Pie XII 1953 - DISCOURS AUX PARTICIPANTS DU CINQUIÈME CONGRÈS DE PSYCHOTHÉRAPIE


ALLOCUTION AU SÉMINAIRE PONTIFICAL FRANÇAIS DE ROME

(16 avril 1953) 1



Les 14 et 15 avril 1953, le séminaire — dit Santa Chiara — célébrait son premier centenaire 2. Aussi le lendemain, professeurs, élèves et anciens élèves étaient reçus en audience par le Saint-Père :

Le centenaire du Séminaire Pontifical Français de Rome, qui vous réunit tous autour de Nous, Vénérables Frères et fils très chers, est un événement, dont Nous voulons être le premier à rendre grâce. Ce n'est pas en vain que votre institution porte le titre de Pontifical, qui lui fut conféré en 1902 par Notre grand Prédécesseur Léon XIII. Dès 1859, lorsque le Saint-Père Pie IX érigeait canoniquement le Séminaire Français de Rome, il ne faisait que mettre le sceau à une entreprise entièrement destinée à resserrer les liens du clergé de France et de la France elle-même avec la Papauté. Tel avait été en effet l'ardent désir des promoteurs de la fondation désormais centenaire : la lettre collective des Evêques réunis en 1853 au Concile de La Rochelle, priant le Pape d'approuver une semblable initiative, en fait foi. Voici donc bien des titres à Notre affection, sans tenir compte encore de tous ceux qu'un siècle de filiale dévotion au Saint-Siège y a ajoutés.

La Divine Providence, qui ne se trompe jamais dans ses voies mystérieuses, avait préparé les cadres du futur Séminaire en restaurant la Congrégation du Saint-Esprit par l'oeuvre du Vénérable Serviteur de Dieu François-Marie-Paul Libermann, dont vous fêtiez l'an dernier le centenaire de la mort. Il n'a pas vu en effet se réaliser son désir d'établir sa Congrégation à Rome ; mais un de ses fils les plus éminents et les plus pénétrés de son esprit, Louis-Marie Barazer de Lannurien, put mettre ce projet à exécution. L'année même de la fondation, en 1853, les quinze premiers élèves, reçus par le Saint-Père, s'entendaient dire : « Si douze prêtres ont suffi pour convertir le monde, que ne feront pas quinze prêtres pour leur pays ! » Aujourd'hui, cent ans plus tard, ce ne sont pas quinze prêtres, mais plus de trois mille, qui ont été formés à Santa Chiara, et Nous pouvons bien dire que la prédiction de Notre Prédécesseur s'est amplement vérifiée : quelle influence profonde n'ont pas exercée dans les Instituts catholiques et dans plus de quarante grands Séminaires les pléiades de professeurs venus de votre illustre Collège ! Que dire du zèle pastoral et de l'autorité doctrinale de tant d'Evêques, d'Archevêques, et de plusieurs Cardinaux ! S'ils avaient pu répondre tous à votre invitation, cinquante-deux Evêques vivants seraient ici pour dire bien haut leur reconnaissance envers le Séminaire Pontifical Français de Rome. Ils seraient venus de France pour la plupart, mais aussi des Missions et d'ailleurs, car, accueillants pour d'autres nations et d'autres cultures, vous avez toujours compté parmi vous des étrangers à votre pays, réalisant ainsi dans votre maison quelque chose de la grande union catholique dont Rome est l'instrument et le centre.

Cette importance et ce rôle de Rome, vous y croyiez et les sentiez avant même de venir dans la Ville éternelle ; mais vous le constatez de vos yeux maintenant et le comprenez davantage chaque jour, à mesure que vous vous pénétrez de sa doctrine, de son histoire et de son esprit. Lorsque vous venez dans la Basilique Vaticane vénérer et prier saint Pierre, lui demandant de bénir votre sacerdoce, vous trouvez dans la majesté même de l'édifice, dans le décor et les oeuvres d'art, dans les textes fondamentaux qui ornent la grande coupole, un véritable traité de Romano Pontifice. Les voix les plus éloquentes de la Tradition vous invitent avec saint Cyprien à aimer toujours plus « cette chaire de Pierre et cette église principale, d'où l'unité du sacerdoce tire son origine 3 ». Plus près du foyer, la lumière est plus intense et plus pure. Près du gouvernement suprême de la Sainte Eglise, la sagesse séculaire qui doit présider à l'exercice du sacerdoce, pénètre plus facilement et plus profondément les esprits et les coeurs.

Profitez bien, chers fils, des années précieuses que vous passez à Rome. Ne vous contentez pas du travail intellectuel, qui demeure toutefois le principal. Les mouvements, les institutions, le souvenir de tant de saints, qui ont parcouru les mêmes rues que vous, prié dans les mêmes églises, exercé le ministère sacerdotal, sont autant d'enseignements, que vous ne trouverez nulle part réunis avec une telle profusion.

Il serait superflu de Nous étendre plus longuement sur un sujet, que vos maîtres et vos directeurs vous exposent avec l'autorité de leur science et l'exemple de leur vertu. L'enseignement que vous recevez à l'Université Grégorienne, la formation spirituelle et pastorale qui vous est donnée par la Congrégation du Saint-Esprit, feront de vous, selon la formule bien connue de Claude Poullart des Places, des prêtres prêts à tout : in manu Proelatorum parati ad omnia. La grandeur du sacerdoce est dans l'imitation de Jésus-Christ. Pénétrez-vous de son humilité devant le Père, si vous voulez vraiment sauver les âmes avec lui. Les âmes ont besoin d'exemples, plus éloquents encore que la doctrine. Nous savons le zèle qui brûle vos coeurs, et Nous sommes sûr que vous ne négligez rien de ce qui peut servir les âmes. Pourvu que vous vous efforciez de reproduire en vous les sentiments de Jésus-Christ ", vous pouvez être professeurs, directeurs d'oeuvres, ou tout ce que la Hiérarchie vous demandera pour le service de l'Eglise, vous aurez rempli selon vos forces la fonction sublime du sacerdoce, et par là même vous aurez été, à la suite de tant de saints prêtres et d'illustres Prélats qui vous ont précédés, de dignes élèves du Séminaire Pontifical Français de Rome.

C'est dans ce but qu'à vous-mêmes ici présents, à tous vos anciens dispersés à travers le monde, à tous vos maîtres et à tous ceux qui vous sont chers, Nous accordons du fond du coeur Notre paternelle Bénédiction apostolique.







Sancti Cypriani, Ep., LIX, c. 14. - Ed. Hartel, Cap. Script. Eccl. Lat., vol. 3. n 2. 683.



Phil., 2, 5.


RADIOMESSAGE AU CONGRÈS EUCHARISTIQUE DE SYDNEY

(19 avril 1953) 1



Le Congrès eucharistique d'Australie, se tenant en présence de Son Em. le Cardinal Gilroy, archevêque de Sydney et Légat pontifical, clôturait ses cérémonies en ce 19 avril 1953, dimanche du Bon Pasteur. Un message parvint de Rome à l'assemblée.

C'est pour vous une journée du souvenir, très chers fus d'Australie, — journée de souvenirs bénis, qui portent l'âme à chanter à Dieu sa louange et sa reconnaissance. Notre Cher Fils, votre estimé Cardinal Archevêque, est au milieu de vous comme Notre Légat personnel, vous manifestant combien Nous sommes près de vous en cette célébration jubilaire.

Voici cent cinquante ans que pour la première fois la sainte Messe fut célébrée sur vos rivages ; et l'on peut aisément imaginer la profonde émotion de ces exilés affamés de l'Eucharistie, quand leur fut enfin accordé le privilège si désiré de se prosterner en adoration devant la divine Victime du Golgotha, élevée par les mains de leur prêtre. Leur Seigneur eucharistique était de nouveau avec eux. La sainte Messe avait forgé un lien qui les unissait par delà les mers à ceux qui leur étaient chers, et sans nul doute les montagnes et les vallées de leur terre natale faisaient écho à la joie qui emplissait leurs coeurs.

Il y a vingt-cinq ans, chers fils, vous commémoriez cet événement mémorable de l'histoire d'Australie. Au milieu d'un grand concours de fidèles venus de près et de loin, dans un pittoresque spectacle, en de savantes assemblées de prélats et de laïcs, et finalement portés par la liturgie solennelle et élevante de l'Eglise, vous donniez une preuve magnifique et publique de votre foi et de votre gratitude envers la divine Bonté. Et qui pourra dire toutes les grâces et les bénédictions qui, des autels érigés aux quatre coins de votre continent, se sont répandues dans les âmes, au cours des décades écoulées depuis ce premier Saint Sacrifice ?

La Messe, votre Messe quotidienne, évoque des souvenirs qui remontent bien au-delà de ce court espace d'un siècle et demi. Elle vous transporte en esprit dans « un grand cénacle apprêté » d'une maison de Jérusalem. C'est la nuit du Jeudi, voici près de deux mille ans. Jésus avait mangé l'Agneau pascal avec les Apôtres. « Alors II prit du pain, le bénit, le rompit, et le leur donna en disant : Ceci est mon Corps, qui va être livré pour vous ; faites ceci en mémoire de moi. Et de même avec le calice, à la fin du repas : Ce calice, dit-il, est la nouvelle alliance en mon sang qui va être répandu pour vous2. » En cette nuit de Jeudi Saint, nuit de trahison encore que de triomphe sans égal, le Sacré-Coeur de Jésus nous demandait à tous, à travers les Apôtres sur lesquels il allait fonder son Eglise 3 de nous souvenir du sacrifice qu'il acceptait, avec tant d'amour, tant d'ardeur même, pour notre salut ; de le commémorer chaque jour, du lever au coucher du soleil, tout au long des siècles et à travers les cinq continents de son Royaume sur terre.

Et avec quelle inébranlable fidélité prêtres et peuple d'Australie se sont souvenus ! Elle est pour tous à lire et à méditer cette histoire de votre indéfectible dévotion à la sainte Messe à travers les difficiles premières années de votre vie nationale. Il est pour tous à voir et à entendre, en cette heure opportune de grâces abondantes, ce vaste Congrès de vos fils et de vos filles, jeunes et vieux, rassemblés autour de la table du Banquet du Sauveur, pour offrir encore une fois cet unique Sacrifice eucharistique, y participer et manger cette Pâque avec leur Roi ressuscité.

Mais que le monde reconnaisse avec Nous, pour son plus grand réconfort et son assurance, que vous êtes aujourd'hui ici assemblés dans la prière et une volonté d'apostolat pour bien autre chose qu'une fête du souvenir. C'est aussi l'heure solennelle des résolutions ! Pour l'Australie, comme pour toute nation dans la grande famille des âmes du Seigneur, Jésus-Christ ne



Luc, 22, 12 et 19-21. Eph., 2, 20.

peut être un simple souvenir, si tendrement et fidèlement conservé soit-il dans les pages de notre histoire.

Souvenez-vous de moi, demande-t-il en effet ; mais souvenez-vous, surtout, que je suis avec vous tous les jours ; demeurez en mon amour 4 ! Le Christ eucharistique est une réalité vivante, aimante, au plus intime de nous-même. L'unique sacrifice rédempteur du Calvaire, renouvelé chaque jour en Son Corps qui est l'Eglise, fait naître en toute vérité et conserve vivante la charité du Christ en ce merveilleux Sacrement pour l'aliment de nos âmes. Réellement présent sur nos autels, dans nos tabernacles, présent dans les coeurs et dans les maisons de tous ceux qui sont un avec Lui par la divine grâce, il nous offre personnellement son amour et implore le nôtre. C'est par là que tous les hommes sauront que vous lui êtes fidèles, que vous lui appartenez ; non pas seulement que vous vous souvenez du Christ et célébrez ses paroles et ses oeuvres de salut, mais que vous le revêtez 5, que vous vivez sa vie d'amour, que vous vous aimez les uns les autres en Lui, comme Lui-même continue à vous aimer tous '. La répercussion sur l'histoire humaine de cet universel amour de sacrifice du Christ eucharistique, vivant dans les coeurs de ses saints prêtres et de ses apôtres laïques, fut immense, comme le sait si bien Notre chère Australie. Et qui mettra des bornes aux futures conquêtes de ce coeur plein d'amour ?

Pourvu que votre résolution soit forte, que vos coeurs ne Lui manquent pas en dédaignant l'aide toute-puissante de sa grâce, la charité du Christ continuera à travers vous et vos enfants, sa mission bénie d'unité et de paix 7, jusqu'à ce que le monde soit enfin délivré des puissances des ténèbres qui le menacent de ruine. Cette charité renforcera les liens précieux de votre vie de famille et par elle le foyer chrétien continuera à être ce sanctuaire de la prière, du travail et de l'amour, que Dieu a voulu. Elle transformera vos relations industrielles, vos plans économiques et politiques, en les ordonnant autour des besoins et des prérogatives sacrées de la personne humaine. Elle fournira l'ardeur et la force qui vous sont nécessaires pour les tâches internationales d'endurance, de sympathie et de solidarité que vous traçait récemment votre dévouée Hiérarchie.

Loué et remercié soit à chaque instant le Très Saint et Divin Sacrement !

Pour tout ce que la charité eucharistique de Notre-Seigneur a signifié pour vous, pour tout ce que vous êtes résolus à lui faire signifier pour le Commonwealth d'Australie et pour un meilleur monde futur, qu'il soit éternellement adoré, remercié et aimé !

Afin de raviver ces précieux souvenirs et affermir cette forte résolution, Nous vous accordons maintenant du fond du coeur, Vénérables Frères et Fils très aimés, ainsi qu'à tous ceux, proches et lointains, qui vous sont chers, Notre Bénédiction apostolique 8.





Lettre au Cardinal Gilroy, p. loi.


ALLOCUTION AU CONSEIL SUPÉRIEUR DES OEUVRES MISSIONNAIRES

(19 avril 1953) 1


amis des missions et ceux qui y travaillent doivent garder une confiance inébranlable, car Celui qui combat pour nous est plus grand que notre adversaire et les promesses divines ne peuvent pas être vaines.

Nous prions le Dieu tout-puissant pour qu'il conduise vos diverses entreprises jusqu'à leur heureux achèvement et invoquant sur vous la protection de Celui qui donne la sagesse et la force, Nous vous accordons de tout coeur, en gage de réconfort céleste, la Bénédiction apostolique, à vous-mêmes et à tous ceux qui par leurs prières, leurs travaux et leurs offrandes soutiennent les activités missionnaires.





Tous les ans, les membres du Conseil Supérieur des Oeuvres Missionnaires se réunissent à Rome. Lors de cette conférence, le Conseil est reçu en audience par le Pape.

Nous Nous réjouissons de vous voir réunis autour de Nous, Vénérables Frères et chers Fils, si dignes de bienveillance et d'honneur, membres des Conseils Supérieurs des Oeuvres Pontificales de la Propagation de la Foi, de Saint Pierre Apôtre pour le Clergé indigène et de l'Union Missionnaire du Clergé, qui êtes venus à Rome de toutes les parties du monde pour traiter d'importantes questions sous la présidence et avec les encouragements du Cardinal Préfet de la Propagation de la Foi.

Nous connaissons le dévouement, le zèle, la prudence, l'ardeur avec lesquels vous travaillez à étendre toujours davantage le Royaume du Christ en qui seul se trouve le salut commun et qui est aussi la source principale de la vraie civilisation et de la religion, et à faire en sorte que, dans la mesure du possible, une seule vérité illumine, un seul amour unisse ceux qui sont éclairés par un unique soleil.

Nous louons, Nous admirons ce que vous avez accompli jusqu'à présent, et Nous vous en félicitons ; et en même temps Nous vous exhortons tous paternellement à ne pas ralentir votre élan mais à consacrer vos forces à cette si noble cause avec une ardeur toujours plus intense.

En ces temps difficiles, il semble que croissent et se multiplient de jour en jour de formidables obstacles, qui s'opposent aux saints labeurs des hérauts de l'Evangile. Et cependant les










ALLOCUTION AUX ENFANTS DU BORGO DON BOSCO

(xg avril xg$3)1






Un millier d'enfants éduqués par les Pères Salésiens, dans un quartier Rome, vinrent rendre hommage au Saint-Père et en cette occasion le Pape leur dit :

Il y a aujourd'hui quelque chose de nouveau dans cette salle, qui a vu se réunir ces derniers jours encore tant de personnes d'âge et de conditions divers, car rarement le souffle d'un joyeux et impétueux printemps a pénétré comme à présent dans cette Maison du Père commun, envahie par une multitude de vivants et chers enfants.

Sans doute avez-vous reçu qui sait combien de recommandations d'être sages, de ne pas faire de bruit, et vous donnez vraiment un magnifique exemple d'ordre et de discipline. Mais Nous désirons vous assurer que si vous n'aviez pas été si nombreux, Nous aurions voulu descendre au milieu de vous pour vous démontrer de façon encore plus manifeste combien le Pape vous aime.

Nous avons devant les yeux dans Notre esprit ce qui devait se passer chaque fois que les enfants réussissaient à se frayer un passage parmi la foule et à rejoindre Jésus. Il ne serait pas exagéré de s'imaginer qu'ils s'emparaient tout à fait de Lui ; et II les laissait faire et défendait leur exubérance et l'audace de ceux qui les conduisaient contre les reproches des Apôtres et de tous ceux qui craignaient que ces petits troublassent la tranquillité et provoquassent du désordre. Et c'est ainsi que se faisait entendre sur les chemins de Palestine la parole douce et ferme de Jésus : « Laissez venir a moi les petits enfants » 2.

Nous voudrions vous dire, chers fils, enfants du Borgo Don Bosco, qu'un tendre amour, semblable à celui qui remplissait le Coeur divin de Jésus pour tous les enfants, enflamme le Nôtre et le fait déborder de joie aujourd'hui où vous avez voulu Nous réjouir par votre présence si pleine d'enchantement.

Nous vous souhaitons donc, chers enfants, Notre paternelle bienvenue et Nous profitons de l'occasion pour vous adresser simplement la parole, désireux comme Nous le sommes d'imiter en quelque sorte ce que vous dirait Jésus, s'il était ici, visible, à la place de son indigne Vicaire sur terre.

Certainement vous rappelez-vous — pour l'avoir entendu raconter tant de fois — la parabole des ouvriers dans la vigne3 : Il y avait une fois un propriétaire qui avait besoin de travailleurs pour sa vigne, aussi était-il sorti de bonne heure pour les chercher. Il revint ensuite à la troisième heure, à la sixième et à la neuvième, et chaque fois un groupe d'ouvriers se mit en chemin pour aller travailler. Puis sorti à la onzième heure il en trouva d'autres qui se trouvaient là désoeuvrés et il leur dit : « Pourquoi restez-vous ici toute la journée oisifs ? ». Ils lui répondirent : « Parce que personne ne nous a engagés ». Alors le patron ajouta : « Allez vous aussi à ma vigne ».

Cette scène évangélique ramène Notre esprit à un événement assez récent : un des si nombreux faits qui marquent comme des étoiles lumineuses, le firmament de l'Eglise dans toute son histoire.

Dans certains des quartiers les plus populaires de Rome, il y avait tant d'enfants dans la rue. Certains jouaient, d'autres se querellaient et répétaient de vilains mots et sans doute offensaient de différentes manières le Seigneur.

Un jour survint un prêtre, mû par le vif désir de sauver ces adolescents ; il réussit à pénétrer parmi eux et il leur demanda : « Pourquoi vous trouvez-vous tout le jour dans la rue sans rien faire ? ». Quelques-uns répondirent : « Papa travaille et maman n'a pas le temps de s'occuper de tous ses enfants, nous sommes tant ! ». D'autres murmurèrent : « Papa et maman sont en tournée à la recherche de quelque chose à manger ; papa est en chômage ». L'un d'eux déclara en pleurant : « Je ne sais pas où est mon père, et maman est morte ». Tous faisaient observer : « Personne ne nous accueille, personne ne veut de nous ;





Matth., 20, i et s.



c'est pour cela que nous sommes oisifs toute la journée dans la rue ».

Alors le prêtre s'écria : « Venez, nous vous donnerons une maison ; nous chercherons à remplacer auprès de vous votre maman et votre papa. Venez : nous avons une petite église, où Jésus, ami des enfants, vous enseignera à devenir meilleurs. Venez : à côté de la petite église nous construirons des ateliers et des écoles ; vous aurez des maîtres empressés, qui vous aideront à être plus habiles. Venez : la nourriture ne vous manquera pas ; vous aurez les remèdes nécessaires ; il y aura des terrains pour jouer. Ainsi vous deviendrez plus forts. Venez, et nous ferons un village entièrement pour vous, et nous serons vos amis. Nous travaillerons avec vous ; nous étudierons avec vous ; nous jouerons avec vous ; s'il le faut, nous pleurerons avec vous. Nous serons une grande famille, confiée à la toute-puissance et à la sagesse de Notre Père qui est aux cieux. »

Et les enfants, que le prêtre avait pris par la main, vinrent : tout d'abord quelques-uns, puis d'autres, ensuite d'autres encore. Aujourd'hui vous êtes plus de mille, et Nous avons été informé qu'au Borgo Don Bosco, à la via Prenestina il y a toute une floraison d'ceuvres en votre faveur ; plus de trois cents élèves internes et sept cents externes qui y passent la journée entière, en travaillant, étudiant et jouant. Et en même temps les inlassables religieux Salésiens — tout en veillant avec tant d'abnégation et de peines à ce que rien ne manque au fonctionnement parfait du « Borgo » — se prodiguent pour votre éducation civile, religieuse et morale, afin que, devenus grands, vous puissiez être de bons citoyens et des ouvriers qualifiés excellents et chrétiens.

Très chers enfants, répondez généreusement et loyalement à leurs sollicitudes.

Profitez des terrains de jeu, de la gymnastique et du sport en général pour être et vous maintenir physiquement sains.

Soyez diligents dans les écoles élémentaires, professionnelles, techniques et dans les ateliers, pour devenir sans cesse plus habiles.

Surtout laissez Jésus, se servant de l'oeuvre des prêtres et de leurs collaborateurs, former vos jeunes âmes. Certes il est nécessaire que vos membres se fortifient et que vos intelligences se développent ; mais à quoi servirait-il d'avoir un organisme sain et fort et une intelligence vive et prompte, si ensuite la volonté était mauvaise, si l'âme était morte parce que privée de la grâce divine ?

C'est maintenant à vous, pères, mères et parents de ces enfants, que Nous adressons brièvement la parole. Nous connaissons bien les difficultés et les soucis au milieu desquels vous vous débattez souvent et qui vous empêchent de vous consacrer directement à vos enfants, comme vous le désireriez vivement ; cherchez donc au moins à aider, dans la mesure du possible, le prêtre dans son oeuvre d'éducation. Parfois — comme c'est pénible à dire — il est arrivé que certaines familles en sont arrivées en revanche à détruire ce qui avait été construit dans le recueillement mystique de la sainte chapelle ou dans les salles de l'école. Nous vous en conjurons au nom du Seigneur : ayez toutes les sollicitudes pour ces jeunes vies qui sont comme la prunelle de Nos yeux et surtout de ceux du divin Maître.

Et vous, chers fils Salésiens de Don Bosco, recevez Notre paternelle félicitation et Notre gratitude pour tout ce que vous avez fait et continuez à faire en faveur de ces enfants. Chacune de vos sollicitudes, chacune de vos aspirations, chacune de vos anxiétés, vous l'avez eue pour Jésus.

Devant les loups qui tentent de pénétrer dans le bercail de l'Eglise pour dévaster ce temple de Dieu qui est l'âme de l'enfant, votre action de salut est ferme et puissante.

Ne vous lassez pas, chers fils, dans cette oeuvre providentielle de rédemption et d'éducation. Ayez toujours présent à votre esprit le lumineux exemple de votre insigne Père et Fondateur. Redoublez vos efforts pour multiplier le nombre des enfants que vous assistez. Et que soient bénis tous ceux qui collaborent avec vous : ceux qui dépensent leurs forces ou qui par leur généreuse obole vous mettent en mesure de surmonter courageusement tant de difficultés, de faire vivre votre Maison et même de la compléter, de l'agrandir et de l'équiper, afin qu'elle réponde à tous les besoins les plus urgents, comme l'exigent les conditions présentes pour le bien physique et spirituel de vos protégés.










ALLOCUTION AUX LAURÉATS D'UN CONCOURS ARTISTIQUE DE ROME

(20 avril 1953) 1


ennemis de son propre salut éternel. Fixez constamment votre regard sur la couronne éternelle de gloire que Dieu réserve à ceux qui, prenant comme modèle le divin Maître Jésus, pourront à la fin s'exclamer, comme Lui : « J'ai vaincu le monde »2.

Nous félicitons également Messieurs les membres du Comité promoteur et des Commissions d'examen, les dirigeants centraux et régionaux, pour l'intérêt cordial qu'ils manifestent à ces joutes juvéniles, et Nous faisons descendre sur tous, en gage des faveurs célestes, Notre Bénédiction apostolique.







Le groupement « Rencontres de la Jeunesse » ayant organisé un concours artistique, les membres lauréats furent reçus en audience et le Pape déclara :

Soyez les bienvenus, chers fils, vainqueurs aux concours des « Rencontres de la Jeunesse », réunis aujourd'hui en Notre présence pour recevoir la Bénédiction du Vicaire du Christ, avec le légitime espoir d'obtenir ses paternelles félicitations pour vos succès mérités et vraiment heureux.

Nous vous les donnons bien volontiers, en vous manifestant en même temps Notre vive satisfaction pour les nobles compétitions dans lesquelles vous exercez une intelligence et un coeur bien dignes des traditions de civilisation de votre Patrie et de nature à contribuer efficacement à encourager l'élévation intellectuelle, spirituelle et morale des nouvelles générations. En effet là où l'esprit d'émulation des jeunes tend à se manifester librement jusque dans les paisibles domaines des arts, des lettres et des sciences, sous le soleil de la religion, là resplendit aussi la juste espérance que l'avenir ne sera pas la proie facile du matérialisme hédoniste, ni rendu stérile par une fatale inertie. Un peuple dont la jeunesse ne saurait vibrer pour de hauts idéals, ni sentir le frémissement de la saine émulation, se condamnerait lui-même à la ruine.

Chers jeunes, en accueillant Notre affectueux éloge, enfermez également dans vos coeurs Notre exhortation : Soyez toujours parmi les vainqueurs, spécialement dans la lutte ardue que tout homme et tout chrétien est appelé à livrer ici-bas contre les





Jean, 16, 33.












ALLOCUTION AU SÉMINAIRE SAINT JÉRÔME DES ILLYRIENS

(20 avril 1953) 1






Ce Séminaire fêtait le cinquième centenaire de sa fondation, aussi les professeurs et élèves furent-ils reçus en audience et le Pape y prononça l'allocution que voici :

Nous vous saluons volontiers et cordialement, chers Supérieurs et élèves du Collège de Saint-Jérôme des Illyriens, et vous tous qui êtes ici, attachés au Collège par les liens de l'amitié ou de la reconnaissance. L'occasion qui vous a conduits aujourd'hui près de Nous, où vous êtes les très bienvenus, est pleine d'allégresse.

Votre collège était un tendre arbuste planté par Notre Prédécesseur Nicolas V et son heureuse croissance fut toujours protégée par les soins attentifs de Pontifes Romains. Maintenant, où il célèbre le cinquième centenaire de sa fondation, il est devenu un chêne touffu qui, pendant un si long laps de temps, a dû supporter bien des difficultés et qui, déjà riche de tant de fruits bienfaisants, se prépare à en donner encore de plus abondants dans l'avenir.

Rome, par la volonté et la bonté divines, est la mère illustre et féconde qui associe et unit les nations diverses par le climat, la langue, les coutumes ainsi que l'exprima à merveille saint Léon le Grand : « Les apôtres Pierre et Paul sont ceux qui t'élevèrent à ce degré de gloire, de telle sorte que, nation sainte, peuple choisi, ville sacerdotale et royale, devenue capitale du monde de par le Siège de Pierre, tu as plus d'influence par la religion divine que par la domination terrestre » 2.

La mission très noble de votre Collège est de permettre à vos compatriotes prêtres 3, en leur donnant l'hospitalité, de recevoir leur formation religieuse, doctrinale et littéraire dans la Ville Eternelle, capitale de la foi catholique si remarquable par les souvenirs glorieux des apôtres et des martyrs.

Imitant les exemples de ceux qui habitèrent votre Collège et le rendirent illustre par les exemples mémorables de leur vie, continuez à suivre vous aussi le même chemin, avec une ardeur toujours plus grande ; emportez donc d'ici dans vos régions ou bien là où le devoir vous appelle, la vérité qui nous élève, la charité qui nous unit dans le Christ par des liens fraternels, l'espérance en l'éternité, qui nous remplit d'une joie sans fin.

Rempli, comme Nos Prédécesseurs, d'une paternelle bienveillance envers vous, Nous souhaitons à votre Collège une heureuse prospérité ; et Nous accordons à vous tous ici présents et à vos compatriotes — qui Nous sont si chers parce qu'ils restent fidèles au Christ dans les difficultés actuelles de l'Eglise — la Bénédiction apostolique.




Ce Séminaire est destiné aux élèves yougoslaves










ALLOCUTION AUX PÈLERINS DE FRIBOURG EN BRISGAU

(22 avril 1953) 1




Lors de l'audience générale du mercredi 22 avril 1953, le Saint-Père s'adressa en particulier à un groupe de pèlerins allemands :

Nous vous souhaitons la bienvenue, chers fils et chères filles, qui êtes venus jusqu'à Nous sous la direction de votre digne et si méritant pasteur pour témoigner au Vicaire du Christ votre fidélité et rapporter dans votre patrie sa bénédiction.

La rencontre avec vous éveille en Nous d'agréables souvenirs ; souvenirs qui datent des années 1927 et 1929, alors qu'à l'occasion des fêtes du premier centenaire de votre archidiocèse Nous apprîmes à connaître les vallées et les sommets de la Forêt Noire, avec leur calme et leur beauté singulièrement austères pénétrant jusqu'au fond de l'âme, la vallée ensoleillée du Danube avec Beuron, la vie joyeuse au bord du Lac de Constance, et surtout votre métropole, Fribourg, la perle du Brisgau.

Entre cette époque et aujourd'hui se situent de lourdes années et des événements bouleversants dont votre ville épis-copale ne fut pas la dernière à souffrir. Nous ne pouvons qu'exprimer le voeu que tout cela vous ait amenés plus près de Dieu et que cela ait ouvert vos coeurs à la foi du Christ, à son amour et à ses promesses, ces promesses qui aboutissent toutes dans l'au-delà, dans la Résurrection et la Vie éternelle.

Votre pèlerinage à Rome est en l'honneur du Bienheureux Bernard 8, de la noble famille des margraves de Bade, qui s'est fait représenter de façon spéciale dans votre groupe. Bernard, le deuxième patron de votre diocèse, arrivé à la perfection en peu de temps, vous a laissé l'exemple d'une vie de prière et de pénitence, l'exemple d'une vie chrétienne simple et ordonnée. Vous le vénérez surtout comme le protecteur de votre jeunesse et quand vous lui adressez votre prière : « Regarde avec bienveillance notre jeunesse que nous t'avons confiée, et qui est profondément menacée par l'esprit d'incrédulité et par la corruption des moeurs, et obtiens-lui la fermeté dans la foi, la force et la persévérance dans la lutte contre toutes les tentations », on pourrait croire que cette prière a été composée spécialement pour nos jours.

Mais en premier lieu, vous recommandez au Bienheureux Bernard les grandes intentions qui Nous préoccupent à l'instant présent, à savoir que les options qui se préparent dans votre pays laissent la voie libre à une vraie culture chrétienne, qu'elles assurent à vos enfants une école et une éducation selon la volonté de leurs parents catholiques et qu'elles respectent et conservent intacts les droits imprescriptibles de l'Eglise.

Nous sentons, pensons et prions avec vous, et comme gage du secours tout-puissant et de la grâce de Dieu, Nous accordons d'un coeur paternel à vous-mêmes, à tous ceux qui vous sont chers à l'archidiocèse de Fribourg et à tout votre pays, la Bénédiction apostolique.





ALLOCUTION A DES JOURNALISTES AUTRICHIENS



(23 avril 1953) 1



Nous vous souhaitons la bienvenue, Messieurs, qui, d'Autriche, êtes arrivés ici.

Votre patrie est pour le présent et pour l'avenir accablée par les problèmes et les devoirs les plus difficiles en ce qui concerne la politique, la conservation et l'accroissement de la vitalité du peuple et la préservation et le développement de sa culture. La carrière de journaliste y est d'autant plus séduisante, mais aussi évidemment d'autant plus lourde de responsabilités. Elle exige une haute dose d'indépendance spirituelle et de fermeté morale.

Soyez loyaux et véridiques ; ne succombez pas aux séductions du sensationnel et de la passion partisane. Donnez votre approbation là où se réalise du travail objectif ; et demandez-vous toujours si vos critiques, vos projets, vos écrits et vos plans servent au bien de l'ensemble, de tout l'Etat et de tout le peuple.

Vous appartenez quant à vos opinions idéologiques à des camps divers, Nous voudrions cependant vous savoir d'accord en ceci qu'un peuple ne peut durer à la longue sans Foi en Dieu et sans respect de sa Loi. Aussi traitez toujours de ces valeurs suprêmes avec le respect qui leur est dû.

Nous souhaitons que l'Autriche se développe toujours davantage dans la paix, la liberté et le bien-être ; si ce but semble à la réflexion humaine être encore reculé dans un avenir incertain, Nous pouvons cependant confier à la toute-puissante Providence de Dieu ce que nos propres forces ne peuvent réaliser. A vous aussi Nous vous souhaitons sa Bénédiction dans toute sa plénitude.


Pie XII 1953 - DISCOURS AUX PARTICIPANTS DU CINQUIÈME CONGRÈS DE PSYCHOTHÉRAPIE