Augustin, Sermons 189

SERMON 189

189 1. Le Christ, Jour du jour.
2. Miracle du Christ né d'une vierge. Par la Naissance du Christ, nous a été apportée la Justice.
3. Le bienfait de la régénération nous a été procuré par la Naissance humaine du Christ.
4. La Naissance du Christ est double.


1891 1. Ce jour, mes frères, nous a été rendu sacré par le Jour qui a fait tous les jours. De Lui, le psaume dit: "Chantez au Seigneur un cantique nouveau; chantez au Seigneur, toute la terre. Chantez au Seigneur et bénissez son Nom; bénissez jour après jour son salut." (Lecture particulière de saint Augustin: "Bénissez le salut qui mène au Jour venu du Jour.")
Qu'est-ce que le Jour venu du Jour sinon le Fils venu du Père, la Lumière venue de la Lumière? C'est ce Jour-là qui a engendré ce Jour-ci, Jour né en ce jour de la Vierge Marie. Ce Jour-là - entendez: Dieu le Père - n'a donc ni lever ni coucher. Et qu'est le Jour, sinon la Lumière? Non pas la lumière faite pour des yeux de chair, celle dont nous bénéficions avec les bêtes; mais la Lumière qui brille sur les anges, la Lumière que veulent contempler ceux qui purifient leurs coeurs. Elle passe, la nuit dans laquelle brillent, pour nous guider, les lampes des Écritures; Il viendra, ce Jour que chante le psaume: "Au matin, je me tiendrai à tes Côtés et je Te contemplerai."

1892 2. Donc, ce Jour, Verbe de Dieu, Jour qui éclaire les anges, jour qui éclaire la patrie où a commencé notre voyage, ce Jour S'est vêtu de chair et est né de la Vierge Marie. Miraculeusement né. Quoi de plus miraculeux que la maternité d'une vierge? Elle a conçu, mais vierge. Elle a enfanté, mais vierge. Il a été formé par celle qu'Il a formée. Il lui a donné la fécondité, sans rien ôter à sa pureté. D'où vient Marie? D'Adam. Adam? De la terre. Si Marie vient d'Adam, et Adam de la terre, Marie donc aussi est la terre, reconnaissons ce que nous chantons: "La Vérité est sortie de la terre. " Quel bienfait nous a-t-elle procuré? "La vérité est sortie de la terre et la Justice a regardé du haut du ciel." Car les Juifs, comme le dit l'Apôtre, "ignorant la Justice de Dieu, et voulant constituer la leur propre, ne se sont pas soumis à la Justice de Dieu." Qu'est-ce qui peut rendre l'homme juste? Lui-même? Qui, étant pauvre, peut se donner du pain? Qui, étant nu, peut se couvrir, s'il ne reçoit un vêtement? D'où vient la justice? Qu'est la justice sans foi? Car "le juste vit de foi." Celui qui, sans la foi, se dit juste, ment. Parce que ment celui en qui n'est pas la foi; s'il veut dire la vérité, qu'il se tourne vers la vérité. Car elle était loin de nous, avant de naître sur la terre. Tu dormais: elle est venue à toi. Un lourd sommeil t'accablait, elle t'a réveillé. Elle a voulu s'ouvrir un chemin vers toi pour ne pas te perdre. Donc, "la Vérité est sortie de la terre", parce que le Christ est né d'une vierge. "La justice a regardé du haut du ciel", pour que par la justice reviennent à la sagesse ceux qui par l'injustice l'avaient perdue.

1893 3. Nous étions mortels, pliant sous le poids du péché, portant notre châtiment. Tout homme qui naît connaît d'abord un état de misère. Inutile de consulter un prophète: observe l'enfant qui naît, vois-le en pleurs. Alors que l'Indignation de Dieu se donnait ainsi libre cours sur la terre, quelle est cette soudaine marque d'estime? "La Vérité est sortie de la terre". Il a tout créé, Lui-même créé parmi le tout. Il a fait le jour, Il est venu au jour. Le Seigneur Jésus Christ dans l'éternité sans commencement auprès du Père, a aussi son Noël. Le Verbe qui était au commencement, - et s'il n'était pas né dans le jour des hommes, nous n'aurions pas accès à la régénération divine - est né pour que nous renaissions. Le Christ est né et personne n'hésiterait à naître une seconde fois. Lui, a connu la génération humaine, mais sans avoir besoin d'être régénéré. En effet, qui en avait besoin, sinon celui, dont la génération était condamnée? Que naisse donc en nos cours sa Miséricorde. Sa Mère L'a porté dans son sein: portons-Le nous aussi dans notre coeur. La Vierge est grosse de l'Incarnation du Christ. Que nos coeurs soient gros de notre foi en Lui. La Vierge a donné naissance à notre Sauveur. Qu'en notre âme naisse le salut, qu'en elle naisse aussi la louange. Ne soyons pas stériles: que nos âmes soient fécondes pour le Seigneur.

1894 4. Le Christ est né du Père sans mère, et d'une Mère sans père: les deux naissances sont miraculeuses. La première éternelle; la seconde, temporelle. L'Éternel est né de l'Éternel. Quoi d'étonnant? C'est Dieu. Considérons sa Divinité: plus de raison de s'étonner. Que meure notre étonnement, mais que monte notre louange. Que la foi nous assiste: croyons que cela s'est réellement produit. Penses-tu que Dieu ne Se soit pas assez humilié? Celui qui était Dieu est entré dans la création. Une auberge exiguë, un enfant enveloppé de langes, dans une crèche: qui ne serait pas étonné? Celui qui emplit le monde, n'a pas trouvé place à l'auberge. Déposé dans une crèche, Il S'est fait notre nourriture. Laissons s'en approcher deux animaux et deux peuples. "Le boeuf a reconnu son Maître et l'âne la crèche de son Maître. "N'aie pas honte d'être la bête de somme de Dieu: tu porteras le Christ, tu ne t'écarteras pas du bon chemin, tu t'avanceras sur la route, le portant assis sur ton dos. Que le Seigneur S'assoie sur nous et nous dirige comme où Il veut. Soyons sa bête de somme, allons à Jérusalem. Quand nous le portons, nous ne saurions errer; allons à Lui par Lui. Afin qu'avec l'enfant né aujourd'hui nous nous réjouissions pour l'éternité.




SERMON 190

190 1. Dieu a choisi le jour de sa Naissance pour nous révéler son Mystère.
2. Les deux Naissances du Christ. Pourquoi Il a voulu naître d'une femme.
3. C'est pour nous que le Christ S'est fait enfant dans une crèche.
4. Il faut fêter la Naissance du Christ.


1901 1. Notre Seigneur Jésus Christ qui, avant de naître d'une mère, était auprès du Père, a choisi non seulement la Vierge dont Il devait naître, mais aussi le jour de sa Naissance. En ce monde d'erreur, les hommes n'en choisissent pas moins la plupart du temps leurs jours, pour planter, pour bâtir, pour partir en voyage, ou parfois pour se marier. Ce faisant, ils ont l'intention de ménager à ce qui prend en quelque sorte naissance dans leur vie, un heureux développement. Personne toutefois ne peut choisir un jour pour fixer sa propre naissance. C'est lui qui a rendu glorieux le jour où Il a daigné naître. Et Il n'a pas choisi ce jour comme l'auraient fait ceux qui ont la sottise de croire que le destin des hommes dépend de la position des astres. Car ce n'est pas le jour de sa Naissance qui a jeté un heureux sort sur sa Naissance. C'est Lui qui a rendu glorieux le jour où Il a daigné naître. Car justement, le jour de sa Naissance révèle le mystère de sa Lumière. L'Apôtre dit en effet: c'était d'abord la nuit, mais le Jour S'est approché: rejetons les oeuvres des ténèbres et revêtons-nous des armes de la lumière; comme il sied en plein jour, conduisons-nous honnêtement." Reconnaissons ce jour et soyons des jours de lumière. Car nous étions devenus nuit, quand nous vivions dans l'infidélité. Et parce que cette infidélité même qui couvrait le monde entier d'une nuit toujours renouvelée, devait diminuer avec l'accroissement de la foi, pour cette raison, au jour de la Naissance du Sauveur, la nuit a commencé à reculer sous l'assaut, et le jour à croître. Considérons donc, mes frères, ce jour, comme un jour consacré: non pas comme feraient les infidèles, en raison de la position du soleil, mais à cause de Celui qui a fait le soleil. Car Celui qui était le Verbe est devenu chair, afin de vivre, à cause de nous, sous le soleil. Selon la chair, en effet, Il vivait sous le soleil, mais par sa Majesté, Il est au-dessus de l'univers dans lequel Il a formé le soleil. En fait, même par la chair, Il était au-dessus de ce soleil qu'adorent à la place de Dieu ceux dont l'esprit aveuglé ne voit pas le vrai Soleil de justice.

1902 2. Donc, chrétiens, célébrons ce jour, non pas comme celui de sa Naissance divine, mais comme celui de sa Naissance humaine, je veux dire celle par laquelle Il S'est rendu semblable à nous, afin que, l'Invisible S'étant rendu visible, nous puissions passer du monde visible au monde invisible. Car la foi chrétienne doit retenir l'existence des deux Nativités du Seigneur: l'une divine, l'autre humaine; la première hors du temps, l'autre dans le temps. Les deux sont miraculeuses: la première sans mère, la seconde sans père. Si nous avons du mal à parler de la seconde, à quand le récit de la première? Car qui pourrait comprendre que cette révolution des révolutions dans l'ordre des choses, sans précédent, cas unique au monde, incroyable, a été rendu croyable, et que, contre toute vraisemblance, le monde entier croit qu'une vierge a conçu, qu'une vierge a enfanté et qu'ayant enfanté, elle est restée vierge? Mais ce à quoi la raison humaine n'a pu atteindre la foi le comprend: et là où la raison humaine défaille, la foi prend le relais. Car qui pourrait soutenir que le Verbe de Dieu, par qui tout a été fait, n'aurait pas pu Se faire un corps sans mère, comme Il a fait le premier homme sans père et sans mère? Mais parce que c'est bien Lui qui a fait l'un et l'autre sexe, l'homme et la femme, Il a voulu, en naissant, honorer l'un et l'autre sexe qu'Il était venu libérer. Certes, vous connaissez la faute du premier homme, lorsque le serpent n'a pas osé parler à l'homme, mais pour le faire tomber, a osé ses servir de la femme. Par le plus faible, il est venu à bout du plus fort. Et en s'introduisant dans l'un des deux, il a triomphé des deux. Aussi, pour nous empêcher de haïr en la femme la cause de notre mort par notre idée de suivre le mouvement d'un juste ressentiment et de la croire condamnée sans retour, le Seigneur, venant chercher ce qui était perdu, a voulu honorer chaque sexe pour lui donner son prix, parce que tous deux avaient été réduits à la mort. Nous en devons donc faire injure au Créateur dans aucun des deux sexes: La Naissance du Seigneur les a honorés tous deux pour que nous ayons l'espoir d'obtenir le salut. La Chair du Christ honore le sexe masculin, sa Mère le féminin. La Grâce de Jésus Christ a vaincu la ruse du serpent.

1903 3. Donc que les deux sexes renaissent en Celui qui est né aujourd'hui et qu'ils célèbrent le jour d'aujourd'hui. En ce jour, le Christ, notre Seigneur, n'a pas commencé à être, mais Celui qui était de toujours auprès du Père, a fait paraître à la lumière la chair qu'Il a reçue de sa Mère; donnant à sa Mère la fécondité, sans lui enlever sa pureté. Il est conçu, naît, est Enfant. Qu'est-ce à dire enfant? L'enfant est celui qui ne peut pas s'exprimer, parler. Il est donc à la fois Enfant et Verbe. Par la chair, Il se tait, par les anges, Il enseigne. Le Prince et Berger des bergers est annoncé aux bergers: et Il est couché dans la crèche comme nourriture des bêtes fidèles. Car Il avait été annoncé par les prophètes: "Le boeuf a reconnu son Maître et l'âne la crèche de son Seigneur." C'est pourquoi Il est monté sur un âne lorsqu'Il est entrée à Jérusalem, précédé et suivi de la foule qui chantait ses louanges. Nous aussi, reconnaissons-Le, approchons-nous de la crèche, mangeons la nourriture, portons notre Maître et notre guide, pour accéder sous sa conduite à la Jérusalem céleste. Lorsque le Christ naît d'une mère, c'est la naissance d'un être diminué. Lorsqu'Il naît du Père, c'est celle d'un incomparable Souverain. Dans les jours qui passent, Il a son jour qui passe. Mais Il est, Lui, le Jour éternel, venu du Jour éternel.

1904 4. C'est à bon droit que, comme la voix d'une trompette céleste, ce psaume enflamme nos coeurs: "Chantez au Seigneur un cantique nouveau. Chantez au Seigneur, toute la terre. Chantez au Seigneur et bénissez son Nom." Reconnaissons-Le donc et proclamons le Jour qui vient du Jour, Celui qui est né en la chair en ce jour. Jour le Fils, né du Jour le Père, Dieu né de Dieu, Lumière de la Lumière. Car c'est le salut que nous apporte Celui dont il est dit ailleurs: "Que Dieu ait pitié de nous et nous bénisse; qu'Il fasse luire sa Face sur nous, pour que nous reconnaissions tes chemins sur la terre, et ton Salut dans toutes les nations." A "sur la terre" fait écho "dans toutes les nations". Et à "chemins" "ton Salut". Rappelons-nous que c'est le Seigneur Lui-même qui a dit: "Je suis le Chemin". Et lorsque tout à l'heure on lisait l'évangile, nous avons vu le bienheureux vieillard Siméon recevoir la Réponse divine à la promesse qu'il n'atteindrait pas la mort avant d'avoir vu l'Oint du Seigneur. Ayant pris dans ses mains le Christ-Enfant et ayant reconnu la Grandeur de ce petit Etre, il dit: "Rappelle maintenant, Seigneur, ton serviteur, comme Tu l'as promis, en paix, parce que mes yeux ont vu ton Salut." Proclamons "sa Gloire parmi les nations, ses Miracles dans tous les peuples." Il est couché dans une crèche, mais Il contient le monde: Il est à la mamelle, mais est la nourriture des anges: dans les langes, Il nous revêt d'immortalité; on Le nourrit de lait, mais on L'adore: Il n'a pas trouvé place à l'auberge, mais Il S'est fait un temple du coeur des croyants. Car pour que sa Faiblesse devienne force, sa Force s'est faite faiblesse. Que sa Naissance charnelle donc aussi nous plonge dans l'admiration et non dans le mépris; et reconnaissons comme s'y est humilié pour nous une telle grandeur. Puis enflammons notre charité, pour parvenir à son Éternité.




SERMON 191

191 1. Le Verbe S'est incarné Pour assumer l'indignité à la place des indignes.
2. Le Christ est né sans détruire la virginité de sa Mère.
3. L'Église est spirituellement vierge et mère.
4. Nous devons imiter la virginité de Marie.


1911 1. Le Verbe du Père, par qui ont été formés les temps, a placé pour nous, quand Il est devenu chair, le jour de sa Naissance dans le temps; et pour naître homme, Il a voulu naître en un jour donné, Lui sans assentiment divin de qui aucun jour ne peut réaliser sa course. Par Lui-même, étant auprès du Père, Il précède tout l'espace des siècles; de Lui-même, en naissant d'une mère, Il S'est introduit en ce jour dans le décours des ans. Il est devenu Homme, Lui qui a fait l'homme; pour être à la mamelle, Lui qui règle le cours des astres; pour avoir faim, Lui le Pain; soif, Lui la Source; pour dormir, Lui la Clarté du jour; pour éprouver la fatigue de la route, Lui la Voie; pour être accusé par de faux témoignages, Lui la Vérité; pour être jugé par un juge mortel, Lui le Juge des vivants et des morts; pour être injustement condamné, Lui la Justice; pour être flagellé, Lui le Maître de la science; pour être couronné d'épines, Lui la Grappe de raisins; pour être suspendu à la croix, Lui le Fondement du monde; pour être rendu faible, Lui le Courage; pour être blessé, Lui le Salut; pour être tué, Lui la Vie. Pour supporter à notre place toutes ces indignités et d'autres semblables, pour libérer ceux qui en étaient indignes, puisqu'Il n'a mérité aucun mal, Lui qui a porté tous nos maux à cause de nous, alors que nous ne méritions aucun bienfait, nous qui avons reçu de Lui de si grands biens. Pour Pour toutes ces raisons donc, Celui qui était avant tous les siècles, lors du commencement des jours; le Fils de Dieu, a daigné être Fils de l'homme en des temps récents; et, né du Père et non pas créé par Lui, Il a été créé Homme dans le sein d'une mère qu'Il avait créée; afin de naître en ce monde en un jour donné, de celle qui jamais et nulle part n'aurait pu être sinon par Lui.

1912 2. Ainsi fut accompli ce qu'avait prédit le psaume: "La Vérité est née de la terre". Marie, vierge avant la conception, vierge après avoir été mère. Car loin de nous l'idée que sur cette terre, c'est-à-dire en cette chair d'où est sortie la Vérité, sa pureté ait pu disparaître. C'est un fait certain, n'est-ce pas, qu'après sa Résurrection, comme on Le prenait pour un esprit sans corps, Il dit: "Touchez et voyez, car un esprit n'a ni chair ni os, comme vous voyez que j'en ai." Et toutefois c'est bien son Corps charnel d'homme dans la fleur de l'âge qui s'est introduit auprès des disciples, toutes portes fermées. Pourquoi donc, Celui qui dans toute sa taille a pu entrer par une porte close, n'aurait pas pu aussi sortir à la vie petit enfant, d'un corps pur? Mais les incrédules n'acceptent ni l'un ni l'autre Vérité. Et il faudrait presque dire que la foi les accepte précisément parce que les infidèles les refusent; les infidèles étant ceux qui ne croient pas en la Divinité de Jésus Christ. Mais si la foi croit que Dieu est né dans la chair, elle ne doute pas que les deux choses soient possibles à Dieu: que le Corps de l'Adulte se soit montré à des hommes à l'intérieur d'une maison dont les portes n'étaient pas ouvertes et que l'Époux-Enfant soit sorti de sa chambre, c'est-à-dire du sein virginal, sans détruire la virginité de sa Mère.

1913 3. Car le Fils unique de Dieu a daigné S'adjoindre la nature humaine, pour associer à sa Tête sans tache le corps d'une Église sans tache: c'est elle que l'Apôtre appelle vierge, considérant non pas seulement celles qui sont vierges par le corps, mais aussi les esprits sans tache de toutes conditions humaines. "Car je vous ai fiancés à un seul Homme, comme une vierge chaste, pour manifester le Christ. "Donc l'Église, imitant la Mère de son Seigneur, n'ayant pu être vierge et mère par le corps, l'est pourtant par son esprit. C'est pourquoi le Christ, en naissant, n'a pas du tout détruit la virginité de sa Mère, Lui qui a rendu son Église vierge en la rachetant de la fornication de démons. Vierges saintes, enfantées de sa virginité sans tache, qui avez choisi de mépriser les noces de la terre, pour être aussi vierges selon la chair, célébrez dans la joie en ce jour la fête de la maternité de la Vierge. Car Il est né d'une femme, Celui qui n'a pas été engendré par un homme dans le sein d'une femme. Lui qui vous a inspiré l'amour de cet état, n'a pas enlevé à sa Mère l'état que vous aimez. Lui qui guérit en vous ce que vous avez hérité d'Eve, loin de nous l'idée qu'Il ait corrompu ce que vous avez aimé en Marie.

1914 4. Donc celle dont vous suivez les pas, n'a pas vécu avec un homme pour concevoir; et enfantant, elle est restée vierge. Imitez-la de toutes vos forces; non pas dans la fécondité, car vous ne le pouvez pas si vous gardez votre virginité. Elle est seule à avoir pu connaître les deux états, dont un seul, selon votre désir, est le vôtre; c'est Lui que vous perdriez, si vous vouliez connaître les deux. Elle est seule à avoir pu les connaître, en engendrant le Tout-Puissant, qui lui a accordé ce privilège. Car seul le Fils unique de Dieu devait devenir, par cette voie unique, Fils de l'homme. Et pourtant, ce que le Christ est pour vous, ce n'est pas le fils d'une vierge unique. Car le Fils que vous n'avez pas pu mettre au monde selon la chair, S'est révélé à vous comme l'Époux de votre coeur; et un Époux tel que votre bonheur possède le Rédempteur qui dissipe la crainte du séducteur. En effet, Celui qui, même en naissant dans un corps, n'a pas détruit la virginité de sa Mère, la conserve bien plus encore en vous dans ses embrassements spirituels. Et ne vous croyez pas stériles parce que vous restez vierges. Car c'est précisément cette pieuse virginité de la chair qui conduit à la fécondité de l'esprit. Faites ce que dit l'Apôtre: puisque vous ne songez pas à ce qui est du monde, ni à plaire à un mari, songez aux choses de Dieu, cherchez à Lui plaire en toutes choses; afin que vous puissiez avoir la fécondité non pas des entrailles mais des vertus de l'esprit.

Enfin, je m'adresse à tous, à tous vont mes paroles; c'est vers la chaste Vierge universelle, Celle que l'Apôtre a fiancée au Christ, que se tourne ma voix. Ce que vous admirez dans la chair de Marie, faites-le dans le tréfonds de votre âme. Celui qui croit en son coeur à la justice, conçoit le Christ. Ainsi, que dans votre corps votre fécondité prospère et que demeure votre virginité.




SERMON 192

192 1. Combien il est admirable que le Fils de Dieu Se soit incarné à cause des hommes.
2. La gloire des vierges, des veuves et des épouses a sa source dans la Nativité du Christ.
3. La Vérité est sortie de la terre, la Justice du ciel. Pourquoi le Christ est né le jour le plus court de l'année.


1921 1. Aujourd'hui "la Vérité est sortie de la terre". Le Christ est né de la chair. fêtez ce jour dans la joie, et, averti aussi par ce jour, songez au jour qui n'a pas de fin, désirez d'un ferme espoir les présents de l'éternité; d'avance représentez-vous que la Puissance du File de Dieu vous en a fait le don. C'est à cause de vous que le Créateur est entré dans la création. Pourquoi faites-vous vos délices, encore, mortels, de choses mortelles, et pourquoi vous efforcez-vous de retenir - s'il était possible - une vie fugitive? Un espoir bien plus lumineux a resplendi sur la terre: la vie de la terre a sa promesse dans les cieux. Pour que nous y croyions, cette chose incroyable a été payée d'avance. Pour donner Dieu aux hommes, Celui qui était Dieu S'est fait homme: sans rien perdre de sa Nature, Il a voulu devenir Lui-même ce qu'il avait créé. C'est Lui-même qui S'est créé, car Il a ajouté la nature humaine à sa Divinité, sans que sa Divinité disparaisse dans l'homme. Nous nous étonnons qu'une vierge ait enfanté et nous nous efforçons de persuader les incrédules de cette forme de naissance sans exemple, car dans un sein non ensemencé a cru le germe de la génération, et les entrailles qui n'ont pas connu l'embrassement de la chair ont donné vie au Fils de l'homme, sans s'êtres offertes à un homme qui en fût le père: car elle est restée parfaitement vierge à la conception comme à la naissance. Étonnant est ce pouvoir, mais plus étonnante cette Miséricorde, car Celui qui a pu naître ainsi, est né de son propre vouloir. Car Il était déjà Fils unique du Père, Celui qui est né Fils unique d'une mère: et Il S'est formé dans sa Mère; Lui qui avait formé pour Lui cette mère; formé après sa Mère, de sa Mère, né du Père avant toutes choses, sans avoir été formé. Le Père n'a jamais existé sans Lui, sans Lui sa Mère n'aurait jamais été.

1922 2. Soyez dans la joie, veuves du Christ: à Celui qui a rendu féconde la virginité, vouez la sainteté de votre continence. Exulte, toi aussi, chasteté dans le mariage de vous tous qui vivez fidèlement avec vos épouses: ce que vous avez perdu dans le corps gardez-le aussi dans votre coeur. Lorsque la chair ne peut plus se tenir éloignée de l'union charnelle, que reste vierge dans la foi votre conscience, celle selon laquelle toute l'Église est vierge. En Marie, la virginité pieuse a enfanté le Christ; chez Anna, le veuvage a connu dans un âge avancé les premiers ans du Christ. Chez Élisabeth, la chasteté conjugale et la fécondité de la vieillesse ont combattu pour le Christ. A tous les degrés, les membres fidèles ont rapporté à la Tête ce que sa Grâce a permis qu'ils Lui rapportent.
Ainsi, puisque le Christ est Vérité, Paix et Justice, concevez-Le dans la foi, donnez-Lui naisssance par vos oeuvres; afin que ce qu'ont fait les entrailles de Marie dans la Chair du Christ, votre coeur le fasse dans la Loi du Christ. Et comment ne participez-vous pas à la Maternité de la Vierge, puisque vous êtes les membres du Christ? Marie a enfanté votre Tête, l'Église vous a enfantées. Car elle est à la fois mère et vierge. M%ère par ses entrailles de charité, vierge par la pureté de sa foi et de sa piété. Elle enfante les peuples, qui sont membres d'un seul corps et dont elle est le corps et l'épouse. En cela aussi elle représente l'image de sa virginité, parce qu'elle est aussi, dans la multitude de ses enfants, mère d'unité.

1923 3. C'est pourquoi, d'un seul élan, d'un esprit chaste et d'un coeur saint, célébrons le jour de la Naissance du Seigneur: en ce jour, comme je l'ai dit en commençant ce sermon: "la Vérité est sortie de la terre". Désormais est accompli ce que dit enduite ce même psaume. Car Celui qui est né de la terre, c'est-à-dire de la chair, parce qu'Il vient du ciel est précisément au-dessus de tous. Sans aucun doute, quand Il est monté auprès du Père, alors aussi la Justice a regardé du haut du ciel." C'est cette Justice qu'Il nous recommande par ses Paroles, en nous promettant l'Esprit saint: "Lui-même confondra le monde en matière de péché, de justice et de jugement; de péché parce qu'ils ne croient pas en Moi; de justice parce que je vais au Père, et vous ne Me verrez plus."
Telle est la Justice qui a regardé du ciel. Car: "Il est venu du plus haut du ciel et sa rencontre nous mène au plus haut du ciel." Mais afin que personne ne méprise la Vérité parce qu'elle est sortie de la terre, lorsque, comme un Époux sorti de sa chambre, c'est-à-dire du sein virginal, où le Verbe de Dieu S'est uni à la créature humaine, dans une sorte d'union conjugale indicible; afin donc que personne ne méprise cette Vérité et que personne ne croie que, malgré le miracle de sa Naissance, de ses Actions et de ses Paroles, puisqu'Il S'est fait semblable au péché de la chair, le Christ n'est rien d'autre qu'un homme, après: "Comme un époux sortant de sa chambre, Il a bondi de joie comme un héros entamant sa carrière", on lit à la suite: "Il est venu du plus haut des cieux". Quand nous entendons: "La Vérité est née de la terre", il s'agit de nous montrer son estime, non pas d'indiquer sa première Naissance. C'est une volonté de miséricorde, non un état de misère. Pour que la Vérité naquît de la terre, Il est descendu du ciel. Pour sortir de sa chambre, l'Époux est venu du haut du ciel. C'est ainsi qu'il faut comprendre qu'aujourd'hui est le jour de sa Naissance, jour sur la terre le plus court de l'année, mais après lequel les jours croissent. Donc Celui qui S'est abaissé et nous a élevé, a choisi le jour le plus court, mais à partir duquel la lumière croît. En ce jour même de sa Venue, où, sans parler, Il nous exhorte comme dans une grande clameur, Lui qui pour nous S'est fait pauvre, apprenons à être riches en Lui. En Lui qui a pris pour nous la forme d'un serviteur, recevons notre liberté. En Lui qui est né de la terre, possédons le ciel.




SERMON 193


193 1. La lecture de l'Évangile nous a fait entendre la voix des anges qui annoncèrent aux pasteurs Jésus Christ, quand Il naquit de la Vierge: "Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre, bienveillance parmi les hommes." Chant de fête et de joie, adressé non pas seulement à la Femme dont les entrailles avaient donné naissance à un fils; mais au genre humain pour qui la Vierge avait enfanté le Sauveur. Car l'événement méritait bien, - et il convenait de la faire - que des anges, chantant de divines louanges, - et non pas de ces amuseuses publiques qui président aux fêtes humaines - célèbrent les fêtes de l'accouchement de celle qui a donné naissance au Maître de la terre et des cieux, et qui, après l'accouchement est restée vierge. Disons donc nous aussi, et disons-le avec tout l'élan de joie dont nous sommes capables, nous qui n'annonçons pas la naissance aux pasteurs des troupeaux, mais qui célébrons son anniversaire avec les brebis, disons, dis-je, dans la fidélité du cour et la dévotion de la voix: "Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre, bienveillance parmi les hommes." Méditons en nos esprits, avec la foi, l'espérance et la charité, ces paroles divines, ces louanges à Dieu, et cette joie des anges à laquelle il faut attacher toute la considération possible. Car comme nous le croyons, espérons et désirons, nous serons, nous aussi la "Gloire de Dieu au plus haut des cieux" lorsque, ressuscitant dans un corps spirituel, nous aurons été enlevés dans les nuages pour aller au-devant du Christ, pourvu que tant que nous sommes sur la terre, nous recherchions la paix dans la bonne volonté. Car c'est au plus haut des cieux qu'est la vie, là en effet est le pays des vivants; les jours de bonheur sont là où est le Seigneur Lui-même, dont les années ne décroissent pas. Quiconque donc veut connaître la vie et choisit de "voir des jours de bonheur, qu'il garde sa langue du mal, et que ses lèvres ne profèrent pas la ruse"; "qu'il s'éloigne du mal et fasse le bien" et qu'ainsi il soit un homme de bonne volonté. Et qu'il "cherche la paix et la poursuive". Car "paix sur la terre, bienveillance parmi les hommes."

1932 2. Et si tu dis, homme: Voici que "vouloir est à portée de ma main, mais que je n'arrive pas à faire le bien" et si te délectant "en la Loi de Dieu selon l'homme intérieur", tu vois "pourtant une autre loi commander ton corps qui combat la loi de ton esprit, et qui te conduit prisonnier dans la loi du péché qui est dans ton corps", persiste dans ta bonne volonté et crie les mots qui suivent: "Misérable que je suis, qui me délivrera de ce corps de mort? La Grâce de Dieu par Jésus Christ notre Seigneur." Car c'est Lui qui est la paix sur la terre pour les hommes de bonne volonté quand prend fin cette guerre dans laquelle "la chair désire contre l'esprit et l'esprit contre la chair; en sorte que vous ne faites pas ce que vous voulez, parce que c'est Lui qui est notre paix, Lui qui des deux peuples n'en a fait qu'un". Que donc la bonne volonté persiste contre la mauvaise concupiscence, et qu'en persistant elle implore le secours de la Grâce de Dieu, par l'intermédiaire de Jésus Christ notre Seigneur. La loi du corps charnel lui répugne, et voici que désormais elle en est prisonnière: qu'elle demande du secours, sans se fier à ses propres forces; et au moins, quand elle connaît la fatigue, qu'elle ne dédaigne pas de l'avouer. Car le secours lui viendra de Celui qui dit à ceux qu'Il voyait déjà croyant en Lui: "Si vous demeurez dans ma parole, vous serez vraiment mes disciples; et vous connaîtrez la Vérité et la Vérité vous affranchira." La Vérité vous secourra et vous libérera de ce corps de mort. C'est pourquoi en effet la Vérité dont nous célébrons l'anniversaire "est né de la terre", afin que la paix soit donnée sur terre aux hommes de bonne volonté. Car qui est capable de vouloir et de pouvoir, si, en nous donnant son esprit, ne vient à notre aide pour nous donner de pouvoir, Celui qui, en nous appelant à Lui, nous a commandé de vouloir? Car assurément sa Miséricorde nous a prévenus, pour que nous soyons appelés, nous qui ne le voulions pas, et que nous obtenions de pouvoir ce que nous voulons. Disons-Lui donc: "J'ai juré et décidé de garder les jugements de ta Justice". J'ai décidé, et parce que Tu l'as commandé, j'ai promis obéissance: mais parce que "je vois une autre loi dans mon corps qui combat la loi de mon esprit et qui me tient captif dans la loi du péché qui est dans mes membres, je me suis humilié en toute occasion, Seigneur; apporte-moi la vie selon ta parole." Et voici que "vouloir est à portée de ma main"; donc "approuve, Seigneur, les volontés de ma bouche, afin que sur la terre les hommes de bonne volonté connaissent la paix." Prononçons ces paroles et toutes celles que la piété, instruites par les saintes lectures, peut nous suggérer; afin que nous ne célébrions pas en vain la fête du Seigneur, né de la Vierge, en nous aidant d'abord de notre bonne volonté, et en cherchant ensuite le perfectionnement d'une charité très ardente qui se répand en nos coeurs, non pas par nous-mêmes, mais par l'Esprit saint qui nous a été donné.




SERMON 194

194 1. La Naissance du Christ est double. Jour de la naissance du Christ et de Jean.
2. Verbe des anges dans les cieux et nourriture des hommes dans une crèche.
3. Par la vision du Verbe après cette vie nous serons rassasiés.
4. Conclusion.


1941 1. Écoutez, fils de la Lumière, adoptés en vue du royaume de Dieu; frères très chers, écoutez; écoutez et bondissez de joie, justes dans le Seigneur, afin que votre louange puisse faire écho à la droiture de vos coeurs. Écoutez ce que vous savez, méditez à nouveau ce que vous avez entendu, aimez ce en quoi vous croyez, annoncez ce que vous aimez. En ce jour où nous célébrons un anniversaire, attendez-vous à entendre le genre de sermon que réclame la circonstance.
C'est la Naissance du Christ, Dieu né du Père, Homme né d'une mère. De l'immortalité du Père, de la virginité de sa Mère. Né du Père sans mère, né d'une mère sans père. Du Père hors du temps, d'une mère hors d'une union charnelle. Du Père principe de vie; d'une mère, destruction de la mort. Du Père, ordinateur des jours; d'une mère, rendant ce jour-ci sacré. En effet, Il a envoyé au-devant de Lui un homme, Jean, né lorsque les jours commençaient à baisser.; né Lui-même lorsque les jours commençaient à croître. Pour que soit préfiguré ce que dit le même Jean: "Il faut qu'Il croisse et que moi, je diminue. " La vie humaine en effet doit décroître en ce qui la concerne, mais croître dans le Christ "afin que ceux qui vivent ne vivent plus désormais pour eux-mêmes, mais pour Celui qui est mort pour tous et ressuscité; et que chacun d'entre nous disent ce que dit l'Apôtre: "Désormais ce n'est plus moi qui vis, c'est le Christ qui vit en moi." "Car il faut qu'Il croisse et que je diminue".

1942 2. Tous ses anges Lui adressent de justes louanges, eux dont Il est l'Aliment éternel, qui les vivifie d'une nourriture incorruptible; parce qu'Il est le Verbe de Dieu, de la vie de qui ils vivent dans le bonheur sans fin. Eux Le louent comme il convient, Dieu auprès de Dieu, et chantant la Gloire de Dieu au plus haut des cieux. "Mais nous, son peuple et le troupeau de sa Main", à la mesure de notre infirmité, méritons la paix, réconciliés avec Lui par notre bonne volonté. En effet, aujourd'hui nous entendons vraiment la voix des anges, proclamer dans l'allégresse, au moment de la Naissance du Sauveur: "Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté." Si eux donc Le louent comme il convient, louons-Le, nous aussi, en obéissant à leur voix. Ils sont ses messagers, nous sommes aussi de son troupeau. Il a couvert d'abondance leur table au ciel, Il a empli sur la terre notre crèche. Car l'abondance de leur table, c'est que "au commencement était le Verbe, et le Verbe était auprès de Dieu et le Verbe était Dieu." Notre crèche remplie, c'est que "le Verbe S'est fait Chair et Il a habité parmi nous." En effet, pour que l'homme mange le Pain des anges, le Créateur des anges S'est fait Homme. Eux Le louent en vivant, nous, en croyant; eux, en jouissant de sa Présence, nous, en y aspirant; eux, en Le recevant, nous, en Le cherchant; eux, en entrant dans sa demeure, nous, en frappant à sa porte.

1943 3. Car quel homme pourrait connaître tous les trésors de sagesse et de science cachés dans le Christ, et caché dans la pauvreté de sa Chair? Car "à cause de nous, Il S'est fait pauvre, alors qu'Il était riche, afin que nous soyons riches de sa pauvreté". En effet, lorsqu'Il assumait la condition mortelle et qu'Il détruisait la mort, Il S'est montré dans sa pauvreté. Mais Il a promis des richesses pour plus tard, sans perdre celles dont Il S'était dépouillé. Immense est l'immensité de sa Douceur, qu'Il a cachée à ceux qui Le craignent pour l'accomplir chez ceux qui espèrent en Lui. Car nous la connaissons en partie, en attendant qu'elle vienne dans sa perfection. Pour que nous soyons certains d'être capables de la recevoir, Lui qui est égal au Père dans la forme de Dieu, en Se faisant semblable à nous dans la forme de serviteur, Il reforme notre nature à la Ressemblance de Dieu: et le Fils unique de Dieu, devenu Fils de l'homme, de nombreux fils des hommes fait des fils de Dieu; et des esclaves qu'Il a nourris en prenant la forme visible de l'esclave, Il en fait des hommes libres pour contempler la Forme de Dieu. En effet, "nous sommes fils de Dieu et nous ne voyons pas encore ce que nous serons. Et nous savons que lorsque nous Le verrons, nous serons semblables à Lui, parce que nous Le verrons comme Il est." En effet, que dirons-nous des trésors de sa Sagesse, de ses divines Richesses, sinon qu'ils sont ce qui nous suffit? Et de l'immensité de sa Douceur, sinon qu'elle est ce qui nous comble? En effet, "montre-nous le Père et cela nous suffit." Et dans un psaume, une voix d'entre les hommes Lui dit pour nous, comme du fond de nos coeurs: "Je serai satisfait, pourvu que ta Gloire me soit manifestée." Or Lui et le Père sont un; et qui Le voit, voit aussi le Père. Donc "Seigneur des vertus, Il est Lui-même Roi de gloire." En se tournant vers nous, Il nous montrera sa Face; et nous serons sauvés, et nous serons rassasiés et cela nous suffira.

1944 4. Que notre coeur Lui dise: "J'ai cherché ton Visage; ton Visage, Seigneur, je chercherai à nouveau; pour que tu ne détournes pas de moi ta Face." Et que Lui-même réponde à notre cour: "Celui qui M'aime, garde mes commandements; et celui qui M'aime est aimé par mon Père; et Je l'aimerai et Me montrerai à lui." Évidemment, ceux à qui Il adressait ses Paroles, Le voyaient de leurs yeux, et entendaient de leurs oreilles le son de sa Voix, et leur coeur humain se Le représentait comme un homme. Mais ce que l'oeil n'a pas vu, que les oreilles n'ont pas entendu, et qui n'a pas inspiré un cour d'homme, Il promettait de le montrer Lui-même à ceux qui L'aimaient. En attendant que cela soit, et que se montre à nous ce qui peut nous suffire, en attendant que nous buvions à la source de la vie et que nous soyons rassasiés, tandis que durant cette attente, nous avançons dans la foi, cheminant loin de Lui, tandis que nous avons faim et soif de la Justice, et que nous aspirons d'une ineffable ardeur à la beauté de la Forme de Dieu, célébrons avec dévotion et déférence l'anniversaire du jour où Il a pris la forme du serviteur. Ne pouvant encore contempler ce qu'a engendré le Père avant l'Étoile du Matin, célébrons en foule ce qui pendant la nuit est né de la Vierge. Nous ne Le comprenons pas encore, parce que son Nom a toujours sa résidence au-delà du soleil, mais sous le soleil est planté sa tente: sachons la reconnaître. Nous ne percevons pas encore le Fils unique demeurant à jamais en son Père, rappelons-nous l'Époux sortant de sa chambre. Nous ne sommes pas encore capables d'être reçus au festin de notre Père, reconnaissons la crèche de notre Seigneur Jésus Christ.





Augustin, Sermons 189