Discours 1999 135

LORS DE SA RENCONTRE AVEC LE PERSONNEL DE LA COMPAGNIE AÉRIENNE POLONAISE (LOT)

Dimanche 13 juin 1999, Aéroport Okecie

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  Loué soit Jésus-Christ!



Avec ce salut chrétien, je voudrais souhaiter la bienvenue à tous ceux qui sont réunis ici. Je remercie le Cardinal Primat de sa présence et du soin pastoral dont il entoure l'aéroport situé sur le territoire de l'archidiocèse de Varsovie, et également pour ses paroles de bienvenue. Je salue le Ministre des Transports, ainsi que tous ceux qui m'ont souhaité la bienvenue au nom des personnes présentes, et je les remercie pour leurs paroles de bienvenue.

Je suis heureux qu'au cours de ce pèlerinage, il me soit donné de m'arrêter parmi le personnel de l'aviation civile polonaise. Notre rencontre revêt un caractère exceptionnel. En effet, je n'ai pas souvent l'occasion de rencontrer les personnes qui représentent un groupe professionnel. Toutefois, le 70ème anniversaire de l'établissement des Lignes aériennes polonaises LOT représente une bonne occasion pour s'arrêter parmi ceux qui de diverses façons servent les voyageurs aériens. Cette visite est également dictée dans un certain sens par le désir de rembourser, du moins en partie, la dette de gratitude envers la LOT et envers toutes les autres compagnies aériennes dans le monde entier que je contracte constamment en tant que Pape pèlerin. Je vous remercie vivement pour cette aide particulière dans mon service à l'Eglise.

Je salue cordialement les pilotes et le personnel aérien. J'éprouve une sincère reconnaissance pour votre professionnalité et votre dévouement. En traversant les continents, vous témoignez de tout ce qu'il y a de bon dans notre réalité polonaise, dans notre culture et dans notre spiritualité. Je vous remercie de cela et je vous demande de continuer à prendre soin de la renommée de la Pologne dans le monde. De là-haut apparaissent avec une clarté extraordinaire la beauté de la création, la petitesse et en même temps la grandeur de l'homme - tout ce qui constitue la manifestation de la puissance et de la sagesse infinies du Créateur. Que cette expérience quotidienne soit pour vous une source de consolidation et de renouveau de la foi! Qu'elle ravive constamment votre confiance dans l'amour de Dieu. Ces paroles sont adressées aux pilotes.

J'adresse encore des paroles de salut et de reconnaissance également au personnel de terre, car les pilotes partent de la terre et retournent sur la terre. Votre travail aide l'homme qui se trouve face à la nécessité de se détacher de la terre, de se détacher non seulement sur le plan physique. Souvent, cela est accompagné par une expérience de perte du sens de sécurité et d'égarement intérieur. C'est pourquoi votre service de bonté est si important: un sourire amical, une bonne parole, la compréhension et la cordialité également envers nous, passagers. Je vous en prie, accomplissez votre service en ayant en mémoire les paroles du Christ: «Dans la mesure où vous l'avez fait à l'un de ces plus petits de mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait» (
Mt 25,40).

Enfin, j'adresse un remerciement particulier à tous ceux qui s'occupent de la manutention de l'aéroport, aux techniciens, aux contrôleurs du trafic aérien. C'est sur vous que repose en grande partie la responsabilité de la sécurité des passagers. Vous accomplissez un travail que les passagers ne remarquent pas. C'est peut-être pour cela qu'il est particulièrement précieux aux yeux de Dieu, qui voit la fatigue de l'homme, même celle cachée (cf. Mt 6,6). Que cette conscience soit pour vous un soutien et une exhortation à accomplir avec zèle votre devoir quotidien.

Je me réjouis de ce que, depuis quelques années, dans quatre aéroports internationaux de Pologne, des chapelles sont à disposition où les employés et les voyageurs peuvent trouver des moments de silence et de prière. Je remercie de tout coeur tous ceux qui y ont contribué. Le soin pastoral de l'aviation civile est l'expression de la responsabilité et de la fidélité de l'Eglise. «Personne ne pouvant être privé du message de salut, l'Eglise tend [de cette façon] la main à tous ceux qui, étant donné les circonstances de leur vie, ne peuvent jouir de façon satisfaisante de soins pastoraux normaux ou encore en sont totalement privés» (cf. Document du Conseil pontifical pour la Pastorale des Migrants et des Personnes en Déplacement, 1995, nn. 4-5).

Pour la septième fois, je profite de la bienveillance des Lignes aériennes polonaises LOT au cours de mon pèlerinage dans ma patrie. Acceptez mes remerciements cordiaux. Dans le même temps, je souhaite que la LOT, l'aéroport de Varsovie-Okecie, ainsi que les autres aéroports de Pologne, se développent toujours plus et se modernisent, devenant de cette façon une carte de visite particulière pour notre Patrie. En vous prodiguant en vue du développement technologique, n'oubliez pas l'homme. Je vous souhaite de savoir servir, dans un esprit de compréhension réciproque et de bonne coopération, la grande oeuvre de rapprochement des hommes entre eux.

Pendant tout ce temps, j'ai réfléchi à la dernière fois où j'ai eu une rencontre semblable, dans un environnement semblable, et à la fin, je m'en suis souvenu: ce fut avec l'Alitalia. A propos de «ballotter» le Pape à travers le monde, malheureusement l'Alitalia vous bat. Mais il ne faut peut-être pas l'envier.



LORS DE SA VISITE AU SANCTUAIRE DE JASNA GÓRA

Jeudi 17 juin 1999

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  1. «Marie, depuis toujours, tu es la Reine de la Pologne!
Marie, prononce une parole en notre faveur!»



Sur l'itinéraire de mon pèlerinage dans ma patrie, je ne pouvais manquer d'effectuer une visite au sanctuaire de Jasna Góra. Ce lieu est si cher à mon coeur et est si cher à chacun de vous, chers frères et soeurs. Nous avons pris l'habitude de venir ici et de présenter à la Mère du Fils de Dieu et à notre Mère nos problèmes personnels et familiaux, ainsi que les grandes questions nationales, comme le firent, des siècles durant, nos ancêtres.

Nous avons pris l'habitude de dire tout cela à Celle qui est présente de façon particulière dans le mystère du Christ et de l'Eglise, dans le mystère de chaque homme. Comme Mère du Sauveur, Marie est également Mère de tout le Peuple de Dieu et l'accompagne sur le chemin de la foi et de la vie quotidienne.

Je suis heureux car il m'est donné aujourd'hui de me trouver une fois de plus en ce lieu saint, en ce lieu particulier de prière et de contempler de près le Visage de notre Mère. A travers «sa foi, sa charité et son union parfaite avec le Christ» (cf. Lumen gentium
LG 63), elle est devenue pour nous un modèle vivant de sainteté et d'amour pour l'Eglise.



2. Je salue cordialement les Pères érémites de saint Paul - gardiens de ce sanctuaire avec à leur tête le Père général et le Père Prieur. Je salue l'Archevêque Stanislaw - Pasteur de l'Eglise de Czestochowa, l'Evêque auxiliaire Antoni, les prêtres diocésains, les religieux, les religieuses et toutes les personnes consacrées. Je salue de tout coeur les habitants de cette ville et les pèlerins venus de diverses parties de la Pologne.



3. Je suis venu à Jasna Góra comme pèlerin, pour rendre hommage à Marie, Mère du Christ, pour La prier et prier avec Elle.

Je veux la remercier pour sa protection au cours de ces journées de service pastoral à l'Eglise dans ma patrie. Tout au long de ce pèlerinage, Marie a été présente parmi nous obtenant de son Fils des dons spirituels, afin que «nous fassions tout ce qu'il nous dira» (cf. Jn 2,5).

138 Je La remercie pour chaque bien spirituel et matériel qui s'accomplit sur la terre polonaise.

Je confie à la protection maternelle de Notre-Dame de Jasna Góra ma personne, l'Eglise, ainsi que tous mes compatriotes, sans aucune exception. Je Lui confie chaque coeur polonais, chaque maison, et chaque famille. Nous sommes tous ses fils. Que Marie soit un exemple et un guide dans notre travail quotidien et difficile. Qu'Elle aide chacun à croître dans l'amour pour Dieu et pour les hommes, à édifier le bien commun de la patrie, à introduire et à consolider la juste paix dans nos coeurs et dans nos milieux.

Je te prie, Mère de Jasna Góra, Reine de la Pologne, embrasse avec Ton coeur de Mère toute ma nation. Accrois son courage et les forces de l'esprit, afin qu'elle puisse faire face à la grande responsabilité qui l'attend. Franchis avec foi, espérance et charité, le seuil du troisième millénaire et adhère plus profondément à Ton Fils Jésus-Christ et à son Eglise édifiée sur le fondement des Apôtres.



Notre Mère de Jasna Góra, prie pour nous et guide-nous, afin que nous puissions témoigner du Christ - Rédempteur de chaque homme.

«Protège toute la Nation,
qui vit pour ta gloire,
qu'elle se développe merveilleusement, Marie!».







MESSAGE DU PAPE JEAN PAUL II AUX PARTICIPANTS À LA SEIZIÈME ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DE CARITAS INTERNATIONALIS

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Chers amis,



1. Alors que se tient à Rome sa seizième assemblée générale, Caritas internationalis célèbre le cinquantième anniversaire de sa fondation. En cette heureuse circonstance, je m'associe volontiers à la joie et à l'action de grâce de ses membres qui, à travers le monde, témoignent de l'amour du Christ et de son Eglise pour les plus démunis et qui sont pour toute la communauté chrétienne un rappel significatif de l'exigence évangélique de la charité.

Au nom de l'Eglise, je suis reconnaissant à la Caritas pour son engagement généreux; il s'est traduit, au cours des quatre dernières années, par une préoccupation particulière pour ceux qui vivent dans des situations de pauvreté toujours plus éprouvantes, particulièrement les réfugiés et les personnes déplacées, partout où l'urgence se fait sentir, comme en Corée du Nord, par exemple; et aujourd'hui ce sont les Balkans et les pays d'Afrique touchés par la guerre qui sont spécialement l'objet de sa sollicitude. D'autre part, grâce à différentes initiatives, la Caritas a voulu répondre avec empresse ment à l'appel que j'ai lancé dans la lettre apostolique Tertio millennio adveniente pour que "le Jubilé soit un moment favorable pour penser, entre autres, à une réduction importante, sinon à un effacement total, de la dette internationale qui pèse sur le destin de nombreuses nations" (
TMA 51).



2. Le cinquantième anniversaire de la Caritas a été une excellente occasion pour approfondir son identité, en réfléchissant sur les valeurs et sur les principes qui guident son action, ainsi que sur sa mission dans l'Église et sur la vision de foi qui l'anime. En contemplant la personne du Christ et en méditant sur le message évangélique, vous participez toujours davantage à la mission du Sauveur venu porter la bonne nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs la délivrance, aux aveugles le retour à la vue, renvoyer en liberté les opprimés, proclamer une année de grâce du Seigneur (cf. Lc 4,17-21). Vous montrez ainsi que le Royaume de Dieu, déjà présent au milieu de nous en la personne du Christ, se manifeste concrètement et qu'il est pourtant toujours au-delà de nous-mêmes et de nos efforts pour l'annoncer et l'accueillir.



3. Parmi les signes de la manifestation du Royaume de Dieu, vous avez voulu porter votre attention, pour les années qui viennent, sur la réconciliation, l'une des formes les plus authentiques de la charité. Dans un monde qui connaît tant de divisions et de déchirements, entre les personnes et entre les communautés humaines, je souhaite ardemment que tous les disciples du Christ apprennent à discerner toujours mieux les signes d'espérance. Qu'ils soient des artisans de paix et de réconciliation pour que notre humanité devienne toujours plus une terre de fraternité et de solidarité où chacun, reconnu dans sa dignité d'enfant d'un même Père, puisse mener une vie paisible et développer les dons qu'il a reçus !

La réalisation de cet idéal demande une conversion des coeurs et aussi des changements, parfois radicaux, dans la société. Comme je l'ai écrit dans l'encyclique Sollicitudo rei socialis, "l'objectif de la paix, si désiré de tous, sera certainement atteint grâce à la mise en oeuvre de la justice sociale et internationale, mais aussi grâce à la pratique des vertus qui favorisent la convivialité et qui nous apprennent à vivre unis afin de construire dans l'unité, en donnant et en recevant, une société nouvelle et un monde meilleur" (SRS 39).

Pour contribuer de manière spécifique à changer les coeurs et les mentalités, ainsi qu'à transformer les structures sociales et économiques qui détruisent l'homme et la collectivité pour en faire des structures de justice qui annoncent le Royaume, je vous invite à déployer vos efforts pour une éducation à la justice et à la solidarité, fondée sur la doctrine sociale de l'Eglise. En effet, ces valeurs sont des manifestations caractéristiques de la nouveauté du Royaume et des signes de son annonce à tous, particulière ment aux pauvres.



4. J'ai voulu que cette année préparatoire au grand Jubilé, consacrée à Dieu le Père, soit l'occasion de mettre en relief la vertu théologale de la charité, avec son double visage d'amour pour Dieu et pour les frères (cf. Tertio millennio adveniente TMA 50). Dans cette perspective, une vie spirituelle intense permettra aux membres de la Caritas de se souvenir que c'est en Dieu que se trouvent la source et l'aboutissement de leur engagement. Dans la prière, qu'ils se laissent attirer par le Père de toute miséricorde, trouvant en lui un modèle de compassion pour les personnes qui souffrent et recevant de lui la force de continuer malgré les échecs et les frustrations ! Que tous deviennent ainsi des témoins toujours plus ardents de l'Evangile de la charité !



5. Alors que Monsieur Luc Trouillard achève son mandat de Secrétaire général, je tiens à lui faire part de ma vive gratitude pour le service qu'il a assuré, avec dévouement et compétence. Confiant chacun des membres de Caritas Internationalis à la protection et au soutien maternel de la Vierge Marie, Mère du Christ et Mère des hommes, je vous encourage cordialement à poursuivre avec générosité votre engagement dans la mission de l'Eglise au service des personnes les plus démunies et les plus éprouvées, et de grand coeur je vous donne la Bénédiction apostolique.

Du Vatican le 2 juin 1999.




AUX MEMBRES DU CONSEIL DES EGLISES CHRÉTIENNES DE MADAGASCAR

Samedi 19 juin 1999

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Monsieur le Cardinal,
Cher Frère dans l'épiscopat,
Chers amis,



Je suis heureux de vous accueillir ce matin, vous qui êtes membres du Conseil des Églises chrétiennes de Madagascar. Vous avez tenu à venir à Rome en souvenir du voyage que j'ai accompli dans votre pays voici dix ans. Je vous remercie cordialement de ce geste de courtoisie à l'égard de la personne du Successeur de Pierre. Votre visite me rappelle l'accueil chaleureux qui m'a été réservé par le peuple malgache et la rencontre fraternelle qui a rassemblé les représentants des différentes confessions chrétiennes à Antananarivo.

Depuis ce temps, je sais que vous avez développé les collaborations entre vos différentes communautés, pour rendre plus vivant et plus vrai le témoignage d'unité des disciples du Christ dans le service de tous leurs compatriotes. Vous apportez ainsi ensemble une contribution précieuse au développement humain et spirituel de toute la nation.

Je souhaite vivement que les chrétiens de la Grande Île continuent à approfondir, avec une ardeur renouvelée, les liens de charité et de solidarité qui les unissent. Que Dieu vous donne de marcher avec courage sur les chemins d'un amour sincère et d'une collaboration toujours plus fraternelle, pour que, parmi les chrétiens, puisse se réaliser toujours plus pleinement la prière du Seigneur : "Que tous soient un" (
Jn 17,21), afin que le monde croie en Celui que le Père a envoyé !

Sur chacun de vous, sur vos familles et sur tout le peuple malgache, j'invoque de grand coeur l'abondance des Bénédictions de Dieu.




AUX MEMBRES DE LA RÉUNION DES OEUVRES POUR L'AIDE AUX ÉGLISES ORIENTALES (R.O.A.C.O.)

Jeudi 24 juin 1999

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Monsieur le Cardinal,
Vénérés frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,
Chers membres et amis de la «Réunion des oeuvres pour l'Aide aux Eglises orientales» (R.O.A.C.O)!



1. Je suis heureux de vous souhaiter une chaleureuse bienvenue, à l'occasion de votre réunion visant à coordonner les aides aux chrétiens des Eglises orientales.

Je salue avec affection le Cardinal Achille Silvestrini, Préfet de la Congrégation pour les Eglises orientales et Président de la R.O.A.C.O, et je le remercie de l'hommage qu'il m'a adressé en votre nom. Je salue le Secrétaire, le Sous-Secrétaire, les collaborateurs du dicastère pour les Eglises orientales, ainsi que les responsables des Bureaux et vous tous ici présents.

Vos réunions semestrielles, qui ont vu le jour en 1968, sont devenues toujours plus structurées, et, enregistrant une participation et une coordination accrues, connaissent aujourd'hui une efficacité opérative davantage éprouvée. Je sais qu'au cours de ces dernières années, une attention particulière a été portée à la façon d'accomplir votre activité en étroite collaboration avec les Eglises orientales catholiques, au service desquelles vous entendez oeuvrer. Vous offrez ainsi une aide précieuse au Pape, auquel vous permettez d'exercer de façon plus diligente le ministère de présider «à la charité universelle».

Je vous remercie tous, chers Responsables des bureaux, pour l'oeuvre que vous accomplissez sous la direction de la Congrégation pour les Eglises orientales. A travers votre engagement, vous allégez des situations de nécessité, vous animez des initiatives socio-pastorales, vous portez secours aux pays déchirés par les conflits, vous venez à l'aide de nombreuses personnes touchées par la pauvreté et par tant d'autres formes de marginalisation.



2. Vous soutenez en particulier les communautés catholiques orientales dans leur oeuvre d'évangélisation. A l'approche du grand Jubilé, les croyants sont appelés à vivre de façon plus intense la foi, dans la conscience d'être «le ferment et presque l'âme de la société humaine, destinée à se renouveler dans le Christ et à se transformer en famille de Dieu» (Gaudium et spes
GS 41).

A côté du témoignage de la foi ne peut manquer le service de la charité: l'annonce de l'Evangile de l'espérance exige l'Evangile de la charité. Parmi les signes de l'itinéraire jubilaire, il y a la «Porte Sainte». L'indication de la porte rappelle la responsabilité de chaque croyant à traverser le seuil de la miséricorde (Incarnationis mysterium, n. 8). «Porte» et «seuil» sont des signes de la charité «qui ouvrent nos yeux aux besoins de ceux qui vivent dans la pauvreté et dans la marginalité [et crée] une nouvelle culture de solidarité et de coopération internationales, où tous - [...] assument leurs responsabilités à travers un modèle d'économie qui soit au service de chaque personne» (Ibid., n. 12).

A travers votre dévouement généreux aux nécessités des frères des Eglises d'Orient, toute la communauté ecclésiale exerce sa mission pastorale universelle. L'établissement d'une coresponsabilité effective aide à surmonter la tentation de particularismes égoïstes et fait sentir liés à un même et grand destin des peuples divers, dans lesquels l'Evangile a fait germer la confiance et l'espérance d'une nouvelle humanité.



3. Avec le Jubilé, se trouveront au centre de l'attention ecclésiale Jérusalem, Nazareth et Bethléem, ainsi que toute la Terre Sainte, dans laquelle le Fils de Dieu a pris notre chair de la Vierge Marie. Je sais que vous apportez déjà un soin particulier aux lieux saints et que vous suivez les angoisses et les préoccupations des communautés chrétiennes locales. Je vous invite surtout à ne pas décevoir les attentes des jeunes et à aider les familles chrétiennes à ne pas perdre l'espérance en ce qui concerne le foyer et le travail, même face aux difficultés socio-économiques et à un environnement précaire.

L'Eglise universelle, notamment à travers la traditionnelle Collecte pour la Terre Sainte, se rend attentive à l'égard des frères qui résident dans les lieux saints de la Rédemption. En recommandant vivement un tel acte d'amour envers les chrétiens de ces régions, je suis certain que votre effort visant à faire parvenir les aides aux régions les plus diverses du monde catholique trouvera un écho reconnaissant de la part des pasteurs et des fidèles des Eglises catholiques orientales et de la communauté latine de Terre Sainte.

Le clergé et les fidèles manifestent leur disponibilité à travailler ensemble, à planifier des interventions et des programmes pastoraux selon des priorités d'évangélisation, de charité et d'engagement éducatif reconnues. La formation de laïcs chrétiens mûrs et responsables, capables d'offrir un témoignage courageux de foi, est d'une importance primordiale.

Au cours de la joyeuse célébration jubilaire, les nombreux pèlerins qui visiteront les lieux saints de la Foi auront l'occasion non seulement de partager des moments de prière et de communion, mais également de connaître les oeuvres que vous suscitez pour aider la catéchèse, l'animation pastorale et l'action caritative.



4. Très chers frères et soeurs, je vous exprime ma reconnaissance pour la sollicitude avec laquelle vous répondez aux demandes qui vous parviennent. A travers moi, ce sont les communautés qui, grâce aux services de la Congrégation pour les Eglises orientales et à la R.O.A.C.O., voient encouragés leurs efforts en vue d'une reprise plus courageuse de l'élan apostolique, qui vous manifestent leur gratitude.

Que la Mère de Dieu, la Très Sainte Vierge Marie, qui, «à partir du jour de la conception virginale, a vécu pleinement sa maternité, la menant jusqu'à son couronnement sur le Calvaire au pied de la Croix» (Incarnationis mysterium, n. 14), vous confirme dans vos intentions et continue «à indiquer à tous la voie qui conduit au Fils».

Avec ces souhaits, je donne de tout coeur une Bénédiction apostolique particulière, que j'étends volontiers aux Communautés ecclésiales auxquelles vous appartenez, aux organismes que vous représentez et aux initiatives pour lesquelles vous oeuvrez inlassablement.





À LA DÉLÉGATION DU PATRIARCHE OECUMÉNIQUE DE CONSTANTINOPLE

28 juin 1999

142 Chers Frères dans le Christ,



1. "La puissance divine nous a fait don de tout ce qui est nécessaire à la vie et à la piété; elle nous a fait connaître Celui qui nous a appelés par sa gloire et par sa force" (
2P 1,3).

Cette profession de foi de la deuxième Epître de Pierre inspire aujourd'hui notre rencontre, chers frères, vous qui êtes envoyés par le Patriarche oecuménique, Sa Sainteté Bartholomaios Ier, à l'occasion de la fête des saints Pierre et Paul. Votre présence est pour moi et pour l'Eglise de Rome une source de joie, de cette joie profonde qui découle de la communion fraternelle. Je sais que ce même sentiment anime Sa Sainteté le Patriarche oecuménique lorsqu'il accueille chaque année au Phanar la délégation de l'Eglise de Rome pour la fête de saint André, le frère de Pierre, l’Apôtre qui, le premier, a entendu l’appel du Seigneur. Ces deux heureuses circonstances annuelles nous unissent et nous permettent de former une plus large assemblée de prière, qui implore du Seigneur et de son Esprit le don de l’unité.



2. Dieu nous a donné tout ce qui est nécessaire à la vie et à la piété. Nous avons reçu les dons divins par l'intermédiaire des Apôtres et nous sommes invités à les transmettre aux hommes, de génération en génération. Ensemble nous voulons rendre gloire à Dieu et ensemble nous voulons annoncer sa Parole et sa force agissante, capables de renouveler le monde, de le vivifier et de le nourrir. Ensemble, nous voulons faire connaître aux hommes Celui qui nous a appelés, pour qu’ils reçoivent ce qui est nécessaire à la vie et à la piété.

Dans la marche vers la pleine communion, une session plénière de la Commission mixte internationale pour le dialogue théologique était prévue pour ce printemps. La triste situation des Balkans, qui nous a causé tant de peine, nous a contraints de renvoyer cette rencontre, d'un commun accord, au mois de juin de l'année prochaine. Cela ne devrait pas toutefois peser sur la poursuite des recherches, ni affaiblir notre engagement, ni empêcher les relations fraternelles de se poursuivre et de s'approfondir. Le lourd héritage du passé et les tensions qui surgissent de temps à autre entre les peuples entravent parfois l'action des Églises qui vivent dans des contextes historiques et culturels dont elles sont obligées de tenir compte. Cependant, c'est Dieu lui-même qui nous convoque à l'unité. C'est le Christ qui a imploré le Père, pour que l'unité des siens soit un signe qui invite le monde à la foi, et qu'elle soit aussi les prémices d'un vrai renouveau et le gage de paix.

La recherche de l'unité et de la pleine communion doit être soutenue par la prière de tous. Que le Seigneur éclaire les pasteurs et les théologiens, afin qu'ils trouvent ensemble les voies de la sanctification et de l'unité, et qu'ils sachent les proposer à tous avec la force et la conviction qui provient de la certitude que “croire au Christ signifie vouloir l'unité; [que] vouloir l'unité signifie vouloir l'Eglise; [que] vouloir l'Eglise signifie vouloir la communion de grâce qui correspond au dessein du Père de toute l'éternité” (Ut unum sint UUS 9).



3. Le troisième millénaire est proche. Dieu nous a donné tout ce qui est nécessaire à la vie et à la piété, et le Jubilé nous offre l'occasion de faire monter vers le Seigneur une doxologie commune et universelle, ainsi que d'implorer ensemble son soutien, pour être capables d'annoncer d'une seule voix sa gloire et sa force agissante. C'est le désir ardent de l'Eglise catholique et de l'Evêque de Rome, afin que s'élève de manière unanime une grande prière d’action de grâce, avec le ferme propos de faire ensemble la volonté de Dieu. Sur la proposition de Sa Sainteté Bartholomaios Ier, j'ai demandé que l'on introduise dans le calendrier des célébrations romaines de l'an 2000 la proclamation d’un jour de prière et de jeûne jubilaire à la veille de la fête de la Transfiguration de notre Seigneur Jésus Christ. J'ai voulu montrer ainsi non seulement notre volonté de nous associer aux initiatives de nos frères dans la foi, mais aussi notre désir de les voir participer aux nôtres. C’est donc ensemble que nous devons rendre grâce au Seigneur, dans des sentiments de fraternité et d'engagement oecuménique.

4. Au terme de notre entretien, je vous prie, frères bien-aimés, d'assurer de mon affection dans le Seigneur Sa Sainteté Bartholomaios Ier et les membres de son Saint-Synode, lui exprimant ma très vive gratitude pour avoir envoyé une délégation guidée par le très estimé Métropolite d'Ephèse. Que le Seigneur bénisse toujours nos pas sur la voie de l'unité!



MESSAGE À SA SAINTETÉ KARÉKINE Ier, CATHOLICOS ET PATRIARCHE SUPRÊME DE TOUS LES ARMÉNIENS

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A Sa Sainteté Karékine Ier
Catholicos et Patriarche suprême de tous les Arméniens



1. Etant donné que ma visite officielle en Arménie et à l'Eglise apostolique arménienne a dû être reportée, et que les circonstances m'ont empêché de rencontre Sa Sainteté au terme de ma visite pastorale en Pologne, je vous écris pour vous assurer de ma proximité spirituelle en cette période difficile de maladie que vous vivez, offrant ainsi un témoignage touchant du Christ souffrant.

Je confie ce message au Cardinal Edward Idris Cassidy, Président du Conseil pontifical pour la Promotion de l'Unité des Chrétiens, qui vous transmettra personnellement, Sainteté, mes sentiments de profonde estime et d'affection fraternelle. Je me rappelle avec gratitude des deux visites que, en tant que Catholicos et Patriarche suprême de tous les Arméniens, vous m'avez rendues à Rome et je salue cordialement tous les membres du Saint-Synode, ainsi que toute l'Eglise apostolique arménienne, à laquelle j'adresse mes meilleurs voeux.



2. J'ai nourri le désir profond de me rendre en Arménie, où à l'ombre du Mont Ararat, la foi chrétienne s'est enracinée et a fleuri. Apportée par les apôtres Bartholomée et Thaddeus et nourrie également par la contribution des Eglises de Cappadoce, d'Edesse et d'Antioche, la foi chrétienne a formé la culture arménienne, tout comme d'autre part, la culture arménienne a contribué à enrichir la compréhension de la foi chrétienne à travers des expressions nouvelles et uniques. Ces jours-ci, la liturgie arménienne célèbre la mémoire des saints traducteurs, Sahak et Mashtots. La création d'un alphabet national par le moine Mashtots constitua une étape importante vers la formation d'une nouvelle culture chrétienne en Arménie.

Il y a quelques mois, j'ai eu l'honneur de me joindre à Sa Sainteté au Vatican pour inaugurer une exposition consacrée à l'histoire et à la culture arméniennes. Quel héritage magnifique, si profondément imprégné de spiritualité chrétienne! Les peuples qui suivent l'enseignement du Christ ne doivent pas renoncer à leur culture. Au contraire, le baptême leur confère une nouvelle lymphe pour nourrir leur génie national. Sainteté, j'attends avec impatience de pouvoir, lorsque les conditions me le permettront, me rendre compte en personne de la remarquable créativité qui a caractérisé et formé le peuple arménien tout au long des siècles.

Vivant à l'ombre du Mont Ararat, les Arméniens ont toujours été un peuple «frontalier». Tout au long de leur histoire, cette situation géographique a laissé une empreinte profonde en eux. En effet, en puisant à l'héritage missionnaire, spirituel, liturgique et culturel de toute la «oikoumene» chrétienne, l'Eglise apostolique arménienne a développé sa propre identité dans un esprit de grande ouverture envers les différentes traditions ecclésiales qui l'entourent. Au cours des siècles, elle s'est engagée dans des échanges directs et fructueux avec les traditions syriaque, byzantine et latine.

Le même esprit d'ouverture lui a permis d'aider et de soutenir les Eglises voisines lorsqu'elles durent faire face à des moments d'épreuve et d'adversité. La contribution actuelle de l'Eglise apostolique arménienne au mouvement oecuménique fait partie d'une longue tradition d'ouverture et d'échange fraternel.



3. Au sein du christianisme, l'Est et l'Ouest n'ont jamais été totalement isolés l'un de l'autre; il y a toujours eu des moments d'échange et des domaines d'enrichissement mutuel entre eux. Sainteté, je me joins à votre prière pour que l'héritage théologique et spirituel de nos nations respectives continue de nous enrichir mutuellement. Puissions-nous vivre en fidélité à l'enseignement de saint Paul: «Il y a, certes, diversité de dons spirituels, mais c'est le même Esprit; diversité de ministères, mais c'est le même Seigneur; diversité d'opérations, mais c'est le même Dieu qui opère tout en tous» (
1Co 12,4-6).

Même si de nombreux efforts oecuméniques au cours des siècles n'ont pas produit de résultats, l'esprit et les principes qui les ont inspirés n'ont perdu aucune de leur valeur. Comment pouvons-nous manquer de rappeler ici les efforts accomplis par le Catholicos Nerses Snorhali pour promouvoir la communion entre les Eglises arménienne et byzantine? Ses lettres à l'Empereur byzantin demeurent un témoignage oecuménique de premier ordre, qui peut aujourd'hui encore nous inspirer tandis que nous marchons vers le rétablissement de la pleine communion entre l'Eglise catholique et l'Eglise apostolique arménienne. La condition nécessaire à l'union, comme l'a déclaré le Catholicos Nerses Snorhali dans l'une de ses lettres, est la vérité de la foi dans la charité. Puissions-nous redécouvrir notre pleine communion précisément dans la vérité de la foi dans la charité!

Sainteté, tel est mon désir ainsi que le désir de toute l'Eglise catholique. La visite du Cardinal Cassidy en mon nom, afin de vous apporter ce message, veut être une confirmation de cet espoir.



4. Depuis le Concile Vatican II, l'Eglise catholique et l'Eglise apostolique arménienne ont développé des liens de communion nouveaux et plus profonds. Lorsque le Pape Paul VI et le Catholicos Vasken Ier échangèrent le baiser de la paix, ils scellèrent une nouvelle relation entre nos Eglises. C'était le 9 mai 1971. Et depuis ce jour mémorable, combien de rencontres heureuses et d'échanges nous ont rapprochés! Je désire vous remercier en particulier, Sainteté, pour tout ce que vous avez fait et ce que vous faites pour garantir que l'aspiration des chrétiens à la pleine unité se réalise. Depuis le moment où vous avez pris part, en tant qu'Observateur, au Concile Vatican II, vous avez constamment oeuvré en vue d'une communion plus complète entre nos Eglises. Lorsque vous avez visité Rome en décembre 1996, nous avons pu signer une Déclaration commune dans laquelle nous soulignions avec joie que «les récents développements des relations oecuméniques et que les discussions théologiques menées dans un esprit d'amour chrétien et de fraternité, ont dissipé de nombreux malentendus hérités des controverses et des désaccords du passé». Puissent ces heureux développements nous inspirer à continuer la recherche des voies les meilleures pour restaurer la pleine communion entre nos Eglises, afin que nous puissions témoigner ensemble de l'amour de Dieu.



5. Une question cruciale sur le chemin vers la pleine communion concerne le ministère de l'Evêque de Rome. Depuis mon élection au Siège de Pierre, j'ai tenté d'exercer ce ministère comme un service effectif à la communion de toutes les Eglises. Inspiré par la mission de Pierre, je me suis efforcé d'être un serviteur d'unité, et je continuerai de le faire. Mais l'exercice de ce service d'unité nous concerne tous. C'est pourquoi, dans ma Lettre encyclique Ut unum sint, j'ai demandé à l'Esprit Saint «de nous donner sa lumière et d'éclairer tous les pasteurs et théologiens de nos Eglises, afin que nous puissions chercher, évidemment ensemble, les formes dans lesquelles ce ministère pourra réaliser un service d'amour reconnu par les uns et par les autres» (UUS 95).

Puisse l'Esprit Saint nous aider à présent à concentrer nos efforts afin que, avec le plus grand tact, patience et amour possibles, nous puissions restaurer le tissu de l'Eglise indivise. Là où nous ne pouvons pas, à présent, trouver de voie pour aller de l'avant, l'avenir nous montrera probablement de nouveaux chemins. A cet égard, un engagement est souhaitable afin d'établir de nouvelles formes de coopération pastorale entre l'Eglise apostolique arménienne et l'Eglise catholique. Cette coopération pourrait nous aider à trouver des moyens nouveaux d'être plus proches et nous conduire progressivement à surmonter toute source de tension qui subsiste.



144 6. Sainteté, à la suite des grandes mutations sociales et politiques que l'Arménie a connues au cours des dix dernières années, un vaste domaine pour le renouveau de l'Eglise s'ouvre également à vous.

L'Eglise apostolique arménienne n'est pas la seule à devoir faire face à ce grand défi.

L'édification au centre de Yerevan d'une nouvelle cathédrale consacrée à saint Grégoire l'Illuminateur est un symbole puissant de la nouvelle énergie que votre Eglise connaît actuellement. Puisse le Seigneur bénir les nombreuses initiatives de l'Eglise apostolique arménienne et vous permettre de profiter de la solidarité de toutes les Eglises, auxquelles saint Paul a exhorté: «Portez les fardeaux les uns des autres et accomplissez ainsi la Loi du Christ» (
Ga 6,2).



7. Sainteté, vous avez parlé en plusieurs occasions de la force et de l'esprit d'endurance comme caractéristiques particulières du peuple arménien et de l'Eglise apostolique arménienne. Il est tout à fait significatif que partout en Arménie, l'on trouve des «khatchkar», ces immenses pierres représentant la Croix glorieuse du Sauveur. Tout au long de votre histoire, elles ont été gravées et placées partout où les Arméniens souhaitaient acclamer ou invoquer leur Rédempteur. Ces «khatchkar» sont devenues un symbole particulier des épreuves et des humiliations que le peuple arménien a dû endurer. Et combien a-t-il dû en endurer, en particulier au début de ce siècle!

La Croix du Christ a représenté votre expérience quotidienne. Mais comme la Vierge Marie au pied de la Croix, le peuple arménien est demeuré fidèle face à toutes les adversités. La Croix du Christ a été votre gloire et votre force. Je prie pour que partout en Arménie, l'aube d'un jour nouveau apporte une nouvelle signification aux symboles glorieux du «khatchkar», faisant resplendir encore plus la puissance pacifique et solennelle du Rédempteur. Puisse la Vierge Marie, Mère du Christ et Mère de l'Eglise, soutenir tous les fidèles dans leur confiance en Dieu et dans leur engagement au témoignage chrétien.

Sainteté, je demeure proche de vous dans la prière et je m'unis à vous pour rendre gloire et louange à Celui qui ne cesse de rassembler les siens dans l'unité: notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ!

De Rome, le 29 juin 1999, solennité des Apôtres Pierre et Paul


Juillet 1999



Discours 1999 135