Discours 1977 90

90 Cet esprit ne pourra « évangéliser les cultures » (Exhortation Apostolique, Evangelii Nuntiandi, EN 20), imprégner vraiment les différents milieux sociaux, rendre fraternels les rapports entre les hommes et améliorer efficacement la gestion des réalités temporelles quotidiennes, que si les laïcs participent activement à la mission de l’Eglise. A cela ils doivent être formés, encouragés, et ce n’est pas le moindre rôle des prêtres, non seulement en vue des nécessités locales de l’Eglise, mais pour assumer les responsabilités qui leur reviennent au service de leur pays et des organisations internationales. La conférence panafricaine d’Accra a bien mis en relief cet appel des laïcs, qui constitue pour vous une exigence supplémentaire, mais aussi une grande espérance.

Sur tous ces points, qui nous tiennent très à coeur, nous suivons vos efforts méritoires, Frères vénérés, avec les Organismes du Saint-Siège, et nous vous encourageons. Nous tenions à vous le dire, en ce dixième anniversaire de notre Message à l’Afrique. Et nous apprécions particulièrement le travail communautaire que vous accomplissez dans votre symposium des Conférences épiscopales, pour aider toutes les jeunes Eglises du continent africain et de Madagascar à faire face à leurs responsabilités, dans la clarté de la foi et le dynamisme de la charité. A tous et à chacun, notre affectueuse bénédiction apostolique.






29 octobre



DISCOURS DU PAPE EN CONCLUSION DU SYNODE



Le samedi 29 octobre, le Pape Paul VI a présidé la dernière Congrégation générale du Synode. Après la prière commune, le Saint-Père a prononcé en latin le discours dont nous publions la traduction.



Vénérables Frères et très chers Fils,



Au terme de ce cinquième Synode des Evêques, vous avez tenu à Nous exprimer, par le Cardinal Antonio Ribeiro, Patriarche de Lisbonne, vos souhaits ainsi que les sentiments qui vous animent au moment de nous séparer.

Quant à Nous, Nous vous exprimons toute notre reconnaissance et Nous vous saluons fraternellement. Après avoir traité pendant tout un mois de ce thème capital pour l’avenir de la vie ecclésiale — la catéchèse — vous vous préparez à rentrer à vos sièges diocésains respectifs et à reprendre vos activités pastorales, animés de la volonté de réaliser avec détermination une action catéchétique rénovée dans vos propres pays.

Ce temps passé ensemble vous a permis de partager votre propre expérience avec vos confrères, et d’offrir l’aide et les résultats de votre connaissance — fruits de votre expérience de vie — afin que l’action catéchétique soit promue dans l’Eglise et afin que « en l’homme la foi soit illustrée par la doctrine et qu’elle devienne vivante, explicite et agissante » (cf. Christus Dominus, CD 17). Vous avez accompli ce travail non pas sur la base de recherches théoriques et historiques — qui sont d’ailleurs utiles en d’autres domaines — mais surtout dans un esprit pastoral. En ce sens, vous avez été guidés par votre expérience de Pasteurs qui participent quotidiennement aux anxiétés et aux difficultés qu’affrontent les hommes de notre temps. Grâce à cette dimension pastorale, le Synode est arrivé à des résultats utiles et valables.

Conscient de l’importance centrale qui doit être reconnue à cette forme d’annonce de la Parole de Dieu aux hommes d’aujourd’hui, Nous vous avons convoqués ici à Rome, auprès du Tombeau de Pierre, en vue des deux objectifs spécifiques qui sont indiqués dans le Motu Proprio Apostolica Sollicitude et qui s’énoncent ainsi : « communiquer mutuellement les informations utiles, présenter des suggestions concernant les problèmes, en fonction desquels le Synode est chaque fois convoqué » (AAS LVII, 1965, p. 777).

Bien des éléments tirés de l’expérience de chacun ont été échangés en vue de l’intérêt commun, et nombreux sont les projets qui veulent rendre l’action catéchétique plus efficace dans l’Eglise universelle ainsi que dans tous les domaines de réalité humaine.

Vous devrez faire part à vos confrères dans l’Episcopat des conclusions auxquelles vous êtes arrivés, quand vous serez rentrés dans vos diocèses et serez retournés à vos tâches pastorales. En d’autres termes, vous transmettrez, Nous en sommes certain, le feu qui brûlait en vous à ceux qui partagent avec vous la charge pastorale. De ce fait le Synode pourra susciter un renouveau quant à la catéchèse afin que de nouvelles voies lui soient ouvertes, afin que les catéchistes soient mieux formés, afin que soient recherchés avec plus d’attention les moyens nécessaires, tout en respectant les dispositions canoniques pleines de sagesse qui sont en vigueur en ce domaine, ainsi que les normes proposées dans le Directoire général de la Catéchèse élaboré par la S. Congrégation pour le Clergé, que Nous avons approuvé et confirmé.

91 Plusieurs d’entre vous vénérables Frères et chers Fils se sont employés à mettre en lumière les tensions que la catéchèse a connues ces dernières années. Il Nous semble qu’il n’est pas nécessaire de traiter de ces difficultés en ce moment mais plutôt de vous inviter à porter votre regard vers l’avenir, et d’exhorter, par vous, tous ceux qui sont conscients de la responsabilité qu’impliqué le nom de chrétiens, pour qu’ils s’efforcent de répandre l’action catéchétique, rénovée par ce Synode dans l’Eglise universelle.

Cette impulsion, comme des spirales de plus en plus larges partant de ce Synode, atteindra les groupes d’évêques d’Orient et d’Occident et, par eux, elle parviendra aux paroisses, aux familles, aux écoles, aux associations qui se rassemblent au nom du Christ et sous la conduite de leurs Pasteurs légitimes. Ce renouvellement continu de la catéchèse sera promu, sera guidé et soutenu par les évêques de chaque lieu, unis au Vicaire du Christ. Ils le feront en étroite collaboration avec les prêtres, les religieux, les religieuses ainsi que les laïcs, qui ont compris l’importance et la beauté de cet apostolat.

C’est d’ailleurs en cela que consiste le sens et la force du « Message au Peuple de Dieu », qui sera adressé aujourd’hui, de la ville de Rome à toute l’Eglise, à la conclusion de ce Synode des Evêques.

Considérant le travail accompli, Nous vous exprimons notre joie en constatant que les Pères ici présents ont rejoint un accord sur les problèmes principaux de la catéchèse et ont présenté de très utiles suggestions en la matière. Celles-ci, rassemblées en trente quatre points, Nous ont été remises. Nous en prendrons attentivement connaissance ainsi que de toutes les autres interventions qui Nous ont été présentées. Par la suite, en accord avec votre désir, Nous adresserons volontiers à l’Eglise universelle ce qui Nous semblera le plus indiqué.

Nous nous réjouissons avant tout qu’a été soulignée la charge des Evêques de veiller et de s’engager afin que toute la catéchèse maintienne toujours la pleine fidélité a la Parole de Dieu, telle qu’elle nous a été communiquée par la révélation et transmise par le Magistère de l’Eglise. Nul doute que cette même tâche de vigilance touche également les autres formes de diffusion de la Parole de Dieu, c’est-à-dire, partant de son annonce générale ou de l’évangélisation, passant par la proclamation au cours de la liturgie ou par la prédication jusqu’à son étude plus approfondie en théologie. Par ailleurs, la vigilance attentive au sujet de la catéchèse est un des aspects de la charge de celui-même qui a été constitué par le Christ, Pasteur et Maître de son Eglise.

Nous ne désirons pas répéter ici combien il Nous tient à coeur de défendre et de promouvoir la saine doctrine. En effet, en ce qui concerne Notre préoccupation, le message que Nous avons adressé à tous les évêques, cinq ans après la conclusion du Concile Vatican II, garde toute son actualité et son poids (cf. Exhortation Apostolique, Quinque iam anni, AAS LXIII, 1971,
PP 97-106). La fidélité envers le dépôt de la Révélation exige manifestement aussi, qu’aucune vérité essentielle ne soit passée sous silence. « Le Peuple, confié à nos soins, jouit du droit sacré auquel il ne peut renoncer de recevoir la Parole de Dieu, c’est-à-dire toute la Parole de Dieu » (ib. pp. PP 99-100).

Cela a donc été pour Nous un grand réconfort de constater que la nécessité absolue d’une catéchèse bien structurée et cohérente a été soulignée par tous, car un tel approfondissement du mystère chrétien lui-même distingue fondamentalement la catéchèse de toutes les autres formes d’annonce de la Parole de Dieu. Vous l’avez clairement enseigné et mis en lumière, convaincus que personne ne peut atteindre la vérité intégrale par une simple expérience privée, c’est-à-dire sans une explication adéquate du message du Christ, qui est « Voie, Vérité et Vie » (Jn 14,6), alpha et oméga, principe et fin de toutes choses (cf. Ap Ap 22,13). L’annonce intégrale du message du Christ contient évidemment aussi l’exposé de principes moraux de ce message, tant du point de vue de chaque personne que de toute la société. Eduquer à la foi des enfants et les jeunes appartenant à nos communautés signifiera à la fois les éduquer à la « sequela Christi », comme vous Nous l’avez bien indiqué dans la douzième proposition qui Nous a été transmise. C’est là d’ailleurs le sens de la doctrine de l’Apôtre Saint Jean, quand il nous dit : « Qui dit ‘je le connais’ (Dieu), et n’observe pas ses commandements, est un menteur » (1Jn 2,4).

En outre, Nous sommes pleinement d’accord avec vous quand vous affirmez avec grande autorité la nécessité de quelques formules principales qui permettent d’exprimer clairement et correctement les vérités chrétiennes de foi de la doctrine morale. Ces formules, une fois mémorisées, favorisent notablement la connaissance stable et sûre des réalités, comme vous le dites dans la dix-neuvième proposition que vous Nous avez communiquée ainsi que dans le « Message au Peuple de Dieu », qui est diffusé aujourd’hui dans le monde entier. Parmi ces formules, vous avez inclu avec raison les plus importantes expressions bibliques — principalement tirées du Nouveau Testament — ainsi que les textes liturgiques, qui servent à célébrer la prière commune et à exprimer plus facilement la confession de foi.

Enfin, Nous reconnaissons aujourd’hui plus que jamais l’urgence de l’appel en faveur de la liberté de l’Eglise, afin qu’elle puisse accomplir sa tâche d’éduquer ses propres fils à la foi chrétienne. Malheureusement dans plusieurs pays le droit de chaque individu à la liberté religieuse, le droit des familles à la formation de leurs enfants, le droit des communautés religieuses à l’éducation de leurs membres, sont complètement supprimés ou du moins injustement limités. En ce moment particulièrement solennel, Nous supplions une fois encore les gouvernants des peuples — pour le bien même de leurs propres pays — afin qu’ils respectent le droit des personnes et des communautés religieuses à la liberté sociale et politique dans le domaine religieux. En effet « il est essentiellement du devoir de chaque pouvoir civil de protéger et de promouvoir les droits fondamentaux de l’homme » (Dignitatis humanae, DH 6).

Après vous avoir fait part de quelques-unes de nos réflexions sur certains points saillants du thème dont vous avez traité dans cette assemblée fraternelle, avant de conclure, Nous voulons remercier tous et chacun de ceux qui ont contribué à préparer et à porter à bonne fin ce cinquième Synode. Notre reconnaissance s’adresse tout d’abord aux Présidents délégués, au Relateur, au Secrétaire général et au Secrétaire spécial ainsi qu’à ses collaborateurs, et enfin à tous ceux qui, pleins de bonne volonté et de compétence ont assuré à différents titres ce service important au Pape de Rome ainsi qu’à cette noble assemblée de ceux qui représentent les évêques du monde entier.

Vénérables Frères et très chers Fils, au moment de nous séparer, Nous vous demandons de porter chez vous les salutations et la Bénédiction du Père Commun, à vos frères les Evêques, à vos prêtres et collaborateurs, aux religieux et religieuses ainsi qu’à tous les laïcs engagés dans l’action catéchétique. Que l’Esprit Saint nous assiste, nous donne la joie en plénitude et nous vivifie tous. Qu’il nous dispose à une action rénovée dans l’unanimité des coeurs « afin que la Parole de Dieu se répande et soit proclamée » (2Th 3,1).

92 Dans ces sentiments, Nous vous bénissons avec pleine charité, vous tous qui êtes ici présents.






Vendredi 4 novembre



LAÏCAT, FAMILLE, ENTRAIDE, AU SERVICE DE L’HOMME



Trois organismes de la Curie, fruits de Vatican II, « Cor Unum », Conseil Pontifical pour les Laïcs et Comité pour la Famille, ont tenu leurs Assemblées générales à Rome. Le Pape les a reçus en audience le vendredi 4 novembre. Répondant à l’adresse du Cardinal Opilio Rossi, qui s’est exprimé au nom des trois organismes, le Souverain Pontife a répondu en français par le discours suivant :



Chers Frères et chers Fils dans le Christ,



Nous vous remercions des sentiments que vous venez de nous exprimer par la bouche du Cardinal Président du Conseil pontifical pour les Laïcs. Ils rejoignent bien nos propres sentiments.

Vous savez le prix que nous attachons au travail des trois organismes post-conciliaires que vous représentez : leur création ou leur confirmation récente manifestent la vitalité et la jeunesse de l’Eglise, qui entend faire face à sa mission d’apostolat et de charité, avec des institutions adaptées et des forces neuves. Nous tenons à vous redire notre joie et notre confiance, au moment où s’ouvrent vos Assemblées générales respectives. Nous sommes particulièrement heureux de saluer les membres qui y prennent part pour la première fois, et nous vous remercions tous chaleureusement, que vous soyez anciens ou nouveaux, d’offrir ainsi votre contribution au Pape dans l’exercice de sa responsabilité pastorale universelle.

Vous collaborez donc à notre ministère apostolique, comme les autres membres de la Curie. Vous mesurez bien — nous n’en doutons pas — ce que comporte un tel rôle. Ce n’est pas une fonction honorifique, même si vous pouvez vous réjouir d’avoir été distingués et choisis parmi l’ensemble du Peuple de Dieu. C’est un véritable service qui vous est demandé.

Le Saint-Siège compte aussi sur vous pour que, prêtant une grande attention aux problèmes, aux besoins et aux réalisations intéressantes des Eglises locales, des milieux et des régions auxquels vous appartenez ou dont vous pouvez être témoins, vous en fassiez bénéficier chacun de vos organismes, de la façon aussi objective que possible. Cette connaissance, qui se conjugue avec l’apport des Conférences épiscopales, est nécessaire au Saint-Siège, pour son oeuvre de communion, de discernement et de stimulation. Vous devez aussi être disposés à accueillir les expériences et les réflexions, différentes et complémentaires, de vos collègues, pour vous ouvrir avec eux à une vision plus universelle qui est le propre du Saint-Siège dans l’Eglise. En acceptant votre nomination, vous vous êtes également engagés à témoigner d’une fidélité totale à la pensée du Magistère, aux objectifs du Saint-Siège, et à aider les autres, à commencer par vos compatriotes, à acquérir et à fortifier cette solidarité avec l’Eglise universelle. C’est dans cet esprit que nous vous demandons une coopération permanente aux travaux que vous proposent ces organismes pontificaux. Nous sommes bien conscient qu’il s’agit là d’un concours laborieux, qui vient prolonger et couronner vos engagements familiaux, professionnels et apostoliques.

Sur la base de ces exigences qui vous sont communes, vous êtes appelés à oeuvrer, au sein de vos différents organismes, à une mission qui leur est commune. Chacun d’eux en effet est l’expression particulière de l’attention que le Saint-Siège et, avec lui, l’Eglise toute entière, doivent porter aux besoins et aux attentes du monde et de la société, selon les voies tracées par la Constitution pastorale Gaudium et Spes. Les domaines propres de vos trois Institutions — laïcat, famille, entraide — ne convergent-ils pas dans un même service de l’homme ? Plus que jamais, l’Eglise se sent appelée à vivre sa mission de salut au sein d’un monde tourmenté, qui s’interroge sur son destin, sur ses fabuleuses découvertes et réalisations, et aussi sur ses limites et ses échecs dans la recherche d’une société stable, fondée sur la justice, l’amour, la fraternité. Ce monde a besoin d’une âme : c’est notre responsabilité de lui proposer la lumière de l’Evangile et c’est sur vous que nous comptons pour en être, avec nous et avec tous les Pasteurs, les témoins actifs.

Au Conseil Pontifical pour les Laïcs





Nous nous tournons maintenant vers vous, membres du Conseil pontifical pour les Laïcs, pour vous encourager à promouvoir la participation du laïcat chrétien à la mission évangélisatrice de l’Eglise. Le champ, Dieu merci, en est immense- Et l’enjeu considérable : évangéliser les personnes, les cultures, « travailler comme du dedans à la sanctification du monde, à la façon d’un ferment » (Constitution dogmatique Lumen Gentium, LG 31), pénétrer l’ordre temporel d’esprit évangélique, pour la construction d’un monde plus digne des hommes, fils de Dieu.

93 Pour confirmer l’importance que nous portons à cette mission des laïcs, en fidélité aux orientations conciliaires, notamment au Décret Apostolicam actuositatem (n. 26), et dans le prolongement de l’expérience encourageante de l’ancien Conseil des Laïcs, nous avons donc décidé de donner à cette institution une « forme nouvelle, stable et d’un niveau plus élevé », comparable à celle des autres Dicastères. Ce n’est pas le lieu de revenir sur le Motu Proprio Apostolatus Peragendi qui a précisé les structures et déterminé les compétences du Conseil pontifical pour les Laïcs : il situe clairement le cadre et les objectifs de votre travail.

Généralement vous avez à accueillir et à soutenir avec discernement ce que les laïcs et leurs multiples associations ont déjà mis en oeuvre, surtout lorsque leur apostolat a une envergure internationale. Ils devront trouver chez vous un encouragement, un stimulant pour leur réflexion, une orientation encore plus évangélique et ecclésiale pour leur action, une coordination avec d’autres efforts. Il vous revient parfois aussi de susciter vous-mêmes une interrogation et une action nouvelles, sur des points qui vous apparaissent trop délaissés dans le réseau des initiatives apostoliques.

Dans le Motu Proprio de votre institution, vous n’avez pas manqué d’observer l’invitation répétée à harmoniser et articuler sans cesse les programmes d’étude et d’action de votre Conseil avec ceux d’autres organismes de la Curie, également concernés, à quelque titre, par des questions touchant à la sanctification, à l’action ecclésiale ou à la discipline des laïcs.

C’est dire, chers Fils et chères Filles, dans quel esprit de partage, de coopération, vous êtes appelés à travailler. N’est-ce pas d’ailleurs l’un des objectifs majeurs de votre mission de promotion du laïcat que de susciter, entre les laïcs eux-mêmes, leurs associations et les diverses instances de l’Eglise, cet esprit de communion qui devrait marquer toutes les relations à l’intérieur de l’Eglise ?

Au Comité pour la Famille





Cette coopération, nous avons proposé qu’elle s’exerce en tout premier lieu et de manière organique avec le Comité pour la Famille. Son activité concerne avec évidence la grande majorité des laïcs, hommes et femmes, appelés à s’engager dans la communauté d’amour et de vie que constitue la famille.

Nous attendons de vous, chers Fils et chères Filles membres de ce Comité, que vous nous aidiez dans notre double mission de vigilance et d’animation pastorales auprès de tous ces foyers qui forment le tissu même de la société humaine.

Vigilance, car vous savez la gravité des menaces qui pèsent sur cette institution sacrée du mariage, soit en raison des conditions de vie défavorables à sa stabilité, soit en raison du dérèglement des moeurs, soit même, malheureusement, à cause de la permissivité croissante de certaines législations. Il est de la responsabilité de l’Eglise de protéger ce que Dieu a inscrit au plus profond du coeur des hommes : l’amour, dans son acception la plus noble, sur lequel deux êtres fondent une alliance appelée à refléter, dans son indissolubilité, la fidélité de l’Alliance de Dieu avec les hommes.

S’il vous faut être attentifs à cette sauvegarde de la conception chrétienne de l’amour et du mariage, plus encore faut-il vous attacher à un travail d’animation, de soutien et d’éducation en ce domaine. En lien avec les organismes compétents de la Curie, avec les Conférences épiscopales et les Associations familiales catholiques, votre Comité doit agir en sorte que l’Eglise offre aux jeunes qui se préparent au mariage comme aux foyers déjà constitués les bases et les ressources doctrinales, spirituelles et morales de leur engagement.

Que l’indifférence ou même l’opposition à l’idéal chrétien du mariage ne vous découragent pas dans votre effort d’éducation des consciences et des coeurs : l’action du Seigneur vous accompagne dans votre service apostolique. Elle est en oeuvre, cette action de Dieu, n’en doutons pas, dans le coeur même de ceux et celles que le manque de préparation, la faiblesse humaine ou l’influence délétère d’une ambiance permissive ont conduit à l’échec d’un amour qu’ils auraient sans doute souhaité plus stable. Que ceux-là mêmes dont la situation illégitime ne permet pas de vivre en pleine communion avec l’Eglise ne soient pas exclus de votre réflexion et de votre attention.

A « Cor Unum »





94 Notre salut paternel s’adresse maintenant à vous, membres du Conseil pontifical « Cor Unum » où se trouvent associés, dans un effort commun de réflexion, des représentants de Conférences épiscopales, d’Organisations internationales et nationales d’entraide, d’Oeuvres pontificales, des prêtres, des religieux et religieuses, des laïcs de divers continents. Nous aimons voir dans cette représentation qualifiée du Peuple de Dieu l’expression de ce que nous avons souhaité en instituant ce Conseil Cor Unum : qu’il soit un lieu de rencontre, de partage et d’animation de tout le Peuple de Dieu pour qu’ensemble ces membres de communautés ecclésiales et nationales, riches et pauvres, oeuvrent à part égale et d’un seul coeur, au service de la Charité universelle de l’Eglise.

Certes l’immense champ d’action qui s’offre à votre attention et à votre concertation apparaît démesuré au regard de vos possibilités : des peuples entiers stagnent dans une situation de sous-développement, malgré les efforts louables d’entraide internationale ; des conflits sanglants et des catastrophes dévastatrices ne cessent d’augmenter le long cortège des populations sans abri, sans emploi, privées du minimum vital.

Nous savons pourtant le remarquable effort que nombre d’organisations catholiques déploient, grâce aux générosités des fidèles, pour atténuer ces misères du monde. Il fallait offrir à ces multiples initiatives comme aux multiples appels qui les suscitent un lieu de concertation, tant pour en ordonner les priorités que pour permettre de les accorder dans un esprit toujours plus évangélique. Tel est bien la tâche spécifique de « Cor Unum ».

Dans la continuité du travail de réflexion déjà réalisé au cours des sessions précédentes, votre actuelle assemblée va s’efforcer d’approfondir un certain nombre de problèmes majeurs, concernant la coordination de vos efforts et les urgences à prendre en considération, au plan des Eglises locales. Nous vous encourageons dans cette préoccupation de relier toujours vos initiatives d’entraide aux Conférences épiscopales, premières responsables des choix à opérer dans les besoins de leurs communautés ecclésiales et nationales.

Puissent ces quelques considérations sur vos trois organismes vous faire sentir l’intérêt constant que nous portons à votre action, puisqu’il y va du témoignage de l’Eglise universelle et de sa contribution spécifique au service de l’humanité. La compétence, le sens de l’organisation et de la coopération y sont nécessaires — nous y avons insisté — mais dans une prospective de foi, d’espérance et d’amour que seul donne l’Esprit Saint. Priez souvent, cet Esprit Saint de vous donner sa lumière et sa force pour réaliser une oeuvre vraiment évangélique et ecclésiale. Et nous, nous sommes heureux de vous accorder une particulière Bénédiction Apostolique.






Lundi 7 novembre



SOUS LE DOUBLE SIGNE DE L’OECUMÉNISME ET DE L’ÉVANGÉLISATION



Le Pape Paul VI a reçu le lundi 7 novembre les Evêques de Grèce venus à Rome pour la visite ad limina. Répondant aux voeux qui lui étaient exprimés par S.Esc. Mgr Antonio Varthalitis, Archevêque de Corfou, président de la Conférence Episcopale grecque, le Souverain Pontife a adressé à ses visiteurs, en français, l’allocution suivante :



Chers Frères dans le Christ,



« A vous grâce et paix, de par Dieu notre Père et le Seigneur Jésus-Christ ! » Nous aimons reprendre ce salut de l’Apôtre Paul aux Eglises d’Achaïe et de Macédoine (1Co 1,3 2Co 1,2 Ph 1,2 2Th 1,2).

Oui, c’est une grande joie pour nous de rencontrer ensemble tous les Pasteurs catholiques de Grèce. Nous vénérons les vieilles chrétientés de ce pays où s’insère votre ministère épiscopal : leur origine remonte aux temps apostoliques, aux missions de l’Apôtre Paul, dont le livre des Actes et les Epîtres parlent avec tant de précision et de chaleur ; et elles ont su défier les siècles, en se déployant dans le cadre des riches traditions byzantines, arméniennes, catholiques. De votre côté, vous aimez vénérer à Rome le lieu où Saint Paul a terminé sa course dans le martyre, tout comme l’Apôtre Pierre. N’est-ce pas le premier sens d’une visite « ad limina Apostolorum » ? Et au-delà du pèlerinage, vous manifestez à ce Siège de Pierre et au Successeur du Prince des Apôtres un attachement fervent qui vous honore. De cela, nous vous félicitons et nous vous remercions.

Vos communautés catholiques en Grèce sont certes dispersées et réduites en nombre, mais elles ont un rôle appréciable. D’abord elles correspondent au droit des fidèles catholiques, qu’ils soient de rite byzantin ou arménien, de vivre et de se rassembler selon leur foi. Elles témoignent de l’Evangile du Christ avec cette note spécifique d’un lien organique avec l’Eglise de Rome. Elles manifestent la richesse du pluralisme des rites dans l’unité de l’Eglise. Et nous savons que leurs oeuvres d’éducation et d’assistance réalisent un important service dont les Autorités et la population estiment la valeur.

95 Aimant votre patrie grecque, vous avez à coeur de participer au progrès de votre pays. Vous partagez sa légitime fierté du prestigieux patrimoine culturel qui, d’Athènes, a marqué tout l’Occident, et aussi son désir actuel d’entrer dans une collaboration plus étroite avec les Institutions européennes. Ce sont là en effet des éléments que votre pastorale ne saurait négliger.

En ce qui concerne la vie chrétienne de vos fidèles, vous portez un certain nombre de préoccupations importantes, que vous avez déjà mûries au sein de votre Conférence épiscopale, et que vous désirez envisager ici avec l’aide du Saint-Siège. Vous trouverez auprès de nos différents Dicastères les contacts fructueux, les conseils ou orientations qui vous seront utiles, en même temps que vous leur apporterez le témoignage de la vitalité religieuse de vos communautés. Notre Congrégation pour les Eglises orientales est spécialement désignée pour cela, et aussi d’autres organismes, en particulier le Secrétariat pour l’Unité des chrétiens. Pour notre part, nous relevons deux soucis pastoraux particulièrement importants : l’un qui caractérise nécessairement votre ministère, celui des rapports oecuméniques ; l’autre qui en marque plutôt la finalité : l’évangélisation, notamment celle des jeunes.

L’oecuménisme, c’est pour vous un problème crucial, vu vos rapports quotidiens avec vos compatriotes, presque tous orthodoxes. Vous avez désigné — nous en sommes très heureux — une Commission chargée des contacts avec une Commission grecque-orthodoxe, pour la préparation du dialogue entre les deux Eglises. Il y a des questions difficiles, qu’il faut résoudre dans un climat de vérité et de paix, telle celle des mariages entre catholiques et orthodoxes. Dans l’ensemble de l’Eglise aujourd’hui, le rétablissement de la charité fraternelle rend désormais possible un loyal dialogue théologique sur toutes les questions qui nous séparent encore. Comme nous voudrions que le dialogue progresse, pour arriver dès que possible à la pleine communion ! Pour votre part, nous osons dire que vous êtes les mieux placés pour témoigner concrètement de ceci : que votre communion profonde avec le Successeur de Pierre, garant de l’unité — qu’à aucun prix vous n’entendez remettre en question, car elle caractérise fondamentalement votre fidélité au Christ — se conjugue avec une sincère estime et un accueil effectif des vénérables traditions liturgiques, spirituelles, théologiques et disciplinaires, légitimes dans leur diversité du moment qu’elles sont compatibles avec l’unique foi de l’Eglise: « Un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu et Père » (
Ep 4,5 cf. Unitatis Redintegratio, UR 17,18). Ainsi votre présence en Grèce, loin de provoquer tensions et rivalités, devrait constituer un appel et un stimulant pour un authentique oecuménisme.

Par ailleurs, le véritable problème actuel auquel tous les chrétiens ont à faire face, c’est celui de l’évangélisation des générations montantes. Combien de jeunes, de tout rite, se laissent séduire par des idéologies non chrétiennes et par un climat matérialiste, qui les poussent à l’indifférence religieuse et à la violence ! C’est une réalité qui nous échappe en partie, et qui relève d’une certaine civilisation, mais il appartient aux Eglises de contribuer à former cette civilisation. Ces jeunes trouvent-ils dans nos Eglises le témoignage évangélique qu’ils sont en droit d’attendre, celui de l’absolu de Dieu et celui de la charité ? Il y va de la qualité de nos assemblées liturgiques, de l’ampleur et de la profondeur de nos efforts de catéchèse, de notre souci effectif de construire un monde plus juste et plus fraternel. Cette évangélisation ne rend que plus urgente la recherche de la pleine communion : « Qu’ils soient un, afin que le monde croie que Tu m’as envoyé ! » (Jn 17,21).

Vénérables Frères, nous savons tous les efforts que vous déployez dans ce sens. Si nous insistons, c’est pour confirmer votre ministère. Portez notre salut affectueux et nos encouragements à vos prêtres, à vos séminaristes, à vos religieux et religieuses, à vos laïcs. De tout coeur, nous leur donnons, et d’abord à vous-mêmes, notre bénédiction apostolique. « La grâce du Seigneur Jésus-Christ, l’amour de Dieu et la communion du Saint-Esprit soient avec vous tous ! » (2Co 13,13).






10 novembre



EDIFIER L’EGLISE DANS LA VÉRITÉ ET DANS L’AMOUR



Le 10 novembre, le Saint-Père a reçu les Archevêque et Evêques d’Angleterre qui faisaient leur visite « ad limina » canonique. Assistaient à l’audience, entourant le Président de la Conférence Episcopale d’Angleterre et du Pays de Galles, Mgr Georg Patrick Dwyer, Archevêque de Birmingham, l’Archevêque de Liverpool et les Evêques de Brentwood, de Stdford, de Notingham, de Shrewsbury, de Glifton, de Lancaster, de Hexham et Newcastle ainsi que plusieurs Evêques Auxiliaires. Répondant à l’adresse d’hommage du Président de la Conférence Episcopale anglaise, le Saint-Père a prononcé un discours en anglais dont voici la traduction :



Vénérables et chers Frères en le Christ,



C’est avec grande joie que nous vous rappelons les paroles que nous vous avons dites lors de la canonisation des Quarante Martyrs. De nouveau, ici, avec vous, nous « faisons l’expérience de manière toute spéciale du mystère de l’unité et de l’amour de l’Eglise ». Car l’Esprit Saint nous a rassemblés et, avec Saint Jean nous savons que « notre communion est avec le Père et avec son Fils Jésus-Christ ». Et nous espérons que vous aussi vous trouverez dans cette communion ecclésiale la joie et une nouvelle vigueur pastorale.

Nous vous savons gré, Frères, de votre communion dans l’Evangile de Jésus-Christ. Et nous sommes également reconnaissant à toutes vos populations — l’Eglise d’Angleterre tout entière — pour son attachement à la foi catholique et apostolique. Oui, nous apprécions profondément le fait que vos martyrs soient morts pour rendre témoignage à leur foi et en particulier au Saint Sacrifice de la Messe et à la primauté de Pierre et de ses successeurs. Nous savons que dans votre pays des générations de prêtres, de religieux et de laïcs ont vécu l’idéal du service chrétien dans la générosité de l’amour. Que le Seigneur daigne vous récompenser lui-même !

Nous voulons vous assurer, — pasteurs du troupeau, gardiens de la foi, « hérauts, apôtres et docteurs » de l’Evangile (2Tm 1,11) — que nous vous sommes très proche dans votre ministère. Nous sommes unis à vous dans vos joies et dans vos peines, dans vos espoirs et dans les difficultés de vos travaux. Nous sommes avec vous dans tous vos efforts d’évangélisation et de catéchèse lorsque vous vous efforcez de sauvegarder la dignité humaine à tous les niveaux et lorsque vous conduisez votre bien-aimé peuple sur les sentiers des Béatitudes, dans les voies du salut du Seigneur.


Discours 1977 90