Pie XII 1939 - LETTRE APOSTOLIQUE POUR LA BÉATIFICATION D'EMILIE DE VIALAR FONDATRICE DES SOEURS DE SAINT-JOSEPH DE L'APPARITION


LETTRE DE LA SECRÉTAIRERIE D'ÉTAT DÉCLARANT SAINT FRANÇOIS D'ASSISE ET SAINTE CATHERINE DE SIENNE PATRONS PRIMAIRES DE L'ITALIE

(18 juin 1939) 1

A la demande de tous les évêques d'Italie, le Saint-Père déclare saint François d'Assise et sainte Catherine de Sienne patrons primaires de l'Italie.



Bien que Nous ait été confiée par le Dieu Rédempteur la sollicitude de toutes les Eglises qui Nous engage fermement à promouvoir spontanément le bien des fidèles du monde entier, la Chaire romaine de saint Pierre a été placée par la divine Providence en Italie. C'est très volontiers qu'à l'occasion Nous cherchons à promouvoir de façon très particulière les intérêts spirituels des Italiens, et que Nous décidons avec un soin très attentif les choses qui paraissent utiles à l'obtention de cette fin.

C'est pourquoi, dans les si grandes difficultés actuelles dont l'Italie est entourée de toutes parts, rien ne peut être plus conforme à Notre charge pastorale et aussi à l'affection dont Nous entourons Nos concitoyens, que de leur donner des patrons particuliers auprès de Dieu pour être leur garde et leur secours. Qui peut douter, en effet, qu'il n'est aidé chaque jour auprès de Dieu par le patronage des saints, surtout quand, placé dans la difficulté, il invoque Dieu, soutenu par l'intercession des bienheureux du ciel, et que Dieu immédiatement l'exauce ? Et ceci peut être à très juste titre affirmé du patronage dont les saints protègent les nations et les pays, et ceux-là principalement auxquels par patriotisme ils se sont efforcés d'être utiles pour des raisons et dans des circonstances particulières lorsqu'ils étaient encore sur cette terre. Sans nul doute, ceci doit être affirmé de saint François d'Assise et de sainte Catherine de Sienne qui, tous deux Italiens, ont, lorsqu'ils vivaient, non seulement illustré leur patrie et la nôtre, terre toujours féconde en saints, par l'admirable splendeur de leurs actes et de leurs vertus, mais encore par l'abondance de leurs bienfaits dans des temps particulièrement difficiles et extraordinaires.

En effet, François, pauvre et humble à l'image de Jésus-Christ, a donné des exemples infatigables de vie évangélique aux citoyens très turbulents de son époque et surtout a ouvert par la création de son Tiers Ordre de nouveaux chemins et un accès plus facile pour la correction des moeurs publiques et privées et pour obtenir un vrai sens catholique.

Catherine, vierge forte et pieuse, a pris soin par un travail efficace de favoriser et d'établir la concorde dans les cités et les villes de sa patrie, de ramener dans la ville de Pierre par ses conseils, par ses prières et par son effort inlassable, les pontifes romains qui vivaient en France presqu'en exil. Aussi paraît-elle à juste titre comme la gloire de la patrie et la protectrice de la religion.

Aujourd'hui, comme Charles Salotti, cardinal-prêtre de la sainte Eglise romaine, préfet de la Sacrée Congrégation des Rites, Nous apprend que tous les archevêques et évêques d'Italie, traduisant les vceux de l'ensemble des fidèles, Nous prient par d'instantes prières de déclarer et constituer les saints que Nous venons de louer patrons primaires de l'Italie, afin d'exciter et d'augmenter de jour en jour la piété qui leur vient des ancêtres, toutes choses ayant été soigneusement pesées, Nous répondons très volontiers à ces demandes que le même cardinal appuie de son propre suffrage.

C'est pourquoi, Nous étant informé et après mûre délibération, motu proprio, dans la plénitude de Notre pouvoir apostolique, Nous déclarons et Nous constituons, par les présentes lettres, à partir d'aujourd'hui et à perpétuité, saint François d'Assise et sainte Catherine de Sienne patrons primaires de l'Italie.

Nous décrétons en outre, par cette présente lettre, de la même autorité, et de même à perpétuité, que la fête de ces patrons sera célébrée chaque année en Italie et dans les îles adjacentes par l'un et l'autre clergés par une messe et un office convenables sous le rite double de première classe sans octave.

Nonobstant toutes choses contraires.






DISCOURS LORS DE LA BÉATIFICATION D'EMILIE DE VIALAR

(19 juin 1939)1

Le lendemain de la béatification d'Emilie de Vialar, le Saint-Père reçut en audience les pèlerins français et les religieuses de l'Institut de Saint-Joseph de l'Apparition venus à Rome à cette occasion et présentés par S. Exc. Mgr Delay, évêque de Marseille. Il leur adressa ces paroles :



Il y a quelques semaines, le splendide Congrès eucharistique d'Alger rappelait au monde les événements qui servirent, voici un siècle, d'occasion providentielle à la pénétration de l'Evangile jusqu'au coeur du continent africain.

Parmi les pionniers de l'apostolat moderne en Afrique se trouvait Emilie de Vialar. C'est donc avec raison que vous êtes venus, chers fils et filles, de son pays de Gaillac, de Marseille, de Paris et d'autres régions, prendre part au triomphe de cette grande missionnaire française.

Mais vous surtout, qui l'appelez votre Mère et dont le coeur a dû s'émouvoir bien doucement, hier, en disant pour la première fois, avec l'Eglise, cette invocation solennelle : Ora pro nobis, beata Aemilia ! C'est vous autres aujourd'hui que, dans un sens différent, mais tout aussi vrai, Nous qualifierons de même en disant : « Bienheureuses les filles d'une telle Mère ! »

Bienheureuses d'abord, parce que vous êtes assurées d'avoir au ciel une protectrice puissante. De son crédit auprès de Dieu, les étendards déployés hier à Saint-Pierre montraient quelques témoignages. Mais c'en est un aussi que le développement rapide et l'extension de votre institut. L'Italie, la France et l'Angleterre, l'Afrique du Nord, Malte, la Syrie et la Palestine, la lointaine Birmanie et l'Australie plus lointaine encore, connaissent et aiment les filles d'Emilie de Vialar. Oui, bienheureuses êtes-vous de la puissance que Dieu a donnée à votre Mère et des grâces qu'il a répandues sur son oeuvre !

Votre joie a encore une autre source : c'est de savoir que l'esprit de votre Mère était bien l'esprit de Dieu, quand, après tant d'incertitudes et de recherches, elle se décida à fonder une congrégation nouvelle. C'est pourquoi doivent vous être toujours plus chers cet esprit et ce nom : « Saint Joseph de l'Apparition ! » Ils vous rappellent sans cesse l'obligation et la douceur d'une absolue confiance en Dieu, dans les obscurités de ce monde, durant ces longues heures d'attente dans la nuit de l'âme, que votre Mère connut si bien !

Enfin, bienheureuses êtes-vous, vous à qui a été donnée cette belle devise : « Se dévouer et mourir ! » Dans vos pensionnats et vos patronages, dans vos dispensaires et vos hôpitaux, en pays chrétien ou en terre de mission, qu'avez-vous d'autre à faire, que faites-vous d'autre, sinon de prodiguer les actes d'un inépuisable et parfois héroïque dévouement ? Restez donc fidèles à votre devise : dévouez-vous, partout et toujours !

Quant à vous tous, très chers fils et filles, vous allez regagner la France, en rapportant de Rome un nouveau fleuron pour sa couronne, déjà si riche, de saintes et de bienheureuses. Avec les vierges candides, de Geneviève à Bernadette, avec les femmes au coeur viril, comme Jeanne d'Arc et Jeanne-Françoise de Chantai, avec les mystiques extasiées, comme Colette et Marguerite-Marie, avec les grandes éducatrices, comme Jeanne de Lestonnac et Madeleine-Sophie Barat, la France a toujours eu, parmi ses fils et ses filles, des missionnaires intrépides. Depuis un siècle et demi, la phalange de ces femmes apôtres a pris un accroissement dont le monde païen tout entier a ressenti les effets. Aux défricheuses, arrosant de leur sueur et parfois de leur sang la terre infidèle, s'est jointe une légion d'auxiliaires invisibles, implorant dans l'ombre du cloître, sous la bure et le cilice, par des supplications embrasées d'amour ou inondées de larmes, les grâces surnaturelles, sans lesquelles tout apostolat resterait vain. Quand Notre prédécesseur, de vénérée mémoire, proclamait une carmélite de Lisieux patronne des missionnaires, il ne faisait que montrer du doigt, comme Thérèse Martin désignant elle-même dans le ciel son étoile, un astre de première grandeur, au sein d'un firmament brillamment constellé.

Allez, chères filles d'Emilie de Vialar, allez, chers pèlerins de France, de l'Afrique du Nord ou d'ailleurs, redire, avec la gloire de la nouvelle bienheureuse, cette grande leçon de sa vie : que l'oeuvre de Dieu se fait avant tout par des âmes humbles ardemment dévouées à sa gloire, saintement hardies dans leurs entreprises, confiantes en sa Providence parmi les difficultés, et résolues enfin, comme la Mère de Vialar l'écrivait au pape en des heures particulièrement pénibles pour elle, résolues à « tout souffrir, plutôt que d'abandonner le poste que Dieu leur a confié ».

Pour vous y aider, tous et chacun, quel que soit votre poste, et comme gage des grâces divines implorées pour vous, Nous vous donnons de tout coeur, chers fils et filles, la Bénédiction apostolique. Cette bénédiction s'étend à toute votre méritante congrégation, à toutes et à chacune de ses religieuses, à toutes vos chères familles, à toutes les personnes et à toutes les choses que vous avez dans la pensée ou dans le coeur, et Nous bénissons aussi tous les objets de dévotion que vous avez portés avec vous.






ALLOCUTION A L'ENVOYÉ EXTRAORDINAIRE DE L'URUGUAY

(20 juin 1939) 1

Répondant aux déférentes paroles de S. Exc. le Dr Joachim Secco Illa, envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de l'Uruguay, lors de la présentation de ses lettres de créance, le Souverain Pontife prononça cette allocution :



En ce moment où Nous avons la consolation de voir un représentant de l'Uruguay présenter ses lettres de créance, par lesquelles S. Exc. M. le président de la République l'accrédite comme envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire en mission spéciale auprès du Saint-Siège, revient à Notre esprit le jour mémorable d'octobre 1934 où, au retour du Congrès eucharistique international de Buenos Aires, Nous avons rendu visite à votre noble peuple et à son gouvernement. Nous avions dû limiter Notre rencontre au peu de temps dont Nous disposions entre l'arrivée et le départ du navire. Toutefois, les heures de Notre séjour dans la capitale furent un événement dont la signification spirituelle pleine de consolation et de promesse demeure depuis ce jour toujours gravée en Notre esprit. Les acclamations du peuple qui s'entassait sur les places et dans les rues de Montevideo, l'entrée à la cathédrale, la rencontre avec M. le président de la République et les membres du gouvernement et du parlement, les sentiments que Nous exprimèrent le clergé et les fidèles : tout cela a formé un ensemble si harmonieux et si admirable qu'à Notre arrivée Nous ne pûmes faire moins que de donner à Notre prédécesseur Pie XI, d'immortelle mémoire, dans le compte rendu de Notre voyage, une place de tout premier choix à Notre visite en Uruguay.

1 D'après le texte espagnol de Discorsi e Radiomessaggi, t. I, p. 199. 10

Que Nous ne Nous sommes pas trompé dans le jugement et l'appréciation des sentiments toujours vivants de ce peuple catholique — pour ne pas faire mention d'autres événements, parmi lesquels mériterait un souvenir spécial le grandiose Congrès eucharistique national de l'année passée — la preuve en est dans le fait que Votre Excellence, objet de la plus grande confiance du chef de l'Etat et particulièrement préparée pour remplir les fonctions si honorables par ses dons si élevés de l'esprit et du coeur et par ses extraordinaires mérites envers la cause catholique, vienne aujourd'hui à Nous en mission spéciale pour conclure des accords qui établissent et régularisent les relations diplomatiques entre le Saint-Siège et l'Uruguay.

En une heure si pleine de responsabilités et de problèmes formidables pour la vie des peuples et pour la paix menacée, il est inutile de dire à Votre Excellence que la réalisation des nobles buts de sa mission trouvera en Nous un appui entier et décidé.

C'est dans cette confiance que Nous invoquons la protection du Très-Haut sur le peuple uruguayen si cher à Notre coeur, sur le chef de l'Etat et sur son gouvernement et surtout sur Votre Excellence, en même temps que Nous faisons des voeux fervents pour que l'union des forces spirituelles qui viennent de la doctrine et de la loi du Christ couronnent de succès les profondes aspirations à la paix qui constituent aujourd'hui les désirs du monde entier.






DISCOURS AUX JEUNES ÉPOUX ET A D'AUTRES GROUPES DE PÈLERINS

(21 juin 1939)1

L'audience générale du 21 juin rassemblait autour du Père commun des jeunes époux, les membres du Comité national de la Protection de la jeune fille, un groupe de jeunes ouvrières, des prêtres, des religieuses, un pèlerinage de Palerme et de nombreux autres fidèles. S'adressant aux différents groupes successivement, le Pape prononça ce discours :



Aux jeunes époux.

C'est avec une vraie joie que Nous constatons le nombre toujours considérable des jeunes époux venus demander au Vicaire de Jésus-Christ une bénédiction qui les accompagne sur le chemin ouvert à leurs espérances. Nous souhaitons que ces belles, joyeuses et saintes espérances se réalisent dans un avenir de vrai et parfait bonheur, et pour eux, et pour les enfants que la Providence leur enverra, puisque les parents ne vivent pas seulement pour eux, mais aussi pour ceux à qui ils ont donné la vie. Bien plus, les époux vraiment chrétiens vivent, veulent vivre et se sentent tenus de vivre spécialement pour le bien de leurs enfants, ils savent du reste que leur bonheur personnel dépend de celui de leurs enfants.



Mission éducatrice des parents.

Or, chers époux, le bonheur de vos enfants est, au moins pour une grande part, dans vos propres mains ; il dépend de l'éducation que vous leur donnerez dès l'aube de leur vie au foyer domestique.

Aujourd'hui même nous célébrons la fête de saint Louis de Gonzague, gloire éclatante de la jeunesse chrétienne. La grâce de Dieu, sans aucun doute, a, dès ses premières années, prévenu et accompagné cette âme privilégiée de dons extraordinaires ; mais il n'est pas moins certain que Dieu trouva une coopératrice attentive, délicate et industrieuse en Dame Marthe, l'heureuse mère de notre aimable saint. Tel est le pouvoir d'une mère consciente de toute la sublimité de sa mission d'éducatrice !

Pour vous aider dans l'accomplissement de cette mission il Nous plaît de relever en cet angélique jeune homme comme le modèle que vous devrez proposer aux enfants que le Seigneur vous donnera, et le patron à qui confier la garde de ces gages de votre amour. Certes les temps sont changés, les moeurs sont changées, les méthodes d'éducation sont changées ; mais la vraie et authentique figure de Louis de Gonzague reste et restera toujours un modèle sublime qui, dans les exemples et les traits de sa vie, convient à la jeunesse de tous les temps. Aussi Notre prédécesseur Pie XI, de vénérée mémoire, confirmant les décrets de Benoît XIII et Léon XIII, voulut-il à nouveau et solennellement proclamer Louis de Gonzague céleste patron de toute la jeunesse chrétienne. Cette jeunesse, il la mit sous sa garde et protection et il l'exhorta paternellement à garder les yeux fixés sur cet admirable jeune homme, chef-d'oeuvre de la nature et de la grâce, qui voua à la rapide conquête d'une sainteté consommée sa vivacité d'esprit, sa vigueur de caractère, sa force de volonté, sa ferveur au travail, sa générosité dans le renoncement, véritable ange de la pureté, véritable martyr de la chasteté.

Rendez-vous aujourd'hui, si possible, à l'église de saint Ignace ici à Rome, et, agenouillés près de l'urne qui referme les ossements sacrés de saint Louis, demandez-lui de recevoir dès maintenant sous sa protection les enfants que vous attendez de Dieu.

Notre pensée et Notre coeur vous accompagnent à cette tombe vénérée, devant laquelle Nous avons prié bien des fois, surtout lorsque dans Notre jeunesse Nous fréquentions tout près de là le Collège romain, qui fut le témoin de la vie sainte et de la précieuse mort de saint Louis de Gonzague.

Puisse Notre bénédiction vous assurer les grâces que Nous demandons de tout coeur par l'intercession de ce saint angélique, à qui est réservée dans l'Eglise une mission ordonnée au plus grand bien de la jeunesse.



Aux pèlerins de Palerme :

Si aux jeunes époux Nous avons adressé Notre parole d'encouragement, à vous, chers habitants de Palerme, Nous devons dire celle de Notre satisfaction pour le succès de votre congrès eucharistique diocésain, heureux couronnement de nombreux congrès paroissiaux, qui s'achève si bien ici, près de Nous, par la joyeuse célébration des noces d'argent episcopales de votre éminentissime et très cher archevêque en ce jour — heureuse coïncidence — de la fête de son patron, saint Louis de Gonzague.

Nous connaissons les résolutions qui ont été prises dans vos solennelles assises et Nous savons de même avec quel enthousiasme vous avez voulu Nous en apporter la confirmation pour Nous demander de les bénir, et donner en même temps au Pasteur de votre archidiocèse la consolation de célébrer au milieu de vous son jubilé à l'autel même de sa consécration episcopale. De tout cela Nous avons raison de Nous réjouir et d'élever avec vous tous l'hymne de la reconnaissance à Dieu. Nous Le prions, en outre, de féconder de sa grâce la bonne semence, que vous avez semée avec tant d'abondance et de foi pendant l'Année eucharistique, et de faire de votre magnifique archidiocèse, si privilégié des beautés de la nature, un jardin florissant de vie et de piété chrétiennes.

C'est en formulant ce souhait que Nous bénissons de tout coeur les présents et les absents, vos familles et vos travaux, et que, d'une manière spéciale, Nous voulons exprimer à votre très digne et très zélé cardinal-archevêque Nos voeux personnels très fervents.



. au Comité national de la Protection de la jeune fille :

Une autre digne représentation de chères filles est assemblée ici autour de Nous pour Nous exprimer ses généreux projets et Nous apporter de bien solides consolations : le Comité national de la Protection de la jeune fille, toujours debout, clairvoyant et efficace dans un travail qui constitue une des plus nobles et plus saintes croisades pour la religion et pour la civilisation. Toute exhortation est superflue pour les membres de ce comité. Stimulant leur diligence et leur charité, l'exhortation vient de la gravité même d'un apostolat, auquel confère un caractère d'extrême urgence la diffusion toujours plus ouverte et impudente des dangers qui menacent les jeunes travailleuses. Pour ces dames pleines de bonne volonté Nous n'avons que des paroles d'éloges et de remerciement. La haute et délicate mission à laquelle elles se dévouent, et les sacrifices que cette mission leur demande, les recommandent, avec leurs compagnes de travail disséminées partout, à Notre particulière gratitude. En les bénissant, comme Nous le faisons de tout coeur, Nous implorons du Seigneur pour elles, pour leur armée qui est sur la brèche et pour toutes leurs initiatives, les plus abondantes bénédictions divines et la récompense souhaitée d'un succès toujours plus pertinent et digne de la sainte cause qu'elles servent.



à de jeunes ouvrières :

De ces authentiques bienfaitrices de la jeune fille, Notre pensée s'adresse naturellement à vous, jeunes ouvrières, qui, de votre retraite spirituelle passée dans le recueillement de ces derniers jours, venez demander au Père commun de bénir vos résolutions. Pensez donc si cette bénédiction descend sur vous large, encourageante, pleine de confiance ! Sur vous, sur vos familles, sur vos travaux. Et Nous voulons qu'elle vous confirme toutes dans l'estime que mérite votre condition sociale, qui fait de chacune de vous une active collaboratrice au milieu de la famille humaine.

Mais Nous voulons surtout que cette bénédiction éclaire vos coeurs et vous fasse sentir fortement la grande dignité et le grand honneur que donne à votre travail le fait qu'il a eu les préférences du divin Maître Jésus et qu'il a rempli la plus grande partie de sa vie mortelle ! Puissiez-vous toutes, pour votre bonheur, vous rendre familières ces pensées et dans votre travail avoir toujours l'esprit fixé au ciel, le coeur en paix !



à des religieux et religieuses :

En même temps que vous, sont réunis ici d'autres généreux héros du travail : des religieux et des religieuses qui, grâce à la munificence du très méritant Ordre de Malte, ont eu l'insigne faveur de suivre sous la direction de professeurs illustres et expérimentés un cours pour infirmiers missionnaires. Faveur insigne, disons-Nous, sachant bien ce que vaut en terre de mission le missionnaire infirmier. Il est pour les néophytes et pour les autres l'expression sensible et émouvante de notre religion d'amour, qui, pour s'occuper des âmes, ne néglige point les corps et sait rendre ainsi un précieux service à Celui qui a dit : « J'étais malade et vous m'avez visité », et qui n'a pas hésité à nous donner comme modèle de la charité le compatissant Samaritain.

Le rôle que l'assistance sanitaire exerce dans les missions fait de ce genre d'oeuvre auxiliaire quelque chose de sacré et Nous souhaitons, pour le plus grand succès de la propagation de la foi, que cette formation ne soit jamais négligée par les oeuvres missionnaires, afin que le travail des missionnaires, qui oeuvrent glorieusement en première ligne, soit assuré du plus grand rendement.

En exprimant aux professeurs comme aux élèves Notre particulière satisfaction pour l'heureuse issue des cours, Nous bénissons de tout coeur les uns et les autres.






DISCOURS AUX ÉLÈVES DES SÉMINAIRES DE ROME

(24 juin 1939)

Plus de 5000 élèves de 80 séminaires ou instituts romains, représentant tous les pays du monde, ont été reçus en audience solennelle par le Saint-Père, le 24 juin, dans la cour Saint-Damase. Voici le long discours que le Père commun prononça à l'adresse de cette imposante assemblée de futurs prêtres :

1 D'après le texte latin des A. A. S., XXXI, 1939, p. 245 ; cf. la traduction française de la Documentation Catholique, t. XL, col. 995.



La réunion solennelle à laquelle vous êtes venus, pour témoigner vos sentiments de respect et de dévotion au Vicaire de Jésus-Christ sur terre, Nous cause une joie singulière, Nos très chers fils, et Nous fait le plus grand plaisir. Nous avons, en effet, sous les yeux une de ces assemblées où se trouvent à la fois les splendeurs de toutes sortes de qualités et l'abondance des dons de l'esprit. Nous voyons avec réconfort le groupe choisi des maîtres insignes en sciences sacrées, cette pléiade de supérieurs qui déploient une inlassable activité pour que les jeunes gens qui leur sont confiés se forment saintement et deviennent d'excellents prêtres ; mais Nous regardons avec une admiration spéciale le spectacle que Nous offre cette jeunesse d'élite, composée de clercs, non seulement de Rome ou de l'Italie, mais encore de l'Europe et du monde entier. Et lorsque Nous les voyons unis par cette harmonie des volontés et la similitude des travaux pour devenir aptes — sous la direction et l'enseignement du successeur de Pierre — à répandre la doctrine et la grâce de Jésus-Christ dans toutes les âmes, Nous ne pouvons Nous empêcher de rendre les plus vives actions de grâces au Dieu tout-puissant pour la plénitude de cette vocation divine, et cela d'autant plus que tous ces jeunes gens représentent en quelque façon les nombreux milliers de ceux qui, sur toute la terre, aspirent à se consacrer à la vie sacerdotale.



Recommandations concernant l'étude des sciences sacrées.

Le Christ Notre-Seigneur, comme vous le savez tous, a dit à ses apôtres : « Vous êtes la lumière du monde ». La lumière brille, le soleil réchauffe. Voici donc votre fin, voici le but assigné au sacerdoce catholique : être le soleil surnaturel qui éclaire l'esprit des hommes par la vérité du Christ et enflamme leurs âmes de l'amour du Christ. Il faut donc que toute préparation et formation sacerdotales correspondent à cette fin et à ce but assignés.

Si vous voulez devenir la lumière de la vérité qui vient du Christ, vous devez d'abord être illuminés par cette vérité. C'est pourquoi vous vous appliquez à l'étude des sciences sacrées.

Si vous désirez imprégner l'âme des hommes de la charité du Christ, vous devez d'abord être enflammés de cette charité. C'est à quoi vise votre éducation religieuse et ascétique.

Vous savez bien, Nos très chers fils, que les études des clercs sont réglées par la remarquable constitution Deus scientiarum Dominus, oeuvre de Notre prédécesseur de vénérée mémoire, le pape Pie XL Cette constitution marque avec soin la distinction, qu'il faut bien suivre dans la pratique, entre les disciplines principales (auxquelles s'ajoutent les auxiliaires) et les autres, qui sont appelées spéciales. Les premières — que les professeurs y fassent grande attention dans l'enseignement et dans les ex?mens — doivent tenir la place principale et être comme au centre des études ; les autres doivent être enseignées et travaillées de telle façon qu'elles accompagnent et complètent bien les disciplines principales, sans pourtant prendre trop de travail ni aller jusqu'à gêner, même le plus légèrement, l'étude approfondie et vraiment capitale des sciences principales.

En outre, on doit s'en tenir entièrement au canon qui prescrit sagement que « les études de philosophie rationnelle et de théologie, et l'enseignement de ces disciplines aux élèves doivent être réalisés par les professeurs selon les méthodes, la doctrine et les principes du Docteur angélique, et qu'il faut fidèlement s'y tenir » 2. Or, c'est bien le caractère distinctif de la sagesse de Thomas d'Aquin d'éclairer d'une vive lumière les vérités accessibles à la raison humaine, et de les grouper remarquablement dans l'unité par un lien bien adapté et solide ; de s'adapter le mieux possible à l'exposé et à la défense des dogmes de la foi ; de combattre efficacement et de vaincre sûrement les erreurs fondamentales qui se déchaînent à toute époque.

Dès lors, très chers fils, apportez dans vos études une âme pleine d'un amour ardent pour saint Thomas ; faites tout ce que vous pouvez pour en pénétrer par votre intelligence la riche doctrine ; embrassez volontiers tout ce qui en fait manifestement partie et en constitue les éléments certains et principaux.



Mise en garde contre certains dangers.

Ces principes, déjà promulgués par Notre prédécesseur, Nous avons estimé devoir aujourd'hui les rappeler et, là où ce serait nécessaire, les reconfirmer intégralement ; et en même temps Nous faisons Nôtres les avertissements de Nos prédécesseurs, qui voulurent assurer le progrès de la vraie science et une légitime liberté dans les études. Nous approuvons pleinement et Nous recommandons que, là où il le faudra, la sagesse antique soit adaptée aux récentes découvertes scientifiques ; qu'on discute librement les points sur lesquels divergent les interprètes autorisés du Docteur angélique ; qu'on utilise les nouvelles ressources fournies par l'histoire pour une meilleure intelligence des textes de l'Aquinate. Mais qu'aucune personne privée « ne se conduise en maître dans l'Eglise » 3, ni « que les uns exigent des autres plus que ce que n'exige de tous l'Eglise, mère et maîtresse de tous » 4, ni, enfin, qu'on suscite de vaines discordes.



Benoît XV, A. A. S., 6, 1914, p. 576. Pie XI, A. A. S., 15, 1923, p. 324.



Si toutes ces règles sont observées, comme Nous l'espérons, on peut en attendre d'abondants avantages pour la science. En effet, en recommandant la doctrine de saint Thomas, on ne supprime pas l'émulation dans la recherche et dans la diffusion de la vérité, mais on la stimule plutôt et on la guide.

Mais pour que votre formation scientifique soit féconde en fruits précieux, il faut, Nos très chers fils, et Nous vous y exhortons de tout coeur, que les connaissances scientifiques, dont vous faites peu à peu l'acquisition au cours de vos études, n'aient pas seulement pour but la réussite des examens scolaires, mais plutôt qu'elles impriment dans vos âmes comme une sorte d'empreinte marquée si fortement qu'elle ne s'efface jamais plus, et de laquelle vous puissiez, le moment venu, faire sortir tout ce qui est utile pour propager par la parole ou les écrits la vérité catholique et conduire les hommes au Christ.

Ce que Nous avons dit vaut à la fois pour ce qui a trait à la vérité divinement révélée et pour ses prémisses rationnelles, c'est-à-dire pour l'exposé et la défense des principes de la philosophie chrétienne. Le relativisme fut par Pie XI, Notre prédécesseur d'immortelle mémoire, assimilé au modernisme dogmatique et, en le « réprouvant grandement », il le dénommait « modernisme moral, juridique et social » 5, en tant qu'il ne reconnaît pas comme règles du vrai et du faux, du bien et du mal, les lois immuables du juste et du droit, mais prétend établir les normes dans ce qui est utile — mais qui varie indéfiniment — aux individus, à l'ordre civil, à l'Etat et aux classes. A ce modernisme vous devez, comme il convient à des prédicateurs du saint Evangile, opposer courageusement les vérités pleines et absolues qui nous viennent de Dieu, d'où découlent nécessairement les premiers droits et devoirs des individus, de la société domestique et des Etats, et sans lesquelles la dignité et le bien-être de la société civile ne pourraient se maintenir. Et vous remplirez cette mission de façon vraiment parfaite si ces vérités ont tellement pris possession de votre esprit que vous soyez prêts, comme pour les mystères de la foi, à ne fuir pour elles aucune fatigue, à ne refuser aucun ennui.

Vous devrez aussi vous efforcer de présenter la vérité, de façon à ce qu'elle soit exactement comprise et goûtée, vous servant d'un langage toujours clair et jamais ambigu, et évitant ces changements superflus et nocifs qui facilement altèrent la substance de la vérité.

Tels ont toujours été la règle et l'usage dans l'Eglise catholique ; et à cela on peut appliquer la parole de saint Paul, que « Jésus-Christ... n'a pas été oui et non, mais il n'y a jamais eu que oui en lui » (2Co 1,19).



Conseils pour l'étude des différentes sciences.

Que si nous considérons l'ordre de la vérité divinement révélée et des mystères de la foi catholique, il est bien vrai que les grands progrès dans la recherche et dans l'utilisation des forces naturelles, et plus encore le bruit avec lequel on répand l'enseignement de choses purement terrestres, ont troublé l'esprit d'un très grand nombre, de telle sorte qu'ils réussissent à peine à percevoir le surnaturel ; il n'est pas moins vrai que les prêtres zélés de Dieu remportent aujourd'hui des succès plus grands et plus merveilleux que jamais peut-être dans la conquête des âmes au Christ. Pour que vous aussi vous deveniez des prêtres de cette valeur, sous la conduite et à l'exemple de saint Paul, que rien ne vous soit plus cher que l'étude de la théologie, tant biblique-positive que spéculative. Gravez profondément dans votre esprit qu'aujourd'hui les fidèles désirent ardemment et demandent de bons pasteurs d'âmes et des confesseurs instruits. Attachez-vous donc avec une pieuse ardeur à l'étude de la théologie morale et du Droit canon. Même le Droit canon est ordonné au salut des âmes, et à travers toutes ses règles, par toutes ses lois, il tend par-dessus tout et en dernière analyse à ce que les hommes vivent et meurent sanctifiés par la grâce de Dieu.

Les sciences historiques, dans la mesure où elles sont enseignées, ne doivent pas se borner aux questions critiques ou purement apologétiques — encore que celles-ci aient leur importance — mais qu'elles tendent plutôt toujours à montrer l'activité de la vie de l'Eglise ; par exemple, tout ce que l'Eglise a fait, tout ce qu'elle a souffert ; suivant quelles méthodes et avec quels succès elle a rempli son mandat ; comment elle a exercé la charité par des oeuvres ; où se cachent les périls qui s'opposent à un état florissant de l'Eglise ; dans quelles conditions les relations entre l'Eglise et l'Etat ont été bonnes ou moins bonnes ; ce que l'Eglise peut concéder au pouvoir politique, et dans quelles circonstances, au contraire, elle doit être irréductible ; enfin, un jugement réfléchi sur la condition de l'Eglise et un sincère amour de l'Eglise. Voilà ce que le cours d'histoire ecclésiastique doit présenter et développer devant l'élève, devant vous surtout, très chers fils, qui étudiez dans cette ville où les monuments antiques, les riches bibliothèques, les archives ouvertes aux études et aux recherches, mettent en quelque sorte sous les yeux la vie de l'Eglise catholique au cours des siècles.

Mais pour ne pas laisser s'amoindrir votre persévérance et votre courage, très chers fils, tous les jours, dans la mesure du possible, puisez dans la source inépuisable des Livres saints, et spécialement du Nouveau Testament, le véritable esprit de Jésus-Christ et des apôtres, pour le faire resplendir toujours dans votre intelligence, dans vos paroles, dans vos actions. Soyez infatigables dans le travail, même durant les vacances, afin que vos supérieurs puissent répéter avec confiance : « Que votre lumière brille devant les hommes afin que, voyant vos bonnes oeuvres, ils glorifient votre Père qui est dans les cieux » (Mt 5,16).



Les séminaristes doivent joindre à l'étude la prière et l'esprit de sacrifice...

Il appartient à votre vocation divine de préparer dans le coeur des hommes la voie à l'amour et à la grâce de Jésus-Christ. Pour atteindre ce but, il faut d'abord que vous soyez vous-mêmes enflammés de cet amour. Allumez donc l'amour du Christ en vous, par l'union avec le Christ, dans la prière et le sacrifice.

Nous disons par le moyen de l'union dans la prière, parce que si vous Nous demandez quel mot d'ordre Nous donnons, au début de Notre pontificat, aux prêtres de l'Eglise catholique, nous répondons : Priez, priez toujours plus et avec une plus grande ferveur.

Par le moyen de l'union dans le sacrifice, dans le sacrifice eucharistique. Non seulement dans le sacrifice eucharistique, mais en même temps dans le sacrifice de soi-même. Vous savez qu'un des effets de la très sainte Eucharistie est de donner à celui qui y assiste et à celui qui la reçoit de la force pour le sacrifice et l'abnégation de soi-même. Il y a à la vérité, et elles doivent le rester, diverses formes d'ascèse chrétienne, différentes entre elles sur plusieurs points secondaires ; mais aucune d'entre elle ne connaît de voie pour atteindre la charité divine en dehors du sacrifice de soi-même. C'est ce que Jésus-Christ réclame de ceux qui le suivent, lui qui a dit : « Si quelqu'un veut venir après moi, qu'il se renonce lui-même, qu'il porte sa croix chaque jour et me suive » (Lc 9,23) ; lui qui a déclaré expressément que la voie conduisant à l'amour de Dieu se trouve dans l'observation des commandements divins (Jn 15,10) ; qui, enfin, a donné spécialement à ses apôtres cette autre admirable sentence : « En vérité, en vérité, je vous le dis, si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il demeure seul ; mais s'il meurt, il porte beaucoup de fruit » (Jn 12,24-25).

Le ministère sacerdotal réclame de vous des sacrifices individuels, comme Nous vous le disions, parmi lesquels ce sacrifice principal et total de soi-même, en hommage au Christ, qui se fait par le célibat. Examinez-vous vous-mêmes ! Et si certains se sentaient incapables d'y être fidèles, Nous les conjurons de quitter le séminaire et de s'en aller ailleurs pour y mener, honnêtement et avec fruit, une vie qu'autrement ils traîneraient dans le sanctuaire non sans péril pour leur salut et non sans déshonneur pour l'Eglise. Nous exhortons ensuite ceux qui sont déjà dans l'état sacerdotal, ou sont prêts à y entrer, à s'offrir totalement et de grand coeur. Faites attention à ne pas vous laisser surpasser dans cette générosité par tant de fidèles qui aujourd'hui supportent patiemment les plus dures épreuves pour la gloire de Dieu et la foi de Jésus-Christ ; mais devancez-les tous dans de tels combats par la lumière de l'exemple et procurez-leur, par vos travaux et votre abnégation, la grâce divine, durant leur vie et à leur mort.



et aussi le souci d'une très grande charité...

En outre, « nous avons reçu de Dieu ce commandement que celui qui aime Dieu aime aussi son frère » (1Jn 4,21). Cette charité envers le prochain proclamée par Jésus-Christ comme étant le signe et en quelque sorte le mot d'ordre de tout chrétien (Jn 13,35), doit, à plus forte raison, être le signe disttnctif du prêtre catholique ; et, du reste, elle ne peut être séparée de l'amour de Dieu, comme le démontre clairement l'apôtre Paul qui, exaltant la charité dans un éloge sublime souligne de façon magnifique la correspondance entre l'amour de Dieu et l'amour du prochain (1Co 13). Cet amour du prochain ne connaît pas la barrière des frontières, mais s'étend à tous les hommes, à toutes les langues, à toutes les nations et à toutes les races. Or donc, très chers fils, profitez de l'heureuse et spéciale facilité que vous offre votre séjour à Rome pour pratiquer cette charité envers la grande multitude de jeunes confrères qui, bien qu'originaires des nations les plus diverses et très éloignées les unes des autres, sont du même âge, ont la même foi, la même vocation, le même amour pour Jésus-Christ, et enfin jouissent des mêmes droits dans l'Eglise. Profitez, disons-Nous, d'une telle occasion pour nourrir cette charité ; et ne faites ni ne dites rien qui puisse la blesser, même légèrement. Laissez aux autres les polémiques des partis politiques : ce n'est pas votre affaire. Au contraire, communiquez-vous réciproquement les nouvelles qui ont trait ou peuvent être utiles à l'apostolat, au soin des âmes, à la situation et à l'expansion de l'Eglise.



. enfin l'obéissance et la fidélité au pape.

En dernier lieu, si vous voulez progresser dans l'amour du Christ, il est nécessaire de cultiver l'obéissance comme une confiance filiale et l'amour envers le Vicaire de Jésus-Christ. C'est le Christ, en effet, qu'en lui vous vénérez et auquel vous offrez votre obéissance ; le Christ en lui vous est présent. C'est à tort que l'on distingue entre l'Eglise juridique et l'Eglise de la charité. Il n'en est pas ainsi ; mais cette Eglise fondée sur le droit, qui a pour chef le Souverain

Pontife, est aussi l'Eglise du Christ, l'Eglise de la charité et l'universelle famille des chrétiens. Que régnent donc entre Nous et vous ces sentiments qui, dans une famille vraiment chrétienne, unissent étroitement les fils au père et le père aux fils. Et vous qui, demeurant à Rome, êtes témoins que ce Siège apostolique, laissant de côté toutes considérations humaines, ne pense à rien d'autre et ne cherche rien d'autre que le bien, le bonheur et le salut des fidèles et de tout le genre humain, transmettez à vos frères épars dans le monde entier cette confiance que vous avez acquise par votre expérience personnelle, afin que tous soient uns dans la charité du Christ avec le Souverain Pontife.

Votre apostolat sacerdotal, illuminé par la vérité divine et animé de l'amour du Christ à travers les très violentes tempêtes d'un monde hostile à la vérité et à l'amour et au milieu des difficultés et des épreuves — qui sont le privilège et comme la compagnie naturelle et nécessaire de tous ceux qui se dévouent à l'apostolat — ne sera pas dépourvu, par la grâce de Dieu, de fruits abondants pour le salut des âmes, ni de cette consolation réconfortante qui faisait dire au saint Docteur des gentils : « Par le Christ, nous sommes comblés de consolations » (2Co 1,5).

Dieu seul sait par quelles voies sa Providence conduira chacun de vous, quelles ascensions et quelles descentes, combien de pas sur des sentiers pierreux et épineux vous attendent. Mais une chose reste bien déterminée et sûre dans la vie de tout prêtre rempli de la vérité et de la charité du Christ : à savoir, l'espérance en Celui « qui nous a donné la victoire par Notre-Seigneur Jésus-Christ » (1Co 15,57).

Et cette certitude surnaturelle dans la victoire, en qui s'enraci-nera-t-elle plus profondément qu'en vous ? Vous avez, en effet, près de la tombe des apôtres et aux catacombes des martyrs, puisé cet esprit qui déjà, aux temps passés, renouvela le genre humain, et qui sait qu'aujourd'hui encore les promesses de Jésus-Christ conservent leur force. Aussi, Nos très chers fils, Nous vous répéterons avec gravité ce que, heureux et sûr du fruit de son labeur apostolique, répétait l'apôtre saint Paul : « Ainsi, mes frères bien-aimés, soyez fermes, inébranlables, travaillant de plus en plus à l'oeuvre du Seigneur, sachant que votre travail dans le Seigneur ne saurait être vain » (1Co 15,58).

Rempli de cette espérance, invoquant sur tous et sur chacun de vous les plus abondantes grâces du Pontife éternel, en gage de cette grâce de lumière et de force, Nous vous donnons de tout coeur dans le Seigneur la Bénédiction apostolique.





LETTRE AU R\2me\0 PÈRE PIERRE DAMIEN BUFFALDINI SUPÉRIEUR GÉNÉRAL DES MOINES ERMITES CAMALDULES DE L'ORDRE DE SAINT BENOIT

(24 juin 1939) 1



1 D'après le texte latin des A. A. S., XXXI, 1939, p. 343.



Parmi les hommes de grand mérite qui ont illustré par leur piété et leur doctrine l'ordre des Camaldules, Ambroise Traversari, dont le cinquième centenaire de la mort bienheureuse vient de sonner, tient assurément une place éminente.

En effet, remarquable par l'intégrité de sa vie, il dépensa de longs efforts à rechercher et à transcrire des manuscrits, écrivit dans un latin élégant de nombreuses oeuvres sur des sujets sacrés et profanes, remplit avec soin d'importantes charge dans son ordre et accomplit avec ardeur des missions très honorifiques sur l'ordre et pour l'utilité du Siège apostolique.

Parmi toutes les autres sont dignes d'une mémoire particulière la légation qu'il accomplit pour le pape Eugène 4, Notre prédécesseur d'heureuse mémoire, auprès de l'empereur Sigismond et par laquelle il réussit à faire transférer le concile de Bâle à Ferrare, et la charge qui lui fut confiée par les Pères du concile de Florence de rédiger le décret d'union pour ramener les Grecs dans le sein de l'Eglise catholique.

Ces missions accomplies avec éclat attestent lumineusement que la contemplation des choses éternelles non seulement n'est pas un obstacle à l'accroissement et aux progrès de cette vie mortelle, mais encore peut apporter de nombreux services et aux hommes pris en particulier et à la société civile et chrétienne. De quel amour, de quelle sainte dévotion, cet homme remarquable a été animé à l'égard du Siège apostolique et du pontife romain dont il a affirmé et revendiqué avec force les droits et la primauté, il serait facile de le montrer par ses lettres ! Rappelons seulement parmi d'autres ces paroles magnifiques qu'il écrivait au pape Eugène IV : « Nous sommes prêt à mourir pour Votre nom parce que nous pensons que nulle autre mort ne serait pour nous plus précieuse que celle-là. »

C'est pourquoi, Nous rappelant en mémoire avec joie les louanges et les mérites d'Ambroise Traversari, non seulement Nous honorons d'une louange méritée les célébrations centenaires qui vont bientôt avoir lieu en son honneur, mais encore Nous y participons volontiers par la présente lettre. Les actions si glorieuses de cet homme de Dieu rappelées opportunément en mémoire par des solennités publiques encourageront à coup sûr tous les moines de l'ordre de Saint-Benoît et particulièrement les fils de saint Romuald, à apporter le maximum de bien à votre famille religieuse, à l'Eglise et à la cité par l'attachement fécond à la vie érémitique, par un amour unanime de l'unité, par la contemplation des choses divines, par la recherche approfondie des saintes disciplines. Et afin que cette proche célébration soit plus salutaire, Nous vous donnons, chers fils, la faculté de bénir en Notre nom et en Notre autorité, tous les fidèles présents, au jour fixé, après la célébration solennelle du saint sacrifice, et de leur accorder une indulgence plénière à gagner selon les prescriptions de l'Eglise.






Pie XII 1939 - LETTRE APOSTOLIQUE POUR LA BÉATIFICATION D'EMILIE DE VIALAR FONDATRICE DES SOEURS DE SAINT-JOSEPH DE L'APPARITION