Pie XII 1950 - CONVENTION ENTRE LE SAINT-SIÈGE ET L'ETAT ESPAGNOL CONCERNANT L'AUMONERIE MILITAIRE


LETTRE AU VINGT-ET-UNIÈME CONGRÈS DE PAX ROMANA

(6 août 1950) 1

Du îg au 27 août se tenait à Amsterdam le vingt-et-unième Congrès de Pax Romana 2. Pie Xli y envoya le message suivant. Le Pape apporte au Congrès l'appui de ses prières :

Nous venons à vous avec joie, chers fils et chères filles qui, sous la présidence du cardinal-archevêque d'Utrecht, êtes assemblés dans l'antique cité d'Amsterdam pour le vingt-et-unième Congrès de Pax Romana. Et Notre première parole sera pour invoquer sur les travaux que vous inaugurez l'abondance des dons spirituels de lumière et de force !

La mission des intellectuels, à l'heure présente, est soidignêe dans les termes suivants :

Aujourd'hui, en effet, votre titre d'étudiants et d'intellectuels catholiques est lourd de responsabilités, comme il le fut rare

1 D'après le texte français des A. A. S., XXXXII, 1950, p. 635.

2 Pax Romana tend à réaliser l'union des étudiants universitaires dans le « Mouvement International des Etudiants Catholiques » (M. I. E. C.) et celle des intellectuels dans le « Mouvement International des Intellectuels Catholiques » (M. I. I. C).

C'est en 1921 que le Secrétariat de Pax Romana fut créé à Fribourg en Suisse. Ce mouvement a pour but :

— de créer entre les membres le véritable esprit de charité universelle ;

— d'enrichir, par des contacts mutuels, leur formation humaine et chrétienne ;

— de  développer,  par  l'entraide  fraternelle,  leurs   activités,  sur  le  plan  national  et international ;

— de favoriser le rayonnement de la pensée chrétienne, notamment dans le monde des idées et de la culture ;

— de coordonner la contribution des  milieux intellectuels  catholiques  à la vie internationale selon les principes chrétiens sous la devise : Pax Christi in regno Christi.

Le président de cette association est M. Roger Millot à Paris, et le secrétaire, M. Ramort Sugranyes, S, avenue du Moléson, Fribourg, Suisse.

ment au cours de l'histoire, et c'est pourquoi, dans le pacifique combat pour la défense et le rayonnement de la vérité, Nous vous exhortons, selon les termes mêmes de l'Apôtre « à tenir bon dans un même esprit, luttant de concert et d'un coeur unanime pour la foi de l'Evangile, sans vous laisser intimider en rien par les adversaires ». S'il en était d'ailleurs besoin, le programme de vos diverses réunions Nous serait une preuve que vous ne vous dérobez ni aux problèmes qui s'imposent à la pensée moderne, ni en particulier, aux tâches qui incombent aux penseurs chrétiens. Soyez-en félicités, et que les voeux du Père commun vous soient le gage d'un labeur fraternel et fructueux.

Le mouvement de Pax Romana constitue une heureuse synthèse de tous les efforts des intellectuels catholiques des divers pays et des diverses disciplines :

Dans l'unité de votre double mouvement international, vous symbolisez, à Nos yeux, non seulement la diversité des professions littéraires et scientifiques qui se partagent le champ de l'activité intellectuelle, mais encore la richesse ancestrale des traditions propres à chacune de vos contrées d'origine ; votre seule présence, au surplus, témoigne des patients efforts de tant de prêtres et de laïcs qui, en chaque ville, chaque Université, ont suscité ces groupes d'Action catholique dont la vitalité reste la condition et la garantie de la valeur de votre Assemblée.

Au delà de Pax Romana, le Pape lance à tous les catholiques intellectuels deux mots d'ordre :

Aussi, en saluant le Congrès de Pax Romana, Nous voyons se profiler à vos côtés l'immense foule de Nos fils, les étudiants et les intellectuels catholiques du monde entier : à eux tous, comme à vous-mêmes, Nous rappelons, comme une impérieuse exigence, ces deux devoirs :

— présence à la pensée contemporaine,

— service de l'Eglise.

i° Les catholiques doivent être présents là où on réfléchit aux grands problèmes de l'homme :

Oui, soyez présents à la pointe du combat de l'intelligence, à l'heure où celle-ci s'efforce d'envisager les problèmes de

l'homme et de la nature aux dimensions nouvelles où ils se posent désormais. Nul, sans doute, ne se dissimule les écueils particuliers qui guettent aujourd'hui l'esprit humain, du fait de l'ampleur des questions soulevées ; et pourtant, les fils de l'Eglise pourraient-ils délaisser la recherche et la réflexion quand, précisément, des applications désordonnées de la science et les prestiges du relativisme philosophique ébranlent en des esprits fragiles et inquiets, les principes les plus fondamentaux et les valeurs les plus essentielles 3 ?

Les catholiques, dans les discussions, apporteront les solutions véritables :

Que votre présence en cette arène de la pensée y porte, au contraire, un témoignage de fermeté et de prudence. Le progrès scientifique ne saurait comme tel déconcerter le croyant qui, bien plutôt, se plaît à le servir et salue en toute découverte une éclatante manifestation de la sagesse et de la grandeur du Créateur. Mais, face à la séduction des systèmes nouveaux, il est plus que jamais nécessaire, pour l'avenir même de l'esprit, d'assurer les bases d'une saine philosophie et d'affirmer la transcendance de la vérité ; hors de là, la raison humaine ne peut que s'affoler dans l'instabilité, à moins qu'elle ne s'érige elle-même en principe suprême, contempteur des droits souverains de Dieu.

Les catholiques apporteront aussi, dans les cercles scientifiques, l'exemple de la collaboration entre chercheurs et étudiants :

Que votre présence y porte également un témoignage de charité et d'union : sans doute l'ampleur du savoir contemporain exige-t-elle désormais, sur le plan des connaissances techniques, une collaboration, trop souvent paralysée, hélas ! par des considérations étrangères au souci de la vérité ! Mais, plus encore, l'urgence des problèmes humains posés à notre génération appelle tous les esprits droits et sincères à la communauté des efforts dans la compréhension réciproque : étudiants de divers pays, intellectuels catholiques de toutes professions, multipliez

3 On trouvera dans l'Encyclique Humani Generis du 12 août 1050 (cf. p. 295) des directives très nettes concernant le relativisme philosophique.

entre vous, autour de vous, les échanges fructueux et les contacts pacificateurs !

En ce faisant, les intellectuels servent l'Eglise :

Une telle action et de tels témoignages sont déjà, à vrai dire, de la part de catholiques appréciés pour leur compétence et leur conscience, un authentique service de l'Eglise.

2° Les intellectuels doivent rendre à l'Eglise des services de premier ordre, notamment en fournissant aux théologiens les données scientifiques dont ils ont besoin :

Mais, ce service, vous l'accomplirez plus précisément encore dans le cadre de votre profession, en apportant à l'élaboration de la pensée chrétienne l'appoint nécessaire de vos expériences et de votre culture. Aujourd'hui, les théologiens catholiques doivent pouvoir compter sur Nos fils, savants ou techniciens, philosophes ou juristes, historiens, sociologues ou médecins, pour fournir à leurs travaux l'assise de connaissances profanes éprouvées. Au sein de l'Eglise, et en votre qualité d'intellectuels, c'est là votre mission privilégiée.

D'autre part, les intellectuels demeureront dociles aux directives de l'Eglise :

Et c'est pourquoi ce service, vous l'accomplirez avec le sens de votre responsabilité, mais aussi d'un coeur filial, et avec une confiante docilité. L'enseignement que l'Eglise vous délivre, les directives qu'elle vous donne, la prudence qu'elle vous impose parfois, sont pour vos labeurs autant de sources de fécondité, autant de garanties de sécurité, autant d'assurances de vraie liberté. Nous souhaitons de tout coeur que dans l'exercice de votre tâche professionnelle, vous découvriez, chaque jour davantage, avec quel respect et quelle vigilance l'Eglise maternelle soutient vos efforts en ces temps difficiles que vous vivez.

Telle est la mission propre de l'intellectuel catholique dans le monde contemporain :

A ces conditions, étudiants et intellectuels chrétiens, vous participerez selon votre propre vocation, à l'oeuvre de la Rédemption, dans le monde qui naît sous vos yeux. La coopération à cette oeuvre de salut — dont vous avez tenu à faire le thème central de votre Congrès — n'exige-t-elle pas, en effet que vous vous insériez au coeur même de l'effort contemporain, à l'image du Christ, en tout semblable à nous, hormis le péché ? Et n'exige-t-elle pas également que vous portiez, féconde en vos esprits, la vertu salvatrice de ce Christ, seul Rédempteur, dont la vie nous est communiquée dans l'Eglise !

Le Pape bénit les travaux de Pax Romana :

Poursuivez donc vos travaux, animés d'un même esprit, forts d'une même espérance, sûrs de la confiance que vous font l'Eglise et son Chef. C'est en gage de Notre paternelle bienveillance et de Nos voeux que Nous vous accordons de grand coeur la Bénédiction apostolique, source de grâces abondantes sur vos personnes et vos labeurs 4.

4 Plus de mille participants venant de cinquante pays prirent part à ce Congrès qui avait pour thème : « La tâche des intellectuels dans l'oeuvre de rédemption ».


LETTRE A SON EM. LE CARDINAL FUMASONI BIONDI A L'OCCASION DU CONGRÈS MISSIONNAIRE INTERNATIONAL (9 août 1950)

1 D'après le texte latin des A. A. S., XXXXII, 1950, p. 725.

Du 5 au 8 septembre se tenait à Rome un Congrès Missionnaire 2 ; à cette occasion, le Pape écrivait au Cardinal Préfet de la S. Congrégation de la Propagande, la lettre suivante :

C'est avec une profonde satisfaction que nous avons appris que, dans les premiers jours du prochain mois de septembre, se tiendra, dans cette auguste cité, un solennel Congrès des missions, auquel participeront de nombreux evêques, missionnaires, prêtres et laïcs.

Nous avons lu et médité les thèmes qui seront exposés au cours des sessions, et nous avons vu que les congressistes, par une sorte d'intuition apostolique, et à juste raison, feront en sorte que les oeuvres instituées pour aider les missions, à savoir l'Union Missionnaire du Clergé, et les OEuvres Pontificales de la Propagation de la Foi, de Saint-Pierre Apôtre et de la Sainte-Enfance, deviennent, dans toute la mesure du possible, plus actives, mieux organisées et plus efficaces 3.

2 Deux congrès avaient eu lieu en 192g et 1936.
3 L'Union Missionnaire du Clergé dont le titre est : Pia Unio Cleri pro Missionibus, a son origine dans des ligues créées en 1912 en Allemagne, et en 1915 en Italie, pour inviter tes prêtres à prier pour les missions. En 1918, l'Union devenait internationale. L'Encyclique Maximum Illud de Benoît XV (30 novembre 1919) déclarait aux evêques : Vous avez le devoir d'orienter tout particulièrement vers les missions les préoccupations de votre clergé. Vous saurez donc que Nous souhaitons voir s'établir dans tous les diocèses du monde catholique l'association dite du clergé pour les missions relevant de la Sacrée Congrégation de la Propagande. En 1950, il y avait 200.000 prêtres inscrits dans l'Union et ils étaient répartis en cinquante pays. Quant aux OEuvres Pontificales pour les missions, on se reportera aux notes des pages 351.


Le Saint-Père rappelle à tous leur devoir missionnaire :

En effet, le but principal de ce Congrès est d'éclairer tous les fidèles sur l'importance de la cause des missions et de les exhorter à s'y intéresser avec un zèle grandissant : tous les fidèles pour tous les infidèles.

i°  devoirs du clergé : '''!

Le clergé, tout d'abord, ne peut avoir conscience de remplir pleinement son propre devoir s'il ne prie pas Dieu avec ferveur pour les missions et s'il ne dirige pas vers elles ses propres pensées et ses propres activités.

2° devoirs des intellectuels :

On doit aussi à tout prix faire en sorte que les milieux cultivés comprennent comment la propagation de l'Evangile est absolument nécessaire à la véritable prospérité humaine et au maintien de la civilisation.

3° devoirs des étudiants :

De même la généreuse jeunesse étudiante qui parfois se laisse prendre aux idéologies dites néfastes, doit être excitée et attirée à de plus nobles entreprises par l'admirable force et l'exemple de l'apostolat missionnaire.

4°  devoirs des journalistes :

La presse enfin, dont l'influence est si grande sur l'opinion publique, ne peut ni ne doit passer sous silence l'activité splendide des missionnaires ; tout au contraire, grâce à l'aide précieuse de la presse, on doit préparer et réaliser le grand et noble combat missionnaire qui est le combat pour la vérité et la justice, pour la concorde et la paix de toutes les nations.

Le problème missionnaire pose aujourd'hui des exigences nouvelles :

Certes, le travail et le zèle des missionnaires ont rencontré,-au cours de ces dernières années, de nouvelles exigences qui doivent être étudiées soigneusement, surtout pour ce qui concerne les règles d'apostolat à suivre, tant parmi les peuples primitifs que parmi les peuples cultivés.


L'Eglise, en pays de mission, doit se préoccuper de la situation faite aux ouvriers :

Les questions sociales, en particulier tout ce qui regarde le travail, le juste salaire, les oeuvres de prévoyance sociale et l'élévation des conditions de vie des travailleurs pour la réalisation d'une société meilleure, sont des sujets importants que les missionnaires doivent connaître et étudier avec soin, et auxquels ils doivent, dans la mesure du possible, trouver une solution, comme la charité elle-même l'exige et comme le besoin s'en fait sentir plus vivement chaque jour.

Le zèle missionnaire devra retrouver un regain de force à l'issue de ce Congrès :

La charité des missionnaires est, sans aucun doute, parmi les plus ardents foyers d'amour qui ne cessent de jaillir du Coeur Sacré de Jésus. La société humaine est tourmentée aujourd'hui par de graves difficultés et seul le divin Rédempteur a « les paroles de la vie éternelle » 4, face à l'opinion erronée, ceux qui se réuniront à Rome pour le Congrès missionnaire, pleinement conscients de la gravité de l'heure présente, entendent à nouveau dans leur coeur la voix de l'Esprit-Saint « qui implore pour nous avec des gémissements inénarrables » 5, ainsi que ces paroles du Christ, qui sont en quelque sorte le testament de son amour indéfectible : « Et j'ai d'autres brebis qui ne sont pas de ce bercail, et il faut que je les amène et elles entendront ma voix et il n'y aura qu'un bercail et qu'un pasteur » 6.

4 Jn 6,69.
5 Rm 8,27.
6 Jn 10,16.

La période où on pouvait se contenter de baser l'apostolat sur l'empirisme ou le sentiment est révolue ; désormais, il faudra baser son action sur une sérieuse étude scientifique :

En ces temps de crise et de lutte, ne suffit plus ce qu'on appelle le « romantisme » de l'apostolat, autrefois si utile à l'oeuvre des missionnaires. Aujourd'hui, au contraire, par des congrès solennels, par la presse, par des rapports envoyés des terres de mission, va se formant la science missiologique, comme le démontrent clairement les chaires de missiologie créées dans les universités et les séminaires, ainsi que ce Congrès préparé avec un soin particulier.

En particulier, les missionnaires doivent respecter les tendances particulières des peuples :

Nous-même, dans la première Encyclique Summi Pontificatus, en date du 20 octobre 193g, écrivions : « Toutes les sollicitudes, toutes les orientations dirigées vers un développement sage et ordonné des forces et des tendances particulières, à condition qu'elles ne s'opposent pas aux devoirs dérivant pour l'humanité de son unité d'origine et de sa commune destinée, l'Eglise les approuve et les accompagne de ses voeux maternels. Elle l'a r..ontré à maintes reprises dans l'activité qu'exercent les hérauts des missions et elle affirme que cette règle est en quelque sorte l'étoile directrice, vers laquelle elle dirige ses regards, sur la route de son apostolat universel »7. rt,.

7 Cf. A. A. S., 31, 1939, p. 413. S A. A. S., 36, 1944, p. 207.

Le Saint-Père précise ici le but même des missions : établir l'Eglise :

En outre, dans l'allocution que Nous avons prononcée, le 24 mai 1944, en présence des Conseils des OEuvres Pontificales Missionnaires, Nous avons ouvertement déclaré que la fin par excellence des missions est d'établir si fortement l'Eglise en terre infidèle, que, poussant des racines toujours plus profondes, elle puisse vivre et se développer par elle-même, sans l'aide des oeuvres missionnaires, laquelle aide devra cesser le jour où elle n'aura plus de raison d'être 8.

Le missionnaire n'est pas un colonisateur, ni un administrateur qui se présente pour gérer les intérêts temporels des peuples :

L'Eglise n'a nullement la volonté de dominer les peuples, ni d'étendre son pouvoir dans les affaires purement temporelles.

le rôle du missionnaire est d'ordre purement spirituel :

Son unique désir est d'apporter la lumière de la foi à toutes les nations, de favoriser le développement de la culture humaine et civile, ainsi que la concorde fraternelle entre les peuples.

Pie XII invite tous les prêtres et religieux à soutenir les OEuvres Missionnaires :

Après ce rappel, Nous voulons exhorter d'un coeur paternel, tous les prêtres, tous les frères, toutes les religieuses, ceux-là surtout qui s'adonnent à l'enseignement, afin que, dans une union étroite, et agissante, les uns par le moyen de l'Union Missionnaire du Clergé, les autres, par le moyen des OEuvres Pontificales de la Propagation de la Foi, de Saint-Pierre Apôtre, pour le clergé indigène, et de la Sainte-Enfance, ils persévèrent dans leur résolution de soutenir les missions, multiplient à leur profit les initiatives, ne cessent d'adresser à Dieu d'ardentes prières et aident ceux qui sont appelés à l'apostolat missionnaire en leur procurant, dans la mesure où ils le peuvent, les ressources nécessaires.

Certaines terres de mission, notamment en Extrême-Orient, au Japon, en Indonésie, en Chine, en Corée, en Malaisie, ont été, ou sont encore gravement éprouvées. Il faut leur venir en aide :

L'Eglise, en effet, est le corps mystique du Christ, dans lequel « si un membre souffre, tous les autres membres souffrent avec lui » 9. Aussi, comme plusieurs de ces membres sont aujourd'hui cruellement tourmentés et couverts de blessures, tous les fidèles doivent considérer comme un devoir sacré de s'unir à eux dans une étroite collaboration matérielle et spirituelle. En certains pays de mission, la fureur de la guerre a dévasté et détruit de façon inouïe de nombreuses églises, résidences, écoles, hôpitaux. Le monde catholique entier, qui de toute évidence est tenu à une particulière sollicitude et charité à l'égard des missions, donnera généreusement les secours nécessaires pour réparer ces dégâts et relever tant de ruines.

Il faut admirer ceux qui souffrent pour l'extension de l'Eglise, dans les terres lointaines :

Mais, en même temps, nous tournerons notre pensée vers les hérauts intrépides de la Foi, qui peinent durement sur le champ de leur labeur, supportent courageusement l'adversité et acceptent avec joie toutes les difficultés, « parce qu'ils ont été jugés dignes de souffrir pour le nom de Jésus »10 ; et nous n'oublions pas de regarder avec reconnaissance les séminaires et les instituts bien méritants de l'Eglise, dans lesquels s'instruisent et se forment les futurs missionnaires.

Le Pape souhaite que le Congrès soit marqué par des fruits abondants : '

Aussi, tandis que Nous félicitons vivement les prêtres et les fidèles qui, à la manière de missionnaires demeurés chez eux, viennent en aide aux missionnaires se trouvant loin de chez eux, de grand coeur Nous exprimons publiquement Nos voeux et Nos souhaits, afin que soit conduit à bonne fin le Congrès missionnaire, qui prendra place parmi les nombreux événements heureux et les solennelles cérémonies de l'Année Sainte. Le voeu formulé par Nous dans la première Encyclique, à savoir, que se prépare et se réalise l'universel retour au Christ, prend une particulière signification si nous songeons à l'immense multitude d'hommes, pour lesquels le Christ Rédempteur a versé son sang, et qui ne connaissent pas encore la grâce de la Rédemption ni n'en bénéficient.

Avec ces voeux et ces souhaits, en gage des dons célestes et en témoignage de Notre particulière affection, à vous, Notre cher Fils, et à tous ceux qui prendront part au prochain Congrès, ainsi qu'à tous les fidèles qui continueront à se dévouer pour que les frontières du Règne de Dieu s'étendent jusqu'aux frontières du monde, Nous accordons de tout coeur, dans le Seigneur, la Bénédiction apostolique ".


10 A. A., 5, 41.
11 Au ier août 1950, la Sacrée Congrégation de la Propagande avait sous sa juridiction : 9 délégations apostoliques, 46 archidiocèses, 180 diocèses, 6 prelatures nullius, 231 vicariats apostoliques, 130 préfectures apostoliques, 3 missions simples, 26.840 prêtres, 9.331 frères, 61.377 soeurs, 27.944.894 catholiques, 2.540.883 catéchumènes.


MESSAGE AU CONGRÈS CATHOLIQUE DE PASSAU (16 août 1950)


1 D'après le texte allemand des A. A. S., XXXXII, 1950, p. 728.

Tous les ans, les catholiques allemands se rassemblent en un Katholikentag où les problèmes de la vie catholique sont discutés 2. En 1930, cette réunion avait lieu à Passau en Bavière. Et lors de la séance de clôture, le 3 septembre, Son Excellence Mgr Landersdorfer, évêque de Passau, donnait communication du message suivant signé par Pie XII :

2 En 1948, à Mayence, le Congrès avait pour thème : « Le Christ et la misère d'aujourd'hui » (cf. radiomessage du 5 septembre 1948 dans Documents Pontificaux 1948, p. 297).
En 1949, à Bochum, le sujet traité était : « La paix est le fruit de la justice » (cf. radiomessage du 4 septembre 1949 dans  Documents Pontificaux 1949, p. 344).
En 1950, à Passau, le Congrès discutait : « La réalité du catholicisme ».

Vous allez vous trouver réunis prochainement pour la revue de vos forces dans la vieille et vénérable cité episcopale de Passau. La ville est aussi vieille que le christianisme, sinon davantage. L'évêché de Passau a une histoire de plus de douze cents ans et il peut se vanter d'avoir compris dans ses frontières la future ville impériale de Vienne. La ville même de Passau et la campagne qui l'entoure — nous songeons notamment aux magnifiques rives du Danube du côté de Regensburg — sont riches en églises et autres fondations. Une piété vivante et un sentiment très délicat du beau et du noble s'y sont unis pour créer des oeuvres de haute valeur. Elles sont d'autant plus précieuses qu'en beaucoup d'endroits, la guerre a détruit des oeuvres analogues.

Mais vous ne courez certes pas le risque d'arrêter vos regards au riche passé de la terre que vous foulez et d'en oublier la grise réalité présente. L'ampleur des résolutions prises par vous aux deux Congrès précédents de Mayence et de Bochum ont prouvé que vous avez pleinement conscience de vos responsabilités actuelles. En vous réunissant cette année dans une cité de caractère rural, vous savez que dans les campagnes, comme dans les villes, les conditions ont radicalement changé.

Vous êtes bien convaincus que sans l'eau fécondante de la prière et de la mortification, la graine semée ne saurait germer et lever. Vous êtes bien convaincus que tous les nobles élans baissent, que toute volonté et toute action se paralysent nécessairement, si la grâce du Christ et l'inspiration du Saint-Esprit ne leur communiquent pas vie, et force et efficacité. Vous en êtes bien convaincus : pour nécessaire que soit l'organisation, par elle-même, elle produit bien peu ; l'action décisive part du chrétien qui est profondément pénétré de la foi chrétienne et qui la vit.

Aussi bien avez-vous résolu de consacrer vos assises d'Altôtting et de Passau à la vie intérieure et au renouveau chrétien. Vous avez voulu faire de ces journées le Congrès de l'Année Sainte qui est l'année du recueillement, de la prière et de la pénitence. Nous louons votre décision et, pour l'appuyer, nous aimerions vous proposer trois considérations :

Il faut que le peuple allemand tire la leçon des épreuves qui le frappent :

Vous ne sauriez supporter le sort actuel de votre patrie — nous songeons avant tout aux millions de personnes chassées des provinces de l'Est3, mais non pas à elles seules seulement — si vous ne considérez pas les événements dans la lumière de la Providence divine. Les épreuves des dernières décades et notamment de la dernière, sont bien au-delà de questions de droit et de justice, un de ces châtiments dont Dieu frappe les fautes de plusieurs siècles. Supportez votre sort en esprit d'abandon et d'humilité. Donnez à cette épreuve un caractère chrétien en l'acceptant des mains de Dieu comme expiation, sinon de vos fautes personnelles, du moins des fautes aux suites si terrifiantes de votre nation et d'autres peuples. Mais ne vous arrêtez pas à cela. Abstraction faite des vicissitudes temporelles d'un peuple, des événements de cette ampleur sont toujours des épreuves envoyées par Dieu, donc des temps de grandes possibilités pour le règne de Dieu, des temps riches de vérité et de grâces pour tous les enfants et pour toutes les classes de la société : c'est que vous coopériez avec l'action de Dieu. Le nerf de votre coopération est dans la sincère acceptation de votre sort, tel que la Providence l'a disposé et tel qu'elle le disposera à l'avenir, dans un esprit d'expiation, de pénitence et de sacrifice, en union avec le Christ. A votre peuple et à d'autres nations, cette acceptation vaudra des grâces de miséricorde et de salut, par des voies peut-être que vous ne connaissez pas maintenant, mais qui tourneront certainement en bénédictions. Car, « par sa Providence, Dieu conduit et gouverne tout ce qu'il a créé, atteignant avec force d'un bout du monde à l'autre ». Car tout est découvert à ses yeux, même les actions libres futures de ses créatures 4.

3 Plus de 12 millions d'Allemands qui habitaient à l'est de la ligne Oder-Neisse ont été évacués à l'ouest de cette ligne, c'est-à-dire à l'intérieur de l'Allemagne actuelle, et 8 millions de ceux-ci se sont réfugiés en Allemagne occidentale (on les appelle les réfugiés A) et 4 millions en Allemagne orientale. Dautre part, près de 4 millions d'Allemands vivant en zone russe ont cherché refuge en Allemagne occidentale (réfugiés B), de sorte que celle-ci a vu affluer chez elle près de 32 millions de réfugiés auxquels il faut encore ajouter plus de 200.000 personnes déplacées venant d'autres pays, qui vivent dans des camps et qui doivent, d'après les décisions des Alliés, s'intégrer dans l'économie allemande.
4 Concile du Vatican, session III, c. l ; DS 1784 (cf. Sg 8,1 He 4,13).

Il faut combattre le matérialisme :

Le programme de votre Congrès comporte la lutte contre le matérialisme. Le matérialisme est une déviation progressive des réalités surnaturelles, spirituelles et religieuses, qui peut aller jusqu'à l'athéïsme absolu. Le matérialisme n'admet que les réalités tombant sous l'expérience des sens. Le matérialisme abuse des découvertes inouïes, sans cesse croissantes, des sciences naturelles qui sont pourtant autant de révélations de Dieu, ainsi que des progrès de la technique. Les tenants du matérialisme s'en servent pour aveugler les gens et leur faire oublier ainsi le surnaturel et l'éternel. Le matérialisme tend au culte des substances physiques, du corps et de la force., de l'argent et de la puissance. Peu d'époques ont vérifié comme la nôtre la maxime de l'Ecriture Sainte, selon laquelle tout ce qui se trouve dans le monde est « concupiscence de la chair, concupiscence des yeux et orgueil de la vie » (1Jn 2,16).

Pour livrer cette lutte avec succès, il faut que les catholiques soient authentiquement chrétiens :

L'athéisme organisé et progressant grâce à sa puissance politique serait moins dangereux, s'il ne pouvait s'appuyer et compter pour l'avenir sur tous les hommes qui, tout en n'admettant pas le matérialisme athée et en se tenant peut-être même pour des croyants et des chrétiens, vivent dans la réalité quotidienne tout comme si Dieu n'existait pas.

Les chrétiens du monde entier ont le devoir d'ériger une digue contre la vague montante de l'athéisme. Cette tâche n'est pas sans espoir. Les catholiques s'élèvent à plusieurs centaines de millions et ils représentent une grande puissance. On a prétendu récemment que les catholiques pratiquant leur foi avec une joie intime ne forment qu'une minorité insignifiante. Cela n'est pas vrai. Pareille assertion ne peut s'expliquer que par une expérience unilatérale et par trop insuffisante. L'Eglise, dans son universalité, a fait d'autres expériences. Nous ne craignons pas de l'affirmer : avec les catholiques, la majorité des hommes est encore toujours pour Dieu. Il existe des pays qui comptent également plusieurs centaines de millions d'habitants et dont la population professe pour les choses religieuses un respect si profond qu'il pourrait remplir de confusion maint catholique. Dieu est aussi le maître de notre époque.

La lutte contre le matérialisme ressemble, peut-être plus qu'aucune lutte de l'Eglise dans le passé, à la tâche des premiers chrétiens en face de la philosophie et des moeurs païennes. Pareille lutte exige le plein engagement — spirituel et moral — du catholique.

Il faut en particulier que l'enseignement de la religion soit donné a tous et sans compromis avec l'erreur :

Seuls les catholiques qui ont vraiment compris leur religion et qui l'approfondissent sans cesse selon le niveau de leur formation intellectuelle, seuls les chrétiens qui ont des convictions religieuses vraiment personnelles sont à même, dans vos conditions présentes de vie, de se préserver, eux et leur entourage, de la contagion de l'indifférentisme religieux. L'Allemagne catholique pouvait jadis se vanter de la profonde formation religieuse qu'elle donnait à ses fils et à ses filles.

Mettez-y encore aujourd'hui votre honneur. Cette formation comporte aujourd'hui une double exigence. Dans votre enseignement et dans vos écrits religieux, tenez-vous-en toujours aux principes sûrs de la doctrine catholique. Seule cette fidélité vous préserve de l'erreur et de la chute. Quant aux relations de la foi et de la science, il ne saurait y avoir d'opposition essentielle entre ces deux modes de connaissance, la science catholique a éclairé ces rapports et elle continuera à le faire. Mais il importe que les résultats de ses études deviennent le bien commun des fidèles et tout particulièrement des classes dirigeantes. Nous rappelons avec insistance leur très lourde responsabilité à tous ceux qui ont la tâche d'exposer la doctrine chrétienne : catéchistes, professeurs de séminaires et d'universités, prédicateurs, journalistes, écrivains.

Mais c'est d'abord sur soi-même que chacun doit remporter la victoire contre le matérialisme :

La lutte contre le matérialisme exige l'engagement moral du catholique. Dans les derniers chapitres de ses Lettres, là où il expose des directives pratiques concernant la vie chrétienne, saint Paul donne aux simples fidèles des consignes qui semblent faites pour des saints. Pareille exigence s'explique non seulement par l'ampleur de la tâche des premiers chrétiens dans un monde païen, mais aussi par la simple vocation chrétienne. Il en fut toujours ainsi. La lutte contre le matérialisme a rendu les chrétiens d'aujourd'hui particulièrement clairvoyants en ce domaine. Chaque chrétien comprend qu'il doit d'abord vaincre le matérialisme dans sa propre personne. Dans ses principes et dans sa conduite, le dimanche comme aux jours de travail, dans son foyer comme dans sa profession, qu'il se trouve seul, en communauté ou dans la vie publique, qu'il soit célibataire ou marié, qu'il se divertisse, pratique le sport, choisisse un journal ou un illustré, qu'il se rende au théâtre ou au cinéma, toujours et partout le catholique est soumis aux commandements de Dieu et à la loi du Christ. Personne ne peut l'en dispenser. La menace du matérialisme a renforcé dans le chrétien la conviction que Dieu est au centre de toutes choses, que Dieu est la seule valeur absolue, la mesure de toutes les valeurs terrestres. Là où il abandonne ces normes, le chrétien se range du côté des adversaires de l'Eglise.

La vocation de chrétien exige donc la vertu et le sacrifice. Plus impérieuse que jamais aujourd'hui, cette exigence s'étend souvent jusqu'à l'héroïsme de la vertu et du sacrifice. Qui veut lutter contre le matérialisme ne doit pas un instant redouter cette réalité et cette exigence.

De plus, il faut prier et prier beaucoup :

Vous avez, chers fils et chères filles, plongé votre Congrès dans la bienfaisante atmosphère de la prière. Vous avez bien fait. Car si la tâche du catholique semble aujourd'hui presque surhumaine, il trouve dans une vie de prière la force de l'accomplir.

Les catholiques allemands se sont de tout temps distingués par leur organisation et leurs résultats dans les divers domaines de l'activité religieuse. Puissent-ils se distinguer également par leur vie de prière.

Nous disons aux prêtres : « Priez. Priez davantage. Soyez pour vos fidèles des modèles de vie de prière. »

Nous disons aux familles de la ville et de la campagne : « Restez fidèles à la tradition de la prière dans le foyer domestique. Bénie de Dieu, cette prière fortifie la foi, augmente la crainte de Dieu et la confiance en la Providence, elle accroît le respect mutuel et l'amour, et remplit l'âme de courage au temps de l'épreuve. »

Nous disons aux jeunes : « Apprenez à prier, non pas seulement en communauté, mais chacun et chacune pour vous ; abandonnés à vous-mêmes, vous saurez ainsi tenir bon dans le danger et répondre à chaque appel de Dieu. »

Nous disons aux patrons et aux ouvriers catholiques : « Recourez aussi à la prière pour la solution de vos problèmes. Nous connaissons la complexité de vos problèmes, et la difficulté des solutions. A eux seuls, des lois, des programmes et des arbitrages ne sauraient assurer la paix sociale. Des dirigeants ouvriers non catholiques reconnaissent qu'il ne saurait y avoir de paix sociale, si l'esprit chrétien et la charité chrétienne n'animent pas les patrons et les ouvriers. Priez beaucoup pour cet esprit et cette charité. »

A tous, nous vous disons : « Levez vos coeurs et vos mains vers Dieu. L'avenir est incertain et obscur. Priez pour que, dans sa miséricorde, Dieu tourne toutes choses au bien. »

Le Pape félicite les catholiques allemands d'avoir placé leurs travaux

sous la protection de la Sainte Vierge.

Vous avez placé votre Congrès sous la protection de Notre-Dame d'Altotting. Vos conférences se tiennent à l'ombre de son sanctuaire et vos manifestations se déroulent à Passau. Nous pensons avec joie et émotion aux heures où Nous avons célébré le Saint Sacrifice dans le sanctuaire de Notre-Dame d'Altotting et où Nous avons pu Nous édifier au spectacle de l'ardeur avec laquelle les pieux pèlerins témoignaient à Marie leur amour et lui présentaient leurs demandes. Au cours des siècles, les catholiques allemands ont gardé et cultivé particulièrement trois biens : la foi dans l'Eucharistie, une dévotion fervente envers la Vierge, l'attachement au Vicaire du Christ, attachement qui, en cette Année Sainte, a trouvé une expression toute spontanée. Puissent vos prêtres se souvenir de la haute responsabilité qui leur incombe de conserver au peuple ces trois sources d'énergie spirituelle dans toute leur pureté et dans toute leur force.

En gage de ces voeux, Nous vous accordons de tout coeur la Bénédiction apostolique, en invoquant toutes les richesses de la grâce du Christ et de l'amour maternel de Notre-Dame sur les Evêques présents à Passau, sur le clergé et les fidèles, sur tous nos fils et toutes nos filles d'Allemagne et sur tout votre peuple.



Pie XII 1950 - CONVENTION ENTRE LE SAINT-SIÈGE ET L'ETAT ESPAGNOL CONCERNANT L'AUMONERIE MILITAIRE