. Notre coeur paternel le souhaite pour votre cher Orient, Nos mains se joignent pour l'obtenir. Puissiez-vous être, Nos très chers fils de la nation maronite aux premiers rangs de ceux qui font resplendir la Lumière et conduisent vers elle tant de chères brebis, attendant qu'une main leur ouvre la porte du bercail.

A cette intention et comme gage de Notre affection paternelle, Nous vous accordons à vous et à tous ceux que vous représentez la Bénédiction apostolique.






DISCOURS AUX JEUNES ÉPOUX ET A DES PÈLERINS ANGLAIS ET SUISSES

(10 mai 1939)

Recevant en audience générale de nombreux nouveaux époux, un groupe important de pèlerins du diocèse de Saint-Gall conduits par leur évêque, S. Exc. Mgr Meile, et une centaine de pèlerins anglais du diocèse de Southwark avec leur archevêque, S. Exc. Mgr Amigo, le Saint-Père s'adressa successivement à chaque groupe de fidèles, leur parlant dans leur langue :



Aux jeunes époux. 1

Nous saluons cordialement les nouveaux mariés, que Nous voyons venir de plus en plus nombreux à ces audiences publiques. Salut d'autant plus cordial que Nous vous l'adressons dans la joie de ce mois de mai, que la piété du peuple chrétien a voulu consacrer particulièrement au culte de la Sainte Vierge.

La dévotion à Marie, patronne des familles.

Appelés à constituer de nouvelles familles, vous voulez sans doute leur donner un caractère essentiellement et profondément chrétien et un solide fondement de bien-être et de bonheur. Eh bien ! c'est par la dévotion à Marie que vous y arriverez. Marie a de nombreux titres à être considérée comme la patronne des familles chrétiennes, et celles-ci ont tout autant de motifs d'espérer d'elle une assistance particulière.

De la famille, Marie a connu les joies et les peines, les événements joyeux et les événements tristes, la fatigue du travail quotidien, les incommodités et les privations de la pauvreté, le déchirement des séparations. Mais elle a connu aussi les ineffables joies de la vie de famille, heureuse de l'amour le plus pur d'un très chaste époux, heureuse du sourire et des tendresses d'un Fils qui était en même temps le Fils de Dieu.

Le coeur miséricordieux de la Sainte Vierge compatira donc aux nécessités des familles, elle leur apportera le réconfort dont elles sentiront le besoin au milieu des inévitables douleurs de la vie présente, et sous son regard maternel les douceurs du foyer deviendront plus pures et plus sereines. La Sainte Vierge ne se contente point en effet d'avoir connu par expérience les graves nécessités des familles ; tendre Mère de miséricorde, elle veut les soulager.

Bienheureux, oui, bienheureux les époux qui commencent leur nouvelle vie avec ces dispositions de piété et de confiance, avec la sainte résolution d'établir leur foyer sur le fondement inébranlable de la religion ! Dispositions qu'ils légueront toutes, comme un précieux héritage, aux chers enfants que Dieu voudra leur donner.

Mais ne l'oubliez pas, très chers fils et filles, pour être vraie et solide et partant féconde en fruits et en grâces, la dévotion à Marie doit être vivifiée par l'imitation de la vie même de Celle que nous aimons à honorer.

La Mère divine est surtout un modèle parfait des vertus domestiques dont l'état des époux chrétiens doit briller. En Marie vous trouverez un amour pur et fidèle envers son très chaste époux, amour fait de sacrifices et de délicates attentions ; en Marie vous trouverez un dévouement parfait et continuel aux soins de la famille et du foyer, aux soins de son époux et surtout de Jésus ; en elle vous trouverez une humilité que manifestent son affectueuse soumission à saint Joseph, sa patiente résignation aux dispositions, si souvent dures et pénibles, de la divine Providence, son amabilité et sa charité envers tous ceux qui approchaient de l'humble maison de Nazareth.

Puisse votre dévotion à Marie, ô époux chrétiens, former une source toujours vive de faveurs célestes et de vrai bonheur, faveurs et bonheur dont vous recevez un gage dans la Bénédiction apostolique que Nous vous accordons de grand coeur.



Aux pèlerins anglais 2 :

Chers fils et filles d'Angleterre, soyez les bienvenus. Nous adressons tout particulièrement ces souhaits de bienvenue à votre chef, Notre très estimé et très cher Frère en l'apostolat, l'archevêque-évéque de Southwark.

Nous Nous réjouissons de l'expansion du catholicisme en votre mère-patrie. Elle est le fruit de la foi et du sacrifice de tous les siècles écoulés. Puissent vos prières et la perfection chrétienne de vos vies apporter la lumière et la joie à vos frères séparés sur le chemin qui mène à la vérité, en sorte que ces fruits puissent rendre cent pour un et davantage encore.

Nous vous adressons le sincère témoignage de Notre satisfaction. Sur vous et sur tous les êtres chers que vous avez laissés en vos foyers, sur tous ceux que vous désirez faire participer à la bénédiction de votre commun Père, Nous répandons, et de tout Notre coeur, Notre Bénédiction apostolique.



2 D'après le texte anglais de Discorsi e Radiomessaggi, t. I, p. 121.



Aux pèlerins suisses 3 :

Chers fils et filles du diocèse de Saint-Gall, Nous ressentons une joie toute spéciale de pouvoir vous saluer, avec votre très honoré évêque, dans Notre maison, après avoir eu si souvent le privilège de pouvoir jouir de l'hospitalité de votre ravissante patrie. Le souvenir des jours que Nous avons pu passer chez vous restera toujours marqué de bonheur dans Notre mémoire.

En Notre qualité de Père de toute la famille catholique, qu'il Nous soit permis de vous adresser quelques paroles d'encouragement et d'exhortation. D'abord l'encouragement : il s'adresse à chacun de vous qui collaborez activement à l'Action catholique. Nous avons appris avec une grande satisfaction que les laïcs de l'Action catholique travaillent en étroite collaboration avec leurs curés et suivent fidèlement les instructions de leur évêque. Continuez a développer encore dans toutes les directions cette activité, en collaboration étroite avec l'évêque que la Providence divine vous a donné. Cela fournira un nouvel élan à l'Action catholique. Ensuite une parole d'exhortation à vous tous : vivez si complètement de votre foi, efforcez-vous tellement à la sainteté intérieure, exercez si généreusement l'amour du prochain, que la splendeur de la nature de votre patrie et de vos églises devienne comme le miroir parlant, l'expression fidèle de la beauté et de la perfection de votre vie chrétienne.

En gage de quoi, Nous vous accordons de tout coeur, à vous ici présents, à vos proches dans la patrie, à tous ceux vers lesquels vont, en cet instant, vos pensées et votre affection, la Bénédiction apostolique.

3 D'après le texte allemand de Discorsi e Radiomessaggi, t. I, p. 117.




LETTRE A S. EM. LE CARDINAL TISSERANT A L'OCCASION DE LA COMMÉMORAISON DU BAPTÊME DE SAINT VLADIMIR

(12 mai 1939) 1

Les collèges ruthène et russe de Rome ayant projeté de célébrer solennellement la commémoraison du baptême de saint Vladimir et de son peuple en 950, le Saint-Père a adressé à S. Em. le cardinal Tisserant la lettre suivante :



1 D'après le texte latin des A. A. S., XXXI, 1939, p. 258.



C'est avec une joie particulière que Nous avons appris par vous, qui, à la Congrégation de la Curie Romaine pour le gouvernement de l'Eglise orientale, témoignez à Notre égard d'un zèle empressé, que les deux collèges pontificaux, le collège ruthène de Saint-Josa-phat et le collège russe de Sainte-Thérèse de l'Enfant Jésus formaient le projet de commémorer solennellement ici à Rome l'année 950 où saint Vladimir et son peuple furent purifiés par le saint baptême. Lorsque Nous avons appris cette nouvelle, non seulement Nous avons approuvé que soit célébré un triduum de prières dans l'église dédiée au Très Saint Nom de Jésus, mais encore Nous avons décidé pour le dimanche 21 de ce mois de célébrer une messe pontificale selon le rite byzantino-slave dans la basilique patriarcale du Vatican pour que Notre participation à cet événement qui rehausse d'une gloire particulière une si grande part du troupeau du Christ se fasse en quelque sorte plus proche et plus éclatante. Certes, le souvenir presque millénaire du baptême de saint Vladimir et de son peuple réveille en Nous de vifs sentiments de reconnaissance envers le Dieu miséricordieux auteur d'un si grand bienfait et de fidèle vénération pour les âmes généreuses qui l'ont obtenu. Combien en effet de témoignages de foi sont apparus en ce moment propice ! Combien les flammes d'une fervente charité ont brûlé en ce jour qui a lui pour le salut d'un si grand nombre sous d'heureux présages ! Dès lors, il apparaît clairement que là où la doctrine du Christ est connue des hommes et règle leur vie, là aussi les conditions matérielles de la vie humaine s'organisent dans un ordre merveilleux et tous les hommes perçoivent plus profondément la dignité du Fils de Dieu et avec une sagesse plus avisée découvrent les voies et les raisons de la justice et de la paix. Evoquer en effet saint Vladimir, le chef illustre de son peuple, c'est évoquer surtout la grâce surnaturelle qui enflamma son âme quand il fut lui-même régénéré par l'eau et l'Esprit-Saint. Alors en lui refleurirent les germes féconds que, lorsqu'il était enfant, sainte Olga son aïeule avait déposés en lui ; alors cet homme auparavant si fruste, si inculte, pour ne pas dire sauvage et cruel, fut formé à une vraie humanité et, dédaigneux d'une gloire passagère, entreprit avec bonheur de hâter la venue du règne du Christ parmi ses sujets jusque-là assis à l'ombre de la mort. Depuis lors, une grâce si grande s'est développée dans son peuple qu'il est demeuré tout au long des siècles fidèle à Jésus-Christ, attestant de manière éclatante les paroles de vie. Nous ne pouvons pas oublier, chers Fils, que saint Vladimir a eu des rapports fréquents avec ce Siège apostolique et lui a donné de nombreuses preuves de sa dévotion filiale et de la fidélité de son amitié. Nous ne pouvons pas non plus passer sous silence la fidélité montrée à la Chaire de Pierre et prouvée par le sang versé de la part des catholiques de rite byzantin dont la foule nombreuse constitue en Europe orientale et dans les deux Amériques une part notable de l'Eglise du Christ. Evoquant avec reconnaissance ces souvenirs, Nous Nous associons très volontiers au bonheur proche de ce joyeux événement. Cependant, en regardant la condition présente de la chrétienté en Russie, Nous sommes contraint de déplorer, l'âme angoissée et inquiète, que ce peuple fidèle qui fait remonter son origine ancienne à saint Vladimir et à ses mérites, endure de grandes souffrances à cause du mépris injuste dont est victime la foi catholique, à cause de la guerre abominable déclarée contre le très saint nom de Dieu, à cause de la violence souvent sanglante faite à ceux qui confessent le Christ, Fils unique de Dieu. Aussi, c'est d'une âme suppliante et pressante que Nous adressons Notre prière à la très douce Mère de Dieu que ce peuple vénère et aime tant, pour qu'elle veuille dans sa bonté inspirer aux chefs de l'Etat le sens vrai de la justice, vaine et stérile si elle n'est pas régie par Dieu à qui tout est soumis, et en même temps obtenir pour ses fils abandonnés qu'ils puissent le plus tôt possible jouir de nouveau de la foi chrétienne, don merveilleux du Très-Haut.

Notre prédécesseur lui-même, Pie XI, d'heureuse mémoire, s'adres-sant aux élèves du collège ruthène de Saint-Josaphat le 21 septembre de l'année passée à Castelgandolfo jugea digne de prononcer déjà les paroles suivantes à propos de ce joyeux anniversaire, paroles que Nous faisons Nôtres et que Nous vous confions, Fils très cher, pour qu'avec Nos félicitations et Notre encouragement personnel vous transmettiez la plénitude de la Bénédiction apostolique à tous ceux qui de rite byzantino-slave ou d'autres rites s'uniront à vous pour célébrer, par l'accord de la prière et l'effusion de la charité mutuelle, lien de la perfection, l'année 950 où saint Vladimir et son peuple furent renouvelés par le bain du salut.






ALLOCUTION A L'ÉPISCOPAT ET AUX FIDÈLES DE RITE GREC-MELCHITE

(16 mai 1939) 1

Un groupe de prélats et fidèles de rite grec-melchite conduit à Rome par S. Exc. Mgr drille IX Mogabgab, patriarche d'Antioche des Melchites, fut accueilli le 16 mai par le Saint-Père qui leur dit :



Une autre partie du cher Orient vient donc à Nous en ce jour ! Et elle Nous est amenée par Notre Vénérable Frère le patriarche du rite grec-melchite, qui, portant vaillamment le poids des années, a voulu conduire en personne vers ce Siège apostolique plusieurs évêques et prêtres du même rite.

Par une heureuse circonstance, au milieu de vous se trouve celui-là même qui possède au coeur de son diocèse un des joyaux de l'Eglise catholique, Nous voulons dire cette bourgade de Césarée de Philippe, appelée aujourd'hui Banias, où le Christ Jésus daigna choisir Pierre, en récompense de son ardente foi, pour en faire le premier et suprême Pasteur. C'est un grand honneur pour tout le rite grec-melchite d'être comme le gardien providentiel de l'endroit où Jésus remit au Prince des apôtres les clefs du royaume des cieux. Le successeur de Pierre vous demande aujourd'hui de travailler avec lui à ouvrir largement aux âmes les portes de cette patrie céleste, dont l'Eglise catholique est le vestibule assuré.

Nous l'avons déjà dit à d'autres de Nos fils d'Orient ; Nous aimons à vous le redire, à vous, héritiers d'un très noble et très ancien rite : de nos jours, où sous l'action de l'Esprit de Dieu tant d'âmes ressentent le besoin de l'unité, votre rôle peut et doit être magnifique. Ces basiliques du Haurân et de la Syrie, où se déroulèrent si tôt et pendant si longtemps les splendides liturgies byzantines, et dont certaines semblent n'attendre qu'une simple restauration pour accueillir encore les foules priantes, Nous apparaissent comme un symbole et vous redisent un appel.

L'heure est venue où les fils de la maison doivent redoubler de zèle pour montrer à leurs frères la demeure qu'ils cherchent et les aider à en franchir le seuil accueillant. Animés par l'exemple de vos grands docteurs, les Athanase, les Cyrille, les Chrysostome, les Jean Damascène, forts des mérites acquis par vos martyrs, travaillez à promouvoir en Orient le règne du Christ dans l'unité.

Avec cet espoir de Notre coeur de Père, et comme gage des faveurs du ciel, Nous vous donnons de toute Notre âme, à vous, Vénérable Frère, patriarche du rite grec-melchite, à Nos Vénérables Frères les évêques, à tous Nos chers fils, prêtres, religieux et fidèles de votre rite, dispersés en Syrie, au Liban, en Palestine, en TransJordanie, dans l'Irak, en Egypte et ailleurs, à vos oeuvres, à vos associations, à vos bienfaiteurs et collaborateurs, la Bénédiction apostolique par vous implorée.






Pie XII 1939 - III