Pie XII 1949 - RADIOMESSAGE AU CONGRÈS EUCHARISTIQUE DE BOLIVIE


ALLOCUTION AUX MEMBRES DE L'ASSOCIATION DE L'ADORATION PERPÉTUELLE

(8 février 1949) 1

En recevant ce jour en audience plus de 400 membres de l'Association de l'Adoration Perpétuelle et de l'Aide aux Eglises Pauvres, fondée à Bruxelles il y a un siècle, le Pape prononça le discours suivant :

Soyez les bienvenues, mes très chères Filles, dans la solennité du Centenaire de votre Association qui tend à un but excellent entre tous. Vous voulez avec l'adoration perpétuelle, et l'aide aux églises pauvres, répondre à la voix — douce et discrète mais pénétrante comme une épée dans les coeurs aimants, — du Verbe Divin fait Homme, victime pour notre rédemption et nourriture de nos âmes.

Le Pape souligne le fait que l'Eglise subit de rudes assauts de la part de ses ennemis :

Quand il y a cent ans, naquit votre Association, les forces du malin travaillaient déjà depuis longtemps, ces forces qui préparaient lentement mais sûrement dans le champ religieux encore plus que dans l'ordre temporel, les dévastations auxquelles nous assistons aujourd'hui avec terreur. Avancer péniblement à travers les lignes ennemies, à travers ces mêmes forces du mal qui sont : le péché, les passions humaines, les fausses doctrines, l'esprit du paganisme a été de tous temps le sort de l'Eglise. Mais aujourd'hui, l'Eglise se trouve devant une si rude opposition contre

1 D'après le texte italien paru dans Discorsi e Radiomessagi di Sua Santita Pio XII, tome X, p. 367 (Ed. Tipografia Poliglotta Vaticana, 1949).

Dieu qu'il n'en fut peut-être jamais de semblable depuis l'origine de l'humanité ; la voilà devant un athéisme voulu, organisé et pourvu de tous les moyens modernes de propagande pour empoisonner l'âme du peuple. Qu'une telle condition de choses soit l'objet de Notre incessante sollicitude, cela ne pourra certes étonner.

C'est pourquoi il faut, devant ce flot menaçant, dresser l'armée des âmes priantes :

Mais, pourquoi vous en parler à vous et en ce moment où vous êtes réunies ici pour fêter le premier Centenaire de votre Association ? C'est pour vous montrer combien elle est utile et adaptée aux circonstances présentes et combien votre vie consacrée à l'adoratioin perpétuelle est conforme aux besoins religieux de notre temps. Phalange d'élite dans la grande armée pacifique de l'Eglise, vous opposez à la négation de Dieu, le cri triomphal incessant : il existe ' un Dieu ! Quis ut Deus ? Restez inébranlables dans votre

foi, mes très chères Filles, et n'oubliez pas qu'avec vos prières, vos réparations, vos pénitences et vos instructions, vous combattez en première ligne pour Dieu et pour Jésus.

Le renouveau eucharistique déclanché par Pie X vint à son heure pour susciter dans l'Eglise des coeurs fervents :

En opposition avec l'indifférence et les péchés qui offensent l'Homme-Dieu présent parmi nous dans le Saint-Sacrement de l'Autel, et en réparation desquels vous offrez vos oeuvres expiatoires, la foi des enfants de l'Eglise est toujours vive ; plus forte est toujours leur volonté de participer au sacrifice eucharistique, de rendre au Christ en de solennelles et publiques adorations ou dans l'intimité de leurs visites privées, l'hommage de leur foi et de leur gratitude ; toujours plus enflammé est l'amour qui fait battre leurs coeurs et qui, alimenté par l'union avec Jésus dans la sainte Communion, les fait vivre, travailler, combattre et souffrir avec le Christ et pour la cause du Christ !

Les membres de Y Association de l'Adoration Perpétuelle doivent faire leurs les grandes angoisses de l'Eglise :

Nous ne doutons pas que vos persévérantes prières et


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vos constants sacrifices aient largement contribué à ce courant de bénédiction eucharistique. Demeurez fermement là où le Maître de l'Eglise agit, où souffle l'esprit de Dieu, où les âmes fidèles puisent cette surnaturelle énergie qui les rend victorieuses jusqu'à la fin. Dans votre adoration perpétuelle, présentez-lui toutes vos inquiétudes, les angoisses du monde entier, et non seulement les petits intérêts temporels qui ne doivent sans doute pas être oubliés, mais principalement les grandes intentions des personnes particulières, des familles, de la société humaine, de l'Eglise, comme vous les entendez énumérer dans l'admirable liturgie du Vendredi-Saint.

Pie XII rappelle les origines de VAssociation 1 :

C'est ainsi que priait votre vénérée Fondatrice, lorsqu'un matin, elle vit le prêtre découvrir le ciboire pour la sainte Communion. Pauvre ciboire d'étain ! Elle est habituée à le voir, mais ce jour-là elle en reste troublée. Elle se hâte d'offrir à Jésus une demeure moins indigne de Sa divine Majesté. Et Jésus à qui* elle avait demandé de lui faire connaître Sa volonté, la récompense en élargissant immensément son coeur pour lui demander davantage.

Ainsi, ce n'est plus seulement la pauvreté du ciboire d'Ohain, les ornements sacrés et le linge d'autel de la paroisse confectionnés en famille qui occupent ses pensées,

i mais le monde entier s'ouvre à son regard fervent. Elle contemple en esprit la « grande pitié » des autels et des ; sacristies, et le zèle pour la beauté de la maison de Dieu

, , la dévore et la consume. Si les demandes de secours se multiplient et la pressent, les aides nécessaires se présentent aussi à elle. Une sainte, Marie Michela du Très Saint-Sacre

1 La fondatrice de l'Institut de l'Adoration perpétuelle est la Rév. Mère Anna de Meeus (1823-1904). Rendant visite à l'église paroissiale de Ohain, située dans le Brabant wallon, elle fut émue de la pauvreté du lieu saint ; de là vint l'idée de l'Association de l'Adoration Perpétuelle et de l'Aide aux Eglises Pauvres. En 1856 une nouvelle Congrégation était fondée pour animer ces oeuvres. La maison-mère est située à Bruxelles: 22, Avenue Léopold Wiener, Watermael-Boitsfort. D'autres maisons de la Congrégation ont été fondées en Belgique, en Italie, en Hollande, en Angleterre, aux Etats-Unis.

ment, est la messagère qui lui apporte la lumière du Ciel ; dix compagnes de la Congrégation de la Sainte Vierge sont ses premières collaboratrices. Votre Association était fondée ! Toujours opportune, mais combien plus urgente de nos jours !

Pie XII insiste sur les besoins actuels du culte :

En tous temps, il y a, bêlas ! des chrétiens qui ne rougissent pas en voyant en tant de lieux, le contraste entre le luxe élégant ou du moins la grâce parfaite de leur toilette et les ornements en lambeaux du Prêtre au saint autel ; entre la blancheur et la finesse du linge qui couvre leur table et la misère répugnante où repose le Corps très sacré de Jésus. Mais aujourd'hui, même là où l'on ne pourrait plus accuser le froid égoïsme des gens du monde, l'indigence rend souvent impuissantes les meilleures volontés : pauvres villages perdus, missions étrangères dans le besoin, paroisses et églises ruinées et dévastées par les guerres, dépouillées et profanées par les persécutions. Vous êtes bienheureuses, vous qui par l'ouvrage de vos doigts, par vos démarches, vos soins, votre propagande, vous vous employez à secourir tant de misères !

Heureusement, l'Association connaît un développement sans cesse accru :

Pendant ce premier siècle de votre vie, quel chemin n'avez-vous pas parcouru ! Fondation d'un Institut religieux pour assurer à votre Association l'équilibre et la stabilité, rapide élévation au rang d'Archiconfrérie pour la Belgique, transfert de son siège au Centre de la catholicité, extension de 9on activité avec non moins de 597 groupes répandus dans le monde entier. Et que dire de vos travaux ? Nous en avons ici sous les yeux une magnifique et encourageante exposition que nous admirons avec d'autant plus de complaisance que nous savons que c'est un échantillon seulement de tout le travail accompli par vous.

En terminant le Saint-Père félicite encore l'Association pour son activité :

Mais la conscience du grand bien réalisé n'est pas pour vous un prétexte ou un terme de repos satisfait, mais

plutôt un stimulant et un encouragement pour une toujours plus intense activité et une plus ardente ferveur. C'est pourquoi, avec l'expression de Nos éloges, de Nos voeux, et de Notre reconnaissance, et, comme gage de la protection divine et des grâces abondantes, Nous vous donnons de tout coeur à vous toutes, chères Filles, à votre Archi-association et à toutes ses Associations affiliées, Notre paternelle Bénédiction apostolique.


DISCOURS AU PRÉSIDENT DU CONSEIL D'ITALIE

M. DE GASPERI à l'occasion du XXe anniversaire des Accords de Latran

(11 février 1949) 1

Le / / février 1929, le Pape Pie XI signait avec le gouvernement italien les Accords de Latran qui mettaient fin à la « question romaine ».

Au jour anniversaire de cette date mémorable, le premier ministre italien de Gasperi fut reçu en audience par le Pape Pie XII ;

ce dernier adressa les mots suivants au Président du Conseil :

C'est avec une vive satisfaction que Nous saluons Votre Excellence — dont la doctrine, les remarquables qualités de gouvernant et l'intégrité de vie rencontrent une très large admiration dans notre patrie et à l'étranger — ici au siège du Père de la Chrétienté auquel le Ministère Apostolique impose des devoirs qui sont indépendants de toute nationalité, mais qui toutefois ne l'empêchent pas de suivre avec un intérêt particulier et avec une intense sollicitude les destinées du peuple italien, sur le sol duquel la Divine Providence a voulu placer la roche de Pierre.

La date de votre visite qui est une visite officielle en tant que celle du Président du Conseil des Ministres est en elle-même un témoignage et une promesse.

Un témoignage de la grande oeuvre de paix et de conciliation qu'un Pontife aux vues étendues et au coeur large conçut et réalisa avec fermeté et courage.

Une promesse de conserver à cette oeuvre de conciliation et de paix sa place bienfaisante dans le progrès et l'ascension de la Nation italienne malgré les oppositions

qui se sont produites et qui pourraient surgir encore de doctrines et tendances contraires.

Sous peu Votre Excellence descendra à la Basilique Vaticane pour vénérer l'endroit du sépulcre du Premier Pierre et pour déposer ensuite une couronne sur la tombe de Notre inoubliable Prédécesseur qui fut non seulement une grande figure dans la série des Pontifes romains, mais aussi un fils aimant et un magnanime bienfaiteur du peuple italien.

Puisse Votre Excellence, — en union avec tous ceux qui dans la protection des bases de l'ordre social voient où se trouve le chemin du véritable salut public — être le constant défenseur de l'oeuvre dont nous commémorons aujourd'hui le vingtième anniversaire.

De cette façon Vous offrirez à un monde, qu'une trop fréquente infidélité aux traités a rendu intimement divisé et partagé, un clair exemple de sagesse romaine et de morale chrétienne. Votre Nation qui est aussi Notre patrie, avec la bénédiction du Très-Haut que Nous implorons de grand coeur sur vous, sur les membres du gouvernement et sur le bien-aimé peuple italien tout entier, trouvera le moyen de surmonter les difficultés et les angoisses du présent et de se diriger vers un avenir plus lumineux et plus tranquille.


EXHORTATION APOSTOLIQUE A L'ÉPISCOPAT

autorisant la célébration d'une Messe Votive en réparation des crimes suscités par la haine de Dieu

(11 février 1949) 1

La lutte contre le christianisme se faisant de plus en plus violente dans les territoires soumis au régime soviétique, le Pape insiste pour que les chrétiens implorent Dieu afin qu'il ait pitié de ceux qui sont persécutés ainsi que de ceux qui persécutent l'Eglise :

La lutte entre les bons et les méchants dont la conduite et les actions entremêlées constituent toujours l'histoire du genre humain, rarement et peut-être jamais n'est devenue plus violente qu'à notre époque.

Si, de cette citadelle du Vatican, Nous regardons en tous sens la terre entière, Nous avons certes de quoi être comblé d'admiration et de joie en voyant resplendir de vertus les foules compactes des hommes de bien qui, surtout par le mérite du courage et la gloire du martyre, rappellent les premiers temps du christianisme ; mais, d'autre part, Nous sommes accablé de tristesse et d'angoisse en voyant que la méchanceté des hommes pervers est parvenue à un degré d'impiété incroyable et absolument inconnu en d'autres temps. Cette honte, Vénérables Frères, Nous avons horreur d'en parler, mais en raison des devoirs de Notre charge apostolique, Nous ne pouvons la taire.

Quand on remonte aux causes de cette lutte actuelle contre Dieu, on découvre que c'est la révolte du premier homme qui a introduit le mal dans le monde : -

1 D'après le texte latin des A. A. S., XXXXI, 1949, p. 58.

L'orgueilleux et méprisant dédain des choses de Dieu qui fut le premier crime de l'homme refusant d'obéir à l'ordre d'en-haut, est la source séditieuse de tous les maux, et à l'époque où nous sommes, il se répand et se déchaîne comme un mal virulent sur presque toute la terre, mais dans certaines régions, spécialement, à cause de la conspiration suscitée « contre le Seigneur et contre son Christ » (Ps. II, 2), il engendre des maux absolument innombrables.

Les conséquences de la révolte contre Dieu sont désastreuses pour l'homme :

Dieu, en effet, une fois supprimé, l'homme est dépouillé de sa dignité spirituelle, et devient vil esclave des choses matérielles, et est supprimé même radicalement tout ce que représentent de beauté: la vertu, l'amour, l'espérance, la vie intérieure. Nous avons nommé l'athéisme où, plus exactement, la haine de Dieu.

L'athéisme militant utilise aujourd'hui tous les moyens modernes de propagande :

Dans leur souveraine impudence, ceux qui haïssent le nom de Dieu tirent profit des secours et des moyens de tout genre. Livres, mémoires, journaux, émissions radiopho-niques, meetings, réunions publiques et conversations privées, sciences et arts, tout leur sert pour répandre le mépris des choses saintes. « Il s'éleva du puits une fumée comme celle d'une grande fournaise et le soleil et l'air furent obscurcis par la fumée du puits » (Apoc. IX, 2),

Cette action est nettement inspirée par le démon lui-même :

Nous estimons, en effet, Vénérables Frères, que de tels faits ne se produisent pas sans l'intervention perfide de l'ennemi infernal dont c'est le propre de haïr Dieu et de nuire aux hommes.

C'esf pourquoi il faut faire appel aux moyens surnaturels pour combattre cette vague de haine :

Qu'il n'y ait donc pour vous, vos prêtres et les fidèles confiés à vos soins, rien de plus urgent que de susciter une rivalité de zèle pour défendre ce nom de Dieu que les puissances angéliques vénèrent en tremblant ; dressant l'étendard de l'archange Saint Michel et répétant l'acclamation : « Qui est comme Dieu ? », opposez à ceux qui insultent la Majesté suprême la plus énergique volonté d'affirmer, d'aimer et de prêcher le nom de Dieu.

Ces athées sont gravement coupables :

Ceux qui l'attaquent en le méprisant, comme Nous avons dit, non seulement sont coupables d'un crime horrible (car (( c'est surtout la haine de Dieu qui constitue le péché contre le Saint-Esprit » (S. Thomas 11—II » q. XXXIV, art. 2, ad I) et qui les expose à subir les châtiments les plus terribles), mais ils témoignent encore de la manière la plus évidente qu'ils sont des coeurs totalement ingrats.

En niant Dieu, ils veulent porter atteinte à l'infinie bonté de Dieu dont nous tenons tout :

Qu'y a-t-il en effet de plus nécessaire et de plus salutaire que d'adorer et d'honorer Dieu ? Notre être composé d'âme et de corps, les dons de notre esprit et nos forces nous viennent de Lui ; la lumière du soleil, l'air, les fruits de la terre, la nourriture, les douceurs de la vie, et ce qui est plus important, la grâce, les secours pour nous sanctifier, la vérité, le salut, nous viennent de Lui ; tout ce que nous avons est un don de Lui.

Les épreuves comme les joies sont pour nous des témoignages de l'amour de Dieu :

« Qu'il est bon et suave, Seigneur, votre Esprit qui remplit tout » (Sap. XII, I). « Mais vous, ô notre Dieu, vous êtes bon, fidèle et patient, et vous gouvernez tout avec miséricorde » (Ibid. XV, I). Il n'est pas loin de chacun de nous. « En lui, nous avons la vie, le mouvement et l'être » (Act. Ap. XVII, 28). Il est plein de sagesse et de miséricorde, soit qu'il encourage en consolant, soit qu'il corrige en châtiant. Mais chaque fois qu'il nous punit, nous souffrons justement, car « nous recevons le prix de nos actes »

(Luc. XXIII, 41), et la douleur elle-même, par un dessein de la divine Providence, devient école de vertu et source féconde de bonheur éternel. Pour celui qui a Dieu comme héritage et bien personnel, la prospérité et l'adversité sont peu de chose, et tant qu'il n'est pas perdu, il faut estimer que rien n'est perdu.

La révolte contre Dieu engendre le désordre social :

Il y a contre ce fait que de l'amour de Dieu naît le salut des hommes, tandis que l'aversion pour lui attire le malheur.

Or, grâce aux nouveaux moyens techniques dont les hommes disposent, la lutte déjà terrible en elle-même devient catastrophique :

Qui ne redouterait avec horreur les luttes, les discordes civiles, les guerres, qui désormais, étant donnée la violence des armes nouvelles, seront extrêmement meurtrières?

C'esf pour cette nouvelle raison que le Pape encourage tous ceux qui s'attachent à pacifier le monde :

Dans l'espoir qu'elles soient écartées, Nous saluons et louons les entreprises qui tendent à unir les pays par des liens de fédération toujours plus étroits \

Mais ici encore, les efforts en faveur de la paix n'ont de Valeur que s'ils sont animés par des croyants en Dieu :

Mais cette tentative, facilement ruineuse, est fondée sur le sable, si le sens des liens fraternels qui unissent tous les hommes ne règne pas sur toute la terre, et rendant sacrée et constante la foi donnée et reçue, ne soutient pas les traités et ne fortifie pas les sociétés. Or, l'expérience prouve d'une manière certaine que les hommes ne se sentent pas frères, à moins de se croire tous nés d'un seul père. Oté le respect envers le Législateur suprême et le

1 Le Pape soutient tous les efforts qui visent à fédérer l'Europe et à organiser le monde. Cf. Discours aux Délégués du Congrès international de l'Union européenne des Fédéralistes du 11 novembre 1948, dans Documents Pontificaux 1948, p. 403. .

Juge divin, le bien et le mal sont de pures paroles : la loi morale est anéantie ; puisqu'il n'y a rien à craindre, la passion avide ose et accomplit toute insolence ; les hommes dont l'unique et misérable divertissement est de jouir des plaisirs et d'exercer leur fureur se précipitent comme des bêtes dans des tueries mutuelles 1.

Il nous est bon, en vérité de servir Dieu. Efforçons-nous donc avec le plus grand soin d'honorer Dieu présent et aimant dans le palais d'une conscience pure, puisque la voie à une vertu plus grande et plus belle, nous fait passer des réalités extérieures aux réalités intérieures, pour élever de là au monde surnaturel que nous ne quitterons plus.

Que les chrétiens, par l'éclat même de leur vie, amènent les révoltés au repentir :

Que sa très douce présence remplisse notre mémoire, illumine notre intelligence, réjouisse notre esprit, fortifie notre volonté en vue d'une action pure, zélée et pieuse : « La justice parfaite consiste en effet à Te connaître (toi, Dieu) » (Sap. XV, 3). Tous ceux qui errent en dehors des voies de ' la justice doivent être, par nos prières, nos paroles, nos :'' oeuvres, et surtout par une vie dans laquelle recommence à briller l'image de la bonté du Père, incités à expier et effacer leurs fautes.

Le Pape exhorte les athées à se convertir :

Que les pécheurs ramènent leurs pensées vers le Père très doux qui rappelle son fils prodigue et le reçoit volontiers, pénitent, après qu'il a souffert de la misère, qui immole le veau gras et célèbre sa joie par un festin. Et pourquoi pas ? Il avait en effet retrouvé le fils qu'il avait perdu, il éprouvait, plus de tendresse pour celui qu il avait gagné. Quel père devons-nous reconnaître là ? Dieu assurément ; nul n'est aussi père, nul n'est aussi bon (Tertullianus, De poenit. 8, M. L. I, 1, 353).

1 Le même thème a été développé dans l'encyclique Summi Pontificatus du 20 octobre 1939 (A. A. S., 31, 1939, p. 481).

Que les chrétiens se montrent accueillants pour ceux qui se repentent :

Celui qui possède la foi et s'enrichit par les oeuvres d'une vie sainte, doit autant que possible faire partager ces biens aux autres.

La grande arme des chrétiens est la prière :

Pour stimuler avec plus de vigueur ce zèle religieux et préparer contre l'impiété criminelle des blasphémateurs, qui souille notre époque, un mur et un remède, nous avons un secours puissant. Que ne peuvent les prières ? Que ne peut, au nom du Christ, la prière de l'innocent ou du pénitent quand elle s'enracine dans la confiance et s'accompange du cortège des bonnes oeuvres ? « La prière est le mur de notre foi, notre arme d'attaque et de défense contre l'ennemi qui de toutes parts nous guette (Tertullianus, De Oratione, XXIX, M. L. I, 1, 304).

La prière la plus efficace est celle qui est constituée par la Sainte Messe :

Mais il n'est point d'acte d'hommage et de culte qui ne le cède au Sacrifice eucharistique, lequel perpétue de façon non sanglante l'immolation sanglante du Christ sur le gibet de la croix et en répand à flots sur les hommes les fruits de salut. Le Père céleste et éternel reçoit hommage, est rendu propice, est apaisé par le sang précieux de l'Agneau innocent, dont la voix est plus puissante que celle de l'innocent Abel et de tous les justes, puisqu'il possède une dignité et une valeur infinies. Ce sang qu'il a pris de nous, le Fils de Dieu Lui-même l'offre pour nous, auteur de notre paix et de notre réconciliation, bienfaiteur inépuisable de qui procède tout don céleste. « Quand, par nos fautes, nous provoquons la vengeance du Juge, alors une parole nous couvre — celle du Sang présent — et les maux menaçants se retirent en foule » (Hymne des premières Vêpres de la fête du Très Précieux Sang de Notre Seigneur Jésus-Christ). Ce même sacrifice « véritablement propitiatoire est offert de façon efficace « pour les péchés, pour les peines, les satisfactions et autres nécessités » (Conc. Trid., sess. XXII, cap. III).

La puissance du Christ-Rédempteur est plus forte que tous les assauts de l'athéisme :

Si donc l'athéisme et la haine de Dieu constituent une faute monstrueuse, qui souille notre siècle et lui fait justement craindre d'épouvantables châtiments, le Sang du Christ contenu dans le calice de la Nouvelle Alliance est un bain purifiant grâce auquel nous pouvons effacer ce crime exécrable et, après avoir demandé le pardon des coupables, en faire disparaître les conséquences et préparer à l'Eglise un triomphe magnifique.

Le Souverain Pontife, pour être pratique, décide qu'en ce dimanche de la Passion (3 avril 1949) tous les prêtres pourront célébrer deux messes : l'une, celle du jour de la Passion ; l'autre, la messe votive pour la rémission des péchés :

Tandis que Nous méditons ces pensées, il Nous a semblé opportun que le Dimanche de la Passion de cette année, vous et tous les prêtres fussiez autorisés, et même exhortés à célébrer une seconde messe qui sera la messe votive pour la rémission des péchés ; cette messe sera offerte à Nos intentions, à moins qu'elle ne doive s'offrir à l'intention de l'évêque ou pour tout le peuple. Ceux qui pour quelque motif, n'useront pas de ce privilège, célébreront la messe du dimanche même et recommanderont du moins à Dieu durant le Sacrifice eucharistique Nos voeux, plus haut mentionnés. Que les fidèles qui, en raison des liens unissant entre eux les membres du Corps mystique du Christ, doivent toujours prendre part aux tristesses et aux joies de l'Eglise accourent à votre voix le plus nombreux possible autour des autels, et qu'appréciant comme il convient l'importance et la gravité du motif qui les réunit, ils offrent à Dieu avec plus d'ardeur, leurs supplications et leurs prières et reçoivent en rangs serrés l'aliment céleste.

Le Pape termine en faisant appel à la ferveur du monde chrétien :

Nous ne doutons pas que vous ferez tous avec la plus grande ferveur ce que Nous demandons, et que vous offrirez

aussi à Dieu des supplications et des voeux, afin que les malheurs une fois écartés, le souffle de la charité céleste vienne renouveler toutes choses dans le Christ pour combler heureusement le commun désir de la paix. Enfin, dans la très vive confiance qu'il sera satisfait de bon gré à Nos désirs, Nous accordons à vous et aux chers prêtres et fidèles confiés à votre garde, qui manifesteront à leurs frères leur amour par le don que Nous proposons, en gage du secours d'En-Haut, la Bénédiction Apostolique.

DÉCRET DE LA S. CONGRÉGATION DES RITES au sujet des deux Messes à célébrer cette année le Dimanche de la Passion (12 février 1949) 1

Le Décret suivant a paru dans les Actes du Saint-Siège signé par Son Eminence le Cardinal Clément Micara, préfet de la Sacrée Congrégation des Rites et évêque de Velletri :

Tout récemment, Notre Très Saint-Père le Pape Pie XII, en vue d'extirper le crime exécrable d'athéisme, d'opposer un rempart et un remède à la funeste impiété, en expiation des péchés et de l'impiété de notre époque, ayant permis à tous les prêtres par son « Exhortation Apostolique », en date du 11 février 1949, de cette année, de célébrer, le dimanche de la Passion, une seconde Messe votive « Pro remissione peccatorum »2, la Sacrée Congrégation des Rites, sur l'ordre de Notre Très Saint-Père lui-même, publie les presriptions suivantes :

Tous les prêtres qui voudraient célébrer ces deux messes, doivent d'abord célébrer celle de la Passion telle qu'elle se trouve dans le Missel Romain, avec oraison pour le Pape, à l'occasion du cinquantenaire de son ordination sacerdotale 3 ; en second lieu, la messe Pro remissione peccatorum qui fait partie des messes votives du Missel Romain, sans aucune mémoire, même du dimanche, avec Credo et Préface de la Passion, en observant par ailleurs les rubriques qui concernent la purification du calice.

1 D'après le texte latin des A. A. S., XXXXI, 1949, p. 82.

2 Cf. le texte de cette Exhortation Apostolique, p. 55.

5 Le Pape Pie XII a reçu l'ordination sacerdotale à Rome le 2 avril 1899. Cette année le dimanche de la Passion était marquée au calendrier le 3 avril 1949.

Quant à celui qui ne célébrera qu'une messe seulement, il devra dire la messe du dimanche de la Passion, en ajoutant à l'oraison du jour la commémoraison de la messe votive Pro remissione peccatorum, sous une seule conclusion, et l'oraison pour le Pape, avec l'Evangile de S. Jean pour finir.

En observant pour le reste les rubriques d'usage, ainsi que les rites particuliers propres aux calendriers particuliers.

DÉCLARATION DE LA S. CONGRÉGATION CONSISTORIALE concernant l'excommunication prononcée contre ceux qui ont arrêté S. E. le Cardinal Mindszenty

(12 février 1949) 1

Le 28 décembre 1948, la S. Congrégation Consistoriale avait déclaré que ceux qui avaient arrêté le Cardinal Mindszenty et l'avaient empêché d'exercer sa juridiction ecclésiastique, étaient frappés ipso facto de la peine de l'excommunication spécialement réservée au Saint-Siège et atteints de la peine vindicative de l'infamie juridique 2.

Mais, depuis, le Cardinal a été traduit devant un tribunal laïc, ce qui frappe les coupables d'une nouvelle peine. En effet, les clercs jouissent du privilège du for ecclésiastique, c'est-à-dire qu'ils ne relèvent que des tribunaux ecclésiastiques. Quand un tel délit est commis contre un Cardinal, les fauteurs sont frappés d'excommunication spécialement réservée au Saint-Siège.

On voit qu'un même sujet peut être frappé, comme c'est le cas présent, par trois excommunications :

Certains ayant osé, non seulement lever une main sacrilège sur l'Eminentissime Cardinal de la Sainte Eglise romaine Joseph Mindszenty archevêque d'Esztergom, mais encore le traîner devant un tribunal laïc et, par une sentence très inique, empêcher l'exercice de sa juridiction archiépiscopale, la Sacrée Congrégation Consistoriale déclare

1 D'après le texte latin des A. A. S., XXXXI, 1949, p. 80; traduction française de La Documentation Catholique, t. XLVI, c. 266.

* On trouvera le texte de cette Déclaration dans le volume Documents Pontificaux 1948, p. 464.

1 Tous les complices sont atteints de la peine citée, depuis celui qui a donné l'ordre d'arrestation jusqu'aux policiers qui l'ont exécuté.

a Lors de l'arrestation de Son Exc. Mgr Stepinac, archevêque de Zagreb, la S. Congrégation du Concile avait fait une déclaration semblable (A. A. S., 38, 1946, p. 401). Dans le cas de S. E. le Cardinal Mindszenty, c'est la S. Congrégation Consistoriale qui formule la déclaration pour en indiquer la gravité particulière.

à nouveau et avertit que tous ceux qui ont commis ou commettront les dits crimes, soit les mandants de toutes conditions et de tout grade, soit les complices que, par leur nature, les crimes en question ont requis ou requerront, soit ceux qui ont induit ou induiront à commettre ces délits, ou qui d'une façon quelconque y ont concouru ou y concourront 1, à la condition cependant que sans leur concours, le crime n'eût pas été commis, ou ne serait pas commis, ont encouru ou encourront l'excommunication latae sententiae, réservée speciali modo au Siège apostolique, aux termes des canons 2343, § 2, n. 1 ; 2341, 2334, 2 ; 2209, §§ 1, 2, 3, ainsi que l'infamie de droit aux termes du canon 2343, § 2, n. 2, et toutes les autres peines dont les coupables, suivant leur participation, peuvent ou pourront être frappés aux termes des sacrés canons du Code de droit canonique 2.


ALLOCUTION AU CONSISTOIRE

(14 février 1949) 1

Son Eminence le Cardinal Mindszenty, primat de Hongrie, ayant été condamné le 9 février 1949 à seize ans de prison après une parodie de procès, le Pape convoqua dans la Salle du Consistoire les Cardinaux présents à Rome et, en leur présence, émit une protestation solennelle :

Nous vous avons convoqués aujourd'hui en ce Consistoire, extraordinaire pour vous ouvrir Notre coeur accablé de la plus grande douleur. La cause de cette douleur vous est évidente : Nous n'en doutons pas. Il s'agit d'un attentat très grave qui offense cruellement non seulement votre très noble Collège, non seulement l'Eglise entière, mais tous ceux qui défendent la dignité et la liberté humaines.

C'est pourquoi, à peine avons-Nous appris que Notre cher fils, Joseph Mindszenty, cardinal de la Sainte Eglise romaine, archevêque d'Esztergom, au mépris du respect dû à la religion, avait été témérairement emprisonné, Nous avons envoyé à Nos vénérables Frères, les archevêques et évêques de Hongrie, une lettre affectueuse pour protester publiquement et solennellement, comme la conscience de Notre devoir Nous l'imposait, contre l'offense faite à l'Eglise 2.

Mais, aujourd'hui, que l'affaire en est venue au point d'avoir infligé un extrême déshonneur à ce très digne prélat, lequel a été condamné à la réclusion comme un criminel,

1 D'après le texte latin des A. A. S., XXXXI, 1949, p. 41; traduction français de La Documentation Catholique, t. XLVI, c. 261.

2 On trouvera le texte de cette lettre à l'Episcopat Hongrois du 2 janvier 1949, p. 19.

Nous ne pouvons nous empêcher de renouveler devant vous une semblable protestation solennelle.

Nous y sommes incité d'abord par les droits sacrés de la religion à l'affirmation et à la revendication desquels cet énergique défenseur des choses saintes a longtemps travaillé avec un courage intrépide, et, ensuite, par le consentement unanime des peuples libres, qui s'est manifesté de la façon la plus large et la plus évidente en paroles et en écrits, venus même de ceux qui sont revêtus de l'autorité publique et de ceux qui ne partagent pas la foi catholique.

Le Pape stigmatise les procédés employés par les policiers et les juges pour arracher des aveux à l'illustre inculpé. D'ailleurs, l'accès aux débats fut refusé aux personnes qui n'étaient pas « sûres » ;

Ce n'est pas, vous le savez, à la pleine lumière du jour, que s'est accompli le procès de ce prélat, qui a tant fait pour la religion de ses ancêtres, et pour les traditions chrétiennes de son peuple.

Des nouvelles parvenues dès le début causèrent une certaine inquiétude. Ceux qui, en effet, avaient fait parvenir, de nations étrangères, la demande de se rendre en Hongrie pour assister sur place, au développement de ce procès, s'ils paraissaient en quelque manière devoir juger et rapporter l'affaire avec sérénité, essuyèrent un refus de nature à leur faire croire, ainsi qu'à tous les autres hommes généreux et droits, qu'il se déroulait à Budapest un procès, que ceux qui le faisaient semblaient craindre de voir examiner librement et publiquement par tout le monde civilisé. Au contraire, une justice vraiment digne de ce nom ne part pas d'opinions préconçues et ne s'appuie pas sur un jugement fixé d'avance, mais elle souhaite spontanément une libre discussion et accorde à chacun la liberté qui lui est due de penser, de croire et de parler.

Or, bien que les faits ne soient ni sûrement connus, ni rapportés de manière claire et complète, Nous estimons cependant ne pouvoir omettre de mentionner le jugement que tout le monde civilisé a porté sur ce procès, spécialement sur son déroulement trop rapide qui a éveillé de très nombreux soupçons, sur les accusations établies avec un art captieux, sur l'état physique de ce cardinal qui ne peut, à la vérité, se comprendre sans de mystérieuses et inavouables pressions qu'il n'est pas permis d'avouer ; car cet homme d'une nature jusque là énergique et d'une grande vigueur est apparu soudain si faible et si hésitant que sa manière d'agir semble porter accusation non contre lui, mais contre ceux qui l'accusèrent et le condamnèrent l.

Le premier effet visé par les autorités hongroises, c'est de jeter le trouble chez les catholiques de ce pays :

En tout cela une seule chose est évidente : l'action judiciaire a eu pour but premier de bouleverser l'Eglise catholique en Hongrie de la manière précisément dont parle la Sainte Ecriture : « Je frapperai le pasteur et les brebis seront dispersées» (Matth. XXVI, 31).

Le Saint-Siège doit protester contre de pareils abus qui ravalent la personne humaine :

Tandis que Nous réprouvons avec douleur cet événement plein de tristesse et que Nous le soumettons en quelque sorte au jugement de l'opinion publique et au tribunal de l'histoire elle-même, Nous faisons une chose que réclament absolument et les droits violés de l'Eglise et la dignité même de la personne humaine.

Il est faux d'affirmer que les catholiques, le clergé, Vépiscopat et, en particulier, le Cardinal Mindszenty soient des instruments de domination politique mis en action par le Vatican 2 :

Et, d'une manière spéciale, Nous jugeons devoir encore déclarer ceci ; il est absolument contraire à la vérité d'affirmer, comme on l'a fait durant le cours du procès, que toute la cause qui est venue en jugement dépendrait du fait que le Siège apostolique, dans ses desseins et ses efforts de

1 De fait le Vatican a été informé que l'ensemble du monde manifestait sa violente réprobation contre les procédés et le verdict du tribunal de Budapest.

2 Cette accusation est constamment formulée par les autorités de l'U. R. S. S. et des pays satellites. L'Eglise orthodoxe de Moscou se fait l'écho des mêmes accusations. (Cf. Radiomessage au monde du 24 décembre 1948, dans Document» Pontificaux 1948, p. 440; lire notamment la note 1P 447)-

domination politique sur les peuples aurait donné l'ordre de s'opposer à la République hongroise et à ses chefs, si bien que toute l'affaire retomberait sur ce même Siège apostolique.

L'Eglise reste sur son terrain, elle ne pénètre pas dans la mêlée politique, sinon pour y proclamer les exigences des principes chrétiens sur le plan spirituel : .

Or, tous savent que l'Eglise catholique n'est pas mue par des motifs terrestres, mais qu'elle admet n'importe quelle forme de gouvernement pourvu que celle-ci ne soit pas en opposition avec les droits divins et humains.

Mais, en cas d'opposition, les évêques et les fidèles eux-mêmes, conscients de leur propre devoir, doivent résister aux lois impies.

Toutefois, il faut citer en exemple les catholiques hongrois qui, au milieu des épreuves, restent fidèles à l'Eglise :

Au milieu de ces circonstances, Vénérables Frères, le Père des Miséricordes (II Cor. I, 3) ne Nous a pourtant pas fait manquer de célestes consolations qui ont adouci Notre douleur. Elles proviennent en premier lieu de la foi tenace des catholiques hongrois, qui, bien qu'empêchés par les plus grands obstacles, font tout leur possible pour défendre la religion de leurs aïeux et pour renouveler les glorieuses traditions de leurs ancêtres.

L'Episcopat hongrois à son tour demeure, en bloc, ferme devant les menaces grandissantes :

Elles proviennent ensuite de la conscience très ferme que Nous nourrissons dans Notre coeur paternel que les ' s évêques de Hongrie s'efforceront toujours, de plein accord et avec sollicitude, de défendre la liberté de l'Eglise, d'affermir de toute façon les fidèles dans l'unité de la foi et de les encourager par cet espoir qui, venu du ciel, et alimenté par la grâce divine, ne peut être affaibli ni éteint par les misères et les injustices de cette vie.

L'Episcopat de tous les pays, en ces tristes circonstances, s'est serré autour du Pape :

Ces consolations d'en-haut Nous sont aussi venues de vous, Vénérables Frères, car Nous vous avons vus étroitement groupés à Notre côté dans ces conjonctures, prendre part à Notre douleur et joindre vos prières aux Nôtres. Elles viennent également des autres cardinaux, archevêques et évêques de toutes les parties du monde qui, unis à leurs clergés, et à leurs peuples, Nous ont exprimé en des lettres émouvantes ou en des télégrammes, leur réprobation pour l'offense fait à l'Eglise et Nous ont promis leurs prières publiques et privées 1.

Il faut surtout prier :

1° afin d'obtenir pour les persécutés la force venant d'En-Haut :

Nous souhaitons vivement que tous continuent ces prières. Chaque fois, en effet, que l'Eglise est ballottée par de si graves tempêtes que les forces humaines ne peuvent les surmonter, il faut se réfugier avec confiance auprès du divin Rédempteur qui seul peut apaiser les flots en furie et ramener une tranquille sérénité.

Faisant donc intervenir le doux et puissant patronage de la Vierge, Mère de Dieu, implorons tous du Seigneur que ceux qui subissent persécutions, prison, et vexations soient affermis par la rosée de la grâce divine nécessaire et la force de la vertu chrétienne.

2° afin que les persécuteurs se convertissent:

Et que ceux qui témérairement osent fouler aux pieds la liberté de l'Eglise et les droits de la conscience humaine, comprennent finalement qu'en supprimant la religion, et en bannissant Dieu, aucune société civile ne pourra jamais subsister.

La paix entre les peuples et entre les individus ne pourra subsister que si tous admettent la loi divine :

Car seuls les principes sacrés de la religion peuvent

1 L'organe officieux du Vatican : l'Osseryafore Romano, a durant plusieurs semaines publié quotidiennement, à longueur de colonnes, le texte des messages de protestations en provenance du monde entier.

équilibrer avec Justice les droits et les devoirs des citoyens, consolider les fondements de l'Etat, régler par des lois bienfaisantes les moeurs des hommes et les diriger vers l'ordre véritable et vers la vertu.

Ce qu écrivait le plus grand orateur romain : « Vous, pontifes, vous défendez la cité par la force de la religion plus sûrement que ne le font les remparts », est infiniment plus vrai et plus certain quand il s'agit de la doctrine et de la foi chrétiennes.

C'esf pourquoi le Pape réclame, dans tous les pays, la liberté pour l'Eglise :

Que tous ceux qui tiennent les rênes de l'Etat reconnaissent donc ces vérités et que partout la liberté qui lui est due soit donc rendue à l'Eglise. De sorte que, sans être gênée par aucune entrave, elle puisse éclairer, de la lumière de sa doctrine, les esprits des hommes, bien éduquer la jeunesse et la former à la vertu, réaffirmer le caractère sacré de la famille, et pénétrer de son influence toute la vie humaine.

De cette action bienfaisante, la société civile n'aura à craindre aucun dommage ; elle en retirera, au contraire, de très grands avantages.

L'Eglise pourra alors exercer son oeuûre de pacification :

Car, alors, Vénérables Frères, les relations sociales réglées avec justice et équité, la condition des indigents relevée comme il est nécessaire, et rétablie selon la dignité humaine, les discordes enfin apaisées et les esprits pacifiés, dans la charité fraternelle, pourront heureusement se lever des temps meilleurs pour tous les peuples et pour toutes les nations, comme Nous le désirons ardemment et le demandons par de ferventes prières.

Voilà, Vénérables Frères, ce que Nous avions à vous faire connaître dans cette noble assemblée, à vous qui Nous assistez de si près dans le gouvernement de l'Eglise universelle, en prodiguant votre prudence éclairée et votre activité empressée 1.

1 On trouvera un jugement serein sur le procès du Cardinal Mindszenty dans La Nouvelle Revue Théologique, mars 1949, pp. 310 et seq.


Pie XII 1949 - RADIOMESSAGE AU CONGRÈS EUCHARISTIQUE DE BOLIVIE