Pie XII 1956 - DISCOURS A UN GROUPE INTERNATIONAL DE CANCÉROLOGUES


PRIÈRE A LA TRÈS SAINTE VIERGE MARIE MÈRE DES ORPHELINS

(28 août 1956) 1






Accueillant volontiers la requête du R. P. Général des Somasques, le Souverain Pontife a composé une prière adressée à la très Sainte Vierge Marie, Mère des orphelins, dont nous donnons la traduction. Le Saint-Père a enrichi cette prière d'une indulgence partielle de mille jours.

Nous te saluons, ô Vierge très pure, Reine très puissante, que la famille humaine appelle du nom très doux de Mère ! Nous ne pouvons pas invoquer notre mère terrestre, car ou bien nous ne l'avons jamais connue, ou bien nous avons été très tôt privés d'un appui si nécessaire et si doux ; aussi c'est à Toi que nous nous adressons, certains que Tu voudras, pour nous spécialement, être mère. Si, en effet notre condition éveille chez tout le monde pitié, compassion et amour, elle suscitera encore plus de tels sentiments chez Toi, la plus aimante, la plus tendre, la plus compatissante de toutes les créatures.

O Mère véritable de tous les orphelins, nous nous réfugions 1 auprès de ton coeur immaculé, assurés de trouver en lui le reconfort auquel aspire notre coeur désolé ; nous mettons toute notre confiance en Toi, afin que ta main maternelle nous guide et soutienne le long de l'âpre sentier de la vie.

Bénis tous ceux qui nous aident et protègent en ton nom ; récompense nos bienfaiteurs et les âmes choisies qui consacrent leur vie à notre service. Mais, surtout, sois pour nous toujours une mère qui façonne nos coeurs, éclaire nos esprits, trempe nos volontés, orne nos âmes de toutes vertus et éloigne de '|

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l D'après le texte italien des A. A. S., XXXXVIII, 1956, p. 641, traduction française de VOsservatore Romano, du 7 septembre 1956.

nous les ennemis de notre bien, qui voudraient nous perdre à jamais.

Enfin, ô notre Mère très aimante, qui fais nos délices et soutiens notre espoir, conduis-nous à Jésus, le fruit béni de tes entrailles, afin que, si nous ne connaissons pas ici-bas la douce affection d'une mère, nous nous rendions d'autant plus dignes de Toi en cette vie et puissions jouir dans l'éternité de ton affection maternelle et de ta présence, ainsi que de celle de ton Fils divin, qui avec le Père et l'Esprit-Saint vit et règne dans les siècles des siècles.

Ainsi soit-il.


ALLOCUTION AU CHOEUR POLYPHONIQUE DES MÉDECINS DE BARCELONE

(29 août 1956) 1






Le mercredi 2g août, le Saint-Père a reçu en audience à Castelgan-dolfo le « Choeur polyphonique du Collège officiel des médecins de Barcelone », venus en Italie pour participer au IVe concours international de musique polyphonique pour amateurs, organisé à Arezzo. Il leur a adressé une allocution en espagnol, dont nous donnons la traduction suivante :

Si l'on a toujours dit que la charité est ingénieuse, parce que, lorsqu'elle se manifeste dans sa pureté, elle trouve pour s'exercer les moyens les plus secrets et jusqu'aux plus incroyables, personne ne pourra s'étonner que Nous ayons aujourd'hui en Notre présence un choeur, une « Chapelle polyphonique », formée rien moins que par des médecins, avec la collaboration de leurs familles, consacrée spécialement à adoucir les heures interminables, les heures de tristesse, les heures douloureuses de leurs malades, et manifestant dans ses activités tant de délicatesse et de bonté que Nous dirions presque que Nous en avons été attendri.

Que la « Chapelle polyphonique du Collège officiel des médecins de Barcelone » soit donc mille et mille fois la bienvenue et que le Seigneur la récompense de sa charité comme II sait le faire et comme Nous le Lui demandons. Vous êtes médecins et vous savez parfaitement que les remèdes ne sont pas uniquement ceux que contiennent fioles ou seringues ; il y a chez l'homme un je ne sais quoi qui vaut beaucoup plus et qui est bien plus décisif ; et pour le réconforter, soutenir, ranimer et


ALLOCUTION AU CHOEUR POLYPHONIQUE DES MÉDECINS DE BARCELONE

(29 août 1956) 1






Le mercredi 2g août, le Saint-Père a reçu en audience à Castelgan-dolfo le « Choeur polyphonique du Collège officiel des médecins de Barcelone », venus en Italie pour participer au IVe concours international de musique polyphonique pour amateurs, organisé à Arezzo. Il leur a adressé une allocution en espagnol, dont nous donnons la traduction suivante :

Si l'on a toujours dit que la charité est ingénieuse, parce que, lorsqu'elle se manifeste dans sa pureté, elle trouve pour s'exercer les moyens les plus secrets et jusqu'aux plus incroyables, personne ne pourra s'étonner que Nous ayons aujourd'hui en Notre présence un choeur, une « Chapelle polyphonique », formée rien moins que par des médecins, avec la collaboration de leurs familles, consacrée spécialement à adoucir les heures interminables, les heures de tristesse, les heures douloureuses de leurs malades, et manifestant dans ses activités tant de délicatesse et de bonté que Nous dirions presque que Nous en avons été attendri.

Que la « Chapelle polyphonique du Collège officiel des médecins de Barcelone » soit donc mille et mille fois la bienvenue et que le Seigneur la récompense de sa charité comme II sait le faire et comme Nous le Lui demandons. Vous êtes médecins et vous savez parfaitement que les remèdes ne sont pas uniquement ceux que contiennent fioles ou seringues ; il y a chez l'homme un je ne sais quoi qui vaut beaucoup plus et qui est bien plus décisif ; et pour le réconforter, soutenir, ranimer et

guérir, on dispose d'autres moyens, dont la musique. Qui sait si, plus d'une fois, une douce mélodie, un accord harmonieux et complet, un morceau plein d'allégresse et de mouvement, n'auront pas fait pour la santé de vos malades beaucoup plus que les médecines de la pharmacopée.

La tradition a voulu très souvent voir les anges accompagnant les bonnes âmes qui, guidées par la charité chrétienne, accourent au chevet des malades. L'art chrétien a aussi très souvent représenté les anges réunis en choeurs des plus suaves ou avec de simples instruments dans les mains. Que vos choeurs soient toujours une imitation des choeurs angéliques par le choix de vos chants, par la délicatesse de l'exécution, par la pureté de l'intention ; mais qu'ils le soient surtout par votre vie elle-même, une vie qui vous rende dignes d'une activité si délicate, si sainte et si chrétiennement louable.

En vous souhaitant les grâces divines les plus abondantes, Nous vous bénissons tout spécialement et Nous bénissons aussi vos très chers malades, auxquels vous apporterez le souvenir, l'affection et les meilleurs voeux du Pape, Père commun.

RADIOMESSAGE POUR LE 77e KATHOLIKENTAG DE COLOGNE
(2 septembre 2956) 1






Le dimanche 2 septembre, le Saint-Père a bien voulu conclure le soixante-dix-septième « Katholikentag » de Cologne par un radiomes-sage en allemand, dont nous donnons la traduction ci-dessous :

C'est avec une joyeuse émotion que Nous adressons la parole au soixante-dix-septième Katholikentag allemand, pour sa grandiose cérémonie de clôture, comme le très estimé Cardinal-archevêque de Cologne nous l'a demandé.
Le Saint-Père adresse un cordial salut à tous les congressistes.


Que ce soit d'abord une parole de salut cordial aux cardinaux, évêques et prêtres qui s'y trouvent, à tous ceux qui, provenant de toute l'Allemagne et, en grand nombre aussi des régions situées au-delà de la frontière interzone, ont afflué dans « Cologne la sainte » pour assister au Katholikentag ; aux hôtes enfin qui, venus d'autres pays d'Europe et du monde, se sont rendus, de tous les continents, à vos solennelles assises, leur imprimant ainsi le sceau de l'Eglise universelle, mère de tous les peuples.

. . . puis une parole de reconnaissance à toutes les associations catholiques allemandes.

Notre parole sera ensuite une parole de reconnaissance a l'intention de vos nombreuses associations libres : confréries, sociétés, fédérations, unions et oeuvres diverses qui, représentant l'Action catholique, ou travaillant dans le sens de cette

m dernière, ont accompli durant les années écoulées un travail considérable pour le progrès religieux de leurs membres, pour les missions dans le monde et la diaspora dans la patrie, pour la jeunesse, l'éducation et l'école, le monde du travail, les professions et conditions particulières, dans l'assistance et la charité, dans la presse, la science et les autres domaines de la culture.
Il rend hommage aux fondateurs et animateurs du Katholikentag.


Honneur au confesseur de la foi, l'évêque de Cologne, Auguste von Droste zu Vischering, qui, par son action courageuse, a fait naître le mouvement catholique allemand ; honneur à vos audacieux prédécesseurs, hommes et femmes, prêtres et laïcs, qui ont su donner forme au mouvement en lançant le Katholikentag, et sont à l'origine de vos organisations — et Nous ne pouvons pas Nous empêcher de citer nommément trois d'entre ces figures de premier plan qui ont fortement marqué le premier Katholikentag de Cologne, en 1858 ; l'archevêque de Cologne de l'époque, le Cardinal Jena von Geissel, qui avait un culte si profond pour Marie, et travailla intensément à promouvoir le mouvement catholique ; l'abbé Adolphe Kolping, père des jeunes ouvriers ; Auguste Reichensperger, le héraut de la construction de la cathédrale, que l'on compte parmi les intrépides dirigeants laïcs allemands du dix-neuvième siècle, non ! aucun de ces hommes et femmes n'a travaillé en vain ! Ce qu'ils ont planté a donné une moisson abondante.



Il exprime sa foie pour la restauration de la cathédrale de Cologne et Y admirable redressement de l'Allemagne.

Notre parole sera enfin une parole de joie pour la restauration, heureusement achevée, de la cathédrale de Cologne ; une parole d'éloge aussi, pour les hommes audacieux qui ont accompli cette oeuvre difficile. La cathédrale de Cologne se dresse comme un appel lancé à tous : élevez vos coeurs vers Dieu ! Elle est là, debout maintenant, comme un merci taillé dans la pierre : action de grâces au Tout-Puissant, qui a daigné en si peu de temps relever l'Allemagne de la ruine totale. Ce monument se dresse à nouveau comme emblème de l'Allemagne catholique et symbole de l'Eglise du Christ, de cet étendard déployé au-dessus des nations.

Signum levatum in nationes (Is 11,12), tel est le mot d'ordre sous lequel vous avez placé votre congrès de cette année. Vos carrefours, vos assemblées auront relevé la beauté et la profondeur de ce thème. Nous ferons simplement les brèves remarques suivantes :



Le Saint-Père évoque les attaques dont l'Eglise d'Allemagne a été l'objet dans le passé. Elle en est sortie plus vivante.

Premièrement : la tourmente idéologique du siècle dernier a eu une influence dévastatrice dans le domaine religieux en dehors de l'Eglise catholique. Elle s'est aussi déchaînée contre le roc sur lequel le Christ a bâti son Eglise ; elle s'est efforcée de faire pénétrer son oeuvre destructrice jusqu'au sein même de l'Eglise. Aux prises avec d'âpres luttes intérieures celle-ci dut se mettre sur la défensive. Mais elle n'a jamais permis que l'on portât la moindre atteinte au trésor de vérité que le Christ lui avait confié, depuis la foi au Dieu Un en Trois Personnes et la divinité de Jésus-Christ, jusqu'à la foi en la résurrection et en la vie éternelle.

Bien plus, elle a passé à la contre-attaque, et, durant cette période précisément, où le sentiment religieux allait se refroidissant et s'éteignant, elle a fait déborder sur les fidèles les flots des grâces eucharistiques avec une surabondance sans précédent dans son histoire.

Nous croyons être redevables de cette libre profession de foi, tout d'abord au Seigneur et Chef de l'Eglise : seules sa volonté et sa puissance préservent l'Eglise à travers toutes les tempêtes. Nous croyons aussi en être redevables à ceux qui, sans peut-être s'en douter eux-mêmes, sont déjà aux portes de l'Eglise ; de même qu'à tous ceux — en nombre toujours croissant — que l'angoisse devant les forces déchaînées de la nature, la peur de l'existence, de l'avenir et d'eux-mêmes poussent à se mettre en quête d'un appui solide. L'Eglise le leur offre : elle est elle-même cet appui. Qui lui fait confiance ne perd rien des valeurs authentiques qu'il possédait. Tout ce que les autres confessions, fussent-elles non chrétiennes, présentent de vrai et de bon, trouve sa place, son sens profond et son aboutissement dans l'Eglise catholique. Elle prête cet appui sans contraindre l'homme à s'insérer de force dans un système totalitaire, et dans le respect total aussi bien de sa nature spirituelle et libre, que de la dignité et de la vocation surnaturelle de sa personne. Même s'il s'agit de la liberté du savoir humain et de la recherche, elle ne connaît qu'une limite : celle que Dieu Lui-même a tracée par le moyen de sa révélation et de sa parole explicite.



Il rappelle que l'Eglise a apporté une importante contribution à l'édification du nouvel ordre social, par sa doctrine sociale.

Deuxièmement : à une Eglise qui s'affirme comme étant l'étendard déployé au-dessus des nations, on demandera compte de la contribution qu'elle a apportée à l'édification de l'ordre social.

L'Eglise catholique peut sans présomption rappeler tous les services considérables qu'elle a rendus au cours de son histoire en faveur de l'organisation et du progrès de la vie sociale ; la recherche historique lui a depuis longtemps déjà rendu cette justice. De plus, l'Eglise n'est pas restée aveugle devant le profond désordre social apporté par l'ère de la technique et du capitalisme. Qu'elle soit capable de résoudre à elle seule la question sociale, elle ne l'a jamais pensé. Elle peut toutefois se permettre d'indiquer, la tête haute, les valeurs qu'elle a mises et qu'elle tient encore à la disposition de tous pour la solution de ces problèmes. Parmi ces valeurs, figure sa doctrine sociale, dont toute l'orientation se fonde, jusque dans les détails sur le droit naturel et la loi du Christ. Cette doctrine a fait ses preuves et s'est révélée très fructueuse, justement aussi chez vous, en Allemagne. L'Eglise, pour l'essentiel, n'a rien à en renier ; elle conserve toute sa valeur.

L'Eglise a toujours insisté avec force sur le fait que l'édification d'un ordre social solide exigeait, outre la réforme des conditions de vie, toute une éducation des esprits ; à savoir le modèlement des consciences suivant les exigences d'un ordre absolu, et la mise en oeuvre des forces morales permettant d'agir toujours en conformité avec la conscience. L'Eglise prétend, et elle l'a démontré, qu'elle est en mesure de former des hommes capables d'une telle conscience. De ce point de vue aussi, le renouveau eucharistique que l'Eglise du vingtième siècle a apporté au monde est le signe visible et tangible de l'action de la Providence divine.

II constate, cependant, avec tristesse, que l'Eglise continue à être victime d'une perfide persécution.

Troisièmement : une manifestation imposante comme la vôtre — et qui par surcroît a pris comme mot d'ordre « l'Eglise étendard déployé au-dessus des nations » — ne peut passer sous silence le fait que l'Eglise catholique, depuis plusieurs décades et surtout depuis dix ans, est soumise à la plus dure, en tout cas, à la plus dangereuse persécution qu'elle ait jamais subie. Car Jésus, en confiant à son Eglise une tâche et une mission à remplir jusqu'à la fin des temps, l'a mise aussi sous le signe de la persécution. Subir la persécution religieuse, c'est toujours, pour le corps mystique du Christ, avoir part aux plaies du Seigneur. Que, entre un système qui a pour fondement l'athéisme et l'impiété, et l'Eglise catholique, ait surgi le plus âpre conflit, c'est un fait dont l'Eglise a le droit d'être fière.



Il met en garde les chrétiens des pays libres contre l'illusion d'une coexistence mensongère avec les ennemis de la religion.

Cela n'empêche pas qu'elle souffre profondément avec ceux qui ont enduré et endurent encore d'amères souffrances pour la cause de leur foi. Elle peut même trembler à la pensée de l'avenir qui l'attend dans ces régions immenses qui sont maintenant soumises à la persécution car l'adversaire dispose, grâce aux mesures de coercition de l'état totalitaire et aux méthodes raffinées d'endoctrinement de l'homme, principalement de la jeunesse et de l'enfance, des moyens tels qu'aucun persécuteur des siècles passés n'en a jamais connus. L'Eglise enfin, avertit les fidèles qui habitent les pays où elle reste libre, d'avoir conscience du danger que représente cet adversaire, et elle les met en garde une fois de plus, contre l'illusion d'une coexistence mensongère, comme si entre la foi et la vision du monde d'un catholique d'une part, et ce système-là de l'autre, on pouvait en venir à une entente, à un accord profond.

Il existe une « coexistence dans la vérité ». Nous avons eu précédemment l'occasion d'en parler ; à ce que nous avons dit alors, nous ajouterons ceci : l'Eglise catholique n'oblige personne à lui appartenir. Mais elle revendique pour elle la liberté de pouvoir vivre dans l'Etat selon sa constitution et ses lois, d'assurer l'assistance de ses fidèles et proclamer ouvertement le message du Christ. C'est pour elle la condition indiscutable de toute honnête coexistence. En attendant, elle poursuit la lutte, non pas sur le terrain politique et économique, comme on ne cesse de le lui reprocher faussement, mais avec ses propres armes : la fermeté de ses fidèles, la prière, la vérité, l'amour. Elle offre l'épreuve de la persécution pour le salut des persécuteurs eux-mêmes, comme pour celui des peuples, des pays où elle est persécutée.

L'Eglise, étendard déployé au-dessus des nations ! une telle devise vous engage tous, très chers fils et filles ; car on juge J'Eglise d'après ce que vous êtes, tant au point de vue religieux qu'au point de vue moral.

Vous vivez dans un monde matérialiste. Caractéristique est, en effet, le peu de cas que l'on y fait des valeurs religieuses. On leur sacrifie peu ou rien, alors qu'on les sacrifie d'un coeur léger à toute valeur d'ici-bas. Renversez ce rapport. Redonnez à Dieu la première place et acceptez que le service de Dieu et du dépôt sacré de votre foi vous coûte quelque chose.



Le Saint-Père termine en invitant les catholiques allemands à travailler à rechristianiser le monde ouvrier.

Vous êtes les citoyens catholiques d'un pays fortement industrialisé. Devant vous se présente la tâche considérable de donner forme et structure chrétienne à ce monde nouveau de l'industrie, à ses ateliers, à ses bureaux, à ses établissements et à toutes ses activités. Le monde de l'industrie n'est pas la nature, mais, comme la nature, il relève du domaine de Dieu. Ici, aussi, l'homme doit se soumettre aux lois que Dieu a inscrites dans les choses. Le Christ, par qui tout a été créé, le Seigneur du monde, est aussi Seigneur de ce monde-là, qui est appelé, lui aussi, à être un monde chrétien. C'est à vous qu'il revient de lui imprimer l'empreinte chrétienne.

Les destinées humaines sont aujourd'hui, dans le monde entier, entrelacées les unes avec les autres comme jamais auparavant. Les dangers en sont d'autant plus grands, si les hommes, si divers du point de vue racial, culturel, historique et en matière d'intérêts, surtout économiques, en viennent à s'opposer en ennemis. Les catholiques, répandus dans le monde entier, peuvent, par leur unité dans la foi et dans l'Eglise, devenir une force puissante pour forger la paix, la paix sociale aussi. Mais il faut pour cela que soit vivante et agissante en eux la conscience de leur appartenance à la même communauté Entretenez tous en vous cette conscience. Car au monde, qui est par lui-même incapable de procurer la paix, le Christ fera don de sa paix : mais il le fera par vous, et pas sans votre collaboration.

Nous conclurons par le cri de louange de l'Apôtre des nations : « Jésus-Christ est le même hier, aujourd'hui et demain et dans l'éternité » (He 13,8).

Vous recommandant tous à la puissante protection de sa Mère la glorieuse Vierge Marie, et en gage de la grâce et de l'amour du Seigneur, Nous accordons à Nos vénérables Frères, les évêques présents au Congrès, à tous les prêtres et à tous les laïcs qui travaillent avec eux dans l'apostolat, ainsi qu'aux représentants et autorités de l'Etat et de la ville, à vous tous, très chers fils et filles, à toute l'Allemagne catholique, dans l'effusion de Notre coeur, la Bénédiction apostolique.


LETTRE DE MONSEIGNEUR DELL'ACQUA SUBSTITUT A LA SECRÉTAIRERIE D'ÉTAT POUR LE CONGRÈS DES DIRECTEURS SPIRITUELS D'ITALIE

(4 septembre 1956) 1






Sa Sainteté Pie Xli a fait parvenir, sous la signature de Son Excellence Monseigneur Dell' Aequa, substitut de la Secrétairerie d'Etat, une lettre adressée à Son Em. le cardinal loseph Pizzardo, préfet de la Sacrée Congrégation des Séminaires et des Universités, pour le congrès des directeurs spirituels d'Italie, qui s'est ouvert le 4 septembre, à Rome. Nous donnons ci-dessous la traduction de ce document :

Le congrès des directeurs spirituels d'Italie, qui va encore une fois se réunir à Rome, sous les auspices de votre Dicastère, offre au Saint-Père l'heureuse occasion de se réjouir du zèle de Votre Eminence Révérendissime et de ses collaborateurs, pour promouvoir tout ce qui contribue au bien du jeune clergé.

Sa Sainteté envoie une pensée d'encouragement paternel, plein de confiance, à cette heureuse rencontre. Elle s'en réjouit d'autant plus qu'Elle connaît bien la délicatesse et les difficultés du travail silencieux de ses fils si méritants, auxquels est confié un domaine combien important pour l'avenir de l'Eglise. Si la tâche de former les jeunes âmes est justement appelée l'art des arts, ce sera, certes, encore bien plus vrai quand il s'agit de préparer aux' responsabilités de demain celui qui devra être dans l'Eglise un guide du troupeau, une lumière qui resplendit sur le candélabre, un sel qui préserve et qui relève.

1 D'après le texte français de l'Osservatore Romano, du 14 septembre 1956.




Le Souverain Pontife trouve, d'autre part, le programme des travaux très intéressant et répondant bien aux inquiétudes qui angoissent tant aujourd'hui les directeurs spirituels des candidats au sacerdoce. Les jeunes clercs de notre époque appartiennent eux aussi, en effet, à une génération qui a, malheureusement, assisté à la tragédie de guerres immenses et à de profonds bouleversements religieux et sociaux ; et cela rend souvent difficile la compréhension et la direction de leurs âmes. Il faut ajouter que la nécessité d'adapter l'apostolat aux besoins et à la mentalité de la vie moderne entraîne beaucoup d'esprits à tenter des voies nouvelles qui ne sont pas parfaitement conformes à l'orthodoxie, et à avoir moins d'estime pour la vie intérieure, sans laquelle l'action n'est plus qu'agitation et désordre ; ils en viennent ainsi à sous-estimer les périls d'un monde, dont les suggestions et les tentations trouveraient désarmé le prêtre qui ne serait pas fortement trempé dans la prière, dans la pénitence et dans l'esprit d'union avec Dieu.

2 S. Jean de la Croix, Vive flamme d'amour, strophe 3, n. 46.




Devant de tels problèmes, le bon directeur spirituel se rendra compte qu'il est aujourd'hui plus que jamais nécessaire de s'appliquer à inculquer chez les jeunes clercs l'estime pour la vie intérieure et l'observation de la discipline ecclésiastique. Sa parole prendra plus de valeur par la prière, par l'exemple et par l'amour envers les âmes. Mais il se rappellera que la direction spirituelle est également un art et, comme tel, exige de lui une préparation soignée et un effort continu, soit pour en apprendre les règles, soit pour se tenir au courant des directives de l'Eglise, soit encore pour profiter de tous les moyens et de toute l'aide que le progrès des sciences peut lui offrir aujourd'hui pour comprendre toujours mieux la psychologie de la jeunesse. S'en remettre à l'improvisation ou à des connaissances empiriques, bien insuffisantes dans un domaine aussi complexe, serait une témérité qui finirait par contrarier, et non plus aider, l'oeuvre du « principal agent, guide et moteur » qu'est le Saint-Esprit2. Il ne sera donc pas inutile, pour les fins de ce congrès, dont le but est d'approfondir les divers problèmes et de tirer profit de toutes les expériences communes, de méditer les graves paroles que saint Jean de la Croix adresse aux directeurs de conscience : « Ce n'est pas une faute légère que de faire perdre à une âme des biens incalculables... par leur conseil téméraire. Celui qui se trompe par témérité, alors qu'il a l'obligation d'être bien sûr — comme chacun est tenu de l'être



dans sa propre charge — ne le fera pas impunément, mais recevra un châtiment mérité, en proportion du dommage causé ; car les affaires de Dieu doivent être traitées avec beaucoup de pondération et les yeux ouverts 3. »

3 Id., n. 56.




Avec le souhait de fruits abondants, garantis par le vif sens de responsabilité qui anime tous les participants, le Souverain Pontife bénit le prochain congrès, tous ceux qui y assisteront et spécialement ses promoteurs et rapporteurs.


ALLOCUTION A UN GROUPE DE TECHNICIENS DE BARCELONE

(6 septembre 1956) 1






Le Saint-Père a accordé une audience à Castelgandolfo, le 6 septembre, à un groupe de techniciens de l'industrie et du commerce de Barcelone. Il leur a adressé un discours en espagnol, dont nous publions la traduction ci-dessous :

La Barcelone industrieuse, — qui par son esprit d'initiative, son assiduité au travail et sa capacité d'organisation, a su se créer un nom qui la distingue dans le domaine de la technique et de l'industrie — ; la Barcelone catholique, — bien connue aussi par sa ferveur religieuse, ses excellentes organisations et largesses et générosités envers les bonnes oeuvres —, a voulu Nous envoyer, aujourd'hui, très chers fils, un pèlerinage bien caractéristique, car, en tant que techniciens commerciaux et membres d'une branche spécialisée de l'Action catholique, vous méritez de représenter dignement en ce moment ceux qui vous ont délégués vers Nous.

Soyez donc les bienvenus à la maison du Père, qui suit avec tant d'attention votre activité, déjà pleine de riches fruits. Et si vous Nous demandez quels sont, plus spécialement, les motifs de Notre intérêt, Nous vous répondrons brièvement qu'il y en a trois :

I. — Avant tout, Nous croyons spécialement opportun de mettre en relief la fonction très délicate qu'il vous appartient d'exercer, en vous trouvant placés — dans le mécanisme complexe qu'est l'entreprise — entre le patron et l'ouvrier, entre la roue et le propulseur comme si l'on vous demandait d'harmo-



niser ces éléments, dont les intérêts pourraient parfois sembler opposés, mais dont, en réalité, il est nécessaire qu'ils s'entendent et se confondent pour que la machine fonctionne. Que de fois la réalisation pratique de cette compréhension mutuelle dépendra de vous et que de vertus exigera cette fonction, s'appuyant sur le tact et sur l'intuition des avantages réels de chacun, s'exerçant dans les limites du possible et de la prudence, ayant toujours comme but le bien commun et s'inspirant continuellement de la vraie charité !

II. — Mais la difficulté de cette mission trouve, dans votre
cas, un appui incomparable et un soutien inébranlable dans la
maturité, dans l'ampleur et dans la solidité de la doctrine
sociale catholique qui, partant des principes évangéliques et
tenant toujours compte des postulats fondamentaux de la mo-
rale, ainsi que des droits inaliénables de la personne humaine,
pourra toujours vous servir de guide sûr dans votre chemin
difficile. Et quelle confiance doit vous inspirer une doctrine
dont nous voyons chaque jour l'excellence dans la pratique ou,
tout au moins, par les terribles conséquences qui résultent du
fait de l'oublier ou de vouloir délibérément l'écarter ! Et il
sera bien inutile de chercher la tranquillité, la paix et l'ordre
parmi les hommes, lorsque cet ordre, cette paix et cette tran-
quillité ne commencent pas à l'intérieur même des nations et,
spécialement, dans les relations entre les différentes catégories
sociales.

III. — Enfin, pour mieux remplir vos devoirs techniques,
professionnels et apostoliques, vous avez voulu vous organiser
en une branche spéciale au sein de l'Action catholique, en rece-
vant de cette féconde plante la sève, la vie et la vigueur et en
lui rendant en échange une vie nouvelle et une splendeur cons-
tante par le travail fructueux que vous accomplissez. Il est
naturel, très chers fils, que l'Action catholique, comme collabo-
ration à l'apostolat hiérarchique de l'Eglise, revête d'une certaine
manière toutes les caractéristiques de celui-ci et, tout particu-
lièrement, l'universalité qui n'exclut aucun domaine, qui n'esti-
me étranger aucun problème qui fait s'intéresser, comme cela
est nécessaire, à tout ce qu'exigent la gloire de Dieu, le bien
de l'Eglise et le salut des âmes. Le domaine dans lequel vous
agissez est, pour de nombreuses raisons, un des plus nécessi-
teux. Et ce serait pour vous une gloire singulière que la divine
Providence ait voulu se servir de votre activité et de vos
personnes pour que la doctrine du Christ, l'amour et le respect des lois de l'Eglise, la pratique de la vie chrétienne renaissent dans certains milieux, où l'on en avait peut-être davantage noté l'absence ces derniers temps.

Une bénédiction, très chers fils, pour vous personnellement et pour tous vos desseins et désirs. Mais aussi une bénédiction pour votre branche florissante et pour toute l'Action catholique barcelonaise ; une bénédiction pour vos entreprises, très spécialement pour Nos très chers fils, qui, précisément parce qu'ils occupent une position plus humble et plus pénible, sont toujours les plus dignes de Notre affection particulière ; une bénédiction pour votre Barcelone, pour toute la région catalane et pour toute la très chère Espagne, à qui Nous ne cessons, d'un coeur vraiment paternel, de désirer le plus grand bien.

DISCOURS

A L'OEUVRE DE L'APOSTOLAT DE LA MER DE LIVERPOOL

(j septembre 1956) 1






Le Saint-Père a reçu en audience, dans la Salle des Suisses, à la Villa Pontificale de Castelgandolfo, le 7 septembre, un groupe de 370 laïcs de l'« Apostolat de la mer » de Liverpool. Sa Sainteté leur a adressé un discours en anglais dont nous donnons la traduction ci-dessous :

Lorsque Nous fûmes informé que vous aviez fait tout le voyage depuis Liverpool pour Nous offrir un témoignage de votre dévotion filiale sous la forme d'un bouquet spirituel, il devint en vérité très difficile pour Nous de refuser la demande de votre aumônier de port de recevoir votre groupe. Des circonstances favorables ont rendu cela possible et Nous sommes donc heureux de pouvoir vous remercier personnellement. C'est une oeuvre de beauté artistique que vous Nous présentez et la richesse de sa signification spirituelle touche profondément Notre coeur paternel.

C'est aussi une heureuse occasion pour Nous d'ajouter une parole d'éloge et d'encouragement pour l'Apostolat de la mer auquel vous vous dévouez. Personne aujourd'hui ne peut manquer de voir combien était urgent le besoin d'une organisation comme la vôtre pour prendre soin efficacement des nécessités spirituelles de ceux qui prennent la mer. Cela a été rendu évident non seulement par la réponse croissante donnée à l'appel de cet apostolat, mais aussi et spécialement par la façon dont les gens de mer dans le monde entier ont contribué à son développement. Il n'y a guère plus de trente ans (1932) que Notre Prédécesseur approuva les Statuts de votre organisation, et, en le faisant, il exprima l'espoir et le désir que l'Apostolat de la mer fût réalisé dans des centres situés sur tous les continents du monde. En cette année-là, il y avait douze centres dans six nations ; aujourd'hui il y en a près de quatre-vingts dans dix-sept nations. Pour souligner Notre intérêt à l'égard de votre Apostolat, Nous confiâmes sa protection et son encouragement à la haute autorité de la Congrégation Consis-toriale, en lui donnant ainsi un cachet romain, un cachet de catholicité, d'universalité.

Nous éprouvons une grande consolation à apprendre que les gens de mer qui arrivent dans les ports du monde prennent l'habitude de rechercher l'aide que vous êtes préparés à leur donner. Cette aide est et demeurera toujours avant tout spirituelle. C'est votre amour de Dieu qui est votre force d'impulsion dans cet apostolat ; et vous avez bien appris et vous êtes intimement conscients que l'amour du prochain est inextricablement lié à l'amour de Dieu. Dieu n'a pas créé une famille humaine composée de membres séparés, isolés, mutuellement indépendants. Non : II les voulut tous unis par le lien de l'amour total de Lui et, en conséquence, par le dévouement individuel dans l'assistance réciproque pour maintenir intact ce lien. Comment pourriez-vous mieux démontrer votre amour pour le prochain qu'en vous efforçant de lui procurer le plus grand bien, l'amour de son Seigneur et Créateur.

Votre sollicitude vise à aider un groupe particulier, dont les besoins spirituels sont pressants et si souvent négligés. Il existe des difficultés particulières inhérentes à leur profession, et vous désirez atténuer ces difficultés et leur rendre plus facile de venir à Dieu et de continuer à être unis à Dieu par la grâce sanctifiante de Son Esprit-Saint, soit à bord soit dans les ports qu'ils visitent. Outre l'offre des bienfaits spirituels de la religion, vous étendez votre apostolat au service social ; et vous faites bien. Si seulement ces braves gens pouvaient trouver un véritable foyer partout ! Vous ne pouvez leur offrir qu un succédané de l'affection reposante et réconfortante d'un foyer familial ; mais c'est un succédané qui est tellement nécessaire. Le rapport de l'Atlantic House, votre centre à Liverpool, indique le progrès extraordinaire que vous avez constamment fait à ce sujet. Nous vous en félicitons ; et Nous prions qu'il plaise



à Dieu de transformer un tel service en une clef d'or dans vos mains pour ouvrir les âmes d'un nombre sans cesse plus grand d'hommes à la connaissance de Celui, « qui n'épargna pas son propre Fils, mais le sacrifia pour nous tous » (Rm 8,32).

Afin que Nos bons voeux puissent apporter des fruits plus abondants et plus riches, Nous vous donnons, à vous, à vos aumôniers de port et à tous les membres du Comité de 1'« Atlantic House » la Bénédiction apostolique en gage des grâces célestes.


Pie XII 1956 - DISCOURS A UN GROUPE INTERNATIONAL DE CANCÉROLOGUES