1983 Documents postconciliaires 1035


"EVANGELICA TESTIFICATIO"

Exhortation apostolique sur le renouveau adapté de la vie religieuse

(29 juin 1971)

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INTRODUCTION

Témoignage évangélique

1 - Le témoignage évangélique de la vie religieuse manifeste aux yeux des hommes la primauté de l'amour de Dieu avec une force dont il faut rendre grâce à l'Esprit-Saint. En toute simplicité - comme Notre vénéré prédécesseur JEAN XXIII le fit à la veille du Concile (EA Il tempio massimo 2-7-62) - Nous voudrions vous dire quelle espérance suscite en Nous, comme chez tous les pasteurs et les fidèles de l'Eglise, la générosité spirituelle de ceux et de celles qui ont consacré leur vie au Seigneur dans l'Esprit et la pratique des conseils évangéliques. Nous souhaitons vous aider aussi à poursuivre votre marche à la suite du Christ, dans la fidélité aux enseignements conciliaires.

Le Concile

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2 - Ce faisant, Nous entendons répondre à l'inquiétude, à l'incertitude et à l'instabilité qui se manifestent chez certains, comme aussi encourager ceux qui recherchent le vrai renouveau de la vie religieuse. L'audace de quelques transformations arbitraires, une méfiance exagérée pour le passé, même lorsqu'il témoigne de la sagesse et de la vigueur des traditions ecclésiales, une mentalité trop soucieuse de se conformer avec hâte aux mutations profondes qui ébranlent notre temps, ont pu entraîner quelques-uns à tenir pour caduques les formes spécifiques de la vie religieuse. N'a-t-on pas même invoqué abusivement le Concile pour la remettre en question jusqu'en son principe? On le sait pourtant, le Concile a reconnu à "ce don spécial" une place de choix dans la vie de l'Eglise, car il permet à ceux qui l'ont reçu de se conformer plus profondément "à cette vie de virginité et de pauvreté que le Christ Notre-Seigneur a choisie pour lui et que la Vierge, sa Mère, a embrassée" LG 46. Il lui a aussi ouvert les voies d'un renouvellement évangélique. PC 1 (ss)

La tradition de l'Eglise

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3 - La tradition de l'Eglise - est-il besoin de le rappeler? - nous offre, depuis les origines, ce témoignage privilégié d'une recherche constante de Dieu, d'un amour sans partage du Christ, d'un dévouement absolu à la croissance de son Royaume. Sans ce signe concret, la charité de l'ensemble de l'Eglise risquerait de se refroidir, le paradoxe salvifique de l'Evangile de s'émousser, le "sel" de la foi de se diluer dans un monde en voie de sécularisation.
Dès les premiers siècles, l'Esprit-Saint a suscité, avec la confession héroïque des martyrs, la résolution admirable des vierges, des ermites et des anachorètes. La vie religieuse était déjà en germe, et elle éprouva progressivement un besoin croissant de s'épanouir et de diversifier ses formes de vie communautaire ou solitaire, pour répondre à l'invitation pressante du Christ: "Nul n'aura laissé maison, femme, frères, parents ou enfants à cause du Royaume de Dieu, qui ne reçoive bien davantage en ce temps-ci, et dans le monde à venir la vie éternelle" Lc 18,29-30.
Qui oserait prétendre que cet appel n'aurait plus aujourd'hui même valeur et vigueur, que l'Eglise pourrait faire l'économie de ces témoins exceptionnels de la transcendance de l'amour du Christ, que le monde pourrait laisser sans dommage s'éteindre ces lumières qui annoncent le Royaume de Dieu avec une liberté sans entrave, vécue quotidiennement par des milliers de ses fils et de ses filles?

Estime et affection

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4 - Ah! chers religieux et religieuses, vous qui avez voulu, par la pratique des conseils évangéliques, suivre plus librement le Christ et l'imiter plus fidèlement en dédiant toute votre vie à Dieu par une consécration particulière qui s'enracine dans la consécration du baptême et l'exprime avec plus de plénitude, puissiez-vous saisir toute l'estime et toute l'affection que Nous vous portons au nom du Christ Jésus! Nous vous recommandons à Nos Frères très chers dans l'épiscopat qui, avec les prêtres, leurs coopérateurs dans le sacerdoce, éprouvent leur propre responsabilité à l'égard de la vie religieuse. Et Nous demandons à tous les laïcs, à qui "reviennent en propre, quoique non exclusivement, les professions et activités séculières" GS 43, de comprendre quel précieux stimulant vous représentez pour eux dans la recherche de la sainteté à laquelle ils sont appelés, eux aussi, par leur baptême dans le Christ, à la gloire du Père!

Renouveau adapté

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5 - Certes, nombre de conditions extérieures préconisées par les fondateurs d'ordres ou de congrégations religieuses s'avèrent aujourd'hui surannées. Des alourdissements ou des raidissements accumulés au cours des âges ont besoin d'être élagués. Des aménagements doivent être opérés, et des formes nouvelles peuvent aussi être recherchées et instituées avec l'approbation de l'Eglise. C'est à quoi s'emploient généreusement la plupart des instituts religieux depuis quelques années, en expérimentant, parfois trop hardiment, des constitutions et des règlements renouvelés: Nous le savons et Nous sommes attentif à cet effort de renouveau voulu par le Concile Eccl. Sanct. - ( Instruct. Renovationis Causam 69-1-6).

Discernement nécessaire

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6 - Comment, au sein même de ce dynamisme où l'esprit du monde risque toujours de se mêler à l'action de l'Esprit-Saint, vous aider à opérer les discernements nécessaires? Comment sauvegarder ou rejoindre l'essentiel? Comment bénéficier de l'expérience du passé et de la réflexion présente pour affermir cette forme de vie évangélique? Selon la responsabilité extraordinaire que le Seigneur Nous a confiée dans son Eglise - "affermir Nos frères" Lc 22,32 - Nous voudrions pour Notre part vous stimuler à avancer avec plus de sûreté et de joyeuse confiance sur le chemin que vous avez choisi. Dans "la recherche de la charité parfaite" PC 1 qui commande vos existences, quelle autre attitude pourrait être la vôtre, sinon une disponibilité totale à l'Esprit-Saint qui, à l'oeuvre dans l'Eglise, vous appelle à la liberté des enfants de Dieu Ga 5,13 2Co 3,17?

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I

FORMES DE LA VIE RELIGIEUSE

L'enseignement du Concile

7 - Chers fils et chères filles, c'est par une libre réponse à l'appel de l'Esprit-Saint que vous avez résolu de suivre le Christ, en vous consacrant totalement à lui. Désormais, les conseils évangéliques de chasteté vouée à Dieu, de pauvreté et d'obéissance sont la loi de votre existence. Or, le Concile nous le rappelle, "l'autorité de l'Eglise, sous la conduite du Saint-Esprit, a pris soin de les interpréter, d'en régler la pratique et d'instituer à partir d'eux des formes de vie stables" LG 43. C'est ainsi qu'elle reconnaît et authentifie l'état de vie constitué par la profession des conseils évangéliques: "Par les voeux ou par d'autres liens sacrés assimilés aux voeux selon leur mode propre, par lesquels le chrétien s'oblige à ces trois conseils, il se donne totalement à Dieu aimé par-dessus tout ... Par le baptême il est mort au péché et consacre à Dieu mais, pour qu'il puisse recevoir un fruit plus abondant de grâce baptismale, il entend, par la profession des conseils évangéliques dans l'Eglise, se libérer des empêchements qui pourraient le retarder dans la ferveur de la charité et la perfection du culte divin, et par ces voeux il se consacre plus intimement au service de Dieu. Cette consécration sera d'autant plus parfaite que, par des liens plus fermes et plus stables, elle représente le Christ, uni par un lien indissoluble à l'Eglise son épouse" LG 44
Cet enseignement du Concile met bien en lumière la grandeur de ce don librement consenti de vous-mêmes, à l'image de celui du Christ à son Eglise, comme lui total, comme lui sans retour. C'est en vue du Royaume des cieux que vous avez voué au Christ, généreusement et sans réserve, ces forces d'amour, ce besoin de posséder et cette liberté de conduire sa vie qui sont pour l'homme si précieux. Telle est votre consécration, qui s'accomplit dans l'Eglise et par son ministère, à la fois celui de ses représentants qui reçoivent les professions religieuses, et celui de la communauté chrétienne dont l'amour reconnaît, accueille, porte et enveloppe ceux qui se donnent en elle, comme un signe vivant "qui peut et qui doit attirer efficacement tous ses membres à remplir courageusement les devoirs de la vocation chrétienne..., leur rendant déjà visible en ce siècle la présence des biens célestes". LG 44

Vie contemplative

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8 - Certains d'entre vous ont été appelés à la vie dite "contemplative". Un attrait irrésistible vous entraîne vers le Seigneur. Saisis par Dieu, vous vous livrez à son action souveraine qui vous soulève vers lui et vous transforme en lui, vous préparant à cette contemplation éternelle qui est notre commune vocation. Comment pourriez-vous avancer sur cette voie et être fidèles à la grâce qui vous anime, si vous ne répondiez de tout votre être, par un dynamisme dont l'amour est le ressort, à cet appel qui vous oriente vers Dieu de façon permanente? Considérez donc toute autre activité immédiate à laquelle vous devez faire face - rapports fraternels, travail désintéressé ou rémunérateur, nécessaire détente - comme un témoignage rendu au Seigneur de votre communion intime avec lui, afin qu'il vous accorde cette pureté d'intention unifiante si nécessaire pour le rencontrer dans l'oraison elle-même. Vous contribuerez ainsi à l'extension du Règne de Dieu, par le témoignage de votre vie et "une mystérieuse fécondité apostolique" PC 7

Vie apostolique

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9 - D'autres sont consacrés à l'apostolat dans sa mission la plus essentielle: annoncer la Parole de Dieu à ceux qu'il met sur leur chemin, pour les conduire vers la foi. Une telle grâce requiert une union profonde avec le Seigneur, qui vous donnera, tout en parlant un langage que le monde peut entendre, de transmettre le message du Verbe incarné. Combien faut-il donc que toute votre existence vous fasse participer à sa passion, à sa mort et à sa gloire Ph 3,10-11!

Contemplation et apostolat

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10 - Et lorsque votre vocation vous destine à d'autres tâches au service des hommes - vie pastorale, mission, enseignement, oeuvres de charité, etc. - n'est-ce pas d'abord l'intensité de votre adhésion au Seigneur qui les rendra fécondes, à la mesure même de cette union "dans le secret" Mt 6,6? S'ils veulent être fidèles à l'enseignement du Concile, "les membres de tout institut, ne cherchant avant tout que Dieu seul", ne doivent-ils pas "unir la contemplation par laquelle ils adhèrent à lui de coeur et d'esprit, et l'amour apostolique qui s'efforce de s'associer à l'oeuvre de la rédemption et d'étendre le Royaume de Dieu"? PC 5

Charisme des fondateurs

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11 - C'est ainsi que vous éveillerez les coeurs à la vérité et à l'amour divins, selon le charisme de vos fondateurs, suscités par Dieu dans son Eglise. Aussi le Concile insiste-t- il à bon droit sur l'obligation des religieux et des religieuses d'être fidèles à l'esprit de leurs fondateurs, à leurs intentions évangéliques, à l'exemple de leur sainteté, y voyant un des principes de la rénovation en cours et un des critères les plus sûrs de ce que chaque institut peut avoir à entreprendre LG 45 PC 2. Le charisme de la vie religieuse, en effet, loin d'être une impulsion née "de la chair et du sang" Jn 1,13, ni issue d'une mentalité qui "se modèle sur le monde présent" Rm 12,2, est bien le fruit de l'Esprit-Saint toujours agissant dans l'Eglise.

Formes extérieures et élan intérieur

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12 - C'est là que se ressource le dynamisme propre à chaque famille religieuse. Car si l'appel de Dieu se renouvelle et se diversifie selon les conditions variables des lieux et du temps, il commande des orientations constantes. L'élan intérieur qui lui répond suscite au coeur de l'existence certaines options fondamentales. La fidélité à leurs exigences est la pierre de touche de l'authenticité d'une vie religieuse. Ne l'oublions pas: oute institution humaine est guettée par la sclérose, menacée par le formalisme. La régularité extérieure ne saurait, par elle-même, suffire à garantir la valeur d'une vie et sa fidélité profonde. Aussi faut-il réanimer sans cesse les formes extérieures par cet élan intérieur sans lequel elles deviendraient vite une pesante surcharge.
A travers la diversité des formes qui donnent à chaque institut sa physionomie propre et ont leur racine dans la plénitude de la grâce du Christ 1Co 12,12-30, la règle suprême de la vie religieuse, sa norme ultime, c'est de suivre le Christ selon l'enseignement de l'Evangile. N'est-ce pas cette préoccupation qui a suscité dans l'Eglise, à travers les siècles, l'exigence d'une vie chaste, pauvre, obéissante?

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II

ENGAGEMENTS ESSENTIELS

Chasteté consacrée

13 - Seul l'amour de Dieu, il faut le redire, appelle de façon décisive à la chasteté religieuse. Cet amour exige du reste si impérieusement la charité fraternelle que le religieux vivra plus profondément avec ses contemporains dans le coeur du Christ. A ce prix, le don de soi fait à Dieu et aux autres sera source d'une paix profonde. Sans déprécier en aucune manière l'amour humain et le mariage - dans la foi, celui-ci n'est-il pas image et participation de l'alliance d'amour qui unit le Christ et l'Eglise Ep 5,25 Ep 5,32 GS 48? - la chasteté consacrée évoque cette alliance d'une façon plus immédiate et apporte ce dépassement vers lequel devrait tendre tout amour humain. Aussi, à un moment où ce dernier est plus que jamais menacé par "un érotisme ravageur" (Disc. Aux Equipes N.D. 4-5- 70, 4) doit-elle être comprise et vécue aujourd'hui avec plus de rectitude et de générosité qu'en aucun temps. Résolument positive, elle témoigne de l'amour préférentiel pour le Seigneur et symbolise, de la manière la plus éminente et la plus absolue, le mystère de l'union du Corps mystique à son Chef, de l'Epouse à son Epoux éternel. Elle atteint enfin, transforme et pénètre d'une mystérieuse ressemblance avec le Christ, l'être humain en ses profondeurs.

Source de fécondité spirituelle

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14 - Ainsi vous faut-il, chers fils et filles, rendre toute sa force à la spiritualité chrétienne de la chasteté consacrée. Lorsqu'elle est effectivement vécue en vue du Royaume des cieux, elle libère le coeur de l'homme et devient ainsi "un signe et un stimulant de la charité et une source particulière de fécondité spirituelle dans le monde" LG 42. Même si ce dernier ne la reconnaît pas toujours. elle n'en reste pas moins mystiquement efficace en son sein.

Don de Dieu

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15 - Quant à nous, que notre conviction soit fermement assurée la valeur et la fécondité de la chasteté observée pour Dieu dans le célibat religieux ne trouvent leur fondement dernier que dans la Parole de Dieu, les enseignements du Christ, l'existence de sa Mère vierge, ainsi que dans la Tradition apostolique, telle qu'elle a été sans cesse affirmée par l'Eglise. Il s'agit là d'un don précieux que le Père accorde à quelques-uns. Fragile et vulnérable en raison de l'humaine faiblesse, il demeure exposé aux contradictions de la pure raison et partiellement inintelligible à ceux auxquels la lumière du Verbe incarné n'aura pas révélé comment celui qui "aura perdu sa vie" à cause de lui "la trouvera" Mt 10,39 Mt 16,25 Mc 8,35 Lc 9,24 Jn 12,25


Pauvreté consacrée

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16 - Chastes à la suite du Christ, vous entendez aussi vivre pauvres à son exemple, dans l'usage des biens de ce monde nécessaires à la subsistance quotidienne. Sur ce point, du reste, nos contemporains vous interpellent avec force. Les instituts religieux ont sans nul doute une tâche importante à accomplir dans les oeuvres de miséricorde, d'assistance et de justice sociale: il est clair qu'en remplissant ce service, ils doivent être toujours attentifs aux exigences de l'Evangile.

La "clameur des pauvres"

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17 - Plus pressante que jamais, vous entendez monter, de leur détresse personnelle et de leur misère collective, la "clameur des pauvres" Ps 9,13 Jb 34,28 Pr 21,13. N'est-ce pas aussi pour répondre à leur appel de privilégiés de Dieu que le Christ est venu Lc 4,18 Lc 6,20, allant même jusqu'à s'identifier avec eux Mt 25,35-40? Dans un monde en plein développement, cette persistance de masses et d'individus misérables est un appel instant à "une conversion des mentalités et des attitudes" GS 63, tout particulièrement pour vous qui suivez "de plus près" le Christ Mt 19,21 2Co 8,9 dans sa condition terrestre d'anéantissement. Cet appel, Nous ne l'ignorons pas, retentit en vous de façon si dramatique que certains d'entre vous connaissent même parfois la tentation d'une action violente. Disciples du Christ, comment pourriez- vous poursuivre une autre voie que la sienne? Ce n'est pas, vous le savez, un mouvement d'ordre politique ou temporel, mais l'appel à la conversion des coeurs, à la libération de toute entrave temporelle, à l'amour.

Pauvreté et justice

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18 - Comment donc le cri des pauvres retentira-t-il dans vos existences? Il doit vous interdire tout d'abord ce qui serait compromission avec toute forme d'injustice sociale. Il vous oblige aussi à éveiller les consciences au drame de la misère et aux exigences de justice sociale de l'Evangile et de l'Eglise. Il conduit certains d'entre vous à rejoindre les pauvres dans leur condition, à partager leurs lancinants soucis. Il invite, par ailleurs, nombre de vos instituts à reconvertir en faveur des pauvres certaines de leurs oeuvres, ce que beaucoup ont, du reste, déjà accompli généreusement. Il vous impose enfin un usage des biens limité à ce que requiert l'accomplissement des fonctions auxquelles vous êtes appelés. Il faut que, dans votre vie quotidienne, vous donniez les preuves, même extérieures, de l'authentique pauvreté.

Usage des biens du monde

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19 - Dans une civilisation, dans un monde marqués par un mouvement prodigieux de croissance matérielle quasi indéfinie, quel témoignage donnerait un religieux qui se laisserait entraîner par une recherche sans frein de ses aises, trouverait normal de s accorder sans discernement ni retenue tout ce qui lui est proposé? Alors que, pour beaucoup, le risque s'est accru d'être englué dans l'appât et la sécurité de l'avoir, du savoir et du pouvoir, l'appel de Dieu vous place à la pointe de la conscience chrétienne rappeler aux hommes que leur développement vrai et plénier, c'est de répondre à leur vocation de "participer en fils à la vie du Dieu vivant, Père de tous les hommes" PP 21

Vie de travail

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20 - Vous saurez entendre également la plainte de tant de vies entraînées dans l'enchaînement implacable du labeur pour le rendement, du profit pour la jouissance, de la consommation, qui, a son tour, oblige à un travail parfois inhumain. Un aspect essentiel de votre pauvreté sera donc d'attester le sens humain du travail accompli dans la liberté de l'esprit et rendu à sa nature de gagne-pain et de service. Le Concile n'a-t-il pas très opportunément mis l'accent sur votre soumission nécessaire à "la loi commune du travail"? PC 13. Gagner votre vie et celle de vos frères ou de vos soeurs, aider les pauvres par votre labeur, ce sont des devoirs qui vous incombent. Mais vos activités ne peuvent déroger à la vocation de vos divers instituts, ni comporter habituellement des travaux qui se substitueraient à leurs tâches propres. Elles ne sauraient non plus vous entraîner en aucune manière vers la sécularisation, au détriment de la vie religieuse. Veillez donc à l'esprit qui vous anime; quel échec ce serait si vous ne vous sentiez "valorisés" que par la rétribution de travaux profanes!

Partage fraternel

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21 - Le besoin si impératif aujourd'hui du partage fraternel doit garder sa valeur évangélique. Selon l'expression de la Didaché: "Si vous entrez en partage pour les biens éternels, à plus forte raison devez-vous y entrer pour les biens périssables" (IV 8) Ac 4,32. La pauvreté effectivement vécue par la mise en commun des biens, y compris le salaire, attestera la communion spirituelle qui vous unit; elle sera un vivant appel à tous les riches, elle apportera aussi un soulagement à vos frères et soeurs dans le besoin. Le désir légitime d'exercer une responsabilité personnelle ne s'exprimera pas par la jouissance de revenus propres, mais par la participation fraternelle au bien commun. Les modes de la pauvreté de chacun et de chaque communauté dépendront du type d'institut et de la forme d'obéissance qui y est pratiquée: ainsi se réalisera, selon les vocations particulières, le caractère de dépendance inhérent à toute pauvreté.

L'exigence évangélique

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22 - Vous le voyez, chers fils et filles, les besoins du monde actuel, si vous les éprouvez dans le coeur du Christ, rendent plus urgente et plus profonde votre pauvreté. S'il vous faut évidemment tenir compte du milieu humain où vous vivez, pour y adapter votre style de vie, votre pauvreté ne pourra pas être purement et simplement la conformité aux moeurs de ce milieu. Sa valeur de témoignage lui viendra d'une réponse généreuse à l'exigence évangélique, dans la fidélité totale à votre vocation, et non seulement d'un souci de paraître pauvres qui pourrait demeurer trop superficiel, en évitant toutefois des modes de vie qui dénoteraient une certaine recherche et vanité.
Tout en reconnaissant que certaines situations peuvent justifier l'abandon d'un vêtement religieux, Nous ne pouvons taire la convenance que l'habit des religieux et des religieuses soit, comme le veut le Concile, signe de leur consécration PC 17 et se différencie en quelque manière des formes manifestement séculières.

Obéissance consacrée

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23 - N'est-ce pas la même fidélité qui inspire votre profession d'obéissance, dans la lumière de la foi et le mouvement même de la charité du Christ? Par cette profession, en effet, vous faites l'offrande totale de votre volonté et vous entrez plus fermement et plus sûrement dans son dessein de salut. A l'exemple du Christ venu accomplir la volonté du Père, en communion avec Celui qui "a appris en souffrant l'obéissance" et "s'est fait serviteur de ses frères", vous êtes liés "plus étroitement au service de l'Eglise" et de vos frères Jn 4,34 Jn 5,30 Jn 10,15-18 He 5,8 He 10,7 Ps 39,8-9 PC 14


Fraternité évangélique et sacrifice

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24 - L'aspiration évangélique à la fraternité s'est fortement exprimée au Concile: l'Eglise s'est définie comme le "peuple de Dieu", où la hiérarchie est au service des membres du Christ unis entre eux par une même charité LG 1-29. Dans l'état religieux comme dans toute l'Eglise se vit le même mystère pascal du Christ. Le sens profond de l'obéissance se révèle dans la plénitude de ce mystère de mort et de résurrection, où s'accomplit en sa perfection la destinée surnaturelle de l'homme: 'est en effet à travers le sacrifice, la souffrance et la mort que ce dernier accède à la vraie vie. Exercer l'autorité au milieu de vos frères, c'est donc les servir Lc 22,26-27 Jn 13,14, à l'exemple de Celui qui "a donné sa vie en rançon pour la multitude" Mt 20,28 Ph 2,8


Autorité et obéissance

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25 - Dès lors, au service du bien commun, l'autorité et l'obéissance s'exercent comme deux aspects complémentaires de la même participation à l'offrande du Christ: pour les détenteurs de l'autorité, il s'agit de servir dans leurs frères le dessein d'amour du Père, et par l'acceptation de leurs directives les religieux suivent l'exemple de notre Maître Lc 2,51 et coopèrent à l'oeuvre du salut. Ainsi, loin de s'opposer, l'autorité et la liberté individuelle vont de pair dans l'accomplissement de la volonté de Dieu recherchée fraternellement, par un dialogue confiant entre le supérieur et son frère, lorsqu'il s'agit d'un cas personnel, ou par une concertation générale au sujet de ce qui regarde une communauté. Dans cette recherche, les religieux sauront éviter aussi bien une agitation excessive des esprits que le souci de faire prévaloir sur le sens profond de la vie religieuse l'entraînement des opinions du jour. Il revient à chacun, mais particulièrement aux supérieurs et à ceux et celles qui exercent une responsabilité parmi leurs frères ou leurs soeurs, de réveiller dans les communautés les certitudes de foi qui doivent les régir. La recherche a pour but d'approfondir ces certitudes et de les mettre en oeuvre dans la vie quotidienne selon les besoins du moment, nullement de les remettre en question. Ces recherches poursuivies en commun doivent, quand il y a lieu, se conclure par les décisions des supérieurs: leur présence reconnue comme telle est indispensable à toute communauté.

A travers les nécessités de la vie quotidienne

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26 - Les conditions modernes de l'existence retentissent naturellement sur votre manière de vivre l'obéissance. Nombre d'entre vous mènent en effet une part de leurs activités hors des maisons religieuses et exercent une fonction pour laquelle ils ont une compétence particulière. D'autres sont amenés à collaborer dans des équipes de travail qui ont un régime propre. Le risque inhérent à de telles situations n'est-il pas un appel à affermir et approfondir le sens de l'obéissance? Pour qu'il soit bienfaisant, certaines conditions sont requises. Il importe avant tout de vérifier si le travail assuré respecte la vocation de l'institut. Il convient aussi de définir avec netteté les deux domaines. Il faut surtout savoir passer de l'activité extérieure aux exigences de la vie commune en veillant à assurer toute leur efficacité aux éléments de la vie proprement religieuse. C'est une des charges principales des supérieurs d'assurer à leurs frères et soeurs en religion les conditions indispensables à leur vie spirituelle. Mais comment pourraient-ils la remplir sans la collaboration confiante de toute la communauté?

Liberté et obéissance

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27 - Ajoutons-le: plus vous exercez votre responsabilité plus il vous faut renouveler, dans son absolu, le don de vous- mêmes. Le Seigneur fait à chacun l'obligation de "perdre sa vie", s'il veut le suivre Lc 9,23-24. Vous observerez ce précepte en acceptant les directives de vos supérieurs comme une garantie de votre profession religieuse, qui est "l'offrande totale de votre propre volonté comme un sacrifice de vous-même à Dieu" PC 14. L'obéissance chrétienne est une soumission inconditionnée au vouloir divin. Mais la vôtre est plus stricte, car vous l'avez spécialement vouée, et l'éventail de vos choix est limité par vos engagements. C'est un acte plénier de votre liberté qui est à l'origine de votre condition présente: votre devoir est de le rendre toujours plus vivant, tantôt de votre propre initiative, tantôt par l'assentiment que vous donnez de grand coeur aux ordres de vos supérieurs. Ainsi le Concile met au nombre des bienfaits de l'état religieux "une liberté fortifiée par l'obéissance" LG 43 et souligne que cette obéissance, "loin de diminuer la dignité de la personne humaine, la conduit à la maturité en faisant grandir la liberté des enfants de Dieu" PC 14.

Conscience et obéissance

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28 - N'y a-t-il pas pourtant des conflits possibles entre l'autorité du supérieur et la conscience du religieux, ce "sanctuaire où l'homme est seul avec Dieu et où sa voix se fait entendre" GS 16. Est-il besoin de le redire: la conscience n'est pas à elle seule l'arbitre de la valeur morale des actions qu'elle suggère, elle doit se référer a des normes objectives et, s'il le faut, se réformer, se rectifier. A l'exception d'un ordre qui serait manifestement contraire aux lois de Dieu ou aux constitutions de l'institut, ou qui entraînerait un mal grave et certain, auquel cas l'obligation d'obéir n'existe pas, les décisions du supérieur concernent un domaine où l'appréciation du meilleur bien peut varier selon les points de vue. Conclure, dès qu'un ordre donné apparaît objectivement moins bon, qu'il est de ce fait illégitime et contraire à la conscience, serait méconnaître d'une manière peu réaliste l'obscurité et l'ambivalence de nombre de réalités humaines. De plus, le refus d'obéissance entraîne une atteinte souvent grave au bien commun. Un religieux ne saurait facilement accepter qu'il y ait contradiction entre le jugement de sa conscience et celui de son supérieur. Cette situation exceptionnelle entraînera parfois une authentique souffrance intérieure, à l'imitation du Christ lui-même, "qui apprit par la souffrance ce que c'est qu'obéir" He 5,8.

La croix, preuve du plus grand amour

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29 - C'est dire à quel renoncement engage la pratique de la vie religieuse. Il vous faut donc connaître quelque chose du poids qui attirait le Seigneur vers sa croix, ce "baptême dont il devait être baptisé", ou s'allumerait ce feu qui vous embrase à votre tour Lc 12,49-50; quelque chose de la "folie" que saint Paul nous souhaite à tous, car seule elle nous rend sages 1Co 3,18-19. Que la croix soit pour vous, comme elle l'a été pour Jésus, la preuve du plus grand amour. N'y a-t-il pas un rapport mystérieux entre le renoncement et la joie, le sacrifice et la dilatation du coeur, la discipline et la liberté spirituelle?

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III

STYLE DE VIE

Un témoignage à donner

30 - Reconnaissons-le, fils et filles en Jésus-Christ: à l'heure actuelle, il est difficile de trouver un style de vie qui s'harmonise avec cette exigence. Tant de sollicitations contraires vous portent à rechercher avant tout une action humainement efficace. Mais ne vous revient-il pas de donner l'exemple d'une austérité joyeuse et équilibrée, en assumant les difficultés inhérentes au travail et aux rapports sociaux, le support patient des épreuves de la vie avec son angoissante insécurité, comme des renoncements indispensables à la plénitude de la vie chrétienne? Les religieux, en effet, "tendent à la sainteté par une voie plus étroite" LG 13. Dans ces peines, grandes ou petites, votre ferveur intérieure vous fait reconnaître la croix du Christ et vous aide à les accueillir avec foi et amour.

A l'exemple du Christ

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31 - A ce prix, vous donnerez le témoignage que le peuple de Dieu attend: des hommes et des femmes capables d'accepter l'inconnu de la pauvreté, d'être épris de simplicité et d'humilité, amants de la paix, purs de compromissions, décidés à l'abnégation totale, à la fois libres et obéissants, spontanés et tenaces, doux et forts dans la certitude de la foi

cette grâce vous sera donnée par le Christ Jésus en

proportion du don radical que vous aurez fait de vous-mêmes et que vous ne reprendrez pas. L'histoire récente de tant de religieux et de religieuses qui ont généreusement souffert pour le Christ en divers pays en est une preuve éloquente. Tout en leur exprimant Notre admiration, Nous les proposons en exemple pour tous.

Fortifier l'homme intérieur

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32 - Dans ce cheminement, une aide précieuse vous est fournie par des formes de vie que l'expérience, fidèle aux charismes des divers instituts, a fait choisir, dont elle a diversifié les synthèses et qu'elle ne cesse de développer. Quelque variées qu'en soient les modalités, ces moyens sont toujours ordonnés à la construction de l'homme intérieur. Et c'est le souci de la fortifier qui vous aidera à reconnaître, au milieu de tant de sollicitations diverses, les formes de vie plus adaptées. Un désir excessif de souplesse et de spontanéité créative peut faire taxer, en effet, de rigidité le minimum de régularité dans les usages qu'appellent normalement la vie des communautés et la maturation des personnes. Des élans désordonnés qui se réclament de la charité fraternelle ou de ce que l'on croit inspiration de l'Esprit peuvent aussi faire éclater les institutions.

Importance du milieu de vie

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33 - On ne saurait pourtant sous-estimer, vous le savez par expérience, l'importance du milieu de vie pour l'orientation habituelle de tout l'être, si complexe et divisé, dans le sens de l'appel divin, et pour l'intégration spirituelle de ses tendances. Le coeur ne se laisse-t-il pas souvent prendre à ce qui passe? Or, beaucoup d'entre vous seront obligés de mener leur vie, pour une part au moins, dans un monde qui tend à exiler l'homme de lui-même et à compromettre, avec son unité spirituelle, son union à Dieu. Il vous faut donc apprendre à le trouver jusque dans ces conditions d'existence marquées par l'accélération des rythmes, le bruit et les sollicitations de l'éphémère.

Pour le ressourcement en Dieu

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34 - Qui ne voit toute l'aide que vous apporte, pour y parvenir, le cadre fraternel d'une vie régulière, avec des disciplines de vie librement consenties? Celles-ci apparaissent toujours plus nécessaires à quiconque "revient à son coeur" Is 46,8, au sens biblique du terme, plus profond que nos sentiments, nos idées et nos vouloirs, pénétré du sens de l'infini, de l'absolu, de notre destination éternelle. Dans le désarroi actuel, les religieux doivent être les témoins de l'homme que l'adhésion vitale à sa fin, le Dieu vivant, a effectivement unifié et ouvert par l'intégration de toutes ses puissances, la purification de ses pensées, la spiritualisation de ses sens, la profondeur et la constance de sa vie en Dieu.

Retrait nécessaire du monde

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35 - Dans la mesure donc où vous avez à accomplir des tâches extérieures, il vous faut apprendre à passer de ces activités à la vie recueillie où vos âmes se retrempent. Si vous accomplissez vraiment l'oeuvre de Dieu, vous éprouverez de vous-mêmes le besoin de temps de retrait, dont vous ferez avec vos frères ou vos soeurs en religion des temps de plénitude. Etant donné la surcharge et la tension résultant de la vie moderne, il convient donc d'attacher une particulière importance, en plus du rythme quotidien de la prière, à ces moments d'oraison plus prolongés, diversement répartis dans le temps, selon les possibilités et la nature de vos vocations. Dans le cas où, selon vos constitutions, vos maisons pratiquent largement l'accueil fraternel, vous saurez en régler la fréquence et le "style" de manière à éviter toute vaine agitation et à faciliter à vos hôtes l'union intime avec Dieu.

Initiation spirituelle

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36 - C'est dire le sens des observances qui rythment votre vie quotidienne. Loin de les considérer sous le seul aspect de l'obligation d'une règle, une conscience avertie les juge aux bienfaits qu'elles apportent, en assurant une plus grande plénitude spirituelle. Il faut le dire: les observances religieuses requièrent, bien plus qu'une instruction rationnelle, ou une éducation de la volonté une véritable initiation visant à christianiser l'être selon les béatitudes évangéliques jusque dans ses profondeurs.

Doctrine de vie

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37 - Le Concile considère "une doctrine éprouvée pour atteindre la perfection" LG 43 comme un des patrimoines des instituts, un des bienfaits majeurs qu'ils doivent vous assurer. Puisque cette perfection est d'avancer toujours plus loin dans l'amour de Dieu et de nos frères, il faut entendre cette "doctrine" d'une façon très concrète, comme une doctrine de vie qui doit être effectivement vécue. C'est dire que les recherches auxquelles se livrent les instituts ne peuvent porter seulement sur des adaptations à accomplir en fonction des mutations du monde: elles doivent aider à une redécouverte féconde des moyens indispensables à une existence toute saisie par l'amour de Dieu et des hommes.

Construction de l'homme nouveau

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38 - La nécessité s'impose dès lors, pour les communautés comme pour les personnes qui les constituent, de passer du stade "psychique" à un stade vraiment "spirituel" 1Co 2,14-15 . "L'homme nouveau" n'est-il pas, selon saint Paul, à la fois comme la plénitude ecclésiale du Christ et comme sa participation par chaque chrétien? Cette orientation fera de vos familles religieuses le milieu vital qui développera le germe de vie divine déposé en chacun d'entre vous par le baptême et auquel votre consécration, intégralement vécue, permettra de produire son fruit en plus grande abondance.

Simplicité accueillante de la vie communautaire

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39 - Imparfaits, certes, comme tout chrétien, vous entendez pourtant constituer un milieu qui contribue au progrès spirituel de chacun de ses membres. Comment y parvenir, sinon en approfondissant dans le Seigneur vos rapports, même les plus ordinaires, avec chacun de vos frères? La charité, ne l'oublions pas, doit être comme une espérance active de ce que les autres peuvent devenir avec l'aide de notre soutien fraternel. Le signe de sa vérité se trouve dans la simplicité heureuse avec laquelle tous s'efforcent de comprendre ce qui tient à coeur à chacun Ga 6,2. Si certains religieux paraissent comme éteints par leur vie de communauté, qui devrait au contraire les épanouir, n'est-ce pas faute d'y trouver cette sympathie compréhensive qui nourrit l'espérance? Nul doute que l'esprit d'équipe, les rapports d'amitié et d'entraide fraternelle dans un même apostolat, ainsi que le soutien mutuel d'une communauté de vie choisie pour un meilleur service du Christ, ne soient dans ce cheminement quotidien de précieux adjuvants.

Petites communautés

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40 - En ce sens, des aspirations se font jour en vue de constituer des communautés plus réduites. Une réaction spontanée contre l'anonymat des concentrations urbaines, la nécessité d'adapter le logement d'une communauté à l'habitat exigu des cités modernes, le besoin d'être plus proches par les conditions de vie d'une population à évangéliser sont parmi les motifs qui amènent certains instituts à envisager, de préférence, l'établissement de communautés peu nombreuses. Celles-ci peuvent aussi favoriser le développement de relations plus étroites entre les religieux et une prise en charge mutuelle plus fraternelle. Cependant, si un certain cadre peut en effet favoriser la naissance d'un climat spirituel, ce serait une illusion de croire qu'il suffit à le développer. Les petites communautés, loin de présenter une forme de vie plus facile, se révèlent au contraire plus exigeantes pour leurs membres.

Grandes communautés

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41 - Par ailleurs, il reste vrai que des communautés nombreuses conviennent particulièrement à bien des religieux. Elles peuvent être aussi exigées par la nature d'un service charitable, par certains travaux intellectuels ou la réalisation d'une vie contemplative ou monastique: que l'unité de coeur et d'âme y soit toujours à la mesure même du but spirituel et surnaturel poursuivi. Au reste, quelle que soit leur dimension, les communautés, petites ou grandes, ne peuvent aider leurs membres que si elles demeurent constamment animées par l'esprit évangélique, ressourcées dans la prière et marquées généreusement par la mortification de l'homme nouveau et la fécondité du sacrifice de la croix.

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1983 Documents postconciliaires 1035