Pie XII 1952 - RADIOMESSAGE AU CONGRÈS EUCHARISTIQUE INTERNATIONAL DE BARCELONE


RADIOMESSAGE AUX FIDÈLES DU DIOCÈSE DE NOVARE

(3 juin 1952) 1




En appuyant sur un bouton électrique, le Saint-Père a, de Rome, illuminé la Croix qui se trouvait au sommet du Mont Mottarone, après quoi le Radiomessage suivant fut transmis :

Chers fils et filles du Cusio, de l'Ossola, du Verbano, Nous saluons avec vous, de nouveau debout et radieux sur la cime de votre Mottarone, l'étendard triomphant de l'humanité rachetée : la Croix de Jésus-Christ. O Cru*, ave spes unica !

Abattue voici un an par la fureur des éléments et des forces atmosphériques, cette Croix qui fut élevée à l'aube de ce siècle pour affirmer sur le roc inébranlable, du haut du mont géant, la fermeté de pierre de votre foi, reprend aujourd'hui sa place, avec un aspect lumineux, dominant l'air et l'espace, rassérénant les coeurs et invitant à s'élever, dans les silences de l'infini, vers Celui qui « tient dans sa main les profondeurs de la terre et à qui appartiennent également les sommets des monts » 2.

2 ps'aPxcV,,e4feX'e itaUen ^ VO-"«™ Romano, du 4 juin .05,




Cet arbre de notre rédemption, qui revient étendre son ombre sur les champs pacifiques du travail et sur les épisodes agités de l'époque, reprend aujourd'hui sa voix muette pour dire aux humbles mortels que la terre est à Dieu et que les hommes sont à Lui ; que si ceux-ci tissent librement, bien ou mal, l'histoire du monde, il est Lui le but lointain de cette mystérieuse histoire qui s'achève dans la bonté, la miséricorde, l'amour, grâce à cette Croix par laquelle nous fûmes rachetés et réconciliés avec Lui.

Contaminée par la faute et parcourue en tous sens par le mal, cette terre est cependant sanctifiée par le glorieux trophée et par le sang de Jésus-Christ, et elle est l'autel d'où s'élèvent vers Dieu, par le Christ rédempteur, vivant dans son Eglise, la louange, la bénédiction, l'action de grâces, la plainte suppliante des fils du péché, implorant pitié, salut et paix.

Et si le mal bouleverse tout et dans sa lutte contre le bien est si souvent victorieux, au point qu'un climat de péché empoisonne le monde et que le vice triomphe dans les haines entre frères, dans la sensualité, dans l'égoïsme, dans le mensonge, dans la soif des richesses, dans les pires instincts de la nature corrompue, la famille chrétienne combattue est cependant toujours entraînée par le désir de la vertu déposé dans son coeur par son Libérateur divin, avec le message de son Evangile et de sa vie. La croix veut être un avertissement éloquent, une solennelle affirmation de cette aspiration à la vertu, de cet effort laborieux et toujours renaissant pour se purifier et se libérer du mal, symbole qui résume toute la religion de l'Evangile et qui, dressé sur le mont, proclame les hauteurs mystiques, les idéaux qui ne peuvent être atteints qu'avec la grâce de Dieu ; elle exprime d'autre part votre désir, la résolution que vous avez publiquement confirmée aujourd'hui de ce renouvellement chrétien qui fait de l'homme une créature nouvelle, spirituelle, élevée, parce qu'elle s'appuie en-haut, sur le mont qu'est le Christ.

Que ce signe de victoire soit un rappel permanent de vos résolutions renouvelées, Novarois, lui que, solidement planté sur le Mottarone, à l'épreuve des vents et des tempêtes, vous avez voulu lumineux et visible même dans les ténèbres de la nuit.

Si vous pénétrez la signification intime de cette inauguration, l'engagement que vous assumez, une fois de plus, à l'égard de votre profession chrétienne ne peut que vous apparaître également lumineux. C'est un engagement que votre piété rend particulièrement solennel du fait que vous avez voulu le Vicaire du Christ présent à votre manifestation et interprète de vos sentiments par le geste de l'illumination et par la parole qui le commente.

Si cette Croix sur le mont, si ce phare qui luit pour les hommes proches ou éloignés, si ce rite suggestif sous le ciel

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étoile, si la bénédiction donnée par le vénéré Pasteur du diocèse, si les milliers de coeurs exultant sur la cime, sur la pente, au pied du Mottarone, si toute la grande famille diocésaine qui est en ce moment à l'écoute ; si tout cela ne doit pas être un simple étalage conventionnel pour séduire la vue et l'ouïe, pour frapper l'imagination, pour susciter les impressions vides et éphémères d'un songe, vous devez penser qu'une inauguration si solennelle, après la grande Mission rénovatrice qui a soulevé votre cité, met un sceau public et permanent à vos promesses, à vos résolutions d'une foi vécue en parfait accord avec la foi professée.

Comme votre foi a maintenant, visible pour tous, le monument que vous avez voulu élever en plein air, qu'elle soit de même chez vous tous manifeste, professée à la lumière du soleil, sincère et courageuse dans son étroite adhésion aux valeurs de l'Evangile, radicalement opposées aux maximes du monde.

Rappelez-vous : « Celui qui me confessera devant les hommes, moi aussi je le confesserai devant mon Père qui est aux cieux » 3. En confessant le Christ, nous sommes justes et heureux. Confessés par le Christ, nous sommes sauvés dans le temps et dans l'éternité.

En un invincible élan chrétien ressenti par vous tous, vous avez voulu que la Croix solitaire domine sur la plus élevée des hauteurs environnantes ; que de la même façon votre foi, dont la Croix est l'expression significative et éloquente, soit pour votre vie la règle suprême, à laquelle tout doit céder, en hommage à la Vérité éternelle, à laquelle la raison humaine, reconnaissant sagement ses propres limites, ne peut s'égaler.

Votre sentiment chrétien a voulu que cette Croix, resplendissant le jour sous les rayons du soleil, soit elle-même un foyer de lumière, qui perce les ténèbres de la nuit, comme le phare pour les navigateurs. Et c'est là une pure réalité à l'égard de votre foi vécue, si elle est vécue comme elle doit l'être, c'est-à-dire conformément à la justice évangélique, parole et vie de Jésus-Christ. Encore une fois rappelez-vous l'exhortation du Rédempteur : « Vous êtes la lumière du monde. Une cité placée sur une montagne ne peut rester cachée ; et l'on n'allume point une lumière pour la mettre sous le boisseau, mais sur le lampadaire, et ainsi elle éclaire tous ceux qui sont dans la maison. Que de la même manière resplendisse votre lumière aux yeux des hommes, afin qu'en voyant vos bonnes oeuvres ils rendent gloire à votre Père qui est aux cieux » 4. Il n'est personne qui ne voie, ni qui ne sente les ténèbres denses du monde environnant — pensée et vie, philosophie et moeurs — et il n'est non plus personne qui ne doive confesser que rien ne les a jamais dissipées, rien ne les dissipera jamais, si ce n'est la lumière du Christ reflétée par le chrétien, quand il est conscient de sa vocation dans la vie, de sa mission dans le temps.

En dernier lieu, chers fils, pensez que si nous tous et toujours, pour témoigner de notre foi, nous évoquons la Croix, nous ne faisons pas cela seulement parce que le saint Bois, empourpré du sang de Jésus-Christ, est devenu pour nous, voire pour tous les hommes sans distinction, la gloire la plus éclatante : la Croix glorieuse dans les siècles et au-delà reste, ce qu'elle fut toujours, le symbole par excellence de tout ce qui, dans notre vie d'homme, s'appelle souffrance, humiliation, douleur. Tout cela est gloire, parce que Jésus a fait sien le calice de toutes les amertumes, mais une gloire qui n'enlève pas aux maux leur aiguillon perçant. Et nous chrétiens, nous professons que nous voulons faire nôtre le calice où Jésus a bu : en goûtant nous-mêmes ce qu'il a savouré pour l'amour de nous jusqu'à la lie.

Si Nous exaltons donc sincèrement ce qui fut un jour un honteux échafaud, signe d'infamie et de malédiction, et est aujourd'hui un étendard triomphant, voici, en conclusion, chers fils, ce à quoi vous engagent les honneurs que vous avez rendus à cet étendard : ils vous engagent à considérer les douleurs de la vie comme l'essence même de votre profession chrétienne. « Il n'est point de salut pour l'âme — écrivait le pieux auteur de 1'« Imitation de Jésus-Christ » 5 — ni d'espérance de vie éternelle si ce n'est dans la Croix ». S'il en est ainsi, si les facteurs essentiels de la religion de l'Evangile sont les sacrifices et les souffrances ; si la voie unique pour s'élever à une vraie noblesse et à une hauteur spirituelle est dans la loi de la douleur, cela veut dire qu'il n'est donné à personne de s'élever spiri-










tuellement en Jésus-Christ ni de jouir entièrement des fruits de son message, si l'on se rebelle contre ses propres douleurs, qui sont l'élément nécessaire du christianisme vécu, mais en même temps sa sève et son arôme, son âme et sa vie.

Aussi, vénérée par vous sur la montagne ou dans la plaine, avec toutes les démonstrations dont elle est digne, que la Croix du Christ, chers fils, soit votre gloire aux yeux des hommes. Mais songez que si le monument du Mottarone est un souvenir et une image, ce qu'il rappelle naturellement est votre passion de chaque jour, c'est-à-dire celle qui fleurit à chaque pas sur votre chemin et vous vient des choses, des hommes et de vous-mêmes, Dieu voulant, permettant qu'il en soit ainsi. En conséquence, pouvez-vous vous écrier en toute vérité avec l'Apôtre : « Quant à moi Dieu me garde de jamais me glorifier, si ce n'est de la Croix de Notre Seigneur Jésus-Christ, grâce à laquelle le monde est crucifié pour moi et moi au monde6 ».

Avec cette forte résolution, digne d'une noble vie terrestre et gage sûr de l'éternité, vous respirerez l'air si pur des hauteurs de la justice, de la sainteté chrétienne. Avec Jésus-Christ crucifié et glorieux, vous aurez la paix et la joie. Plus lumineuse que la Croix du Mottarone apparaîtra un jour, à vos yeux mourants, dans le cadre de la vie qui s'éteint, celle que vous aurez portée ici-bas, avec patience, avec la force de Celui qui l'a soutenue en vous ; avec confiance, vous regarderez le jour final où apparaîtra dans le ciel le signe du Fils de l'Homme, et II viendra au-dessus des nuages avec puissance et une grande majesté 7.

Avec ces sentiments, Nous implorons pour vous, sous les auspices de votre patron céleste, saint Gaudence, une pleine effusion de ces grâces qui furent méritées pour nous par Jésus-Christ sur l'échafaud sanglant de la Croix. Et au si digne Pasteur du diocèse, au Clergé séculier et régulier, aux Religieuses de tout ordre qui l'appuient par l'action et par la prière, à tous les fidèles de la grande Eglise novaroise, Nous donnons de tout coeur, en gage de Notre bienveillance, la Bénédiction apostolique.










MESSAGE AU PEUPLE BRÉSILIEN

(4 juin 1952) 1






Lors d'une audience accordée le 1 juin par Pie XII à M. Alexandre Marcondès Pilho, ancien ministre du Travail du Brésil, celui-ci présenta au Saint-Père le texte d'une nouvelle législation sociale basée sur l'enseignement social de l'Eglise, sollicitant des directives du Pape. C'est pourquoi le message suivant lui fut donné, et il fut lu le 17 juillet au Sénat Brésilien :

Pour autant que des yeux humains peuvent entrevoir les desseins de la Divine Providence, le Brésil a aujourd'hui devant lui un avenir grandiose.

D'autant plus grande est dès lors la responsabilité du peuple brésilien, en ce sens qu'il doit se conformer aux bonnes et paternelles intentions du Créateur.

Votre pays est grand et riche. Mais l'immensité de son territoire ne sera avantageuse pour vous que si elle est, et dans la mesure où elle le sera, la demeure heureuse d'un nombre toujours croissant de familles physiquement et spirituellement saines. De même que vos terres et vos champs sont immenses, qu'ainsi vos coeurs soient ouverts et grands pour recevoir ceux qui désirent venir chercher près de vous une nouvelle patrie, pour y vivre honnêtement avec ceux qui leur sont chers.

Dans les relations réciproques entre les divers Etats de la Fédération — si inégaux dans leur niveau de progrès —, il faut prendre pour règle directrice cette parole de l'Ecriture : « Aidez-vous les uns les autres à porter vos fardeaux 2 », afin que parvienne à toutes les extrémités de la patrie la force de la solidarité nationale, qui fera toujours davantage de vous une nation au vrai sens du mot.







» Gal., 6, 14.

7 Cf. Matth., 24, 30.



1 D'après le texte portugais de VOsservatore Romano, des 21 et 22 Juillet 1952.

2 Gal., 6, 2.

De la même façon les richesses de votre terre ne vous seront vraiment utiles que si la fertilité et les trésors de son sol généreux rendent le peuple brésilien vraiment et réellement maître de son destin.

Cela se réalisera si, dans une juste et saine liberté, en tous les secteurs de la vie, de l'économie à la culture, les Brésiliens continuent à employer en ce sens leurs énergies, avec intelligence, dans un effort tenace, vivant avec économie et surtout dans la confiance en Dieu.

C'est seulement de cette façon que vous pourrez être assurés contre l'injuste exploitation de la part d'autrui ; c'est seulement de cette façon que vous empêcherez la spéculation du capital étranger ou local de vous ravir le fruit de votre travail.

C'est seulement de cette façon que vous serez défendus contre l'arrogance d'Associations ouvrières anti-chrétiennes, qui d'un côté manifestent de l'intérêt pour le bien de l'ouvrier, mais de l'autre rendent uniforme et vont jusqu'à contrarier la productivité du travail national.

Le libre travail des Brésiliens, fait d'harmonie entre agriculture et industrie, entre la campagne et la ville, réglé par une forte classe moyenne, point de convergence et d'union des autres classes sociales : c'est cela seulement qui, avec l'aide de Dieu, vous permettra d'être toujours plus maîtres de votre destin.

Alors le Brésil sera le rempart de la paix intérieure et sociale, sûre garantie pour la paix du monde, et membre, au sein de la grande famille humaine, d'une fécondité inestimable pour l'échange des richesses matérielles et spirituelles.










LETTRE DE MONSEIGNEUR J.-B. MONTINI SUBSTITUT A LA SECRÉTAIRERIE D'ÉTAT A M. L'ABBÉ GRENET, AUMÔNIER GÉNÉRAL DE LA JEUNESSE OUVRIÈRE CHRÉTIENNE FRANÇAISE

(4 juin 1952) 1






Au nom de S. S. Pie XII et à l'occasion du 25e anniversaire de la J. O. C. française, Mgr Montini a adressé à M. l'Abbé Grenet, aumônier général, la lettre suivante :

A la veille des fêtes du XXVe anniversaire de la J. O. C. française, vous avez tenu à venir, M. le chanoine Guérin, et vous-même, assurer le Souverain Pontife de l'attachement respectueux et filial des jeunes travailleurs et des jeunes travailleuses catholiques de France. Le bienveillant accueil de Sa Sainteté vous fut une preuve tangible de l'estime en laquelle le chef de l'Eglise tient ce mouvement d'Action Catholique ; je suis heureux de vous renouveler aujourd'hui en son nom ses meilleurs encouragements et ses voeux.

Depuis vingt-cinq ans, la J. O. C. poursuit auprès de la jeunesse ouvrière, son oeuvre capitale d'éducation humaine et chrétienne. A l'âge de l'adolescence, où l'influence des milieux de travail et de formation professionnelle est souvent décisive, quel indispensable soutien pour ces jeunes que l'entrée dans le mouvement. Patiemment, à travers l'expérience journalière, et au moyen d'activités suggérées par elle, ils y apprennent à découvrir les réalités de la vie, à juger chrétiennement, à agir selon des convictions personnelles et mûries, et quelques années














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plus tard, ce sera une nouvelle génération jociste qui viendra grossir les rangs d'un laïcat catholique conscient de ses responsabilités vis-à-vis de l'Eglise, comme vis-à-vis de son milieu et de son pays.

Aussi le Saint-Père se réjouit-il vivement de savoir qu'après les années difficiles de la guerre et de l'après-guerre, un nombre croissant de militants et de militantes bénéficient, dans les deux branches du mouvement, d'une telle formation, pleinement adaptée à leur condition particulière sans être pour autant compromise par le particularisme de classe. Il se félicite, à cet égard, des contacts méthodiques que vous entretenez avec l'Association catholique de la jeunesse française et souhaite que se poursuive un si bel effort de collaboration fraternelle.

Mais ce caractère éducatif du mouvement ne peut être séparé de sa fin apostolique. Quel est, en effet, l'idéal des Jocistes, sinon d'être, par leur active coopération à la grâce rédemptrice, des ferments de renouveau chrétien au coeur même de la jeunesse travailleuse ? Pour servir cet idéal, le premier soin des militants et des militantes est d'aller aux sources de la vie surnaturelle, grâce aux retraites, récollections et sessions qui jalonnent l'année ; leur premier souci est de demeurer enfants de l'Eglise, finalement dociles à la hiérarchie qui leur marque tant de confiance. Animés de cet esprit, ils peuvent alors se pencher avec réalisme sur les multiples problèmes qui, dans la famille, le travail, les loisirs, conditionnent de fait les possibilités de vie chrétienne de la jeunesse ouvrière ; et, quand ils font entendre leur appel pour le respect de cette jeunesse, de son avenir, de sa santé et de son honneur, quand ils s'efforcent de donner à leurs frères de quartier ou d'atelier le témoignage commun d'un christianisme vivant et rayonnant, leur but, par-delà les objectifs immédiats, est de permettre à tous les jeunes travailleurs et jeunes travailleuses d'accéder à une condition d'existence plus conforme à leur vocation de fils de Dieu et de découvrir dans les milieux où ils grandissent le vrai visage du Christ et de l'Eglise. A ce titre, le mouvement jociste se révèle comme une forme providentielle de la présence de l'Eglise dans le monde du travail, où elle est, hélas ! trop souvent ignorée ; il offre aux paroisses, avec lesquelles s'établit une étroite collaboration, la possibilité d'élargir singulièrement leur champ d'apostolat.

Devant de telles perspectives, le Saint-Père encourage spécialement les prêtres, aumôniers jocistes, à se consacrer avec zèle comme avec une discrétion toute sacerdotale, à cette oeuvre essentielle de formation des militants et militantes et d'animation spirituelle du mouvement. N'est-ce pas une tâche éminemment digne du prêtre que de faire ainsi grandir le Christ dans l'âme de ces jeunes qui se préparent à être demain, dans toute leur vie de travailleurs chrétiens, d'authentiques apôtres de la classe ouvrière ? Le Saint-Père est donc particulièrement heureux d'apprendre que cette année jubilaire sera marquée par une session sacerdotale consacrée à la préparation des aumôniers à leur fonction d'éveilleurs d'âmes et d'éducateurs.

Enfin, considérant les résultats substantiels acquis au cours de ces vingt-cinq ans, le Souverain Pontife félicite tous les jocistes et anciens jocistes qui ont contribué avec tant de dévouement à cette action apostolique, et sa pensée va très spécialement aux permanents et permanentes dont il sait l'admirable esprit de sacrifice au service d'une cause qui leur est chère. A tous ces jeunes et à leurs dirigeants, à leurs aumôniers, à M. le chanoine Guérin, auquel le jocisme français doit tant de gratitude, et à vous-même, Sa Sainteté renouvelle de grand coeur la Bénédiction apostolique.

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ALLOCUTION A LA FÉDÉRATION INTERNATIONALE DES ASSOCIATIONS TOURISTIQUES DES CHEMINOTS

(5 juin 1952) 1






Le VIe Congrès de cette Fédération Internationale s étant tenu à Rome, les participants furent reçus en audience par Pie XII, qui leur déclara :

Nous accueillons bien volontiers, Messieurs, l'hommage de votre visite à l'occasion du VIe Congrès de la Fédération Internationale des Associations touristiques des Cheminots. Ce ne sont pas moins de quatorze nations européennes, qui se trouvent en ce moment représentées par vous. Et derrière vous, sur la carte d'Europe, Nous entrevoyons le merveilleux réseau ferroviaire, qui à travers les monts et les fleuves relie les civilisations les plus diverses, assurant avec la circulation de convois innombrables l'échange des biens matériels et spirituels. Sur ce réseau travaillent actuellement des centaines de milliers d'employés et de techniciens, se relayant jour et nuit pour assurer un trafic ininterrompu, responsables, chacun pour sa part, de tant de denrées précieuses et de tant de vies humaines. Bien peu d'entreprises comportent une telle variété d'emplois, une telle coordination d'activités, en vue d'un service aussi important. Ceux qui les premiers, au début du siècle dernier, préconisaient l'idée, alors étrange, d'installer sur des chemins de fer des carrosses à vapeur ne se doutaient certainement pas de l'importance sociale de leur découverte. Une très vaste corporation est née, qui se ramifie toujours davantage et crée pour ses dirigéants des obligations nouvelles envers toutes les branches de ses employés et envers leurs familles.

Parmi les ressources particulières qui pouvaient être mises au service des cheminots, il y avait tout d'abord l'organisation même des chemins de fer. Il eût été vraiment dommage que l'on ne fît pas profiter les cheminots, non seulement des commodités de circulation qui depuis longtemps leur sont largement accordées, mais aussi de tourisme proprement dit, c'est-à-dire de voyages organisés dans un but principalement culturel. Nous avons eu récemment l'occasion d'exposer quelques réflexions à ce sujet devant les groupements touristiques italiens 2, et Nous ne pouvons ici que rappeler ses avantages pour le développement de l'esprit, l'ouverture du sens social, la diminution des préjugés, l'estime réciproque des peuples, l'élévation de l'âme. Aussi apprécions-Nous et louons-Nous les activités sociales et culturelles, qui se développent en chacune des Associations que vous représentez. L'idée de les avoir groupées en Fédération Internationale est particulièrement heureuse, car la culture dépasse aujourd'hui plus que jamais les limites d'une nation et les problèmes se posent de plus en plus sur le plan mondial. Sans votre Fédération, bien peu de cheminots sans doute franchiraient les frontières de leur pays. Grâce à vous, au contraire, leur goût de voyager se trouve éclairé et guidé, des facilités spéciales leur sont procurées, et Nous augurons les meilleurs fruits d'une collaboration toujours plus étroite entre les Associations Touristiques de Cheminots.

Il fut un temps, hélas, où le même mot « hostis » désignait l'étranger et l'ennemi. Nous n'en sommes plus là, heureusement, et la civilisation chrétienne a toujours combattu les égoïsmes nationaux, mais il s'en faut de beaucoup, n'est-il pas vrai, que les peuples se connaissent et s'estiment comme ils le devraient. Puissiez-vous du moins, Messieurs, être parmi les ouvriers et employés très nombreux, qui en chaque pays relèvent de vos services, des agents toujours plus efficaces d'une culture humaine plus large et d'une amitié fraternelle plus profonde. C'est le voeu que Nous prions Dieu de ratifier au moment de vous accorder à vous-mêmes et à vos familles, aux Associations que vous représentez et à tous ceux qu'elles atteignent, Notre paternelle Bénédiction apostolique.












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ALLOCUTION AUX SCOUTS A L'OCCASION DE LEUR I8' CONGRÈS

(6 juin 1952) 1




Les Chefs Scouts catholiques assemblés à Rome à l'occasion de leur 1er Congrès qui avait pour thème « L'Apostolat dans le Scoutisme et par le Scoutisme », furent reçus en audience par Pie XII, qui leur fit l'adresse que voici :

Vous avez choisi Rome, chers fils, comme lieu de réunion de la Conférence Internationale du Scoutisme Catholique, et c'est la première fois que vos dirigeants nationaux se rassemblent dans la Ville éternelle. Vous deviez d'ailleurs y traiter un sujet qui vous appelait de préférence près du Vicaire de Jésus-Christ : « L'apostolat dans et par le scoutisme ». Soucieux de répondre aux pressants appels que Nous avons adressés à tous les catholiques, vous voulez prendre toute la responsabilité qui vous revient dans l'apostolat de l'Eglise, noble et généreuse résolution, tout à fait conforme à l'esprit du scoutisme.

Chacun sait en effet que, dès le début, la religion y a tenu la première place ; mais vous avez conscience également de ce que le catholicisme ajoute de force et de précision à l'oeuvre édu-catrice que vous poursuivez. Il ne s'agit pas seulement pour vous de former de meilleurs citoyens, plus actifs, plus dévoués au bien commun de la cité temporelle, il faut aussi former de meilleurs fils de l'Eglise. Or dans l'Eglise catholique la mission apostolique descend de la hiérarchie aux fidèles, et de nos jours tous les fidèles, selon leurs moyens, sont appelés à collaborer à cet apostolat.

A vrai dire, les garçons ne sont pas à l'âge de l'apostolat organisé, mais ils doivent y être préparés.

L'expérience d'une trentaine d'années a amplement démontré la valeur formatrice du scoutisme. Que de belles figures de grands chrétiens, de héros et de chefs, que de vocations religieuses et sacerdotales ont pris naissance dans les Troupes ! Attentifs cependant à combattre les déviations possibles, vous avez constamment revisé les méthodes et rappelé les principes. Si le scout aime la nature, ce n'est pas en égoïste ou en dilettante, ou simplement pour y jouir de l'espace, de l'air pur, du silence, de la beauté du paysage ; s'il y prend le goût de la simplicité, d'une saine rudesse en opposition avec la vie artificielle des villes et les servitudes de la civilisation mécanisée, ce n'est pas pour fuir les obligations de la vie civile. S'il cultive d'excellentes amitiés dans un groupe choisi, ce n'est pas pour refuser les contacts et les services, bien au contraire. Rien ne serait plus éloigné de son idéal. S'il aime les réalités concrètes, ce n'est pas non plus par mépris des idées et des livres. Il a souci d'une culture complète et harmonieuse, en rapport avec ses talents et les nécessités actuelles.

Pour atteindre ce but, la Promesse d'observer la Loi scoute, avec la grâce de Dieu, est un levier puissant, qui soulève la jeunesse au-dessus des faiblesses et des tentations. Basée sur les fondements de la loi naturelle, la Loi scoute, par l'éducation de l'effort, par la pratique quotidienne de bonnes actions volontaires, fait appel à la droiture et à la fidélité dont les jeunes ont si grand désir et qu'ils sont heureux d'être aidés à garder fermement. Elle leur fait prendre en horreur la fraude, le mensonge, la dissimulation. Les jeunes, sentant grandir leurs forces, sont naturellement généreux ; ils veulent lutter, se mesurer aux difficultés ; ils éprouvent le besoin de donner, de se donner, de se dépasser, et trouvent dans la pratique de la vie en plein air et dans la recherche de l'habileté manuelle un aliment adapté à leur âge. La pureté, favorisée par un tel climat moral, leur est aussi nettement définie et donne à leur énergie la réserve et la délicatesse chrétiennes.

Qui pourrait nier l'opportunité d'une telle éducation dans une civilisation, où régnent l'égoïsme, la défiance, la lâcheté, l'amour effréné du plaisir ?

Le premier apostolat des scouts est celui de l'exemple dans la Troupe. En se formant personnellement et collectivement, ils sont déjà au service de l'Eglise et façonnent l'instrument de leur apostolat futur. Plus les fondements qu'ils posent seront

larges et profonds, plus l'édifice de leur vie chrétienne sera solide et imposant ; plus le rayonnement de leurs qualités sera étendu, plus on fera appel à leur compétence pour la gloire de Dieu et l'honneur de l'Eglise.

Mais cette formation doit dès leur jeune âge, par les méthodes concrètes d'observation et de réflexion qui leur conviennent, être ouverte sur les réalités sociales, naturelles et surnaturelles. Ils doivent apprendre à vivre dans la société moderne, et pour cela être prudemment informés sur ses qualités et ses défauts. Ils doivent particulièrement se préparer à prendre dans leur milieu et dans leur communauté paroissiale la part d'influence et de responsabilité, dont ils sont capables. En somme, la formation du caractère, qui est la fin principale du scoutisme, doit avoir une orientation franchement sociale et apostolique. Elle doit préparer à servir le prochain à la fois dans les contacts personnels et dans les institutions civiles et religieuses.

L'amour que les scouts ont toujours eu pour la Personne divine du grand Chef, qui est la Route, la Vérité et la Vie, doit demeurer leur lumière et le soutien de leurs efforts quotidiens.

C'est ce que Nous Lui demandons de tout coeur, afin qu'au jour des responsabilités II les trouve toujours prêts. Que dès aujourd'hui, sur vous-mêmes ici présents, sur tous les groupements nationaux que vous représentez, sur les chefs, sur les aumôniers et sur tous les scouts descendent les grâces qu'implore Notre Bénédiction apostolique.










ALLOCUTION A DES PÈLERINS AMÉRICAINS

(7 juin 1952) 1






Son Eminence le Cardinal Spellman, Archevêque de New-York, avait assisté avec 600 pèlerins des Etats-Unis au Congrès Eucharistique de Barcelone ; ce groupe vint ensuite à Rome et le Pape leur dit quelques mots :

Que pouvons-Nous dire pour ajouter à la profonde joie spirituelle et à la ferveur de pieux pèlerins, revenant comme vous d'un Congrès Eucharistique ? Vous avez rendu votre hommage de louange et d'adoration à votre Dieu dans le Saint Sacrement, au Fils de la Vierge Mère, lorsqu'il était exposé sur le trône élevé de l'autel ; et Nous sommes sûr que vos âmes se sont largement ouvertes pour recevoir les riches dons du Saint-Esprit qui se répandaient alors avec tant d'abondance.

Nous évoquons une peinture exquise et délicate dans sa beauté et son charme, que peut-être vous connaissez. La figure haute et droite de la Mère Bénie élève son Enfant divin à la hauteur de son épaule et soutient Son petit bras et Sa main voulant donner une bénédiction à tous ceux qui viennent à Lui. Un ostensoir vivant, peut-on dire.

De retour à votre pays, à vos villes et à votre entourage, pourquoi ne pourriez-vous tenir le Christ bien haut, afin que tous autour de vous puissent Le voir, puissent Le reconnaître dans vos paroles, dans votre conduite, dans toute votre personne, puissent en arriver à connaître Ses enseignements, à savoir que « la grâce de Dieu, notre Sauveur, s'est manifestée à l'humanité, nous enseignant à abandonner les pensées inconvenantes et les désirs mondains et à vivre dans ce monde une vie d'ordre, de justice et de sainteté2 », conscients de l'héritage qui nous
















revient comme fils adoptifs de Dieu à travers Jésus-Christ ? Que cette pensée, chers fils, soit la mesure de la résolution que vous rapportez chez vous après ce pèlerinage.

Notre coeur va avec une affection spéciale à vous, Notre cher fils, actif et énergique Cardinal Archevêque d'une métropole mondiale, mais aujourd'hui guide et père de ces pieux pèlerins de diverses localités ; à vous Vénérables Frères en l'Episcopat, et aux membres du clergé présents ici et sur tout votre territoire, qui collaborez avec Nous dans la tâche de l'apostolat du Christ. Avec un sentiment très sincère de gratitude et de confiance dans les paroles du grand Prêtre Suprême, Nous prions : Notre Père, « gardez-les saints dans la vérité ; c'est votre parole qui est vérité » 3.

Et maintenant, en implorant le Sacré-Coeur de Jésus de vous garder tous dans Son amour et en gage des grâces dont vous et ceux qui vous sont chers avez le plus besoin, Nous sommes heureux de vous donner la Bénédiction apostolique.












ALLOCUTION AUX PÈLERINS VENUS A ROME POUR LA BÉATIFICATION DE SOEUR MARIE BERTILLE BOSCARDIN

(9 juin 1952) 1






Le dimanche 8 juin eut lieu à Saint-Pierre la béatification de Soeur Marie Bertille Boscardin 2. Le lendemain, aux pèlerins venus à cette occasion à Rome, le Souverain Pontife déclara :

Comme Jean Bosco, Joseph Sarto, Marie Goretti, la Bienheureuse Bertille Boscardin, des Soeurs Enseignantes de Sainte Dorothée, Filles des Sacrés-Coeurs de Vicence, est une humble paysanne de notre terre bénie d'Italie. Dans la splendide gerbe de fleurs sylvestres que nos campagnes chrétiennes offrent sans cesse au Père céleste, elle vient s'ajouter, encore plus simple que toutes les autres, mais non moins agréable à Dieu, non moins influente sur Son coeur, non moins attirante pour les âmes, que la grâce aide constamment à devenir meilleures.

Quelle joie cela a été pour Nous, hier, d'élever aux honneurs des autels cette figure si pure de perfection chrétienne ! Puisse-t-elle réaliser en vous et par vous le voeu de son coeur : « Que je me fasse sainte et que je conduise beaucoup d'âmes à Jésus ! ». S'il est en effet un modèle qui n'effraie point, c'est bien la nouvelle Bienheureuse. Dans son humilité, elle a défini « sa route la voie charretière, la plus ordinaire », celle du catéchisme.

Vous savez bien l'amour que cette candide enfant a eu pour son petit livre de catéchisme. Non seulement elle prenait plai-












> lean, 17, 17.

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soeur marie bertille boscardin



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sir à en écouter l'explication, mais, dès l'âge de dix ans, la jeune Annette commença à l'enseigner aux autres. Alors qu'elle n'avait pas l'esprit ouvert aux matières scolaires, elle assimilait avec un sûr instinct surnaturel la doctrine chrétienne. Celle-ci l'intéressait au-dessus de tout, et elle comprenait avec l'intelligence d'un coeur pur les choses de Dieu. Elle lisait souvent le catéchisme chez elle, spécialement le dimanche à son retour des cérémonies religieuses. Lorsqu'elle fut obligée durant la première guerre mondiale d'abandonner Trévise et ses chers malades, la Bienheureuse, plus soucieuse des autres que d'elle-même, ne prit rien de ses affaires personnelles, mais demanda la grâce d'emporter avec elle le catéchisme. Ce petit livre précieux, quoique froissé par l'usage, serait resté avec elle dans sa tombe, si, alors que les soeurs veillaient la dépouille, la Supérieure Générale n'avait fait changer par un habit neuf son pauvre vêtement usé, dans la poche duquel fut trouvé ce petit livre qui l'avait suivie jusqu'à la mort.

Puissiez-vous tous, chers fils et filles, qui Nous écoutez, tirer profit de cet exemple ! Spécialement vous, les mères de famille et les catéchistes, qui expliquez la doctrine chrétienne aux enfants. Puissiez-vous la faire aimer comme elle doit l'être, l'aimer vous-mêmes et l'expliquer avec le respect et la ferveur que méritent les choses de Dieu ! Ce tout petit livre a par lui-même une plus grande valeur qu'une ample encyclopédie ; il contient les vérités qu'on doit croire, les devoirs qu'on doit accomplir, les moyens pour la sanctification personnelle. Qu'y a-t-il de plus important sur terre ? Il est le livre de la sagesse, l'art de bien vivre, la paix de l'âme, la sécurité dans l'épreuve. Il nous enseigne comment plaire à Dieu : la Bienheureuse Bertille l'avait compris et ce fut sa félicité.

Non seulement elle avait compris son catéchisme, mais elle vivait par lui. La grâce abondante de Dieu, favorisée par l'exemple d'une mère profondément chrétienne, développa dans son âme un amour intense de la prière : elle priait chez elle, elle désirait ardemment accompagner sa mère à l'église, et quand elle put y aller seule, on la vit souvent passer recueillie dans les rues du village pour se rendre à la maison du Père céleste. Le jour béni où ses parents la conduisirent à Vicence pour la présenter à la Maîtresse des postulantes de l'Institut Farina, dès qu'elle fut entrée dans le couvent, elle alla tout de suite, sans dire un mot, s'agenouiller au pied de l'autel. Comme l'aiguille aimantée cherche le nord, de même elle se tournait, comme par instinct, vers la présence de Dieu.

On ne nota rien d'extraordinaire dans cette humble novice, si ce n'est un amour de Dieu de plus en plus intense, de plus en plus impérieux et lucide. Elle résumera sa félicité d'être religieuse dans ces simples paroles : « Je veux du bien à tous, spécialement aux Supérieurs, et plus qu'à tous au Seigneur, pour lequel j'ai quitté mon père et ma mère... » « Oh ! quel plaisir de faire la volonté de Dieu !... » « Oh ! si vous saviez combien de gloire on peut rendre à Dieu en un seul instant ! »

L'esprit large, simple et solide que le pieux fondateur inculqua aux Religieuses Enseignantes de Sainte Dorothée, Filles des Sacrés-Coeurs, n'exige d'elles qu'une vie intérieure intense et pure, un véritable amour de Dieu qui s'épanche au service du prochain dans les oeuvres dictées par l'obéissance. C'est l'esprit que notre Bienheureuse poussa jusqu'à la perfection.

Avant tout, l'union avec Dieu : Soeur Bertille fut un modèle de recueillement et de prière dans la vie religieuse, comme elle l'avait été dans sa famille et dans sa paroisse : « Quand je me tais, s'écriait-elle, je prie bien et je me trouve bien. » Elle agissait pour Dieu, uniquement pour Lui : « Mon Jésus, écrivit-elle, je vous en conjure par vos saintes plaies, faites-moi plutôt mourir mille fois, que de faire une seule action pour être vue. »

La sincère obéissance d'Annette l'avait fait parfois tourner en ridicule chez elle et au village ; et elle fut même méconnue, réprouvée et humiliée jusque par certaines compagnes de sa Congrégation ; mais elle était prête à tout pour rendre gloire au Seigneur : « Jésus Crucifié est mon modèle » disait-elle. Elle supporta jusqu'à l'extrême limite un mal intérieur, qu'avec son expérience d'infirmière elle avait dû reconnaître depuis longtemps. Quand elle ne put plus le cacher, il était déjà trop tard : elle avait tout donné !

Voici jusqu'où le petit catéchisme de la Bienheureuse Bertille Boscardin l'avait conduite par « la voie charretière ». Point d'extases, point de miracles dans sa vie ; mais une union avec Dieu sans cesse plus profonde, dans le silence, dans le travail, dans la prière, dans l'obéissance. De cette union venait l'exquise charité qu'elle manifestait aux malades, aux médecins, aux supérieurs, à tous. Elle avait si bien cherché le royaume de Dieu en elle-même, que tout le reste lui fut donné par surcroît. Quel exemple et combien digne d'être imité et suivi !










Pie XII 1952 - RADIOMESSAGE AU CONGRÈS EUCHARISTIQUE INTERNATIONAL DE BARCELONE