Pie XII 1950 - LETTRE A SON EM. LE CARDINAL GRIFFIN LÉGAT PONTIFICAL, POUR LA CÉLÉBRATION DU PREMIER CENTENAIRE DU RÉTABLISSEMENT DE LA HIÉRARCHIE CATHOLIQUE EN ANGLETERRE


ALLOCUTION AUX MEMBRES DU TROISIÈME CONGRÈS THOMISTE

(17 septembre 1950) 1

Le troisième Congrès International Thomiste2 ayant pour sujet : Philosophie et Religion, tint ses assises à Rome du 11 au 16 septembre ; à l'issue de celui-ci, une audience fut accordée aux participants :

Nous vous accueillons et vous saluons avec une affection et une estime toutes particulières, vous qui êtes venus à Rome pour les troisième assises thomistes internationales. Le sujet de votre Congrès est d'une haute importance et d'une vivante actualité : les rapports de la foi et de la raison, de la philosophie contemporaine et de la religion chrétienne.

Vous savez que sur ce sujet, Nous avons récemment publié l'Encyclique Humani generis. Elle vous a tracé une voie sûre dans vos discussions, à la lumière de ce soleil resplendissant qu'est la doctrine de saint Thomas d'Aquin, dont votre Académie porte le nom glorieux 3.

En vérité, la Philosophie perennis est une oeuvre d'une immense envergure, pour la construction de laquelle la Providence suscita, au cours des siècles, des esprits d'élite, des génies de sagesse. Perpétuellement jeune, elle est aujourd'hui aussi pleine d'une robuste vigueur. Elle accueille et favorise toujours les progrès des différentes sciences, qu'il s'agisse de scruter plus profondément les forces de la nature, d'exposer avec plus d'exactitude l'histoire ou, enfin, d'établir avec plus de soin la méthode critique.

Parmi tous les maîtres de la scolastique, une palme incomparable revient à saint Thomas. Il occupe la toute première

1 D'après le texte latin de l'Osservatore Romano des 18-19 septembre 1950.

2 Les deux Congrès précédents eurent lieu à Rome, en 1925 et en 1937.

3 Le Congrès était organisé par l'Académie romaine de Saint-Thomas dont le secrétaire général est le Père Charles Boyer S. T. et le siège au Palais de la Chancellerie à Rome.

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* On lira le discours aux philosophes du 25 septembre 1949 (cf- Documents Pontificaux 1949- P- 403).

place. Il n'aime que la vérité. Avec quel respect — attitude d'ailleurs exigée par la dignité de la vérité — ne le voit-on pas considérer les choses pour en pénétrer pleinement la nature examiner les faits, sonder les écrits et les documents ! Quel ordre dans l'exposé des problèmes, quelle force dans ses arguments et quelle lumineuse propriété dans ses termes ! Avec la force invincible de son génie, il avance vers les conclusions : avec quelle sérénité et sûreté il pousse jusqu'à leurs dernières conséquences les principes de la métaphysique, qui sont un patrimoine de la sagesse chrétienne commun à tous les âges.

C'est certain : autant le ciel dépasse la terre, autant la Révélation s'élève au-dessus des forces humaines. Supérieur à l'esprit humain, le donné révélé ne le contredit aucunement. II y a supériorité et non pas contradiction. Avec une aisance admirable, saint Thomas introduit l'intelligence humaine, incertaine et hésitante devant l'éclat de la Révélation, dans le temple des mystères divins. Résolvant les différents problèmes par la rigueur de son argumentation, il met en lumière l'accord de la foi et de la raison. L'Encyclique citée plus haut montre l'âpreté des discussions actuelles sur les rapports de la foi et de la raison.

C'est dans le dessein et avec la volonté de protéger l'intégrité et la pureté du dépôt de la foi que Nous avons promulgué ce document. Les questions auxquelles Nous avons touché dans cette Encyclique, il vous appartient de les traiter à fond dans vos recherches et dans votre enseignement, en suivant sans cesse l'exemple de saint Thomas, qui étudia en unissant le travail intellectuel le plus intense à une ardente piété.

Traitez ces questions selon sa méthode, en marquant toujours le sens précis des termes, en évitant les mots inutiles ; en usant du langage sobre, solide et clair qui distingua saint Thomas et les docteurs de la scolastique à son âge d'or et qui illumina l'Eglise et éclaira les sciences.

Engagez-vous hardiment dans cette voie. Par là, vous acquerrez de précieux mérites dans l'Eglise. En gage d'une abondante moisson, Nous accordons avec effusion la Bénédiction apostolique aux membres de votre Congrès, ainsi qu'à ceux de Y Académie de saint Thomas. Que Dieu, auteur de la lumière et de la paix, soit toujours avec vous 4 !


F ALLOCUTION A UN GROUPE DE MÉDECINS DE CAMPAGNE

(18 septembre 1950) 1

Plus de huit cents médecins de campagne réunis en Congrès à Tiuggi -furent reçus en audience à Castel-Gandolfo ; le Souverain Pontife leur dit :

Nous sommes très heureux de vous recevoir, chers fils, et de vous donner l'assurance de notre estime et de Notre bienveillance particulière, autant en raison de la beauté et de l'utilité de votre charge que pour le dévouement avec lequel vous l'exercez.

Habitué à une vie de fatigue, souvent pénible, le paysan, le cultivateur de la terre sait supporter longuement les indispositions et le malaise, à la différence de nombreux habitants de la ville, quand il vous appelle, c'est, d'une façon générale, un signe que la maladie est sérieuse, la souffrance difficilement supportable ; parfois le traitement rudimentaire et inapproprié que, dans son ignorance, il a voulu appliquer avant de recourir à vous, n'a réussi qu'à aggraver le mal. Alors, à votre science, à votre habileté, votre coeur ajoute le baume de sa délicatesse, et ainsi celui-là même qui, bien portant, pouvait paraître rude et indifférent, souvent, dans la maladie, devient sensible comme un enfant, et, comme un enfant, éprouve le besoin d'un réconfort moral. Personne, après le prêtre, ne peut le lui donner que le médecin. De cette manière, il gagne la confiance du malade et de la famille et, par cela même, il acquiert sur eux et sur la population du lieu, une influence profonde et acceptée volontiers.

Le médecin chrétien, ou tout au moins digne de cette confiance, par son honnêteté, peut faire beaucoup pour relever la

i D'après le texte italien de VOsservatorc Romano des 18 et 39 septembre 1950.

moralité du peuple, pour freiner ou réprimer des abus, vices et habitudes que la conscience réprouve. Dans de nombreux cas, il a encore le devoir délicat de préparer et faciliter le ministère du prêtre, de dissiper des préjugés et appréhensions déraisonnables et funestes.

Toutefois, si votre charge est belle en raison du bien qu'elle apporte au prochain, pour vous, elle est austère ; elle est une occasion d'abnégation non seulement fréquente, mais continue, une occasion de soucis et de désagréments, qui, parfois, ne sont pas même dignement appréciés, ni compensés par la reconnaissance, ni rétribués équitablement. Il n'est pas rare, en outre, que le médecin de commune, tout en consacrant au service de ses assistés tout son coeur et toute son activité, éprouve une sensation de solitude, surtout s'il ne peut garder auprès de lui sa famille et pourvoir, dans la petite commune perdue à laquelle il se trouve peut-être lié, à une digne éducation de ses enfants. Aussi exprimons-Nous le souhait que vos justes aspirations d'ordre moral et économique obtiennent une satisfaction convenable pour votre plus grand avantage et celui de tous ceux à qui vous assurez vos soins assidus.

Et maintenant, regardez avec courage vers le ciel, chers fils, et vous sentirez descendre en vous la lumière et le réconfort du Médecin divin de l'humanité. Votre vertu, votre bonté ne demeureront pas sans une récompense plus élevée. Dieu se révélera mieux à vous et, dans la loyauté de votre esprit, vous répondrez fidèlement à ses appels. Nous demandons au Seigneur cette grâce, en même temps que Nous invoquons pour vous, pour tous ceux qui vous sont chers, pour toute votre bienfaisante activité, pour vos malades, les plus abondantes bénédictions du Ciel.

w A Paris fut fondé en îgzi l'Union Catholique du Théâtre 2, groupant les artistes de France. Ceux-ci ont été reçus en audience à Castel-Gandolfo par le Pape qui déclara :

Votre visite, chers fils et chères filles de l'Union Catholique du Théâtre, Nous cause une joie profonde ; celle, en vous bénissant, de vous donner le témoignage de Notre estime et de Notre affection envers une institution qui s'est assigné pour fin la sanctification de ses membres et l'exercice d'un apostolat de très haute importance et de puissante efficacité.

Plus bruyant et plus voyant que le bien, le mal s'affiche partout. Jamais on ne déplorera autant qu'il conviendrait l'étendue des ravages qu'il cause dans les âmes et dans la société ; jamais non plus, on ne flétrira avec trop de rigueur le scandale qui en procure la diffusion dans tous les pays, dans tous les milieux, à tous les âges, même au plus tendre, envers lequel le poète païen réclamait la plus respectueuse délicatesse 3. II serait fâcheux pourtant que la juste dénonciation du spectacle perver-tisseur ou dangereux fît méconnaître l'existence et la belle histoire du spectacle élevant et bienfaisant. De plus, l'énergie dépensée à réagir directement contre le mal serait toujours d'une médiocre efficacité, si on ne lui opposait l'influence prépondérante du bien. Celle-ci ne doit pas être seulement l'objet d'un souhait platonique, mais la conquête d'une conviction de l'intel

1 D'après le texte français de VOsservatore Romano du 21 septembre 1950.

2 Le siège de l'Union Catholique du Théâtre est situé 31, boulevard de La Tour-Mau-b°urg, Paris.

3 Iuven, Sat., 14-47.


ALLOCUTION A L'UNION CATHOLIQUE DU THÉÂTRE

(19 septembre 1950) 1

ligence et d'une résolution de la volonté, que ne sauraient intimider ni les difficultés ni les contradictions. Or, cette victoire peut être remportée, et avec votre concours — Dieu en soit loué — elle le sera !

Quels sont, en effet, les facteurs du succès ? L'existence d'un théâtre honnête et même bienfaisant : elle est possible ; la faveur du public : il est aisé de l'obtenir ; la puissance psychologique des interprètes : vous saurez la prouver par l'étroite union de votre foi et de votre talent.

L'expérience du passé est le fondement de l'espérance pour l'avenir. Sans remonter à l'antiquité classique où les tragédies d'Eschyle, d'Euripide, celles surtout de Sophocle, portent le cachet d'un esprit religieux, transparent à travers les superstitions du paganisme ; dans l'ère chrétienne, le théâtre est né, il a évolué à l'ombre de la cathédrale.

Tout d'abord, il y est un simple et naïf, mais lumineux, émouvant et souvent sublime commentaire de la liturgie, avec les « oratorios » composés de textes sacrés à la façon de mosaïques ; puis il en est le complément plus large, illustrant la liturgie d'exemples tirés de la vie de Jésus, de Marie, des saints, de faits historiques ou légendaires, plus ou moins rigoureusement contrôlés sans doute, mais dont la poésie confirme la doctrine et la morale religieuse par des traits édifiants représentés sur le vif. Petit à petit, alors que le théâtre aura encore élargi son cadre et mis sur la scène des fables profanes ; alors même qu'il s'abaissera malheureusement jusqu'à l'abus de la satire mordante et grivoise, le théâtre d'inspiration religieuse ne disparaîtra pourtant pas tout à fait, et, en plein grand siècle classique, c'est avec Polyeucte, Esther, Athalie, que l'art dramatique français atteint son apogée.

Dans le même temps, et déjà dès la fin du XVIe siècle, les drames de Lope de Vega et surtout de Calderon et de la Barca, soulevant d'enthousiasme toute l'Espagne, témoignent du haut degré de la culture religieuse et de la vie spirituelle du peuple espagnol.

L'époque contemporaine, loin d'amener comme on le pronostiquait trop facilement, la complète disparition du théâtre proprement chrétien, a fait au contraire resplendir son triomphe. Un fait évident et frappant est la faveur dont jouit actuellement ce renouveau de la scène.

Quel préjugé tenace il faut avoir pour donner au théâtre immoral, irréligieux ou vulgaire l'excuse d'obéir aux exigences du public !

C'est calomnier le public, son bon goût, son bon jugement, ses bonnes moeurs. Depuis longtemps, ne vient-il pas de toutes les parties du monde, périodiquement, à Oberammergau, dans un coin perdu de la Bavière, uniquement pour s'émouvoir saintement et applaudir de tout son coeur à la représentation du drame sacré ? Au cours de ce demi-siècle écoulé, quelle attraction ont exercée sur les auditoires, les plus divers par la culture et par l'esprit, les « mistères », les « jeux » qui font revivre les faits évangéliques, ou qui en transportent l'application dans la vie moderne ? Le parvis Notre-Dame n'a-t-il pas fourni un cadre merveilleux à la reprise des vieux « miracles » du moyen âge ? Et ne voit-on pas encore surgir de nouveaux dramaturges encouragés par la faveur du public à promouvoir le renouveau du théâtre religieux ?

Ni la possibilité d'un théâtre sain et — dans le sens le plus élevé du terme — édifiant, ni la faveur du public ne manquent. On dira peut-être, et Nous n'y contredisons point, que l'art des acteurs est pour beaucoup dans ce succès. C'est justement là que Nous voulions en venir et Nous faisions de la puissance psychologique des interprètes la troisième condition de l'apostolat théâtral. Ce qui assure, en effet, au théâtre sa forte influence, c'est la communication directe, personnelle, entre l'interprète et le spectateur ; elle agit par l'oreille et par les yeux, sur l'intelligence et sur le coeur. Les nuances et les intonations de la voix, d'une délicatesse et d'une variété illimitées ; le geste, le mouvement, l'attitude de toute la personne, le regard surtout et les plus imperceptibles frémissements des traits, font passer l'émotion d'une âme à une âme. Et c'est là où le théâtre diffère essentiellement du cinéma ; celui-ci a ses ressources, elles sont grandes, très grandes ; elles sont autres. Sur la scène, l'acteur est là, et tandis que son âme se communique ainsi à toute la salle ou, plus vraiment à chacun de ceux qui la composent, il peut, lui aussi, lire dans la leur les sentiments qu'il a fait naître ou vibrer ; il en est ému à son tour et, par un effet d'action et de réaction, la communication réciproque se fait de plus en plus intime et puissante.

Tout ceci, qui est très beau, suppose évidemment que l'interprète « vit » le personnage qu'il représente. Au plus bas, le simple procédé qui, parce qu'il consiste à feindre par des artifices de métier des sentiments que l'on n'éprouve pas au coeur, a tant fait décrier une profession de soi-même très honorable. Pas de sincérité ! — On est monté un peu plus haut déjà, lorsqu'on s'efforce de mettre réellement en soi les sentiments qu'on cherche à traduire dans son jeu ; mais c'est bien peu de progrès encore, si l'on y tend par des moyens factices, par une sorte d'excitation nerveuse, qui n'a rien à voir avec le coeur et l'esprit.

Et pour cela aussi, il y a des procédés, comme celui de certains orateurs qui réussissent à s'installer pour quelque temps dans une ambiance répondant aux dispositions psychologiques, dans lesquelles ils ont besoin de se trouver.

On suit ainsi le vieux conseil d'Horace : Si vis me flere, dolentum est — primum ipsi tibi4 : « Si vous voulez que je pleure, commencez par ressentir vous-mêmes de la douleur. » Mais, au fond, il est une seule manière de joindre dignement la sincérité à l'efficacité : vivre de telle sorte que les beaux et purs sentiments, auxquels applaudit le public, jaillissent comme spontanément du coeur de celui dont la voix et le geste les expriment sur la scène. Or, c'est bien là, chers fils et chères filles de l'Union catholique du Théâtre, votre idéal. C'est à quoi vous tendez, et par la sanctification de votre vie personnelle intérieure, et par votre zèle apostolique. Nous savons l'édification que vous donnez aux fidèles, témoins à Saint-Roch, de votre piété à la messe dominicale ; Nous savons votre assiduité à recevoir les sacrements, à promouvoir votre vie spirituelle par les saints exercices de la retraite ; Nous savons la ferveur de l'esprit de foi, qui vous a fait concevoir et réaliser, au prix de sacrifices, le désir de venir, en cette Année Sainte, gagner votre jubilé et Nous apporter le témoignage de votre amour filial. Aussi est-ce d'un coeur très paternel que Nous vous donnons, à vous tous ici présents, à vos familles, à vos camarades empêchés de se joindre à vous, à tous ceux qui, dans la profession dramatique et par elle, s'efforcent de hausser les âmes et de les porter à Dieu, Notre Bénédiction apostolique 5.

4 De Arte poet., 102-103.

5 On lira l'allocution au Centre Catholique du Théâtre de Rome, 26 août 1945.


ALLOCUTION AUX PROFESSEURS ET ÉTUDIANTS DES INSTITUTS SUPÉRIEURS CATHOLIQUES DE FRANCE

(21 septembre 1950)1

Conduit par les recteurs des Universités catholiques de Paris (Son Excellence Mgr Blanchet), d'Angers (Mgr Pasquier), de Lille (Mgr Glorieux), un groupe d'universitaires fut reçu en audience à Castel-Gandolfo par Pie XII, qui déclara :

En vous souhaitant la bienvenue, chers fils des Universités de France, venus célébrer ici l'Année Sainte, Nous saluons aussi avec une profonde émotion et une ardente fierté les trois-quarts de siècle de votre vaillante histoire 2. Emotion et fierté, oui, car c'est une histoire de grands sacrifices, de grands dévouements, qui s'est déroulée à travers tant de vicissitudes, tour à tour brillantes et sombres, toujours laborieuses.

Or, il ne serait pas raisonnable de dépenser son bien, sa peine, sa vie, au service d'une cause superflue ou insignifiante. Ce qui a été fait par vous et par la génération précédente suppose la conviction qu'un intérêt capital est engagé. Lequel ?

Le Pape constate que, dans une large mesure, l'enseignement officiel n'attaque plus la doctrine de l'Eglise :

Grâce à Dieu, il ne s'agit plus guère, comme à la fin du siècle dernier et au début de celui-ci, d'une polémique de défense

1 D'après le texte français de VOsservatore Romano du 23 septembre 1950.

2 Le ier juillet 1875, l'Assemblée nationale française proclamait que l'enseignement supérieur français était libre : cinq universités catholiques étaient immédiatement fondées : Paris, Lille, Angers, Lyon, Toulouse.

ti

ou de contre-offensive. Nous-même avons eu maintes fois l'occasion de recevoir et de haranguer d'illustres représentants du monde intellectuel, ceux notamment des grandes Universités qui Nous ont apporté le témoignage de leur déférence et de leur droite volonté.

Mais il faut continuer à offrir à la jeunesse une synthèse équilibrée ou toute la somme des connaissances est enseignée : tant la religion que les sciences :

Quelle est donc actuellement, la raison d'être des Instituts catholiques, leur opportunité, sur laquelle, même dans les meilleurs milieux, on semble élever parfois quelque doute ? On pourrait d'abord voir une question de dignité pour l'Eglise dans le maintien de l'oeuvre plus que millénaire, qui lui doit sa naissance, ses développements, son extraordinaire et féconde influence. Mais une pure considération de dignité, de tradition historique vénérable, suffit-elle à justifier, à expliquer une pareille dépense d'argent et d'efforts ? Il en est une autre, à Notre avis, plus importante et plus vitale. La permanente actualité d'Instituts ou Universités catholiques réside dans l'utilité, le besoin de continuer un corps de doctrine, ordonné, solide, de créer toute une ambiance de culture spécifiquement catholique. Un enseignement, même irréprochable, dans toutes les branches du savoir, complété aussi par l'annexion à côté de lui d'une instruction religieuse supérieure, ne suffit pas. Toutes les sciences ont directement ou indirectement quelque rapport avec la religion, non seulement la théologie, la philosophie, l'histoire, la littérature, mais encore les autres sciences : juridiques, médicales, physiques, naturelles, cosmologiques, paléontolo-giques, philologiques. A supposer qu'elles n'incluraient aucune relation positive aux questions dogmatiques et morales, elles risqueraient néanmoins souvent de se trouver en contradiction avec elles. Il faut donc, même si l'enseignement ne touche pas directement la vérité et la conscience religieuse, que l'enseignant lui, soit tout imbu de religion, de religion catholique.

Ce n'est pas tout. Des circonstances tout à fait extrinsèques ont fait substituer en certains pays, d'autres noms à celui d'Universités catholiques. Le nom seul a pu disparaître ; le caractère demeure et doit demeurer. Université ne dit pas seulement juxtaposition de facultés étrangères les unes aux autres.


INSTITUTS SUPERIEURS CATHOLIQUES DE FRANCE 387

mais synthèse de tous les objets du savoir. Aucun d'eux n'est séparé des autres par une cloison étanche ; tous doivent converger vers l'unité du champ intellectuel intégral. Et les progrès modernes, les spécialisations toujours plus poussées, rendent cette synthèse plus nécessaire que jamais. Autrement, le risque est grand de l'alternative entre l'excès d'indépendance, l'isolement de cette spécialisation au détriment de la culture et de la valeur générales et, d'autre part, le développement d'une formation générale, plus superficielle que profonde, au détriment de la précision, de l'exactitude, de la compétence propre. Réaliser cette synthèse elle-même, dans toute la mesure du possible, est la tâche de l'Université ; la réaliser jusqu'à son noeud central, jusqu'à la clef de voûte de l'édifice, au-dessus même de tout l'ordre naturel, est la tâche d'une Université catholique.

Le Pape se plaît à souligner le fait que les Universités catholiques de France ont compté des savants éminents :

Si les vicissitudes des temps en ont paralysé ou ralenti l'exécution, du moins l'effort est loin d'avoir été stérile. Vos instituts catholiques de France peuvent être fiers de leur Livre d'or. Sans parler des maîtres éminents en toutes les sciences, professeurs, écrivains, inventeurs, initiateurs, dont les noms sont parmi les plus illustres de l'histoire contemporaine, quelle phalange d'hommes, aussi remarquables par leur valeur professionnelle que par leur foi et leur vie chrétienne, ont été fournis par eux à l'Eglise et à la société !

Le Saint-Père invite les Universitaires à rester fidèles aux enseignements de l'Eglise :

Poursuivez donc votre route, très chers fils, le regard fixé sur l'idéal que, hommes de science et hommes de foi, vous avez choisi pour votre étoile. Marchez dans sa lumière ; elle brille au ciel indéfectiblement ; si jamais elle venait à pâlir à vos yeux, vous connaissez le guide, à qui le Christ vous a confiés. Et c'est pour vous aider à avancer d'un pas ferme dans sa clarté, que Nous avons donné Notre toute récente Encyclique . Humani Generis3. Etudiez-la ; soyez activement dociles à ses

3 Cf.   p.   205-

enseignements ; faites-les passer en acte. Faites-le avec ce courage dont vous ont donné l'exemple, à tous les âges de l'Eglise, les plus célèbres parmi les savants, les penseurs et les chefs. Ni les surprises ménagées par les découvertes de la science, ni les tâches d'actualité ne furent jamais pour les déconcerter, même un seul instant. Forts de la conviction que, entre la science et la foi, entre les conclusions définitives de celle-ci, aucune contradiction, aucune opposition irréductible n'est possible, ils vivaient dans l'assurance sereine que la foi catholique, sans maquillage, et sans réticence, reste toujours, au temps présent, comme au temps des Apôtres, l'Arche de salut. Telle doit être la pensée et le sentiment de l'humanité.

Qu'aucun effort ne vous décourage, qu'aucune incompréhension ne vous intimide, ni ne vous lasse ; vous avez pour vous l'assistance divine en gage de laquelle Nous vous donnons, à vous tous, à vos Instituts, à vos collègues, à vos disciples, à tous ceux qui vous sont chers, Notre Bénédiction apostolique 4.

i On lira le discours aux Universitaires français, lo avril 1950, p. 112 ; allocution aux Etudiants de l'Ecole normale supérieure de Paris, ier septembre 1950, p. 342.


ALLOCUTION AUX MEMBRES DU CONGRÈS DES MALADIES DU THORAX

(22 septembre 1950) 1

Le Pape a reçu à Castel-Gandolfo les 400 spécialistes réunis pour assister au premier Congrès International des maladies du thorax ; S'adressant en anglais, le Souverain Pontife dit :

Votre groupe, Messieurs, est celui du dévouement, c'est-à-dire un groupe de personnes se consacrant elles-mêmes aux autres et ayant fait du monde entier leur débiteur ; aussi avons-Nous été heureux d'accéder à la requête de votre Président et profitons-Nous de cette occasion pour vous assurer de Notre sincère intérêt à l'égard de vos travaux et de leurs succès.

Poursuivant en italien, le Pape dit :

Après l'American Collège of Chest Physicians qui a eu l'initiative de ce Congrès d'une si haute importance et d'une si puissante efficacité, Notre gratitude va au Gouvernement italien, et tout particulièrement à M. le Ministre de l'Instruction Publique, qui l'a si largement favorisé, à l'Institut « Carlo-Forla-nini » qui l'a si heureusement organisé, sous le patronage du Haut-Commissariat pour l'Hygiène et la Santé Publique, en collaboration avec l'Institut National de la Prévoyance Sociale et avec la Fédération italienne pour la lutte contre la tuberculose.

Enfin en français, le Pape déclare :

Dans de telles conditions et sous de tels auspices, vous pouviez vous attendre à une belle réponse. La réponse ! La

1 D'après le texte de l'Osserpafore Romano du 24 septembre 1950.

voici, Messieurs, et combien éloquente ; ce groupe d'environ quatre cents savants et praticiens appartenant à quarante-cinq nations différentes, et au nombre desquels Nous reconnaissons plusieurs de ceux que l'humanité salue aujourd'hui avec justice comme ses illustres bienfaiteurs dans la lutte contre l'épouvantable fléau de la tuberculose. Parmi eux, Nous désirons nommer spécialement le célèbre bactériologue Sir Alexandre Fleming, membre de Notre Académie des Sciences 2.

Oui, lutte tragique dans laquelle les victimes succombent en nombre incalculable. Lutte héroïque aussi contre un ennemi, qui ne cède le terrain que pied à pied, mais dont les combattants, loin de se laisser décourager par les difficultés, par la lenteur des progrès, redoublent d'efforts pour vaincre à tout prix. Lenteur au gré de leur légitime impatience, sans doute, mais qui ne peut faire méconnaître la splendide avance réalisée grâce à une constance obstinée au cours surtout du demi-siècle qui vient de s'écouler.

L'avance, en effet, s'est développée sur tout le front de la bataille. L'hygiène, la prophylaxie, le diagnostic, la microbiologie, la thérapeutique, se mobilisent tour à tour pour barrer le chemin à l'envahisseur, pour l'arrêter au plus tôt, pour le refouler, pour lui disputer jusqu'au bout ou, pour tout au moins, retarder sa victoire.

C'est une histoire émouvante que votre intervention à chaque étape de la maladie. Que de fois doit revenir à votre mémoire le vieil adage : Principiis obsta! Rien de lamentable comme ces hésitations, ces interminables tergiversations des sujets et de leurs familles avant de recourir à vos soins. Ils semblent espérer, en s'aveuglant devant la menace ou les signes avant-coureurs du mal, le conjurer et l'écarter. Est-il exagéré d'attribuer à ces illusions, à ces temporisations, une des plus grandes difficultés qui s'opposent à votre action efficace ? Dans la majorité des cas, une simple colonie, mais sagement dirigée, le séjour dans un préventorium bien monté auraient sauvé l'enfant délicat avant même l'apparition des prodromes inquiétants. Au lieu de cela, on a différé de jour en jour, de mois en mois, et quand on

2 Sir Alexandre Fleming est né en x882 en Ecosse et devint médecin en 1906 et professeur de bactériologie à l'Université de Londres. En 1928 il découvrit la pénicilline, qu'on utilisa pour des motifs médicaux, à partir de 1941, et qui constitue un des plus puissants antiseptiques connus.

présente le malade au sanatorium, à la clinique, à l'hôpital, le mal, souvent, est déjà sans remède. Les premiers indices commencent à se manifester : une hygiène, un régime approprié, pourraient encore avoir raison, en relativement peu de temps, de la maladie à ses débuts : on a laissé s'aggraver les ravages, s'étendre les lésions, s'approfondir les cavernes et quand il est devenu impossible de s'illusionner plus longtemps, on vous demande un diagnostic qui n'est alors que trop facile et trop clair. On se décide enfin à se tourner vers vous, mais quelles hésitations encore ! quelle pusillanimité déraisonnable fait surseoir le plus longtemps possible aux traitements, aux cures, aux opérations énergiques, qui, depuis une génération, ont fait, grâce à vos devanciers et à vous-mêmes, de merveilleux progrès. On voudrait, au contraire, essayer encore tous les remèdes anodins, on prête une confiance sans fondement à la première réclame de journal. En désespoir de cause, on se résigne à se livrer complètement à vous, quand il est déjà trop tard. Avec toute votre science, tout votre art, et tout votre coeur aussi, sans illusion et malgré tout avec une invincible obstination, vous faites l'impossible pour desserrer les bras du spectre qui étreint sa proie, pour retarder faute de mieux, un dénouement désormais inévitable.

C'est pourquoi Nous ne saurions trop louer les pouvoirs publics, les Instituts de Prévoyance sociale et autres, qui vous apportent, à vous, médecins, le concours de leur action morale sur le public, et notamment sur les familles.

Poursuivez donc vos recherches avec une infatigable persévérance, avec une confiance inébranlable ; continuez à mettre en commun les résultats de vos travaux. Nous appelons sur vous et sur eux la bénédiction divine, avec le voeu qu'elle en assure l'heureuse efficacité.


LETTRE A SON EM. LE CARDINAL CEREJEIRA A L'OCCASION DU QUATRIÈME CENTENAIRE DE LA MORT DE SAINT JEAN DE DIEU

(23 septembre 1950) 1

De grandes solennités ayant lieu en Espagne et au Portugal pour célébrer le IVe centenaire de la mort de saint Jean de Dieu, le Pape y envoie comme légat pontifical Son Eminence le Cardinal Cerejeira, patriarche de Lisbonne.

La célébration très prochaine de cérémonies solennelles pour le IVe centenaire de la très pieuse mort de saint Jean Cidade, appelé communément « de Dieu » nous semble particulièrement opportune, non seulement pour le profit religieux individuel des fidèles chrétiens, mais aussi pour l'heureux affermissement des liens entre la nation portugaise et la nation espagnole. Le très illustre Jean naquit en effet dans la charmante ville de Montemor-o-Novo, non loin de la capitale du Portugal, et c'est là qu'il reçut enfant la première formation à la vertu, mais c'est dans la ville de Grenade qu'il fit surgir du sol un double et vaste hôpital et jeta les fondements d'un nouvel Ordre de Frères Hospitaliers qui s'est répandu en long et en large au cours de ces quatre siècles à travers le monde. C'est donc à juste titre qu'on a récemment formé le projet de transporter pour quelques jours le vénérable corps de saint Jean de Dieu conservé religieusement dans l'auguste temple de Grenade, pour l'exposer aux yeux et au culte des fidèles du Portugal, et de célébrer dans les deux villes citées plus haut des cérémonies religieuses solennelles en présence tout d'abord des Chefs de l'Eglise et de l'Etat et des Autorités civiles des deux nations.

Nous Nous réjouissons de grand coeur de ces projets et Nous en attendons un notable accroissement de piété et de vertu chez les deux peuples. Tous les fidèles chrétiens en effet ont en saint Jean de Dieu un modèle très éclatant de rare pénitence et de mépris de soi, de contemplation des choses divines et d'application à une prière continuelle, d'extrême pauvreté et d'obéissance parfaite ; ceux notamment qui dans les hôpitaux et les hospices s'emploient aux soins, à l'aide et à la consolation des malades, possèdent dans leur céleste Patron un très brillant miroir de charité, qu'ils contempleront pour stimuler de jour en jour davantage les progrès de la santé des âmes et des corps des malades. Et pour que les prochaines fêtes séculaires se célèbrent avec plus d'autorité, le Prieur Général de l'Ordre Hospitalier de saint Jean de Dieu, auquel Nous avons dans le courant de cette année témoigné paternellement nos voeux et souhaits par Notre lettre Quattuor ante saecula, du 15 février 2, Nous a prié instamment d'assister et de présider aux solennités Hispano-Portugaises par un Cardinal Légat. Estimant devoir accéder à ces demandes, Nous vous choisissons pour Notre Légat par la présente lettre, Notre cher Fils, vous qui siégez dans l'éclat de la pourpre romaine dans le très illustre Patriarcat de Lisbonne, pour que vous teniez Notre place aux cérémonies religieuses qui se célébreront au début d'octobre prochain tant au Portugal qu'en Espagne et que vous présidiez ces fêtes en Notre nom et par Notre autorité. Nous vous accordons en outre la faculté de bénir en Notre nom, au jour fixé, à l'issue de l'Office Pontifical, les fidèles présents, et de leur annoncer une indulgence plénière, selon les règles spéciales relatives au Saint Jubilé. Et Nous avons l'entière confiance que dans votre remarquable piété envers saint Jean de Dieu et vu les liens d'amitié qui vous lient au peuple espagnol, vous accomplirez avec succès et profit la très honorable fonction que Nous vous confions. Qu'entre-temps soit l'intermédiaire et la messagère des dons surnaturels et le témoignage de Notre particulière bienveillance la Bénédiction apostolique, que Nous vous accordons avec très grande tendresse dans le Seigneur, à vous, Notre cher Fils, et aux fidèles qui assisteront aux cérémonies sacrées.

2 On trouvera cette lettre p. 37.


EXHORTATION « MENTI NOSTR/E AU CLERGÉ DU MONDE   .

(23 septembre 1950) 1

A l'occasion de Y Année Sainte, le Pape publie un document important pour souligner la mission du prêtre à l'heure actuelle 2.

Pie XII signale que c'est un des devoirs primordiaux du Pasteur suprême de veiller au clergé qui lui est confié :

Dans Notre esprit retentit toujours la voix du divin Rédempteur qui dit à Pierre : « Simon, fils de Jean, m'aimes-tu plus que ceux-ci ? Pais mes brebis » 3, et celle du Prince des apôtres lui-même, exhortant les evêques et les prêtres de son temps : « Paissez le troupeau de Dieu qui vous est confié... en devenant les modèles du troupeau » 4.

Réfléchissant attentivement à de telles paroles, Nous jugeons qu'une des principales obligations de Notre magistère suprême est de veiller de Notre mieux à ce que les efforts des vénérables pasteurs et des prêtres chargés d'apprendre au peuple chrétien à éviter le mal, à triompher des dangers qui le menacent et à parvenir à la sainteté, soient toujours plus efficaces.

Il y a aujourd'hui des motifs particuliers de rappeler au monde la vérité proclamée par l'Evangile :

Et ceci est d'autant plus nécessaire en notre temps, que, par suite de l'horreur de la dernière guerre, les peuples sont,

1 D'après le texte latin des A. A. S„ XXXXI, 1950, p. 657.

2 On se référera à des documents semblables publiés par Pie X : Exhortation au clergé catholique, 4 août 1908 ( Pie X, t. VI, p. 16) ; Pie XI : Encyclique Ad Catholici Sacerdotii, 20 décembre 1935 ( Pie XI, t. XIII, p. 194).

s Jean, 21, 15, 17. 4 I. Petr., 5, 2-3.

non seulement en butte à de graves difficultés matérielles, mais encore fortement troublés dans leur âme ; et que les ennemis du nom chrétien, devenus insolents par suite des conjonctures inhérentes à la situation actuelle de la société civile, s'efforcent, avec une haine satanique et par de subtils artifices, d'éloigner les hommes de Dieu et de Jésus-Christ.

Or, ce seront les prêtres qui devront être les agents principaux du retour des foules au christianisme :

La nécessité — que tous les gens de bien comprennent — d'une restauration chrétienne Nous pousse à reporter spécialement Notre pensée et Notre coeur vers les prêtres du monde entier, sachant bien que c'est surtout l'action humble, vigilante et ardente de ceux qui vivent au milieu de leur peuple et en connaissent la gêne, les peines, les afflictions spirituelles et matérielles, qui peut, à l'aide des préceptes évangéliques, transformer les consciences et établir sur la terre le règne de Jésus-Christ, « règne de justice, d'amour et de paix » 5.

Pour cela, il faut que les prêtres brillent par leur sainteté de vie :

Mais il est absolument impossible que le ministère sacerdotal atteigne pleinement les résultats qui répondraient d'une façon adéquate aux besoins de notre temps, si les prêtres ne brillent pas au milieu du peuple par une insigne sainteté et ne sont pas de dignes « ministres du Christ », de fidèles « dispensateurs des mystères divins » d'efficaces « collaborateurs de Dieu »7, prêts à toute oeuvre bonne 8.

En témoignage de gratitude pour les hommages présentés par le clergé à l'occasion de son Jubilé sacerdotal, Pie XII publie cette exhortation 9 :

C'est pourquoi Nous ne pensons pas pouvoir témoigner mieux Notre gratitude aux prêtres du monde entier — qui, à

5 Préface de la messe du Christ-Roi.

6 I- Cor., 4, i.

7 I. Cor., 3, 9.

8 II. Tim., 3, 17.

9 Pie XII a été ordonné le 2 avril 1809, four de Pâques. Lors du cinquantenaire de Cet événement, les dons des prêtres du monde entier permirent d'envisager la construction l'occasion du cinquantième anniversaire de Notre sacerdoce Nous ont donné le témoignage de leur amour en priant pour Nous — qu'en adressant à tout le clergé une paternelle exhortation à la sainteté sans laquelle le ministère qui leur est confié ne saurait être fécond.

Les prêtres doivent être les premiers à bénéficier des bienfaits spirituels de l'Année Sainte :

L'Année Sainte que Nous avons prescrite, avec l'espérance d'une restauration des moeurs selon les enseignements de l'Evangile, Nous désirons qu'elle donne comme premier fruit celui de voir les pasteurs des fidèles tendre avec un plus grand zèle vers les sommets de la vertu, et qu'ainsi entraînés et armés, ils travaillent mieux à rénover selon l'esprit de Jésus-Christ le troupeau qui leur est confié.

Il ne faut pas oublier que la sainteté est pour le prêtre un devoir permanent :

Il faut cependant rappeler que si, de nos jours, les besoins accrus de la société chrétienne exigent de plus en plus la perfection intérieure des prêtres, ceux-ci sont déjà tenus, en vertu même de la nature du sublime ministère que Dieu leur a confié, à travailler inlassablement, toujours et partout, à l'oeuvre de leur propre sanctification.

Pie XII exalte le grand don fait par le Christ en instituant le sacerdoce :

Comme l'ont enseigné Nos prédécesseurs et particulièrement Pie X 10 et Pie XI11, et que Nous-même l'avons touché dans Nos-Lettres encycliques Mystici Corporis12 et Mediator Dei13 ; le sacerdoce est vraiment le grand don du divin Rédempteur qui.

d'une nouvelle paroisse dans le diocèse de Rome, dédiée à saint Eugène, ainsi qu'un nouvel Institut Pontifical (cf. Motu Proprio du 2 avril 1949 fondant l'Institut Pontifical Saint-Eugène dans Documents Pontificaux 2949, p. 125).

10 Exhortation Hserent animo, Actes de Pie X, vol. IV, p. 237 et seq.

U Lettre-encyclique Ad Catholici Sacerdotii, A. A. S., 28, 1936, p. 3 et seq.

12 A. A. S., 35, 1943, p. 193 et seq.

A. A. S., 49, 1947, p. 521 et seq.

pour perpétuer jusqu'à la fin des siècles l'oeuvre de salut du genre humain qu'il avait consommée sur la croix, a transmis ses pouvoirs à l'Eglise qu'il voulut ainsi faire participer à son unique et éternel sacerdoce.

Le prêtre est comme un « autre Christ » parce qu'il est marqué du caractère indélébile qui fait de lui une image vivante du Sauveur ; le prêtre représente le Christ qui disait : « Comme le Père m'a envoyé, moi aussi, je vous envoie u. » « Qui vous écoute m'écoute 15.

Préparé par l'appel divin à ce très saint ministère, « il est établi pour les hommes en ce qui regarde le culte de Dieu afin d'offrir des oblations et des sacrifices pour les péchés » 16. C'est à lui donc que doit aller qui veut vivre de la vie du divin Rédempteur et recevoir force, soulagement et aliment de l'âme ; et c'est encore à lui que doit demander les remèdes opportuns celui qui s'efforce de revenir des moeurs dépravées à une vie fructueuse.

En conséquence, tous les prêtres peuvent s'appliquer à eux-mêmes les paroles de l'Apôtre : « Nous sommes ouvriers avec Dieu »

Cette haute dignité exige des prêtres qu'ils correspondent avec la fidélité la plus grande à leur très lourde charge. Destinés à procurer la gloire de Dieu sur la terre, à alimenter et à accroître le Corps mystique du Christ, il est absolument nécessaire qu'ils excellent de telle sorte par la sainteté de leurs moeurs, que par eux se répande partout la « bonne odeur du Christ » 18.

C'esf pourquoi l'obligation fondamentale du prêtre est d'être saint :

Chers fils, le jour même où vous fûtes élevés à la dignité sacerdotale, l'évêque, au nom de Dieu, vous a solennellement indiqué quelle était votre obligation fondamentale : « Comprenez ce que vous accomplissez ; retracez dans votre vie ce que vous faites à l'autel, en ce sens que, célébrant le mystère de la mort

14 Jean XX, 21.

15 Luc, 10, 16. » Hebr., 5, 1. " I. Cor., 3, 9. >8 II. Cor., 2, 15.

du Seigneur, vous mortifiiez vos membres en les soustrayant" aux vices et aux convoitises. Que votre doctrine soit un remède spirituel pour le peuple de Dieu, que le parfum de votre vie réjouisse l'Eglise du Christ, afin que par la prédication et par l'exemple, vous édifiiez la maison qui est la famille de Dieu

Totalement exempte de péchés, que votre vie, plus encore que celle des simples fidèles, soit cachée avec le Christ en Dieu 20.

Ainsi ornés de cette éminente vertu exigée par votre dignité, travaillez à l'achèvement de l'oeuvre de la Rédemption, mission à laquelle vous destine l'ordination sacerdotale.

Tel est le programme que vous avez librement et spontanément accepté : soyez saints, parce que, vous le savez, votre ministère est saint !


Pie XII 1950 - LETTRE A SON EM. LE CARDINAL GRIFFIN LÉGAT PONTIFICAL, POUR LA CÉLÉBRATION DU PREMIER CENTENAIRE DU RÉTABLISSEMENT DE LA HIÉRARCHIE CATHOLIQUE EN ANGLETERRE