Pie XII 1952 - DE ROME


ALLOCUTION AUX PÈLERINS VENUS AUX CÉRÉMONIES DE BÉATIFICATION DE LA MÈRE RAPHAÈLE MARIE DU SACRÉ-COEUR

(19 mai 1952) 1






Le 18 mai, Pie XII déclarait la Mère Raphaële Marie du Sacré-Coeur Bienheureuse'1. Le lendemain, il recevait en audience un groupe de religieuses Servantes du Sacré-Coeur avec leurs élèves et leur disait :

De nombreuses régions du monde, mais surtout de cette Espagne toujours prodigue en héros et en saints, vous êtes venus à la Ville Eternelle, très chers fils et filles, pour assister au triomphe de Raphaële Marie Porras y Ayllon ou, mieux encore, de cette Mère du Sacré-Coeur que, peut-être depuis l'enfance, vous avez appris à aimer dans ses oeuvres et dans ses filles. Et Nous, en vous souhaitant la plus cordiale bienvenue, Nous sentons comme le besoin d'évoquer son doux souvenir, ainsi que quelqu'un qui pense à haute voix et repasse sans le vouloir les souvenirs aimables d'une mère en Nous voyant entouré de ce qu'est aujourd'hui sa généreuse et vaillante famille.

1 D'après le texte espagnol des A. A. S., XXXXIV, 1952, p. 473.

2 Raphaele Porras naquit le 1er mars 1850 à Pedro-Abad, près de Cordoue ; elle entra chez les Soeurs de Marie Réparatrice ; mais la maison de Cordoue fut dissoute, et un nouveau couvent fut fondé à Madrid, qui demeura indépendant et fut appelé : les Ancelles du Sacré-Coeur. Soeur Raphaèle-Marie du Sacré-Coeur y fut élue supérieure à 27 ans.

Elle passa les trente-deux dernières années de sa vie dans la maison de Rome, dans l'oubli le plus complet, et y mourut le 6 janvier 1925.

Les « Ancelles » sont aujourd'hui au nombre de 2.700, répandues en Europe, en Amérique et au Japon. Elles ont 56 couvents et 11.000 élèves.




Les oeuvres de Dieu sont toujours admirables ; magna et mirabilia sunt opéra tua, Domine,3 ; mais beaucoup plus encore

mère raphaèle-marie



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quand elles se réalisent en un domaine plus noble et avec une finalité plus élevée. C'est pourquoi, si Nous pouvons Nous exprimer ainsi, elles ne sont jamais plus admirables que dans la préparation et la formation des saints. Il y a trois étapes pour l'admirer dans la vie de Raphaële Marie : une préparation providentielle, une activité voulue seulement par Dieu et un long déclin sur la croix.



Préparation providentielle :

Peu de noms sont aussi suggestifs que celui de l'antique Cor-doue, où tant de races et de civilisations, attirées par sa richesse et son charme, sont venues déposer ce sédiment de culture et de siècles qui forment l'âme de ses fils, dans laquelle paraissent s'harmoniser la délicate grâce andalouse et la sage gravité romaine, la typique austérité ibérique et la richesse imaginative et ornementale de l'envahisseur arabe.

Elle fut une fille authentique de cette terre lumineuse, Raphaële Marie, mais enrichie en outre du chrême chrétien reçu à l'école d'une mère exemplaire et que fit pénétrer profondément la main consacrée de saints ministres du Seigneur. Car c'est en cela que commencera à se manifester le fait que Dieu l'a choisie pour quelque chose : en cela que jamais ne lui manquera, dans les épreuves décisives de sa vie, celui qui, au nom de Dieu, lui indiquera le chemin.

Une enfance innocente, une jeunesse chaste, même au milieu des périls de ce monde qui, en raison de son origine, pourrait la croire de lui ; puis, orpheline, une période de plus en plus retirée, consacrée à la charité et à la dévotion ; finalement le fruit naturel de sa piété chrétienne réalisé dans un désir : celui de se consumer comme une flamme silencieuse devant un Tabernacle caché ; et, s'ajoutant à tout cela, jamais ne lui manqueront l'opposition de ceux qui, pour elle et pour sa soeur, rêvaient autre chose, ni les critiques pour son genre de vie, ni même le scandale en apprenant que le premier pas était fait et que le nid familial était resté vide.

Dans les mains toujours paternelles de l'artiste divin, le marteau et le ciseau ont commencé à travailler ; déjà le diamant est dégagé et laisse échapper quelques reflets ; mais que de chemin il lui reste à parcourir, sans qu'elle le sache. Elle était née exactement au milieu du siècle et nous sommes seulement en 1874, l'année où la Providence lui fera rencontrer ce prêtre, remarquable pour de nombreuses raisons, aux vues élevées et aux décisions énergiques, que fut don José Antonio Ortiz Urruela.

A quoi bon détailler maintenant cette période agitée de deux ans, alors que les faits extérieurs sont de minime importance ? A la lumière de Dieu et avec la perspective du temps, les êtres humains, avec leurs désirs et activités, avec leurs mouvements et leurs soucis, avec même leurs erreurs et excès possibles, semblent de petites fourmis jouant à changer les petits grains de pierre de la fourmilière ou de petites gouttes d'eau perdues dans le puissant et irrésistible flux et reflux des vagues de la mer. Ce qui importe est de voir la main de Dieu qui se prépare un diamant, une âme selon le Coeur divin de son Fils — et cette âme est celle de Raphaële Marie, encore jeune, à peine vingt-sept ans — avec un clair idéal, la sainteté au moyen de la réparation, et avec dans ses mains une oeuvre, qu'elle n'a pas cherchée, ce Noviciat isolé et errant, dont elle devient le centre naturel sans le vouloir. Aussi elle dira : « Je ne veux pas être fondatrice » ; mais c'est inutile parce que Dieu le veut comme II veut une nouvelle plante, quand il laisse le zéphyr enlever une semence et la transporter au loin.



Activité selon la volonté de Dieu :

C'est le deuxième tiers du XIXe siècle et de nombreuses choses connaissent une profonde transformation. Pourquoi ne se noterait-elle pas aussi dans ce que la vie religieuse a de contingent, en l'enrichissant de formes nouvelles, plus en harmonie avec son temps et plus capables de produire des fruits de sainteté et d'apostolat ? Dans le classique attachement à la tradition qui caractérise l'âme espagnole, elle ne pouvait se faire sans surmonter quelques difficultés. Et là même où la ligne se brise sous le frottement, la Providence avait placé Raphaële Marie qui, aspirant au calme et à l'isolement, en arrivait à se retrouver errante et fondatrice.

De nouveau, les hommes et les événements passent à travers son histoire comme la navette entre les fils de la trame, qui sans savoir ce qu'elle fait confectionne un précieux tissu. Son guide principal mourra ; mais il s'en trouvera d'autres ; de ville en ville, de résidence en résidence, de tourment en

tourment, surmontant un obstacle aujourd'hui et un autre demain, Raphaële Marie, ou si vous préférez, Marie du Sacré-Coeur, fidèle à son esprit, ne redressera pas un front altier, mais ne reculera pas non plus. En 1880, un illustre Prince de l'Eglise, le cardinal Moreno, accordera à l'Institut sa première approbation. Toutefois, il y aura encore sept autres années d'activités extérieures, parce que la plante est tendre et sa rapide croissance pourrait elle-même lui porter préjudice si Dieu ne la tenait cachée, afin que, en la fortifiant, elle avance sur le chemin de la sainteté, en mettant comme base de tout : un amour sans limites devant le sacrifice, une obéissance des plus délicates à la règle, une dévotion des plus tendres au Sacrement des autels et ce quelque chose de solide, équilibré et fort, qui resplendira toujours en elle et qu'elle apprit aux leçons d'un grand patriarche de la vie religieuse, saint Ignace de Loyola, aux écrits duquel, — Exercices, Constitutions — elle puisera sans crainte d'erreur comme à la source de sa spiritualité.

Maintenant, la plante a vraiment sa vie propre. Les desseins de Dieu sur Raphaële Marie se trouveront-ils accomplis 7 En aucune manière : l'essentiel manque, car la Providence, qui avait disposé de commencer sa sainteté en la faisant fondatrice, veut la compléter en la sacrifiant comme victime. Son rôle se réduisit à l'accepter tout entier, avec amour et avec cette sorte de grâce naturelle qui donne l'impression qu'elle ne fait rien. Dans ses Exercices fervents et répétés, elle avait souvent fait ses « obla-tions de plus grande estime et plus grande importance » (Exercices « 97 »), elle avait demandé à plusieurs reprises cette « humilité des plus parfaites... (voulant et choisissant) davantage d'opprobres avec le Christ qui en était plein, que d'honneurs..., (désirant) davantage d'être jugée vaine et folle pour le Christ, qui le premier fut tenu pour tel, que sage et prudente dans ce monde » (Exercices « 167 »). Et le Seigneur l'avait prise au mot. L'artiste divin laisse le marteau et le ciseau et approche le diamant de la roue de la vie qui tourne vertigineusement. Dans le lointain, surgit le profil d'une Croix !



croix :

Ici non plus, très chers fils et filles, nous n'avons à nous arrêter aux faits purement extérieurs qui, étant humains, ont à participer à ces contrastes - terre et ciel - capables de désorienter ceux qui oublieraient une Providence qui cherche ses fins en permettant que les créatures se meuvent librement et aussi en se servant des bonnes intentions de tous, comme lorsqu'elle permet que le vent s'élève, entraîne les lourds nuages et les fasse courir à travers le ciel, déchargeant de leurs noires profondeurs la grêle et la foudre. Et combien devait-il s'en accumuler dans le ciel de la Mère du Sacré-Coeur jusqu'à ce qu'elle en arrive à cette renonciation de 1893, ici, à Rome ! Et combien devaient se révéler douloureux pour son esprit si délicat ces incompréhensions, ces doutes, ces méfiances qui, peu à peu, l'isolaient des humains, l'entouraient d'ombres et la poussaient, lentement mais inexorablement vers cette Croix où l'attendait Celui qu'elle avait aimé depuis toujours et qui faisait d'elle sa « victime d'amour ».

Elle a seulement quarante-trois ans et une nature des plus riches ; il lui reste trente-deux autres années de vie, qui seront plus de six lustres interminables d'anéantissement progressif et de martyre dans l'ombre. Et, consciente de sa vocation, elle entre dans l'ombre, avec la grandeur des âmes qui vont au sacrifice les yeux ouverts ; qui, du haut de la Croix, ne desserrent pas les lèvres pour laisser entendre un gémissement ; qui savent savourer jour par jour, l'amertume d'une immolation d'autant plus douloureuse qu'elle est plus lente, plus ignorée, plus longue. Dans l'ombre, pour obéir, pour renoncer à elle-même, pour travailler sans pouvoir y sentir que les brouillards qui l'entourent se sont dissipés. Dans l'ombre, non pas pour oublier, ce qui serait trop doux, mais bien pour être oubliée, ce qui est la plus haute couronne du sacrifice. Dans l'ombre, pour se faire remarquer seulement par une vie plus austère, une pénitence plus rigide, une humilité plus profonde. « L'Ami qu'elle porte dans le coeur ne la laisse pas reposer » ; et, à ce même Coeur divin, auquel elle donne tout — sa fondation, sa vie - auquel elle a tout offert, elle s'offre tous les jours du fond de son ombre en esprit de réparation, pour les péchés du monde, pour la gloire du Père et la sanctification des âmes.

Le 24 décembre 1924, Notre grand Prédécesseur, de sainte mémoire, ouvrait la Porte Sainte de l'Année Jubilaire 1925. Treize jours plus tard, les portes du ciel s'ouvraient pour la Mère Marie du Sacré-Coeur.

! oeuvre de la Bienheureuse demeure :

L'artiste divin a terminé son travail et le diamant, bien poli sur toutes ses facettes, est une oeuvre merveilleuse et parfaite : qui pensera en le voyant étinceler dans le ciel, enchâssé dans la couronne des Saints, qui pensera en le voyant si beau et si bien achevé, aux tours qu'il fallut lui donner pour le polir, aux parcelles infinies qu'il fallut lui arracher à coups vifs et aux instruments dont la Providence se servit ?

Aujourd'hui, les Religieuses Servantes du Sacré-Coeur de Jésus, avec leurs collèges et écoles, leurs maisons d'Exercices, résidences, associations et oeuvres, de toutes catégories, font un bien immense, de l'Espagne natale jusqu'au lointain Japon, où Nous avons appris avec plaisir les fruits qu'elles recueillent. Mais la racine de tout cela se trouve dans le sacrifice et dans la sainteté d'une âme qui se laissa gouverner par la Providence divine.

Sa suavité, son humilité, sa stricte obéissance, son amour de l'abnégation et du sacrifice, sa fidélité à un esprit sûr, équilibré et ferme, son adhésion filiale et sans condition au Siège de Pierre, sa dévotion à ce Coeur divin, caché sous les voiles de l'Eucharistie, sont l'exemple qu'elle a laissé à tous et spécialement à vous, ses filles, qu'elle aima tant ! Sur ce chemin, le Seigneur ne vous refusera jamais ses grâces. En gage de celles-ci et en témoignage de Notre bienveillance particulière, Nous désirons donner avec un amour paternel, la Bénédiction apostolique, tout d'abord au très cher Institut, avec toutes ses maisons, personnes et oeuvres et tous ses projets ; ensuite à tous ceux qui bénéficient de son apostolat ; et enfin, d'une manière spéciale, aux présents, ainsi qu'à toutes les personnes qu'ils portent en ce moment dans leur pensée et dans leur coeur.










LETTRE A LA VICOMTESSE DE CUREL PRÉSIDENTE DE LA LIGUE FÉMININE DACTION CATHOLIQUE FRANÇAISE

Ci 9 mai 1952) 1






A l'occasion du cinquantenaire de la Ligue fêté à Lourdes, Sa Sainteté Pie XII a adressé à la vicomtesse Charles de Curel, présidente générale, la lettre suivante :

Nous nous sommes réjoui de grand coeur à l'annonce des prochaines fêtes du cinquantenaire de la Ligue féminine d'Action Catholique française, et Nous désirons que, comme un écho des chaleureux encouragements que prodiguait le bienheureux Pie X à votre Mouvement naissant, vous parvienne à cette occasion le témoignage de Notre gratitude paternelle.

La fidélité à l'Eglise, à sa doctrine, à sa hiérarchie, dont s'est toujours honorée la Ligue féminine, et qui demeure encore aujourd'hui l'un de ses thèmes privilégiés d'étude et d'action, Nous la trouvons en quelque sorte inscrite dans l'histoire même de votre mouvement. Fondé — sous deux formes voisines qui fusionnèrent ensuite — à une heure critique pour la vie religieuse de votre pays, il fut, en effet, étroitement associé, au cours de ce demi-siècle, aux épreuves et aux renouveaux du catholicisme français et s'est distingué, en maintes circonstances, par son filial empressement à servir l'Eglise. Lors des cérémonies jubilaires, que présidera Son Em. le cardinal Gerlier, entouré de nombreux membres de l'épiscopat, les femmes catholiques de France, assemblées auprès de la Grotte de Lourdes, au nom de quelque deux millions d'adhérentes de la Ligue, pourront à juste titre,














action catholique française



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chanter le Magnificat de leur reconnaissance au souvenir de ce passé mémorable.

Ce service de l'Eglise s'enracine d'ailleurs dans une vie de foi profonde. Appliquée plus particulièrement comme Mouvement d'Action Catholique générale à l'apostolat paroissial et communautaire, la Ligue féminine poursuit avant tout, auprès de ses militantes, une oeuvre de culture religieuse et de formation spirituelle. Nous l'en félicitons, comme aussi Nous rendons hommage au zèle et au dévouement avec lesquels ses aumôniers lui prodiguent, avec toute la délicatesse requise, l'assistance de leur ministère sacerdotal. Il Nous plaît également, parmi tant de « services » dus à l'initiative du mouvement, de relever l'activité qu'il déploie pour la préparation des mères aux tâches capitales de l'éducation humaine et chrétienne des enfants. Vous avez, à cet égard, multiplié les recherches et les réalisations et, déjà ces efforts se répercutent dans un grand nombre de familles françaises pour le plus grand bien de l'Eglise et de la patrie.

Continuez donc à répandre, dans les milieux sociaux divers, où rayonne votre influence, l'esprit d'union et de fraternelle collaboration qui anime les membres de la Ligue, dans un commun service de la paroisse et un même amour de leur Mère, l'Eglise ; développez votre action, en pleine harmonie avec les autres formes d'apostolat également approuvées par la hiérarchie pour des tâches complémentaires de la vôtre ; portez hautement témoignage, devant le pays et devant les responsables de la cité, de votre foi et de ses exigences imprescriptibles, surtout en matière familiale et éducatrice ; en un mot, bâtissez, avec ces pierres symboliques que les délégations diocésaines emporteront bientôt de Lourdes, non seulement une demeure matérielle, témoin tangible de votre charité, mais l'édifice spirituel d'une société fondée sur la vraie pierre angulaire.

Tâche magnifique, qu'après la halte réconfortante de ces solennels anniversaires, vous aimerez poursuivre avec une confiance accrue dans le secours divin. « Au coeur des femmes de France, à qui, dans les conjectures actuelles, incombe une mission de souveraine importance, daigne Dieu, le Seigneur tout-puissant, infuser en une mesure riche et débordante », les énergies surnaturelles dont firent preuve, en leur temps, les grandes saintes de la patrie ! C'est le voeu que Nous formions en ce jour mémorable de l'Année Sainte, « témoin de l'affectueuse rencontre du Père de la grande famille chrétienne avec sa fille aînée la France catholique » 2. Nous le formulons aujourd'hui à nouveau, et, en gage des grâces abondantes que, par l'intercession de Notre-Dame de Lourdes, Nous appelons sur la Ligue féminine d'Action française, ses dirigeantes, ses aumôniers et chacun de ses membres, Nous vous accordons, dans 1 effusion de Notre coeur paternel, Notre Bénédiction apostolique.



albert pincherle



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DÉCRET DU SAINT-OFFICE CONDAMNANT LES OEUVRES DALBERT PINCHERLE

(20 mai 1952) 1


que les autorités publiques ne permettent point la publication et la diffusion de ces ouvrages qui tendent à la destruction des principes mêmes et des fondements de l'honnêteté naturelle.

Le jeudi suivant, 3 avril 1952, Notre Très Saint-Père le Pape Pie XII, dans l'audience accordée à Son Exc. Reverendissime l'Assesseur du Saint-Office, a approuvé la décision des Eminentissimes Pères qui lui avait été soumise, l'a confirmée et a ordonné sa publication.







Il est établi que les livres de cet auteur sont marqués par une immoralité fondamentale dont on a pu constater l'action corrosive. Dès lors, ils sont déjà condamnés par l'article 1399 du Droit Canon. Mais l'Eglise a voulu signaler la nocivité particulière de ces ouvrages en les citant nommément ; et Elle saisit l'occasion pour lancer un avertissement aux fidèles :

Dans la réunion plénière du mercredi 2 avril 1952, de la Sacrée Congrégation du Saint-Office, les Eminentissimes et Ré-vérendissimes cardinaux préposés à la défense de la foi et des moeurs, sur l'avis des Révérendissimes Consulteurs, ont condamné les oeuvres complètes d'Albert Pincherle (connu sous le nom de Moravia).

A cette occasion, en présence du mal immense causé aux âmes, d'une part par une licence sans frein dans la publication et la diffusion de livres, brochures et périodiques qui racontent, décrivent ou enseignent ex professo des choses lascives ou obscènes ; d'autre part, par un désir funeste de lire sans discernement ces ouvrages, les Eminentissimes et Révérendissimes Pères de la Sacrée Congrégation du Saint-Office jugèrent opportun de publier l'avertissement suivant :

Que les chrétiens se souviennent de leur obligation grave de s'abstenir de la lecture des livres et périodiques de ce genre ;

que les éducateurs songent au grave devoir qui leur incombe d'écarter absolument de la jeunesse, comme un insidieux poison, les écrits licencieux ;













ALLOCUTION A DES INFIRMIERS ET INFIRMIÈRES DES HÔPITAUX DE ROME

(21 mai 1952) 1




Voici le texte de cette allocution où le sens de la vocation de l'infirmier est mis en lumière :

De tout coeur Nous vous saluons, chers fils et filles, qui êtes venus en si grand nombre d'hôpitaux, d'hospices, cliniques, maisons de santé de Notre diocèse de Rome, pour recevoir la bénédiction du Vicaire du Christ. Votre présence nous atteste la haute conception que vous avez de votre profession, et Nous engage ainsi à vous entretenir brièvement de la vocation à laquelle vous vous êtes consacrés.

Nous disons vocation, parce que celui qui embrasse la profession d'infirmier ou d'infirmière répond à la voix de la charité du Christ : Venez, les bénis de mon Père — vous dira Jésus au jour du jugement — parce que... j'étais malade et vous m'avez visité... Tout ce que vous avez fait au plus misérable des malades, vous l'avez fait à moi-même 2.

De fait, les chrétiens ont, à travers les siècles, créé de nombreuses institutions en faveur des malades :

Les paroles si explicites du divin Maître ont été la Charte de toutes les oeuvres chrétiennes de miséricorde, et nous savons par le récit des plus anciens historiens de l'Eglise la générosité et la méthode avec lesquelles les chrétiens soignaient eux-mêmes tous les malades, parce qu'ils voyaient en eux les frères de

1 D'après le texte italien des A. A S XXXYTV

* Cf. Matth., 25, 36-40. ' I952' P- 551-

Celui qui souffrit pour nous tous les tourments de la passion et de la croix. Eusèbe de Césarée3 parle d'une horrible peste qui, peu après l'an 250, fit des ravages en Afrique, et au cours de laquelle les chrétiens, prêtres et laïcs, sans souci du danger pour leur propre vie, prenaient soin des malades, que les païens par crainte de la contagion, écartaient loin d'eux et abandonnaient à leur sort, sans les ensevelir. Plus tard, quand l'Eglise put se développer et s'organiser librement, apparurent même les premiers hôpitaux. C'est ainsi que l'hôpital créé vers l'an 350 à Césarée par le grand évêque saint Basile était une ville entière, séparée du reste des habitations et où étaient soignées toutes les maladies, y compris la lèpre 4.

Dans notre ville de Rome, selon le témoignage précis de saint Jérôme 5, Fabiola fonda le premier hôpital où elle recueillit et soigna les malades de toutes sortes et de tous lieux, qu'elle avait l'habitude de porter elle-même sur ses épaules et dont elle lavait les plaies purulentes que d'autres avaient répugnance même à regarder. Puis l'Urbs vit bientôt s'élever près des deux grandes basiliques constantiniennes du Saint-Sauveur au Latran et de Saint-Pierre au Vatican les refuges de charité chrétienne pour les pauvres, les pèlerins et les malades. L'un d'eux donna naissance au célèbre hôpital du Saint-Esprit et l'autre du Saint-Sauveur. Mais il serait trop long de retracer ici la merveilleuse histoire de la charité hospitalière de Rome au moyen âge et au cours des siècles suivants. Toutefois deux grands noms doivent être rappelés, ceux de vos saints Patrons Jean de Dieu 0 et Camille de Lellis 7 qui fondèrent, l'un l'Ordre hospitalier devenu si populaire sous le nom de Fate Bene Fratelli, l'autre, celui des Clercs Réguliers Serviteurs des Malades. Le 23 juin 1886 ils furent proclamés par le Souverain Pontife Léon XIII Patrons célestes des hôpitaux et des malades, et le 28 août 1930, Notre vénéré prédécesseur Pie XI les établit Pa

trons de tous les infirmiers des deux sexes et de leurs associations catholiques 8.

Mais une mention particulière est due à saint Vincent de Paul8 qui, avec une idée qui parut audacieuse alors, sut unir la disposition spéciale de la femme aux soins des malades avec la vie religieuse : les Filles de la Charité inaugurèrent ainsi la magnifique floraison des Congrégations de Soeurs Infirmières, aujourd'hui répandues dans le monde entier et jusqu'aux postes missionnaires les plus éloignés.



Les laïcs sont eux aussi appelés à venir au secours des souffrants :

Toutefois le soin des malades n'est pas une prérogative des religieux et religieuses seulement, il réclame également dans le Laïcat des foules de serviteurs compétents et généreux, et comme il est né de l'esprit chrétien, il doit être de même alimenté et entretenu par celui-ci.



Pie XII énumère les qualités requises du personnel infirmier :

L'importance de la fonction est la mesure de la responsabilité de celui qui l'exerce. Or, l'infirmier doit répondre non point d'une chose matérielle, mais d'un homme vivant, plus ou moins gravement atteint dans sa vie même, et qui, par conséquent, dépend, — souvent totalement — de la science, de l'habileté, de la délicatesse et de la patience d'autrui, c'est-à-dire du médecin et de l'infirmier, et même, à un certain point de vue, encore plus de l'infirmier que du médecin, comme le faisait remarquer un chirurgien connu : « C'est à eux (les infirmiers) que sont confiés les malades la plus grande partie du jour et de la nuit ; ce sont eux qui prennent en consigne les opérés et qui par leur oeuvre modeste et efficace rendent possibles les succès du médecin et du chirurgien » 10.

Il faut être compétent :

Votre profession suppose donc des qualités peu ordinaires : une solide formation spécifique, c'est-à-dire des connaissances techniques sérieusement acquises et constamment tenues à jour, une souplesse d'intelligence capable d'acquérir sans cesse de nouvelles méthodes, d'utiliser de nouveaux instruments et remèdes.



Il faut être maître de soi et de ses mouvements :

Donc un tempérament calme, ordonné, attentif, consciencieux. L'infirmier doit être maître de lui-même ; à un geste brusque correspond une nouvelle douleur pour le malade ; le médecin ne pourrait plus être tranquille ; le malade aurait peur de lui. Il doit conserver son calme devant les plaintes ou les demandes déraisonnables du malade, devant les crises imprévues. Il doit prévoir et préparer à temps tout le nécessaire parfois si compliqué, pour les soins du malade ; il ne doit rien oublier, il doit observer toutes les précautions de l'hygiène et de la prudence. Il doit être fidèle à l'horaire prescrit, exact dans les doses à administrer ; observateur vigilant pour signaler au médecin les réactions du malade et les symptômes que son expérience lui permet de relever ; attentif aux ordres reçus et prompt à les exécuter.



L'infirmier doit être rempli de tact :

L'infirmier doit posséder d'autre part des qualités morales non moins considérables : un tact discret et modeste, sensible et fin, qui sache deviner les souffrances et les désirs du malade, ce que l'on doit et ce que l'on ne doit pas dire. Il doit être plein de tact envers le médecin, dont il doit respecter et soutenir l'autorité ; envers les collègues, infirmiers et infirmières, particulièrement envers les plus jeunes, qu'il ne doit jamais mettre dans l'embarras ou dans la confusion, mais qu'il doit au contraire être toujours prêt à aider.



L'infirmier doit être dévoué :

Votre profession réclame un dévouement complet au malade, aussi bien pauvre que riche, aussi bien désagréable que sympa-

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truque. L'infirmier n'est pas un employé de bureau, qui peut s'en aller sans inquiétude à l'heure fixée. Il y a des cas urgents, des journées surchargées de travail, durant lesquelles l'interruption ou le repos ne sont pas possibles.



Il doit être patient :

La patience fait également partie de ce dévouement total, car certains sont capables d'un grand effort extraordinaire de temps en temps, mais se lassent et s'irritent devant les petits ennuis qui se répètent quotidiennement.



Il faut observer le secret professionnel :

Enfin les vertus morales de l'infirmier qui doit strictement observer le secret professionnel sont couronnées par la discrétion. Jamais il ne peut révéler les choses qui ont été dites par le malade en confidence ou dans le délire, ni rien qui puisse nuire à sa réputation ou à celle de sa famille.



Respect des malades :

Mais il y a encore des vertus plus élevées, auxquelles la foi chrétienne confère un éclat particulier : Nous voulons parler du respect envers le malade, de la véracité et de la fermeté morale. Respect envers celui qui parfois en arrive à perdre beaucoup de ce qui rend l'homme respectable, le courage, la sérénité, la lucidité. Respect également envers son corps, temple du Saint-Esprit, racheté par le précieux sang du Christ, et destiné à la résurrection et à la vie éternelle



Véracité :

Véracité à l'égard des médecins, des malades et de leurs familles qui doivent pouvoir se fier à la parole de l'infirmier. Il en va parfois non seulement du salut du corps, mais également de l'âme ; retarder par des réticences la préparation du malade au grand passage à l'éternité pourrait être facilement une faute grave.

Fermeté :

Enfin fermeté morale, spécialement quand il s'agit de la loi divine. Ce que Nous avons déclaré en d'autres occasions sur les problèmes qui concernent la médecine, par exemple, dans Notre allocution du 12 novembre 1944 à l'Union Italienne Médico-Biologique « Saint-Luc » et dans celle du 29 octobre 1951 à l'Union des Sages-Femmes catholiques d'Italie, entend s'appliquer également à l'activité de l'infirmier n.

Toutes ces qualités doivent être vivifiées par l'esprit surnaturel :

Tel est, chers fils et filles, le tableau de ce qu'exige votre profession. Peut-être dira-t-on que rares sont ceux qui réalisent cet idéal. Est-ce donc vrai ? A votre honneur, Nous croyons en revanche pouvoir dire qu'un bon nombre de vous le réalisent en eux entièrement.

Il est toutefois certain que vous ne seriez pas en mesure de demeurer à la hauteur de votre tâche et de vos devoirs, si vous ne pouviez disposer de forces morales résultant d'une foi vive et profonde et alimentées par elle. Si vous concevez et pratiquez votre travail uniquement comme un emploi, honorable certes, mais purement humain, sans puiser aux sources surtout eucharistiques la force chrétienne, vous ne réussirez pas, à la longue, à demeurer fidèles à vos devoirs. Vous avez en effet, dans votre vie, tant de sacrifices à accomplir, tant de dangers à surmonter, qu'il vous serait impossible, sans l'aide surnaturelle, de triompher constamment de la faiblesse humaine. Vous devez cultiver en vous l'esprit d'abnégation, la pureté du coeur, la délicatesse de la conscience, afin que votre service soit vraiment l'acte de charité surnaturelle que réclame la foi chrétienne. Nous l'avons rappelé au début : vous devez servir chez les malades Jésus-Christ même ; c'est Lui qui vous demande de Le soigner, comme II demanda un jour à boire à la Samaritaine, et Nous vous disons en son nom ce qu'il ajouta pour l'encourager à vaincre sa surprise : « Si tu connaissais le don de Dieu et qui est celui qui te demande à boire, tu l'en aurais prié toi-même et il t'aurait donné une eau vive 13. »



12 Cf. Documents Pontificaux 1951, p. 47°-

13 Jean, IV, 7-10.



Vous savez bien que sont très nombreux aujourd'hui ceux qui se font soigner dans les hôpitaux, dans les cliniques, dans les sanatoria ; de la sorte, un rayon toujours plus vaste s'offre à votre bienfaisante activité. On peut dire qu'elle pénètre pour ainsi dire dans toutes les familles. Aussi désirons-Nous vivement que vous preniez une conscience de plus en plus nette de vos responsabilités et une volonté de plus en plus ardente d'y répondre entièrement. Nous vous recommandons donc vivement, vous-mêmes ainsi que votre travail, à la protection et à l'amour maternel de la Sainte Vierge, et en même temps Nous vous donnons de tout coeur la Bénédiction apostolique.










ALLOCUTION AUX ENFANTS DE MARIE

(22 mai 1952) 1






En ce jour de Y Ascension, plusieurs milliers de jeunes filles, membres de Congrégations d'Enfants de Marie ont été reçues en audience par Pie XII qui leur dit :

En cette belle fête de l'Ascension, c'est une joie pour Notre coeur d'accueillir les groupes d'Enfants de Marie de Sainte Agnès et ceux qui leur sont affiliés. Chères filles qui êtes venues aujourd'hui si nombreuses et joyeuses à la maison du Père, pour Lui dire votre dévotion et Lui demander de renforcer par la Bénédiction apostolique la sainte milice de la Reine des cieux, répandue dans tout le monde catholique, soyez les bienvenues !

Le jour de cette audience Nous semble particulièrement approprié pour vous adresser Notre parole, même brièvement. On peut dire en effet, en un certain sens, que la première Congrégation se forma le jour même de l'Ascension, car Nous aimons penser que la Sainte Vierge ne fut pas absente du Mont des Oliviers, lorsque son Fils divin bénit, pour la dernière fois sur terre, ses disciples et monta au ciel. Qui fut alors l'âme des premiers fidèles, sinon la Mère de lésus ? Nous savons qu'elle était au Cénacle durant les jours d'attente et de prière qui se terminèrent par la glorieuse manifestation du Saint-Esprit. A elle seule, sa présence fut pour les Apôtres et les disciples un stimulant à mieux aimer Jésus : la Sainte Vierge fut pour eux la Mère du bon conseil, la Mère de la véritable et solide piété.

Et Nous aussi, en ce moment, Nous sentons présente ici notre chère Mère Marie, en qui, après Jésus, sont fondées toutes nos espérances : présente au milieu de vous, comme la mère de fa-







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enfants de marie



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mille, qui embrasse de son regard, qui serre sur son coeur ses chers enfants ; présente près de Nous, comme céleste inspiratrice, pour que votre vie chrétienne reçoive de Notre exhortation un nouvel aliment, et votre oeuvre dans le monde une nouvelle impulsion.

Ils le savent bien vos dirigeants — l'illustre Ordre des Chanoines Réguliers du Latran — et vous le savez vous-mêmes, chères filles, que le Saint-Siège, spécialement par les actes de Nos glorieux Prédécesseurs Pie IX et Léon XIII, encouragea et enrichit de privilèges votre Pieuse Union ; et, comme dernier mérite, qui lui vint des forces adverses, elle eut l'honneur d'être comprise dans la rafale des mesures hostiles, par lesquelles, voici vingt ans, fut frappée l'Action Catholique 2.

Mais, plus que les privilèges, vous avez à coeur de regarder les devoirs qui découlent pour vous toutes et pour chacune des buts élevés de votre Pieuse Union.

Elle a pour tâche principale de développer et de cultiver la piété des jeunes filles : une piété solide et éclairée qui réponde à l'esprit de l'époque. Elle insiste avant tout sur la nécessité de la prière ; elle vous enseigne à prier et à bien prier. La prière est la respiration de l'âme. Sans la prière fréquente et fervente, l'âme devient anémique, la foi s'affaiblit, l'espérance languit, et, à la place de la charité, I'égoïsme s'installe, comme un plomb, dans les coeurs.

Les zélés directeurs, qui ont la charge spirituelle de vos Congrégations, vous mettent en garde contre vos défauts et contre les tentations intérieures et extérieures, et vous guident selon les circonstances changeantes ; mais les principes ne changent pas, la nature humaine est toujours substantiellement la même.

Les moeurs, en revanche, ont changé. L'autorité de la famille est généralement diminuée, et la liberté laissée aux jeunes filles les expose à de plus nombreux dangers ; l'obligation fréquente de travailler dans les bureaux, dans les magasins, dans les ateliers, dans les usines, multiplie les occasions et les périls ; les relations souvent trop libres avec les jeunes gens, les publications en vente dans les kiosques, les films projetés dans les salles de cinéma, sont souvent une excitation au mal. Certainement il n'est pas en votre pouvoir de réformer la moralité publique ; mais les difficultés que vous rencontrez pour protéger votre vertu, votre piété et votre foi même, vous imposent l'obligation de chercher la lumière et la force, dont vous avez besoin, là où elles se trouvent. Or votre Congrégation vous offre pour cela également des avantages incomparables. En effet vous ne pouvez vous contenter de l'instruction catéchisti-que reçue quand vous étiez des fillettes de dix ou douze ans ; vous devez compléter votre instruction religieuse, savoir comment répondre aux objections contre la foi.

Mais la lumière ne suffit pas si le coeur n'est pas généreux. Quels que soient votre état et votre condition, que votre coeur soit pur, que vous fassiez vôtre, en tout et toujours, la volonté de Dieu dans l'humble acceptation de tout ce qui forme la trame de votre vie, et rien ne vous manquera pour être dignes de votre Mère céleste ; votre nom exprimera votre filiation spirituelle et votre dévotion à Marie sera vivante et non une simple apparence. Le monde verra en vous des filles obéissantes à leurs parents et affectueuses, des travailleuses actives, des jeunes filles et des femmes étrangères aux vaines frivolités, éloignées de tout ce qui est une pente glissante vers les moeurs faciles. Il verra des épouses et des mères exemplaires, conscientes de leur haute mission éducatrice, appliquées à former, sur les sentiers de la foi, de l'honnêteté, de la piété religieuse, cette famille chrétienne qui, seule, peut donner à la société les éléments pour former un peuple civilisé, fort et grand, respectueux des lois de Dieu.

Ce monde verra d'autre part (spectacle mystérieux pour lui) se détacher parfois du sein de vos Congrégations, sur un signe du Seigneur, des âmes devenues étrangères à la terre par une irrésistible nostalgie du ciel et des choses de l'esprit, et accourir au recueillement du cloître, pour consacrer à leurs frères toutes leurs forces ou consumer celles-ci par un commerce mystique plus direct avec Dieu, dans cette vie contemplative, qui est la plus haute et la plus pure forme de vie.

Ainsi formées et ordonnées, chères filles, vous comprenez quel facteur efficace de bien moral et religieux sont au sein de l'Eglise les Congrégations d'Enfants de Marie, et comme doit vous être chère la grâce que vous fait le Seigneur d'abriter votre vie chrétienne à l'ombre de la Sainte Vierge et sous son manteau maternel.

Puisque l'expérience de longues années et des pays les plus divers a démontré que les vraies Enfants de Marie ont toujours été la joie des familles, l'exemple de toutes les vertus domestiques et civiles, pensez combien Nous devons avoir à coeur que leurs Congrégations s'épanouissent dans toutes les paroisses et se fassent prospères partout où l'usure du temps et la fragilité humaine ont pu en diminuer l'efficacité ou en tarir la sève vitale.

L'Action Catholique ne pourra pas se sentir diminuée dans son travail par l'oeuvre spirituelle à laquelle s'appliquent vos Congrégations, car celles-ci ne sont pas par elles-mêmes, ni au premier plan, créées pour l'action extérieure, mais principalement pour l'entretien de cette vie chrétienne intérieure, sans laquelle le reste serait plutôt du bruit qu'un apostolat substantiel. Au contraire, l'Action Catholique sera heureuse de trouver dans les Congrégations des âmes déjà formées et éprouvées dans la vie religieuse personnelle, et, de leur côté, les Congrégations les mettront bien volontiers au service de l'Action Catholique. Continuez donc, avec courage et avec zèle, à travailler dans l'esprit et selon les méthodes et les lois qui, dans le passé, ont fait fleurir vos Congrégations. Celles qui parmi vous sont aptes et se sentent appelées à l'apostolat des laïcs trouveront toujours dans l'Action Catholique et dans d'autres oeuvres d'apostolat un affectueux accueil.

Pour vous retremper dans cet esprit et rendre votre action le plus possible féconde, vous aurez le patronage de la Mère céleste, de la suave vierge et martyre Agnès et de votre nouvelle patronne, la douce et sainte Marie Goretti. Et si toutes les Enfants de Marie, proches et lointaines, rivalisent en ferveur de vie et de vertu, ce ne sera pas une contribution médiocre que la vôtre à ce renouvellement spirituel que Nous avons appelé d'une façon si pressante.

Avec cette confiance, Nous implorons pour toutes vos Congrégations la constante protection maternelle de la Vierge Immaculée, et tout en vous invitant à vous resserrer autour d'Elle, élevant vos yeux vers son Fils divin, sanctificateur de vos âmes, Nous vous donnons de tout coeur, à vous toutes ici présentes, à vos soeurs lointaines, de toutes régions et de tous peuples, à vos familles, à vos travaux, à vos intentions, Notre paternelle Bénédiction apostolique.












Pie XII 1952 - DE ROME