Pie XII 1950 - ENCYCLIQUE «MIRABILE ILLUD»


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désirons donc que, spécialement en cette nuit sainte, tous les chrétiens, en union avec le Vicaire de Jésus-Christ, implorent le Père des Miséricordes, par la très puissante intercession de la Vierge, Mère de Dieu, préservée dès l'origine de toute souillure, pour que se lève enfin sur tous les peuples et tous les pays, dans l'apaisement des haines et l'instauration de la justice et de l'équité, la pleine et pure lumière de la paix.

Le Saint-Père souhaite qu'une neuvaine de prières soit organisée en préparation de la fête de Noël :

Nous souhaitons au surplus, qu'avec la même ardeur, des prières à cette intention soient faites à nouveau au cours de la neuvaine préparatoire à la fête de Noël, implorant du divin Enfant que cette paix promise « aux hommes de bonne volonté 2 » et chantée par les Anges au-dessus de sa crèche, illumine toute la terre et s'y établisse fermement.

Le Pape invite à prier pour tous ceux qui souffrent encore des suites de la guerre :

N'oublions pas non plus de faire monter d'ardentes prières au Rédempteur nouveau-né et à sa divine Mère, pour que la religion catholique, fondement très sûr de la société humaine et de la civilisation, jouisse en tous pays de la liberté qui lui est due : que « ceux qui souffrent persécution pour la justice s » que ceux qui sont détenus en prison pour leur ferme défense des droits sacrés de l'Eglise ou que l'exil a chassés de leur siège, ceux qui, bannis de leur patrie natale, errent misérablement ou languissent encore en captivité, soient remplis de consola

2 Luc, 2, 14.

3 Matth., 5, 10.

tions célestes et obtiennent enfin ce à quoi ils aspirent de leurs voeux les plus ardents et de leurs plus pressants désirs.

Les évêques exhorteront leurs diocésains, afin que toute la chrétienté s'unisse dans une même supplique :

Nous ne doutons pas, Vénérables Frères, qu'avec votre diligence et votre zèle habituels, vous ne fassiez connaître, de la façon la plus appropriée, à votre clergé et à votre peuple Nos paternelles exhortations, et Nous sommes assurés que tous les fils aimants que Nous comptons dans l'univers, répondront spontanément et volontiers à Notre appel.

Qu'elle soit donc le gage des meilleures grâces célestes et le témoignage de Notre paternelle bienveillance, cette Bénédiction apostolique que Nous vous accordons de grand coeur dans le Seigneur, à vous tous, Vénérables Frères, à tous vos fidèles et à ceux en particulier qui prieront selon Nos intentions.

F 1 D'après le texte espagnol de VOsseroatore Romano du 8 décembre 1950.

2 Emmanuel Torres Acosta est la fondatrice d'un Ordre de soeurs garde-malades. Elle mourut en 1887. Elle a été béatifiée le 5 février 1950. Sa cause fut introduite par Pie XI


ALLOCUTION AUX MEMBRES DE LA JEUNESSE FÉMININE CATHOLIQUE ESPAGNOLE

(6 décembre 1950) 1

Au cours d'une audience générale, le Saint-Père s'adressa spécialement à un groupe de jeunes filles espagnoles :

Parmi tant et tant de chers fils et filles, qui ont désiré, comme encore aujourd'hui, venir Nous voir, se détache le groupe nombreux — un bon millier — de jeunes Espagnoles, qui Nous offrent la représentation symbolique de toutes les régions et de tous les produits de cette Espagne que le Pape aime tant. Soyez les bienvenues, très chères filles, et mille fois merci.

Jeunes Espagnoles, s'il est vrai que vous vous flattez de l'être cent pour cent, comme vous le dites, rappelez-vous que l'Espagnole a toujours été gracieuse, mais modeste ; vive, mais réservée ; étincelante d'esprit, mais docile et soumise aux vérités de la foi, sincèrement vécues. Dans le foyer chrétien espagnol, elle compte encore par son influence décisive, pour lui conserver le caractère de sanctuaire chrétien qu'il a toujours eu. La base de la restauration nationale à laquelle vise votre Section féminine, c'est la restauration religieuse ; car on ne pourra jamais oublier qu'aux temps de ses grands jours, les femmes, en Espagne, s'appelaient Isabelle de Castille ou Thérèse de Jésus ; et, en cette même Année Jubilaire, Nous avons eu la consolation d'élever aux autels deux Espagnoles: Soledad Torres Acosta et Vincenta Maria Lopez y Vicuna2.

Les grâces jubilaires vous aideront à suivre ces hauts idéaux. Nous joignons maintenant à celles-ci, très chères filles, Notre Bénédiction spéciale, que Nous étendons à toutes vos soeurs d'Espagne, à vos pères et mères, à vos parents et à toute votre et Notre Espagne bien-aimée.

le 25 novembre 1924 (cf. Décret sur les miracles en vue de la béatification, 27 novembre ig49, A. A. S., XXXXII, 1950, p. 152 ; Lettre apostolique de béatification, 5 février 1950, A. A. S., XXXXII, 1950, p. 182).

Vincenta Maria Lopez y Vicuna est née le 22 mars 1847 à Cascante. Elle fonda l'Institut des Filles de l'Immaculée. Elle mourut à Madrid le 26 décembre 1890. Sa cause fut introduite par Pie XI le 22 juillet 1932 et elle fut béatifiée le 39 février Ï950 (cf. Décret sur les miracles en vue de la béatification, 11 décembre 1949, A. A. S., XXXXII, 1950, p. 237).


ALLOCUTION AUX ÉLÈVES DE L'ACADÉMIE ITALIENNE DE L'AÉRONAUTIQUE

(6 décembre 1950) 1

Un groupe de futurs aviateurs militaires italiens était venu à Rome pour y gagner l'indulgence du Jubilé ; Pie XII les salua par les mots que voici :

Nous avons reçu toujours avec une égale satisfaction, les délégations de divers Corps militaires, et Nous avons conservé une heureuse impression de la manifestation spontanée d'affection de ces fils qui ont tenu à se succéder en présence du Père Commun pour apporter au Vicaire de Jésus-Christ le témoignage de leur foi et de leur piété religieuse.

Aujourd'hui, avec une non moins grande satisfaction, Nous voyons autour de Nous la belle troupe des aspirants officiers de l'Aéronautique, les élèves de l'Académie qui préparent en Italie les forces de l'Air, les pilotes et les techniciens qui auront à guider, à travers les espaces, d'une main sûre et d'un cceur ferme, les délicats engins de sa paix et de sa sécurité.

Chers jeunes gens, vous êtes pour les vastes cieux, pour les altitudes, pour les vols libres ; tout ceci sourit à votre enthousiasme juvénile, mais vous ne pourrez en jouir pleinement si le sentiment du devoir n'est pas en vous. Or, ce sentiment n'est pas profond, n'est pas impérieux s'il n'a pas ses racines en Dieu, source de la morale et de la justice comme de la vérité et de la beauté. Il vous faut suivre votre chemin dans la vie avec Dieu, voler avec Dieu vers vos buts, en affrontant tout obstacle  et soucieux  de l'oeuvre à  accomplir plus  que  de

1 D'après ïe texte italien de VOsservatore Romano du 8 décembre 1950.

l'heureux succès, si vous avez le désir de vous sentir libres, même sous la plus sévère discipline et de trouver en vous-mêmes dans votre conscience chrétienne, la récompense de votre peine.

Il suffit qu'à Jésus, auteur de la véritable liberté, comme II est pour nous « Sagesse, Justice, Sanctification et Rédemption » 2, vous confiiez votre vie, dociles à ses enseignements, qui ne lient, en imposant des luttes et des renoncements, que pour vous faire libres et non les esclaves du mal. Avec Lui seul, vous connaîtrez les véritables altitudes, celles de l'esprit, et avec Lui, tout en planant dans les hauteurs, dans la vérité et dans la justice, vous porterez dans votre coeur le secret d'une félicité que nul ne pourra vous ravir.

C'est là le voeu que Nous faisons pour vous remercier d'une visite qui Nous a été particulièrement chère.

Et, tout en priant le Seigneur pour que les bénéfices du Grand Jubilé que vous êtes venus acquérir, apportent à votre vie des fruits permanents de foi active et de sincère piété chrétienne, Nous invoquons sur vos intentions la grâce du ciel et Nous vous donnons, à vous tous présents ici, supérieurs et élèves, Notre paternelle Bénédiction apostolique.

2 Cf. I. Cor., 1, io.


DISCOURS AUX MEMBRES DU CONGRÈS DES RELIGIEUX

(8 décembre 1950)1

Du 26 novembre au 7 décembre s'est tenu à Rome le premier Congrès des Religieux, réunissant 800 religieux et religieuses représentant à peu près tous les Ordres, Congrégations et Instituts, soit environ 1.300.000 personnes consacrées au service de l'Eglise. On y discuta les problèmes d'adaptation posés par les conditions modernes.

A l'issue du Congrès, le Pape reçut en audience cette illustre assemblée :

L'Année Sainte, qui, sans aucun mérite de Notre part, mais par la miséricorde de Dieu, a produit des fruits bienfaisants supérieurs à tout ce que l'esprit humain pouvait prévoir, a montré dans une étonnante suite de manifestations, la force de foi et la richesse de vie de notre Mère, l'Eglise du Christ. Dans tout cet ensemble d'événements et d'entreprises particulièrement graves et importants, votre Congrès vient opportunément prendre place, assemblée fraternelle qu'il Nous est très agréable de saluer maintenant par des paroles affectueuses.

Fait que l'histoire de l'Eglise ne relate jamais s'être passé, pour la première fois, les Associations dont les membres ont choisi comme but de leur vie la réalisation de la perfection évangélique se sont réunies en une affluence jamais réalisée comme en ces derniers jours, pour se mettre d'accord sur leurs intérêts communs.

C'était là, à Notre avis, chose absolument requise pour l'époque actuelle. En effet, les circonstances nouvelles que doit affronter l'Eglise, quelques opinions élaborées et répandues à

l'intérieur même de l'Eglise 2, touchant aussi des questions qui

intéressent la condition et l'état de perfection morale, les nécessités urgentes de l'apostolat auquel vous vous donnez largement et avec zèle, tout cela conseillait vivement de procéder à des échanges de vues et d'études.

Vous voilà sur le point d'achever votre oeuvre. Elle a été animée par vos remarques assidues, elle a fait naître de nombreuses propositions3 et elle ne sera pas moins riche, Nous l'espérons, en virtualités d'exécution. Celles-ci, avec le concours de vos efforts, seront le fruit de la grâce divine, que vos prières, vos oeuvres de renoncement religieux — celles surtout de vos soeurs dans le Christ — ont invoquée avec d'ardents désirs sur vos entreprises.

En gage de l'assistance et de la lumière divines, comme couronnement de votre Congrès, vous implorez la bénédiction paternelle du Vicaire du Christ. Avant de vous l'accorder, Nous croyons opportun de vous exposer divers points qui concernent les notes nécessaires de la vie religieuse, et qui, une fois éclairas, vous servent désormais de règles pour diriger vos pensées et vos actes.

I Pie XII précise le rôle joué dans l'Eglise par les religieux :

Il Nous faut d'abord rappeler en peu de mots quelle place tiennent dans l'Eglise les Ordres et Congrégations religieuses. Vous savez parfaitement que Notre-Seigneur a fondé une Eglise de nature hiérarchique. Car entre les Apôtres et leurs successeurs, auxquels il faut ajouter ceux qui les aident dans leurs fonctions propres, et les simples fidèles, Il a établi une nette distinction : c'est donc de ce double groupement que se compose la structure du Royaume de Dieu sur terre. Dès lors, c'est le droit divin lui-même qui a voulu que les clercs soient distincts des laïcs 4. Entre ces deux degrés, se situe l'état de vie religieuse qui, d'origine ecclésiastique, tire son existence et sa valeur de ce qu'il

2 Certains ont ces derniers temps proclamé que la vie religieuse n'est plus adaptée à notre temps.

3 Voir conclusion et voeux du Congrès dans la Documentation catholique, XLVII, c. 1700.

4 Cf. canon 107.

se rattache étroitement à la fin propre de l'Eglise, à savoir de conduire les hommes à la sainteté. Bien que tout chrétien guidé par l'Eglise doive tendre vers ce sommet sacré, le religieux y tend cependant par des voies qui lui sont tout à fait propres et par des moyens de nature plus élevée.

Il n'y a pas lieu d'établir une hiérarchie entre clergé séculier et clergé régulier :

En outre, l'état religieux n'est nullement réservé à l'un ou à l'autre de ces deux groupes qui existent de droit divin dans l'Eglise, puisque les clercs comme les laïcs peuvent être également religieux, et que par contre, l'accès à la dignité cléricale est ouvert soit aux religieux, soit à ceux qui ne le sont pas. Il se trompe donc dans l'appréciation des fondements que le Christ a donnés à l'Eglise, celui qui pense que l'état particulier du clergé séculier, comme séculier, aurait été établi et sanctionné par le divin Rédempteur, et que l'état particulier du clergé régulier, bien qu'il doive être tenu pour bon en lui-même et approuvé, serait secondaire et seulement auxiliaire, puisqu'il dériverait du premier. C'est pourquoi, à juger d'après l'ordre établi par le Christ, aucune des deux formes particulières de clergé n'a la prérogative de droit divin, puisque ce même droit n'accorde pas de préférence à l'une plus qu'à l'autre, ni n'écarte l'une ou l'autre. Quelle différence entre les deux, quelles relations entre eux, quelle tâche confier à chacune dans l'oeuvre du salut de l'humanité, tout cela, le Christ a voulu en laisser la détermination aux nécessités des diverses époques, ou pour définir avec plus d'exactitude Notre pensée, en a confié la décision au jugement de l'Eglise.

Prêtres séculiers et religieux sont tous les auxiliaires de l'Evêque.

Sans aucun doute, d'après la prescription du droit divin, le prêtre, qu'il soit séculier ou religieux, doit exercer son ministère en auxiliaire de l'Evêque et sous sa dépendance. Et, de fait, c'est ce qui se passe dans l'Eglise selon la coutume et est clairement précisé dans les prescriptions du Code de Droit Canon concernant les religieux-curés et Ordinaires de lieux 5. Il n'est pas rare

5 Canons 626-631 ; 454, par. 5. Les canons cités prévoient les règles auxquelles sont tenus les religieux qui sont nommés curés de paroisse, evêques d'un diocèse, cardinaux ou qui sont revêtus d'autres dignités ecclésiastiques.

d'ailleurs que dans des territoires de missions, tout le clergé, sans excepter l'Evêque, soit du clergé régulier. Or, il ne faut pas croire qu'une telle situation soit étrangère à l'ordre ou à la règle habituelle, comme si elle était seulement passagère et comme si le ministère sacré devait être confié dès que possible au clergé séculier.

L'exemption de certains Ordres ne fait que confirmer la thèse énoncée 6 :

Mais l'exemption même des Ordres religieux ne s'oppose pas aux principes de la Constitution divine donnée à l'Eglise, ni ne répugne d'aucune façon à la loi qui veut que le prêtre soit soumis à l'Evêque. En effet, d'après le Droit Canon, les religieux exempts sont soumis à l'autorité de l'Evêque du lieu, selon que le requièrent les devoirs de la charge episcopale et la bonne organisation du ministère des âmes. Et sans même parler de cela, dans les discussions de ces dix dernières années sur l'exemption, on n'a peut-être pas suffisamment remarqué que les religieux exempts même d'après les prescriptions du Droit Canon sont toujours et partout soumis à l'autorité du Souverain Pontife comme à leur Supérieur suprême et qu'ils sont tenus de lui obéir en vertu même du voeu d'obéissance '. Or, le Souverain Pontiie a juridiction ordinaire et immédiate sur l'Eglise tout entière, et donc sur chaque diocèse et sur chaque fidèle. Il apparaît donc clairement que la première loi donnée par Dieu, d'après laquelle clercs et laïcs doivent être soumis au pouvoir de l'Evêque, a été suffisamment et abondamment observée, même en ce qui concerne les religieux exempts, et qu'enfin le clergé de l'une et l'autre milice répond également à la volonté et à l'ordre que le Christ a voulus.

6 On appelle exemption, le privilège par lequel certains Ordres religieux ne sont pas

soumis — en ce qui concerne la vie conventuelle — à la juridiction de l'évêque (cf. canon 615 et seq.).

" Canon 499, § 1. Celui-ci déclare : « Tous les religieux sont soumis même en vertu du voeu d'obéissance au Souverain Pontife en tant que leur supérieur suprême ».


II.

Le Pape précise que le religieux est dans l'état de perfection évan-gélique, tandis que le clerc — comme tel — n'est pas dans cet état :

Une autre question est étroitement liée à ce qui précède et Nous avons à coeur de l'exposer et de l'éclaircir : elle concerne la façon dont le clerc et le religieux doivent tendre chacun vers sa propre perfection de vie.

Il est faux d'affirmer que l'état clérical, comme tel et selon qu'il procède du droit divin, exige de ses membres, en vertu de sa nature, ou du moins en vertu d'un certain postulat de cette nature, la pratique des conseils évangéliques et doive ou puisse dès lors être appelé état de perfection évangélique (à acquérir). Ainsi le clerc n'est pas lié de droit divin aux conseils évangéliques de pauvreté, chasteté, obéissance ; et surtout il n'y est pas lié de la même façon, ni par une obligation semblable à celle qui naît des voeux publics émis en s'engageant dans l'état religieux. Cela n'empêche d'ailleurs pas le clerc de prendre ces liens à titre privé et de son propre mouvement. De même, le fait que les prêtres de rite latin sont tenus de conserver le célibat consacré, ne supprime pas ni ne diminue la distinction entre l'état clérical et l'état religieux. Le clerc régulier professe la condition et l'état de perfection évangélique non en tant que clerc, mais en tant que religieux.

Les membres des Instituts séculiers sont eux dans l'état de perfection :

Si, par la Constitution apostolique Provida Mater Ecclesia s, Nous avons déclaré que la forme de vie suivie par les Instituts séculiers devait être admise comme un état de perfection évangélique publiquement reconnu, pour la raison que leurs membres s'astreignent de quelque façon à observer les conseils évangéliques, il n'y a en cela aucune contradiction avec ce que Nous venons d'exposer. Certes, rien n'empêche des clercs de s'unir en Instituts séculiers afin de tendre par ce genre déterminé de vie à l'état de perfection évangélique, mais alors ils sont, eux aussi, dans l'état de pratique de la perfection, non en tant que clercs.

8 La Constitution Provida Mater Ecclesia du z février 1947 créa les Instituts Séculiers qui sont déclarés « professer authentiquement et pleinement la vie de perfection ».

mais en tant que membres d'un Institut séculier. En effet, un Institut de ce genre a bien pour règle à laquelle il s'oblige les conseils évangéliques qui sont propres à l'état religieux et qui y sont pratiqués avec une entière perfection, mais il les adopte de telle manière qu'il n'est pas rattaché à l'état régulier, mais demeure, en lui-même, dans une forme extérieure de vie qui n'appartient pas nécessairement à la perfection rappelée plus haut.


III.

Le Saint-Père explique les vraies raisons qui motivent l'entrée en religion :

Il est opportun, pensons-Nous, de Nous arrêter un moment à cette question : Quelles raisons l'état religieux offre-t-il pour inviter à l'embrasser ? Certains affirment que l'état religieux, de par sa nature et sa fin même, auxquelles on ne refuserait pas son approbation, ne serait qu'un refuge de salut offert aux âmes craintives et anxieuses qui, ne pouvant affronter les périls d'une vie agitée, et ne sachant ou ne voulant pas supporter les adversités, diraient adieu au siècle par indolence, pour se réfugier dans le havre d'un calme monastère ; et que, dès lors, il faudrait réveiller la confiance en Dieu et en elles-mêmes, afin qu'au lieu de rechercher ainsi une paix oisive, elles rejettent ce prétendu penchant et osent affronter les luttes de la vie ordinaire. Cela est-il vrai ?

Nous n'avons pas en ce moment à apprécier sous quelle influence chacun choisit la vie religieuse. Nous voulons indiquer la raison, la principale certes, et la vraie, qui doit motiver l'entrée dans la vie du cloître. Elle diffère tout à fait de celle indiquée ci-dessus et qui, généralisée, est fausse et injuste. En effet, comme le choix du sacerdoce, la décision d'entrer dans la vie religieuse et la ferme constance à y rester fidèle, demandent un grand coeur et une ardente volonté de se donner entièrement.

D'ailleurs, les religieux rendent d'éminents services à l'Eglise et à la société :

L'Histoire Ecclésiastique, qui rapporte les oeuvres éclatantes des Saints et des Instituts religieux, qui décrit les exploits de leurs missions, expose leurs doctrines ascétiques, démontre à l'évidence, tout comme l'expérience quotidienne, que l'état religieux n'a rien à envier au siècle sous le rapport des hommes et des femmes de courage intrépide et généreux. D'ailleurs, les religieux et les religieuses qui se fatiguent à l'extension du règne de l'Evangile, dans les missions, qui soignent les malades, se consacrent à l'éducation de la jeunesse ou à son instruction dans les écoles, tous ceux-là quittent-ils le commerce des hommes et leur refusent-ils leur dévouement ? Est-ce qu'au contraire la plupart d'entre eux ne combattent pas en première ligne pour la cause de l'Eglise, tout autant que les prêtres séculiers et les auxiliaires laïcs ?

Une des causes premières de la diminution des vocations religieuses, c'est le manque de courage et de désir de perfection :

Ici, Nous ne pouvons Nous empêcher de signaler à votre attention un fait absolument contraire à l'opinion rappelée plus haut. Si le nombre de ceux et surtout des jeunes filles qui veulent entrer dans le jardin fermé de la vie religieuse est en diminution, la cause en est souvent qu'on estime trop dur de se dépouiller de sa propre volonté et de renoncer à sa liberté, ce que comporte de par sa nature le voeu d'obéissance.

Il faut d'ailleurs avoir une notion exacte du voeu d'obéissance : ici encore, il y a des erreurs qu'on professe actuellement :

Bien plus, ce n'est pas la liberté sacrifiée par amour du Christ qui est louée par certains comme la forme élevée de la perfection morale, mais la réduction de cette abnégation de liberté. De sorte que pour la formation de l'homme juste et saint, il faudrait préférer cette règle : limiter la liberté autant qu'il est nécessaire, lâcher la bride à la liberté autant que cela peut se faire.

Ces théories nouvelles vont à Y encontre de la tradition ; or, celle-ci s'est montrée féconde :

Nous laissons de côté ici la question de savoir si le nouveau fondement sur lequel ils s'efforcent de fonder l'édifice de la sainteté sera, en réalité, aussi fécond et solide pour soutenir et augmenter le travail apostolique  de l'Eglise que ne l'a été, durant quinze cents ans l'antique règle de l'obéissance embrassée par amour du Christ.

Si l'on veut pratiquer authentiquement le conseil de l'obéissance, il faut avoir souci de ne pas détourner celui-ci de son sens véritable :

Mais ce qui importe surtout pour le moment, c'est de considérer profondément cette règle, pour découvrir ce qui s'y cache. A la bien examiner, elle méconnaît entièrement la nature du conseil évangélique et même l'infléchit d'une certaine manière vers une signification qui passe à côté de la vraie. Personne n'est obligé de s'imposer la pratique du conseil évangélique de la parfaite obéissance, dont la racine est cette règle de vie, par laquelle on abdique la libre disposition de sa volonté ; personne, disons-Nous, qu'il s'agisse de particuliers ou d'associations. On peut, si on le veut, organiser sa vie selon cette nouvelle règle. Mais il faut comprendre et employer les mots dans leur vrai sens. Or, si une telle règle est comparée au vceu d'obéissance, elle n'a pas la même valeur souveraine et elle n'exprime pas cette parole de la Sainte Ecriture, ni l'admirable exemple qu'elle propose : « Il s'humilia lui-même, se faisant obéissant jusqu'à la mort *. »

Dès lors, on doit montrer loyalement aux âmes qui cherchent leur voie, qu'il y a moyen de se sanctifier — en dehors de la vie religieuse — mais aussi qu'il y a une forme traditionnelle de perfection qui suppose l'obéissance totale.

A chacun, en pleine liberté, de faire son choix :

Il trompe donc et il se trompe celui qui, consulté sur le choix de la vie religieuse, ne propose que cette règle et cette opinion et néglige bien à tort l'inclination de cette âme et l'instinct de la grâce divine. Et, dès lors, si une invitation divine appelle d'une façon certaine quelqu'un vers les sommets de la perfection évangélique, qu'on lui propose sans hésitation aucune, en vue d'atteindre ce sommet, la libre immolation de sa liberté, comme le voeu d'obéissance le réclame, voeu, disons-Nous, que l'Eglise a étudié attentivement pendant tant de siècles, a expérimenté, réglé et approuvé. Personne ne doit être poussé malgré

• Phil.. Il, s.

10 Hebr., 11, l.

soi à cette forme de don, mais que personne ne se trouve qui en dissuade celui qui la désire, et encore moins l'en empêche.


IV

Aujourd'hui, on veut voir un conflit entre les exigences de la vie intérieure et celles de l'apostolat extérieur :

En voilà assez sur ce sujet. Nous avons maintenant l'intention d'ajouter quelques considérations sur les oeuvres extérieures et la vie intérieure. Peu de questions touchant la vie régulière et en général la vie de piété ont été l'objet de tant d'études, et elles sont à la vérité de grande importance. Nous voulons néanmoins, Nous aussi, exposer Nos vues sur ce sujet.

Certaines philosophies tendent à minimiser le rôle des principes dans la direction de la vie :

Ce n'est point par hasard que la philosophie qu'on appelle 1'« existentialisme » s'est formée et développée de nos jours. Placés en face des difficiles problèmes métaphysiques et religieux posés par les événements, nos contemporains se contentent, négligeant les réalités supérieures, de répondre aux exigences immédiates du moment. Le croyant, lui, refuse de s'occuper seulement de chaque fait concret du temps et de se laisser emporter au flux de la vie. Il sait, lui, que les réalités invisibles10 méritent la plus haute estime et qu'elles sont éminemment vraies et destinées à durer sans jamais connaître de déclin.

Les religieux doivent être avertis du danger qu'il y a de suivre ces écoles :

Hélas ! bien que les mises en gardé et les exhortations n'aient pas manqué, même des prêtres, religieux non exceptés, ont subi une sérieuse contagion de ces doctrines ; et bien qu'ils ne nient pas les réalités qui dépassent les sens et l'ordre naturel, ils les apprécient peu.

Ce grave danger est-il désormais écarté ? Grâces en soient rendues à Dieu, on a aujourd'hui des raisons de l'espérer : des faits que Nous voyons et apprenons Nous portent à le croire.

Chacun devra allier l'activité extérieure avec l'esprit de prière et la pratique de la vertu :

Une activité extérieure la plus intense peut s'unir aux richesses d'une rare vie intérieure. L'exemple de deux astres qui resplendissent par le culte de la vie régulière le prouve très clairement : saint François-Xavier et sainte Thérèse de Jésus.

Une activité ardente et le souci de la vie intérieure demandent non seulement à être unis l'un à l'autre, mais encore, du moins dans l'estime et le désir que l'on en a, elles veulent progresser de pair. Qu'à la ferveur des oeuvres se joignent donc avec une égale ferveur la foi, la prière, la réelle consécration de soi et de tout ce qu'on possède à Dieu, la beauté d'une conscience pure, l'obéissance, la patience dans les épreuves, la charité active et vigilante envers Dieu et le prochain.

Le Pape demande que ce même équilibre soit la caractéristique de tous les Ordres religieux :

Cette exigence ne concerne pas seulement individuellement chaque religieux, s'il l'est dans l'âme et non seulement par son habit, elle est aussi pour les ordres religieux dans leur ensemble une justification solide de la vie religieuse devant Dieu et devant les hommes, et un motif qui la rend digne de la plus grande approbation. L'Eglise vous le demande instamment : que votre activité extérieure réponde à votre vie intérieure et qu'elles s'équilibrent constamment l'une l'autre. Clercs et laïcs, est-ce que vous ne professez pas l'état de perfection évangélique ? S'il en est ainsi, produisez les fruits de cet état, pour enrichir de votre force et de votre ardeur le Corps mystique du Christ qui est l'Eglise. C'est pour la même raison que les Ordres contemplatifs sont en un certain sens nécessaires à l'Eglise, pour laquelle ils sont une gloire et une source continuelle de grâces célestes.



Pie Xli souligne le rôle particulier joué par les religieux consacrés aux oeuvres de charité :

Vous le savez, on entend dire souvent que la charité envers le prochain perd peu à peu sa nature religieuse et se laïcise. Mais une bienfaisance qui ne repose sur aucun principe de foi et prend ailleurs sa source, n'est pas la charité, ni ne mérite le qualificatif de « catholique ». La charité a une dignité, une inspiration, des forces qui manquent à la philanthropie même richement munie de ressources et de moyens. Ainsi les religieuses catholiques infirmières comparées aux infirmières qui exercent la même fonction seulement pour des raisons de philanthropie ou de gain, ont pour elles quelque chose d'un autre ordre et de plus important ; il arrive que les religieuses soient parfois inférieures aux autres infirmières en matière de ressources techniques et Nous les exhortons encore à égaler et même à dépasser les autres en cela aussi. Mais quand les soins sont donnés par des religieuses pleines du vivant esprit de leur Institut et chaque jour prêtes à se donner aux malades pour l'amour du Christ, alors une atmosphère bienfaisante les entoure, dégageant une vertu étonnante qui produit ce que la technique ni la médecine ne réalisent.

Chacun s'efforcera donc de développer son activité dans la ligne tracée par le Christ :

Que les Ordres religieux et les Congrégations de vie active aient donc devant les yeux et cultivent tous les moyens de faire briller dans leurs oeuvres les traits du divin et entretiennent dans la profondeur d'une conscience pure le feu de l'Esprit-Saint.

V Aujourd'hui se posent les problèmes d'adaptation :

Nos très chers Fils, Nous voulons encore dire quelques mots du soin que doivent mettre les Instituts religieux à s'adapter aux circonstances actuelles et d'unir harmonieusement le passé et le présent.

Si les jeunes entendent dire : « Il faut être de notre temps », « il faut adapter nos efforts à l'époque où nous vivons », ils sont enflammés d'une ardeur nouvelle, et s'ils ont le mérite de servir sous les enseignes de la milice religieuse, ils ont surtout le désir d'orienter dans cette direction les efforts de leur travail religieux. Ce qui est juste, pour une part. En effet, la plupart du temps, les législateurs des Instituts religieux conçurent leur fondation nouvelle pour remplir des fonctions ou répondre à des nécessités qui apparaissaient dans l'Eglise et ne souffraient pas de retard ; c'est pourquoi ils adaptaient leur oeuvre à leur époque. Si donc vous voulez suivre l'exemple de vos fondateurs, conformez votre attitude à celle qui fut la leur. Etudiez les opinions, les jugements et les moeurs de vos contemporains parmi lesquels vous vivez, et si vous y découvrez des éléments justes et bons, adoptez-les ; sinon, vous ne pourriez pas éclairer votre prochain, l'aider, l'encourager, le guider.

Mais il faut maintenir immuable la foi :

Mais il y a un patrimoine de l'Eglise, demeuré intact depuis ses origines et sans changements au cours des siècles, un bien qui est en plein accord avec les besoins et les voeux du genre humain : son élément principal est la foi catholique, que Nous avons récemment encore défendue par l'Encyclique Humani Generis 11 contre de nouveaux dangers. Gardez-la avec le plus grand soin, préservée de toute tache, entièrement persuadés qu'elle possède les forces très puissantes capables d'informer n'importe quelle époque.

De même, la nécessité du renoncement, qui est une des caractéristiques de la vie religieuse, ne subira aucune évolution quelconque :

De plus, le but de l'état de perfection est un élément du même patrimoine et vous devez le réaliser avec la plus grande ardeur, pour vous sanctifier grâce à ses secours et à ses moyens, et sanctifier aussi, directement ou indirectement, vos frères, afin que, participant toujours plus abondamment à la grâce divine, ils vivent et meurent pieusement. En ce patrimoine est contenue aussi cette vérité si élevée et si essentielle que le seul chemin menant à la perfection est l'abnégation de soi-même par amour

11 L'Encyclique Humani Generis du 12 août 1950 (cf. p. 295) a mis en garde contre certaines erreurs modernes.

du Christ. Et cela, aucune évolution du temps ne peut le modifier.

Par contre, il est un vaste domaine où les adaptations sont indispensables :

Et pourtant, il y a, et en grand nombre, des circonstances où vous pouvez et devez répondre au caractère et aux besoins des hommes et des temps. Cela a d'ailleurs déjà pour une bonne part été réalisé ; mais maintenant, après la confrontation de vos idées et de vos résolutions, il est pleinement et abondamment préparé. Que vous ayez déjà très justement innové en bien des domaines, cela ressort de tout ce que vous faites en tout genre, individuellement ou par vos Instituts, pour les écoles, pour l'éducation de la jeunesse, pour le soulagement des misères humaines, pour la culture et le développement des connaissances. Il faut donc reconnaître, et personne ne pourrait nier Notre affirmation, que déjà s'édifie l'immense travail pour répondre d'une manière neuve et adaptée aux situations nouvelles.

Il faut surtout entrer dans les courants de pensée qui entraînent nos contemporains, du moins en tout ce qu'ils ont de bon :

Mais dans cet effort d'adaptation aux besoins d'une époque nouvelle, il importe avant tout, Nous en jugeons ainsi, de rechercher avec soin quelles énergies spirituelles cachées possèdent vos contemporains, par quels désirs secrets ils sont emportés, quel est le sincère visage de leur âme. Nous ne parlons pas de ce visage qui manifeste des choses mauvaises et condamnables, qui exprime le tumulte des passions et les poisons des vices. Mais chez tout homme, en tant que tel et plus encore en tant que chrétien, même s'il pèche et est entraîné au mal, il y a beaucoup de bon et il y a l'espérance du progrès. Il vous faut répondre à ces élans, aller au-devant de ces désirs, avec prudence cependant, de manière à ne pas recevoir du monde ce qu'il a de triste et de coupable, mais à y faire pénétrer ce que vous avez de bon et de saint et conforme en même temps aux impulsions les meilleures de l'homme. Entretenez chez les autres tout ce bien caché en eux, perfectionnez-le, développez-le ; de ce bien comme de parcelles d'or, façonnez des objets précieux, de lui comme de ruisseaux, faites couler des fleuves.

r 12 I. Cor., 3, 23.

13 I. Cor., 15, 28.

14 Marc, 12, 28-34.

15 Luc, 9, 62.

lfi Cf. Jean, 11, 16.

Le Pape précise quelles sont ces exigences nouvelles :

Certains pensent, et peut-être pas à tort, que trois caractéristiques répondraient le mieux à la mentalité et aux penchants de notre époque : la largeur de vue dans la pensée et la réflexion, l'unité dans l'organisation, la rapidité dans l'action. Est-ce que ce ne sont pas trois marques et signes distinctifs de l'Evangile, est-ce que ce ne sont pas des qualités propres à ceux qui professent et vivent la foi catholique ? Quelles dimensions plus vastes pourraient être offertes à nos pensées que celles évoquées par les paroles de l'Apôtre : « Tout, en effet, est à vous, mais vous êtes du Christ et le Christ est à Dieu 12. » Quelle unité plus étroite dans l'intelligence et l'amour que celle affirmée simplement et brièvement par les paroles de l'Ecriture : « Dieu tout en tous 13 ». « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton coeur, de toute ton âme, de tout ton esprit et de toutes tes forces... Tu aimeras ton prochain comme toi-même 14 » ?

Et que nous soyons prompts et énergiques, sans qu'aucun souvenir nuisible des biens périssables ne nous retienne, cette parole nous le dit : « Celui qui, mettant la main à la charrue, regarde en arrière, n'est pas apte au royaume de Dieu15 ». Si vous voulez choisir des exemples de vertu où resplendissent ces trois titres de gloire, pensez à l'Apôtre Paul et à tous ceux qui, dans l'Eglise du Christ, ont accompli des actions éclatantes et dignes d'une immortelle mémoire.

Le Saint-Père exhorte tous les religieux à poursuivre résolument la sainteté :

Or, les buts qui brillent devant vous, proposés à votre contemplation et à votre action, et de même ceux que doivent atteindre les autres fils de l'Eglise, prêtres et laïcs, ce sont la perfection chrétienne et le salut du genre humain. Mais c'est votre part d'user des moyens les plus efficaces, les conseils évangéliques professés par les voeux publics de religion, pour dompter par une lutte continuelle la concupiscence de la chair, la concupiscence des yeux et l'orgueil de la vie *°, arriver par là

à une sainteté toujours accrue et devenir de généreux auxiliaires de Dieu pour le salut du genre humain. Orientez vos pensées et vos actes vers l'obtention de ce but sublime, et « fondés et enracinés dans la charité 17 », affermis dans une foi vigoureuse, riches d'humilité, ne laissez échapper aucune occasion de ramener les hommes vos frères vers le Créateur et Rédempteur, comme des brebis errantes à leur Pasteur.

En particulier, les religieux entretiendront entre eux la charité :

Par une fidélité exemplaire et inviolable, faites en sorte que votre façon de vivre corresponde à votre nom, que toute votre conduite soit en accord avec votre profession. Selon la parole de l'Apôtre des Gentils : « Attentifs à conserver l'unité d'esprit dans le lien de la paix 18 », que la paix règne en vous et entre vous, c'est-à-dire entre les membres d'un même Institut et d'une même maison et avec les membres des autres Instituts ; entre vous et tous les autres qui travaillent avec vous et avec qui vous travaillez à gagner les hommes au Christ. Que s'éloignent de vous les controverses et les discordes qui énervent et rendent stériles des entreprises même pleines d'espérance : l'Eglise, comme un champ où doit s'exercer le labeur apostolique, a des dimensions immenses, l'occasion d'y travailler et d'y peiner n'y manque à personne.

Que les religieux rivalisent pour atteindre les sommets de la perfection :

Si les engagements du religieux sont soutenus par les exemples d'une vie, dont l'ensemble resplendit de l'observation rigoureuse des voeux, si rien n'est lourd ou dur pour le prêtre dans le soin du salut des âmes, alors, à eux aussi s'appliquera ce que l'Apôtre déclare de la parole de Dieu, qui « est vivante... et efficace et plus effilée que tout glaive à deux tranchants 18 ». Pour prendre un exemple, tout récemment, Nous avons averti les fidèles de vivre simplement et de se montrer larges envers le prochain accablé par la misère, en cette époque de calamités où

17 Eph., 3, 17.

18 Eph., 4, 3.

Hebr., 4, 12.

le sort douloureux d'un grand nombre et leur misère navrante s'opposent violemment à des dépenses exagérées 2°. Allons, dépassez les autres par vos exemples dans cette oeuvre si pressante de perfection chrétienne, de justice et de charité, et amenez-les à imiter le Christ.

Enfin, souhaitant ardemment que la grâce secourable de Notre-Seigneur Jésus-Christ fasse sortir de votre Congrès des fruits abondants et durables, en gage de Notre bienveillance, Nous vous donnons de tout coeur, à vous qui êtes ici présents et à vos familles religieuses répandues dans le monde entier, la Bénédiction apostolique.

20 Cf. Encyclique « Mirabile Illud ».


Pie XII 1950 - ENCYCLIQUE «MIRABILE ILLUD»