Catéchèses S. J-Paul II 16020

Mercredi 16 Février 2000

16020 Lecture: Gn 12,1-3

1. Après l'ouverture de la Porte Sainte dans les quatre basiliques romaines, nous avançons à présent à grands pas dans l'itinéraire ecclésial de conversion et de réconciliation proposé par le Jubilé. Comme on le sait, l'un des aspects spirituels les plus significatifs et profonds du jubilé est le pèlerinage, signe de la condition même de chaque être humain en tant qu'homo viator. Comme je l'ai souligné dans la Bulle d'Indiction du Jubilé, "c'est un exercice d'ascèse salutaire, de repentance pour les faiblesses humaines, de vigilance constante sur sa propre fragilité, de préparation intérieure à la réforme du coeur" (cf. Incarnationis mysterium, n. 7).

Cette signification intérieure du pèlerinage est ultérieurement approfondie et complétée par les contenus de foi et de spiritualité qui émanent des lieux sacrés, qui, selon une antique tradition, sont des buts de pèlerinages individuels et communautaires. En effet, comme le temps, l'espace est lui aussi marqué par des interventions salvifiques particulières de Dieu et, précisément pour cette raison, certains lieux peuvent favoriser un contact particulier avec le divin (cf. Lettre sur le pèlerinage, n. 2).


2. Conscient de ces contenus spirituels fondamentaux du pèlerinage, j'ai décidé de visiter, en référence aux célébrations jubilaires, la terre qui a été marquée de façon singulière par les interventions de Dieu dans l'Histoire du salut. C'est pourquoi, au cours des prochaines semaines, je me rendrai en pèlerinage, si Dieu le veut, dans certains lieux particulièrement liés à l'incarnation du Verbe de Dieu.

J'aurais surtout désiré visiter Ur des Chaldéens (cf. Lettre sur le pèlerinage n. 5), l'actuelle Tal al Muqayyar dans le sud de l'Irak, lieu d'origine d'Abraham, qui se rendit ensuite avec sa famille à Carran (cf. Gn Gn 31), où, selon le récit biblique, il entendit la Parole du Seigneur qui l'invitait à quitter sa terre et à se mettre en marche vers le pays qu'il lui aurait indiqué (cf. Gn Gn 12,1-3).

A travers cette invitation, Abraham devenait l'instrument d'un dessein de salut qui devait concerner le futur peuple de l'Alliance et même tous les peuples du monde. Il obéit et se mit en route. Avec lui, le salut de Dieu commença à marcher sur les routes de l'histoire humaine.


3. C'est pourquoi il est important "de marcher sur les traces d'Abraham", pour redécouvrir les traces de la présence aimante de Dieu aux côtés de l'homme et revivre l'expérience de foi de celui que saint Paul qualifiera de père de tous eux qui, circoncis ou non circoncis, croient (cf. Rm Rm 4,11-12). Avec sa foi traduite en choix concrets et parfois même dramatiques, comme l'abandon de la sécurité de sa propre terre ou le sacrifice de son unique fils Isaac, Abraham obtint cette justice qui fit de lui l'ami de Dieu, il adhéra pleinement au plan divin pour lui et pour sa descendance et il devint le chef d'une multitude de croyants.

En marchant "sur les traces d'Abraham" on apprend donc à évaluer concrètement les exigences d'une attitude de foi authentique et on fait l'expérience du dynamisme de l'initiative divine, qui aura son point d'arrivée dans le Christ.

Conscients de leur lien indéfectible avec l'antique peuple de l'Alliance, les chrétiens reconnaissent en Abraham le "Père dans la foi" par excellence et ils sont heureux d'en imiter l'exemple en se mettant en chemin "sur ses traces".


4. C'est en raison de ces considérations que, au nom de toute l'Eglise, j'aurais voulu me rendre pour prier et pour réfléchir sur le lieu d'où Abraham partit, Ur des Chaldéens. Cela ne m'étant pas possible, je désire réaliser tout au moins spirituellement un tel pèlerinage. C'est pourquoi, mercredi prochain, lors d'une célébration spéciale qui aura lieu dans la Salle Paul VI, nous revivrons ensemble les moments marquants de l'expérience d'Abraham, tout en sachant que vers le grand Patriarche se tournent non seulement ceux qui peuvent se vanter de descendre physiquement de sa personne, mais également tous ceux qui se sentent ses descendants spirituels.

Après cette première étape, il sera possible de poursuivre, l'âme remplie de gratitude, vers les autres étapes à travers lesquelles s'est développée l'Histoire du salut, à commencer par le Mont Sinaï, où Moïse eut la révélation du Très Saint Nom de Dieu et fut introduit à la connaissance de son mystère.

Je vous invite dès à présent à m'accompagner par la prière dans mon pèlerinage sur les lieux liés à l'Histoire du salut, qui commencera précisément mercredi prochain par la célébration spéciale consacrée à Abraham, père de tous les croyants.

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Parmi les pèlerins qui assistaient à l'Audience générale du 17 février 2000 se trouvaient les groupes suivants, auxquels le Saint-Père s'est adressé en français:

De France: Pèlerinage du diocèse de Bordeaux, accompagné par S. Em. le Card. Pierre Eyt; groupe de jeunes du diocèse d'Orléans, accompagnés par Mgr Gérard Daucourt; pèlerinage de la Congrégation Saint-Jean; paroisse Notre-Dame de Picardie Verte, de Grandvilliers; paroisse Saint-François-Xavier, de Marseille; paroisse de Bonnière-sur-Seine; groupe de Scouts du diocèse de Tulle; groupe de pèlerins de Pourrières; d'Orléans; de Cambrai; groupe de la Congrégation des Ursulines; Collège catholique-séminaire de Valbourg; Collège du Sacré-Coeur, de Severac-le-Château; Collège "Jeanne-d'Arc", de Surgères; Ecole Saint-Georges, d'Entraygues-sur-Truyères; Collège de Carqueiranne.

De Suisse: Confirmands des paroisses de Lausanne.

Chers Frères et Soeurs,

L'un des aspects les plus significatifs du Jubilé est le pèlerinage. Dans cet esprit, j'aurais voulu visiter avant tout le lieu où, selon les textes bibliques, Abraham entendit la Parole du Seigneur qui l'invitait à laisser sa terre et à partir vers le pays qu'il lui indiquerait. En marchant à sa suite, nous redécouvrons les traces de la présence aimante de Dieu aux côtés de l'homme et nous revivons l'expérience de foi de celui que saint Paul qualifiera de père de tous ceux qui croiraient (cf. Rm Rm 4,11-12).

Ne pouvant pas me rendre à Ur des Chaldéens, je souhaite réaliser spirituellement ce pèlerinage. Pour cela, mercredi prochain, au cours d'une célébration à la salle Paul VI, nous revivrons les grands moments de l'expérience d'Abraham. Après cette étape, il sera possible de poursuivre le pèlerinage dans les lieux particulièrement marqués par les interventions de Dieu dans l'histoire du salut, en commençant par le Mont Sinaï où Moïse reçut la révélation du saint Nom de Dieu et où il fut introduit dans la connaissance de son mystère. Je vous invite à m'accompagner par la prière.

Je suis heureux d'accueillir les francophones présents ce matin. Je salue particulièrement les pèlerins des diocèses de Bordeaux, d'Orléans et de Beauvais. J’adresse un salut spécial à la Congrégation Saint-Jean: puisse chacun de vous discerner sa vocation et y demeurer fidèle, pour continuer à répondre généreusement aux appels de l’Eglise ! Que l'année jubilaire vous aide à grandir dans la foi au Christ et à en témoigner avec ardeur !

A tous je donne de grand coeur la Bénédiction apostolique.





Mercredi 23 Février 2000

23200 Je me rendrai à présent dans la Salle Paul VI, où je présiderai une célébration liturgique en souvenir du Patriarche Abraham, notre père dans la foi. Ce sera la première étape de ce pèlerinage dans divers lieux liés à l'histoire du salut que je poursuivrai demain en partant pour l'Egypte et le Mont Sinaï.

La place Saint-Pierre est reliée par la télévision avec la Salle Paul VI: ceux qui le souhaiteront pourront rester pour suivre sur les écrans géants disposés sur la place la cérémonie qui se déroulera dans la salle toute proche; ils se mettront ainsi spirituellement en marche "sur les traces d'Abraham". Ils pourront revivre le moment initial de cette "histoire du salut" qui atteignit son sommet lorsque, dans la plénitude des temps, le Fils de Dieu naquit de la Vierge Marie. L'histoire d'Abraham possède une importance fondamentale pour les croyants de chaque époque et donc aussi pour nous qui nous tournons vers lui comme vers un modèle de soumission inconditionnée à la volonté de Dieu.

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Parmi les pèlerins qui assistaient à l'Audience générale du 23 février 2000, se trouvaient les groupes suivants, auxquels le Saint-Père s'est adressé en français:

De France: Lycée "Immaculée Conception", de Villeurbanne; Collège Saint-Victor, de Valence; Collège Saint-François-de-Sales, de Dijon; Collège Victor de Laprade, de Montbrison; Centre scolaire Saint-Paul, de Lille; groupe de pèlerins des diocèses de Chartres; de Marseille.

Chers Frères et Soeurs,

Je souhaite que le grand Jubilé soit pour tous une expérience de foi, avec une conversion du coeur par un changement de vie, en vue du témoignage évangélique renouvelé. Puissiez-vous retrouver l’amitié avec Dieu et sa grâce, pour des relations fraternelles avec tous !

Je salue cordialement les pèlerins de langue française, notamment les séminaristes de Nancy, les jeunes de Toulouse et les confirmands de Reims. Qu’ils marchent toujours sur les traces du Christ ! A tous, j’accorde volontiers la Bénédiction apostolique.




Mercredi 1er mars 2000

10300
  1. C'est avec une grande joie que j'ai pu me rendre, la semaine dernière, en pèlerinage en Egypte, sur les traces de Moïse. Le moment culminant de cette expérience extraordinaire a été la visite au pied du Mont Sinaï, la Montagne sainte: sainte, car c'est sur elle que Dieu s'est révélé à son serviteur Moïse et lui a manifesté son Nom; sainte, également, parce que Dieu y a fait don à son peuple de sa Loi, les Dix Commandements: sainte, enfin, parce que les croyants, à travers leur présence constante, ont fait du Mont Sinaï un lieu de prière.

Je rends grâce à Dieu de m'avoir accordé de m'arrêter en prière sur le lieu où Il a introduit Moïse à une connaissance plus claire de son mystère, en lui parlant du buisson ardent, et où il lui offrit, ainsi qu'au peuple élu, la loi de l'Alliance, loi de vie et de liberté pour tout homme. De cette alliance, Dieu lui-même se fit le fondement et le garant.


2. Comme j'ai eu l'occasion de le dire samedi dernier, les Dix Commandements nous ouvrent l'unique avenir véritablement humain et cela parce qu'ils ne sont pas imposés de façon arbitraire par un Dieu tyrannique. Yahvé les a écrits sur la pierre, mais il les a gravés avant tout dans chaque coeur humain comme loi morale universelle valable et actuelle en tout lieu et en tout temps. Cette loi empêche que l'égoïsme et que la haine, le mensonge et le mépris ne détruisent la personne humaine. Les Dix Commandements, avec leur rappel constant à la divine Alliance, mettent en lumière le fait que le Seigneur est notre Dieu unique et que tout autre divinité est fausse et finit par réduire en esclavage l'être humain, le conduisant à la perte de sa dignité humaine.

"Ecoute Israël [...] tu aimeras Yahvé ton Dieu de tout ton coeur, de toute ton âme et de tout ton pouvoir. Que ces paroles, que je te dicte aujourd'hui, restent dans ton coeur!" (
Dt 6,4-7). Ces paroles, que le juif pieux répète chaque jour, retentissent également dans le coeur de chaque chrétien. "Ecoute! Que ces paroles restent dans ton coeur!". On ne peut vouloir rester fidèles à Dieu si l'on n'observe pas la Loi. Etre fidèles à Dieu, par ailleurs, signifie également être fidèles à soi-même, à sa nature authentique et à ses aspirations les plus profondes et irrépressibles.


3. Je remercie l'Archevêque Damianos, Higoumène du monastère de Sainte-Catherine, ainsi que ses moines, pour la profonde cordialité avec laquelle ils m'ont accueilli. L'Archevêque, qui m'attendait à l'entrée du monastère, m'a illustré les précieuses "reliques bibliques" qui y sont conservées: le puits de Ietro et surtout les racines du "buisson ardent", à côté desquelles je me suis agenouillé en repensant aux paroles avec lesquelles Dieu a révélé à Moïse le mystère de son être: "Je suis celui qui suis". J'ai pu en outre admirer les magnifiques oeuvres d'art, jaillies au cours des siècles de la contemplation et de la prière des moines.

Avant la célébration de la Parole, l'Archevêque Damianos a rappelé que, précisément au-dessus de nous s'élève le Mont Horeb, avec la cime du Mont Sinaï, le pic du Décalogue, le lieu dans lequel "dans le feu et dans l'obscurité", Dieu parla à Moïse. C'est dans ce cadre que depuis des siècles, une communauté de moines poursuit l'idéal de la perfection chrétienne dans une "constante coercition de la nature et un contrôle inlassable des sens", utilisant les moyens traditionnels du dialogue spirituel et de la pratique ascétique. Au terme de la rencontre, l'Archevêque et quelques-uns de ses moines m'ont accompagné cordialement jusqu'à l'aéroport.


4. Je profite volontiers de l'occasion pour renouveler mes remerciements au Président Mubarak, aux représentants des Autorités égyptiennes et à tous ceux qui ont contribué à la réalisation du voyage. L'Egypte est le berceau d'une civilisation très ancienne. La foi chrétienne y est arrivée dès les temps apostoliques, en particulier avec saint Marc, disciple de Pierre et de Paul et fondateur de l'Eglise d'Alexandrie.

Au cours du pèlerinage, j'ai eu des entretiens avec Sa Sainteté le Patriarche Chenouda III, chef de l'Eglise copte orthodoxe et avec Mohamed Sayed Tantawi, grand Cheikh d'Al-Azhar et chef religieux de la communauté musulmane. Je lui exprime ma reconnaissance, qui s'étend également à Sa Béatitude Stéphanos II Ghattas, Patriarche des Coptes catholiques, et aux autres archevêques et évêques présents.

Je renouvelle mon salut à la petite, mais fervente, communauté catholique, que j'ai rencontrée au cours de la célébration solennelle de la Messe au Caire, à laquelle ont participé toutes les Eglises catholiques présentes en Egypte: copte, latine, maronite, grecque, arménienne, syrienne et chaldéenne. Autour de la Table du Seigneur, nous avons célébré notre foi commune et nous avons recommandé à Dieu l'élan de vie et d'apostolat des frères et soeurs égyptiens, qui témoignent avec tant de sacrifices et de générosité de leur adhésion fidèle à l'Evangile dans le pays où la Sainte Famille a trouvé refuge il y a deux mille ans.

Je conserve un souvenir reconnaissant de la rencontre significative que j'ai eue avec les représentants et fidèles des Eglises et communautés ecclésiales non catholiques présentes en Egypte. Que les progrès oecuméniques, qui avec la grâce de l'Esprit Saint, ont été accomplis au cours du XX siècle, puissent connaître des développements supplémentaires, qui rapprochent toujours plus l'objectif de la pleine unité, pour laquelle le Seigneur Jésus a prié ardemment.


5. Le Mont Sinaï rappelle aujourd'hui à mon esprit un autre mont sur lequel, si Dieu le veut, j'aurai la joie de me rendre à la fin de ce mois: le Mont des Béatitudes en Galilée. Dans le sermon sur la montagne, Jésus dit ne pas être venu pour abolir la Loi antique, mais pour la perfectionner (cf. Mt Mt 5,17). En effet, depuis que le Verbe de Dieu s'est incarné et est mort pour nous sur la Croix, les Dix Commandements se font entendre à travers sa voix. Il les enracine, à travers la vie nouvelle de la Grâce, dans le coeur de celui qui croit en Lui. Le disciple de Jésus ne se sent donc pas opprimé par une multitude de prescriptions, mais, poussé par la force de l'amour, il ressent les commandements de Dieu comme une loi de liberté: la liberté d'aimer grâce à l'action intérieure de l'Esprit.

Les Béatitudes représentent le complément évangélique de la Loi du Sinaï. L'Alliance alors stipulée avec le Peuple juif trouva son perfectionnement dans l'Alliance nouvelle et éternelle scellée dans le sang du Christ. Le Christ est la Loi nouvelle et c'est en lui qu'est offert le salut de tous les peuples.

Je confie à Jésus-Christ la prochaine étape de mon pèlerinage jubilaire, qui sera la Terre Sainte. Je demande à chacun de m'accompagner par la prière dans la préparation, surtout spirituelle, de cet événement important.

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Parmi les pèlerins présents à l'Audience générale du 1 mars 2000, se trouvaient les groupes suivants, auxquels le Saint-Père s'est adressé en français:

De France: Paroisses Saint-Sauveur et Saint-Pierre, d'Aubagne; paroisse Saint-Raymond, de Pradet; paroisse Saint-Esprit, de Montpellier; paroisse de Gaillac; paroisse de Pont-Saint-Esprit; groupe de l'Abbaye de Sylvanes; équipes Notre-Dame, de Cherbourg; Collège "Notre-Dame de Vaux", de Vaux-sur-Poligny; groupe de prière "La Sainte Famille", de Falck; groupe des AFC d'Albi.

Du Luxembourg: Ecole des Soeurs de la doctrine chrétienne du "Fiéldgen".

Du Canada: Les petits Chanteurs de l'Ile.


Chers Frères et Soeurs,

Je remercie Dieu de m’avoir permis de me rendre au Mont Sinaï, où Dieu s’est révélé à Moïse, lui manifestant son Nom et lui donnant les dix Commandements, la loi d’alliance avec son peuple. Cette loi ouvre un avenir pour l’homme ; elle est la loi de la vie, qui permet d’être fidèle à sa nature propre et à Dieu. Le Mont Sinaï renvoie au Mont des Béatitudes, où je me rendrai prochainement. C’est là que Jésus a dit qu’il était venu non pour abolir la loi donnée à Moïse, mais pour l’accomplir, présentant les dix Commandements comme une loi de liberté, celle d’aimer grâce à l’action intérieure de l’Esprit Saint.

Je remercie tous ceux qui m’ont accueilli, notamment le Président Moubarak, le grand Sheik d’Al-Azhar, Sa Sainteté Chenouda III, chef de l’Eglise copte orthodoxe. Je sais gré à l’Archevêque Damianos, Higoumène du monastère Sainte-Catherine, et à ses moines de m’avoir reçu avec cordialité, me permettant ainsi d’accomplir pleinement mon pèlerinage. Mes remerciements vont aussi à Sa Béatitude Stéphanos II Ghattas, Patriarche catholique d’Alexandrie des Coptes, à tous les Evêques et aux membres de la communauté catholique, qui ont contribué à la réussite de mon voyage.

J’accueille avec joie les pèlerins francophones, notamment les jeunes. Que leur pèlerinage jubilaire à Rome soit l’occasion d’une nouvelle conversion et d’un nouvel engagement dans la foi, avec le désir de vivre toujours davantage la loi de Dieu. Avec ma Bénédiction apostolique !



Mercredi 8 mars 2000

8030 1. Le Carême représente le point culminant du chemin de conversion et de réconciliation que l'Année jubilaire, temps privilégié de grâce et de miséricorde, propose à tous les croyants pour renouveler leur adhésion au Christ, unique Sauveur de l'homme. C'est ce que j'écrivais dans le Message pour le Carême 2000 et c'est dans cet esprit que nous entreprenons aujourd'hui, Mercredi des Cendres, l'itinéraire pénitentiel du Carême. La liturgie d'aujourd'hui nous invite à prier afin que le Père céleste accorde au peuple chrétien de commencer à travers le jeûne un parcours de véritable conversion, afin d'affronter victorieusement avec les armes de la pénitence le combat contre l'esprit du mal.

Tel est le message du grand Jubilé, qui au cours du Carême, devient encore plus éloquent. L'homme, chaque homme, est invité à la conversion et à la pénitence, et est poussé à l'amitié avec Dieu, afin qu'il reçoive en don la vie surnaturelle, qui comble les plus profondes aspirations de son coeur.


2. En recevant les cendres sur le front, nous nous rappelons que nous sommes poussière et que nous redeviendrons poussière. Cette pensée, qui est une certitude humaine, n'est pas répétée afin de susciter en nous une résignation passive à notre destin. Au contraire, en soulignant que nous sommes mortels, la liturgie nous rappelle l'initiative miséricordieuse de Dieu, qui veut nous faire participer à sa vie éternelle et bienheureuse.

Dans le rite suggestif de l'imposition des cendres, retentit pour le croyant une invitation à ne pas se laisser conditionner par les réalités matérielles qui, bien qu'appréciables, sont destinées à disparaître. Il doit plutôt se laisser transformer par la grâce de la conversion et de la pénitence pour atteindre les sommets courageux et apaisants de la vie surnaturelle. Ce n'est qu'en Dieu que l'homme se retrouve pleinement soi-même et découvre la signification ultime de son existence.
La porte jubilaire est ouverte à tous! qu'y entre celui qui se sait opprimé par la faute et qui se reconnaît pauvre de mérites; qu'y entre celui qui se sent comme une poussière que le vent disperse; qu'y vienne le faible et celui sans espoir pour y puiser une vigueur renouvelée dans le Coeur du Christ.


3. A l'imposition des cendres s'accompagne aujourd'hui la pratique traditionnelle de l'abstinence et du jeûne. Il ne s'agit certes pas de simples observances extérieures, d'accomplissements rituels, mais de signes éloquents d'un changement de vie nécessaire. Le jeûne et l'abstinence, en effet, fortifient le chrétien pour lutter contre le mal et pour le service à l'Evangile.

A travers le jeûne et la pénitence, on demande au croyant de renoncer à des biens et à des satisfactions matérielles légitimes, pour acquérir une plus grande liberté intérieure, en se rendant disponible à l'écoute attentive de la Parole de Dieu et à l'aide généreuse des frères dans le besoin.
L'abstinence et le jeûne doivent donc être accompagnés de gestes de solidarité envers ceux qui souffrent et traversent des moments difficiles. La pénitence devient ainsi partage avec ceux qui sont marginalisés et dans le besoin. Tel est l'esprit également du grand Jubilé, qui invite chacun à manifester de façon concrète l'amour du Christ envers ses frères privés du nécessaire, des victimes de la faim, de la violence et de l'injustice. Dans le Message pour le Carême, j'ai écrit à ce propos: "Comment pouvons-nous demander la grâce du Jubilé si nous sommes insensibles aux nécessités des pauvres, si nous ne nous engageons pas à garantir à tous  les moyens nécessaires pour vivre dignement?" (n. 5).


4. "Repentez-vous et croyez à l'Evangile" (
Mc 1,15). Ouvrons notre coeur à ces paroles, qui résonnent fréquemment au cours du Carême. Que le chemin de conversion et d'adhésion à l'Evangile, que nous entreprenons aujourd'hui, nous fasse sentir tous fils de l'unique Père et renforce le désir d'unité des croyants et de concorde entre les peuples. Je prie le Seigneur pour que chaque chrétien ressente profondément, en ce Carême jubilaire, l'engagement à se réconcilier avec Dieu, avec soi-même et avec ses frères. Telle est la voie afin que se réalise le désir de la pleine communion de tous les disciples du Christ. Que vienne bientôt le moment où, grâce à la prière et au témoignage fidèle des chrétiens, le monde reconnaisse Jésus comme unique Sauveur et, croyant en Lui, obtienne la paix.

Que la Très Sainte Vierge Marie nous guide dans ces premiers pas sur le chemin du Carême, afin que, franchissant la porte sainte de la conversion, nous ressentions tous la grâce d'être transfigurés à l'image du Christ.

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Parmi les pèlerins qui assistaient à l'Audience générale du 8 mars 2000, se trouvaient les groupes suivants, auxquels le Saint-Père s'est adressé en français:

De France: Paroisse Saint-Germain, de Rennes; groupe de pèlerins de La Chapelle d'Aurec, de Rueil Malmaison; Collège Victor Demange, de Boulay; Collège Bergpfad, d'Ham-sous-Varsberg; Institut Sonnenberg, de Carspach; Institut Saint-Jean-Eudes, de Vire; groupe "Prions en Eglise".

De Suisse: Ecole de la foi, de Fribourg; Paroisse d'Estavayer-le-Lac.

De Belgique: Paroisse d'Embourg; Lycée Sacré-Coeur, de Jette.


J'accueille avec plaisir les pèlerins de langue française, notamment les jeunes, et les étudiants de l'Ecole de la Foi de Fribourg. Je souhaite à tous d'entrer avec ardeur dans l'esprit du Carême et je les bénis de grand coeur.





Mercredi 29 mars 2000

29030   1. Après la commémoration d'Abraham et ma visite brève mais intense en Egypte et au Mont Sinaï, mon pèlerinage jubilaire dans les lieux saints m'a conduit dans la terre qui a vu la naissance, la vie, la mort et la résurrection de Jésus-Christ et les premiers pas de l'Eglise. La joie et la reconnaissance contenues dans mon âme pour ce don du Seigneur, que j'ai tant désiré, sont inexprimables. Après avoir été en Terre Sainte au cours du Concile Vatican II, j'ai à présent eu la grâce d'y revenir, avec plusieurs de mes collaborateurs, précisément en l'Année du grand Jubilé, bimillénaire de la naissance du Sauveur. Cela a été comme un retour aux origines, aux racines de la foi et de l'Eglise.

Je remercie le Patriarche latin et les Evêques des diverses Eglises orientales catholiques présents en Terre Sainte, ainsi que les Franciscains de la Custodie, de l'accueil chaleureux et du grand travail accompli. Je remercie vivement les Autorités jordaniennes, israéliennes et palestiniennes, qui m'ont accueilli et aidé dans mon itinéraire religieux. J'ai apprécié les efforts qu'elles ont fournis pour la bonne réussite du voyage et je leur ai renouvelé l'assurance de la sollicitude du Saint-Siège pour une paix juste entre tous les peuples de la région. Je suis reconnaissant aux populations de ces terres pour la grande cordialité qu'elles m'ont réservée.

2. La première étape - au Mont Nébo - était en continuité avec celle du Sinaï: du haut de ce mont, Moïse contempla la Terre promise, après avoir accompli la mission que Dieu lui avait confiée, et avant de Lui rendre son âme. J'ai précisément commencé mon itinéraire, dans un certain sens, par ce regard de Moïse, en ressentant sa profonde inspiration, qui franchit les siècles et les millénaires.

Ce regard se tournait vers la Vallée du Jourdain et le désert de Judée, là où, dans la plénitude des temps, devait retentir la voix de Jean le Baptiste, envoyé par Dieu, comme nouvel Elie, pour préparer la voie au Messie. Jésus voulut être baptisé par lui, révélant être l'Agneau de Dieu qui prenait sur lui le péché du monde. La figure de Jean-Baptiste m'a introduit sur les traces du Christ.

C'est avec joie que j'ai célébré une Messe solennelle dans le stade d'Amman pour la communauté chrétienne qui y réside, que j'ai trouvée riche de ferveur religieuse et bien insérée dans le contexte social du pays.

3. Après Amman, j'ai séjourné à la Délégation apostolique à Jérusalem. De là, ma première étape a été Bethléem, une ville où, il y a trois mille ans, le roi David vit le jour et où, mille ans après, selon les Ecritures, naquit le Messie. En cette année deux mille, Bethléem est placée au centre de l'attention du monde chrétien: en effet, c'est de là qu'est venue la Lumière des nations, le Christ Seigneur; de là est partie l'annonce de paix pour tous les hommes que Dieu aime.

Avec mes collaborateurs, les Ordinaires catholiques, plusieurs cardinaux et de nombreux autres évêques, j'ai célébré la Messe sur la place centrale de la ville, qui est attenante à la grotte dans laquelle Marie donna le jour à Jésus et le déposa dans une mangeoire. La joie de Noël, la joie du grand Jubilé s'est renouvelée dans le mystère. On avait l'impression d'entendre à nouveau l'oracle du prophète Isaïe: "Car un enfant nous est né, un fils nous a été donné" (
Is 9,5), ainsi que le message angélique: "Je vous annonce une grande joie, qui sera celle de tout le peuple: aujourd'hui vous est né un Sauveur, qui est le Christ Seigneur" (Lc 2,10-11).

Dans l'après-midi, je me suis agenouillé avec émotion dans la grotte de la Nativité, où j'ai senti présents spirituellement toute l'Eglise, tous les pauvres du monde, parmi lesquels Dieu a voulu dresser sa tente. Un Dieu qui, pour nous reconduire dans sa maison, est devenu exilé et réfugié. Cette pensée m'a accompagné alors que - avant de partir pour les Territoires autonomes palestiniens - je visitai, à Bethléem, l'un des nombreux camps où depuis trop longtemps vivent plus de trois millions de réfugiés palestiniens. Puisse l'engagement de tous permettre enfin de résoudre ce douloureux problème.

4. Le souvenir de Jérusalem est inoubliable dans mon âme. Grand est le mystère de cette ville, dans laquelle la plénitude du temps s'est faite, pour ainsi dire, "plénitude de l'espace". En effet, Jérusalem a accueilli l'événement central et culminant de l'histoire du salut: le mystère pascal du Christ. Là s'est révélé et réalisé le but pour lequel le Verbe s'est fait chair: dans sa mort sur la croix et dans sa résurrection, "tout s'est accompli" (cf. Jn Jn 19,30). Sur le Calvaire, l'Incarnation s'est manifestée comme Rédemption, selon le dessein éternel de Dieu.

Les pierres de Jérusalem sont les témoins muets et éloquents de ce mystère. A commencer par le Cénacle, où j'ai célébré la sainte Eucharistie, dans le lieu même où Jésus l'a instituée. En ce lieu, où est né le sacerdoce chrétien, j'ai fait mémoire de tous les prêtres, et j'ai signé la Lettre qui leur est adressée pour le prochain Jeudi Saint.

Les oliviers et le rocher du Gethsémani sont les témoins du mystère, où le Christ, pris d'une angoisse mortelle, a prié le père avant la Passion. Le Calvaire et la tombe vide, le Saint-Sépulcre, témoignent de ces heures dramatiques de façon toute particulière. Dimanche dernier, jour du Seigneur, j'ai renouvelé précisément là l'annonce de salut qui traverse les siècles et les millénaires: le Christ est ressuscité! Ce fut le moment où mon pèlerinage a atteint son sommet. C'est la raison pour laquelle j'ai ressenti le besoin de m'arrêter à nouveau en prière, dans l'après-midi, sur le Calvaire, où le Christ a versé son sang pour l'humanité.

5. A Jérusalem, Ville sainte pour les juifs, les chrétiens et les musulmans, j'ai rencontré les deux Rabbins Chefs d'Israël et le Grand Mufti de Jérusalem. J'ai ensuite rencontré les représentants des deux autres religions monothéistes, juive et musulmane. Jérusalem est appelée, même malgré de grandes difficultés, à devenir le symbole de la paix entre ceux qui croient dans le Dieu d'Abraham et se soumettent à sa loi. Puissent les hommes rendre plus proche l'accomplissement de ce dessein!

A Yad Vashem, Mémorial de la Shoah, j'ai rendu hommage aux millions de juifs victimes du nazisme. J'ai exprimé encore une fois ma profonde douleur pour cette tragédie terrifiante et j'ai dit à nouveau que "nous voulons nous souvenir" pour nous engager ensemble - juifs, chrétiens et tous les hommes de bonne volonté - à vaincre le mal par le bien, pour marcher sur la voie de la paix.

De nombreuses Eglises vivent aujourd'hui leur foi en Terre Sainte, héritières des antiques traditions. Cette diversité constitue une grande richesse, tant qu'elle est accompagnée de l'esprit de communion dans la pleine adhésion à la foi des Pères. La rencontre oecuménique, qui s'est déroulée au Patriarcat grec-orthodoxe et qui a vu une intense participation de tous, a marqué un pas important sur le chemin vers la pleine unité entre les chrétiens. Cela a été pour moi un motif de grande joie de pouvoir rencontrer Sa Béatitude Diodoros, Patriarche grec-orthodoxe de Jérusalem, et Sa Béatitude Torkom II Manoogian, Patriarche arménien de Jérusalem. J'invite chacun à prier, afin que le processus d'entente et de collaboration entre les chrétiens des diverses Eglises se consolide et se développe.

6. Une grâce singulière de ce pèlerinage a été de célébrer la Messe sur le Mont des Béatitudes, près du Lac de Galilée, avec de très nombreux jeunes provenant de Terre Sainte et du monde entier. Un moment riche d'espérance! En proclamant et en remettant aux jeunes les Commandements de Dieu et les Béatitudes, j'ai vu en eux l'avenir de l'Eglise et du monde.

Toujours sur les rives du Lac, j'ai visité avec une grande émotion Tabgha, où le Christ multiplia les pains, le "lieu de la primauté", où il confia à Pierre la direction pastorale de l'Eglise, et enfin, à Capharnaüm, les restes de la maison de Pierre et de la synagogue dans laquelle Jésus se révéla comme le Pain descendu du Ciel pour donner la vie au monde (Jn 6,26-58).

Galilée! Patrie de Marie et des premiers disciples; patrie de l'Eglise missionnaire parmi les nations! Je pense que Pierre l'a toujours conservée dans son coeur; et il en est de même pour son Successeur!

7. En la fête liturgique de l'Annonciation, en remontant presque aux sources du mystère de la foi, nous sommes allés nous agenouiller dans la grotte de l'Annonciation à Nazareth, où, dans le sein de Marie, "le Verbe s'est fait chair et a habité parmi nous" (Jn 1,14). Là, en écho du "fiat" de la Vierge, il est possible d'entendre, dans le silence de la prière, le "oui" plein d'amour de Dieu à l'homme, l'amen du Fils éternel, qui ouvre à chaque homme la voie du salut. Là, dans le don réciproque du Christ et de Marie, se trouvent les pivots de chaque "porte sainte". En ce lieu, où Dieu s'est fait homme, l'homme retrouve sa dignité et sa très haute vocation.

Je remercie ceux qui dans les différents diocèses, dans les maisons religieuses, dans les communautés contemplatives ont suivi spirituellement les pas de mon pèlerinage et je peux assurer que dans les lieux que j'ai visités, j'ai porté toute l'Eglise avec moi dans la prière. Alors que j'exprime encore au Seigneur ma reconnaissance pour cette inoubliable expérience, je Lui demande avec une humble confiance qu'il en extraie des fruits abondants pour le bien de l'Eglise et de l'humanité.



Je désire adresser une pensée aux chères populations des Philippines, où, dans la grande Ile de Mindanao, les tensions se sont malheureusement accrues, causant de violents affrontements. Je prie pour tous les habitants de cette région et, en particulier, pour les responsables politiques et militaires, afin que le Seigneur les illumine et les incite à faire tout le possible pour mettre un terme à la violence en recherchant des solutions pacifiques aux problèmes existants. J'exprime aux familles, qui souffrent à cause de cette situation, ma proximité et ma solidarité.


Salut en langue française

Chers frères et soeurs,

Après ma visite au Mont Sinaï, mon pèlerinage jubilaire aux Lieux Saints, où Moïse a pu contempler la terre promise et où s'est déroulée la vie terrestre du Christ et les premiers pas de l'Eglise, a été l'occasion d'une joie ineffable. C'est une grâce d'avoir pu parcourir, en esprit de prière, les traces de l'histoire du salut, où Dieu a dressé sa "tente" parmi nous. Pour ce don, ma reconnaissance au Seigneur est immense.

Je me réjouis d'avoir rencontré les représentants des religions juive et musulmane. Puisse Jérusalem devenir le symbole de la paix entre ceux qui croient au Dieu d'Abraham!

Mes remerciements vont au Patriarche latin, aux Evêques de Terre Sainte et aux Franciscains de la Custodie pour leur accueil chaleureux. J'exprime ma gratitude aux Autorités jordaniennes, israéliennes  et  palestiniennes,  qui ont permis la bonne réussite de mon voyage.

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Avec plaisir, j’accueille les pèlerins francophones, saluant particulièrement l’École Sainte-Marie de Neuilly, Monseigneur Soulier, Évêque de Limoges et ses diocésains, le groupe de prêtres de Montréal, ainsi que Monseigneur Sarah, archevêque de Conakry. À tous, je souhaite de bien se préparer aux célébrations pascales. Avec ma Bénédiction apostolique !




Catéchèses S. J-Paul II 16020