Catéchèses S. J-Paul II 41089

Fête de saint François d’Assise Mercredi 4 octobre 1989

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« Donne-nous la paix, Seigneur : en toi nous espérons. »
(Refrain du psaume responsorial.)

1. Cette invocation qui, non seulement au cours de cette rencontre de prière mais bien des fois — et surtout du Liban —, s’est élevée avec une grande espérance vers le Dieu de toute bonté, reçoit du Rédempteur une force nouvelle: « Que votre coeur ne se trouble pas. N’ayez pas peur… Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix. » (
Jn 14,27)

Dans la confiance sereine que le Seigneur accomplira ses promesses d’une manière toujours supérieure à nos attentes, je désire le supplier avec vous, chers frères et soeurs, de nous combler, nous les croyants, comme tous les citoyens du monde, nos frères en humanité, et les responsables du destin des nations et, tout spécialement, nos frères libanais, de sa bénédiction de paix, d’amour et de grâce.

Nos frères du Liban vivent depuis de nombreuses années au milieu d’une tempête de violences et de peurs. J’entends encore les supplications qui nous parviennent depuis les refuges souterrains de Beyrouth, comme l’appel au secours des jeunes Libanais sur le monte del Gozo, en Espagne, devant des centaines de milliers de jeunes de leur âge.

La grâce du Seigneur, en même temps que ces appels, fera que soit entendu l’impératif qui monte de notre conscience : nous ne pouvons pas demeurer indifférents et inactifs ! Dieu a inscrit au coeur de chacun de nous une loi qui nous met au service de la cause de l’homme et de sa convivance sociale dans la paix et la dignité, dans la liberté et la vérité.

2. La prière est le recours que Dieu nous offre. Unis à nos frères libanais, chrétiens et musulmans, avec décision et humilité, faisons usage de cette prière et demandons : « Père très saint, notre Père, Créateur et Rédempteur, notre Consolateur et notre Sauveur » (saint François, Paraphrase du Notre Père, dans Fonti Francescane, p. 141), sois « proche de ceux qui sont humiliés et opprimés » « pour ranimer leur coeur » (Is 49,8).

C’est un réconfort pour tous de savoir que Dieu est vraiment aux côtés de l’homme. Car le Seigneur dit : « Au temps de la miséricorde, je l’ai entendu ; au jour du salut, je te suis venu en aide… pour relever le pays. » (Is 49,8)

Et il est également réconfortant de savoir que l’homme a lui aussi la capacité de se tenir aux côtés de son frère, d’entendre son appel à l’aide et au secours.

Je suis certain que Dieu tout-puissant écoute nos supplications et j’espère aussi fermement que les responsables des nations sauront répondre comme il convient à l’appel des Libanais et de tous les croyants qui, avec nous, n’ont d’autres arguments que leur prière fervente et leur désir sincère d’apporter leur contribution concrète, afin que le drame du Liban prenne fin le plus vite possible.

3. Chers frères et soeurs, nous sommes certains que Dieu n’est pas indifférent à la souffrance et à la violence qui, trop souvent, accablent les hommes. Ce Père provident ne les abandonne pas ; il les exhorte à abandonner les ténèbres et à suivre la direction qu’il leur indique pour les mener là où la vie se déroule dans la lumière, là où il n’y a plus de crainte (cf. Is Is 49,9-10). L’Auteur de la paix unit au don du salut celui de la grâce qui permet d’édifier une société harmonieuse par la pratique du droit et de la justice (cf. Is Is 11,3-5).

Le Dieu de toute miséricorde n’a pas hésité à offrir son propre Fils pour réconcilier les hommes avec Dieu et entre eux.

Avec le Rédempteur, demandons au Tout-Puissant de transformer le coeur de tous les êtres humains, de les rendre capables d’accueillir en eux la charité divine et, avec elle, le fruit du pardon.

Le pardon ! Les Libanais ont besoin de la paix et la désirent ardemment. Ils attendent une aide concrète pour obtenir cette paix. Ils ont besoin d’être libres pour pouvoir décider de l’avenir de leur pays.

Mais ils ont aussi un grand besoin de pouvoir recommencer à aimer intensément leur pays et tous leurs concitoyens et, surtout, d’avoir le courage et la force du pardon.

Les souffrances qu’ils ont endurées ont souvent été la cause et la conséquence d’incompréhensions, de haines et de vengeances, et elles ont engendré le manque de confiance et le soupçon.

Un dialogue sincère, qui favorise la paix et l’entente nationales, exige le respect de chacun à l’égard des autres, jusqu’au pardon. Il demande que l’on mette fin aux tentations de l’arrogance, de la soif de domination et du fanatisme.

4. Le Christ, le Serviteur plein de douceur envoyé comme Alliance du peuple saint et Lumière des nations (cf. Is Is 48,8-9), nous enseigne combien est grande et bénéfique la force mise au service de la charité. Alors, le coeur humain devient l’habitation de la miséricorde et de la vérité, et l’existence quotidienne se déroule dans la justice et la paix (cf. Ps Ps 84,11-12). Alors, les conflits et leur charge de désagrégation se dissolvent et l’esprit de chacun s’ouvre à la vérité et à la sagesse de Dieu, se conformant à son dessein de sagesse sur le monde.

5. Je vous demande en même temps de porter votre regard vers saint François d’Assise : c’est sous son patronage que j’ai voulu placer cette Journée universelle de prière pour la paix au Liban. Ce saint, précisément à cause de sa particulière configuration au Rédempteur, a été capable d’embrasser tout homme comme son frère, même celui d’apparence repoussante. Partout où il se rendait, il rétablissait la paix, et toutes les personnes qui le rencontraient et bénéficiaient de son ministère de charité redécouvraient leur dignité de fils de Dieu.

Amis du Liban, vous tous, Libanais — chrétiens et musulmans —, la dignité de créatures de Dieu qui nous est commune, notre qualité de citoyens du monde sont pour nous une obligation de nous mobiliser : le Liban doit vivre dans la paix et libre de toute occupation les Libanais, quelle que soit leur foi religieuse, doivent nourrir la plus vive espérance qu’ils pourront dialoguer avec leurs propres concitoyens et décider ensemble de leur sort, afin qu’il soit conforme à leurs légitimes et justes aspirations.

6. Prions aujourd’hui saint François pour que nos frères libanais puissent vivre sur une terre qui ne soit plus en proie à de violents conflits. Et, parce que la miséricorde et le pardon sont la mesure de la charité du Père céleste, demandons-lui de nous remettre nos dettes comme nous les remettons à nos débiteurs et, comme priait saint François, « ce que, nous, nous ne savons pas pleinement pardonner, toi, Seigneur, fais que nous le pardonnions pleinement, afin que, par amour de toi, nous aimions vraiment nos ennemis et intercédions dévotement auprès de toi, ne rendant à personne le mal pour le mal mais nous efforçant en toi d’être utiles à tous » (saint François, Paraphrases du Notre Père, dans Fonti Francescane, p. 142).

Que la Vierge Marie, qui fut la première demeure de la divine Charité, présente à Dieu nos supplications. Qu’elle les soutienne maternellement de sa prière et obtienne pour tous les Libanais qui l’invoquent comme «Notre-Dame du Liban » d’être libérés de toute tribulation et de pouvoir parcourir ensemble les chemins de la justice et de la paix.
* * *


Chers frères et soeurs de langue française, je suis heureux de vous accueillir aujourd’hui et je vous remercie d’être venus vous unir a notre prière pour le Liban, en cette fête de saint François d’Assise, qui a été un saint pacificateur. Je salue particulièrement les membres de la Communauté libanaise résidant à Rome et je leur redis, au nom de tous, notre solidarité avec le peuple libanais si durement éprouvé. Que Dieu lui accorde la paix et l’unité!

Vous tous ici présents, je vous bénis de grand coeur.




Mars 1993: Mercredi 31 mars 1993 - Le presbytérat, participation ministérielle au sacerdoce du Christ

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1. Nous commençons aujourd’hui une nouvelle série de catéchèses, consacrées au presbytérat et aux prêtres qui, comme on le sait, sont les plus proches collaborateurs des évêques : ils participent à leur consécration et à leur mission. Je parlerai d’eux en m’en tenant fidèlement aux textes du Nouveau Testament et en suivant la ligne du Concile Vatican II, selon le style habituel de ces catéchèses. J’entreprends d’exposer ce thème le coeur rempli d’affection pour ces proches collaborateurs de l’Ordre épiscopal, que je sens à mes côtés et que j’aime dans le Seigneur, comme je l’ai dit dès le début de mon pontificat et particulièrement dans la première Lettre que j’ai adressée aux prêtres du monde entier, écrite à l’occasion du Jeudi saint 1979.

2. Il nous faut tout de suite observer que le sacerdoce, à quelque degré que ce soit, et donc aussi bien pour les évêques que pour les prêtres, est une participation au sacerdoce du Christ qui, selon la Lettre aux Hébreux, est l’unique “ Grand Prêtre ” de la nouvelle et éternelle Alliance, celui qui “ s’est offert lui-même une fois pour toutes ” par un sacrifice d’une valeur infinie et qui demeure, immuable et impérissable, au centre de l’économie du salut (cf. He
He 7,24-28). Il n’est plus besoin, il n’est plus possible d’avoir d’autres Prêtres en dehors ou à côté du Christ, l’unique médiateur (cf. He He 9,15 Rm 5,15-19 1Tm 2,5), qui réalise l’union et la réconciliation entre les hommes et Dieu (cf. 2Co 5,14-20), le Verbe fait chair, plein de grâce (cf. Jn Jn 1,1-18), hiereus (Prêtre) véritable et définitif (cf. He He 5,6 He 10,21) qui s’est manifesté sur terre “ pour abolir le péché par son sacrifice ” (He 9,26). Au ciel, il continue à intercéder pour ses disciples (cf. ibid., 7, 25), jusqu’à ce qu’ils parviennent à l’héritage éternel qu’il a acquis et promis. Dans le Nouveau Testament, personne d’autre n’est hiereus en ce sens.

3. La participation à l’unique sacerdoce du Christ, qui s’exerce selon une pluralité de degrés, a été voulue par le Christ. Il a voulu pour son Église des fonctions différenciées, comme l’exige un corps social bien organisé, et, pour la fonction de direction, il a établi des ministres de son sacerdoce (cf. Catéchisme de l’Église catholique [CEC], n. 1554). Il leur a conféré le sacrement de l’Ordre pour les constituer officiellement prêtres travaillant en son nom et avec son pouvoir, offrant le sacrifice et pardonnant les péchés. “ C’est ainsi – observe le Concile – que le Christ a envoyé ses Apôtres comme lui-même avait été envoyé par le Père ; puis, par les Apôtres eux-mêmes, il a fait participer à sa consécration et à sa mission les évêques, leurs successeurs, dont la fonction ministérielle a été transmise aux prêtres à un degré subordonné ; ceux-ci sont donc établis dans l’Ordre du presbytérat pour être les coopérateurs de l’Ordre épiscopal, dans l’accomplissement de la mission apostolique confiée par le Christ ” (PO 2 cf. CEC CEC 1562).

Cette volonté du Christ résulte de l’Évangile ; nous savons par lui que Jésus a attribué à Pierre et aux Douze une autorité suprême sur son Église, mais qu’il a voulu des collaborateurs pour leur mission. Ce qu’atteste l’évangéliste Luc est significatif, à savoir que Jésus, après avoir envoyé les Douze en mission (cf. Lc Lc 9,1-6), envoie un nombre encore plus grand de disciples, comme pour signifier que la mission des Douze ne suffit pas pour l’oeuvre d’évangélisation : “ Après cela, le Seigneur désigna soixante-douze autres et les envoya deux par deux en avant de lui dans toute ville et tout endroit où lui-même devait aller ” (Lc 10,1).

Certes, ce passage ne fait que préfigurer le ministère que le Christ établira formellement plus tard. Mais il manifeste déjà l’intention du divin Maître d’introduire un nombre important de collaborateurs dans le travail de la “ vigne ”. Jésus avait choisi les Douze parmi un nombre plus important de disciples (cf. Lc Lc 6,12 Lc Lc 6,13). Ces “ disciples ”, selon le sens de ce terme dans les récits évangéliques, ne sont pas seulement ceux qui croient en Jésus, mais ceux qui le suivent, qui veulent recevoir son enseignement de Maître et se consacrer à son oeuvre. Et Jésus les intègre dans sa mission.

Selon Luc, c’est précisément en cette circonstance que Jésus dit : “ La moisson est grande, mais les ouvriers sont peu nombreux ” (10, 2). Il indiquait ainsi que, pour lui, et selon l’expérience du premier ministère, le nombre des ouvriers était trop petit. Il ne l’était pas seulement alors, mais pour tous les temps, pour notre époque aussi, où le problème est devenu particulièrement grave. Nous devons l’affronter en nous sentant stimulés et en même temps réconfortés par ces paroles et – pourrait-on dire – par ce regard de Jésus sur les champs où il faut des ouvriers pour moissonner le blé. Jésus a donné l’exemple par son initiative, que l’on pourrait appeler de “ promotion vocationnelle ” : il a envoyé les 72 disciples en plus des 12 Apôtres.

4. Si nous nous en tenons à l’Évangile, Jésus assigne aux 72 disciples une mission semblable à celle des Douze : les disciples sont envoyés pour annoncer la venue du Royaume de Dieu. Ils exerceront cette prédication au nom du Christ, avec son autorité : “ Qui vous écoute m’écoute, qui vous rejette me rejette, et qui me rejette rejette Celui qui m’a envoyé ” (Lc 10,16).

Comme les Douze (cf. Mc Mc 6,7 Lc 9,1), les disciples reçoivent le pouvoir d’expulser les esprits mauvais, si bien que, après les premières expériences, ils disent à Jésus : “ Seigneur, même les démons nous étaient soumis en ton nom ”. Ce pouvoir est confirmé par Jésus lui-même : “ Je voyais Satan tomber du ciel comme l’éclair ! Je vous ai donné le pouvoir de fouler aux pieds serpents, scorpions et toute la puissance de l’Ennemi ” (Lc 10,17-19).

Il s’agit également pour eux de participer avec les Douze à l’oeuvre rédemptrice de l’unique Prêtre de la nouvelle Alliance, le Christ, qui a voulu leur confier, à eux aussi, une mission et des pouvoirs semblables à ceux des Douze. L’institution du presbytérat ne correspond donc pas seulement à une nécessité pratique des évêques qui ressentent le besoin d’avoir des collaborateurs, mais découle d’une intention explicite du Christ.

5. De fait, nous trouvons que, dès les premiers temps du christianisme, les prêtres (presbyteroi) sont présents et exercent des fonctions dans l’Église des Apôtres et des premiers évêques, leurs successeurs (cf. Ac Ac 11,30 Ac 14,23 Ac 15,2 Ac 15,4 Ac 15,6 Ac 15,22 Ac 15,23 Ac 15,41 Ac 16,4 Ac 20,17 Ac 21,18 1Tm 4,14 1Tm 5,17 1Tm 5,19 Tt 1,5 Jc 5,14 1P 5,1 1P 5,5 1P 5,15 2Jn 1 3Jn 1).

Il n’est pas toujours facile de distinguer, dans ces livres du Nouveau Testament, les “ prêtres ” des “ évêques ” en ce qui concerne les tâches qui leur sont attribuées. Mais, très vite, on voit se délimiter, dans l’Église des Apôtres, les deux catégories de participants à la mission et au sacrifice du Christ, que l’on retrouve ensuite, mieux spécifiées, dans les oeuvres des écrivains post-apostoliques (comme la Lettre aux Corinthiens du Pape saint Clément, les Lettres de saint Ignace d’Antioche, le Pasteur d’Hermas, etc.), si bien que, dans le langage employé dans l’Église à Jérusalem, à Rome et dans les autres communautés d’Orient et d’Occident, on finit par réserver le nom d’évêque au chef et pasteur unique de la communauté, alors que celui de prêtre désigne un ministre qui travaille en dépendance de l’évêque.

6. Dans le sillage de la tradition chrétienne et en conformité avec la volonté du Christ attestée par le Nouveau Testament, le Concile Vatican II parle des prêtres comme de ministres qui ne possèdent pas le “ sacerdoce suprême ” et qui, dans l’exercice de leur pouvoir, dépendent des évêques, mais qui, par ailleurs, leur sont unis dans “ l’honneur sacerdotal ” (LG 28 cf. CEC CEC 1564).

Cette conjonction s’enracine dans le sacrement de l’Ordre : “ La fonction des prêtres, en tant qu’elle est étroitement unie à l’Ordre épiscopal, participe à l’autorité par laquelle le Christ lui-même construit, sanctifie et gouverne son Corps ” (PO 2 cf. CEC, CEC 1563). Les prêtres, aussi, portent en eux “ l’image du Christ, Prêtre souverain et éternel ” (LG 28). Ils participent donc à l’autorité pastorale du Christ, et c’est là la note spécifique de leur ministère, fondée sur le sacrement de l’Ordre qui leur est conféré.

Comme nous le lisons dans le Décret Presbyterorum ordinis, “ le sacerdoce des prêtres, s’il présuppose les sacrements de l’initiation chrétienne, est cependant conféré au moyen du sacrement particulier qui, par l’onction du Saint-Esprit, les marque d’un caractère spécial et les configure ainsi au Christ prêtre pour les rendre capables d’agir au nom du Christ Tête en personne ” (PO 2 cf. CEC CEC 1563).

Ce caractère, conféré par l’onction sacramentelle de l’Esprit Saint, est, pour ceux qui le reçoivent, un signe : le signe d’une consécration plus spéciale, par rapport au baptême et à la confirmation, au Christ Prêtre, qui en fait ses ministres actifs, dans le culte officiel rendu à Dieu et dans la sanctification des frères ; le signe des pouvoirs ministériels à exercer au nom du Christ, Chef et Pasteur de l’Église (cf. CEC, CEC 1581-1584).

7. Le caractère est aussi le signe et l’instrument, dans l’âme du prêtre, des grâces spéciales pour l’exercice du ministère, liées à la grâce sanctifiante que l’Ordre comporte en tant que sacrement, que ce soit au moment où il est conféré ou dans tout l’exercice et le développement dans le ministère.

Il implique donc le prêtre dans une économie de sanctification, que le ministère même comporte en faveur de celui qui l’exerce comme de ceux qui en bénéficient par les divers sacrements et les autres activités qu’exercent leurs pasteurs.

L’Église tout entière reçoit les fruits de la sanctification opérée par le ministère des prêtres-pasteurs : le ministère des prêtres diocésains comme de ceux qui, à quelque titre et sous quelque forme que ce soit, ayant reçu l’Ordre sacré, exercent leur activité en communion avec les évêques diocésains et avec le successeur de Pierre.

8. L’ontologie profonde de la consécration de l’Ordre et le dynamisme de sanctification qu’elle comporte dans le ministère, excluent certainement toute interprétation sécularisée du ministère presbytéral, comme si le prêtre était simplement consacré pour l’instauration de la justice ou la diffusion de l’amour dans le monde.

Le prêtre est ontologiquement participant du sacerdoce du Christ, vraiment consacré, “ homme du sacré ”, député, comme le Christ, au culte qui monte vers le Père, et à la mission évangélisatrice par laquelle il répand et distribue à ses frères ce qui est sacré : la vérité, la grâce de Dieu.

Voilà la véritable identité sacerdotale, voilà l’exigence essentielle du ministère sacerdotal, également dans le monde d’aujourd’hui.





Mercredi 21 avril 1993 - La mission évangélisatrice des prêtres

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1. Dans l'Église, nous sommes tous appelés à annoncer la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, à la transmettre aux croyants avec toujours plus d'abondance (cf. Col
Col 3,16), à la faire connaître aux non-croyants (cf. 1P 3,15). Aucun chrétien ne peut se dispenser d'un tel engagement, qui découle des sacrements mêmes du baptême et de la confirmation et qui est à l'oeuvre par l'action de l'Esprit Saint. Disons donc tout de suite que l'évangélisation n'est pas réservée à une seule catégorie de membres de l'Église. Néanmoins, les évêques en sont les protagonistes et les guides pour toute la communauté chrétienne, comme nous l'avons vu précédemment. Dans cette oeuvre, ils sont assistés par les prêtres et, dans une certaine mesure, par les diacres, selon les normes et la pratique de l'Église, que ce soit dans les temps plus anciens comme en ce moment de "Nouvelle Évangélisation".

2. Pour les prêtres, on peut dire que l'annonce de la Parole de Dieu est la première fonction à remplir (cf. LG LG 28 CEC 1564) parce que la foi, suscitée par la Parole de Dieu et qui se nourrit de cette Parole, est le fondement de la vie chrétienne personnelle et communautaire. Le concile Vatican II souligne cette mission évangélisatrice en la mettant en relation avec la formation du Peuple de Dieu et avec le droit de tous à recevoir des prêtres l'annonce de l'Évangile (PO 4). La nécessité de cette prédication a été mise en lumière par saint Paul qui ajoute au commandement du Christ son expérience d'Apôtre. Dans son activité évangélisatrice exercée dans de multiples régions et milieux, il s'était rendu compte que les hommes ne croyaient pas parce que personne ne leur avait encore annoncé la Bonne Nouvelle. Bien que la voie du salut ait été ouverte à tous, il avait constaté que tous n'avaient pas encore la possibilité d'en profiter. C'est pourquoi il donnait cette explication de la nécessité de la prédication selon le commandement du Christ : " Comment invoquer le nom du Seigneur sans d'abord croire en lui? Et comment croire sans d'abord l'entendre? Et comment entendre sans prédicateur? Et comment prêcher sans être d'abord envoyé?" (Rm 10,14-15). L'Apôtre se préoccupait ensuite de communiquer en abondance la Parole de Dieu à ceux qui étaient devenus croyants. Il le dit lui-même aux Thessaloniciens : "Comme un père pour ses enfants nous vous avons, chacun de vous, exhortés, encouragés, adjurés de mener une vie digne de Dieu qui vous appelle…" (1Th 2,11-12). L'Apôtre recommande de manière pressante ce ministère à son disciple Timothée : " Je t'adjure devant Dieu et devant le Christ Jésus…, proclame la parole, insiste à temps et à contretemps, réfute, menace, exhorte, avec une patience inlassable et le souci d'instruire " (2Tm 4,1-2). Quant aux prêtres, il leur donne cette prescription : " Les presbytres qui exercent bien la présidence méritent une double rémunération, surtout ceux qui peinent à la parole et à l'enseignement " (1Tm 5,17).

3. La prédication des prêtres n'est pas un simple exercice de la parole qui répond à un besoin personnel de s'exprimer et de communiquer son opinion propre ; elle ne peut pas non plus être seulement la manifestation d'une expérience personnelle. Cet élément psychologique, qui peut avoir sa fonction sous un aspect didactique et pastoral, ne peut constituer ni la raison ni la partie prépondérante de la prédication. Comme l'ont dit les Pères du Synode des évêques de 1971, " les expériences de la vie, aussi bien des hommes en général que celles des prêtres, que l'on doit garder à l'esprit et toujours interpréter à la lumière de l'Évangile, ne peuvent être ni l'unique ni la principale norme de la prédication " (Ench. Vat. 4, 1 186).

La mission de prêcher est confiée aux prêtres par l'Église comme une participation à la médiation du Christ, mission à exercer en vertu et suivant les exigences de son commandement : les prêtres, " participants, dans leur degré de ministère, à la charge de l'unique Médiateur (1Tm 2,5), annoncent à tous la Parole de Dieu " (Ibid.). Cette expression ne peut pas ne pas nous faire réfléchir : il s'agit d'une " Parole de Dieu ". Par conséquent, elle n'est pas " nôtre " ; nous ne pouvons pas la manipuler, la transformer, l'adapter selon notre bon plaisir, mais nous devons l'annoncer intégralement. Et puisque la " Parole de Dieu " a été confiée aux Apôtres et à l'Église, " tout prêtre a une responsabilité spéciale dans la prédication de toute la Parole de Dieu et dans son interprétation selon la foi de l'Église ", ainsi que l'ont encore dit les Pères du Synode de 1971 (Ench. Vat. 4, 1 183).

4. L'annonce de la Parole se fait en lien étroit avec les sacrements par lesquels le Christ communique et propage la vie de la grâce.

À ce propos, on doit encore noter qu'une bonne part de la prédication, spécialement aujourd'hui, se déroule durant la célébration des sacrements et en particulier durant la Sainte Messe. Il faut observer, en outre, que l'annonce s'exerce déjà par l'administration des sacrements, soit par la richesse théologique et catéchétique des formules et des lectures liturgiques, que l'on prononce aujourd'hui en langue vivante, compréhensible pour le peuple, soit par la pédagogie du rite.

Cependant, il n'y a pas de doute que la prédication doit précéder, accompagner et couronner l'administration des sacrements, que ce soit pour une préparation nécessaire avant de les recevoir, ou pour leur fructification dans la foi et dans la vie.

5. Le Concile a rappelé que l'annonce de la Parole de Dieu a pour effet de susciter et de nourrir la foi, et de contribuer au développement de l'Église. " En effet, dit-il, en vertu de la Parole salvatrice, la foi s'éveille dans le coeur des non-croyants, et c'est elle qui donne naissance et croissance à la communauté des croyants " (PO 4). Il faudra toujours tenir ce principe présent à l'esprit : tout prédicateur de l'Évangile, et donc le prêtre qui, d'une manière toute spéciale, est fréquemment appelé à exercer le " ministère de la Parole ", doivent avoir comme but premier de diffuser, fortifier et faire croître la foi. Une prédication, qui serait une broderie de thèmes psychologiques liés à la personne, ou qui s'épuiserait à poser des problèmes sans les résoudre ou à susciter des doutes sans donner la source de la lumière évangélique qui peut éclairer le chemin personnel et celui de la société, ne rejoindrait pas l'objectif essentiel voulu par le Sauveur. Elle finirait même par être une source de confusion pour l'opinion publique et de dommage aux croyants eux-mêmes dont le droit de connaître le vrai contenu de la Révélation ne serait pas respecté.

6. En outre, le Concile a montré l'étendue et la variété des formes que prend l'authentique annonce de l'Evangile, selon ce que l'Église enseigne et commande aux prédicateurs : " Ainsi les prêtres se doivent à tous les hommes : ils ont à leur faire partager la vérité de l'Évangile dont le Seigneur les fait bénéficier. Soit donc qu'ils aient parmi les païens une belle conduite pour les amener à glorifier Dieu, soit qu'ils prêchent ouvertement pour annoncer aux incroyants le mystère du Christ, soit qu'ils transmettent l'enseignement chrétien ou exposent la doctrine de l'Église, soit qu'ils étudient à la lumière du Christ les problèmes de leur temps, dans tous les cas il s'agit pour eux d'enseigner, non pas leur propre sagesse, mais la parole de Dieu, et d'inviter tous les hommes avec insistance à la conversion et à la sainteté " (PO 4).

Par conséquent, telles sont les voies de l'enseignement de la Parole de Dieu, selon l'Église : le témoignage de vie qui dévoile la puissance de l'amour de Dieu et rend persuasive la parole du prédicateur ; la prédication explicite du mystère du Christ aux non-croyants ; la catéchèse et l'exposé didactique et systématique de la doctrine de l'Église ; l'application de la vérité révélée ; juger les cas concrets et leur apporter une solution. C'est dans ces conditions que la prédication montre sa " beauté " et attire les hommes qui désirent voir, aujourd'hui aussi, la " gloire de Dieu ".

7. Le principe de l'adaptation de la prédication, particulièrement souligné par le Concile (cf. PO PO 4), n'est pas opposé à cette exigence d'authenticité et d'intégrité de l'annonce.

Il est clair que le prêtre doit avant tout se demander, avec responsabilité et réalisme, si ce qu'il dit dans sa prédication est compris par son auditoire et si cela a un effet sur leur mode de pensée et de vivre. Il doit, par ailleurs, s'efforcer de tenir compte, dans sa prédication, des différentes attentes des auditeurs et des circonstances diverses qui font qu'ils se réunissent et qu'ils demandent son intervention. Bien entendu, il doit aussi connaître et reconnaître ses talents, et s'en servir de manière opportune, non pour faire de l'exhibitionnisme qui le disqualifierait par-dessus tout auprès de ses auditeurs, mais dans le but de mieux introduire la Parole de Dieu dans l'esprit et dans le coeur des hommes.

Mais, plus qu'à ses talents personnels, le prédicateur devra faire appel à ces charismes surnaturels que l'histoire de l'Église et de l'éloquence sacrée présente chez de nombreux saints prédicateurs, et il se sentira poussé à demander à l'Esprit Saint l'inspiration pour s'exprimer, se conduire et dialoguer avec son auditoire de manière la plus adaptée et la plus efficace.

Tout cela vaut également pour tous ceux qui exercent le ministère de la Parole à travers les écrits, les publications, les émissions de radio et de télévision. L'usage de ces moyens de communication exige également du prédicateur, du conférencier, de l'écrivain, de l'informateur religieux et spécialement du prêtre, l'appel et le recours à l'Esprit Saint, lumière qui vivifie les esprits et les coeurs.

8. Selon l'enseignement du Concile, l'annonce de la Parole de Dieu doit être faite dans tous les milieux et à tous les niveaux de la société, en tenant compte aussi des non-croyants : qu'il s'agisse de véritables athées ou, comme c'est plus souvent le cas, d'agnostiques ou même d'indifférents ou encore de ceux qui sont inattentifs, il faudra trouver la manière la plus adaptée pour les intéresser. Ici, il suffit d'avoir soulevé une fois de plus le problème, qui est grave et que l'on doit affronter avec un zèle soutenu par l'intelligence et avec un esprit serein. Le prêtre pourra utilement se rappeler la sage considération du Synode des évêques de 1971, qui a dit : " Le ministre de la Parole, par l'évangélisation, prépare les voies du Seigneur avec beaucoup de patience et de foi, en s'adaptant aux différentes conditions de la vie des individus et des peuples " (Ench. Vat., 4, n. 1 184). L'appel à la grâce du Seigneur et à l'Esprit Saint, qui en est le dispensateur divin, toujours nécessaire, sera ressenti encore plus vivement dans tous ces cas d'athéisme (au moins pratique), d'agnosticisme, d'ignorance et d'indifférence religieuses, parfois d'hostilité a priori et même de rage, qui font constater au prêtre que tous les moyens humains sont insuffisants pour frayer dans les âmes un passage à Dieu. Alors, plus que jamais, il fera l'expérience de ce qu'on a appelé le " mystère des mains vides " ; mais c'est précisément pour cela qu'il se rappellera que saint Paul, presque crucifié par de semblables expériences, trouvait toujours un courage renouvelé dans la " puissance et la sagesse de Dieu " présentes dans le Christ (cf. 1Co 1,18-19), et rappelait aux Corinthiens : " Moi-même, je me suis présenté à vous faible, craintif et tout tremblant, et ma parole et mon message n'avaient rien des discours persuasifs de la sagesse ; c'était une démonstration d'Esprit et de puissance, pour que votre foi reposât, non sur la sagesse des hommes, mais sur la puissance de Dieu " (1Co 2,3-5). Peut-être est-ce là le soutien indispensable pour le prédicateur d'aujourd'hui.





                                                                                  Mai 1993



Mercredi 5 mai 1993 - La mission des prêtres dans le ministère sacramentel de sanctification

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(
Mt 28,16-20)


1. En parlant de la mission évangélisatrice des prêtres, nous avons déjà vu que, dans les Sacrements et à travers les Sacrements, il est possible de donner aux fidèles une instruction méthodique et efficace sur la Parole de Dieu et sur le mystère du salut. En effet, la mission d’évangélisation du prêtre est essentiellement liée au ministère de sanctification par le moyen des sacrements (cf. Catéchisme de l’Église catholique CEC 893).

Le ministère de la Parole ne peut s’arrêter au seul effet immédiat propre à la parole. L’évangélisation est le premier de ces “ labeurs apostoliques ” qui, selon le Concile, “ visent à ce que tous, devenus enfants de Dieu par la foi et le baptême, se réunissent en assemblée, louent Dieu au sein de l’Église, prennent part au sacrifice et mangent la Cène du Seigneur ” (Sacrosanctum Concilium SC 10). Et le Synode des évêques de 1971 affirmait que “ le ministère de la Parole, s’il est correctement compris, mène aux sacrements et à la vie chrétienne, telle qu’elle est vécue en pratique dans la communauté visible de l’Église et dans le monde ” (cf. Le sacerdoce ministériel, II, I, 1, b : SMME 590 ; Ench. Vat., 4, 1179).

Toute tentative de réduire le ministère sacerdotal à la seule prédication ou à l’enseignement méconnaîtrait un aspect fondamental de ce ministère. Déjà, le Concile de Trente avait repoussé la proposition de faire consister le sacerdoce dans le seul ministère de la prédication de l’Évangile (cf. DS DS 1771 FCC 9296). Étant donné que certains, récemment encore, ont exalté d’une manière trop unilatérale le ministère de la Parole, le Synode des évêques de 1971 a souligné l’alliance indissoluble entre Parole et Sacrements. “ En effet, dit le Synode, les sacrements sont célébrés en lien avec la proclamation de la Parole de Dieu et développent ainsi la foi, en la fortifiant par la grâce. Aussi les sacrements ne peuvent-ils pas être sous-évalués parce que, grâce à eux, la Parole atteint son plus plein effet, c’est-à-dire la communion au mystère du Christ ” (cf. Le sacerdoce ministériel, ivi : Ench. Vat., 4, 1180).

2. Sur ce caractère unitaire de la mission d’évangélisation et du ministère sacramentel, le Synode de 1971 n’a pas hésité à dire qu’une division entre l’évangélisation et la célébration des Sacrements “ diviserait le coeur de l’Église elle-même, jusqu’à mettre la foi en péril ” (cf. Le sacerdoce ministériel, ivi ; Ench. Vat., 4, 1181).

Le Synode reconnaît cependant que, dans l’application concrète du principe d’unité, il peut y avoir des modalités diverses pour chaque prêtre, “ étant donné que l’exercice du ministère sacerdotal doit souvent assumer, dans la pratique, des formes diverses, afin de mieux répondre aux situations particulières ou nouvelles dans lesquelles il faut annoncer l’Évangile ” (cf. Le sacerdoce ministériel, ivi ; Ench. Vat., 4, 1182).

Une sage application du principe d’unité doit également tenir compte des charismes que chaque prêtre a reçus. Si certains ont des talents particuliers pour la prédication ou l’enseignement, il faut qu’ils les utilisent pour le bien de l’Église. Il est utile de rappeler ici le cas de saint Paul qui, tout en étant convaincu de la nécessité du Baptême et après avoir aussi administré parfois ce sacrement, se considérait néanmoins comme envoyé pour la prédication de l’Évangile et consacrait ses énergies surtout à cette forme de ministère (cf. 1Co 1,14 1Co 1,17). Mais, dans sa prédication, il ne perdait pas de vue l’oeuvre essentielle d’édification de la communauté (cf. 1Co 3,10), à laquelle la prédication doit servir.

Cela veut dire que, aujourd’hui encore, comme toujours dans l’histoire du ministère pastoral, la répartition du travail pourra porter à mettre l’accent sur la prédication ou sur le culte et les Sacrements, selon les capacités des personnes et l’évaluation des situations. Mais on ne peut mettre en doute que, pour les prêtres, la prédication et l’enseignement, même aux plus hauts niveaux académiques et scientifiques, doivent toujours conserver une finalité de service envers le ministère de sanctification par le moyen des Sacrements.

3. De toute façon, l’importante mission de sanctification confiée aux prêtres est hors de cause, et c’est surtout dans le ministère du culte et des sacrements qu’ils peuvent l’accomplir. Il ne fait pas de doute que c’est une oeuvre accomplie avant tout par le Christ, comme le soulignait le Synode de 1971 : “ Le salut qui se réalise à travers les Sacrements ne vient pas de nous mais descend de Dieu, et cela montre le primat de l’action du Christ, unique Prêtre et Médiateur, dans son Corps, qui est l’Église ” (cf. Le sacerdoce ministériel, II, I, 1d : SMME 593 ; Ench. Vat., 4, 1187 ; cf. aussi l’exhort. apost. Pastores dabo vobis PDV 12). Cependant, dans l’actuelle économie du salut, le Christ se sert du ministère des prêtres pour réaliser la sanctification des croyants (cf. Presbyterorum Ordinis PO 5). Agissant au nom du Christ, le prêtre atteint l’efficacité de l’action sacramentelle par le moyen du Saint-Esprit, Esprit du Christ, principe et source de la sainteté de la “ vie nouvelle ”.

La vie nouvelle que, par le moyen des Sacrements, le prêtre suscite, nourrit, restaure et fait grandir, est une vie de foi, d’espérance et d’amour. La foi est le don divin fondamental : “ On déduit clairement de cela la grande importance de la préparation et de la disposition à la foi pour celui qui reçoit les Sacrements ; on comprend aussi dès lors la nécessité du témoignage de la foi que donne le prêtre par toute sa vie, mais surtout par la manière d’évaluer et de célébrer les Sacrements eux-mêmes ” (cf. Le sacerdoce ministériel, II, I, 1d : SMME 593 ; Ench. Vat., 4, 1188).

La foi communiquée par le Christ par le moyen des sacrements s’accompagne immanquablement d’une “ vivante espérance ” (1P 1,3) qui infuse dans l’âme des fidèles un puissant dynamisme de vie spirituelle, un élan vers “ les choses d’en haut ” (Col 3,1-2). Par ailleurs, la foi “ opère par la charité ” (Ga 5,6), cet amour de charité qui jaillit du coeur du Sauveur et ruisselle dans les sacrements pour se propager ensuite à toute l’existence chrétienne.

4. Le ministère sacramentel des prêtres est donc doté d’une fécondité divine. Le Concile l’a bien rappelé.

Ainsi, par le baptême, les prêtres “ introduisent les hommes dans le Peuple de Dieu ” (PO 5) : et ils sont donc responsables, non seulement d’une digne exécution du rite, mais aussi de sa bonne préparation, par la formation des adultes à la foi et, pour les enfants, par l’éducation de la famille afin qu’elle coopère à l’événement.

En outre, “ dans l’esprit du Christ Pasteur, qu’ils enseignent également à soumettre d’un coeur contrit ses péchés à l’Église, dans le sacrement de la Pénitence, pour pouvoir ainsi se convertir au Seigneur, davantage chaque jour, se souvenant de ses paroles : “Repentez-vous, car le Royaume des cieux est proche” (Mt 4,17) ” (PO 5). C’est pourquoi les prêtres doivent, eux aussi vivre personnellement dans l’attitude d’hommes qui reconnaissent leurs propres péchés et leur besoin de pardon, en communion d’humilité et de pénitence avec les fidèles. Ils pourront ainsi manifester plus efficacement la grandeur de la miséricorde divine et donner un réconfort céleste, en même temps que le pardon, à ceux qui se sentent oppressés par le poids de leurs fautes.

Dans le sacrement du Mariage, le prêtre est présent comme responsable de la célébration, en témoignant la foi et en accueillant le consentement de la part de Dieu, qu’il représente comme ministre de l’Église. Il participe ainsi profondément et de manière vitale, non seulement au rite, mais à la dimension la plus profonde du sacrement.

Et enfin, par l’Onction des malades, les prêtres “ soulagent les malades ” (PO 5). C’est une mission prévue par saint Jacques qui enseignait dans sa Lettre : “ Quelqu’un parmi vous est-il malade ? Qu’il appelle les presbytres de l’Église et qu’ils prient sur lui après l’avoir oint d’huile au nom du Seigneur ” (Jc 5,14). Sachant donc que le sacrement de l’Onction est destiné à “ soulager ” et à apporter purification et force spirituelles, le prêtre sera sensible au besoin de s’engager à faire en sorte que sa présence transmette au malade la compassion efficace du Christ et rende témoignage à la bonté de Jésus pour les malades, auxquels il a consacré une si grande partie de sa mission évangélique.

5. Ce discours sur les dispositions avec lesquelles on doit tâcher de s’approcher des Sacrements, en les célébrant avec conscience et esprit de foi, sera complété dans les catéchèses que, s’il plaît à Dieu, nous consacrerons aux Sacrements. Dans nos prochaines catéchèses, nous traiterons un autre aspect de la mission des prêtres dans le ministère sacramentel : le culte de Dieu, qui s’accomplit spécialement dans l’Eucharistie. Disons dès maintenant que c’est là l’élément le plus important de sa fonction ecclésiale, la raison principale de son ordination, et le but qui donne sens et joie à sa vie.




Catéchèses S. J-Paul II 41089