PieXII 1955 - ALLOCUTION A DES SOLDATS ITALIENS


DISCOURS A LA F. A. O. A L'OCCASION DE SON DIXIÈME ANNIVERSAIRE

(10 novembre 1955) 1

Le jeudi 10 novembre, le Saint-Père a reçu en audience spéciale, en la Salle des Suisses de Castel Gandolfo, les participants à la huitième session de la Conférence de la F. A. O. (Food and Agriculture Organisation) 2.

Il a prononcé en français le discours suivant :

La huitième session de la conférence de la F. A. O., à laquelle vous participez, Messieurs, revêt cette année une signification toute spéciale, puisque cet organisme célèbre en même temps le dixième anniversaire de sa fondation. C'est en effet, le 16 octobre 1945 que les représentants de vingt Etats furent invités à signer l'acte constitutif de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture. A la fin de la première session de la conférence, quarante-deux pays avaient donné leur adhésion officielle à la nouvelle institution. Depuis lors le nombre des Etats-membres est allé toujours croissant et l'on en compte actuellement soixante-et-onze. En vous souhaitant la bienvenue, Nous sommes donc particulièrement heureux de vous féliciter du chemin parcouru pendant ces dix ans.

Les objectifs, que vous vous proposiez, étaient et restent primordiaux : élever le niveau de la nutrition et les conditions de vie des populations, accroître le rendement de la production et faciliter la répartition des produits alimentaires et agricoles, contribuer à l'expansion de l'économie mondiale. Le Saint-Siège ne pouvait se désintéresser d'une entreprise si nécessaire et si bienfaisante ; dès 1948, il avait son observateur aux réunions régionales de Rome et, l'année suivante, à une session du Conseil ; en 1950, une délibération de la Conférence de Washington l'admettait comme observateur permanent, statut dont il est, jusqu'à présent, le seul à jouir.

Réalisations remarquables de la F. A. O.

Vous savez, Messieurs, avec quel intérêt Nous avons suivi les différentes phases de votre activité depuis le jour où la F. A. O. fut fondée. Il s'agissait alors de regarder en face ce fait terrible : plus de la moitié de la population mondiale est sous-alimentée ; pour satisfaire les besoins de l'humanité, il fallait doubler la production alimentaire. La F. A. O. se met énergique-ment à l'oeuvre : elle forme le Comité international de la crise alimentaire, entreprend un recensement mondial de l'agriculture et se propose la création d'un Conseil mondial de l'alimentation ; elle prend en charge les travaux commencés dans neuf pays dévastés par la guerre pour restaurer leur agriculture. Pour Nous limiter à quelques réalisations plus caractéristiques, rappelons qu'en 1947 fut constituée la Commission européenne des forêts, en 1948 eut lieu la première conférence régionale sur les problèmes de la nutrition ; tandis qu'à partir de 1949 un Comité mixte d'experts en cette matière se réunit annuellement sur divers points du globe. Puisque l'accroissement de la productivité et l'élévation du niveau de vie des populations rurales sont liés aux conditions sociales dans lesquelles travaillent les agriculteurs, la F. A. O. aborde dès 195a les problèmes de la réforme des structures agraires et les questions connexes du crédit agricole ; en même temps, des réunions multiples en divers continents appuient le mouvement coopératif agricole.

Il fallait sans aucun doute de la hardiesse pour envisager une action aussi variée et qui s'étendît à d'aussi grands territoires. Mais ces efforts n'ont pas été vains. Le rapport, que vous avez publié sur la situation de l'agriculture en 1955, note que la production agricole mondiale a atteint en 1954 un accroissement de 25% par rapport à celle de 1946. Pendant cette décade, les pays sous-développés ont rapidement mis en valeur leurs ressources en terre et en eau ; grâce à l'assistance technique.

ils ont appliqué, à la production animale et végétale, les nouvelles méthodes expérimentées et mises au point dans les régions plus avancées. Mais, à côté des résultats positifs, il importe aussi d'enregistrer les insuffisances et les malaises actuels, afin d'attirer l'attention de tous les responsables et d'orienter leurs efforts ; vous avez signalé entre autres la rigidité des structures productives et la difficulté qu'elles éprouvent à répondre adéquatement à la demande, la stagnation du commerce mondial des produits agricoles et le niveau insuffisant du revenu des agriculteurs, si on le compare à ceux d'autres activités. En de vastes régions du monde, on n'a pas encore réussi à fournir aux hommes le moyen d'acquérir toute la nourriture dont ils ont besoin. Ce fait reste, faut-il le dire, le motif premier qui vous stimule à poursuivre vos efforts.

Heureux résultats pour la conservation et l'amélioration de la fertilité du sol.

Parmi les études particulières, auxquelles se sont livrés vos spécialistes, Nous voudrions en relever quelques-unes, particulièrement suggestives, et d'abord celles qui concernent la base même de toute agriculture, le sol. Dans le passé, l'utilisation, la conservation, l'amélioration du sol étaient abandonnées au bon sens pratique des cultivateurs ; une expérience acquise au prix d'un labeur prolongé et non sans déboires leur indiquait comment procéder pour ne pas ruiner la terre dont ils tiraient leur subsistance. On sait que, si d'aucuns ne ménagèrent pas leurs peines pour sauvegarder leur fonds, d'autres, poussés par l'appât d'un gain facile ou victimes de leur incompétence, causèrent au sol des dommages vite irréparables. Afin d'enrayer les conséquences de ces erreurs et d'en prévenir le retour, afin aussi d'utiliser au maximum toutes les possibilités des terrains, il importait d'acquérir une connaissance rationnelle des différents sols, de leur structure, de leurs propriétés, et de dresser la carte de leur répartition géographique ; ainsi il devenait possible de préciser quel genre de culture convenait à une région déterminée, quelles modifications celle-ci devait éventuellement subir, par le drainage ou l'apport d'engrais. En particulier, on ne pouvait négliger la lutte contre l'érosion provoquée par les éléments naturels, mais, en bien des cas, facilitée et accélérée par l'intervention de l'homme qui, pour rendre cultivables des terres en déclivité, les dépouille de toute végétation protectrice. On a constaté aux Etats-Unis que les pertes en phosphates, dues à l'érosion, étaient supérieures à l'épuisement provoqué par les récoltes. Les publications consacrées à cette question, telle, par exemple, celle qui concerne la carte de l'érosion en Amérique latine, contribueront beaucoup à empêcher des dégâts ultérieurs.

Mais la conservation du sol ne dépend pas seulement du contrôle de l'érosion. On préfère actuellement envisager le sujet dans un cadre plus large, en tenant compte des systèmes modernes pour améliorer la fertilité et des facteurs économiques et sociaux susceptibles d'accroître le bien-être des populations rurales, d'aider la colonisation des terres incultes, de freiner l'exode des campagnes et le dépeuplement des régions montagneuses au profit des villes. L'appauvrissement de la terre peut être le résultat d'un régime foncier inadéquat, de la concentration ou du morcellement excessif de la propriété, de la valeur insuffisante des produits agricoles ; les conditions de vie trop dures découragent le cultivateur et le poussent à chercher autrement sa subsistance. Vous n'avez pas ignoré cet aspect des choses, puisque, comme Nous l'avons signalé tantôt, vous avez envisagé une action en matière de réforme agraire, comme aussi dans le domaine du crédit et des coopératives agricoles.

. . . et pour la préservation des forêts.

A cause du rôle essentiel qu'elles jouent dans la régulation de la circulation hydrique superficielle et souterraine, les forêts méritent une attention sérieuse ; elles freinent l'écoulement des eaux, favorisent leur pénétration en profondeur et l'alimentation des sources ; elles retiennent les neiges et, même si elles ne peuvent empêcher les inondations exceptionnelles, elles régularisent le débit des rivières. Les pouvoirs publics, soucieux du développement de l'agriculture, ont donc intérêt à exercer leur vigilance sur la manière dont les forêts sont exploitées.

Relevons encore, parmi beaucoup d'autres, les recherches menées sur la possibilité de faire servir les algues marines à la nourriture humaine ; jusqu'à présent toutefois l'exploitation de ces ressources apparaît encore de réalisation difficile.

Vers la solution du problème de la faim.

Ces brèves considérations font ressortir assez que le programme initial, préparé par la conférence de Hot Springs et

formulé dans l'acte constitutif, est en bonne voie d'exécution. Alors que jadis le problème de la faim apparaissait insoluble, il est permis à l'heure présente de le regarder en face et de compter pour le résoudre sur la collaboration des gouvernements. Les monographies consacrées à l'étude du sol ont attiré l'attention sur l'unité physique des diverses régions, qui rend la plaine solidaire de la montagne ; celui qui veut sauvegarder la fertilité de ses terres doit se préoccuper de ce qui se passe bien au-delà de leurs limites. Cette vérité prend ici, Nous semble-t-il, valeur de symbole ; les peuples favorisés par la nature ou par les progrès de la civilisation risquent de connaître un jour de durs réveils, s'ils ne se mettent en peine dès maintenant d'assurer à de moins fortunés les moyens de vivre humainement, dignement et de se développer eux aussi. Eveiller davantage chez un grand nombre d'individus et de nations ce sentiment de responsabilité collective, et surtout provoquer par là des interventions éclairées et généreuses, voilà une tâche haute et noble ; en ces temps de suspicion, de division, de révolte, la portée morale d'un tel résultat dépasse encore de loin ses conséquences matérielles.

Nous Nous plaisons par-dessus tout à reconnaître, dans cette action mondiale destinée à toucher non un ordre privilégié, mais l'immense foule souvent impuissante et sans défense, un aspect authentique de la charité, que le Christ a illustrée par sa vie et par sa mort, et dont il a voulu faire le signe distinctif de ses disciples ; cette charité universelle, désintéressée, exigeante jusqu'au sacrifice, ne peut s'enraciner sinon dans l'amour que Dieu lui-même porte aux hommes. Elle en est la preuve la plus solide.

C'est pourquoi Nous ne doutons pas que le divin Maître ne bénisse tout ce que vous faites pour ceux qui lui appartiennent ; c'est à Lui-même que ces bienfaits s'adressent ; il saura les récompenser, comme il l'a solennellement promis et comme Nous l'en prions ardemment. Que les faveurs du Ciel descendent sur vous-mêmes et sur votre oeuvre, sur vos familles et sur ceux qui vous sont chers. Nous vous en accordons pour gage Notre Bénédiction apostolique.


DISCOURS A DES MÉDECINS ET INFIRMIERS

(11 novembre 1955) 1

Le vendredi 11 novembre, le Saint-Père a accordé une audience à un important groupe du personnel des Hôpitaux réunis de Naples. Il leur a adressé un discours dont nous donnons ci-dessous la traduction :

En vous accueillant aujourd'hui en Notre demeure, Nous savons, très chers fils et filles, que Nous répondons à votre ardent désir ; Nous sommes donc particulièrement heureux de voir maintenant votre groupe imposant, représentant ces Hôpitaux réunis de Naples, qui, depuis cinq siècles, ont écrit dans les annales de la cité parthénopéenne de splendides pages d'abnégation, de vive charité, d'inlassable dévouement au service des malades.

Bref historique des hôpitaux de Naples.

Il faut en effet remonter au seizième siècle pour assister à la fondation du premier de vos hôpitaux, celui de Sainte-Marie-du-Peuple, dit par la suite des Incurables, dû au zèle d'une âme fervente et qui devait en peu de temps devenir un lumineux foyer de charité et un refuge pour les souffrants. Il y fut créé une école de médecine par un groupe de maîtres célèbres, dont l'oeuvre se poursuit jusqu'à présent, sans rien perdre de son éclat, dans la personne d'insignes cliniciens. Aux Incurables s'ajoutèrent ensuite d'autres édifices hospitaliers : ceux de Jésus et Marie, de Sainte-Marie-de-la-Paix et de Sainte-Marie-de-Lorette, soutenus par la générosité de bienfaiteurs, qui les mirent en mesure d'étendre à un plus large cercle de nécessiteux le secours de l'assistance sanitaire. Mais, comme à toutes les oeuvres de longue haleine, l'épreuve ne pouvait manquer non plus à celle-ci : la dégradation des installations, la dévaluation de la monnaie, le manque de fonds placèrent les hôpitaux de Naples dans les conditions très difficiles. Puis, au moment où l'Etat, affrontant le problème du travail nécessaire de restauration, entreprenait la construction du magnifique édifice du Cardarelli, la seconde guerre mondiale menaça de compromettre de nouveau tout l'avenir de l'Institut. Un sérieux effort, accompli ces deux dernières années, a permis de mener à bonne fin l'oeuvre de restauration, de sorte que vous êtes, à présent, à juste titre orgueilleux d'une organisation hospitalière devenue parfaitement adéquate aux hautes exigences que posent dans ce domaine les progrès de la médecine : heureux résultat d'une harmonieuse coopération de la part du gouvernement, de l'administration municipale, de généreux citoyens, des professeurs, des docteurs et des employés de tout grade, pleinement conscients de l'importance sociale de leur travail et du poids de leur responsabilité.

Eloge de la clinique de phtisiologie.

Nous saluons de grand coeur le personnel du sanatorium Principi di Piemonte et de la Clinique de Phtisiologie de l'Université de Naples. Nous connaissons l'important travail entrepris depuis 1939 dans ce centre de recherches et de soins. Doté de bibliothèques et de laboratoires scientifiques, avec une école de spécialisation en phtisiologie, avec ses centres de chirurgie, de statistique et de vaccination contre la tuberculose, il constitue, pour ainsi dire, une forteresse munie d'armes multiples et puissantes pour la lutte contre un des plus grands fléaux qui frappent encore de manière formidable tant de milliers de vies humaines. Parmi ses principaux moyens d'action, Nous notons la conception pathogénique unitaire de la tuberculose, due à son éminent et méritant directeur, honneur de votre Université, avec une méthode de cure qui porte son nom. Elle consiste surtout à avoir introduit, parmi tant de travaux et d'études concernant les divers aspects de cette maladie, une doctrine et un système qui diagnostique et précise son processus d'évolution, permet d'en prévoir la direction et ouvre ainsi un sûr chemin au médecin traitant. On doit signaler d'autre part l'action accomplie en ce qui concerne la prévention de la tuberculose dans deux quartiers populeux de la ville. Les résultats en ont été heureux et consolants, si bien que, comme on l'assure, en six ans les cas de tuberculose se sont réduits de deux tiers dans ce secteur.

Cette allusion brève et incomplète à l'action hospitalière et sanitaire dans la ville de Naples n'a eu d'autre but, chers fils et filles, que de tracer en larges traits le tableau de votre activité quotidienne. Nous voudrions, maintenant, vous montrer en quelque sorte la profonde signification de votre travail et la noblesse de ses buts.

Grandeur des professions consacrées aux soins des malades.

Il ne vous échappe certainement pas que les professions consacrées au soin des malades comportent en même temps de graves responsabilités et de lourds devoirs, mais aussi de grandes et intimes satisfactions. Si l'on fait exception du ministère sacerdotal, qui entre en contact direct avec les âmes, aucune autre catégorie de personnes ne pénètre plus que vous dans l'intime de l'homme en des moments critiques de sa vie, quand il se trouve en face du problème de la souffrance, et vous n'ignorez pas les terribles formes sous lesquelles celle-ci peut se présenter. Vous avez vu des malades rendus immobiles depuis des années, gravement atteints dans leur corps et dans leurs facultés spirituelles, soumis à des cures longues et douloureuses, dont, souvent, on ne peut garantir l'heureux résultat. Certains sont privés de familles et d'amis, et luttent seuls contre le mal qui les oppresse, avec de pénibles alternatives d'espérance et de découragement.

Alors vous avez éprouvé au fond de votre esprit l'ardent désir de venir à leur secours, d'alléger leur angoisse ; vous avez subi cette impulsion qui mettait en oeuvre toutes les ressources de votre générosité. Qu'y a-t-il de plus difficile que de ne pas offenser une sensibilité déjà blessée, aux perceptions affinées, aux réflexes avivés ; ces malades, parfois impatients ou capricieux, espèrent être traités avec sollicitude, être considérés non point comme des cas spécifiés par la nature de leur mal, mais comme des personnes vivantes ; ils demandent que soient vraiment compris leur état et leur tourment. Or on ne peut nier que les hôpitaux présentent pour la personne du malade le danger de tomber dans une sorte d'« anonymat ». Les nécessités de l'organisation imposent, dans une large mesure, des dispositions générales qui ne permettent pas de tenir compte de tous les aspects particuliers. Les services hospitaliers sont réglés par des normes qui fixent les prestations de chacun ; une fois celles-ci remplies, le médecin ou l'infirmière peuvent croire sincèrement qu'ils ont accompli tous leurs devoirs. Toutefois la vraie charité vise plus loin que la simple obligation ; elle ne se considère jamais pleinement satisfaite ; elle ne s'épargne pas dans le don de soi-même ; elle devine et prévient les désirs de ceux auxquels elle se consacre ; elle supporte patiemment leurs défauts. Ce qu'on vous demande en réalité, c'est de savoir penser aux autres, pour pouvoir leur porter un intérêt et une affection profonds.

Sans aucun doute la participation aux peines d'autrui, la compassion manifestée à l'affligé, exigent un grand oubli de soi-même ; elles obligent à se défaire de toute indifférence et d'une certaine insensibilité, qui affaiblit petit à petit la vivacité de réaction devant un spectacle douloureux, mais toujours le même. De la sorte, votre activité, loin de devenir une répétition d'actes matériels plus ou moins mécaniques, comportera le témoignage vivant d'une présence fraternelle auprès d'un être souffrant, et vous contraindra à pénétrer et à cultiver au fond de vous-mêmes ce qu'il y a de meilleur, de plus humain et, surtout, de plus chrétien.

Car — et sur ce point Nous voudrions attirer particulièrement votre attention — vous avez pu certainement constater à plusieurs reprises la force de la foi chrétienne et d'une espérance qui dépasse les visions trop restreintes de ce monde. Le malade sent bien que les appuis humains au fur et à mesure lui échappent ; que, même s'il est entouré, réconforté, consolé, personne ne peut arriver jusqu'au plus profond de lui-même, et qu'il doit supporter à lui seul son destin. Le vrai secours ne peut venir que de Dieu, de Jésus-Christ, qui, par sa grâce, soutient et élève l'esprit et le coeur. Mais il est bien difficile pour qui n'y a pas été préparé de s'ouvrir aux vérités libératrices, de renoncer à toute vaine révolte, d'entrer dans la perspective de la Rédemption, où la souffrance est considérée comme expiation de la faute, participation à la passion du Christ et à son pouvoir de sauver. C'est ainsi que Jésus attend que des âmes pieuses, fidèles, vigilantes, transmettent son message, l'interprètent et le fassent comprendre et accepter. De la sorte, chers fils et filles, un magnifique champ d'apostolat s'offre à votre zèle, et Nous sommes sûr que vous avez déjà constaté combien votre profession atteint là sa fin la plus élevée et y puise la force de continuer son travail ardu. En même temps, vous trouvez les joies les plus durables et les consolations les plus intimes dans la conscience d'accomplir une oeuvre que ni le temps ni la mort ne parviendront à détruire.

Afin que le divin Consolateur vous communique l'onction de sa grâce et vous fasse les messagers de sa céleste providence, Nous accordons de tout coeur à vous, à vos malades, à tous ceux qui vous sont chers, Notre paternelle Bénédiction apostolique.


ALLOCUTION AUX CADETS DE LACADÉMIE NAVALE ESPAGNOLE

(17 novembre 1955) 1

Le Saint-Père a accordé une audience spéciale aux Cadets de l'Académie navale espagnole. A cette occasion, Il leur a adressé un discours en espagnol, dont voici la traduction :

Voici, très chers fils, chefs et officiers, élèves, sous-officiers et marins, qui formez l'équipage du navire-école « Neptuno », une visite dont Nous tenons à vous remercier tout spécialement pour l'amabilité que représente le fait de l'avoir comptée parmi les principaux objectifs de votre croisière. Nous vous souhaitons en même temps et de tout coeur la plus paternelle bienvenue.

Que soient donc les bienvenus, dans la Maison du Père commun, les gens de mer, les fidèles serviteurs d'un idéal, qui fait de vos existences comme un holocauste, en raison des risques continuels, de la rigueur du service, et de toute une manière d'être qui semble n'avoir pour but que la défense et la protection d'une patrie, dans l'oubli de toute commodité et l'acceptation de l'engrenage de votre discipline de fer.

Mais c'est précisément dans ce que Nous appellerons l'ascétisme de votre vie que se trouve la source sûre de ces vertus qui doivent vous distinguer. « Si tu veux apprendre à prier — dit le proverbe castillan — prends la mer. » Mais la vérité est bien plus ample : prends la mer et tu verras comment la mer te conduit à Dieu, non seulement au moment du danger, quand la prière s'élève sur les lèvres, fiévreuse et tremblante pour invoquer le secours contre les colères de l'ouragan furieux ou l'assaut imposant des vagues déchaînées, mais aussi, et bien plus, aux heures sereines, quand on a l'impression de vivre au


ACADEMIE NAVALE ESPAGNOLE

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milieu de l'immensité de Dieu en laissant le regard se perdre dans l'infini de l'horizon, ou quand il nous semble que nous contemplons sa beauté en regardant avec ravissement le soleil — disque d'or — qui s'enfonce solennellement dans les eaux, en colorant de teintes rouges les deux et en semant de reflets d'argent les ondes tranquilles. Alors, oui, on se sent proche de Celui qui fit de la mer son chemin (Ps. LXXVI, 20), de Celui auquel même le vent et la mer obéissent ! (Mc 4,41).

Votre nation, très chers fils, providentiellement placée entre deux mers, reçut de la mer ces grands apports que furent les cultures hellénique et phénicienne ; et elle ne tarda pas à lancer sur les mers ses vaisseaux pour montrer ce dont elle était capable, parfois pour des entreprises purement péninsulaires, comme celle du grand amiral Bonifaz, et d'autres fois en orientant sa hardiesse vers l'extérieur, comme avec les deux Roger, celui de Flor et celui de Lauria. Puis, à l'aube des temps modernes, lorsqu'elle abattit la barrière de l'inconnu et se posa comme une sentinelle avancée de l'ancien monde, la mer se trouva petite devant l'avance de vos proues. C'était l'heure de Dieu, quand à la pointe du grand mât du navire, dominait toujours une croix et quand, à côté de l'explorateur, ne manquait jamais le missionnaire. Vocation héroïque et providentielle d'une race qui sut si généreusement y répondre.

vie de marin peut être une école des plus belles vertus.

Ces jours sont passés et, aujourd'hui, la science nautique, qui n'est plus enfermée dans les murs étroits d'une école de Sagres ou d'une salle de Salamanque, a laissé fort loin les caravelles et les brigantins, les astrolabes et les tables de déclinaison de ces temps-là ; elle met à votre disposition des moyens très perfectionnés, d'une puissance incroyable et d'une rapidité inouïe, grâce auxquels les distances, les brumes, le calme des vents et les ombres mêmes de la nuit ne sont plus un obstacle. Mais, aujourd'hui comme alors, l'homme qui contrôle tout sera l'élément décisif, et, en fin de compte, il dépendra de vous de mettre l'esprit de sacrifice caractéristique de votre profession, le sentiment de fraternité universelle, fruit de vos voyages continuels, et même votre capacité technique, au service de l'humanité, du bien commun, du progrès et de l'utilité dans tous les domaines, et, en un mot, de la protection, de la conservation et du développement de la vraie paix.

Allez avec Dieu, très chers fils, spécialement vous, la florissante jeunesse qui se prépare pour l'avenir ; apprenez à respecter et à aimer vos chefs, à vous traiter entre vous avec une sincère et fraternelle camaraderie, où la principale émulation consiste à voir qui est le meilleur en tout ; à être affectueux et déférents envers cette marine, symbole de celle qui, demain, devra former votre grande famille, dans vos charges respectives ; et profitez le plus possible de cette croisière, surtout pour votre formation humaine et spirituelle, afin que, demain et toujours, dans tous les ports, sur toutes les mers, vous continuiez à être un exemple, non seulement de correction, de prestance et de force, mais aussi de chevaliers chrétiens, qui prêchent partout par l'exemple de leur vie la foi qu'ils professent.

Marins ou gens de mer, nous le sommes un peu tous dans ce voyage qu'est la vie, dans lequel nous louvoyons toujours pour tourner le vent contraire, pour éviter les écueils, pour fuir les ennemis qui, tantôt à bâbord, tantôt à tribord, ne manquent jamais de nous presser ; et bien infortuné serait celui qui, après tant d'efforts, finirait par succomber ou aller à la dérive. Le grand Apôtre des Gentils dit du peuple de Dieu (Héb. XI, 29) que c'est grâce à sa foi qu'il réussit à traverser la mer comme sur la terre ferme. C'est la même foi que vous professez et qui doit vous servir de lumière et d'orientation dans toutes vos traversées. Et si, levant les yeux, vous cherchez une étoile, Nous vous invitons à la contempler en celle que vous appelez vous-mêmes « Etoile des mers » en votre Vierge du Carmel, qui tant de fois et en tant de manières, a montré sa prédilection pour ceux qui confient leurs vies aux eaux instables pour le service de Dieu et de la patrie.

Une bénédiction, très chers fils, pour votre Espagne bien-aimée ; une bénédiction pour tous les navires qui, dans n'importe quelle partie du monde s'aventurent sur les flots, à l'ombre du glorieux pavillon rouge et or ; une bénédiction pour tous vos collègues, pour vos familles et pour toutes vos intentions. Et quand, bientôt, à la chute du jour, la première fois que vous serez réunis sur le tillac pour réciter la prière du soir, ayez une intention spéciale pour votre père de Rome qui là, au centre de la Chrétienté, au même moment, prie pour vous et, comme si vous étiez présents, vous bénit un à un affectueusement.


DISCOURS AUX FONCTIONNAIRES DU MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR D'ITALIE

(20 novembre 1955)1

Le dimanche 20 novembre, le Souverain Pontife a reçu en audience spéciale à Castelgandolfo un imposant groupe d'environ 900 fonctionnaires du Ministère de l'Intérieur d'Italie. Il leur a adressé le discours que voici :

Haute signification de la fonction publique.

En vous souhaitant la bienvenue, Messieurs les fonctionnaires du Ministère de l'Intérieur, Nous ne saurions séparer vos dignes personnes de la haute autorité, des devoirs et des difficultés que vous impose l'importante charge d'administrateurs de la chose publique ; de même que Nous ne saurions non plus vous voir détachés des millions de citoyens, auxquels vous consacrez vos sollicitudes assidues et qui, de leur côté, vous font confiance pour les besoins fondamentaux de la vie civile. Voir le peuple pour ainsi dire identifié avec ses gouvernants, loin d'exclure la juste distinction entre l'un et les autres, nécessaire à l'exercice du pouvoir, signifie au contraire mettre en relief les rapports humains et affectifs, qui doivent unir les deux parties dans un climat de compréhension mutuelle, de dévouement généreux et pour ainsi dire de cordialité familiale. Cette vision de l'Etat comme une famille, tout en écartant le sentiment de méfiance réciproque, qui parfois fait considérer l'Etat comme un ennemi du peuple et vice versa, dispose le citoyen à voir dans le corps administratif, et en particulier dans votre administration, peut-être plus proche du peuple que les autres, la prévoyante, vigilante et affectueuse fonction d'un père, zélé et im-

plus grande importance que dans les autres administrations, Nous trouvons tout à fait naturel que vous ayez désiré demander au Père commun des fidèles, outre la Bénédiction apostolique, une parole d'exhortation qui puisse profiter à vos âmes et vous soutenir dans la tâche ardue de chaque jour.

Il est certain qu'on ne peut nier les efforts accomplis par tant d'hommes de bonne volonté pour relever votre patrie de l'état de prostration, dans lequel elle était malheureusement tombée. Ils doivent donc avoir la gratitude de tous ceux qui, n'étant pas aveuglés par les passions partisanes, sont contraints à reconnaître qu'un grand chemin a été fait dans la voie de la reconstruction intégrale de l'Italie. En particulier, dans votre Département, on connaît l'efficience des services, réorganisés selon les critères les plus modernes ; de même que l'on reconnaît la promptitude avec laquelle il accourt et agit dans les tristes circonstances, où une inondation, un incendie ou une autre catastrophe s'abat sur telle ou telle région. Mais le signe le plus convaincant de la réelle reprise de la nation est offert par l'indignation générale que soulève un acte criminel. Elle indique clairement que le peuple est revenu avec fermeté sur la voie de la civilisation et de la moralité traditionnelles.

Certains — et vous-mêmes ne seriez pas les derniers à le faire — pourraient indiquer telles déficiences qui persistent encore ; mais l'anxiété et la volonté de les éliminer est incontestable chez tous ceux qui aiment leur patrie et désirent ardemment lui restituer le visage sain et chrétien, la prospérité et le tranquille bien-être que mérite à bon droit le peuple italien. Dans cette oeuvre de consolidation de la paix intérieure, tout le monde doit se prodiguer par devoir, en tant que citoyen ; mais un rôle spécial vous revient à vous qui êtes et devez être des promoteurs et tuteurs de la tranquillité dans l'ordre : dans l'ordre garanti et intégral.

lois doivent être justes.

1 — Soyez des promoteurs de l'ordre juste, c'est-à-dire fondé sur la juste loi.

Si, dans quelque Etat, certaines lois devaient être injustes, parce que contraires au bien commun, au droit naturel, au droit positif divin et ecclésiastique, il faudrait sans aucun doute se soucier de les réformer suivant de justes critères, pour éviter

partial, pour le bien de tous, qu'il organise en employant intelligence et coeur, amabilité et force, persuasion et fermeté, toujours poussé par l'amour.

Rôle de première importance du Ministère de l'Intérieur.

Aussi, plus encore que par l'expression moteur de l'Etat, qui est habituellement employée, votre Ministère pourrait être désigné par celle de coeur de l'Etat, en tant que coeur indique une importance de fonctions vitales, une position centrale et, suggère en même temps, l'idée de présence périphérique, dynamisme et, à la fois, sensibilité et affection.

Notre dessein n'est pas de vous entretenir sur des questions purement politiques ou sur des problèmes de technique administrative : c'est votre domaine et, en premier lieu, celui de Monsieur le Ministre, dont nous connaissons et apprécions non seulement la vie de fervent chrétien, mais aussi la sérieuse préparation et la ferme volonté de s'employer à ce que votre administration pourvoie aux multiples activités dont elle est responsable et qui dépendent d'elle. Par un ample rapport, qui Nous a été courtoisement remis, Nous avons appris que le Ministère de l'Intérieur supervisait à l'origine de nombreux autres services, qui aujourd'hui sont assumés et assurés par divers ministères dits techniques ; qu'il n'est pas facile de fixer les limites dans lesquelles doit agir votre administration, si l'on pense que son intervention se justifie partout où ne touche pas la compétence des départements dérivés d'elle. De toute façon, il n'est pas exact de la considérer comme un Ministère de Police, à moins que l'on ne veuille entendre ce terme dans la plus large acception de bon ordre de la société civile. En effet, c'est à vous qu'est confié le soin de l'ordre public, de l'administration civile, de l'assistance et de la bienfaisance publiques ; et même, depuis la conclusion des Pactes du Latran, votre Ministère est compétent dans un secteur des plus délicats et qui Nous concerne plus directement : ce qu'on appelle la politique ecclésiastique. On doit ajouter la vigilance et l'influence que vous êtes appelés à exercer dans le domaine de l'activité économique et syndicale et dans les rapports entre les classes productives, afin qu'ils soient maintenus dans les limites fixées par le droit.

Comme dans votre travail de contact continu avec les hommes et avec leurs nécessités, l'élément humain semble avoir une

qu'intervienne contre elles le droit, voire le devoir, des citoyens de ne pas leur obéir. Mais quand les lois de l'Etat sont justes, comme Nous souhaitons que le soient toujours les vôtres, parce qu'elles reconnaissent et respectent l'ordre éthique et juridique ; quand elles tendent à la réalisation du bien commun ; elles doivent inspirer et régler les actes du pouvoir exécutif, et en particulier vos actes, au centre et à la périphérie. Aucune fin bonne ne justifierait l'arbitraire employé comme moyen au détriment de qui que ce soit ; et il ne serait pas juste que fût jugé comme coupable et encore moins traité comme tel celui qui ne se révélerait pas clairement comme transgresseur d'une loi. Sauf des cas exceptionnels, il faut éviter la hâte à appliquer les rigueurs de la loi, l'excès dans l'usage des moyens de contrôle. Le prestige même de l'Etat conseille de préférer le risque de commettre une erreur en usant d'indulgence, à celui de se tromper en employant la rigueur.

Les fonctionnaires doivent accueillir avec compréhension ceux qui adressent à eux.

2 — L'ordre que vous promouvez doit être empreint de douceur, en tant qu'effet de la persuasion et de l'humanité dans les rapports avec les autres.

Quand la Sainte Ecriture parle du gouvernement de Dieu, elle proclame en même temps sa justice et sa rectitude, comme sa bonté et sa miséricorde : bonus et rectus est Dominas (Ps. XXIV, 8) : le Seigneur est bon et droit. En effet, ses voies sont à la fois : équité et grâce, sévérité et douceur, menaces et pardon. Elles constituent l'oeuvre formatrice de Dieu, qui suit et atteint l'âme, à condition qu'elle ne s'obstine pas à le repousser pour demeurer loin de lui ; qui l'accompagne et la soutient et qui la stimule jusqu'à ce qu'elle parvienne au but que lui a assigné l'éternel Amour qui prévoit et pourvoit.

Or le gouvernement humain doit s'efforcer d'imiter, autant que possible, le gouvernement de Dieu. La douceur de l'ordre auquel vous êtes préposés et dont vous êtes les tuteurs, résultera avant tout de la force de la persuasion que vous réussirez à créer parmi les citoyens ; conscience de la vigueur des lois, de la nécessité qu'elles soient observées pour le vrai bien commun, c'est-à-dire celui de tous les citoyens. L'humanité du comportement chez vous tous, surtout chez ceux qui sont affectés aux services périphériques, servira également à obtenir le caractère humain de l'ordre : l'Etat est au service des citoyens. N'oubliez pas, chers fils, que derrière chaque homme, qui vient vous parler d'une démarche et demande votre intervention, il y a souvent une épouse qui vit dans l'attente et dans l'inquiétude ; qu'il y a peut-être des enfants qui languissent et implorent de l'aide. Faites donc que vos rencontres avec eux soient inspirées par l'affection ; qu'elles soient des rencontres de frères avec des frères, tous fils de l'unique Père qui est dans les cieux et estimera comme fait pour lui tout ce que vous aurez accompli pour le plus modeste de vos semblables.

La bonté n'exclut pas la fermeté.

3 — Mais afin que la douceur nécessaire ne devienne pas faiblesse, il faut que l'ordre soit garanti par la prévention vigilante et, au besoin, par la ferme répression des transgressions.

Il vaut certainement mieux prévenir que réprimer : tout le monde doit se le répéter avec davantage de conviction. Mais, pour prévenir efficacement, il faut créer les conditions propres à rendre sans cesse plus difficile la violation de la loi, soit en décourageant la volonté même qui y serait disposée, soit en supprimant toute échappatoire. Naturellement, dans ce domaine, un très grand rôle revient également à d'autres organes de l'Etat, spécialement à celui qui est chargé de l'instruction et de l'éducation nationales. Mais vous pourrez apporter une contribution efficace par votre présence continue et diligente, exercée avec tous les moyens que le Ministère met à votre disposition. Songez, par exemple, à la salutaire influence que vous pouvez avoir en administrant avec un amour intelligent la bienfaisance et l'assistance publiques.

En revanche, si certains cherchaient obstinément à violer les lois, peut-être avec l'espoir ou l'illusion de demeurer impunis ; si, poussés par de mauvais instincts, ils attentaient à la vie et aux biens d'autrui ; s'ils menaçaient la sérénité des foyers domestiques ; si, en particulier, ils osaient nourrir et manifester des desseins de violente subversion au détriment de l'Etat ; vous devriez, avant tout, appliquer votre vigilance à empêcher que des torts soient causés, des délits commis ; puis, les faits accomplis, vous ne devriez rien négliger pour que les coupables soient atteints par les rigueurs de la justice. Notre pensée s'a-

dresse en ce moment aux méritants préfets, aux commissaires, au corps de la police, qui, s'il agit avec justice et humanité, pourra par son intervention prompte et courageuse prévenir et, à l'occasion, réprimer tout ce qui menace la sécurité des citoyens et l'ordre public. Nous ne voulons pas oublier non plus l'activité zélée des carabiniers et des pompiers. La fréquence et la violence de certaines infractions et agressions, comme de nombreuses transgressions de la loi, dépendent souvent de la faiblesse et de la négligence de ceux qui auraient pu et dû empêcher ces agressions et punir ces violations. Cela ne signifie pas que l'on doive employer la violence et l'arbitraire ; il faut seulement appliquer la loi et l'appliquer promptement et fermement. La multitude des Italiens honnêtes, aimant le travail et la vie sereine, vous seront certainement reconnaissants, si vous savez par votre intelligente prévention et par votre juste répression décourager tous ceux qui voudraient attenter à la tranquillité de l'ordre civil en Italie.

Un dernier mot, chers fils, avant de vous bénir avec toute l'effusion de Notre coeur paternel.

Les relations de l'Etat avec l'Eglise méritent une attention toute particulière.

Comme Nous y faisions allusion au début — et vous le savez bien — depuis la conclusion des Pactes du Latran, confirmés également dans le texte de la Constitution italienne, votre Ministère est compétent en matière de « politique ecclésiastique ». Nous désirons ardemment que tout ce qui sert à la protection et au développement des valeurs religieuses en Italie soit l'objet de vos sollicitudes particulières. En facilitant, dans la mesure où il vous appartient, le difficile travail apostolique de l'Eglise, vous soutenez en même temps le bien des citoyens, le bien de l'Italie. L'Etat n'a rien à perdre et a tout à gagner avec ces citoyens, qui, parce qu'ils sont de sincères et fervents croyants, donnent les plus sûres garanties de respect envers les pouvoirs publics, d'observation des lois et d'absolue honnêteté dans la vie publique et privée. C'est l'histoire de tous les temps et également la chronique d'aujourd'hui : qu'en serait-il actuellement de l'Italie, si les catholiques n'avaient pas efficacement contribué à la sauver de l'abîme dans lequel il semblait inévitable qu'elle dût tomber sans espoir d'un prompt relèvement ?

Sur cette voie tracée par tant d'hommes de bonne volonté, qui ont servi le pays avec dévouement et amour, continuez votre chemin. Et puisse votre oeuvre assurer la tranquillité souhaitée dans l'ordre, la paix dans la charité et la justice, et encourager tout sain progrès, afin que sur le sol de la chère Italie soient reconnus par tout le monde les signes de la prédilection divine !


PieXII 1955 - ALLOCUTION A DES SOLDATS ITALIENS