Révélations de Sainte Brigitte de Suède 8057

Chapitre 57. le châtiment de Dieu est venu sur le royaume à cause de trois péchés, c’est pourquoi Dieu peut être apaisé en considération de trois autres biens

8057   La Mère de Dieu dit à l’épouse que le châtiment de Dieu est venu sur le royaume à cause de trois péchés, c’est pourquoi Dieu peut être apaisé en considération de trois autres biens :

1° que les peuples embrassent une vraie humilité et une modestie en leurs habits ;

2° par certaines aumônes ;

3° par processions et messes ici contenues.

  La Mère de Dieu parlait à l’épouse, lui disant : L’affliction et la punition de Dieu sont venues sur le royaume pour trois péchés, savoir, pour la superbe, l’incontinence et la cupidité : c’est pourquoi Dieu peut être apaisé par trois choses, afin que le temps de l’affliction soit abrégé et raccourci : 1° que tous embrassent une vraie humilité en leurs habits, ayant des robes honnêtes, non trop longues, comme celles des femmes, ni trop étroites, comme celles des bouffons, ni des découpures, taillades ou déchiquetures pleines de dépenses vaines et inutiles, d’autant que telles choses déplaisent à Dieu ; qu’ils portent aussi leur corps avec telle honnêteté qu’ils ne paraissent pas avancés en dehors par une vaine ostentation, ni plus courts ou plus grêles par le moyen de certaines ligatures, noeuds et semblables artifices, mais que tout soit pour le profit et pour l’honneur de Dieu. Que les femmes aussi quittent leurs robes de parade, qu’elles ont prises par superbe et vaine gloire, d’autant que le diable a suggéré aux femmes qui méprisent les anciennes et louables coutumes de leurs pays, un nouvel abus et des ornements indécents en la tête, aux pieds et aux autres membres, pour provoquer la luxure et irriter Dieu. Qu’on fasse des aumônes avec allégresse et gaîté de coeur. Qu’un prêtre, en chaque paroisse, une fois chaque mois, un an durant, chante une messe de la sainte Trinité, à laquelle se trouve tout le peuple confès et contrit, et qu’il jeûne ce jour, faisant de ferventes prières, pour que leurs péchés leur soient pardonnés et que l’ire de Dieu soit apaisée.

p 195

  Que semblablement les évêques, chaque mois, fassent par eux-mêmes ou par autres personnes, des processions solennelles en leurs églises cathédrales, célébrant la messe de la sainte Trinité, et qu’ils assemblent les pauvres et leurs lavent humblement les pieds.


Chapitre 58. L’empereur céleste Jésus-Christ, assis sur son tribunal, reprend rudement les rois et les princes de la terre et tous les états, de leur ingratitude

8058   L’empereur céleste Jésus-Christ, assis sur son tribunal, reprend rudement les rois et les princes de la terre et tous les états, de leur ingratitude, y ajoutant la menace de la terrible sentence de son courroux ; toutefois il les avertit de se convertir, et qu’il les recevra avec miséricorde, comme fera aussi son Père.

  Je vis un grand palais semblable au ciel serein et sans nuage, dans lequel était l’armée céleste, qui paraissait plus nombreuse que les atomes du soleil, etc. (Cherchez au Livre VII, Chap. 30.)


p 196

Chapitre 59.

8059   D’un roi indigne et de son jugement.

  Le Fils de Dieu parle : Parce que ce roi ne cherche pas…

  (Cherchez au Livre des Révél. Extrav. XXVII. )

Chapitre 60. De six rois iniques, etc.

8060   Le Fils de Dieu parle : Je t’ai ci-devant fait voir cinq roi… (Cherchez chap. 78. )

Chapitre 61. Un roi était averti de se corriger, autrement qu’il serait privé de son royaume\i.

8061   La Vierge Marie, Mère de Dieu, parlait à l’épouse de Jésus-Christ, disant : Je suis celle vers laquelle l’ange, etc. (Cherchez au Livre des Révél. extrav. Chapit. 80.)

  Fin p 196



Livre IX



Chapitre 1 De l’exposition des degrés de l’humilité.

9001 p 197

  De l’exposition des degrés de l’humilité.

  Notre-Seigneur parle : Celui qui a un beau vase et assure q’en icelui se trouvent des parfums aromatiques, qui le croira, s’il ne les fait respirer et s’il n’en montre les espèces et les vertus ? De même en est-il des vertus. Un certain prêchait et disait que l’humilité était une vertu. Que profite cela à l’auditeur, s’il ne lui en montre la racine, les degrés, les manières de l’avoir, de la tenir et pratiquer ? Mais d’autant que l’humilité est une vertu parfaite que j’ai montrée par mon exemple, votre confesseur doit en peu de paroles exposer et expliquer les degrés d’icelle : il les a appris en la règle de mon bien-aimé Benoît, afin que les filles de ma Mère apprennent l’origine et la source des vertus, sur laquelle elles doivent établir leur édifice spirituel.


p 198

Chapitre 2 De ce qui est nécessaire aux filles de Saint-Sauveur.

9002 De ce qui est nécessaire aux filles de Saint-Sauveur.

  Le Fils de Dieu parle, disant : Pourquoi ce Frère ignore-t-il ce qu’il faut faire et ce qu’il faut bâtir pour ces filles ? Ne lui ai-je pas montré par vous que mon fidèle serviteur Benoît eut son corps comme un sac, et quel doit être l’habit d’un Bénédictin ? Qu’il donne donc, à cause des infirmes, tout ce qui sera utile et nécessaire, mais rien de superflu. Il faudra aussi tolérer ceux auxquels j’aurai donné la grâce d’une plus grande abstinence, et il faudra aussi modérer le froid par les habits extérieurs.

Chapitre 3 De l’office devin et du chant.

9003   De l’office devin et du chant.

p 199

  L’Ecriture, que vous appelez Bible et que nous appelons Ecriture dorée, dit que la ville qui est assiégée par quelque grande puissance, le pauvre l’affranchira par sa sapience, duquel pauvre pas un ne se souviendra. Cette ville est la créature humaine, que le diable a bloquée en carré, d’autant qu’il l’a assiégée par quatre sortes de péchés : par rébellion aux commandements divins ; par la transgression de la loi naturelle ; par la méchant cupidité et par l’obstination de l’esprit. Ma Mère, dit Jésus-Christ, a délivré en quelque manière cette créature, quand elle a résigné sa volonté en mes mains et voulut souffrir toute sorte de tribulations, afin que les âmes fussent sauvées, car c’est celle-là qui est la vraie sagesse de soumettre sa volonté à la volonté de Dieu, et de se plaire à pâtir pour l’amour de Dieu. A raison donc de cette volonté, moi, Fils de Dieu, j’ai été fais homme en la Sainte Vierge, dont le coeur était comme mon coeur ; et partant, je puis dire que quasi ma Mère et moi avons sauvé l’homme comme d’un coeur, moi en pâtissant de coeur et en ma chair, et elle, par douleur de coeur et d’amour.

Cette Vierge était vraiment pauvre ; elle ne désirait rien des richesses du monde ; son esprit n’adhéra jamais au moindre péché. Quelques-uns sont pauvres de biens, mais les désirent en leur esprit, étant pleins de cupidité et de superbe. Ceux-là ne sont pas les pauvres marqués en mon Evangile. Les autres abondent en biens, mais sont pauvres d’esprit. Ceux-là considèrent qu’ils ne sont que poudre et cendre, qui mourront bientôt, qui désirent d’être avec Dieu, qui possèdent seulement les richesses pour leur nécessité et utilité du prochain. Ceux-là sont vraiment pauvres et riches en Dieu, entre lesquels était ma Mère. Ma Mère, sa sagesse et sa pauvreté étaient quasi oubliées. Quelques-uns la louaient de bouche, point de coeur, et moins imitaient-ils les pas de sa charité.

p 200

  L’honneur de Dieu est chanté et célébré sept fois en l’Eglise, selon la louable coutume des Pères anciens : partant, je veux que les Frères chantent les heures aux heures rédigées et ordonnées, et qu’après, les Soeurs fassent leur office un peu plus lentement.

Ce nombre sept ne s’accomplit pas selon le cours du soleil, mais selon l’ordre qu’on y a mis, et partant, j’ordonne, moi qui ai dicté la règle, que les païens sachent de quel honneur j’ai préféré ma Mère ; et d’autant qu’elle est la principale patronne de ce monastère de Saint-Sauveur, par laquelle je veux être propice aux défaillants, et afin que l’Ecriture soit accomplie, qui dit : Je louerai Dieu en tout temps et en toute ma vie : donc, que cette singulière grâce ne me soit point refusée, car le bien particulier ne préjudicie en rien au bien commun ; il ne faut pas pourtant mépriser la coutume louable des Pères, mais il me plaît qu’en cette maison, on dise plutôt les heures de la Sainte Vierge, ma Mère, et qu’après on sonne les heures du jour, selon les heures qu’on a ordonnées.


Chapitre 4. Du chant des Filles de Saint-Sauveur.

9004 Du chant des Filles de Saint-Sauveur.
p 201

  Le Fils de Dieu parle et dit : N’avez-vous pas lu que Marie, soeur de Moïse, est sortie avec les vierges et autres femmes, chantant mélodieusement, avec des clochettes et des cymbales un cantique de joie à Notre-Seigneur, le bien signalé que Dieu leur avait fait en la mer Rouge ? De même les filles de ma Mère sortiront de la mer Rouge, c’est-à-dire, de la cupidité et complaisance mondaine, ayant en leurs mains les oeuvres et les clochettes, c’est-à-dire, l’abstinence de la volupté charnelle et les cymbales d’une louange sonore, le chant desquelles ne sera pas lâche, ni trop entrecoupé, ni dissolu, mais honnête, grave, uniforme, en tout humble, et que leur chant imite celui des Chartreux, la psalmodie desquels est douce à l’esprit, et marque plus d’humilité et de dévotion que quelque ostentation, car l’esprit n’est pas sans coulpe,quand la note plaît plus à celui qui chante que ce qu’il chante, et il est entièrement abominable devant Dieu, quand on élève plus sa voix pour l’amour des auditeurs que pour l’amour de Dieu.

Chapitre 5 Combien plut à Dieu le docteur Pierre, en célébrant la sainte messe et en enseignant le chant aux filles\i.

9005 Combien plut à Dieu le docteur Pierre, en célébrant la sainte messe et en enseignant le chant aux filles.

  Un jour que le docteur Pierre d’heureuse mémoire, confesseur de sainte Brigitte, célébrait la messe en la chapelle devant elle, lors Dieu le Père dit à l’épouse de son Fils : Bien que peu de personnes soient assistantes à cette messe, néanmoins tout le ciel s’en réjouit, et toutes les âmes du purgatoire sont soulagées par elle. Dites à ce prêtre qu’il fasse réciter cette hymne de l’épouse, l’appliquant au Fils, comme lui-même l’a mis, car puisque la sainte Eglise appelle toutes les âmes ses épouses, beaucoup plus doit être appelée son épouse l’âme de la Sainte Vierge.


p 202

Chapitre 6 Combien le confesseur de sainte Brigitte était aimé de Dieu. Du chant des filles de Saint-Sauveur\i.

9006 Combien le confesseur de sainte Brigitte était aimé de Dieu. Du chant des filles de Saint-Sauveur.

  La Mère de Dieu parle à l’épouse de Jésus-Christ, disant : Votre maître a une blessure reçue d’un qui parlais contre Dieu ; et d’autant qu’il l’a reçue par amour, ne la guérissons point, mais mettons-y un emplâtre pour la dilater et l’agrandir. Dites-lui encore que, puisqu’il aime la sainte Trinité de tout son coeur et de toute sa force, je l’ai tellement avancé en l’amour de la sainte Trinité qu’il est un des prêtres que Dieu aime chèrement : c’est pour cela aussi que lui a été donnée la grâce de composer et de faire apprendre le chant mélodieux des filles de Saint-Sauveur, qui sert à la consolation de plusieurs.

 

Chapitre 7. Combien le chant des filles de Saint-Sauveur est agréable à Dieu.

9007   (Voyez Livre IV, Chap. 33.)


Chapitre 8 Du commandement que sainte Brigitte eut d’aller à Rome.

9008 Du commandement que sainte Brigitte eut d’aller à Rome.
p 203

  Notre-Seigneur Jésus-Christ parle à son épouse étant au monastère d’Alvastre, lui disant : Allez à Rome, et demeurez-y jusques à ce que vous voyiez le pape et l’empereur, et vous leur direz de ma part les paroles que je vous inspirerai.

Sainte Brigitte vint donc à Rome, âgée de quarante deux ans, et elle demeura là, selon que Dieu le lui avait commandé, quinze ans avant que le pape Urbain V et l’empereur Charles Boème vînssent, auxquels elle offrit et présenta les révélations pour la réformation de l’Eglise et de la règle. Pendant le séjour de quinze ans qu’elle fit à Rome, elle eut plusieurs révélations touchant la ville de Rome, de laquelle Notre-Seigneur reprenait les excès, et les péchés des citoyens et des habitants d’icelle, avec grande menace d’une horrible vengeance.

Ces révélations étant parvenues à la connaissance desdits habitants de ladite ville, ils eurent une haine mortelle contre sainte Brigitte, d’où vient que quelques-uns la menaçaient de la brûler toute vive ; les autres l’accusaient d’être une fausse pythonisse et sorcière. Mais sainte Brigitte souffrait patiemment toutes ces menaces ; elle craignait seulement que les parents et alliés qui étaient à Rome, étant scandalisés sur ce fait, ne manquassent à eux-mêmes. Elle délibéra donc de céder un peu à la fureur des malins ; elle ne pensait pas pourtant rien remédier sur ce sujet, sans la grâce spéciale de Dieu, car depuis vingt-huit ans, elle n’avait remué sans le commandement de Dieu.

p 204

  Sainte Brigitte, demeurant en l’oraison, conseille sur cela. Notre-Seigneur lui dit : Vous voulez savoir ma volonté, savoir, si vous devez demeurer à Rome, où plusieurs envieux conspirent votre mort, ou bien s’il faut céder à leur malice quelque temps. Je vous réponds que, quand vous m’avez, vous ne devez rien craindre. Je retiendrai leur impétuosité avec le bras de ma puissance, et ils ne pourront vous nuire ; et bien que mes ennemis m’aient crucifié, c’est par ma permission ; mais ils ne pourront vous nuire en manière quelconque.

Lors soudain la Sainte Vierge lui apparut et lui dit : Mon Fils est puissant par-dessus les hommes, les démons et toutes les créatures, et retient invisiblement l’effort de leur malice. Je serai le bouclier de vous et des vôtres, et vous protégerai de l’incursion des ennemis, tant corporels que spirituels.

Partant, je veux que vous et votre famille vous vous assembliez tous les soirs pour chanter l’hymne Ave, maris Stella, et moi je vous secourrai en toutes nécessités. De là vient que son susdit confesseur et sa fille sainte Catherine instituèrent que cette hymne serait chantée en leur ordre, disant que sainte Brigitte l’avais dit par le commandement que la Sainte Vierge lui en avait fait, car la même Vierge avait promis à cet ordre, qui lui avait été dédié par son Fils, de le conserver par une faveur spéciale et de le remplir de bénédictions.


Chapitre 9. Des sept psaumes qu’on devait dire tous les vendredis.

9009   Le Fils de Dieu parle, disant que, tous les vendredis, les Soeurs de Saint-Sauveur doivent dire les sept psaumes, en faisant la procession, lesquels étant finis, elles entreront dans le choeur et diront les litanies étant à genoux, et de même les Frères par leur cloître.


p 205

Chapitre 10. Jésus-Christ montre pourquoi on ne doit pas avoir d’orgues dans les monastères de l’ordre de Saint-Sauveur\i.

9010   Jésus-Christ parle : Les fils des Israélites, étant d’un esprit grossier et marchant sous l’ombre de la loi, avaient plusieurs choses qui les excitaient à la dévotion, car ils avaient des trompettes, des orgues et des cistres, par lesquels ils étaient provoqués à louer Dieu. Ils avaient aussi des cérémonies et des commandements qui leur montraient comment ils devaient servir Dieu. Ils reçurent encore la loi et jugement par lesquels ils évitaient le mal et suivaient le bien. Mais d’autant que maintenant la vérité est venue, qui avait été auparavant signifiée par les figures, à savoir, moi, qui suis vrai Dieu, il est raisonnable qu’on me serve en vérité et d ‘affection. Donc, bien qu’il soit bon et doux d’entendre les instruments de musique, et que ce ne soit pas contre les bonnes moeurs, je ne veux pas toutefois qu’on en ait dans le monastère dédié à l’honneur de ma Mère, d’autant qu’en icelui on doit voir le temps bien employé ; les chants doivent y être très graves, les entendements purs ; le silence doit y être observé ; les discours doivent n’être que sur la parole de Dieu, et surtout avec une vraie humilité et une prompte obéissante.


p 206

Chapitre 11 comment l’abbesse peut parler durant peu de temps avec les ouvriers

9011   Touchant les chapitres 6, 7, et 8 de la règle de Saint-Sauveur, Jésus-Christ enseigne comment l’abbesse peut parler durant peu de temps avec les ouvriers et autres personnes de travail dans le monastère, et pour quelles causes l’abbesse, les religieuses et le confesseur, ou les religieux, peuvent sortir du cloître.

  Le Fils de Dieu parle : L’abbesse pourra parler dans le monastère, mais brièvement, avec les ouvriers, lorsqu’il faudra, ou réparer les ruines, ou faire quelque chose de nouveau ; mais autrement, elle ne peut parler dans le monastère avec les séculiers, si ce n’est aux grilles ; ni elle ne pourra jamais sortir, elle ou quelqu’une des Soeurs, si ce n’est, peut-être, lorsqu’il faudra bâtir un nouveau monastère. Pour lors, l’abbesse, le confesseur et le couvent enverront des religieuses anciennes. Quand au confesseur, il pourra sortir avec un compagnon pour la constitution de la règle et pour instituer des disciplines régulières avec ses supérieurs, comme encore pour faire cesser le scandale et l’infamie du monastère, s’il y en a (ce qui n’arrive pas), ou pour réfuter les hérétiques, s’il en est besoin. Il pourra encore sortir, s’il en est requis par les évêques, pour l’utilité de la sainte Eglise, ou lorsque surviennent telles affaires auxquelles les procureurs du monastère ne peuvent convenablement mettre ordre.


p 207

Chapitre 12 doctrine pour laquelle l’abbesse est instruite avec ses soeurs, et le confesseur avec les Frères

9012 Dévote doctrine pour laquelle l’abbesse est instruite avec ses soeurs, et le confesseur avec les Frères de l’ordre de Saint-Sauveur. Comment on doit discrètement se comporter pendant le temps qui est entre les heures des jours de fête.

  Aux jours de fête, l’abbesse doit montrer aux Soeurs l’état de la maison, des revenus et des affaires qui peuvent survenir, et leur lire quelque chapitre de la règle. Que là où elle en aura quitté la lecture, elle recommence là au jour de fête suivant, jusqu’à tant qu’elle soit parachevée, afin qu’aucune ne prenne pour excuse l’ignorance de la règle. Qu’elle ait et tienne aussi avec elles des discours d’édification et des admonitions des excès qu’elle voit commettre : Après cela, qu’elle leur permette de parler entre elles en particulier. Semblablement aussi que les prêtres s’adonnent à la lecture, à la conférence et à l’étude, comme les autres jours, si ce n’est peut-être que les confesseurs les demandent pour donner leur conseil sur l’état de la maison et des affaires qui se présentent ; autrement, s’ils veulent, avec la permission du confesseur, ils pourront se promener seuls.


p 208

Chapitre 13 En quelle façon il est permis à ceux qui jeûnent au pain et à l’eau, de manger des légumes.

9013   Touchant le chapitre 9 de la règle de Saint-Sauveur, c’est-à-dire, du jeûne. Jésus-Christ dit que l’humilité et la discrétion lui sont plus agréables qu’un jeûne indiscret. En quelle façon il est permis à ceux qui jeûnent au pain et à l’eau, de manger des légumes.

  Le Fils de Dieu parle : Bien que ma mère ait pratiqué une très parfaite abstinence, toutefois elle a gouverné son corps avec autant de discrétion qu’il n’était débilité par aucune superfluité et aucune violence. Et bien que les pharisiens et encore plusieurs religieux n’usent point du vin, pour cela toutefois ils ne viennent pas à moi, parce qu’ils n’ont point le fondement de continence, savoir, l’humilité et la discrétion : c’est pourquoi lorsqu’on propose des choses hautes et sublimes, ou qu’on les commande, elles doivent être pesées et examinées par ceux qui ont une conscience timorée, afin qu’ils ne fassent pas tout ce qu’ils voudraient, mais ce qui est expédient et licite ; car voici que jeûner au pain et à l’eau est un bien à ceux qui sont pleins de santé, mais n’est pas un souverain bien. Le souverain bien est la charité, sans laquelle il n’y a point de salut. Toutefois, sans le jeûne au pain et à l’eau, chacun se peut sauver, pourvu qu’il ait la perfection de la foi, la discrétion et une juste cause. Donc, parce que les saisons sont changées, les lieux froids, les âmes tièdes, les vases fragiles, c’est pourquoi celui qui a soin des palmiers pourra adoucir ce qui est âpre et arroser ce qui est aride. Cela se doit ainsi entendre qu’il est permis à ceux qui jeûnent au pain et à l’eau de pouvoir manger des légumes et boire de l’eau cuite, parce que le pain est sec et aride sans légumes, et l’eau est âpre et froide, si elle n’est cuite comme la tisane ou qu’elle soit passée dans de l’orge.

p 209

Chapitre 14 distinction des trois degrés de péché

9014   Jésus-Christ, faisant distinction des trois degrés de péché, dit qu’il avait toujours devant les yeux toute sorte de charité, humilité et discrétion en le nouvelle règle qu’il a lui-même dictée, savoir, de l’ordre de Saint-Sauveur.

  Le Fils de Dieu parle : La loi de Dieu est faite, ou pour réprimer l’audace de ceux qui la transgressent, ou pour restreindre l’impudence des lascifs, ou bien pour l’intelligence de ce qu’il faut faire ou omettre. Donc, si quelqu’un pêche par infirmité en chaque loi, et par nécessité importante, il en est dispensé ; et celui qui, étant marri et pêche sans délibération, est jugé plus légèrement ; au contraire, celui-là qui pêche à dessein ou par habitude, n’est aucunement excusable. Il en est de même de mes disciples, parce que, quand j’étais encore parmi les hommes, ceux qui maniaient des grains le jour du sabbat et en mangeaient, étaient jugés par les hypocrites d’entre les Juifs, lesquels j’ai excusés à cause de leur simplicité et de leur infirmité que je connaissais, alléguant l’exemple de David, qui étant en chemin, pressé de la nécessité, mangea les pains des prêtres, ce qui était défendu aux laïques.
p 210

  Or, maintenant, moi qui suis Dieu, j’ai envoyé à mes amis une nouvelle règle que j’ai faite, en laquelle il faut considérer la charité, l’humilité et la discrétion. Il faut aussi avoir pitié des malades et sains, parce que la loi qui n’est pas accomplie en charité, humilité et discrétion, ne mérite pas louange. Partant, bien que j’ai dit en la règle que tous les sains doivent jeûner aux temps fixés, pourtant on ne leur doit pas refuser dispense, si quelque soudain changement et quelque infirmité leur arrivent, ou que le temps du travail requière compassion, ce qui doit être au pouvoir de l’abbesse et du confesseur, et en l’administration de celui qui a la charge d’ordonner toutes fois et quantes qu’il sera nécessaire à ceux qui sont en santé, de rompre leur jeûne et prendre la récréation. Il faut donc dispenser ceux qui manquent légèrement à cause de quelque soudaine infirmité, ou qui sont harassés par de trop grand travail.


Chapitre 15 il ne faut pas défendre les bains

9015   Qu’il ne faut pas défendre les bains, même aux personnes qui sont en santé, en l’ordre de Saint-Sauveur, pour certaine causes et pour certains temps.

  Le Fils de Dieu parle : Les docteurs et les prêtres de la loi blâmaient mes disciples de ce qu’ils avaient mangé sans avoir lavé leurs mains. Je leur répondis que le lavement de la chair ne profite de rien là ou le coeur est corrompu et sale. Donc, le coeur pur et net est agréable à Dieu, à quoi le lavement ne sert point d’empêchement, et le soin de la chair, s’il y a cause juste et raisonnable : c’est pourquoi on ne doit pas défendre les bains, même à ceux qui se portent bien, en certaine causes et en certain temps, parce qu’il faut conserver la santé, afin qu’il ne soit pas débiles. Qu’on use donc des bains, quand il en sera besoin, pour les malades, mais pour les sains, une fois le mois ou tous les quinze jours, si la santé le requiert.

p 211

Chapitre 16 du moyen de la probation, réception et consécration des personnes

9016   Touchant le chapitre 10 de la règle de Saint-Sauveur, savoir, du moyen de la probation, réception et consécration des personnes.

  Le Fils de Dieu parle : Je vous ai dit ce qu’il faut garder avant l’an de probation. Vous devez considérer ceci touchant les personnes desquelles la vie et conversation sont moins connues : c’est pourquoi je vous permet que si quelqu’un, désirant être admis en la religion, est de telle autorité et de telle gravité qu’on ne craigne pas cela vienne d’une inconstance ou d’une mutation, et qu’il sait discerner les tentations de la chair et les embûches du diable, et que son âge et sa vie soit notoires, celui-là peut être reçu en la religion, Demian expiré ; qu’on lui expose et qu’on lui montre tellement l’austérité de la règle et les statuts d’icelle, afin qu’il sache pourquoi il est venu et ce qu’il doit faire.
p 212

Chapitre 17 Se disposer et comporter en l’observance de la règle

9017   Belle doctrine par laquelle les vierges, et même ceux qui veulent faire profession de la règle de Saint-Sauveur, se doivent disposer et comporter en l’observance de la règle.

  Celles qui désirent être épouses de Dieu sont obligées à travailler avec plus d’ardeur pour accomplir la volonté de Dieu que pour leurs usages ou pour accomplir la leur. Elles doivent être comme des épouses qui sont éloignées de leurs possessions et sont en chemin, et doivent aller loger au patrimoine de leur époux. Leur possession et la liberté du corps, et la conversation mondaine avec ceux-là qui leur appartiennent, desquels elles doivent se séparer de toute leur affection. Elles doivent être revêtues des vêtements nuptiaux, savoir, d’ humilité, de patience et d’obéissance, qui servent d’ornement à l’âme et la rendent belle devant Dieu. Elles doivent se lever et marcher, afin qu’elles paraissent agréables devant leur époux et devant ceux qui ont été invités par lui. Oh ! avec quelle honnêteté, docilité et modestie il faut qu’elles marchent devant ceux qui les regardent! Oh ! de quelles moeurs elles doivent être accomplies, vu que ceux qui sont conviés aux noces les regardent, qui sont la Vierge Marie, Mère de Dieu, avec tous les citoyens célestes ! et l’Epoux (qui les désire), est le vrai Dieu, Roi des rois, Seigneur des seigneurs, et il a pouvoir sur toutes choses créées ; car pour lors, elles se sont levées, quand elles ont fait leur confession avec discrétion et avec une vraie humilité et vraie volonté de ne pécher plus à l’avenir ; mais c’est pour lors qu’elles ont marché, quand elles ont quitté de leur bon gré toutes choses mondaines, ne s’en souciant aucunement, ni même de leur propre volonté ; et pour lors, elles sont consacrées avec leur époux, quand elles promettent de garder inviolablement la règle et leur profession : c’est lorsqu’elles marchent sûrement vers le lit de leurs époux, quand elles observent la règle et leur profession autant qu’elles pourront.

p 213

  La profession étant faite, lors commence le premier jour des noces, et il finit alors que l’âme sortira du corps : c’est pourquoi c’est pourquoi il faut qu’elles passent ce jour-là avec trois choses, savoir : avec une crainte discrète, avec une dévote joie et une ardente charité.

Chapitre 18 de l’office des religieux, et du nombre

9018   Touchant le chapitre 12 de la règle de Saint-Sauveur, qui est de l’office des religieux, et du nombre, tant des religieuses que des religieux.

p 214

  Jésus-Christ, Fils de Dieu, parle : l’Ecriture toute d’or dit que quelques-uns offraient au désert de l’or, de l’argent et des pierres précieuses, pour l’ornement du tabernacle ; les autres offraient des peaux et du poil de chèvre pour faire des tentes, et tout ce qu’on offrait était agréable à Dieu, selon la disposition et volonté de celui qui l’offrait. Ainsi en est-il des oraisons et lectures des fidèles : quelques-uns,séparés de l’amour du monde, offrent à Dieu un coeur très pur comme de l’or purifié ;les autres, embrasés de l’esprit de la divine sagesse, profèrent et chantent des paroles de la divine sagesse, qui sont comme de l’or épuré et éprouvé. Il y en a d’autres qui, sachant à peine le Pater noster, offrent toutefois à Dieu avec un coeur contrit, avec des actes de pénitence et une foi parfaite, le peu qu’ils savent et peuvent, comme poil de chèvre. Les prières de tous ceux-ci me sont agréables, pourvu que l’intention et la volonté soient bonnes. Partant, parce qu’il est difficile aux prêtres qui sont avancés en âge de délaisser ce qu’ils ont accoutumé, et s’accoutumer à de nouvelles choses, il leur est permis de dire l’office de l’église cathédrale au diocèse où le monastère est fondé ; mais les religieuses ne changeront aucunement leur office institué.

Chapitre 19 il est difficile de trouver des hommes qui se veulent assujettir au gouvernement d’une femme

9019   Sainte Brigitte, étant en souci pour les personnes qui devaient entrer en l’ordre de Saint-Sauveur, entendit de la Sainte Vierge qu’elles étaient provenues de Dieu, et que quelques-unes de celles-là se rendaient rebelles aux paroles de Jésus-Christ.

  L’épouse de Jésus-Christ, étant une fois en oraison, eut une pensée sur l’état de la future religion, comment se pourraient trouver tant de personnes de l’un et l’autre sexe. La Mère de Dieu étant apparue, lui dit : Ma fille, tu es en peine pour des personnes qui, à l’avenir, entreront en cette religion, savoir, que mon Fils, qui en personne a dicté cette règle, prenait mille personnes pour chacune de celles que tu sais, que tu espères entrer en cette religion.

p 215

  L’épouse lui répondit : Madame, il est aisé de trouver des femmes qui se soumettent à l’ordre, mais il est difficile de trouver des hommes qui se veulent assujettir au gouvernement d’une femme, vu que la science de plusieurs religieux et le monde les flattent de leurs honneurs, richesses et contentements.

La Vierge lui dit encore : Et ceux-là viendront qui recevront avec allégresse les paroles de mon Fils, et se serviront d’icelles pour le salut de leur âme et pour la gloire de Dieu. Il en viendra d’autres qui ne seront pas moins contraires aux paroles de mon Fils et à la simple règle qui t’a été révélée, que ceux-là furent incrédules qui furent contraires aux paroles de Dieu et de Moïse dans le désert, interprétant les paroles de Dieu selon leur volonté. Toutefois sache que les paroles de cette règle s’accommoderont pour le profit et fructifieront jusqu’à la fin, et ne sois, ma fille, en soin des personnes qui entreront dans cette religion, car mon Fils connaît ceux qu’il appellera et avec ordre selon sa volonté, pour le besoin de ce monastère, bien que quelques-uns d’iceux seront rebelles aux paroles de mon Fils, faisant peu de cas présomptueusement de la simplicité des paroles, suivant leur fantaisie mondaine, comme les sages du monde présument faire plus de cas quelquefois de leurs opinions que de la volonté divine, qui corrompent l’entendement et font tomber en erreur.
p 216


Chapitre 20 Touchant le chapitre 14 de la règle de Saint-Sauveur, savoir, de l’élection de l’abbesse, etc.

9020 Le Fils de Dieu, faisant distinction de trois sortes d’hommes qui lui sont grandement agréables, veut que la religieuse qui ne provient pas d’un mariage légitime, ne soit pas élue pour abbesse.

  Le Fils de Dieu parle : Bien que le fils ne doive porter l’iniquité du père, toutefois, parce qu’il y a trois ordres qui me plaisent grandement, à savoir, la virginité, la viduité et le mariage, c’est pourquoi ces trois ordres doivent être préférés et honorés par-dessus tous, tant parce qu’ils portent les marques d’une grande pureté et honnêteté, que parce que ma Mère les a en elle-même accomplis, car elle a été vierge très pure en l’enfantement, après et avant l’enfantement, et elle a été vraiment mère et vierge ; elle a été aussi veuve après mon ascension, étant privée de ma présence corporelle. Partant, quand il sera question d’élire l’abbesse, qu’on en élise une qui soit de quelqu’un de ces ordres, autrement de quelque vie continente et suréminente qu’elle soit, elle ne peut être élue pour abbesse.


p 217


Révélations de Sainte Brigitte de Suède 8057