Catéchèses S. J-Paul II 11299

1er décembre 1999 Promouvoir la famille

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Lecture: (Jn 17,20-21)


1. Pour une préparation appropriée au grand Jubilé, un sérieux engagement pour redécouvrir la valeur de la famille et du mariage ne peut pas manquer dans la communauté chrétienne (cf. Tertio millennio adveniente TMA 51). Cela est d'autant plus urgent que cette valeur est aujourd'hui mise en discussion par une grande partie de la culture et de la société.

Les modèles contestés ne sont pas seulement certains modèles de vie familiale, qui changent sous la pression des transformations sociales et des nouvelles conditions de travail. C'est la conception même de la famille, en tant que communauté fondée sur le mariage entre un homme et une femme, qui est visée au nom d'une éthique relativiste qui se diffuse dans de vastes couches de l'opinion publique et de la législation civile elle-même.

La crise de la famille devient, à son tour, la cause de la crise de la société. De nombreux phénomènes pathologiques - allant de la solitude à la violence et à la drogue - s'expliquent également du fait que les cellules familiales ont perdu leur identité et leur fonction. Là où la famille se désagrège, le tissu conjonctif de la société tend à disparaître, avec des conséquences désastreuses sur les personnes, en particulier les plus faibles: des enfants aux adolescents, aux porteurs de handicap, aux malades, aux personnes âgées...


2. Il faut donc promouvoir une réflexion qui aide non seulement les croyants, mais tous les hommes de bonne volonté à redécouvrir la valeur du mariage et de la famille. Dans le Catéchisme de l'Eglise catholique on lit: "La famille est la cellule originelle de la vie sociale. Elle est la société naturelle où l'homme et la femme sont appelés au don de soi dans l'amour et dans le don de la vie. L'autorité, la stabilité et la vie de relations au sein de la famille constituent les fondements de la liberté, de la sécurité, de la fraternité au sein de la société" (CEC 2207).

La raison elle-même peut arriver à la redécouverte de la famille en écoutant la loi morale inscrite dans le coeur humain. Communauté "fondée et vivifiée par l'amour" (cf. Exhort. apos. Familiaris consortio FC 18), la famille tire sa force de l'alliance d'amour définitive à travers laquelle un homme et une femme se donnent réciproquement, devenant ensemble des collaborateurs de Dieu dans le don de la vie.

Sur la base de ce rapport fondamental d'amour, les relations qui s'établissent avec et entre les autres membres de la famille doivent elles aussi s'inspirer de l'amour et être caractérisées par une affection et un soutien réciproque. Loin de refermer la famille sur elle-même, l'amour authentique l'ouvre à la société tout entière, car la petite famille domestique et la grande famille de tous les êtres humains ne se trouvent pas en opposition, mais dans une relation intime et originelle. A la racine de tout cela se trouve le mystère même de Dieu, que la famille évoque précisément de façon particulière. Comme je l'écrivais, en effet, il y a quelques années dans la Lettre aux familles, "à la lumière du Nouveau Testament il est possible d'entrevoir comment le modèle originel de la famille doit être recherché dans Dieu lui-même, dans le mystère trinitaire de sa vie. Le "Nous" divin constitue le modèle éternel du "nous" humain; de ce "nous" qui est tout d'abord formé par l'homme et par la femme, créés à l'image et à la ressemblance divine" (n. 6: Insegnamenti XVII/ [1994], 332).


3. La paternité de Dieu est la source transcendante de chaque autre paternité et maternité humaine. En la contemplant avec amour, nous devons nous sentir engagés à redécouvrir cette richesse de communion, de procréation et de vie qui caractérise le mariage et la famille.

En elle se développent les relations interpersonnelles où une tâche spécifique est confiée à chacun, sans cadres rigides. Je n'entends pas ici faire référence aux rôles sociaux et aux fonctions qui sont l'expression de contextes historiques et culturels particuliers. Je pense plutôt à l'importance que revêtent, dans la relation sponsale réciproque et dans l'engagement commun de parents, la figure de l'homme et de la femme en tant que personnes appelées à développer leurs caractéristiques naturelles dans le cadre d'une communion profonde, enrichissante et respectueuse. "A cette "unité des deux" est confiée par Dieu non seulement l'oeuvre de procréation et la vie de la famille, mais également la construction même de l'histoire" (Lettre aux femmes, 8: Insegnamenti XVIII/1 [1995], 1878).


4. Un enfant doit en outre être considéré comme la plus haute expression de la communion de l'homme et de la femme, c'est-à-dire de l'accueil/don réciproque qui se réalise et se transcende en un "tiers", précisément dans l'enfant. Les enfants sont la bénédiction de Dieu. Ils transforment le mari et la femme en père et en mère (cf. Exhort. apos. Familiaris consortio FC 21). Tous deux "sortent de soi" et s'expriment dans une personne, qui, bien qu'étant le fruit de leur amour, va au-delà d'eux-mêmes.

On peut appliquer de façon particulière à la famille l'idéal exprimé dans la prière sacerdotale, dans laquelle Jésus demande que son unité avec le Père interpelle les disciples (cf. Jn Jn 17,11) et ceux qui croiront à leur parole (cf. Jn Jn 17,20-21). La famille chrétienne, "église domestique" (cf. Lumen gentium LG 11), est appelée à réaliser de façon particulière cet idéal de communion parfaite.


5. En avançant vers la conclusion de cette année consacrée à la méditation sur Dieu le Père, nous redécouvrons donc la famille à la lumière de la paternité divine. De la contemplation de Dieu le Père, nous pouvons nous rendre compte d'une urgence qui correspond de manière particulière aux défis du moment historique actuel.

Tourner son regard vers Dieu le Père signifie concevoir la famille comme le lieu de l'accueil et de la promotion de la vie, atelier de fraternité où, avec l'aide de l'Esprit du Christ, se crée entre les hommes "une fraternité et une solidarité nouvelles, véritable reflet du mystère de don et d'accueil mutuels de la Très Sainte Trinité" (Evangelium vitae EV 76).

De l'expérience de familles chrétiennes renouvelées, l'Eglise elle-même pourra apprendre, à tous les membres de la communauté, à cultiver une dimension plus familiale, en adoptant et en promouvant un style de relations plus humaines et fraternelles (cf. FC FC 64).

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  Salut en langue française

Chers frères et soeurs,

A l'occasion du grand Jubilé, la communauté chrétienne est invitée à redécouvrir la valeur du mariage et de la famille, fondée sur la relation entre un homme et une femme. La crise actuelle de la famille devient une crise de la société, avec de nombreux phénomènes pathologiques, comme la violence ou la drogue. L'absence de tissu familial a de nombreuses répercussions, notamment sur les enfants, les adolescents, les personnes âgées. Il convient donc de mener une réflexion qui aidera tous les hommes à redonner leur place au mariage et à la famille, où se réalise entre les personnes un amour authentique, et un soutien réciproque et affectueux. De telles relations ouvrent à l'amour envers tous. A la source de l'amour, se trouve le mystère de Dieu.

L'homme et la femme sont appelés par Dieu à vivre une riche et profonde communion d'amour. Il leur est confié non seulement l'oeuvre de la procréation et la vie de la famille, mais aussi la construction même de l'histoire. Les enfants sont l'expression par excellence de la communion d'amour et une bénédiction du Seigneur. Contempler Dieu Père aide à concevoir la famille comme lieu d'accueil et de promotion de la vie, et comme lieu de fraternité, avec l'aide de l'Esprit. Grâce à cette expérience, l'Eglise elle-même pourra vivre de manière plus familiale, par des relations plus humaines et plus fraternelles.

                                    
Chers pèlerins de langue française, je suis heureux de vous accueillir et je vous souhaite de vous préparer avec ferveur à la fête de Noël, qui marquera le début du grand Jubilé de l'An 2000. Je vous bénis tous de grand coeur.



Mercredi 15 décembre 1999 Edifier la civilisation de l'amour

15129 Lecture: (Jn 13,34-35)

1. "Se souvenant de la parole du Seigneur: "En ceci tous connaîtront que vous êtes mes disciples, si vous vous aimez les uns les autres" (Jn 13,35), les chrétiens ne peuvent pas former de souhait plus vif que celui de rendre service aux hommes de leur temps" (Gaudium et spes GS 93).

Cette tâche que le Concile Vatican II nous a confiée au terme de la Constitution pastorale sur "L'Eglise dans le monde de ce temps", répond au défi fascinant de construire un monde animé par la loi de l'amour, une civilisation de l'amour, "fondée sur les valeurs universelles de paix, de solidarité et de liberté, qui trouvent dans le Christ leur plein accomplissement" (Tertio millennio adveniente TMA 52).

A la base de cette civilisation, se trouve la reconnaissance de la souveraineté universelle de Dieu le Père en tant que source intarissable d'amour. C'est précisément sur l'acceptation de cette valeur fondamentale, que doit être effectué un examen sincère de fin de millénaire à l'occasion du grand Jubilé de l'An 2000, pour repartir avec plus d'entrain vers l'avenir qui nous attend.

Nous avons assisté au déclin d'idéologies qui ont vidé de références spirituelles un grand nombre de nos frères, mais les fruits néfastes d'un sécularisme qui engendre l'indifférence religieuse continuent à persister, en particulier dans les régions les plus développées. Une réponse valable à cette situation n'est certainement pas le retour à une vague religiosité, motivée par de fragiles instances compensatrices et par la recherche d'un équilibre psycho-cosmique, tel qu'il se révèle dans les nouveaux modèles religieux qui proclament une religiosité sans référence à un Dieu transcendant et personnel.

Il faut en revanche analyser avec attention les causes de la perte du sens de Dieu et reproposer avec courage l'annonce du visage du Père, révélé par Jésus-Christ dans la lumière de l'Esprit. Cette révélation n'affaiblit pas mais exalte la dignité de la personne humaine en tant qu'image du Dieu Amour.


2. La perte du sens de Dieu a coïncidé, ces dernières décennies, avec l'avancée d'une culture nihiliste qui appauvrit le sens de l'existence humaine et relativise même, dans le domaine éthique, les valeurs fondamentales de la famille et du respect de la vie. Tout cela se produit souvent de façon non apparente, mais au moyen, plus subtil, de l'indifférence qui fait passer pour normaux tous les comportements, de sorte qu'aucun problème moral n'apparaît plus. On exige paradoxalement que l'Etat reconnaisse en tant que "droits" de nombreux comportements qui attentent à la vie humaine, en particulier celle qui est la plus faible et sans défense. Pour ne pas parler des immenses difficultés d'acceptation de l'autre s'il est différent, gênant, étranger, malade, handicapé. C'est précisément le refus toujours plus grand de l'autre, en tant qu'autre, qui interroge notre conscience de croyants. Comme je le disais dans l'Encyclique Evangelium vitae: "Nous sommes face à une réalité plus vaste, que l'on peut considérer comme une véritable structure de péché, caractérisée par la prépondérance d'une culture contraire à la solidarité, qui se présente dans de nombreux cas comme une "culture de mort"" (EV 12).


3. Face à cette culture nécrophile, notre responsabilité de chrétiens s'exprime dans l'engagement de la "nouvelle évangélisation", dont l'un des fruits les plus importants est la civilisation de l'amour.
"L'Evangile, et donc l'évangélisation, ne s'identifient certes pas avec la culture, et sont indépendants à l'égard de toutes les cultures" (Evangelii nuntiandi EN 20), toutefois, ils possèdent une force régénératrice qui peut influencer de façon positive les cultures. Le message chrétien n'humilie pas les cultures en détruisant leurs caractéristiques particulières, au contraire, il agit en elles de l'intérieur, en valorisant les potentialités originales que leur génie est capable d'exprimer. L'influence de l'Evangile sur la culture purifie et élève l'être humain, en faisant resplendir la beauté de la vie, l'harmonie de la coexistence pacifique, le génie que chaque peuple apporte à la communauté des hommes. Cette influence possède sa force dans l'amour qui n'impose pas mais qui propose, en s'appuyant sur la libre adhésion, dans une atmosphère de respect et d'accueil réciproque.

4. Le message d'amour qui est propre à l'Evangile donne vie à des modèles et à des valeurs humaines, comme la solidarité, l'aspiration à la liberté et à l'égalité, le respect pour le pluralisme des formes expressives. Le pivot de la civilisation de l'amour est la reconnaissance de la valeur de la personne humaine et, concrètement, de toutes les personnes humaines. La grande contribution du christianisme se reconnaît justement sur ce terrain. En effet, c'est précisément de la réflexion sur le mystère du Dieu trinitaire et sur la personne du Verbe fait chair que s'est progressivement formée la doctrine anthropologique de la personne comme être de relation. Cette précieuse acquisition a fait mûrir la conception d'une société qui établit dans la personne son point de départ et l'objectif à atteindre. La doctrine sociale de l'Eglise, sur laquelle l'esprit du Jubilé invite à reméditer, a contribué à fonder sur le droit de la personne les lois mêmes de la coexistence sociale. La vision chrétienne de l'être humain, comme image de Dieu, implique en effet que les droits de la personne s'imposent, de par leur nature, au respect de la société, qui ne les crée pas, mais les reconnaît seulement (cf. Gaudium et spes GS 26).


5. L'Eglise est consciente que cette doctrine peut rester lettre morte si la vie sociale n'est pas animée par le souffle d'une authentique expérience religieuse, et en particulier par le témoignage chrétien sans cesse alimenté par l'action créatrice et assainissante de l'Esprit Saint. En effet, elle est consciente que la crise de la société et de l'homme contemporain est motivée en grande partie par la réduction de la dimension spirituelle spécifique de la personne humaine.

Le christianisme offre sa contribution à la construction d'un société à la mesure de l'homme, précisément en lui assurant une âme et en proclamant les exigences de la loi de Dieu, à laquelle chaque organisation et législation de la société doit s'ancrer, si elles désirent garantir la promotion de l'homme, la libération de tout type d'esclavage, le progrès authentique.

Cette contribution de l'Eglise passe surtout à travers le témoignage offert par les chrétiens, et en particulier par les laïcs, dans leur vie quotidienne. En effet, l'homme contemporain accueille le message de l'amour des témoins plus que des maîtres, et de ces derniers lorsqu'ils se présentent comme d'authentiques témoins (cf. Evangelium nuntiandi, n. 41). Tel est le défi à relever, pour que s'ouvrent de nouveaux horizons pour l'avenir du christianisme et de l'humanité elle-même.

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Salut en langue française

Chers frères et soeurs,

Au cours des dernières décennies, la perte du sens de Dieu a coïncidé avec l'avancée d'une culture qui relativise les valeurs fondamentales comme celles de la famille et du respect de la vie. Ainsi, on veut considérer tous les comportements comme étant normaux, de façon qu'aucun problème moral ne puisse surgir. On exige aussi que l'Etat reconnaisse comme des droits des comportements qui attentent à la vie humaine. Par ailleurs, le refus toujours plus fort de l'autre en tant qu'autre interroge notre conscience de croyants.

Face à cette culture de mort, notre responsabilité de chrétiens doit s'exprimer par la "nouvelle évangélisation", dont la civilisation de l'amour est l'un des fruits les plus importants. En son centre se trouve la reconnaissance de la valeur unique de tout être humain. La vision chrétienne de la personne comme image de Dieu implique que ses droits soient respectés par la société, qui ne les a pas créés mais qui doit seulement les reconnaître.

Pour que cela ne reste pas lettre morte, la vie sociale doit être animée par le souffle d'une authentique expérience religieuse. Aussi l'Eglise entend-elle apporter sa contribution à l'édification d'une société à la mesure de l'homme, grâce notamment au témoignage des chrétiens, en particulier des laïcs, dans leur vie quotidienne.

Je salue cordialement les personnes de langue française présentes ce matin, spécialement le groupe d'accueil de la Trinité des Monts. Je souhaite que les quelques jours qui nous séparent de l'ouverture du grand Jubilé soient pour chacun l'occasion d'une préparation fervente à la célébration de la venue du Fils de Dieu dans notre humanité. A tous, je donne de grand coeur la Bénédiction apostolique.




Mercredi 22 décembre 1999 Vivre le mystère de l'Incarnation

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  Lecture: (Jn 1,1-3 Jn 1,14)


1. L'Audience habituelle du mercredi se déroule aujourd'hui dans le climat liturgique et spirituel de l'Avent, rendu encore plus intense par l'imminence des fêtes de Noël. La neuvaine du Saint Noël, que nous sommes en train de vivre au cours de ces journées, constitue un itinéraire liturgique qui nous accompagne dans notre engagement de préparation à la célébration du grand "événement" qui a eu lieu il y a vingt siècles: elle nous invite à méditer sur les aspects profonds du mystère de l'Incarnation et à les accueillir dans notre existence.

En ce Noël de l'année 1999, nous nous apprêtons à vivre un événement extraordinaire. Au cours de la Nuit Sainte, désormais proche, commencera en effet le grand Jubilé de l'An 2000, auquel l'Eglise se prépare avec foi depuis si longtemps, et cela confère une force supplémentaire à notre attente. Au cours de la dernière période de ce temps de l'Avent, la liturgie souligne l'attente de toute la création. C'est comme si cette dernière, après deux mille ans, ressentait avec une joie renouvelée l'arrivée de Celui qui en recompose de façon encore plus parfaite l'harmonie primordiale, bouleversée par le péché.


2. Très chers frères et soeurs! Préparons-nous dès à présent à vivre avec une intense participation l'événement salvifique de Noël, en commençant avec une joie profonde l'Année jubilaire. Nous contemplons dans la pauvreté de la crèche le grand "événement" de l'Incarnation: Dieu se fait homme pour rencontrer chacun de nous. Laissons ce grand Mystère transformer notre existence au cours de tout le temps de grâce du Jubilé. Revivons l'expérience émouvante et exaltante des pasteurs, qui accueillirent avec promptitude l'annonce apportée par les anges, et qui se mirent en route immédiatement pour adorer le Seigneur, devenant ainsi les premiers témoins de sa présence dans le monde.


3. Que la Vierge Marie, qui fut la première à préparer une demeure digne pour le Messie promis et qui aujourd'hui encore le présente au monde, nous enseigne à ouvrir, et même à ouvrir en grand les portes de notre coeur au message de lumière et de paix de Noël.

Avec ces sentiments et dans le contexte de joie spirituelle dû à l'ouverture imminente du grand Jubilé de l'An 2000, je suis heureux d'adresser à chacun de vous mes voeux les plus affectueux. J'étends ces sentiments cordiaux à ceux qui sont opprimés par la souffrance, à ceux qui doivent supporter les lourdes conséquences de la guerre et à ceux qui se trouvent face à des difficultés particulières. Je souhaite à tous de pouvoir ressentir au cours des prochaines fêtes le réconfort dérivant de la présence du Seigneur, témoignée à travers des gestes significatifs d'amour et de solidarité.


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Parmi les pèlerins qui assistaient à l'Audience générale du 22 décembre 1999, se trouvaient les groupes suivants auxquels le Saint Père s'est adressé en français:

De France: Collège-Lycée "Marc Delannoy", de Douai; Institution "Stanislas", de Nice.

Du Liban: Groupe d'étudiants.

Chers Frères et Soeurs,

Nous nous apprêtons à vivre un événement extraordinaire. Après l’intense préparation qui a ravivé notre foi, l’ouverture du grand Jubilé, qui célébrera la venue du Rédempteur, va nous redonner une joie immense.

Je souhaite donc à tous les chrétiens de vivre joyeusement cette fête du mystère admirable de l’Incarnation. Je souhaite à tous les hommes de bonne volonté, notamment aux jeunes, d’accueillir la Bonne Nouvelle du salut. Ma pensée se tourne aussi vers ceux qui souffrent et qui vivent dans des situations de conflits : que le Seigneur soit leur véritable espérance ! A tous, je souhaite de faire l’expérience de la présence du Seigneur qui aime, qui réconcilie et qui nous fait le don de la joie.

J'accueille avec plaisir les pèlerins de langue française, notamment le groupe d'étudiants du Liban. Que le grand Jubilé fortifie leur foi! Avec la Bénédiction apostolique.



Mercredi 29 décembre 1999

29129   1. Dimanche dernier, la liturgie nous a présenté la Sainte Famille de Nazareth, modèle de toute famille qui se laisse guider par l'action surprenante de Dieu.

Dans le monde occidental, Noël est considéré comme la fête de la famille. Se retrouver ensemble et échanger des dons souligne le fort désir de communion réciproque et met en lumière les valeurs les plus élevées de l'institution familiale. Celle-ci se redécouvre comme communion d'amour entre personnes, fondée sur la vérité, sur la charité, sur la fidélité indissoluble des conjoints, sur l'accueil à la vie. Dans la lumière de Noël, la famille ressent sa vocation à être une communauté de projets, de solidarité, de pardon, de foi, où chaque individu ne perd pas sa propre identité, mais, apportant ses dons spécifiques, contribue à la croissance de tous. C'est ce qui a eu lieu dans la Sainte Famille, que la foi présente comme début et modèle des familles illuminées par le Christ.


2. Prions afin que le grand Jubilé, qui vient de commencer, soit réellement une occasion de grâce et de rédemption pour toutes les familles du monde. Que la lumière de l'Incarnation du Verbe les aide à mieux comprendre et à réaliser leur vocation originelle, le projet que le Dieu de la vie a pour eux, afin qu'ils deviennent une image vivante de son amour.

Le Jubilé offrira ainsi l'opportunité d'un temps de conversion et de pardon réciproque au sein de chaque famille. Ce sera une période propice pour renforcer les relations d'affection dans chaque famille et pour recomposer les cellules familiales divisées. Que chaque famille chrétienne prenne toujours plus conscience de sa haute mission dans l'Eglise et dans le monde! Aujourd'hui l'on ressent le besoin d'une attention particulière à l'égard de chaque famille, en particulier envers les plus pauvres et les moins sereines; il est nécessaire d'encourager et d'accueillir la vie naissante, car chaque enfant qui vient au monde est don et espérance pour tous.

3. A notre époque, où "la famille, comme les autres institutions et peut-être plus qu'elles, a été atteinte par les transformations, larges, profondes et rapides, de la société et de la culture", il est important que de la part des croyants soit réaffirmé avec vigueur que "le mariage et la famille constituent l'un des biens les plus précieux de l'humanité". C'est pourquoi l'Eglise ne se lasse pas de se mettre au "service de tout homme soucieux du sort du mariage et de la famille" (Familiaris consortio
FC 1).

Que le grand Jubilé de l'An 2000 soit pour toutes les familles une occasion pour ouvrir avec courage les portes au Christ, unique Rédempteur de l'homme. En effet, le Christ est la nouveauté qui dépasse toute attente de l'homme, le critère ultime pour juger la réalité temporelle et chaque projet qui vise à rendre l'existence de l'homme toujours plus humaine (cf. Incarnationis mysterium, n. 1).

Avec cette conscience, nous entrons en esprit dans la maison de Nazareth et nous demandons à la Sainte Famille de protéger et de bénir les familles du monde, afin qu'elles soient "une école d'humanité plus complète et plus riche" (Gaudium et spes GS 52).


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Parmi les pèlerins qui assistaient à l'Audience générale du 29 décembre 1999, se trouvaient les groupes suivants auxquels le Saint-Père s'est adressé en français:

De France: Groupe de prêtres du diocèse de Moulins; pèlerinage de l'Association Saint-Benoît, patron de l'Europe; pèlerins des diocèses d'Autun, de Chalon et Mâcon; de Cambrai; groupe des Pueri Cantores; pèlerins de Paris, de Solesmes, de Toulon.


Chers frères et soeurs,

Le Jubilé est un moment privilégié pour rendre grâce à Dieu, dont la tendresse remplit de lumière les réalités humaines. La liturgie de dimanche dernier nous a présenté la Sainte Famille de Nazareth comme modèle d'une famille qui se laisse guider par l'action surprenante de Dieu.

A Noël, une grâce spéciale est donnée à la famille: elle se redécouvre comme communion d'amour entre les personnes, fondée sur la vérité, la charité, l'indissoluble fidélité des conjoints et l'accueil de la vie. Elle perçoit sa vocation à être une communauté de valeurs, de projets, de solidarité, de pardon et de foi; chacun de ses membres y apporte ses dons spécifiques et contribue à la croissance de tous.

La Sainte Famille, en qui se réalise de façon spéciale le dessein originel du Créateur, est le modèle de toutes les familles. Prions pour que le grand Jubilé soit pour elles une occasion de réaliser toujours davantage leur vocation et le projet que Dieu à sur elles; ainsi elles deviendront des images vivantes de son amour. Demandons à la Sainte Famille de Nazareth de protéger et de bénir toutes les familles du monde pour qu'elles soient des écoles d'enrichissement humain et spirituel.
                                  
Je salue cordialement les pèlerins de langue française, en particulier les jeunes du diocèse de Cambrai et les membres de l'association Saint-Benoît, patron de l'Europe. Je souhaite que le temps de Noël soit pour chacun l'occasion d'entrer avec joie et ferveur dans la démarche spirituelle du grand Jubilé. A tous je donne de grand coeur la Bénédiction apostolique.


J'accueille avec plaisir les pèlerins francophones venus ce matin. En ce jour où nous célébrons la naissance du Sauveur des hommes, je leur souhaite d'entrer avec joie et ferveur dans la démarche spirituelle du grand Jubilé. A tous je donne de grand coeur la Bénédiction apostolique.




Mercredi 5 janvier 2000

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Lecture:
Lc 1,26-28

1. Quelques jours après l'ouverture du grand Jubilé, je suis heureux de commencer aujourd'hui la première Audience générale de l'An 2000, en présentant à tous mes meilleurs voeux pour l'Année jubilaire: que celle-ci constitue véritablement un "temps fort" de grâce, de réconciliation et de renouveau intérieur.

L'an dernier, la dernière année consacrée à la préparation immédiate au Jubilé, nous avons approfondi ensemble le mystère du Père. Aujourd'hui, en conclusion de ce cycle de réflexions et presque en introduction particulière aux catéchèses de l'Année Sainte, nous voulons nous arrêter une fois de plus avec amour sur la personne de Marie.

"Fille de prédilection du Père" (Lumen gentium LG 53), en Elle s'est manifesté le dessein divin d'amour pour l'humanité. La destinant à devenir la mère de son Fils, le Père l'a choisie parmi toutes les créatures et l'a élevée à la plus haute dignité et mission au service de son peuple.

Ce dessein du Père commence à se manifester dans le "Proto-évangile", lorsque, à la suite de la chute d'Adam et d'Eve, Dieu annonce qu'il mettra une hostilité entre le serpent et la femme: ce sera le fils de la femme qui écrasera la tête du serpent (cf. Gn Gn 3,15).

La promesse commence à se réaliser dans l'Annonciation, lorsque Marie reçoit la proposition de devenir la Mère du Sauveur.


2. "Réjouis-toi, pleine de grâce" (Lc 1,28). La première parole que le Père adresse à Marie, à travers son ange, est une formule de salut qui peut être entendue comme une invitation à la joie, invitation qui fait écho à celle adressée à tout le peuple d'Israël par le prophète Zacharie: "Exulte avec force, fille de Sion! Voici que ton roi vient à toi" (Za 9,9 cf. également So 3,14-18). A travers cette première parole adressée à Marie, le Père révèle son intention de communiquer la joie, celle qui est véritable et définitive, à l'humanité. La joie propre au Père, qui consiste à avoir son Fils auprès de lui, est offerte à tous, mais elle est confiée avant tout à Marie, afin qu'à partir d'elle, elle se diffuse dans la communauté des hommes.


3. Pour Marie, l'invitation à la joie est liée au don particulier qu'elle avait reçu du Père: "Pleine de grâce". L'expression grecque est souvent traduite, non sans raison, par "pleine de grâce": il s'agit en effet d'une abondance qui atteint son degré maximum.

Nous pouvons noter que l'expression résonne comme si elle constituait le nom même de Marie, le "nom" qui lui a été donné par le Père dès l'origine de son existence. En effet, depuis la conception, son âme est comblée de toutes les bénédictions, qui lui ouvriront un chemin d'éminente sainteté, tout au long de son existence terrestre. Sur le visage de Marie, on aperçoit le reflet du visage mystérieux du Père. La tendresse infinie de Dieu-Amour se révèle dans les traits maternels de la Mère de Jésus.


4. Marie est la seule mère qui peut dire, en parlant de Jésus, "mon fils", comme le dit le Père: "Tu es mon Fils" (Mc 1,11). Pour sa part, Jésus dit au Père: "Abba", "Papa" (cf. Mc Mc 14,36), tandis qu'il dit "Maman" à Marie, exprimant dans ce nom toute son affection filiale.

Au cours de sa vie publique, lorsqu'il laisse sa mère à Nazareth, en la rencontrant, il l'appelle "femme", pour souligner que désormais il prend des ordres uniquement du Père, mais également pour déclarer qu'elle n'est pas simplement une mère biologique, mais qu'elle a une mission à accomplir en tant que "Fille de Sion" et mère du peuple de la nouvelle Alliance. En tant que telle, Marie demeure toujours orientée vers la pleine adhésion à la volonté du Père.

Ce n'était pas le cas de toute la famille de Jésus. Le quatrième Evangile nous  révèle  que ses  parents  "ne croyaient pas en lui" (Jn 7,5) et Marc rapporte qu'ils "partirent pour se saisir de lui, car ils disaient: "il a perdu le sens"" (Mc 3,21). On peut dire que les dispositions intimes de Marie étaient totalement diverses. C'est ce dont nous assure l'Evangile de Luc, dans lequel Marie se présente comme "l'humble servante du Seigneur" (Lc 1,38). C'est à cette lumière que doit être lue la réponse donnée par Jésus lorsqu'on "l'informa: "ta mère et tes frères se tiennent dehors et veulent te voir"" (Lc 8,20 cf. Mt Mt 12,46-47 Mc 3,32); Jésus répondit: "Ma Mère et mes frères, ce sont ceux qui écoutent la Parole de Dieu et la mettent en pratique" (Lc 8,21). En effet, Marie est un modèle d'écoute de la Parole de Dieu (cf. Lc Lc 2,19 Lc Lc 2,51) et de docilité à son égard.


5. La Vierge a conservé et renouvelé avec persévérance la totale disponibilité qu'elle avait exprimée dans l'Annonciation. L'immense privilège et la suprême mission d'être la Mère du Fils de Dieu, n'ont pas changé son attitude d'humble soumission au dessein du Père. Parmi les autres aspects de ce plan divin, Elle a pris l'engagement éducatif impliqué dans sa maternité. La mère n'est pas seulement celle qui enfante mais également celle qui s'engage activement dans la formation et le développement de la personnalité de son fils. Le comportement de Marie a certainement suscité une influence sur la conduite de Jésus. On peut penser, par exemple, que le geste du lavement des pieds (cf. Jn Jn 13,4-5), laissé aux disciples comme modèle à suivre (cf. Jn Jn 13,14-15), reflète ce que Jésus lui-même avait observé depuis son enfance dans le comportement de Marie, lorsqu'Elle lavait les pieds des hôtes, dans un esprit d'humble service.

Selon le témoignage de l'Evangile, au cours de la période passée à Nazareth, Jésus était "soumis" à Marie et Joseph (cf. Lc Lc 2,51). Il reçut ainsi une véritable éducation de Marie qui forma son humanité. D'autre part, Marie se laissait influencer et former par son fils. Dans la manifestation progressive de Jésus, elle a découvert toujours plus profondément le Père et lui a fait l'hommage de tout l'amour de son coeur filial. Son devoir consiste désormais à aider l'Eglise à marcher comme elle sur les traces du Christ.

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De France: Groupe de pèlerins de Toulon.
De Belgique: Groupe de professeurs du petit Séminaire de Saint-Roch.

Salut en langue française

Au début de la nouvelle année, j'adresse à tous mes voeux les plus cordiaux. Au début de l'Année Sainte, il convient de contempler la Vierge Marie. Le dessein d'amour de Dieu pour l'humanité s'est manifesté de manière toute spéciale en elle, la "Fille de prédilection du Père". L'annonce faite à Marie commence par une invitation à la joie: "Réjouis-toi, pleine de grâce" (Lc 1,28). C'est la joie propre au Père, joie qu'il veut communiquer et il confie à Marie de la donner au monde. L'infinie tendresse de Dieu, qui est amour, se manifeste à travers la Mère de Jésus.

Tout au long de sa vie publique, Jésus appellera sa Mère "Femme", pour signifier qu'elle devient la Mère du peuple de la Nouvelle Alliance, modèle d'écoute de la Parole de Dieu, toujours docile à la volonté du Père. Tout en assumant son rôle éducatif de mère, dont le comportement a certainement eu une influence sur Jésus, Marie se laissera aussi former par son Fils et découvrira toujours plus profondément le Père. Aujourd'hui, Marie aide l'Eglise à marcher sur les traces du Christ.

                                  
Je salue très cordialement les pèlerins de langue française, en particulier le groupe du petit Séminaire de Saint-Roch, en Belgique. Je souhaite que l'événement du grand Jubilé soit pour chacun source de renouvellement spirituel. A tous, je donne de grand coeur la Bénédiction apostolique.




Catéchèses S. J-Paul II 11299