Pie XII 1953 - LETTRE APOSTOLIQUE AU RÉV. PÈRE ABELLAN, S. J. POUR LE QUATRIÈME CENTENAIRE DE L'UNIVERSITÉ GRÉGORIENNE


RADIOMESSAGE AU CONGRÈS EUCHARISTIQUE DU BRÉSIL



(15 août 1953) 1





En ce jour de l'Assomption se clôturait le VIe Congrès Eucharistique National du Brésil à Belem de Para, sous la présidence de Son Eminence le Cardinal Alvaro da Silva, Légat Pontifical2. Le message suivant fut transmis par radio :

Vénérables Frères et chers Fils, vous êtes venus de tout le Brésil catholique vers la ville de Bélem de Para, et, sous les auspices de Notre-Dame de Nazareth, en ce jour lumineux de sa glorieuse Assomption au ciel, y rendez au Dieu de l'Eucharistie, « fruit du sein immaculé de la Vierge très pure », vos hommages de foi et d'adoration, d'amour et de réparation, d'inaltérable fidélité et dévotion.

En cette heure solennelle, présent au milieu de vous dans la personne de Notre très digne Légat, et contemplant en esprit le magnifique exemple que vous donnez au monde, Nous Nous élevons par la pensée auprès de la Vierge triomphante, jusqu'à la Jérusalem céleste et Nous contemplons le Dieu élevé sur son trône, ayant autour de lui, avec les hiérarchies célestes, la multitude innombrable des élus de toute tribu, langue, peuple et nation qui, par lui et avec lui, devenus frères en une seule famille, adorent et aiment, bénissent et glorifient, comme divinisés dans son infinie béatitude, la Majesté de l'Eternel *.

Jérusalem céleste, divine vision de paix et d'amour, éternelle, inaltérable et béatifiante !

Une image, une préparation, un prélude de cette divine vision se trouve dans le spectacle que vous offrez aujourd'hui, réunis à la Sainte Table ou recueillis en intime adoration autour du trône eucharistique, mais surtout et en proportion beaucoup plus grandiose dans la Sainte Eglise catholique, qui, répandue de par le monde entier, est pourtant toujours unie dans la foi et dans l'amour de la divine Eucharistie. Que les autels se multiplient, c'est toujours l'unique et même victime divine qui s'immole deux cent ou trois cent mille fois par jour, à travers toute la terre, et qui se multiplie également à la Sainte Table ; c'est toujours l'unique et même aliment que tous reçoivent ; il les réunit tous, fussent-ils des millions, dans le seul Corps mystique du Christ. C'est pourquoi le génie de saint Augustin a pu dire que la Sainte Eucharistie est, finalement, la société des élus parce qu'elle la symbolise, la prépare et la forme

En effet, l'Eucharistie, ce mystère des mystères et « miracle le plus grand » de l'amour infini du Christ, a été le sujet de vos méditations pendant ces jours de votre Congrès National. L'Eucharistie — instituée par Jésus surtout pour qu'elle fût comme le Coeur de l'Eglise, le centre où convergent et où se fondent en un seul corps et une seule âme les fidèles dispersés sous toutes les latitudes du globe — est la source abondante où tous puisent la sève nutritive de la même vie divine. C'est lui-même qui affirma solennellement avec toute la force de sa parole infaillible et toute-puissante : « Mon Corps est vraiment une nourriture et mon Sang est vraiment un breuvage. Celui qui mange ma Chair et boit mon Sang demeure en moi et moi en lui » 5.

Et c'est après la première communion, instituée et distribuée par ses mains divines, qu'il formulait son commandement nouveau : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés » ; et c'est alors aussi qu'il formulait, Prêtre éternel, le voeu suprême de son amour : « Père saint, garde en ton nom ceux que tu m'as donnés, qu'ils soient un, comme Nous sommes un ». Et non seulement ceux qui sont ici présents, mais tous ceux qui, au cours des siècles, croiront en moi : que tous soient un comme toi, ô Père, tu es en moi et moi en toi, qu'eux aussi soient un en nous, . . . dans une très parfaite et constante unité *.

Oh ! mystère de la divine et infinie miséricorde ! Oh ! signe et sceau efficace de l'unité ! Oh ! lien de la charité, symbole de paix et de concorde !1. Une seule et même victime à adorer sur tous les autels ; une seule et même nourriture divine servie partout à la Sainte Table ; et tous sans distinction de races ou de nationalités, de conditions et classes sociales, tous également invités à croire, à adorer et à communier, pour que tous soient également participants de son corps et de son sang, tous élevés à la même noblesse souveraine, divinse consortes natune 8, afin que tous se sentent plus que frères, membres du même Corps mystique du Christ, s'aimant les uns les autres affectivement et effectivement comme si c'était le Christ lui-même 9.

Et s'il y a des obstacles à vaincre, des intérêts opposés, des antagonismes, des passions qui engendrent la désunion, l'amour de Jésus-Eucharistie et la grâce toute-puissante qui en provient « pour qui la reçoit non seulement matériellement, remarque saint Augustin, mais spirituellement et fructueusement », saura enfin surmonter, dénouer, et vaincre les difficultés et cimenter la paix et la concorde.

C'est pourquoi, Jésus, amour eucharistique, n'hésite pas, dès ce monde in maligno positus, à proposer aux siens comme idéal de l'amour de Dieu et du prochain qui les doit unir, l'unité de la bienheureuse Trinité ! C'est qu'il a voulu en instituant la divine Eucharistie, faire de notre terre sur laquelle pèse la malédiction du péché, plus qu'une image du ciel, un paradis anticipé !

Les premiers fidèles le comprenaient admirablement, qui toujours dans la célébration du Saint Sacrifice recevaient l'Eucharistie : c'est pourquoi ils s'aimaient et s'aidaient mutuellement, au point de mettre leurs biens en commun, comme membres de la même famille et plus encore comme étant « un seul coeur et une seule âme » dit l'historien inspiré 10. C'est pourquoi ils priaient en rendant grâces que : « comme les grains de blé, de dispersés, qu'ils étaient sur les monts, s'unissent et ne forment plus qu'un seul pain, qu'ainsi se réunisse des extrémités de la terre, ô Seigneur, votre Eglise dans votre royaume » ". C'est pourquoi encore, le signe le plus sûr et le plus ferme de la charité chrétienne, c'était l'Eucharistie qu'on envoyait aux absents, et que les diverses communautés s'envoyaient mutuellement 12. C'est pourquoi finalement l'apôtre saint Paul trouvait si étrange que quelques-uns des fidèles de Corinthe introduisissent des distinctions sociales à la Table du Seigneur dans leurs agapes 13.

Mais pourquoi aller chercher si loin des exemples quand vous les avez si éloquents dans les fastes ecclésiastiques du Brésil ?

Le Brésil n'est-il pas né et n'a-t-il pas été baptisé « Terre de la Sainte Croix » près de l'autel et en présence de Jésus-Eucharistie que les aborigènes adorèrent avant de la connaître, imitant simplement en fraternisant avec eux les premiers qui l'ont découvert ?

La dévotion à Jésus-Eucharistie n'a-t-elle pas été celle qui a le plus contribué à conserver et à fortifier la foi dans les populations formées et à la faire croître dans les nombreuses Missions qui, pendant des siècles, couvrirent la partie brésilienne ? De même dans les immenses régions de l'Amazone dont la ville de Bélem est la capitale et le port, quel fut le moyen le plus efficace pour attirer à la foi les aborigènes et unir leurs coeurs entre eux et avec les constructeurs de la grande nation ? Les confréries ne furent-elles pas, celle du Saint-Sacrement la première et la plus efficace, érigées parmi toutes les populations existant alors ou qui devaient se former, comme le décrétait vers 1600 un de vos plus grands missionnaires le Père Antoine Vieira 14 ?

Et quand, à une heure difficile de votre histoire, l'invasion d'armées étrangères imprégnées d'hérésies menaçait l'unité et plus encore l'intégrité de la foi catholique, n'est-ce pas surtout la dévotion à la divine Eucharistie alliée à celle de la Sainte Vierge qui a uni les esprits pour la victoire ?
























Très chers fils !

Si Nous rappelons ces détails que vous avez certainement médités pendant le Congrès, c'est avant tout pour remercier la divine charité cachée dans l'Eucharistie et qui se manifeste si lumineusement dans ses fruits ; et ensuite pour Nous réjouir paternellement avec vous qui, animés d'une vive foi, faites de Jésus-Eucharistie le centre et la source de votre piété ; mais c'est aussi et surtout pour vous exhorter à puiser toujours dans le Tabernacle de nouvelles énergies pour un ardent et fructueux apostolat.

Aujourd'hui, autant et peut-être plus qu'en aucune grande crise de l'histoire, de nombreuses forces ennemies menacent la paix et tendent à détruire l'union internationale, nationale, sociale, familiale, individuelle, combattant l'unité de la foi, la pureté et la sainteté de la morale, le sérieux et l'intégrité des moeurs, la stabilité et la concorde des familles, enfin la vie chrétienne même dans ses bases.

Que Jésus dans l'Eucharistie vous soit, comme dans le passé et plus encore, une source constante de grâces et d'énergies, pour que vous ne vous laissiez pas entraîner par le torrent des erreurs et des vices, qui inonde le monde. Qu'il fasse de vos associations et de vos familles des copies vivantes de la maison de Nazareth ; qu'il inspire et soutienne le zèle de votre apostolat pour que toute la grande famille brésilienne, unie dans la vraie paix, dans l'ordre et le progrès et prenant comme modèle la Sainte Famille, se montre digne de voir régner et se répandre sur elle toute la munificence et la bonté de la Souveraine Reine et Mère Notre-Dame de Nazareth, aujourd'hui solennellement couronnée.










CONCORDAT ENTRE LE SAINT-SIÈGE ET L'ESPAGNE

(27 août 1953) 1 Au nom de la Très Sainte Trinité,

Le Saint-Siège apostolique et l'Etat espagnol, animés du désir d'assurer une féconde collaboration, pour le plus grand bien de la vie religieuse et civile de la nation espagnole, ont décidé de signer un Concordat qui, reprenant les accords antérieurs et les complétant, constitue la norme qui doit régler les relations réciproques des hautes parties contractantes, en conformité à la loi de Dieu et à la tradition catholique de la nation espagnole.

A cette fin, Sa Sainteté Pie XII a tenu à désigner expressément comme son plénipotentiaire :

Son Excellence Reverendissime Mgr Domenico Tardini, prosecrétaire d'Etat pour les affaires ecclésiastiques extraordinaires,

Et Son Excellence le Chef de l'Etat espagnol, Don Francisco Franco Bahamonde, a tenu à désigner expressément comme ses plénipotentiaires : son Excellence Don Alberto Martin Ar-tajo, Ministre des affaires Etrangères et son Excellence don Fernando de Maria Catiella y Maiz, ambassadeur espagnol près le Saint-Siège.

Lesquels, après échange de leurs pleins pouvoirs respectifs et reconnaissance de leur authenticité, ont convenu ce qui suit :


ARTICLE PREMIER

La religion catholique, apostolique, romaine continue d'être la seule de la nation espagnole et elle jouira des droits et des prérogatives qui lui reviennent en conformité avec la loi divine et le droit canonique.


















ARTICLE 2

1. L'Etat espagnol reconnaît à l'Eglise catholique le caractère de société parfaite et lui garantit le libre et plein exercice de son pouvoir spirituel et de sa juridiction, ainsi que le libre et public exercice du culte.

2. En particulier, le Saint-Siège pourra librement promulguer et publier en Espagne toute disposition relative au gouvernement de l'Eglise et communiquer sans empêchement avec les prélats, le clergé et les fidèles du pays, de la même manière que ceux-ci pourront le faire avec le Saint-Siège.

Jouiront des mêmes pouvoirs les Ordinaires et les autres autorités ecclésiastiques à l'égard de leur clergé et de leurs fidèles.

ARTICLE 3

1. L'Etat espagnol reconnaît la personnalité juridique internationale du Saint-Siège et de l'Etat de la Cité du Vatican.

2. Afin de maintenir dans la forme traditionnelle les relations amicales entre le Saint-Siège et l'Etat espagnol, continueront en permanence à être accrédités un ambassadeur d'Espagne près le Saint-Siège et un nonce apostolique à Madrid. Celui-ci sera le doyen du corps diplomatique, aux termes du droit établi par l'usage.

ARTICLE 4

x. L'Etat espagnol reconnaît la personnalité juridique et la pleine capacité d'acquérir, de posséder et d'administrer toute catégorie de biens, à toutes les institutions et associations religieuses existant en Espagne à l'entrée en vigueur du présent Concordat, constituées suivant le droit canonique ; en particulier aux diocèses avec leurs institutions annexes, aux paroisses, aux Ordres et Congrégations religieuses, aux Sociétés de vie commune et aux Instituts séculiers de perfection chrétienne ca-noniquement reconnus, qu'ils soient de droit pontifical ou de droit diocésain ; à leurs provinces et à leurs maisons.

2. Jouiront d'une égale reconnaissance les entités de même nature qui seront érigées ou approuvées en Espagne par les autorités ecclésiastiques compétentes, sous la seule condition que le décret d'érection ou d'approbation soit communiqué officiellement par écrit aux autorités compétentes de l'Etat.

3. La gestion ordinaire et extraordinaire des biens appartenant à des entités ecclésiastiques ou associations religieuses, ainsi que la surveillance et l'inspection de la dite gestion de biens seront exercées par les autorités compétentes de l'Eglise.

ARTICLE 5

L'Etat considérera comme fériés les jours établis comme tels par l'Eglise dans le Code de droit canonique ou en d'autres dispositions particulières sur les fêtes locales, et donnera dans sa législation les facultés nécessaires pour que les fidèles puissent remplir, ces jours-là, leurs devoirs religieux.

Les autorités civiles, tant nationales que locales, veilleront à l'observance obligatoire du repos, les jours fériés.

ARTICLE 6

Conformément aux concessions des Souverains Pontifes, saint Paul V et Grégoire XIII, les prêtres espagnols adresseront chaque jour des prières pour l'Espagne et pour le chef de l'Etat, suivant la formule traditionnelle et les prescriptions de la liturgie sacrée.

ARTICLE 7

Pour la nomination des archevêques et des évêques résidentiels et de leurs coadjuteurs avec droit de succession, continueront d'être en vigueur les normes de l'accord signé entre le Saint-Siège et le gouvernement espagnol le 7 juin 19412.

ARTICLE 8

Continuera de subsister dans la cité royale le priorat Nul-lius des ordres militaires.

Pour la nomination de l'évêque prieur, on appliquera les normes auxquelles se réfère l'article précédent.






ARTICLE 9

1. Afin d'éviter, autant que possible, que les diocèses ne
renferment des territoires appartenant à différentes provinces
civiles, les hautes parties contractantes procéderont, d'un com-
mun accord à une revision des circonscriptions diocésaines.

De même, le Saint-Siège, d'accord avec le gouvernement espagnol, prendra les mesures opportunes pour supprimer ces enclaves.

Aucune partie du territoire espagnol ou de souveraineté espagnole, ne dépendra de l'Evêque dont le siège se trouve en territoire soumis à la souveraineté d'un autre Etat, et aucun diocèse espagnol ne comprendra des zones de territoire soumis à une souveraineté étrangère, à l'exception de la principauté d'Andorre qui continuera d'appartenir au diocèse d'Urgel.

2. Pour l'érection d'un nouveau diocèse ou d'une nouvelle province ecclésiastique et pour les autres changements de circonscriptions diocésaines qui pourraient être jugés nécessaires, le Saint-Siège se mettra préalablement d'accord avec le gouvernement espagnol sauf s'il s'agit de rectifications minimes de territoire, réclamées pour le bien des âmes.

3. L'Etat espagnol s'engage à pourvoir aux besoins économiques des diocèses qui seront érigés dans l'avenir, en augmentant convenablement la dotation établie à l'article 19.

En outre, l'Etat, par lui-même, ou par l'intermédiaire des corporations locales intéressées, contribuera par une subvention extraordinaire aux dépenses initiales de l'organisation des nouveaux diocèses ; en particulier, il subventionnera la construction des nouvelles cathédrales et des édifices destinés à la résidence du prélat, des bureaux de la Curie et des Séminaires diocésains.

ARTICLE 10

Pour la provision des bénéfices non consistoriaux, on continuera d'appliquer les dispositions de l'accord signé le 16 juillet 1946.

ARTICLE 11

1. L'autorité ecclésiastique pourra librement ériger de nouvelles paroisses et modifier les limites de celles qui existent déjà.

Lorsque ces mesures entraînent une augmentation de la contribution économique de l'Etat, l'autorité ecclésiastique se mettra d'accord avec l'autorité compétente de l'Etat pour ce qui se réfère à la dite contribution.

2. Si l'autorité ecclésiastique juge opportun de grouper d'une façon définitive ou provisoire, différentes paroisses, soit en les confiant à un seul curé, assisté d'un ou de plusieurs coadjuteurs soit en réunissant dans un seul presbytère différents prêtres, l'Etat maintiendra intégralement les dotations assignées aux dites paroisses. Les dotations pour les paroisses qui sont vacantes ne peuvent être distinctes des dotations pour les paroisses qui sont pourvues de titulaire.

ARTICLE 12

Le Saint-Siège et le gouvernement espagnol régulariseront dans un accord distinct et dès que possible ce qui se réfère au régime des chapellenies et fondations pieuses en Espagne.

ARTICLE 13

1. En considération des liens de piété et de dévotion qui ont uni la nation espagnole à la basilique patriarcale de Sainte-Marie-Majeure, le Saint-Siège confirme les privilèges honorifiques traditionnels et les autres dispositions en faveur de l'Espagne, contenus dans la bulle Hispaniarum Fidelitas, du 3 août 1953 3.

2. Le Saint-Siège accorde que l'espagnol soit l'un des idiomes admis pour traiter les causes de béatification et de canonisation en la Sacrée Congrégation des Rites.

ARTICLE 14

Les clercs et les religieux ne seront pas obligés d'assumer les charges publiques ou fonctions qui, suivant les normes du droit canonique, seraient incompatibles avec leur emploi.

Pour occuper des emplois ou des charges publics, ils auront besoin du nihil obstat de leur Ordinaire du lieu où ils auraient à déployer leur activité. En cas de révocation du nihil obstat, ils ne pourraient continuer à les exercer.

ARTICLE 15

Les clercs et religieux, qu'ils soient profès ou novices, sont exempts du service militaire, conformément aux canons 221 et 614 du Code de droit canonique.

A ce sujet, continue d'être en vigueur la convention intervenue entre les hautes parties contractantes dans l'accord du 5 août 1950 relatif à la juridiction militaire 4.

ARTICLE 16

1. Les prélats dont il est parlé au § 2 du canon 120 du Code de droit canonique ne pourront être cités devant un juge laïque, sans qu'ait été obtenue préalablement la permission obligatoire du Saint-Siège.

2. Le Saint-Siège consent à ce que les affaires contentieu-ses concernant des biens ou des droits temporels dans lesquelles seraient demandeurs des clercs ou des religieux, soient portées devant les tribunaux de l'Etat, après notification à l'Ordinaire du lieu où est instruit le procès auquel devront aussi être communiquées en leur temps les sentences ou décisions correspondantes.

3. L'Etat reconnaît et respecte la compétence privative des tribunaux de l'Eglise pour les délits constituant exclusivement la violation d'une loi ecclésiastique, conformément au canon 2198 du Code de droit canonique.

Contre les sentences de ces tribunaux n'interviendra aucun recours auprès des autorités civiles.

4. Le Saint-Siège consent à ce que les causes criminelles con-
tre les clercs ou religieux pour les autres délits, prévus par les
lois pénales de l'Etat, soient jugées par les tribunaux de l'Etat.

Cependant, l'autorité judiciaire, avant de commencer la procédure, devra solliciter, sans préjudice des mesures à prendre en pareil cas, et avec la réserve requise, le consentement de l'Ordinaire du lieu où est instruit le procès.

Au cas où, pour de graves motifs, l'Ordinaire croira de son devoir de refuser ce consentement, il devra en faire part par écrit à l'autorité compétente.

Le procès sera entouré des précautions nécessaires pour éviter toute publicité.

Les résultats de l'instruction, ainsi que la sentence définitive du procès, aussi bien en première qu'en dernière instance, devront être notifiés avec diligence à l'Ordinaire du lieu mentionné plus haut.

3. En cas de détention ou d'arrestation, les clercs et les religieux seront traités avec les égards dus à leur état et à leur grade hiérarchique.

Les peines de privation de liberté seront accomplies dans une maison ecclésiastique ou religieuse qui, de l'avis de l'Ordinaire du lieu et de l'autorité judiciaire de l'Etat, offre les garanties convenables ; ou tout au moins, dans des locaux distincts de ceux destinés aux civils, à moins que l'autorité ecclésiastique compétente ait réduit le condamné à l'état laïque.

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-mm



On leur accordera les bénéfices de la liberté conditionnelle ainsi que les autres établis dans la législation de l'Etat.

6. Au cas où serait décrétée la confiscation des biens, on
laissera aux ecclésiastiques ce qui leur est nécessaire pour une
honnête subsistance et la dignité de leur état, tout en mainte-
nant l'obligation pour eux de payer ce qu'ils doivent à leurs
créditeurs.

7. Les clercs et les religieux pourront être cités ccomme té-
moins devant les tribunaux de l'Etat ; cependant, s'il s'agit de
causes criminelles pour délits que la loi punit de peines graves,
on devra en demander la permission à l'Ordinaire du lieu où
est instruit le procès. Toutefois, en aucun cas, ils ne pourront
être requis, par les magistrats ni par d'autres autorités, pour
fournir des renseignements sur des personnes ou des faits ma-
tériels dont ils auraient eu connaissance en vertu de leur mi-
nistère sacré.

ARTICLE 17

L'usage de l'habit ecclésiastique ou religieux pour les laïcs, ou pour les clercs ou les religieux auxquels il aurait été interdit en vertu d'une décision ferme des autorités ecclésiastiques compétentes est défendu et sera puni, une fois communiqué officiellement au gouvernement, des mêmes sanctions et peines qui sont appliquées à ceux qui usent indûment de l'uniforme militaire.

ARTICLE 18

L'Eglise peut librement demander à ses fidèles les prestations autorisées par le droit canonique, organiser des collectes et recevoir des sommes et des biens meubles et immeubles en vue de l'obtention de ses propres fins.

ARTICLE 19

1. L'Eglise et l'Etat étudieront d'un commun accord la créa-
tion d'un patrimoine ecclésiastique suffisant pour assurer une
dotation convenable du culte et du clergé.

2. En attendant, l'Etat, à titre d'indemnisation pour les con-
fiscations passées de biens ecclésiastiques et comme contribu-
tion à l'oeuvre de l'Eglise en faveur de la nation, lui assignera
annuellement une dotation convenable. Celle-ci comprendra en
particulier des traitements réservés aux archevêques et évêques diocésains, aux coadjuteurs, auxiliaires, vicaires généraux, aux chanoines des cathédrales et des collégiales, au clergé paroissial ainsi que les subventions en faveur des Séminaires et Universités ecclésiastiques, et pour l'exercice du culte.

En ce qui concerne la dotation de bénéfices non consisto-riaux, et les subventions pour les Séminaires et les Universités ecclésiastiques continueront d'être en vigueur les règles fixées dans les accords respectifs du 16 juillet et du 8 décembre 1946.

Si dans l'avenir, venait à se produire un changement notable des conditions économiques générales, les dites dotations seront opportunément adaptées aux nouvelles circonstances, de manière que restent toujours assurés l'entretien du culte et la subsistance convenable du clergé.

3. L'Etat fidèle à la tradition nationale, accordera chaque année des subventions pour la construction et la conservation des églises paroissiales, des presbytères et des Séminaires, la prospérité des Ordres, Congrégations et Instituts ecclésiastiques consacrés à l'activité missionnaire et à l'entretien des monastères ayant une importante valeur historique en Espagne, ainsi que pour aider à l'entretien du collège espagnol de Saint-Joseph, de l'église et de la résidence espagnoles de Montserrat à Rome.

4. L'Etat accordera à l'Eglise sa collaboration, pour créer et financer des institutions d'assistance en faveur du clergé vieux, infirme ou invalide. Il assurera également une pension convenable aux prélats résidentiels qui, pour raison d'âge ou de santé, se démettent de leur charge.

ARTICLE 20

1. Jouiront de l'exemption d'impôts et de contributions de caractère national ou local :

a) Les églises et chapelles destinées au culte, de même que les édifices et locaux annexes destinés à leur service ou au siège d'associations catholiques ;

b) la résidence des évêques, des chanoines et des prêtres ayant charge d'âmes, à la condition toujours que l'immeuble soit la propriété de l'Eglise ;

c) Les locaux destinés aux bureaux de la Curie diocésaine et aux bureaux paroissiaux ;

d) Les Universités catholiques et les Séminaires destinés à la formation du clergé ;

e) Les maisons, les Ordres, Congrégations et Instituts religieux et séculiers canoniquement établis en Espagne ;

f) Les collèges et autres centres d'enseignement de bienfaisance, dépendant de la hiérarchie ecclésiastique.

Sont compris dans cette exemption les vergers, jardins et dépendance des immeubles énumérés, à condition toujours de n'être pas destinés à une industrie ou à quelque autre usage de caractère lucratif.

2. Jouiront également de l'exemption totale en matière de contributions les objets destinés au culte catholique, ainsi que la publication des instructions, ordonnances, lettres pastorales, bulletin diocésain et tout autre document des autorités ecclésiastiques compétentes se rapportant au gouvernement spirituel des fidèles, de même que leur affichage aux endroits habituels.

3. Sont également exempts de tout impôt et de toute contribution les dotations du culte et du clergé auxquelles se réfère l'article 19 ; ainsi que l'exercice du ministère sacerdotal.

4. Tous les autres biens d'entités ou de personnes ecclésiastiques ainsi que leurs revenus qui ne proviennent pas de l'exercice d'activités religieuses propres à leur apostolat, demeureront soumis à l'impôt conformément aux lois générales de l'Etat, dans les mêmes conditions que les autres institutions ou personnes.

5. Les dotations, legs ou héritages destinés à la construction d'édifices du culte catholique ou de maisons religieuses seront assimilés, pour tous les effets en matière de contribution, à ceux destinés à des fins de bienfaisance ou au profit de l'enseignement.

ARTICLE 21

1. Dans chaque diocèse sera constituée une Commission qui, sous la présidence de l'Ordinaire, veillera à la conservation, à la réparation et aux réfections éventuelles de temples, de chapelles et d'édifices ecclésiastiques, déclarés monuments nationaux, historiques ou artistiques, ainsi que des antiquités et oeuvres d'art qui sont la propriété de l'Eglise ou lui sont confiées en usufruit ou en dépôt et qui ont été déclarés comme étant d'une haute valeur ou d'une importance historique nationale.

2. Ces Commissions seront nommées par le ministère de l'Education nationale et seront composées, par moitié, de membres choisis par l'évêque et approuvés par le gouvernement, et, par moitié, de membres désignés par le gouvernement avec l'approbation de l'évêque.

3. Les dites Commissions seront aussi compétentes en ce qui concerne les fouilles intéressant l'architecture sacrée et veilleront, avec l'Ordinaire, à ce que la reconstruction et la réparation des édifices mentionnés plus haut soient conformes aux règles techniques et artistiques de la législation générale, aux prescriptions de la liturgie et aux exigences de l'art sacré.

Elles veilleront également à l'accomplissement des conditions établies par les lois, tant civiles que canoniques, concernant l'aliénation et l'exportation d'objets de caractère historique ou d'une valeur artistique, propriété de l'Eglise, ou à elle confiés en usufruit ou en dépôt.

4. Le Saint-Siège consent à ce que, en cas de vente de ces objets aux enchères publiques, conformément aux règles du droit canonique, option d'achat soit donnée, à conditions égales à l'Etat.

5. Les autorités ecclésiastiques donneront des facilités pour l'étude des documents conservés aux archives ecclésiastiques publiques qui dépendent exclusivement d'elles. De son côté, l'Etat prêtera l'aide technique et économique convenable pour l'installation, le classement et la conservation des dites archives.

ARTICLE 22

1. Demeure garantie l'inviolabilité des églises, chapelles, cimetières et autres lieux sacrés, suivant les prescriptions du canon 1160 du Code de droit canonique.

2. Demeure également garantie l'inviolabilité des palais et curies épiscopaux, des Séminaires, des maisons et bureaux paroissiaux, des presbytères, ainsi que des maisons religieuses canoniquement établies.

3. Sauf en cas d'urgente nécessité, la force publique ne pourra pénétrer dans les dits édifices pour l'exercice de ses fonctions, sans le consentement de l'autorité ecclésiastique compétente.

4. Si pour une grave nécessité publique, particulièrement en temps de guerre, il était besoin d'occuper temporairement quel






qu'un des dits édifices, on devra le faire après accord préalable avec l'Ordinaire compétent.

Si des raisons d'urgence absolue ne permettaient pas de le faire, l'autorité qui procède à l'occupation devra en informer immédiatement l'Ordinaire lui-même.

5. Les dits édifices ne pourront être démolis, sinon d'accord avec l'Ordinaire compétent, sauf en cas d'urgence absolue, par exemple pour raison de guerre, d'incendie, d'inondation.

6. En cas d'expropriation pour utilité publique, l'autorité ecclésiastique compétente sera toujours préalablement entendue, ainsi qu'en ce qui concerne le montant de l'indemnisation. On ne procédera à aucun acte d'expropriation sans que les biens à exproprier n'aient été, le cas échéant, privés de leur caractère sacré.

7. Les Ordinaires diocésains et les supérieurs religieux, suivant leur compétence respective, sont obligés de veiller à l'observance dans les édifices en question, des lois communes en vigueur en matière de sécurité et de salubrité publique.

ARTICLE 23

L'Etat espagnol reconnaît les pleins effets civils au mariage célébré suivant les normes du droit canonique.

ARTICLE 24

1. L'Etat espagnol reconnaît la compétence exclusive des tribunaux et dicastères ecclésiastiques dans les causes concernant la nullité du mariage canonique, la séparation de conjoints, la dispense du mariage célébré et non consommé, ainsi que la procédure relative au privilège paulin.

2. Une fois commencée et admise devant le tribunal ecclésiastique une demande de séparation ou de nullité, il incombe au tribunal civil d'édicter, sur l'instance de la partie intéressée, les règles et mesures préventives, qui règlent les effets civils découlant de la procédure en cours.

3. Les sentences et décisions dont il est question, lorsqu'elles sont fermes et exécutoires, seront communiquées par le tribunal ecclésiastique ou tribunal civil compétent, lequel prescrira le nécessaire pour leur exécution quant aux effets civils et ordonnera — s'il s'agit de nullité, de dispenses super rato ou d'application du privilège paulin — qu'elles soient inscrites au registre de l'état civil en marge de l'acte de mariage.

4. En général, toutes les sentences, décisions administratives et décrets émanés des autorités ecclésiastiques, en n'importe quelle matière du domaine de sa compétence, auront été communiqués aux autorités compétentes de l'Etat, lesquelles prêteront, en plus, l'aide nécessaire pour leur exécution.

ARTICLE 25

1. Le Saint-Siège confirme le privilège accordé à l'Espagne, en vertu duquel certaines causes sont examinées et jugées devant le tribunal de la Rote de la nonciature apostolique, conformément au Motu Proprio pontifical en date du 7 avril 1947, qui rétablit le dit tribunal 5.

2. Feront toujours partie du dit tribunal de la Sacrée Rote Romaine deux auditeurs de nationalité espagnole, qui occuperont les siXcchs0 èges traditionnels d'Aragon et de Castille.
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Lri0Dans tous les w0 centres de tout ordre et de tout degré, d'Etat ou non d'Etat,)10 l'enseignement sera #onforme auh principes du dogmeLexpndtw-10 et de xpndtw0 la morale de l'Eglise pndtw0 catholique 6.

Les Ordinaires rempliront xpndtw0 librement leur ¬mission de.dtw-10 surveillance des dits centres enseignants, en ce qui concerne la pureté de la foi, les bonnes moeurs et l'éducation religieuse.

Les Ordinaires pourront exiger que soient interdits ou que soient retirés les livres, publications et matériel d'enseignement contraires au dogme et à la morale catholique.

Pie XII 1953 - LETTRE APOSTOLIQUE AU RÉV. PÈRE ABELLAN, S. J. POUR LE QUATRIÈME CENTENAIRE DE L'UNIVERSITÉ GRÉGORIENNE