Augustin, Sermons 2023

2023

VINGT-TROISIÈME SERMON. SUR CES PAROLES DU PSAUME CXLV, v. 1: «JE BÉNIRAI LE SEIGNEUR PENDANT MA VIE; ETC. (1)».

ANALYSE.- 1. La louange de Dieu doit se prolonger au-delà de cette vie.- 2. Rien ne dure en cette vie.- 3. Que le chrétien ne s'abuse point sur son bonheur passager.- 4. Que la fin du riche et de Lazare soit une leçon pour nous.

1. Daigne le Seigneur m'accorder de vous dire un mot sur les paroles du psaume que nous venons de chanter. Nous avons dit en effet: «Je bénirai le Seigneur pendant ma vie, je chanterai mon Dieu tant que je vivrai (1)». A ces paroles, nous devons un avis à votre charité: c'est de ne point comprendre, quand vous entendez dire, ou que vous dites vous-mêmes: «Je bénirai Dieu tant que je vivrai», qu'après cette vie finira aussi la louange du Seigneur. Nous le bénirons mieux, en réalité, quand nous jouirons de la vie sales fin. Si nous le bénissons, en effet, dans ce pèlerinage qui doit finir, comment le bénirons-nous dans ce palais d'où nous ne sortirons plus? On dit, on chante, on lit dans un autre psaume: «Bienheureux ceux qui habitent votre maison; ils vous béniront dans les siècles des siècles (2)». Or, quand tu entends «les siècles des siècles», il n'y a aucune fin, et l'on jouit de cette vie bienheureuse, où l'on voit Dieu sans trembler, on l'aime sans l'offenser, on le bénit sans fin. Notre vie alors sera de voir Dieu, de l'aimer, de le bénir. Si donc nous bénissons Dieu quand nous ne le voyons que par la foi, comment le bénirons-nous quand nous le verrons à découvert? Quelle sera l'allégresse de la claire-vue, si telle est la bénédiction de la foi? L'Apôtre nous dit en effet: «Tant que nous sommes dans ce corps, nous marchons loin du Seigneur; car nous n'allons à lui que par la foi, sans le voir à découvert (3)». Ici-bas c'est

1. Ps 146,1 - 2. Ps 83,5 - 3. 2Co 5,6-7

donc la foi, là-haut ce sera la claire-vue. Maintenant nous croyons ce que nous ne voyons pas, alors nous verrons ce que nous aurons cru. Celui qui croit, le fait sans confusion, car il est vrai qu'il verra. Le Seigneur a d'abord établi en nous la foi, afin que si la foi mérite une récompense, on ne 1a cherche point avant d'avoir cru.

2. Mais, dira-t-on, pourquoi le psaume dit-il: «Je chanterai mon Dieu tant que je vivrai», et non: Je chanterai mon Dieu éternellement? Cette expression, en effet: «Tant que je vivrai», semble appeler une fin, bien qu'on ne l'entende pas ainsi. Si tu veux appliquer «tant que je vivrai n à cette vie terrestre, vois si cette vie est bien longue. Quel que soit le nombre des années, la vie est courte. Comment serait longue une vie qui ne te rassasie point? Un enfant dit que tel homme qu'il voit vieillard a vécu longtemps; mais que lui-même arrive à l'âge de cet homme, et il sait que ce temps est peu long. Les années s'envolent et les moments se précipitent si rapidement, que c'est avant-hier que nous étions enfants, hier adolescents, aujourd'hui vieillards. Nous sommes donc fondés à croire que ces paroles: «Aussi longtemps que je vivrai je chanterai mon Dieu», ne s'entendent pas de cette vie. Dès lors, en effet, que le Prophète a dit: «Aussi longtemps que je vivrai», on ne saurait l'entendre de cette vie où rien ne dure «longtemps». Des sages de ce monde ont pu en faire la remarque, et des chrétiens ne le

(1) Dans le Codex, fol. 74, pag. 2, on lit: «Sermon de saint Augustin, évêque», sur la brièveté de la vie et son bonheur passager, mis en lumière une seconde fois par l'exemple du riche et de Lazare.

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pourraient voir? Un de ces sages, l'homme le plus éloquent a dit: «Qu'est-ce donc, en effet, que ce longtemps, puisqu'il a une fin (1)?» Il ne veut donc point qu'il y ait un longtemps, quand la fin peut arriver un jour. Es-tu parvenu à la dernière vieillesse? tu as vécu un temps, et non pas un long temps. Car la vie d'un homme, surtout aujourd'hui, n'est «qu'une fumée qui apparaît un moment». Ce que je dis, l'Ecriture le dit aux hommes dans leurs jubilations, alors qu'ils s'élèvent dans leur orgueil et ne savent point s'ils ne mourront pas à l'instant. Les divines Ecritures leur tiennent ce langage et leur donnent cet avertissement dans leur accès d'orgueil, dans la vaine confiance que leur donne une fragilité si peu durable. «Qu'est-ce que votre vie, dit-elle? C'est une vapeur qui parait un moment jusqu'à ce qu'elle soit dissipée (2)». S'élever dès lors dans l'orgueil, c'est se confier dans une vapeur, s'enfler de vaine gloire, pour périr avec cette vapeur. Il faut donc réprimer notre orgueil, le fouler aux pieds autant que possible, comprendre que nous ne vivons ici-bas que pour mourir, élever nos pensées vers cette fin qui ne finira pas. Qui que tu sois, en effet, ô homme qui as vieilli, si tu en ressens de l'orgueil, si tu crois avoir vécu longtemps, toi qui dois finir un jour, sache que si Adam vivait encore, et devait mourir, non pas maintenant, mais à la fin du monde, il n'aurait pas vécu un temps bien long, puisque ce temps aurait une fin (3). Et ceci est très-vrai, tout homme prudent le comprendra, et non-seulement c'est une vérité que l'on prêche, mais une vérité que les auditeurs comprennent.

3. Reportons notre attention au psaume que nous avons chanté, afin d'y trouver que le Prophète n'a dit: «Je chanterai le Seigneur «aussi longtemps que je vivrai», que dans le sens de cette vie qui dure toujours. S'il n'est, en effet, rien de bien long dans cette vie, parce qu'elle a une fin, ce n'est point cette vie que nous sommes appelés à désirer quand nous devenons chrétiens. Et de fait, nous ne devenons point chrétiens pour être heureux en cette vie de la terre. Car si nous avons embrassé le christianisme, pour jouir du bonheur seulement en cette vie du temps, et

1. Cicero, Orat. pro M. Marcello, n. 28.- 2.

3. Cette dernière phrase parait à l'éditeur une épiphonème assez inepte, qui aura passé de la marge dans le texte.

encore d'un bonheur si frivole, si vaporeux, nous sommes dans une profonde erreur; vos pieds seront chancelants en voyant un homme, revêtu de dignité et dominant ceux qui l'entourent, jouir de la santé corporelle et arriver à une vieillesse qui s'éteint lentement. Voilà ce que voit le chrétien pauvre, sans honneur, soupirant chaque jour dans la peine et les gémissements, et qui dit en lui-même: Que me revient-il d'être chrétien? En quoi suis-je plus heureux que cet autre qui ne l'est pas? que cet autre qui ne croit pas au Christ? que cet autre qui blasphème mon Dieu? Voici l'avertissement du Psalmiste: «Ne mettez point votre confiance dans les princes». Quel charme a pour toi la fleur du foin? «Car toute chair n'est qu'un foin». C'est ce que dit le Prophète, qui non-seulement le dit, mais le crie. Et le Seigneur lui dit: «Crie». Et il répondit: «Que faut-il crier? Que toute chair n'est qu'un foin, et toute beauté de la chair, la fleur du foin. Le foin est desséché, la fleur est tombée». Tout donc a-t-il péri? Non. «Le Verbe de Dieu demeure éternellement (1)». Quel charme a pour toi du foin? Voilà que ce foin périt; veux-tu ne point périr? Attache-toi au Verbe. Ainsi le dit aussi notre psaume. Ce chrétien dans l'indigence, dans la bassesse de sa condition, voyait dans ce païen riche et puissant la fleur du foin, et peut-être eût-il préféré être à son service plutôt qu'au service de Dieu. C'est à lui que le Psalmiste adresse ces paroles. «Ne mets point ta confiance dans les princes, ni dans les fils des hommes, en qui n'est pas le salut (2)». Et notre interlocuteur de répondre: Veut-il parler de celui qui a le salut? Le voilà en santé. Je le vois aujourd'hui plein de verdeur. Et moi je suis plutôt misérable et languissant. A quoi bon t'arrêter à ce qui a pour toi de l'attrait et des charmes? Ce n'est point là le salut. «Le souffle s'en ira de lui, et il retournera dans la terre qui est son partage». Voilà tout salut pour lui. «C'est une vapeur qui apparaît un instant. L'esprit sortira de lui, et il retournera dans la terre qui est son partage». Laissez passer quelques années, laissez écouler l'eau du fleuve comme à l'ordinaire. Parcourez quelques tombeaux des morts, et distinguez les os du riche des os du pauvre. Quand l'esprit s'est retiré, il est retourné dans la terre qui est son

1. Is 40,6-8- 2. Ps 146,3

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partage. Le Prophète a grandement raison de ne rien dire de l'esprit de cet homme qui n'a eu pendant sa vie nulle pensée spirituelle. «Il est retourné dans la terre qui lui est propre», c'est-à-dire cette chair, ce corps qui était tout pour lui, ce corps d'orgueil, cette chair si trompeuse et dont l'apparente félicité t'aveuglait. «L'esprit sortira, et il retournera dans la terre qui est son partage; en ce jour périront toutes leurs pensées (1)». Ces pensées qui étaient si terrestres; voilà ce qu'il faut faire, ce qu'il faut achever, où il faut parvenir. Voilà ce que je veux acheter, ce que je veux acquérir, à quel honneur je prétends arriver. «En ce jour s'évanouiront toutes ses pensées». Mais comme «la vertu de Dieu demeure éternellement», en t'attachant au Verbe, pour lui demander la vie éternelle, non-seulement ta pensée ne périra point, mais c'est alors qu'elle se réalisera. Quand elle périt pour lui, elle se réalise pour toi. Cet homme n'avait que des pensées du temps et de la terre, d'ajouter un champ à un champ, d'entasser trésor sur trésor, de briller dans les honneurs, de s'enfler de sa puissance. Comme donc il avait de telles pensées, «ces pensées mourront toutes en ce «jour». Mais toi, chrétien, si tes pensées, loin de s'arrêter à la félicité de cette vie, ont pour objet le repos sans fin, lorsque ton corps retournera dans la terre, c'est alors que ton âme aura trouvé ce repos.

4. Ecoute l'Evangile, vois et considère les pensées de deux hommes. «Il y avait un riche, qui était revêtu de pourpre et de fin lin, et qui donnait tous les jours de splendides festins (2)». Tous les jours le foin, et la fleur du foin. Ne te laisse pas séduire par la félicité de cet homme qui est revêtu de pourpre et de fin lin, et qui donne de splendides festins chaque jour. C'était un orgueilleux, un impie, n'ayant que des pensées vaines et de vains désirs. Quand il mourut, ce jour-là ses pensées moururent avec lui. Or, il y avait à sa porte un pauvre nommé Lazare. L'Evangile, qui tait le nom du riche, nous dit le nom du pauvre. Dieu n'a point dit un nom qu'emporte le vent. Mais Dieu a daigné nommer celui dont on ne disait pas le nom. Ne t'en étonne pas, je t'en prie. Dieu a raconté ce qu'il a vu écrit en son livre. Or, il est dit des impies: «Qu'ils ne soient pas inscrits sur votre livre (3)». De même, quand les Apôtres se glorifiaient de

1. Ps 146,4 - 2. Lc 16,19 - 3. Ps 68,29

ce qu'au nom du Seigneur les démons leur étaient soumis, de peur qu'ils ne vinssent à en concevoir de l'orgueil, comme le reste des hommes, à s'en vanter, bien que ce fût une grande et glorieuse puissance, le Sauveur leur dit: «Ne vous réjouissez point de ce que les démons vous soient soumis; mais réjouissez-vous de ce que vos noms sont écrits dans le ciel (1)». Le Dieu qui habite le ciel garda le silence sur le nom du riche, qu'il ne trouva point écrit dans le ciel; il proclama celui du pauvre, parce qu'il l'y vit écrit, ou plutôt qu'il l'y fit écrire. Mais voyez ce pauvre. A propos des pensées de ce riche impie, fastueux, vêtu de pourpre et de fin lin et donnant de splendides festins tous les jours, nous avons dit qu'elles périrent avec lui à sa mort. Or, à la porte de ce riche était un pauvre du nom de Lazare, «couvert d'ulcères, et qui désirait se rassasier des miettes qui tombaient de la table du riche, sans que personne les lui donnât; tandis que les chiens venaient et léchaient ses ulcères (2)». C'est là que je veux te voir, ô chrétien; car c'est là que nous apprenons la fin de ces deux hommes. Dieu, dans sa puissance, peut nous donner le salut en cette vie, et nous délivrer de la pauvreté, et donner au chrétien ce qui est suffisant. Et toutefois, si cela venait à manquer, que choisirais-tu? D'être ce pauvre ou ce riche? Loin de toi toute illusion. Ecoute la fin, et tu verras quel choix est mauvais. Assurément ce pauvre, qui était pieux, méditait, au milieu de ses malheurs temporels, sur cette vie qui doit finir un jour et sur le repos éternel qui doit nous échoir. Tous deux moururent, mais les pensées de ce pauvre ne périrent point avec lui. Car s'il mourut pauvre, il fut porté par les anges au sein d'Abraham. En ce jour toutes ses pensées se réalisèrent. Et comme Lazare signifie, en latin, Adjutus ou aidé, la parole du Psalmiste s'accomplit. «Bienheureux l'homme à qui le Dieu de Jacob vient en aide (3)». Quand son esprit s'en alla, quand sa chair retourna dans la terre qui est son partage, ses pensées ne périrent point avec lui, «parce que son espérance était dans le Seigneur son Dieu». Voilà ce que l'on apprend donc à l'école où enseigne le Christ, voilà ce qu'espère l'âme de son disciple fidèle, voilà la plus réelle récompense du Sauveur.

1. Lc 10,20 - 2. Lc 16,21- 3. Ps 146,5

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VINGT-QUATRIÈME SERMON. SUR CES PAROLES DE L'ÉVANGILE, [LUC, 16,19-31]: «IL Y AVAIT UN HOMME RICHE, ETC. (1)».

ANALYSE.- 1. Les Juifs ne croient pas encore aux oracles des Prophètes qui concernent le Christ et son Eglise.- 2. L'incrédulité des Juifs est combattue par l'exemple de ce riche aux grands festins.- 3. Ce riche est pour nous un exemple salutaire.- 4. Suffisamment avertis de l'avenir, nous n'avons aucune excuse.- 5. Ce qui est accompli, ce que Dieu nous a promis, doit confirmer notre foi.- 6. Promesses que Dieu a faites dans la nation juive, au sujet d'Abraham, dont la foi est hautement proclamée.- 7. Fidélité de Dieu dans l'accomplissement de ses promesses, et folie des idolâtres.- 8. Dieu cherche son image dans notre âme, comme César sur sa monnaie. - 9. Combien de promesses de Dieu sont accomplies déjà.- 10. La foi d'Abraham est pour nous un exemple.- 11. Double comparaison pour nous faire supporter l'adversité.- 12. Nous devons user de la patience de Dieu et l'imiter.- 13. Dans l'adversité, il faut nous confier à Dieu sans nous plaindre.- 14. Exhortation à la patience.

1. Telle est la foi chrétienne, qui est pour les impies et pour les infidèles un sujet de dérision, c'est que nous croyons qu'il est une autre vie après celle-ci, qu'il y a une résurrection des morts, et, après la fin du monde, un jugement. Comme ce point de foi n'était point en vigueur parmi les hommes, et qu'il leur paraissait même inacceptable, en dépit des prédications et des affirmations des Prophètes serviteurs de Dieu et de la loi établie par le ministère de Moïse, Jésus-Christ, notre Seigneur et Sauveur, est venu en ce monde pour le persuader aux hommes. Lui qui était Fils de Dieu, né du Père d'une manière invisible et ineffable, lui, coéternel au Père et égal au Père, et Dieu unique avec le Père; lui, Verbe du Père, par qui tout a été fait; lui, conseil du Père, par qui tout se dirige, déposa pour un temps cette grandeur sans mesure, cette incompréhensible majesté, cette sublime puissance, en venant sur la terre se revêtir de notre chair et se montrer aux yeux des hommes. Comme donc on ne voyait pas Dieu ou la divinité dans le Christ, on méprisait sa chair que l'on voyait; mais lui prouvait par des prodiges la divinité qui était en lui. Et comme, au simple aspect, l'oeil humain pouvait le mépriser, il faisait de tels miracles, que ces oeuvres montraient en lui le Fils de Dieu. Comme donc il opérait des prodiges, donnait des préceptes utiles, corrigeait les vices et les reprenait, enseignait les vertus, guérissait même les maladies du corps, afin de guérir les esprits des infidèles, le peuple où il avait pris naissance, grandi, fait ses prodiges, s'irrita contre lui et lui donna la mort. Mais lui, qui était venu pour naître parmi nous, était venu aussi pour mourir. Or, cette mort de son corps, qu'il avait voulu subir pour nous donner un exemple de résurrection, il ne voulut pas qu'elle fût infructueuse; mais il permit qu'elle lui fût donnée par la main des impies, de sorte que ces hommes qui ne voulaient point obéir à ses préceptes lui firent souffrir ce qu'il voulait. Ainsi fut fait. Le Christ fut mis à mort, enseveli, ressuscita, comme nous le savons, comme l'atteste l'Evangile, comme on le prêche dans l'univers entier, et les Juifs, vous le voyez, ne veulent point croire au Christ, même après qu'il est ressuscité d'entre les morts, qu'il a été glorifié aux yeux de ses disciples en montant au ciel, quand s'accomplissent dans l'univers entier les oracles des Prophètes. Car tous les Prophètes qui ont annoncé que le Christ devait naître, mourir, ressusciter, monter au ciel, ont prédit aussi que l'Eglise s'étendrait par toute la terre. Quant aux Juifs, s'ils n'ont point vu le Christ à sa résurrection et à son ascension

(1) On lit dans le Codex, fol. 80: «Sermon de saint Augustin, évêque, sur le riche et Lazare». C'est plutôt l'exposition de la vérité de la religion chrétienne prouvée par tout ce qui s'est accompli jusqu'alors, et par les promesses de Dieu qui doivent l'être ensuite, avec une exhortation â la patience. Possidius en fait mention dans son Indicul. Opp., c. S.

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au ciel; du moins, qu'ils voient l'Eglise répandue sur la terre entière, et dans ce fait l'accomplissement des paroles des Prophètes.

2. Maintenant s'accomplit parmi eux ce que nous venons d'entendre dans l'Evangile. Ils n'écoutent pas le Christ après qu'il est ressuscité d'entre les morts, parce qu'ils n'ont pas écouté le Christ vivant sur la terre. C'est ce que dit Abraham à ce riche, qui était tourmenté dans l'enfer, et qui voulait que l'on envoyât en ce monde avertir ses frères de ce que l'on souffre en enfer, et, avant qu'ils ne tombassent dans ce lieu de tourments, de bien vivre, de faire pénitence de leurs péchés, afin de mériter d'aller dans le sein d'Abraham, plutôt que dans ces supplices où lui-même était tombé. Voilà ce que faisait ce riche tardivement miséricordieux, qui avait méprisé le pauvre couché devant sa porte, et sans doute en punition de son orgueil envers lui, sa langue était desséchée, et il soupirait après une goutte d'eau. Comme il n'avait point fait sur la terre ce qu'il y devait faire pour ne point arriver au lieu des tourments, il fut trop tard miséricordieux envers les autres. Mais que lui dit Abraham? «S'ils n'écoutent point Moïse et les Prophètes, ils ne croiront pas, quand même quelqu'un des morts ressusciterait (1)». Voilà ce qui s'est vérifié, mes frères. On ne saurait aujourd'hui persuader aux Juifs de croire en Celui qui est ressuscité des morts, parce qu'ils n'écoutent pas Moïse et les Prophètes. S'ils voulaient, en effet, les écouter, ils trouveraient en eux la prédiction de ce qui vient de s'accomplir et qu'ils ne veulent pas croire. Ce que nous disons des Juifs faisons-le donc pour nous, de peur qu'en regardant les autres, nous ne tombions nous-mêmes dans l'impiété. On ne lit point l'Evangile aux Juifs, mes frères bien-aimés, on leur lit Moïse et les Prophètes, qu'ils ne veulent point croire. Gardons-nous de faire, quand on nous lit l'Evangile, ce qu'ils font quand on leur lit les Prophètes. Car ce n'est point chez eux, dis-je, mais chez nous, qu'on récite l'Evangile.

3. L'Evangile, vous venez de l'entendre, nous annonce deux vies: la vie présente et la vie future. Nous avons la vie présente, nous croyons à la vie à venir. Nous sommes dans la vie présente, sans être arrivés encore à la vie future. Mais en cette vie présente, amassons-nous de quoi mériter la vie éternelle;

1. Lc 16,31

car nous ne sommes point morts encore. Est-ce que l'on récite l'Evangile dans les enfers? Quand même on l'y réciterait, ce riche l'entendrait en vain, puisque sa pénitence ne saurait plus être fructueuse. C'est ici-bas qu'on le lit pour nous, et nous l'entendons ici-bas où nous pouvons nous corriger tant que dure notre vie, de peur que nous ne tombions dans ces tourments. Croyons-nous, ou ne croyons-nous pas ce qu'on nous lit? Loin de moi d'outrager votre charité jusqu'à penser que vous ne croyez point! Car vous êtes chrétiens, et vous ne seriez nullement chrétiens si vous ne croyiez point à l'Evangile. Il est donc évident que vous croyez à l'Evangile dès lors que vous êtes chrétiens. Nous l'avons entendu; on vient de nous le réciter. Il y avait donc un homme riche, plein d'orgueil, se prévalant de ses richesses, qui «était vêtu de pourpre et de fin lin, et qui donnait de splendides festins tous les jours (1)». Or, à sa porte était couché un pauvre du nom de Lazare, couvert d'ulcères que les chiens venaient lécher; et «il désirait se rassasier des miettes qui tombaient de la table du riche (2)» et ne le pouvait. Voilà donc le crime du riche; c'est qu'il désirait se rassasier de miettes, et ne pouvait le faire, celui qui devait se revêtir de la nature humaine. Et dès lors si ce riche eût pris en pitié le pauvre couché à sa porte, il serait arrivé où ce pauvre est arrivé lui-même. Ce qui a conduit en effet Lazare au lieu du repos, c'est moins la pauvreté que l'humilité; et ce qui en a détourné le riche, ce sont moins les richesses que l'orgueil et l'infidélité. Car, vous le savez, mes frères, le langage qu'il tient dans les enfers prouve que ce riche fut infidèle sur la terre. Ecoutez en effet. Il voulait que quelqu'un d'entre les morts allât annoncer à ses frères ce que l'on endure en enfer, et comme Abraham le lui refusait en disant: «Ils ont Moïse et les Prophètes, qu'ils les écoutent. Non, Abraham, mon père», répond-il, «mais si quelqu'un d'entre les morts y allait, il les persuaderait»; nous montrant par là que lui-même, quand il était en cette vie, ne croyait ni à Moïse, ni aux Prophètes, mais désirait qu'un homme sortit d'entre les morts pour venir à lui. Examinez ceux qui pensent comme lui, et voyez, si vous avez la foi, quel avertissement nous donne l'exemple de ce

1. Lc 16,19 - 2. Lc 16,21

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riche. Combien nous disent maintenant Jouissons de la vie tant qu'elle dure? Mangeons, buvons, plongeons-nous dans les délices! Qu'est-ce que l'on nous annonce, qu'il y a une autre vie? Qui en est revenu? Qui est ressuscité? Voilà ce qu'on nous dit, ce que disait ce riche, qui éprouve après la mort ce qu'il ne croyait point pendant sa vie. Il eût été mieux de se corriger utilement pendant la vie, que d'endurer après la mort tant de tourments inutiles!

4. Retournons maintenant ses paroles, afin de voir s'il n'y a personne parmi nous pour raisonner comme lui. Car Dieu n'a point mis sous nos yeux ici-bas ce qu'il nous a ordonné de croire; et il nous l'a dérobé afin que notre foi fût méritoire. Quel mérite, en effet, aurais-tu de croire, si Dieu te l'avait mis sous les yeux? Ce ne serait plus croire alors, mais voir. C'est donc pour attiser ta foi que Dieu ne t'a rien manifesté; il t'ordonne ici-bas de croire, et se réserve de te montrer à découvert ce que tu crois. Mais si tu ne crois pas quand il t'impose la foi, il ne te réserve point de voir sa face, mais il te réserve les tourments du riche dans l'enfer. Et quand viendra Jésus-Christ notre Seigneur et Sauveur, dont on nous prêche qu'il est venu, de manière à nous faire espérer qu'il doit venir, il viendra avec des rétributions pour les fidèles et pour les infidèles; aux fidèles il donnera des récompenses, et jettera les infidèles au feu éternel. Il annonce en effet, dans l'Evangile, comment il doit juger à la fin du monde: il mettra les uns à sa droite, les autres à sa gauche, il fera le discernement des nations, comme le berger qui sépare les brebis des boucs; il placera les justes à sa droite, les impies à sa gauche, et dira aux justes: «Venez, les bénis de mon Père, recevez le royaume qui vous est préparé dès l'origine du monde»; aux impies et aux infidèles: «Allez au feu éternel, qui a été préparé au diable et à ses anges (1)». Ce juge pouvait-il être plus obligeant pour toi, que de t'annoncer la sentence définitive, pour te faire éviter de l'encourir? Mes frères, tout homme qui menace ne veut point frapper, mais s'il nous surprenait tout à coup, c'est alors qu'il nous frapperait. Quiconque dit: Garde à toi, ne veut trouver personne à frapper. C'est donc pour les hommes se préparer un châtiment, c'est pour les

1. Mt 25,31-41

hommes s'amasser un trésor de douleur, que refuser de croire, quand Dieu nous dit Garde à vous. Quant à la peine de nos errements en cette vie, c'est souvent quelque affliction, quelque fléau, qui est pour nous corriger ou nous mettre à l'épreuve. Ou bien, en effet, Dieu veut corriger l'homme de ses fautes, de peur que son impénitence n'aboutisse à de grands châtiments, ou il met à l'épreuve la foi de chacun de nous, afin de voir avec quel courage, avec quelle patience nous demeurerons sous le châtiment d'un père, sans murmurer de ses paternelles corrections, nous réjouissant de ses caresses, et toutefois ne goûtant cette joie qu'en lui rendant grâces même quand il nous redresse; «puisque Dieu châtie celui qu'il reçoit parmi ses enfants (1)». Quelles ne furent point les douleurs des martyrs! Quel fut leur courage! Quelles chaînes, quelles prisons fétides, quels déchirements des chairs, quelles flammes, quelle férocité des bêtes, quels genres de mort! Ils triomphèrent de tout. L'esprit leur montrait de quoi mépriser ce qu'ils voyaient des yeux du corps. Car il y avait en eux l'oeil de la foi fixé sur l'avenir, et qui dédaignait le présent. biais celui dont l'oe il ne voit point l'avenir, craint pour le présent et, n'arrive point à cet avenir.

5. C'est donc la foi qui s'édifie en nous. Que tout homme qui refuse maintenant de croire que le Christ est né de la vierge Marie, qu'il a souffert, qu'il a été crucifié, en croie les Juifs quant à son existence et à sa mort, et en croie l'Evangile quant à sa naissance d'une Vierge et à sa résurrection. Il y a là des motifs de croire. Les Juifs nos ennemis n'oseraient dire: Le Christ n'a pas existé dans notre nation, ou bien: il n'a pas existé cet Homme qu'adorent les chrétiens. Il a existé, disent-ils, et nos pères l'ont mis à mort, et il est mort comme tout autre homme. Si nous trouvons dans les Prophètes ce qui devait suivre sa mort, que l'on devait parcourir le monde en son nom, que toutes les nations devaient l'adorer, ainsi que toutes les contrées habitées, parce que tous les rois eux-mêmes devaient accepter son joug, et si nous voyons s'accomplir après la mort du Christ ce qui était annoncé bien avant sa naissance, dans quelle erreur ne tombons-nous point si nous refusons de croire le reste des prophéties,

1. He 12,6

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quand nous en voyons déjà tant d'accomplies parmi nous? Et en effet, mes frères, nous chrétiens qui sommes ici, nous ne sommes point nous seulement, nous sommes le monde entier. Il y a quelques années, nous n'étions pas, et ce qu'il y a de surprenant, c'est qu'on voie aujourd'hui s'accomplir ce qui pendant tant de siècles n'était pas. Voilà ce que nous lisons dans les Prophètes; nous le trouvons prédit, de peur que nous n'en venions à n'y voir que l'effet du hasard. Voilà ce qui doit augmenter notre foi, l'édifier, la consolider. Nul ne dit: Cela s'est fait subitement. D'où cela vient-il? Nous voyons, de nos jours, ce qui n'est jamais arrivé sur la terre. De fois à autre, nous trouvons dans les Ecritures que Dieu est traité comme un débiteur, mais qui doit s'acquitter au temps qu'il a choisi. Comment Dieu pouvait-il devoir? S'était-il donc vu dans la nécessité d'emprunter, lui qui donne à tous en surabondance, lui qui avait ceux mêmes qui devaient recevoir ses dons? Car, auparavant, il n'y avait aucun homme qu'il pût combler de ses bienfaits Quelqu'un me dira-t-il: C'est à mes mérites que Dieu a bien voulu accorder tous ces dons. Mais ton existence, aux mérites de qui l'a-t-il accordée? De qui pouvait-il se gratifier quand tu n'étais pas? D'une existence gratuite. Car tu n'avais pu la mériter avant d'être. C'est sur sa parole qu'il te faut croire qu'il t'a fait gratuitement les autres dons. Nous sommes donc en possession de la grâce de Dieu, et Dieu était en quelque sorte le débiteur du monde entier. Ou plutôt, le monde n'avait aucun titre sur Dieu, parce qu'il ne connaissait pas la caution qu'il nous avait faite. Il s'est fait débiteur par ses promesses, et non par l'emprunt qu'il nous a fait. Car un homme peut être appelé débiteur de deux façons. Il doit rendre ce qu'il a reçu ou ce qu'il a promis. Mais comme on ne saurait employer le mot rendre, à l'occasion des promesses de Dieu, puisque Dieu, qui a tout donné à l'homme, n'en a rien reçu; il n'y a plus pour lui qu'un moyen d'être débiteur, c'est qu'il a daigné promettre.

6. Or, cette promesse était consignée dans les Ecritures, et les Ecritures étaient entre les mains de la nation juive, qu'il avait choisie, afin de naître de la chair de son serviteur, de son fidèle, qui crut en lui. Et de qui est née cette nation? D'Abraham déjà vieux, et de Sara qui était stérile? Ce fut un miracle, que l'enfantement, que la naissance d'Isaac, souche de la nation juive (1). Le vieillard n'osait plus rien espérer de ses membres vieillis, il n'osait rien désirer d'une épouse stérile. Or, ce qu'il n'espérait plus, Dieu le lui offrit, et il crut à Dieu qui lui offrait ce qu'il n'eût osé demander à Dieu même. Et comme, en récompense de sa foi, un fils lui était né, en qui il croyait avoir une postérité innombrable, voilà que Dieu lui demande de lui offrir ce même fils en sacrifice (2). Or, telle était la foi d'Abraham, qu'il n'hésita point à immoler ce fils, au sujet duquel il avait reçu les promesses de Dieu. Le voyons-nous hésiter et dire à Dieu: Seigneur, un fils dans ma vieillesse était une grande faveur, le comble de mes vieux, une joie ineffable, un fils m'est né contre mon espérance; et vous exigez que je l'immole? Ne m'en point donner n'eût-il pas été mieux que me le redemander après me l'avoir donné? Il ne dit rien de semblable, mais il crut utile tout ce qu'il voyait que Dieu exigeait. Telle est la foi, mes frères. Ce pauvre dont nous parlons fut porté au sein d'Abraham, et le riche précipité dans les supplices de l'enfer. Or, afin que vous sachiez que ce n'est pas dans les richesses qu'est le péché, il était riche cet Abraham au sein duquel fut porté Lazare; Abraham était riche sur la terre, comme l'Ecriture nous l'enseigne. Il avait beaucoup d'or et d'argent, de troupeaux, de serviteurs. Il était riche, mais sans orgueil; afin de vous faire comprendre que la cause des tourments du riche de l'Evangile, c'était son orgueil, c'étaient ses vices. Eux seuls méritaient le châtiment, et non une substance de Dieu; car une substance de Dieu est un bien, peu importe à qui il la donne. Mais quiconque en use bien s'acquiert une récompense, quiconque en use mal encourt un châtiment. Or, voyez comment Abraham possède les richesses. Les réserve-t-il à son fils? Quel mépris n'avait-il point pour des richesses, l'homme qui, pour obéir à Dieu, lui offrit son fils même.

7. Les Juifs donc ne comprenaient point ce passage de l'Ecriture, où Dieu se faisait notre débiteur par ses promesses. Or, voici venir Jésus-Christ Notre-Seigneur, né selon les Ecritures, parce qu'il nous est rendu selon cette même Ecriture encore. Il a souffert selon l'Ecriture, parce qu'elle annonçait ce

1. Gn 17 Gn 21 - 2. Gn 21

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qu'il devait souffrir. Selon l'Ecriture encore, il est ressuscité, parce qu'elle annonçait sa résurrection. Selon l'Ecriture, il est monté aux cieux, parce qu'elle annonçait son ascension. Après cette ascension ignorée des Juifs, il envoya ses Apôtres vers les nations, afin de les réveiller en quelque sorte de leur sommeil, et de leur dire: Levez-vous, recevez ce qui vous est dû, ce que l'on vous a promis dans les temps anciens! Qui donc va éveiller son créancier, pour lui offrir ce qu'il lui doit? Car ce ne sont point les nations qui se sont éveillées, parce qu'elles avaient Dieu pour débiteur. Elles ont été appelées, ont commencé à examiner les Ecritures et à y lire qu'elles recevaient ce qui leur avait jadis été promis. Elles ont accueilli le Christ promis et mis sous leurs yeux; elles ont accueilli la grâce de Dieu, l'Esprit-Saint promis et manifesté; elles ont accueilli l'Eglise dispersée parmi les nations, promise et manifestée. Les idoles qu'adoraient les nations, Dieu avait promis de les détruire. Voilà ce qu'on lit dans les Ecritures, voilà ce qu'on y trouve (1). Vous voyez comment Dieu accomplit de nos jours ce qu'il a promis tant de milliers d'années auparavant. Car les hommes s'étaient détournés de celui qui les avait créés, pour se tourner vers l'ouvrage de leurs mains. Or, comme l'ouvrier est toujours supérieur à son oeuvre, Dieu dès lors est supérieur non-seulement à l'homme qu'il a fait, mais supérieur à tous les anges, aux vertus, aux puissances, aux trônes, aux dominations, puisqu'il les a tous créés (2) et que toute oeuvre de l'homme est inférieure à l'homme lui-même. Telle était la démence des hommes, qu'ils adoraient les idoles qu'ils auraient dû condamner. Encore s'ils eussent adoré l'ouvrier qui avait fait l'idole, car l'ouvrier est supérieur à l'idole qu'il a faite. Adorer un ouvrier, t'eût été de la part des hommes une abomination, et les voilà qui adorent l'idole faite par l'ouvrier. C'eût été une abomination d'adorer l'ouvrier, mais t'eût été mieux encore que d'adorer l'idole. Or, s'il faut condamner ceux qui font mieux, quelles pleurs donner à ceux qui font pire? Et si nous portons condamnation contre celui qui adore l'ouvrier, celui qui abandonne l'ouvrier pour passer à l'idole, qui délaisse le mieux pour passer au pire, quelle condamnation

1. Is 2,18 Ez 6,6 Mi 1,7- 2. Ep 1,21 Col 1,16

méritera-t-il?Mais quel mieux a-t-il délaissé tout d'abord? Dieu, par qui il a été fait. Il cherche l'image de Dieu, et il l'a en lui-même. L'ouvrier n'a pu faire l'image de Dieu, mais Dieu a pu se faire une image. Or, adorer l'image de l'homme qu'a faite l'ouvrier, c'est mutiler l'image de Dieu, gravée en toi par Dieu même. Et quand il t'appelle pour te ramener à lui, c'est pour te rendre cette image que tu as perdue, effacée, en l'usant au contact des convoitises terrestres.

8. C'est pourquoi, mes frères, Dieu nous redemande son image. C'est ce qu'il veut dire aux Juifs quand ceux-ci lui présentèrent une pièce de monnaie. D'abord ils voulaient le tenter, en disant: «Maître, est-il permis de payer le tribut à César (1)?» afin que, s'il répondait: il est permis, ils pussent l'accuser de malédiction contre Israël, qu'il voudrait assujétir à l'impôt et rendre tributaire sous le joug d'un roi. Que si, au contraire, il répondait: Il n'est pas permis, ils pussent l'accuser de parler contre César, d'être cause qu'on refusait l'impôt que l'on devait, puisqu'on était sous le joug. Il vit leur piège, comme la vérité découvre le mensonge, et il les convainquit de mensonge par leur propre bouche. Il ne les condamna point de sa propre bouche, mais il leur fit prononcer eux-mêmes leur sentence, ainsi qu'il est écrit: «Tu seras justifié par tes paroles et condamné par tes paroles (2). Pourquoi me tentez-vous», leur dit-il? «Hypocrites, montrez-moi la pièce d'argent du tribut». Et ils lui en montrèrent une. «De qui est cette image et cette inscription? De César, répondirent-ils. Et le Sauveur: Rendez donc à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu (3)». De même que César cherche son image sur une pièce de monnaie, Dieu recherche son image en ton âme. Rends à César, dit le Sauveur, ce qui appartient à César. Que réclame de toi César? Son image. Que réclame de toi le Seigneur? Son image. Mais l'image de César est sur une pièce de monnaie, l'image de Dieu est en toi. Si la perte d'une pièce de monnaie te fait pleurer, parce que tu as perdu l'image de César; adorer les idoles, ne sera-ce point pour toi un sujet de larmes, puisque c'est faire injure en toi à l'image de Dieu?

9. Examinez donc, mes frères, la promesse

1. Mt 22,17 - 2. Mt 12,37 - 3. Mt 22,18-21

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du Seigneur notre Dieu, et voyez, d'après le nombre de ses promesses, combien il nous a déjà donné. Le Christ n'était point né encore, mais il était promis dans les saintes Ecritures; il a tenu cette promesse. Il est né; mais il n'avait point souffert encore, il n'était pas ressuscité; il a également tenu cette promesse. Il a souffert, a été crucifié, est ressuscité. Sa passion est notre récompense, son sang le prix de notre rédemption. Il est monté aux cieux, comme il l'avait promis; nouvelle promesse que Dieu a tenue. Il a envoyé l'Evangile dans toutes les nations, et c'est pour cela qu'il voulut avoir quatre évangélistes, afin que ce nombre de quatre indiquât l'univers entier, par l'Orient et l'Occident, le Nord et le Midi. Pour cela encore qu'il voulut avoir, douze disciples, afin d'en envoyer trois dans chacune des quatre parties, parce que le monde entier est appelé en la sainte Trinité, au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit. Encore une promesse qu'il a tenue. Il a donc lancé l'Evangile selon cette prédiction: «Qu'ils sont beaux, les pieds de ceux qui annoncent l'Evangile de paix, qui évangélisent les vrais biens (1)! Leur voix s'est répandue par toute la terre, et leurs paroles sur les confins de la terre (2)». II a donc envoyé comme il l'avait promis. C'est dans toutes les contrées que l'Evangile est écrit. L'Eglise aussi tout d'abord souffrit persécution: c'est une promesse acquittée par Dieu qui avait promis des martyrs. Cite-nous cette promesse: «Précieuse est devant le Seigneur la mort de ses justes (3)». Que doit-il acquitter encore? «Tous les rois de la terre se prosterneront en sa présence (4)». Ils ont cru aussi, ces rois qui, tout d'abord, avaient fait des martyrs par la persécution. Nous voyons donc aussi maintenant des rois qui embrassent la foi. Dieu a donc tenu à ses promesses, au point qu'ils ordonnent maintenant de briser les idoles, ces mêmes rois qui ordonnaient de mettre à mort les chrétiens. Il a fait encore disparaître les idoles, comme il l'avait promis: «Les idoles des nations ne seront point épargnées (5)». Après l'accomplissement de tant de promesses, pourquoi, mes frères, ne point croire en lui? Dieu est-il donc devenu un débiteur moins solvable? Quand même il n'aurait rien accompli

1. Rm 10,15 - 2. Ps 18,4-5 - 3. Ps 115,15 - 4. Ps 71,11- 5. Sg 14,1

encore, il n'en serait pas moins débiteur solvable, lui qui a créé le ciel et la terre. Car il ne saurait devenir pauvre au point de n'avoir pas de quoi payer, ni tromper, puisqu'il est la vérité, ou bien la puissance de Dieu peut-elle être renversée avant qu'il ait le temps de s'acquitter?

10. Il est juste, mes frères, que l'on croie en Dieu avant qu'il acquitte quoi que ce soit; car il ne saurait ni mentir, ni tromper aucunement. Il est Dieu. Ainsi nos pères ont cru en lui. Ainsi crut en lui Abraham. C'est ainsi que la foi est louable, qu'elle est exemplaire. Il n'avait rien reçu de Dieu encore, et il crut à sa promesse; et nous qui avons déjà tant reçu de lui, nous ne croyons pas. Abraham pouvait-il lui dire: Je croirai en vous parce que vous avez accompli telle promesse que vous m'aviez faite? A la première injonction, il crut sans rien avoir vu s'accomplir de semblable. «Sors de la terre, lui fut-il dit, de ta parenté, et va dans la terre que je te montrerai (1)». Et il crut à l'instant, quoique Dieu ne lui eût point donné cette terre, mais l'eût réservée à sa postérité, et que promit-il à cette postérité? «En ta postérité seront bénies toutes les nations (2)». Sa postérité c'est le Christ, puisque d'Abraham naquit Isaac, d'Isaac Jacob, de Jacob les douze patriarches, des douze patriarches le peuple juif, du peuple juif la vierge Marie, et de la vierge Marie Jésus-Christ Notre-Seigneur. Ce même Jésus-Christ Notre-Seigneur est donc la postérité d'Abraham, et la promesse faite à Abraham, nous la voyons accomplie en nous. En «ta postérité, lui fut-il dit, seront bénies toutes les nations». Voilà ce qu'il crut avant d'avoir rien vu. Il crut sans avoir vu ce qu'on lui promettait. C'est nous qui voyons la promesse qui lui fut faite. Et tout ce qui lui était promis devait s'accomplir. Qu'est-ce que Dieu n'a point accompli? Il a prédit des peines pour cette vie, des peines pour ses saints, ses fidèles, qui en recueilleront le fruit par la patience (3). Il les a prédites, et nous les voyons; nous ployons sous les calamités. Quelles épreuves ne sont point annoncées encore? Gardez-vous de croire, en effet, mes frères, que les malheurs qui nous accablent dans ces temps ne sont point consignés dans les saintes Ecritures. Tout est consigné, et la patience recommandée aux chrétiens, et sur

1. Gn 3,1 - 2. Gn 22,18- 3. Lc 8,15

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tout les biens à venir, parce que sont venus sur nous les maux qui devaient arriver d'après les prédictions. Si les maux prédits n'étaient point arrivés, ils nous rendraient incrédules au sujet des biens; mais les maux sont accomplis pour nous faire croire aux biens de la vie future.

11. Tel est le monde ici-bas; c'est un pressoir qui foule. Mais si tu n'es que le marc impur, tu vas aux cloaques; si tu es l'huile, tu es recueilli dans le vase. Il faut en effet qu'il y ait un pressoir. Voyez plutôt le pressoir et voyez l'huile. Le pressoir foule quelquefois dans le monde; ainsi, c'est la famine, la guerre, la disette, la pauvreté, la mortalité, les pillages, l'avarice, la misère des pauvres, les calamités des villes. C'est tout cela, et nous le voyons. Tout cela est prédit, et nous le voyons s'accomplir. Or, au milieu de ces calamités, nous entendons des hommes qui murmurent et qui disent: Combien de malheurs depuis que le monde est chrétien! Avant qu'on ne fût chrétien, quelle abondance de richesses! Nous n'avions pas à subir tant de calamités. C'est le marc sortant du pressoir, et coulant au cloaque. Aussi sa bouche est-elle noire de ses blasphèmes; il n'a nulle beauté, tandis que l'huile a un certain éclat. Nous rencontrons un autre homme qui sort du pressoir, de dessous cette meule qui l'a broyé. S'il est tout disloqué, n'est-ce point l'effet du pressoir? Après avoir entendu le marc, prêtez l'oreille à l'huile. Grâces au Seigneur! Que votre nom soit béni, ô mon Dieu! Tous ces maux dont vous nous accablez étaient prédits. Nous voici dans la certitude que les biens viendront aussi. Quand vous nous redressez ainsi que les méchants, c'est votre volonté qui s'accomplit. Nous trouvons en vous un Père dans vos promesses, un Père encore dans vos châtiments. Redressez-nous, et rendez-nous l'héritage que vous nous avez promis pour la fin. Nous, bénissons votre saint nom, parce que le mensonge ne fut jamais en vous. Toujours vous avez dirigé les événements selon votre prédiction. C'est au milieu de ces bénédictions qui s'échappent du pressoir, que l'huile s'écoule dans les vases. Et toutefois, comme le monde entier n'est qu'un pressoir, on en tire une autre comparaison. De même que c'est dans la fournaise que l'on éprouve l'or et l'argent, de même c'est au feu de la tribulation que le juste est mis à l'épreuve; et le creuset de l'orfèvre nous fournit cette comparaison. Dans cet étroit creuset, nous trouvons trois choses: le feu, l'or et la paille; et voilà ce qui nous donne l'image du monde entier. Il y a dans le monde, en effet, et de la paille, et de l'or, et du feu; de la paille qui est brûlée, du feu qui embrase, de l'or qui est éprouvé. De même, en ce bas monde, on rencontre partout des justes, des impies et la tribulation. Le monde ressemble à la fournaise de l'orfèvre, les justes à l'or, les impies à la paille, et la tribulation au feu qui embrase. Pourrait-on purifier l'or si la paille n'était brûlée? De là vient que les impies sont réduits en cendres. Ils ne sont que cendres en effet, quand ils blasphèment, quand ils murmurent contre Dieu. Ils sont un or épuré, les justes qui supportent patiemment toutes les calamités de cette vie, qui bénissent le Seigneur au milieu de leurs tribulations, et que Dieu met dans ses trésors comme un or précieux. Car Dieu a des trésors où il met l'or épuré, de même qu'il a des égouts pour jeter les cendres de la paille. Or, il redemande pour lui tout ce qui est en ce monde. Vois ce que tu es, car il faut que le feu vienne. S'il trouve que tu sois de l'or, il épurera en toi les scories; s'il trouve que tu sois de la paille, il te consumera et te réduira en cendres. Choisis le sort que tu veux subir; car tu ne saurais dire: J'éviterai le feu. Te voilà dans le creuset de l'orfèvre, où le feu viendra nécessairement; et il est plus nécessaire encore que tu y sois, puisque tu ne saurais éviter le feu.

12. Pourquoi donc, mes frères, ne pas croire que la fin du monde arrivera, ainsi que le jour du jugement, afin que chacun de nous reçoive selon ses oeuvres en cette vie, bonnes ou mauvaises? Quand nous voyons s'accomplir, se manifester, et nous arriver tant de promesses faites, pourquoi, pendant notre vie, ne point choisir le parti qui nous fera vivre toujours? Ainsi, parce que nous avons été négligents, soyons diligents aujourd'hui. Car la négligence ne nous est jamais permise. Tu ne sais ce que demain sera pour toi. Dieu, dans sa patience, nous avertit de redresser et nous et notre vie, si elle a été mauvaise, et de faire un meilleur choix quand il en est temps. Pensez-vous que Dieu dort et ne voit point ceux qui font le mal? En nous enseignant la patience, il nous en donne le (471) premier l'exemple. Or, il trouve un homme qui a fait des progrès, qui ne marche plus comme il marchait, c'est-à-dire dans le mal. Mais cet homme est en butte à la méchanceté d'un ennemi, et il voudrait que Dieu le retirât de ce monde; et il murmure contre le Seigneur, qui lui laisse ici-bas un ennemi puissant, et ne le délivre point de ses vexations. Cet homme oublie que le Seigneur l'a supporté avec patience, et que, s'il eût usé de sévérité envers lui, il ne serait plus là pour murmurer. Tu demandes à Dieu d'être sévère? Mais tu as passé, souffre qu'un autre passe aussi. Car tu n'as pas, après ton passage, coupé le pont de la divine miséricorde. Il en est d'autres à passer. Dieu t'a fait bon, de mauvais que tu étais, il veut qu'un autre aussi, de mauvais devienne bon, comme toi-même as changé du mal au bien. Ainsi tous viennent à leur tour. Mais certains refusent de venir, d'autres viennent volontiers. C'est aux premiers que l'Apôtre a dit: «Par votre dureté, par l'impénitence de votre coeur, vous vous amassez un trésor de colère pour le jour de la colère et de la manifestation a du juste jugement de Dieu qui rendra à chacun selon ses oeuvres (1)». Et puis, si le méchant veut persévérer dans le mal, au lieu d'être un compagnon pour toi, il sera une occasion d'épreuve. Car s'il est méchant, et toi bon, ta patience à supporter le mal prouve en toi la bonté. Tu recevras donc la couronne de l'épreuve, tandis qu'il subira la peine de sa persévérance dans le mal. Quoi que fasse le Seigneur, attendons avec patience sa paternelle correction. Il est père, en effet, il est bienveillant, il est miséricordieux. Qu'il laisse nos jours s'écouler en paix, c'est alors que, pour notre malheur, il s'irrite contre nous.

13. Voyez, mes frères, jetez un coup d'oeil sur ces amphitéâtres qui s'écroulent aujourd'hui. La luxure les a construits. Pensez-vous, en effet, qu'ils soient l'oeuvre de la piété? Non, ils ne sont l'oeuvre que de la luxure des hommes impies. Or, ne voulez-vous point que s'écroulent un jour les édifices de la luxure et que s'élèvent les édifices de la piété? Quand on construisait ces monuments, Dieu permit qu'un jour les hommes reconnussent les désordres qu'ils commettaient. Mais comme ils ne les voulurent point reconnaître, Notre-Seigneur Jésus-Christ est venu, a commencé

1. Rm 2,5

à prêcher leurs désordres, à détruire ce qu'ils avaient de plus cher, et les voilà qui disent: Les temps sont mauvais depuis le christianisme. Pourquoi? Parce que l'on détruit sous tes yeux ce qui te faisait mourir. Mais, nous disent-ils, on regorgeait de biens, quand se donnaient ces spectacles. Sans doute, et c'est de là que venaient ces grands biens. Si donc tu reconnais que Dieu t'a donné un jour cette abondance dont tu as fait mauvais usage, usage de perdition, comprends que cette abondance t'a conduit à la mollesse et à la perte de ton âme. Alors est venu le Père qui a dit avec sévérité: Voilà un enfant indiscipliné. Je lui ai confié tel ou tel bien, comment donc a-t-il perdu l'un et l'autre? Si nous-mêmes nous ne confions aucune semence à la terre, qu'elle ne soit bien préparée, de peur que cette semence ne vienne à se perdre, comment voulez-vous que Dieu nous donne ses biens en abondance, quand nous sommes insubordonnés au point de négliger notre vie, quand cette abondance deviendrait une source d'abus, et ne voulez-vous pas que Dieu arrête les hommes sur la pente de la perdition. Mes frères, Dieu est médecin, et il sait nous enlever un membre gangréné, de peur que le mal ne gagne les autres. Il faut couper ce doigt, dit-il; car un doigt de moins est mieux que tout le corps s'en allant en pourriture. Si le médecin, qui est un homme, en agit ainsi d'après son art, si l'art médical retranche quelque partie des membres, pour empêcher la gangrène de tout envahir, pourquoi Dieu n'amputerait-il pas chez les hommes ce qu'il connaît de gangréné, pour les faire arriver au salut?

14. Loin de nous donc, mes frères, cet ennui pour la main sévère de Dieu, de peur qu'il ne nous laisse et que nous ne périssions éternellement; demandons-lui plutôt qu'il tempère les châtiments, qu'il les proportionne de manière que nous ne succombions point, demandons-lui qu'il nous redresse pour notre salut, qu'il mesure l'épreuve, et nous rende ensuite ce qu'il a promis à ses saints. Voyez ce qu'a dit l'Ecriture: «Le pécheur a irrité le Seigneur, et dans sa grande colère il n'en tirera point vengeance (1).» Qu'est-ce à dire, qu' «il n'en tirera pas vengeance dans sa colère?» C'est-à-dire que telle est sa colère, qu'il ne recherchera point ses fautes, mais qu'il

1. Ps 10,4

472

le laissera périr éternellement. Si donc négliger le châtiment est l'effet d'une grande colère, nous exercer est l'effet de sa miséricorde. Or, il nous exerce, quand il nous châtie, quand il attire à lui notre coeur par l'affliction. Tenons donc à ce salut qu'il nous présente, et ne fuyons point ses châtiments. Tels sont les enseignements et les avertissements qu'il nous donne, c'est en cela même qu'il nous affermit. Lui, Fils de Dieu, qui est venu ici-bas nous consoler, quelle prospérité, dites-moi, a-t-il goûtée ici-bas? Il est, à n'en pas douter, le Fils de Dieu, Verbe de Dieu, par qui tout a été fait. Or, quelle prospérité at-il goûtée en cette vie? N'est-ce point lui qui, en chassant les démons, entendait résonner à ses oreilles cette injure: «Vous êtes possédé du démon (1)». Oui, au Fils de Dieu qui chassait les démons, les Juifs disaient: «Vous êtes possédé du démon». Ils valaient mieux que les Juifs, ces démons qui confessaient qu'il était le Messie (2). Ils faisaient du moins cette confession que les Juifs ne faisaient point. Or, telle était sa patience, telle était sa grandeur, telle était sa puissance, qu'il endurait toutes ces injures. Il fut flagellé et outragé, sa face fut meurtrie de soufflets, couverte de crachats, il fut couronné d'épines, tourné en dérision, insulté, enfin suspendu à

1. Jn 7,20 - 2. Lc 4,41

la croix, puis enseveli. Tout cela, le Fils de Dieu l'a enduré. S'il en est ainsi du Maître, à combien plus forte raison du disciple? Ainsi de celui qui nous a créés, à combien plus forte raison de sa créature? Lui qui nous a légué la patience afin de nous donner l'exemple. Pourquoi manquer de patience, comme si nous avions perdu notre chef qui nous a précédé au ciel? Mais ce chef ne nous a précédé au ciel que pour nous dire en quelque sorte: C'est là, là qu'il vous faut venir par la douleur et la patience. Telle est la voie que j'ouvre devant vous. Mais où conduit cette voie par laquelle vous me voyez monter? Au ciel. Refuser de prendre cette voie, c'est refuser d'aller au ciel. Quiconque veut venir à moi, doit y venir par le chemin que j'ai enseigné, et vous ne pouvez y:arriver que par le chemin des chagrins, des douleurs, des tribulations, des angoisses. C'est par là que tu arriveras au repos qui ne t'est point refusé. Mais si tu aspires à ce repos qui est pour un temps, si tu veux t'éloigner de la voie du Christ, considère les tourments de ce riche qui était torturé dans les enfers, et qui, en recherchant le repos d'ici-bas, trouva les peines éternelles. Mes frères bien-aimés, choisissons la vie pénible qui doit aboutir au repos sans fin. Tournons-nous du côté du Seigneur, etc.





Augustin, Sermons 2023