Pie XII 1945 - L'« OPUS OPERATUM » ET L'« OPUS OPERANTIS »


LA VIE DES FIDÈLES SANCTIFIÉE ET SOUTENUE PAR LA VERTU DES SACREMENTS

Toutefois, Nous avons ici l'intention d'insister, moins sur ce rapport de i'opus operatum avec Vopus operantis que bien plutôt sur la vie que les fidèles doivent mener, s'ils veulent vraiment correspondre à la grâce reçue par le moyen des sacrements et en premier lieu de la très sainte Eucharistie. En nous donnant les sacrements, le Christ ne s'est pas proposé de nous dispenser de la lutte pour la perfection chrétienne, mais de nous mettre en mesure de l'affronter : « Renouvelez-vous spirituellement dans votre intelligence — recommande l'Apôtre des gentils aux chrétiens d'Ephèse — et revêtez-vous de l'homme nouveau créé selon Dieu dans la vraie justice et sainteté » (Ep 4,23-24). Avec la vigueur incisive qui lui est propre, l'Apôtre entre dans le détail de la douloureuse opposition entre la sérénité toute céleste de la grâce divine et la ténébreuse réalité de la nature déchue, rappelant à ses fidèles que désormais le triomphe sur le péché ne dépend que d'eux. « Et n'attristez pas l'Esprit-Saint de Dieu, en qui vous avez été marqués d'un sceau pour le jour de la Rédemption » (Ep 4,30). Personne, mieux que 'l'apôtre saint Paul, n'a mis en rayonnante lumière la magnificence de la vie surnaturelle que les sacrements nous communiquent ; personne n'a imposé d'exigences et de conditions plus hautes au rôle personnel des fidèles quand il s'agit de « marcher dans le renouveau de la vie » (Rm 6,4). C'est dans cette coopération de la vertu du sacrement avec l'effort humain que consiste le secret de la foi vive, de la vie sérieusement chrétienne, du véritable élan vers la perfection spirituelle. Là est le pivot où viennent se fondre en l'unité, la liturgie et le ministère pastoral, et là se trouve en même temps le sommet de cette union.

Quel est, en fait, le but du ministère pastoral, sinon que l'homme vive, grandisse et meure dans la grâce divine ? Mais la grâce de Dieu, le « renouveau de vie », la force d'agir conformément à cette vie nouvelle, voilà ce que procurent les sacrements. Cette activité elle-même doit s'exercer dans tous les domaines : dans la vie individuelle, dans la vie familiale, dans la vie professionnelle, dans la paix et dans la tranquillité, dans l'agitation et dans le danger. Les fonctions liturgiques, la célébration de la messe, l'administration des sacrements ne se peuvent concevoir comme isolées de l'ensemble de la vie. Elles sont destinées à la purifier, à la sanctifier, à la diriger vers Dieu. Quelle sollicitude exige un tel travail pour que les âmes soient préparées et disposées à recevoir dignement et avec fruit les sacrements ! Quelle lutte pour assurer leur persévérance et leur progrès dans le bien ! Néanmoins, chers fils, le but principal et le plus important auquel doivent tendre vos efforts sans se lasser, sans jamais désespérer d'un bon résultat, c'est la réalisation et l'achèvement de cette unité chez les fidèles confiés à vos soins, de cette continuelle action et réaction réciproque du sacrement et de la vie.

BRÈVES REMARQUES SUR CERTAINS SACREMENTS EN PARTICULIER

Si Nous en venons maintenant aux sacrements en particulier, vous connaissez, chers fils, par expérience personnelle, l'espèce et la gravité des devoirs que leur digne et fructueuse administration impose à la charge pastorale ! C'est pourquoi, Nous Nous bornerons à traiter un petit nombre de points qui semblent réclamer une particulière attention.

La pénitence.

Nous avons déjà parlé à une autre occasion des qualités dont un bon confesseur doit être revêtu. Nous voudrions aujourd'hui faire une recommandation qui regarde plutôt les pénitents.

N'est-il pas vrai que les confessions, pour produire des effets durables, devraient être préparées avec plus de soin qu'elles ne le sont généralement ? Nous parions ici, non pas tant des confessions qui se font par pure dévotion que des confessions nécessaires. Il est clair que le confesseur ne peut, pour chaque pénitent qui se présente, recommencer l'examen de conscience à partir du début ainsi que toute la préparation. Le temps lui ferait défaut pour cela et les forces ne lui suffiraient pas. C'est pourquoi il faut donner une instruction commune, solide, complète sur la confession, non seulement au catéchisme pour enfants, mais bien plus encore d'ans celui que l'on fait aux adolescents et aux adultes. Cette instruction apporte la lumière aux consciences et la paix aux coeurs, là où il n'y a pas de motif sérieux d'inquiétude : mais elle pénètre également, tranchante comme le bistouri du chirurgien, là où se cache l'abcès du péché, surtout du péché grave. Elle conduit efficacement à la contrition intérieure, surnaturelle, universelle, à la sincère détes-tation du péché et à la conversion à Dieu. Dans vos prédications du dimanche, vous ne pourriez traiter de sujets plus utiles que les vérités religieuses, les commandements, les pratiques réglant la vie quotidienne et ordinaire de vos paroissiens, la nécessaire et convenable préparation au sacrement de pénitence.

L'extrême-onction.

Exhortez les fidèles à appeler à temps le prêtre auprès de ceux qui sont gravement malades et auprès des mourants. Combattez avec charité et persévérance cette crainte déraisonnable qui trouble tant de gens à la pensée de l'extrême-onction, comme si elle était le signal de la mort, alors qu'elle est un sacrement de vie : toujours et en premier lieu un sacrement de vie surnaturelle pour la sanctification et le réconfort spirituel de l'âme ; mais aussi, dans la mesure où il agit sur le corps, il ne pourra procurer que secours et soulagement.

L'Eucharistie.

Vous pourrez espérer obtenir un meilleur et plus durable résultat touchant les deux buts essentiels du ministère pastoral eucharistique, à savoir l'assistance à la sainte messe et la fréquentation des sacrements, si dans vos efforts vous les associez au précepte de la sanctification des fêtes. Il faut obtenir que tous les fidèles trouvent de nouveau, comme dans le passé, chaque semaine, le temps et un temps suffisant pour s'adonner au service de Dieu et au salut de leurs âmes, pour écouter la parole de Dieu, pour lire un bon livre, pour donner du repos au corps et la paix intérieure à l'âme, autant que possible au sein de la famille.

Sur ce chapitre, Nous ne pourrions que répéter ce que Nous vous avons déjà dit d'autres fois en de semblables audiences. Nous ajouterons toutefois une remarque. Ce serait une funeste illusion si, à cause de la difficulté de ramener le peuple des grandes villes à une plus scrupuleuse sanctification des fêtes de précepte, on regardait comme plus prudente la tactique du silence, sous le prétexte spécieux que même en ce cas il faut laisser les gens dans la bonne foi et ne pas transformer des consciences endormies ou de bonne foi erronées en consciences positivement mauvaises. Non, chers fils. En une matière aussi grave et de telle importance, ne recourez pas à cette échappatoire. Votre pusillanimité vous exposerait à la menace du prophète : « Malheur aux pasteurs qui laissent périr et se disperser le troupeau de mon pâturage, dit le Seigneur » (Jr 23,1).

Le mariage.

Quant au sacrement de mariage, l'Italie, dans sa législation actuelle, ne reconnaît pas le divorce. Notez bien que l'Eglise n'est pas la seule à le repousser : des voix autorisées se sont fait entendre aussi dans le monde des juristes et des sociologues laïques pour avertir et pour conjurer de ne pas permettre que le divorce pénétrât dans le sanctuaire du mariage et de la famille pour le profaner et le faire tomber en ruine.

Hélas ! une propagande ouverte en faveur du divorce a déjà été lancée dans une certaine presse, au risque, pour les esprits peu avisés, d'être induits en erreur, et que soit encouragé un mouvement contraire à la loi naturelle et divine et à la sainte loi du Christ. Les fidèles catholiques doivent à cause de cela maintenir très fermement les trois points fondamentaux ci-après : ils ne peuvent contracter un véritable mariage valide que conformément à la forme prescrite par l'Eglise ; le mariage validement contracté entre personnes baptisées est par le fait même un sacrement ; le mariage valide entre baptisés, une fois consommé, ne peut être dissout pour aucun motif, par aucune autorité humaine, par aucun pouvoir terrestre, mais seulement par la mort.

Il vous appartient à vous, pasteurs d'âmes, de graver profondément ces trois principes dans l'esprit et la conscience des fidèles, afin qu'ils leur servent de règle dans leur vie personnelle et leur fournissent en toute occasion une ligne de conduite ferme et précise.


LES DONS D'UNITÉ ET DE PAIX

Dans la secrète de la fête du Très Saint Sacrement, nous récitons cette prière : « Daignez, s'il vous plaît, Seigneur, accorder à votre Eglise les dons de l'unité et de la paix qui sont mystérieusement signifiés par le pain et le vin de cette offrande. » Si la très sainte Eucharistie est présentée dans cette prière comme le mystère de l'unité et de la paix et si elle est réellement cela par excellence, cette céleste note caractéristique appartient cependant aussi aux autres sacrements. Tous nous apportent l'union et la paix avec Dieu ; cette union qui dépasse tout ce que l'on peut imaginer, puisqu'elle consiste dans la participation à la nature divine ; cette connaissance ineffable dans laquelle nous appelons Dieu notre Père et lui nous appelle ses enfants et ses amis.

D'un autre côté, les sacrements établissent l'union et la paix entre les hommes, selon la parole de saint Paul qui nous exhorte (Ep 4,3-5) à nous appliquer « à maintenir l'unité de l'Esprit par le lien de la paix. Un seul Corps... un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême. Il n'est qu'un seul Dieu et Père de tous... » Et Nous, Nous pouvons ajouter : une même Table eucharistique qui nous réunit tous au Christ sans aucune distinction d'origine, de nation, de classe sociale, et les uns aux autres dans l'unité du Corps mystique du Christ ; un même flux de grâce dans le mariage qui unit, dans l'unité de la foi, de la charité, de la concorde, de la paix, l'époux et l'épouse, les parents et les enfants, les familles chrétiennes entre elles ; un même sacerdoce qui embrasse et doit tenir unis tous les prêtres de la terre dans cette plus étroite union que le monde ne connaît pas.

L'OEUVRE DE CHARITÉ

Notre espérance de la réconciliation des peuples repose sur cette force surnaturelle et sur ce lien qui unit comme entre frères : et Nous les voyons déjà agir de multiples manières, surtout en faveur des victimes de la guerre dans une oeuvre de charité vers laquelle les fidèles du monde entier font converger leurs généreuses offrandes, Nous mettant ainsi en mesure de répondre autant que possible aux innombrables demandes qui font appel à Notre aide.

Notre secours désire atteindre toutes les parties du monde, sans distinction de race ou de langue, tous ceux que l'horrible guerre a jetés dans la misère. Pour ce qui regarde plus spécialement l'Italie, Notre sollicitude se préoccupe surtout de venir en aide aux enfants, aux malades, aux réfugiés, aux malheureux, aux rapatriés. L'urgence de la conjoncture Nous a conduit à établir ici à Rome cette oeuvre de charité par 'laquelle Nous Nous efforçons de secourir la grande foule des pauvres vagabonds, sans toit, sans vêtement, en proie aux horreurs de la faim.

Nous remercions Dieu en toute humilité pour tout ce qu'il Nous a été donné de faire jusqu'à présent en ce domaine. Mais Notre reconnaissance s'adresse aussi à vous, chers fils, et à vos chers paroissiens : à vous, à cause de votre zèle ardent, à eux pour 'les abondantes aumônes que vous avez pieusement rassemblées et transmises à la Commission pontificale d'assistance, établie par Nous. Sachez, vous, 'les pasteurs des âmes dans Notre diocèse de Rome, que les associations d'Action catholique, que les fidèles sachent qu'à cette heure tragique de misère et d'angoisses, cette oeuvre est celle qui Nous est plus chère que toute autre ; c'est vers elle qu'ils doivent diriger les efforts de leur charité, si un désir du Vicaire du Christ trouve écho dans leurs coeurs.


LES MISSIONS SACRÉES

Nous ne voulons pas terminer cette instruction pastorale sans avoir jeté un regard sur la Croix de mission élevée dans les églises de Rome.

N'oubliez pas que les missions visent moins ceux qui sont déjà des nôtres et travaillent avec nous, que ceux du dehors, qui foris sunt (1Co 5,12), les indifférents, les hostiles, ceux qui ont mal tourné, qui se sont perdus, qui sont dans l'erreur ; non pas tant ceux qui, dans la maison paternelle abundant panibus, « ont du pain en surabondance », que les fils prodigues qui famé pereunt, « qui meurent de faim » (Lc 15,17). C'est d'après le nombre de ceux qui, en ces jours de grâces, auront retrouvé le droit chemin qui conduit à Dieu, au Christ, à l'Eglise, que vous pourrez apprécier et évaluer le résultat de la mission. Ce résultat, chers fils, dépend non seulement de la parole des prédicateurs, mais aussi du clergé paroissial ; du zèle avec lequel il prépare la mission, parcourant en tous sens la paroisse, rue par rue, maison par maison, rassemblant les dispersés, secouant les négligents ; du zèle avec lequel le clergé suit la mission une fois commencée, en priant, en encourageant, en venant en aide de toute façon, en veillant au bon ordre de toutes choses.

Puisse l'amour du Père céleste des miséricordes, puisse la grâce du Christ, puisse le souffle de l'Esprit qui avive l'unité dans la foi et la concorde dans l'action, faire produire des fruits abondants à votre travail. Nous-même, au cours de ces semaines de mission, Nous vous resterons uni, jour par jour, heure par heure, par le coeur et par la prière. En présage du secours divin tout-puissant, Nous vous donnons à vous, chers fils, à vos collaborateurs, à vos paroissiens, à tous ceux qui écouteront avec attention et dévotion votre prédication de carême, Notre paternelle Bénédiction apostolique.


ALLOCUTION AUX TRAVAILLEURS CHRÉTIENS D'ITALIE

(11 mars 1945J1

A deux cents délégués des associations chrétiennes de travailleurs italiens en congrès national à Rome, le Saint-Père a rappelé les devoirs de ces associations, les relations qu'elles doivent avoir avec les syndicats et le rôle qu'elles auront à jouer dans l'établissement du nouvel ordre social.

Notre prédécesseur de sainte mémoire, Pie XI, commémorant l'immortelle encyclique Rerum novarum de Léon XIII a rappelé avec quelle allégresse l'accueillirent les ouvriers chrétiens « qui se sentirent protégés et défendus par la plus haute autorité de la terre » 2. Votre présence autour de Nous, chers fils, est un témoignage très doux pour Notre coeur que ce sentiment et cette confiance sont toujours vivants au sein des classes ouvrières. Quant à Nous qui, connaissant parfaitement leurs conditions d'existence, désirons de tout coeur défendre la cause des travailleurs chrétiens et même de tout le vaste monde du travail, Nous vous souhaitons paternellement la bienvenue et, tout en vous exprimant Nos voeux les plus fervents pour vous et pour vos associations, Nous voudrions vous adresser quelques brèves paroles d'enseignement et d'encouragement.

Ce que sont les associations catholiques d'ouvriers.

1. — Et tout d'abord : que sont pour leurs propres membres les associations catholiques d'ouvriers ? Elles sont, en premier lieu, des cellules de l'apostolat chrétien moderne. Non pas en ce sens qu'elles peuvent et doivent se substituer à la paroisse. Mais elles maintiennent, exploitent et conservent dans le monde du travail le fondement religieux et moral de la vie, d'une manière toujours adaptée aux circonstances spéciales de chaque époque. Observez les ennemis de Jésus-Christ. Ils exploitent toutes les difficultés et tous les problèmes de la vie ouvrière pour conquérir l'âme du travailleur chrétien, pour égarer sa conscience et, finalement, le détacher et l'éloigner du divin Sauveur. N'est-ce pas là une preuve évidente que les associations de travailleurs chrétiens sont aujourd'hui un moyen indispensable d'apostolat ? Indispensable même dans ces milieux où il ne paraît pas que l'ennemi du Christ ait déjà pris pied et donné des signes particuliers d'agitation et d'activité, car partout les conditions pratiques et les besoins quotidiens du travail salarié déconcertent les intelligences même des hommes profondément croyants, et soulèvent des problèmes qui, touchant aux intérêts religieux et moraux requièrent le concours et l'assistance de l'Eglise. Portez donc, au moyen de vos associations, les principes de la foi et une solide formation chrétienne dans la vie religieuse et morale du travailleur et de sa famille. Faites de ces associations elles-mêmes autant de centres d'une vie spirituelle qui, abondamment alimentée par les sacrements, répande ses fruits bienfaisants dans les paroles et les actes d'une charité mutuelle vraiment évangélique.

Fermement établi sur ce solide fondement, le travailleur chrétien trouvera en même temps dans les associations la possibilité d'étendre son savoir et son pouvoir dans les autres domaines de la vie privée et publique. Mais, par-dessus tout, une association de ce genre doit contribuer à rendre la famille du travailleur chrétien capable, autant et plus que les autres familles, à bien éduquer les enfants et à gouverner la maison avec profit spirituel et matériel pour ses membres. Si elle remplit cette mission, l'association verra surgir dans son sein de véritables apôtres, des travailleurs qui se font apôtres parmi leurs compagnons pour imprégner et animer de l'esprit chrétien le milieu tout entier de l'ouvrier, son champ de travail, son foyer domestique et jusque ses honnêtes loisirs.

Leur place parmi les autres institutions ouvrières.

2. — Ici, Nous abordons un deuxième point qui Nous tient souverainement à coeur : que représentent les associations de travailleurs chrétiens pour les autres institutions ouvrières f En ce moment,

Nous pensons non seulement aux associations d'assistance mutuelle, telles, par exemple, les coopératives de consommation, mais encore aux institutions publiques d'assurances qui requièrent la contribution des travailleurs. Vous savez tous combien le succès de telles organisations, salutaires et avantageuses en soi, dépend de la probité, de l'honnêteté et de la confiance mutuelle de leurs adhérents. Vous connaissez aussi — et vous en faites tous les jours l'amère expérience — les terribles ravages provoqués par la guerre et ses funestes conséquences dans la moralité sociale du peuple, ravages beaucoup plus graves que les immenses dommages matériels eux-mêmes. La classe ouvrière, sans ces vertus chrétiennes, deviendrait le pire ennemi d'elle-même. Dans la lutte contre ce péril, les associations chrétiennes apportent une aide précieuse aux autres associations et oeuvres d'assistance des classes ouvrières. En effet, si elles arrivent à être réellement le foyer des vertus sociales, de la droiture, de la fidélité, de la conscience professionnelle, elles fourniront aux autres institutions leurs meilleurs membres, leurs dirigeants les plus sûrs, hommes et femmes, qui sauront susciter et maintenir vivant l'esprit de responsabilité et de solidarité, sans lequel aucune mutualité, aucune assistance ne peuvent prospérer. C'est cet esprit que saint Paul définissait en ces paroles magnifiques : Alter alterius onera portate, « portez les fardeaux les uns des autres » (Ga 6,2).

Leurs relations avec les syndicats.

3. — Examinons maintenant brièvement les relations des associations chrétiennes avec les syndicats. Contrairement à ce qui se pratiquait auparavant, on a constitué récemment en Italie l'unité syndicale. Nous comptons et espérons bien que les renoncements consentis avec leur adhésion par les travailleurs catholiques ne causeront pas de préjudice à leur cause, mais aboutiront au résultat attendu par tous les travailleurs. Cela suppose la condition fondamentale que le syndicat se maintienne dans les limites de son but essentiel qui est de représenter et de défendre les intérêts des travailleurs par les contrats de travail. Dans le cadre de cette mission, le syndicat exerce naturellement une influence sur la politique et sur l'opinion publique. Cependant, il ne pourrait dépasser cette limite sans se causer de graves préjudices à lui-même. Si le syndicat, comme tel, par suite de l'évolution politique et économique, en venait à exercer une sorte de patronage ou de droit en vertu duquel il disposerait librement du travailleur, de ses forces et de ses biens, comme il arrive dans d'autres domaines, le concept même de syndicat, qui est une union pour l'aide et la défense de ses membres, en serait altéré ou détruit. Ces prémices posées, Nous disons que le syndicat et les associations de travailleurs chrétiens tendent vers une fin commune qui est d'élever les conditions de vie du travailleur. Les dirigeants du nouveau syndicat unique ont reconnu « la très haute contribution spirituelle apportée par les travailleurs catholiques à l'oeuvre de la confédération », et ils ont rendu hommage au « souffle de spiritualité évangélique » dont ils animent la confédération elle-même « au profit de tout mouvement ouvrier ». Dieu veuille que ces influences soient durables et efficaces, et que l'esprit de l'Evangile soit vraiment la base de l'action syndicale ! Car, en fait, si Nous ne voulons pas Nous contenter de vaines paroles, en quoi consiste pratiquement cet esprit de l'Evangile, sinon à faire prévaloir les principes de la justice suivant l'ordre établi par Dieu dans le monde sur la force purement mécanique des organisations, l'amour et la charité sur la haine de classe ? Vous comprenez ainsi l'importance du devoir et de la mission d'impulsion, de vigilance, de préparation et de perfectionnement incombant aux associations de travailleurs chrétiens par rapport au travail syndical.

Leur rôle dans l'accomplissement du nouvel ordre social.

4. — L'accomplissement de ce devoir nous amène à considérer un quatrième point : quel rôle joueront les associations chrétiennes de travailleurs dans rétablissement du nouvel ordre social f Faisons ici abstraction du présent état de choses. Il est anormal, et il ne Nous laisse pour le moment que la possibilité de déterminer, conformément aux règles de la justice et de l'équité, les parts respectives des employeurs et des ouvriers — et pour ceux-ci suivant leurs diverses catégories — dans le support des charges provenant du coût élevé de la vie. D'ailleurs, même en conditions normales, les associations chrétiennes savent qu'il ne peut être question d'ériger en principe stable de l'ordre social le simple arrangement ou accord entre les deux parties, employeurs et employés, même s'il est dicté par le plus pur esprit d'équité. En fait, ce principe serait faussé dès l'instant où l'accord, en contradiction avec sa propre signification, quitterait le sentier de la justice et, ou bien se muerait en oppression ou en exploitation illicite du travailleur, ou bien convertirait, par exemple, ce qu'on appelle aujourd'hui nationalisation ou socialisation de l'entreprise et démocratisation de l'économie en une arme de combat et de lutte contre l'employeur privé comme tel.

Les associations chrétiennes n'admettent la socialisation que dans les cas où elle s'avère indispensable au bien commun, c'est-à-dire comme l'unique moyen véritablement efficace de remédier à un abus ou d'éviter un gaspillage des forces productives du pays, d'assurer l'organisation de ces mêmes forces et de les orienter dans le sens des intérêts économiques de la nation, c'est-à-dire afin que l'économie nationale, par son développement régulier et pacifique, ouvre la voie à la prospérité matérielle du peuple tout entier, une prospérité qui soit un bon fondement pour la vie culturelle et religieuse. En outre, les associations chrétiennes reconnaissent que la socialisation implique d'ans tous les cas l'obligation d'une indemnité convenable, c'est-à-dire calculée d'après ce que les circonstances concrètes suggèrent comme juste et équitable pour tous les intéressés.

Quant à la démocratisation de l'économie, elle n'est pas moins menacée par le monopole ou encore par le despotisme économique d'une coalition anonyme de capitaux privés que par l'hégémonie des masses organisées et disposées à user de leur force au préjudice de la justice et du droit d'autrui.

Il est désormais temps de laisser là les phrases creuses et de songer, avec l'encyclique Quadragesimo anno, à une nouvelle organisation des forces productives du peuple. C'est-à-dire qu'au-dessus de la distinction entre employeurs et employés, les hommes doivent savoir discerner et reconnaître cette plus haute unité qui unit entre eux tous ceux qui collaborent à la production, Nous voulons dire leur entente et leur solidarité dans le devoir de pourvoir qu'ils ont ensemble et de manière durable au bien commun et aux besoins de la communauté tout entière. Que cette solidarité s'étende à toutes les branches de la production, qu'elle devienne le fondement d'un ordre économique meilleur, d'une saine et juste autonomie, qu'elle ménage aux classes laborieuses, par des voies légitimes, l'accès à leur part de responsabilité dans la gestion de l'économie nationale ! De cette manière, grâce à cette harmonieuse coordination et coopération, à cette union plus intime du travail et des autres facteurs de la vie économique, le travailleur arrivera à tirer de son activité un gain assuré et suffisant à sa subsistance et à celle de sa famille, une véritable satisfaction pour son coeur et un puissant stimulant pour son perfectionnement.

Puissent les associations chrétiennes de travailleurs italiens, en ces temps de misère, promouvoir l'union et la solidarité des hommes dans toute la vie économique ! Alors, un esprit nouveau mettra le travail national en mesure de surmonter les difficultés nées de l'étroitesse de l'espace et de la pénurie de moyens.

Le levain le plus efficace — Nous pouvons même dire le seul véritablement efficace — pour créer ce sentiment de solidarité, sûre garantie d'honnêteté et de paix sociale, réside dans l'esprit de l'Evangile et afflue en vous du Coeur de l'Homme-Dieu, Sauveur du monde. Nul travailleur n'a jamais été aussi parfaitement et profondément imprégné de cet esprit que celui qui vécut avec Jésus-Christ dans la plus étroite intimité et communauté de famille et de travail, son père putatif, saint Joseph. Nous plaçons donc sous son puissant patronage vos associations ouvrières catholiques, afin qu'il leur soit accordé, en cette heure de si graves résolutions et dangers pour tout le monde du travail, de correspondre pleinement à leur mission providentielle. En attendant, comme gage des grâces divines les plus abondantes, Nous vous donnons du fond de Notre coeur, à vous, à tous les membres de vos associations, à vos familles, à toutes les personnes qui vous sont chères, Notre paternelle Bénédiction apostolique.


ALLOCUTION AUX FIDÈLES DE ROME

(18 mars 1945) 1

Aux fidèles de Rome réunis sur la place Saint-Pierre à l'occasion de la clôture des exercices de la mission donnée dans les paroisses de la ville, le Saint-Père a adressé l'allocution suivante :

Le pieux empressement avec lequel vous êtes venus ici, chers fils et filles, en phalanges serrées, de toutes les parties de la ville, Notre siège épiscopal, est un vivant témoignage de votre docilité à écouter l'exhortation que l'Eglise adresse à tous les fidèles en ce dimanche de la Passion : « Oh ! si vous pouviez aujourd'hui écouter la voix du Seigneur » (Ps., xciv, 7). Cette voix du Seigneur, dont les cloches de vos églises et les bronzes puissants de cette basilique patriarcale nous apportent comme un faible écho, a retenti, durant les semaines passées du carême, jusqu'au plus profond de vos coeurs, alors que, rassemblés autour des chaires de vos paroisses, vous écoutiez la parole des zélés prédicateurs des missions ordonnées par Nous : comme le firent, au cours des siècles écoulés, leurs prédécesseurs, ils vous ont inculqué avec une ardente sollicitude et parfois aussi avec une affectueuse sévérité le devoir de penser et de pourvoir à l'unique chose nécessaire, unum necessarium (Lc 10,42), votre propre salut et sanctification.

En ce temps béni, le divin Semeur est passé parmi vous et a jeté avec profusion la semence de sa parole en vos âmes, que tant de prières et de pénitences ont préparées à la recevoir comme une terre bonne et féconde.

Et maintenant, devant la sainte croix sur laquelle le Christ, les bras ouverts, vous appelle et vous attend, Nous, son indigne vicaire, Nous vous conjurons, très chers fils et filles, « de renoncer à l'impiété et aux convoitises mondaines, pour vivre en ce siècle présent dans la réserve, la justice et la piété, en attendant la bienheureuse espérance qui est l'apparition glorieuse de notre grand Dieu et Sauveur Jésus-Christ» (Tt 2,11-13).

Que désormais il n'y ait personne parmi vous qui néglige d'élever tous les jours son coeur et ses mains vers Dieu, dans une prière humble et confiante d'adoration, de louange, de supplication et d'action de grâces.

Sanctifiez le dimanche, le jour du Seigneur, ainsi que les fidèles romains vos pères vous en ont donné l'exemple depuis les temps apostoliques ; assistez tous assidûment au saint sacrifice de la messe ; approchez-vous nombreux de la sainte Table eucharistique et comportez-vous de telle façon que le Dieu de la paix et de l'amour soit avec vous au sein de votre vie domestique et sociale (cf. 2Co 13,11).

Vous, pères de famille, souvenez-vous toujours que vous êtes responsables devant Dieu, devant l'Eglise et devant la société humaine, du bien spirituel et temporel de vos enfants. Vous, garçons et filles, renouvelez-vous dans le respect et l'obéissance envers ceux qui vous ont donné le jour et qui occupent auprès de vous la place de Dieu.

Vous, époux, souvenez-vous du moment, où, au pied de l'autel du Seigneur, vous vous promîtes solennellement et réciproquement une inviolable fidélité. Observez-la et gardez-la intacte, sans le moindre manquement, sans l'ombre la plus légère, et elle sera jusqu'à la fin pour vous et pour votre famille la source des plus abondantes bénédictions. Si l'on voyait, au contraire, se répandre et dominer dans un peuple la pernicieuse peste de l'infidélité conjugale, cette faute si grave attirerait sur lui malédiction et calamités.

Tous ensemble, avec une généreuse émulation, efforcez-vous de rétablir et de restaurer partout l'honnêteté et la pureté des moeurs. Dans tous les domaines : l'éducation des enfants, la formation d'une jeunesse pure, saine, sincère, saintement fière et jalouse de sa vertu. Dans tous les domaines : la vie du travail, les délassements, les loisirs, les exercices sportifs. Sinon, c'en est fini de l'honneur chrétien du peuple, c'en est fini de sa dignité humaine elle-même, car « Dieu ne nous a pas appelés à l'impureté, mais à la sanctification » (1Th 4,7).

Que pas un d'entre vous ne figure au nombre de ceux qui, dans l'immense misère où est tombée aujourd'hui la famille humaine,

ne voient qu'une occasion propice de s'enrichir malhonnêtement en exploitant le besoin et la détresse de leurs frères et en élevant indéfiniment les prix pour se procurer des gains scandaleux. Voyez leurs mains, elles sont souillées de sang ; du sang des veuves et des orphelins, du sang des petits et des adolescents dont le développement a été empêché ou retardé par la dénutrition et par la faim ; du sang de milliers et de milliers d'infortunés de toutes les classes du peuple, dont ils se sont faits les bourreaux par leur ignoble trafic. Ce sang, comme celui d'Abel, crie vers le ciel contre les nouveaux Caïns. Sur leurs mains reste la tache indélébile, comme au fond de leur conscience reste le crime impardonnable, tant qu'ils ne l'auront pas reconnu, déploré, expié, réparé dans la mesure où peut se réparer une si grande faute.

Ne fermez pas vos oreilles à la voix du divin Maître qui a dit : « Bienheureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde » (Mt 5,7). Pour l'amour du Christ, unissez-vous fraternellement ; aidez-vous mutuellement. Vous qui jouissez encore du bien-être ou qui l'avez acquis récemment et vous qui l'avez lamentablement perdu, restant sans pain, sans vêtement et sans toit, soutenez-vous mutuellement afin de surmonter, appuyés les uns sur les autres, la crise économique dont souffre le pays, crise qui, ainsi atténuée, finirait par disparaître si tous les hommes étaient unis entre eux par les liens d'une solidarité véritablement humaine et par une charité chrétienne véritablement divine. Ecoutez donc la voix de Dieu, n'endurcissez pas votre coeur. Cette voix vous dit : « Que le méchant abandonne sa voie et le criminel ses pensées pour se tourner vers le Seigneur » (Is., lv, 7).

Pour qui prétend rester sourd aux appels divins, se raidir contre les accents persuasifs des pasteurs des âmes, contre la voix sévère et poignante de la conscience, une autre voix, une voix sauvage, celle des cruels événements, celle de l'atroce réalité, s'élève pour leur annoncer et les avertir que la guerre est le fruit et le châtiment du péché. Le pécheur pourra bien chercher à s'étourdir, l'impie pourra s'obstiner à suivre les sentiers du mal, loin de Dieu ; la voix tragique retentira chaque fois plus sonore, chaque fois plus terrible et, par-delà les causes et les responsabilités immédiates de l'effroyable conflit, parjdelà les faits extérieurs et les paroles sensibles, elle pénétrera jusqu'au fond silencieux des coeurs pour détecter et révéler la cause profonde qui a suscité et alimenté l'horrible incendie, l'esprit qui a provoqué et exaspéré la discorde, qui est l'esprit d'orgueil, d'ambition et de convoitise. C'est l'esprit du mal qui se dresse contre l'esprit de Dieu, qui veut proscrire de la terre le règne du Christ pour diviniser la force matérielle, pour détruire dans la vie des peuples et surtout dans les relations internationales toute distinction essentielle entre le bien et le mal, entre le juste et l'injuste.

A ceux qui se sont laissé séduire par les fauteurs de la violence et qui, après les avoir suivis inconsidérément, commencent enfin à revenir de 'leurs illusions, consternés de voir jusqu'où les a conduits leur servile docilité, il ne reste plus d'autre chemin de salut que de répudier définitivement l'idolâtrie des nationalismes absolus, les orgueils de la race et du sang, les convoitises d'hégémonie dans la possession des biens terrestres, et d'adopter résolument l'esprit de sincère fraternité, fondé sur le culte du Père divin de tous les hommes, et dans lequel les notions trop longtemps opposées de droit et de devoir, de profit et de charge, s'harmonisent dans la justice et dans la charité.

Cependant, la réconciliation des peuples ne pourra avoir de garanties de stabilité, si ce n'est à condition qu'elle se réalise enfin avec loyauté et générosité. Après tant de tristes événements, nous ne pouvons supposer qu'il y ait quelqu'un qui puisse céder à la tentation de profiter des conditions présentes pour tourner à son avantage particulier, à l'encontre de la justice, l'organisation de la paix. Un tel homme pourrait bien se présenter sur l'heure comme un bienfaiteur de l'humanité ; mais, plus tard, l'histoire, qui juge à la lumière de principes plus élevés et d'expériences plus vastes, saurait le ranger non parmi ceux qui ont contribué à arracher le monde à l'oppression et à la violence, mais parmi ceux qui, à une heure solennelle, grave et décisive, ont frustré et trompé l'attente des peuples auxquels des souffrances indicibles avaient conféré un nouveau titre à la sauvegarde de leurs droits inviolables.

Nous n'oublions pas que devant Dieu, « pour qui tous les coeurs sont ouverts et toutes les volontés dévoilées »2, les coeurs n'ont point de ténèbres ni les volontés de secrets. Maître et Seigneur souverain, il tient en ses mains et peut mouvoir à son gré l'esprit des hommes qui croient détenir dans les leurs les destinées du monde. Il peut faire naître, éclore et mûrir les pensées et les enseignements capables d'inspirer une paix conforme à ses desseins et aux espérances des hommes de bonne volonté. Il peut le faire, mais il

2 Missel romain, messe votive pour demander la grâce de l'Esprit-Saint.

attend notre collaboration, il veut que nous l'en suppliions et l'en priions.

Et voilà pourquoi la chrétienté tout entière, voilà pourquoi, en ce jour, les fils de la Ville éternelle, le coeur contrit et humilié, en esprit de repentir et d'expiation, de supplication et de pénitence, lèvent les yeux et les mains vers Celui qui seul peut faire qu'aux horreurs de la discorde et de la haine, aux innombrables angoisses des populations, spécialement dans les pays qui sont encore des champs de bataille, succèdent la tranquillité et la pacification de tous les peuples. Voilà pourquoi aussi, nous souvenant que ce Seigneur et Père « manifeste sa toute-puissance surtout par la miséricorde et le pardon » 3, Nous le conjurons de mettre fin à un si terrible fléau, d'achever la grande et souhaitable rénovation de l'humanité profondément meurtrie et d'accélérer la venue d'une paix véritable et durable.

Le chemin qui devra mener de la lutte à la suspension des hostilités, de la trêve des armes à la paix, est encore tout couvert d'ombres à chacune de ses étapes, ombres qui pourraient bien cacher des surprises et des dangers. Plus l'homme s'efforce de prévoir et de prévenir les difficultés par ses réflexions et ses calculs, plus aussi parfois l'esprit malin se met en travers du chemin et déconcerte, au moins pour un moment, les plans les mieux établis.

Mais finalement l'heure viendra — qu'elle vienne bientôt ! — l'heure fixée par Dieu, l'heure hâtée par les mérites et les prières des élus (Mt 24,22). Que cette heure vous trouve prêts, vous spécialement, chers fils de Notre Rome ! A vous voir en ce moment, serrés au pied du grand obélisque qui fut témoin de la passion de Pierre, Notre pensée s'envole vers vos aïeux dont la foi reconnaissante a gravé sur le piédestal de granit le cri : Christus vincit ! Ce triomphe du Christ, gage de consolation et d'espérance, vos pères l'ont exalté avant que d'en graver le souvenir sur la pierre, par le courage dans la lutte, par la générosité dans la souffrance. C'est là l'honneur de la Rome chrétienne qui maintenant vous est confié, honneur qui consiste non pas tant dans les pierres de ses basiliques et de ses monuments que dans la foi, dans l'amour et dans la vertu de ses fils. Malheur à eux s'ils ne laissaient qu'aux marbres, aux tableaux et aux monuments des vieilles gloires le soin de le consentir !

3 Oraison du Xe dimanche après la Pentecôte.

Fils et filles de la Rome chrétienne, soyez fiers de l'héritage que vos pères vous ont légué ; gardez-le dans l'honneur ; dans l'honneur en face d'un passé qui vous appelle et vous convie à l'héroïsme ; dans l'honneur en face des futures générations auxquelles vous devez préparer, en cette heure d'angoisse, la voie du progrès ordonné et de la vraie et impérissable grandeur pour atteindre le bonheur terrestre et le bonheur éternel.


Pie XII 1945 - L'« OPUS OPERATUM » ET L'« OPUS OPERANTIS »