Pie XII 1953 - ALLOCUTION AUX MEMBRES DU QUATRIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE CHIRURGIE


LE DIOCESE DE STOCKHOLM



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CONSTITUTION APOSTOLIQUE ÉRIGEANT LE DIOCÈSE DE STOCKHOLM (HOLMIA)

(29 juin 1953) 1






Le culte catholique fut interdit en Suède jusqu'en 1783 ; à cette date, un Edit de tolérance permit aux étrangers seuls la pratique d'une religion autre que le luthéranisme ; le 23 octobre 1860, un arrêté royal, puis en 1870^ et 1872 des lois abrogent en grande partie les lois d'exception : à partir de 18 ans, un Suédois pourra changer de religion ; Mgr Studach, vicaire apostolique depuis 1833 (jusqu'en 1874) parvient à construire deux nouvelles églises : cependant peu de conversions. Sur presque sept millions d'habitants, la Suède ne comptait guère en 1950 que 50 prêtres et 5.000 catholiques, auxquels on doit ajouter 5800 étrangers et peut-être 10.000 réfugiés ; Mgr Jean-Eric Müller, né en 1877, était vicaire apostolique depuis 1923 ; il fut le premier évêque consacré par Mgr Pacelli — plus tard Pape^ sous le nom de Pie XII - alors Nonce à Munich. Il devient le premier évêque de Stockholm.

Le Vicariat Apostolique de Suède, déjà renommé pour ses travaux et son culte de l'humanisme et des beaux-arts, a beaucoup progressé dans la religion et l'ardeur des oeuvres, au point d'y voir luire la douce espérance que l'Eglise catholique y retrouvera son ancienne splendeur. Et Nous, à qui le Père éternel des hommes a confié sur terre le soin de son Royaume, Nous Nous réjouissons vivement parce que le moment Nous semble venu d'y régler l'administration de la religion sous une forme et une nature qui correspondent et conviennent mieux à l'état de choses actuel. C'est pourquoi Nous avons l'intention d'élever le dit Vicariat de Suède à la dignité de diocèse ; les exemples de piété, de zèle et de sagacité qui ont été ici racontés surtout par les prêtres séculiers qui ont en charge le Vicariat, méritent grandement en effet cette faveur destinée à encourager ce clergé à poursuivre des résultats plus considérables et à affermir la constance des fidèles. Ratifiant donc tout ce que la Sacrée Congrégation de la Propagande a proposé, et donnant en outre notre consentement à l'avis de ceux qui jugent pour quelque motif que cette affaire leur importe, ayant très attentivement considéré la question et donc en pleine connaissance de l'acte que Nous allons poser, en vertu de Notre pouvoir apostolique, Nous décidons ce qui suit. Nous élevons le Vicariat Apostolique de Suède au rang et à la dignité de diocèse, qui s'appellera désormais diocèse de Stockholm et sera soumis directement à Nous et au Siège Apostolique. L'Evêque de cette Eglise aura ses siège et domicile dans la ville capitale de Stockholm et placera en outre sa chaire épiscopale dans le beau temple de saint Eric, qui existe en cette ville et qui servait jusqu'ici de cathédrale. A cette Eglise ainsi érigée pour sa nouvelle dignité, et à ses évêques selon le temps, Nous attribuons tous les droits et privilèges, charges et obligations qui honorent et lient les autres Sièges épiscopaux et les autres Evêques de même rang. En ce qui concerne le Chapitre de Chanoines, l'Evêque de Stockholm veillera très bien à sa constitution ; mais jusqu'à ce que les circonstances et les lieux le permettent, Nous accordons qu'en leur lieu des Con-sulteurs diocésains soient nommés pour assister fidèlement l'Evêque de leur prudence et de leur diligence. En outre, comme le plus sûr moyen de pourvoir à la solidité de tout diocèse est la formation des enfants que le divin Pasteur des âmes aura appelés au ministère sacerdotal, Nous voulons qu'un séminaire soit fondé au plus tôt. La mense épiscopale, comme on l'appelle, sera constituée des biens du Vicariat de Suède, s'il en existe, ou des ressources qui parviendront à la Curie du nouveau diocèse ou enfin des subsides de la Sacrée Congrégation de la Propagande et des fidèles. Pour la réalisation de Nos décisions, Nous choisissons Notre Vénérable Frère Jean Evangéliste Eric Mùller, évêque titulaire de Loviensis, jusqu'ici Vicaire Apostolique de Suède et créé ce même jour premier Evêque de Stockholm. Nous lui accordons donc tous les pouvoirs nécessaires à cette fin, subdélégables en cas de besoin à tout dignitaire ecclésiastique. Nous voulons en outre que le même vénérable Frère consigne par écrit la réalisation de cette affaire, dont il enverra au plus tôt des exemplaires dignes de foi à la Sacrée Congrégation de la Propagande.


LE DIOCESE D'OSLO



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CONSTITUTION APOSTOLIQUE ÉRIGEANT LE DIOCÈSE D'OSLO

(29 juin 1953) 1






La sainte messe fut célébrée publiquement pour la première fois en Norvège depuis la réforme en 1843 ; deux ans après, le roi accordait la liberté religieuse ; cependant il y eut peu de progrès au XLX" siècle. En 1-953 il y a environ 5000 catholiques, une cinquantaine de prêtres, dont 13 Norvégiens et 300 religieux. De sérieux progrès se sont fait jour depuis quelques années.

Chose faste pour la religion divine, il arrive qu'en Norvège, région qui brille par ses exploits et sa culture, le catholicisme a progressé au point de faire luire la douce espérance que la Sainte Eglise y obtiendra son ancien éclat. Et Nous, à qui le Souverain Père des deux a confié sur cette terre le soin de son Royaume, Nous Nous réjouissons grandement de ce fait, et en outre Nous estimons opportun de régler l'administration religieuse sous une forme et d'une manière qui correspondent mieux à la situation actuelle. C'est pourquoi Nous amenons le Vicariat Apostolique d'Oslo à la dignité de diocèse ; les témoignages de vertu, de piété et de sagacité qui Nous ont été rapportés de la part surtout des prêtres séculiers auxquels a été confiée la charge du Vicariat, méritent d'être justement récompensés, afin que ces mêmes prêtres y prennent encore plus de courage pour atteindre des résultats plus abondants et que s'affermisse la constance des fidèles. C'est pourquoi, ratifiant toutes les propositions de la Sacrée Congrégation de la Propagande ; et entrant dans les vues de ceux qui jugent que la chose les intéresse pour quelque motif ; après un examen très attentif de la question et donc en pleine connaissance de Nos décisions, en vertu de Notre pouvoir apostolique, Nous décidons ce qui suit : Nous élevons le Vicariat Apostolique d'Oslo à la dignité de diocèse, qui prendra désormais le nom d'Oslo, et Nous le soumettons directement à Notre autorité et à celle du Siège apostolique. L'Evêque d'Oslo aura donc son siège et son domicile dans la ville d'Oslo, qui donne son nom au nouveau diocèse, et il placera sa chaire épiscopale dans le beau temple de saint Olaf, établi en la même ville et qui remplissait jusqu'ici les fonctions de cathédrale. A cette église nouvellement érigée, pour sa nouvelle dignité, et à ses évêques selon le temps, Nous attribuons tous les droits et privilèges, charges et obligations, dont les autres Sièges épis-copaux et les autres évêques de même rang sont habituellement investis et tenus. En ce qui concerne le Chapitre de Chanoines, l'Evêque d'Oslo devra constituer ce collège ; mais, jusqu'à ce que les circonstances et les lieux le permettent, Nous concédons qu'en leur lieu des Consulteurs diocésains soient choisis pour assister fidèlement l'Evêque de leur prudence et de leur zèle. Comme en outre le meilleur moyen de procurer la stabilité des diocèses est de former les enfants qui, par un divin attrait, aspirent aux fonctions sacerdotales, Nous voulons qu'un séminaire soit fondé au plus tôt. Quant à la mense épiscopale, comme on l'appelle, elle sera constituée des biens du Vicariat d'Oslo, s'il en existe ; ou des ressources qui surviendront à la nouvelle Curie, ou enfin des subsides de la Sacrée Congrégation de la Propagande et des fidèles. Pour la réalisation des décisions de Notre présente Lettre, Nous choisissons Notre vénérable Frère, Jacques Mangers, Evêque titulaire de Seliensis, jusqu'ici Vicaire apostolique d'Oslo et qui aujourd'hui même en a été nommé le premier Evêque. Nous lui accordons donc tous les pouvoirs nécessaires et utiles à cette fin, subdélégables à tout dignitaire dans le saint sacerdoce. Nous ordonnons en outre que le même vénérable Frère consigne par écrit la réalisation de cette affaire et qu'il en envoie au plus tôt des exemplaires dignes de foi à la Sacrée Congrégation de la Propagande.










LETTRE AUX CONGRÉGATIONS MARIALES

(2 juillet 1953) 1






Cette lettre adressée au Rév. Père Louis Paulussen S. ]., Secrétaire Général des Congrégations, approuve les nouveaux statuts.

Tous ceux qui connaissent Notre pensée sur l'apostolat d'aujourd'hui savent combien Nous tiennent à coeur les Congrégations mariales et leur constant développement spirituel. Dans la Constitution apostolique Bis Soeculari — synthèse pour ainsi dire de Nos intentions à l'égard de cette éminente et particulière forme d'Action Catholique — Nous avons fixé avec Notre Autorité apostolique des normes et des lois destinées « à imprimer une impulsion et une vigueur sans cesse plus grandes à ces centres de piété et de vie chrétienne active » 2. Il n'est donc pas étonnant que Nous ayons appris avec une grande joie et une grande satisfaction que « pour mieux se conformer intégralement à la pensée de l'Eglise » (Reg. Com. 33), les Congrégations mariales légitimement érigées et rattachées à la « Prima Prima-ria » du Collège romain entendent s'unir en une Fédération mondiale grâce à laquelle, conformément à Nos constantes exhortations tendant à une plus grande unité d'efforts et à un appui mutuel, puissent être obtenus d'heureux et fructueux résultats, en union avec toutes les associations analogues de l'Eglise militante. Comme, jusqu'à présent, des fédérations « de même classe sociale ou de même région » (Reg. Comm. 68), n'ont pas été constituées partout, une Fédération de ce genre, qui doit concerner toute l'Eglise catholique, conduira à l'heureuse réalisation des buts poursuivis.

Aussi approuvons-Nous et louons-Nous bien volontiers les statuts de cette Fédération et invitons-Nous toutes les fédérations mineures, actuellement disséminées dans le monde, à adhérer en bloc à la Fédération mondiale.

Et comme est projetée la convocation à Rome du premier Congrès de la Fédération Mariale pour l'année prochaine, premier centenaire de la solennelle proclamation par Notre prédécesseur, Pie IX, d'heureuse mémoire, du dogme de l'Immaculée Conception de la Bienheureuse Vierge Marie et soixantième anniversaire de Notre consécration dans la Congrégation mariale, Nous bénissons de tout coeur le Congrès, ses buts et ses initiatives.

Mais pour que celui-ci produise les fruits les plus abondants, il Nous a semblé opportun d'attirer votre attention, par la présente Lettre, sur quelques points particuliers.

Le thème qui sera discuté aux diverses séances et qui Nous a été soumis par le Secrétariat Central, Nous semble tout ce qu'il y a de plus actuel. Il est ainsi formulé : Recherche de la plus grande gloire de Dieu à travers une sélection plus rigoureuse, une union plus étroite avec la hiérarchie et une collaboration plus concrète avec toutes les autres organisations apostoliques. Voici résumé en quelques mots les points principaux qu'exposait Notre Constitution apostolique Bis Sseculari : Nous voulons que les Congrégations mariales tiennent cette Constitution comme leur loi fondamentale, persuadées qu'elles seront d'autant plus solides, vigoureuses et efficaces, qu'elles se conformeront plus fidèlement à ses prescriptions3.

Une sélection plus rigoureuse est la source de tout renouvellement, aussi doit-elle être réalisée énergiquement, surtout là où se serait vérifié un affaiblissement de l'esprit d'origine. Seuls doivent être admis à la consécration perpétuelle ceux qui ont la volonté et la capacité de mener, au moyen de l'observation des Règles Communes, une vie catholique plus fervente, plus apostolique, plus militante. Et comme les Congrégations ont été instituées « pour toutes les classes des fidèles » (Reg. Com. 4) et existent effectivement dans tous les milieux, des plus élevés aux plus modestes, la sélection doit aussi s'appliquer à tous, sans exception. Une telle sélection, visant à raviver l'esprit apostolique dans la lumière de l'Evangile, n'implique pas nécessairement un petit nombre de Congrégations ni ne s'oppose à ce







D'après le texte latin des A. A. S., XXXXV, 1953, p. 494.

Cf. A. A. S., 40, 1948, p. 399 et Documents Pontificaux IÇ48, p. 336.

s Cf. Discours du 3 mai 1951 ; Documents Pontificaux ig;i, p. 150.

que les Congrégations donnent naissance, avec des moyens appropriés à des formes d'association plus ouvertes pour les non congréganistes, spécialement du même niveau social.

Il ressort clairement de Notre allocution au Congrès mondial de l'Apostolat laïque, que plus pure est la nature de l'Action Catholique, plus étroite doit être son union dans l'apostolat avec la hiérarchie4. Il apparaît donc clairement jusqu'à quel point les Congrégations mariales sont tenues de refléter la véritable conception d'Action Catholique : en effet, une fois qu'elles ont été légitimement érigées par la hiérarchie, elles en dépendent uniquement et immédiatement dans toutes leurs oeuvres d'apostolat ; aussi, comme Nous l'avons précisé à plusieurs reprises, une fois qu'elles ont été érigées, par là même et de plein droit, elles doivent être dites Action Catholique et placées sur le même plan que les autres formes de celle-ci5. La nouvelle Fédération Mondiale ne touchera nullement la nature hiérarchique des Congrégations mariales : car n'importe quel organisme fédéral, loin d'affaiblir l'union avec la hiérarchie ecclésiastique, doit et entend la rendre sans cesse plus stable, forte et intime.

Une collaboration plus concrète avec les autres organisations apostoliques fait certainement partie des principaux objectifs de la Fédération Mondiale. Aussi est-il à souhaiter que le prochain Congrès, fidèle aux glorieuses traditions des Congrégations mariales, donne des fruits abondants. Les Congrégations, qui n'ont pas besoin de quelque nouveau mandat ou d'autre association pour exercer, sous la direction de l'Episcopat, une activité apostolique multiforme, non plus privée, mais confiée à elles par l'Eglise6, doivent examiner d'elles-mêmes, en tenant toujours compte de la plus grande gloire de Dieu, dans quelles circonstances il convient également d'introduire des congréganistes dans d'autres institutions d'apostolat, dont les tâches peuvent être accomplies sans nuire à l'avantage spirituel des individus et de l'action apostolique de la Congrégation.

Nous voyons enfin, avec une profonde satisfaction que les congréganistes soucieux, non point de leur propre intérêt, mais exclusivement de la plus grande gloire de Dieu et de l'honneur de la Bienheureuse Vierge (Reg. Corn. 43 et 68), donnent un



Cf. A. A. S., 43, 1951, p. 7S9, et Documents Pontificaux ig;i, p. 4I8. Cf. A. A. S., 40, 1948, p. 402 et Documents Pontificaux 1948, p. 336.

exemple peu commun de tenace attachement aux Pasteurs de l'Eglise, de sincère volonté pour une complète collaboration avec tous les autres, de zèle constant à réaliser, dans le cadre des directives ecclésiastiques, la conservation ou le réveil de l'esprit et des règles de l'authentique Congrégation. Nous louons du fond du coeur cette nette attitude à l'égard des intérêts de l'Eglise, en sachant parfaitement combien est indispensable, spécialement de nos jours, une semblable disposition d'esprit pour que l'apostolat laïque, sur lequel Nous insistons tant, ait une plus grande efficacité.

Un autre motif de grand réconfort et de joie est pour Nous la floraison, aujourd'hui également, des Congrégations de prêtres et de séminaristes, si méritants aux yeux de l'Eglise, comme l'atteste une tradition de plusieurs siècles. Aussi les encourageons-Nous vivement, comme particulièrement adaptées à former d'excellents prêtres et à préparer les futurs directeurs de ces mêmes Congrégations.

Nous ne passerons point non plus sous silence tous ceux qui, répondant à Nos désirs, s'appliquent aux authentiques Exercices Spirituels et s'efforcent de tirer de cette source si limpide inspiration, lumière et énergie, soit pour pénétrer leur vie de l'esprit évangélique, soit pour diriger les Congrégations selon les exigences modernes.

Mais particulièrement dignes de mention Nous semblent les congréganistes, si chers à Notre coeur, qui vivent dans Y « Eglise du silence » et dont seul Dieu voit dans le secret et accueille volontiers les oeuvres, les sacrifices et les prières. Tous ceux qui d'une manière ou de l'autre sont persécutés pour la justice doivent savoir que la croix, qui leur est présentée par la Divine Providence, constitue une indiscutable et considérable contribution au retour des peuples opprimés par tant de maux vers la vie, le salut et le renouveau chrétien.

Les congréganistes travaillent avec persévérance et habileté, sans bruit pour la plupart — comme il convient aux imitateurs de la Très Sainte Vierge — à la formation et à l'éducation des jeunes et au renouvellement de la vie paroissiale, familiale et sociale. Qu'ils continuent donc dans cette voie, même si elle est semée d'obstacles. Qu'ils continuent surtout à se distinguer par la plus active dévotion envers la Vierge Marie Mère de Dieu comme également par la recherche de la vie intérieure et par des activités apostoliques de tout genre, tendant spécialement à la



reconstruction de la société, à la lumière des principes de la charité et de la justice sociale.

Pour la réalisation de tous ces objectifs, avec l'inspiration et l'intervention de la Bienheureuse Vierge Marie 7 et pour le plus heureux succès de la Fédération Mondiale et du Congrès qui se tiendra l'an prochain. Nous vous donnons de tout coeur, à vous cher Fils, à tous les directeurs de Congrégations Mariales, aux congréganistes et aux aspirants, la Bénédiction apostolique.









LETTRE DE MONSEIGNEUR J.-B. MONTINI PRO-SECRÉTAIRE D'ÉTAT A LA XLe SEMAINE SOCIALE DE FRANCE
(6 juillet 1953) 1






















































A. S., 40, 1948, p. 398, et Documents Pontificaux 1948, p. 344.



La quarantième Semaine Sociale de France tenait sa session en juillet 1953 à Pau et elle avait pour thème la paix internationale. En cette occasion M. Charles Flory, président des Semaines Sociales de France, reçut la lettre que voici :

C'est non loin de la grotte de Massabielle, où si souvent déjà les peuples assemblés implorèrent de Dieu le don de la paix, que la quarantième Semaine Sociale de France tiendra prochainement ses assises. Et, dans la vieille cité béarnaise qui accueillera votre Université itinérante, vous inviterez maîtres et auditeurs à servir eux aussi la cause de la paix, par une courageuse réflexion sur les conditions humaines, politiques et économiques d'une vraie communauté internationale. Ce thème si important a retenu toute l'attention du Souverain Pontife, qui me charge d'être auprès de vous l'interprète de Sa pensée. Sa Sainteté s'est d'ailleurs spécialement réjouie d'apprendre qu'avec la collaboration du Mouvement « Pax Christi » et sous la présidence de Son Eminence le Cardinal Feltin, les travaux de la Semaine s'achèveront, à Lourdes même, par une journée de prière et de pénitence. De grand coeur Elle confie toute cette Session à la maternelle et puissante intercession de Marie, Reine de la Paix.



Le monde présent ne jouit pas d'une paix authentique.

Cet examen des problèmes de la paix par des hommes de foi, de science et d'action est d'autant plus opportun que les esprits,



aujourd'hui, sont plus troublés. Jamais l'histoire humaine n'a connu plus gigantesque désordre. Ce dissentiment aux dimensions du monde envahit la vie quotidienne des peuples ; il s'alimente des luttes sociales et les entretient ; ses sources sont d'ordre idéologique autant qu'économique ; il pénètre au coeur des familles et des institutions, et son harcèlement psychologique épuise la résistance de la volonté et obscurcit le jugement. Il n'est pas jusqu'au drapeau de la paix qui, arboré à des fins partisanes ne divise parfois les esprits ! Comment s'étonner si, dans de telles conditions, bien des consciences généreuses s'égarent et, jusque dans les rangs catholiques, se laissent séduire par le mirage d'une paix de propagande ? Mais plus grave est le péril, plus impérieux le devoir d'y parer. A notre époque inquiète, où la paix est comme profanée par les hypocrites prétentions de ceux qui voudraient détourner, à leur profit et au détriment d'autrui, ce pur idéal des peuples, puissent tous les fils de l'Eglise mériter la béatitude de l'Evangile : Beati pacifia, bienheureux les apôtres de la paix ! A la veille de la Semaine Sociale de Pau, tel est le voeu du Saint-Père que j'ai mission de vous transmettre.



Pie XII n'a cependant cessé d'indiquer les conditions de la vraie paix.

Etre apôtre de la paix, c'est d'abord, pour un chrétien, connaître et répandre toute la pensée de l'Eglise sur la paix. Depuis la première guerre mondiale, en particulier, les enseignements des Souverains Pontifes se sont multipliés. Chef de l'Eglise en des heures tragiques, Pie XII, Lui-même n'a cessé d'avertir, d'instruire, d'exhorter les fidèles et tous les hommes de bonne volonté. Il ne craignit pas de leur tracer les voies de la paix au fort même de la bataille, définissant avec clairvoyance les bases de la communauté internationale alors que s'affrontaient encore les forces rivales. Les actes, dans la mesure de ses moyens, accompagnèrent les paroles et ils attestent, à l'encontre des plus douloureuses calomnies, l'infrangible volonté de paix du Siège apostolique.



Cependant la plupart des catholiques font la sourde oreille.

Or, malgré la sévère leçon des événements, trop de chrétiens encore restent sourds aux avertissements de la Papauté. Combien, par exemple, continuent de s'enfermer dans les étroitesses d'un nationalisme chauvin, incompatible avec le courageux effort d'ouverture sur la communauté mondiale demandé par les derniers Papes ? Mais plus nombreux, sans doute, ceux qui n'ont pas renoncé à leur étrange inertie en dépit des appels réitérés du Saint-Père « à l'action contre toute inaction et toute désertion, dans la grande bataille spirituelle dont l'enjeu est l'édification ou mieux l'âme même de la société future ! » 2. Aussi, tout en se réjouissant de l'admirable générosité de tant de catholiques qui oeuvrent patiemment pour la paix du monde, se prend-on parfois à songer qu'il y a un demi-siècle, on assistait déjà hélas ! sur un autre point d'égale gravité, à semblable contraste entre la fermeté clairvoyante d'un grand Pontife et les timidités, les doutes et les égoïsmes d'un trop grand nombre... 3.



Il faut édifier la communauté des peuples.

La doctrine de l'Eglise sur la paix, les maîtres de la Semaine Sociale la connaissent et ils sauront en exploiter les richesses. Mais, devant la dramatique cassure de ce monde, l'appel du Père commun se fait plus pressant. Ayez foi dans l'Eglise, dit-il à tous ses fils, quand elle vous demande de travailler à la communauté des peuples. « Pour elle, Orient et Occident ne représentent pas des principes opposés, mais participent à un commun héritage, auquel ils ont l'un et l'autre puissamment contribué et sont encore appelés à contribuer à l'avenir»4, et sa voix maternelle ne se lassera pas de rappeler aux hommes d'Etat responsables que même les complications politiques et économiques actuelles peuvent se résoudre à l'amiable, moyennant la bonne volonté de toutes les parties intéressées 5. Sachez écouter l'Eglise, quand, soucieuse de redonner aux nations le sens de leur fraternité humaine, elle leur trace les voies de justice et de vérité, de renoncement et de charité, qui ont en Jésus-Christ leur principe et en dehors desquelles il n'est pas de paix durable. Ne doutez pas de l'oeuvre à laquelle vous convie l'Eglise : c'est une oeuvre éminemment positive et constructive, fondée sur les droits sacrés de la loi naturelle et divine ; une

2 Radiomessage, Noël 1942, A. A. S., 35, p. 15.

3 Cf. Quadragesimo Anno, A. A. S., 23, p. 181.

4 Radiomessage, Noël 1950, A. A. S., 43, p. 58 ; cf. Documents Pontificaux 1950, 615.

5 Cf. Discours à Pax Christi, 13 septembre 1952, Documents Pontificaux 1952, p. 447.



oeuvre réaliste aussi, car l'expérience devrait apprendre à tous « que la politique orientée vers les vérités éternelles et les lois de Dieu est la plus réelle et la plus concrète des politiques. Les politiciens réalistes qui pensent autrement ne créent que des ruines » ".



La paix se construit d'abord dans la conscience d'un chacun.

Fidèle à ces enseignements, qui garantissent la rectitude de ses libres initiatives, le chrétien se doit pourtant de porter plus avant encore son effort de paix, jusque dans le secret de ses dispositions intérieures. Ecoutons plutôt ce qu'écrivait le Saint-Père en Sa première encyclique : « Non, le salut pour les nations ne vient pas des moyens extérieurs, de l'épée, qui peut imposer des conditions de paix, mais ne crée pas la paix. Les énergies qui doivent renouveler la face de la terre doivent venir du dedans, de l'esprit. » Et Sa Sainteté de préciser plus loin : « S'il est vrai que les maux dont souffre l'humanité d'aujourd'hui proviennent en partie du déséquilibre économique et de la lutte des intérêts pour une plus équitable distribution des biens que Dieu a accordés à l'homme comme moyens de subsistance et de progrès » — et n'était-ce pas là le thème de votre dernière Semaine Sociale — « il n'en est pas moins vrai, poursuit-il, que leur racine est plus profonde et d'ordre interne : elle atteint les croyances religieuses et les convictions morales » 7. La paix est une, en effet, et quiconque, par le péché, la renie dans sa vie personnelle, familiale, sociale, ne saurait prétendre l'instaurer efficacement dans la cité ou dans le concert des nations. La paix ne se construit pas sur le mensonge.

« Radiomessage, Noël 1945, A. A. S., 38, p. 24. ? Encyclique Summi Pontifkatus, A. A. S., 31, p. 440.




C'est donc à un véritable examen de conscience que nous convie le Saint-Père. On accorde volontiers aujourd'hui que la tension du monde se répercute jusqu'en la vie personnelle de chacun : par quel funeste illogisme refuserait-on alors d'y remédier d'abord en soi-même ? Déjà il fait oeuvre efficace de paix, le chrétien qui surmonte en lui les obstacles à la compréhension d'autrui, à la collaboration fraternelle. Et quels sont ces obstacles intérieurs, sinon l'esprit partisan, ou même sectaire, incapable d'une recherche désintéressée de la vérité ; l'esprit passionné, livré à toutes les propagandes de division, insensibles aux recommandations du droit ; l'esprit pharisien, prompt à déceler l'erreur d'autrui, mais aveugle à ses propres préjugés et dur aux adversaires victimes de l'erreur qu'il combat. L'homme qui cède à de tels penchants agrandit, en lui, autour de lui, la blessure dont saigne l'humanité souffrante.



La loi de charité doit régner.

Que tous les disciples du Christ, au contraire, jettent sur le monde un regard pacifique et catholique. Attentifs au commandement du Maître, qu'ils approfondissent les exigences de la charité ; qu'ils méditent ses paroles et ses exemples sur l'amour des ennemis et se souviennent de sa grande leçon sur le pardon des injures. Devant l'ampleur et les difficultés de la tâche, il faut à l'apôtre de la paix, selon les termes d'une prière connue, « un coeur grand et indomptable, qu'aucune désillusion ne ferme, qu'aucune épreuve ne broie, qu'aucune indifférence ne lasse » ; à l'exemple du P. de Foucauld, il doit se sentir pour tous les hommes l'âme d'un « frère universel ». Telle est l'irremplaçable mission qui incombe de nos jours aux chrétiens ; en paix avec eux-mêmes ; en paix avec les hommes, leur armée pacifique peut abattre les murs de la suspicion et de l'injustice qui fragmentent douloureusement la communauté internationale. Qu'ils soient d'ailleurs sans illusions, car des puissances obscures sont toujours à l'oeuvre dans l'histoire, cherchant à séduire les plus généreux ; mais qu'ils soient sans crainte, ces fils de lumière, car l'Eglise, dont ils sont les bons serviteurs, a les paroles de la vie éternelle.



L'Eglise apporte son concours à l'édification de la paix.

C'est donc vers l'Eglise qu'ils aimeront se tourner avec confiance aux heures difficiles. Mère des peuples, elle ne saurait, sans se renier elle-même, demeurer sourde aux cris d'angoisse de ses enfants, de toutes classes, de toutes races. Bien au contraire, elle ne cesse d'adresser aux hommes le salut pascal de Jésus : « La paix soit avec vous ! »8. Messagère de la Paix de Dieu, elle proclame à la face du monde les règles fondamentales et inviolables dont dépend en fin de compte la stabilité de tout



« Jean, 20, 19.

ordre national et international. Messagère de la paix entre les hommes, elle leur apporte, avec la grâce du Christ, le gage de la vraie fraternité ; elle instaure la paix dans les âmes, dans les cités et dans la grande famille humaine. Telle est l'Eglise dans la société des peuples. Le royaume qu'elle annonce n'est pas de ce monde, mais elle demeure présente au monde, comme une inaltérable puissance de paix, comme l'épouse, divinement assistée, du Christ, Prince de la Paix.

Beati Pacifici ! Cet appel du Souverain Pontife à travailler sans retard et sans défaillance à l'oeuvre de paix, les leçons de la Semaine Sociale de Pau en répercuteront largement l'écho ; elles en préciseront le contenu à la lumière des enseignements pontificaux. Mais le Saint-Père voulait Lui-même en redire à tous la double exigence de fidélité doctrinale et d'ascèse morale. Et, se souvenant de la prière unanime qui clôturera à Lourdes votre Session, il recommande enfin, avec Saint-Paul, « qu'on adresse des demandes, prières, supplications, actions de grâces, pour tous les hommes, pour les rois et tous ceux qui détiennent l'autorité afin que nous puissions mener une vie calme et paisible en toute piété et dignité » 9. C'est dans cette espérance qu'il vous accorde, ainsi qu'à tous vos collaborateurs des Semaines Sociales de France, la faveur d'une très large et paternelle Bénédiction apostolique.









LETTRE POUR LE VIIIe CENTENAIRE DE LA CANONISATION DE SAINT STANISLAS AU PRIMAT ET A L'ÉPISCOPAT DE POLOGNE
(16 juillet 1953) 1






Saint Stanislas est né en 1030 d'une riche famille polonaise ; il vint étudier la théologie à Paris. Répondant au voeu de la population, il fut sacré évêque de Cracovie en 1072. Le roi Boleslas II menant une vie indigne fut réprimandé par l'évêque. Finalement le roi, excédé, assassina de sa propre main Stanislas, le 8 mai 1079. Il fut canonisé en 1.253 e^ proclamé patron de la Pologne.

Dans les annales de la Pologne, célèbre pas ses hauts faits, le nom de saint Stanislas, illustre protecteur de votre patrie, est gravé ineffaçablement et à la veille du septième centenaire de son inscription au catalogue des Saints par Notre Prédécesseur Innocent IV, vous avez voulu, cher Fils et vénérables Frères, dans un désir unanime, avec le clergé séculier et les fidèles confiés à vos soins, honorer ce Saint par de solennelles célébrations dignes du mémorable événement.

Il y a peu de temps, avec une filiale sollicitude, vous Nous avez annoncé des célébrations, quand vous vous trouviez réunis dans la ville de Cracovie et, vous répondant aussitôt, Nous vous avons exprimé par télégramme Notre satisfaction et Nos voeux. Les cérémonies solennelles qui auront lieu maintenant, Nous entendons les couronner par l'expression de Notre joie paternelle, dans cette Lettre qui exalte en une louange méritée le très grand Saint que fut Stanislas, en même temps qu'elle vous presse à nouveau de recourir à son patronage et de prendre exemple












» I Tim., 2, 1-2.



sur sa fermeté, ainsi d'ailleurs que vous l'avez fait jusqu'à présent.

Le nom illustre de ce saint Prélat éclaire d'une lumière des plus éclatantes les fastes de l'Eglise catholique en Pologne, car pour lui la gloire du martyre consacra l'aube de la religion chrétienne dans votre nation. Il manquait encore à votre peuple un Pasteur qui, donnant sa vie pour ses brebis dans la défense de la foi et des moeurs chrétiennes, fécondât sans cesse davantage par son sang le grain de l'Evangile déjà semé.

C'est ce qu'accomplit l'évêque de Cracovie qui, suscité par la divine Providence donna le plus lumineux exemple de force chrétienne. Saint Stanislas se distingua par sa piété envers Dieu et sa généreuse charité envers le prochain ; il n'y eut rien de plus doux pour lui que de consacrer tous ses soins au troupeau qui lui était confié et il estima comme son devoir, plus agréable que tout autre, de reproduire en lui-même, de manière parfaite jusqu'à la fin de sa vie, l'image du divin Pasteur. Il n'épargna aucune fatigue, ne redouta aucune difficulté dans son zèle à rendre entièrement conformes aux préceptes évangéliques les moeurs publiques et privées ; il ne s'effraya pas quand, pour avoir dénoncé publiquement les moeurs perverses du roi Boleslas, la fureur de ce dernier s'excita contre lui. Le tyran impie put maltraiter le Prélat par des persécutions et par de féroces tourments, mais il ne put soumettre son esprit invincible. Donnant, en effet, à ses brebis un exemple d'intrépide constance, plutôt que de manquer au devoir de sa conscience, Stanislas fit volontiers le sacrifice de sa vie, et la couronna par la palme du martyre.

Tout l'amour, toute la vénération dont vos ancêtres entourèrent cet! éminent évêque sont clairement démontrés par la soudaine indignation du peuple chrétien pour la mort cruelle infligée à son Pasteur et par la vive douleur des esprits, douleur qui se manifesta si violemment qu'elle contraignit — suivant la tradition — l'auteur de ce crime impie à abandonner le royaume pour un exil perpétuel. Cet amour, en vérité, et cette admiration envers le vaillant athlète du Christ, loin de diminuer avec la succession des siècles, Nous les voyons aujourd'hui — non sans joie — s'allumer d'une nouvelle ardeur.

En effet, les calamités dans lesquelles vous vous trouvez actuellement ont une ressemblance avec celles de la dure époque, où brilla la constance exceptionnelle de ce martyr. De nouveau, hélas, une nuit de malheur pèse sur la pieuse et toujours fidèle Pologne 2 ; mais, au milieu de ces profondes ténèbres, resplendissent, comme des astres éclatants, vos vertus, que contemple depuis longtemps l'Eglise universelle. Nous admirons, et la postérité respectueuse rappellera dans ses annales tout ce que Dieu seul, qui donne les énergies et voit nos combats, pourra récompenser dans une mesure égale aux mérites. Combien sont-ils, encore aujourd'hui, ceux qui pour conserver inviolée la foi catholique ont perdu leurs biens et immolé leur vie ! Combien d'évêques, de prêtres, de membres de congrégations religieuses ont été emprisonnés parce qu'ils furent de courageux défenseurs de la justice ; combien de ministres sacrés et de fidèles de tous milieux et de tous âges ont été emprisonnés, entraînés dans des solitudes glacées, privés des droits civiques, frappés de châtiments, couverts d'outrages et d'injures, parce qu'ils étaient des disciples fidèles de l'Evangile !

Sans aucun doute, ils sont dignes d'un honneur immortel tous ces hommes qui suivant sur un rude sentier, interdit aux lâches et aux paresseux, la trace de saint Stanislas, ont clairement démontré que l'antique vertu fleurit encore dans la race polonaise : devant des contraintes impies, les Polonais savent en effet souffrir les maux les plus grands, plutôt que de se soumettre avec déshonneur. Et ne pensez pas que ces actions éminentes manqueront de force et d'efficacité ; les bienfaisants effets se manifesteront peut-être plus tard, mais d'une manière plus abondante. En effet, l'Esprit de Dieu, qui brûle dans les coeurs des héros chrétiens et les encourage à des gestes mémorables, a coutume de faire servir les épreuves à nourrir la vertu pour une abondante maturité spirituelle et à promouvoir un grand zèle pour une fructueuse concorde ; et c'est ce qui se produit dans les frontières même de la Pologne, quand saint Stanislas, unissant son sacrifice à l'Hostie divine, empourpra l'autel de son sang.

Toute une génération de saints personnages, gloire immortelle des Polonais, sembla jaillir du sang répandu par ce vaillant martyr. Il suffit de citer quelques exemples. On vit apparaître saint Hyacinthe Odrouwonz, de l'Ordre des Frères Prêcheurs qui, dans de très vastes régions, conduisit d'innombrables pécheurs aux pieds du Christ et à son pardon ; brûler le bien-



2 L'Eglise de Pologne est persécutée par le gouvernement communiste.








heureux Czeslas, qui protégea Breslau contre l'assaut et les hordes des Mongols ; le bienheureux Sadok et ses 48 confrères qui — au milieu des cruelles tortures qui leur furent infligées à Sandomierez par ces mêmes féroces ennemis — élevèrent, comme un chant du cygne, leurs louanges à la Mère de Dieu et des hommes. Les bienheureux prélats Vincent Kadlubek et le si courageux Jean Prandota — qui fit tant pour que Stanislas fût inscrit au nombre des Saints — obtinrent par leur sublime vertu une gloire impérissable. Et l'on ne doit point passer sous silence ces êtres d'élite, précieuses fleurs du sexe féminin : sainte Hedwige, duchesse de Silésie et patronne de la Pologne ; les bienheureuses Kinga, Yolande, Salomée, Bronislava, à l'imitation desquelles accourut avec empressement Hedwige d'Anjou, reine de Pologne, digne d'admiration éternelle, parce qu'elle fit passer l'amour de Dieu et le salut des âmes avant tout ce qui peut flatter, et qu'elle brille maintenant comme une étoile amie de votre patrie.

Il est très agréable de rappeler également ce que les Pasteurs de la Pologne décidèrent au synode de Leczyca pour consacrer honorablement la mémoire du bienheureux Stanislas, alors que s'achevait le premier centenaire de sa mort. Imitant l'ardeur dont il avait été enflammé pour la justice, ils prescrivirent alors des lois providentielles de manière à éloigner les violences des orgueilleux oppresseurs et défendre les droits et les biens des humbles. Aussitôt s'unit à eux le prince Casimir le Juste ; et alors, pour la première fois, fut décrété ce pacte qui, sous la protection de saint Stanislas, réprima sur vos terres l'insolente injustice. Mais sans aucun doute saint Stanislas ne fut pas moins le promoteur de la paix que de la justice. La nouvelle que le Pontife romain l'avait inscrit au catalogue des Saints était à peine parvenue en Pologne, que votre peuple afflua aussitôt en foule à Cracovie pour vénérer ses dépouilles sacrées. Là, le Légat apostolique, les évêques polonais, cinq princes, d'innombrables prêtres et fidèles, tous débordants d'une sainte allégresse, furent unis par le lien de la concorde. Toute la Pologne, auparavant déchirée par les différends — difficilement assoupis devant l'invasion des Mongols — se dressa unanime, vigilante et intrépide autour des reliques de saint Stanislas. Continuez maintenant à conserver cette union si étroite des esprits pour être en mesure de surmonter la situation difficile dans laquelle vous vous trouvez ; cette union, vous devrez la conserver également dans l'avenir afin de pouvoir accomplir résolument ce que Dieu a préparé pour vous : une longue route vous reste encore à parcourir en effet vers de grandes entreprises, et, lorsque Nous vous voyons y avancer avec courage, au milieu de l'affliction et de la tristesse présentes, Nous en retirons un véritable réconfort. Par vos prières, par les exemples de vos vies et de vos moeurs, par vos paroles, il faut ensuite attirer ceux qui abandonnèrent le bercail du Christ, de manière que par leur retour ils réjouissent leurs frères, et que dans l'Eglise ils honorent le vrai Dieu, ce Dieu dont celui qui s'éloigne est opprimé par les ténèbres, tandis que celui qui s'en rapproche rayonne de lumière. « Il ne faut pas désespérer : priez, prêchez, aimez : Dieu est puissant. Déjà ils ont commencé à connaître son visage ; beaucoup l'ont connu et beaucoup ont rougi de honte ; le Christ sera présent pour que les autres également le connaissent » 3.

Quand vous aurez donc constaté la présence de la droite invincible du Christ, rejetant toute crainte, persévérez dans la bataille du Seigneur ; que votre confiance soit plus solide que le roc ; que votre espérance, plus brillante que le soleil, même quand tout semble aller de travers et crouler, fortifie vos résolutions de pieuses constances et oriente votre esprit inébranlable vers de sereins présages. Que pouvez-vous craindre ? « La Sainte Eglise sait croître au milieu des douleurs et conserver une vie honorable au milieu des outrages ; elle sait ne pas se décourager dans les adversités ni s'enorgueillir dans la prospérité, elle sait s'humilier ; en face de l'adversité, elle sait s'élever aux plus hautes espérances » 4.

Songez que nous sommes appelés au service du Dieu vivant5, afin que, dans la victoire sur le péché et la mort, resplendissent les étendards triomphants de la vérité et de l'amour. Aussi adressons-Nous à chacun de vous l'exhortation de saint Ignace d'Antioche à saint Polycarpe : « Sois solide comme l'enclume battue » 6. Car les grands efforts que vous supportez ne demeureront pas sans un grand résultat.

Nous sentons Notre esprit rempli d'une particulière douceur quand Nous découvrons que la sublime Mère de Dieu est si

tendrement aimée par vous et par vos fidèles, que dans ce culte et cette confiance vous ne le cédez à personne, mais que vous en surpassez beaucoup. Que la Vierge bienveillante et propice regarde donc du ciel les Polonais qui ont recours à Elle ; et puisqu'elle est pour eux protection, soutien, ornement, qu'à leurs voeux suppliants, Elle, leur très puissante Patronne, change en joie ce qui, est maintenant, pour eux source de crainte.

Et pour que ces célébrations centenaires portent les plus abondants fruits spirituels, Nous autorisons volontiers les évêques à donner une fois aux fidèles, le jour de leur choix, en Notre nom et avec Notre autorité, la Bénédiction apostolique avec l'indulgence plénière sacrée, aux conditions habituelles. De même Nous accordons pour cette année que les Polonais, qui, dans leur patrie ou à l'étranger, visitent une église le jour anniversaire de la canonisation de saint Stanislas, acquièrent une fois l'indulgence plénière aux conditions habituelles.

Il ne Nous reste plus qu'à donner la Bénédiction apostolique à vous, cher Fils et vénérables Frères, à tous les prêtres, les religieux et les fidèles, et particulièrement à la jeunesse pour laquelle vous partagez l'angoisse et la sollicitude des parents. Que cette Bénédiction, signe de la prédilection paternelle, vous obtienne l'aide efficace de Dieu, par l'intercession même de saint Stanislas, lui dont le glorieux martyre honora votre chère et illustre patrie et dont aujourd'hui le puissant patronage est toujours prêt à la défendre.










Pie XII 1953 - ALLOCUTION AUX MEMBRES DU QUATRIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE CHIRURGIE