2Maccabées (LIT) 11

CHAPITRE 11

11 1 Très peu de temps après, Lysias, tuteur et parent du roi, l'administrateur du royaume, fort irrité par ce qui s'était passé,
2
rassembla environ quatre-vingt mille hommes et toute sa cavalerie, et marcha contre les Juifs. Il comptait faire de Jérusalem une ville grecque,
3
soumettre le Temple à l'impôt, tout comme les autres lieux de culte païens, et mettre en vente chaque année la dignité de grand prêtre.
4
Grisé par ses myriades de fantassins, ses milliers de cavaliers et ses quatre-vingts éléphants, il ne tenait aucun compte de la souveraineté de Dieu.
5
Il pénétra donc en Judée, s'approcha de Bethsour et en bloqua les issues. Or, cette place fortifiée était distante de Jérusalem d'environ cent cinquante stades.
6
Dès que ceux qui entouraient Judas Maccabée apprirent que Lysias assiégeait les forteresses, ils se mirent à se lamenter et à pleurer avec la foule, suppliant le Seigneur d'envoyer un bon ange pour sauver Israël.
7
Judas Maccabée lui-même, prenant les armes le premier, exhorta les autres à secourir leurs frères, en s'exposant avec lui au danger. Ensemble, ils s'élancèrent, avec détermination.
8
Ils étaient encore tout proches de Jérusalem, lorsqu'apparut à leur tête un cavalier vêtu de blanc et brandissant des armes d'or.
9
Alors, tous ensemble, ils bénirent le Dieu de miséricorde et se sentirent animés d'une grande vigueur : ils étaient prêts à pourfendre non seulement des hommes, mais les bêtes les plus féroces et jusqu'à des murailles de fer.
10
Ils s'avancèrent donc en ordre de bataille, avec cet allié venu du ciel, car le Seigneur les avait pris en pitié.
11
Comme des lions, ils foncèrent sur les ennemis ; ils en abattirent onze mille, en plus de seize cents cavaliers, et contraignirent tous les autres à fuir.
12
La plupart d'entre eux se sauvèrent, blessés, privés de leurs armes. Lysias lui-même se sauva en prenant honteusement la fuite.
13
Mais Lysias ne manquait pas de bon sens : il réfléchit sur la défaite qu'il venait de subir et comprit que les Hébreux étaient invincibles, parce que le Dieu puissant combattait avec eux. Il envoya donc des émissaires
14
pour les persuader de conclure un accord à des conditions tout à fait justes, promettant aussi de persuader le roi de la nécessité de devenir leur ami.
15
Judas Maccabée consentit à tout ce que proposait Lysias, par souci de l'intérêt commun. Et de fait, tout ce que Judas Maccabée transmit par écrit à Lysias au sujet des Juifs, le roi l'accorda.
16
Voici donc en quels termes Lysias écrivit aux Juifs : « Lysias à l'ensemble des Juifs, salut !
17
Jean et Absalom, vos envoyés, ont remis l'acte transcrit ci-dessous et demandé une réponse au sujet de ce qui s'y trouvait indiqué.
18
J'ai donc informé le roi de tout ce qu'il fallait lui soumettre, et ce qui était possible, je l'ai accordé.
19
Si donc vous conservez votre bienveillance à l'égard de l'État, je m'efforcerai encore à l'avenir de contribuer à votre bien.
20
Quant aux questions de détail, j'ai donné ordre à vos envoyés et aux miens d'en discuter avec vous.
21
Portez-vous bien ! L'an 148, le 24 du mois de Dioscore. »
22
La lettre du roi était ainsi conçue : « Le roi Antiocos à son frère Lysias, salut !
23
Notre père est allé rejoindre les dieux, et nous-même, nous souhaitons que les sujets de notre royaume soient à l'abri des troubles et s'appliquent à leurs propres affaires.
24
Or, nous avons appris que les Juifs ne consentent pas à s'adapter aux coutumes grecques, voulues par notre père, mais qu'ils préfèrent leur genre de vie à eux et demandent qu'on leur accorde d'observer leurs lois.
25
Désirant donc que ce peuple soit lui aussi exempt de trouble, nous décidons que le Temple lui sera restitué et que les Juifs pourront vivre selon les usages de leurs ancêtres.
26
Tu ferais donc bien de leur envoyer des messagers pour leur tendre la main droite en signe de paix afin que, ayant pris connaissance de nos intentions, ils soient rassurés et continuent avec bonheur à gérer leurs propres affaires. »
27
Voici la lettre que le roi adressa à la nation des Juifs : « Le roi Antiocos au Conseil des anciens et aux autres Juifs, salut !
28
Si vous vous portez bien, nous en sommes heureux. Nous aussi, nous sommes en bonne santé.
29
Ménélas nous a fait part de votre désir de rentrer chez vous pour vaquer à vos propres affaires.
30
Donc ceux qui retourneront chez eux d'ici le 30 du mois de Xanthique obtiendront l'assurance de l'impunité.
31
Les Juifs pourront consommer leurs aliments spéciaux et suivre leurs lois, comme auparavant. Aucun d'entre eux ne sera inquiété, d'aucune façon, pour des fautes commises par ignorance.
32
J'ai d'ailleurs envoyé Ménélas pour vous encourager.
33
Portez-vous bien. L'an 148, le 15 du mois de Xanthique. »
34
Les Romains aussi adressèrent aux Juifs une lettre qui était ainsi conçue : « Quintus Memmius et Titus Manius, légats des Romains, au peuple des Juifs, salut !
35
Les choses que Lysias, parent du roi, vous a accordées, nous aussi, nous y consentons.
36
Quant aux choses qu'il a jugé devoir soumettre au roi, examinez-les, puis envoyez-nous sans délai quelqu'un qui nous en informe. Ainsi, nous pourrons les exposer au roi d'une façon qui vous convienne, car nous nous rendons à Antioche.
37
Hâtez-vous donc d'envoyer des messagers, afin que nous sachions, nous aussi, quel est votre avis.
38
Soyez en bonne santé. L'an 148, le 15 du mois de Xanthique. »

CHAPITRE 12

12 1 Après la conclusion de ces traités, Lysias retourna auprès du roi, tandis que les Juifs se remettaient aux travaux des champs.
2
Mais parmi les gouverneurs militaires de la région, Timothée et Apollonios, fils de Gennaios, ainsi que Jérôme et Démophon, et aussi Nicanor le Cypriarque, ne leur laissaient ni trêve, ni repos.
3
Quant aux habitants de Joppé, ils commirent un acte particulièrement infâme. Ils invitèrent les Juifs qui habitaient parmi eux à monter, avec leurs femmes et leurs enfants, sur des embarcations qu'ils avaient préparées. Ils paraissaient n'avoir aucune intention malveillante à leur égard,
4
mais agir suivant une décision publique votée par la cité. Les Juifs acceptèrent, pour marquer qu'ils voulaient la paix et qu'ils étaient sans défiance. Mais quand ils furent au large, on les précipita par le fond. Ils étaient au nombre d'au moins deux cents.
5
Dès que Judas apprit l'acte de cruauté commis contre les gens de sa nation, il le fit savoir à ses hommes.
6
Après avoir invoqué Dieu, le juge impartial, il marcha contre les meurtriers de ses frères. De nuit, il incendia le port, brûla les embarcations, et transperça ceux qui s'y étaient réfugiés.
7
Comme la place forte avait été fermée, il s'éloigna, mais avec l'intention de revenir pour détruire de fond en comble la cité de Joppé tout entière.
8
Ayant appris que les habitants de Jamnia voulaient, eux aussi, agir de la même façon que ceux de Joppé à l'égard des Juifs qui habitaient chez eux,
9
il attaqua également les Jamnites pendant la nuit et mit le feu au port et à sa flotte. Les lueurs des flammes étaient visibles jusqu'à Jérusalem, pourtant distante de deux cent quarante stades.
10
Comme il s'était éloigné avec son armée à neuf stades de là, lors d'une marche contre Timothée, des Arabes tombèrent sur lui, au nombre d'au moins cinq mille, avec cinq cents cavaliers.
11
Un violent combat s'engagea et, grâce à l'aide de Dieu, les troupes de Judas connurent un beau succès. Vaincus, les nomades supplièrent Judas de leur tendre la main droite en signe de paix, promettant de lui livrer du bétail et de lui rendre service en toute autre circonstance.
12
Judas, estimant qu'ils pourraient réellement lui être utiles en bien des choses, consentit à faire la paix avec eux. Ils se donnèrent donc la main droite, puis ils se retirèrent dans leurs tentes.
13
Judas attaqua aussi une ville forte du nom de Kaspine, entourée de remparts et habitée par un mélange de peuples.
14
Confiants dans la solidité de leurs murs et dans leurs réserves de vivres, les assiégés se montraient extrêmement grossiers à l'égard des troupes de Judas, joignant les blasphèmes aux insultes et proférant des paroles sacrilèges.
15
Mais ceux qui entouraient Judas invoquèrent le grand Souverain du monde, lui qui sans béliers ni machines de guerre renversa Jéricho au temps de Josué ; puis ils s'élancèrent sauvagement à l'assaut des remparts.
16
Devenus maîtres de la ville par la volonté de Dieu, ils firent un carnage indescriptible, au point que l'étang voisin, large de deux stades, paraissait rempli du sang qui avait coulé.
17
À sept cent cinquante stades de là, ils atteignirent le camp retranché qui se trouvait chez les Juifs appelés Toubiens.
18
Quant à Timothée, ils ne le trouvèrent pas en ces lieux, qu'il avait alors quittés sans avoir rien fait ; il avait cependant laissé en un certain lieu une garnison très forte.
19
Dosithée et Sosipatros, deux généraux de l'entourage de Judas Maccabée, allèrent attaquer ce poste fortifié et tuèrent les hommes que Timothée y avait laissés, au nombre de plus de dix mille.
20
Judas Maccabée, de son côté, divisa son armée en cohortes et en confia le commandement à ces deux généraux, puis il s'élança en expédition contre Timothée, qui était entouré de cent vingt mille fantassins et de deux mille cinq cents cavaliers.
21
Informé de l'approche de Judas, Timothée commença par envoyer les femmes, les enfants et tout l'équipement au lieu appelé Carnione, une place imprenable et difficile d'accès en raison de l'étroitesse de tous les passages.
22
Quand la cohorte de Judas apparut la première, la frayeur fondit sur les ennemis, et même la crainte devant l'apparition de Celui qui voit tout. Ils prirent la fuite dans toutes les directions, au point d'être souvent gênés l'un par l'autre et blessés par les pointes de leurs épées.
23
Judas les poursuivit avec une vigueur extrême, embrochant ces criminels dont il fit périr jusqu'à trente mille hommes.
24
Timothée lui-même tomba aux mains des hommes de Dosithée et de Sosipatros, mais il les supplia, avec une grande fourberie, de le laisser aller sain et sauf, prétendant qu'il avait en son pouvoir des parents – et même des frères – de beaucoup d'entre eux, à qui il pourrait bien arriver malheur.
25
Par de longs discours, il les persuada de sa détermination à libérer ces hommes sans leur faire de mal. Alors, ils le relâchèrent, pour sauver leurs frères.
26
Ensuite Judas marcha sur Carnione et le temple de la déesse Atargatis où il égorgea vingt-cinq mille personnes.
27
Après la déroute et l'extermination de ces gens-là, il conduisit son armée contre Éphrone, ville forte où habitait une population de diverses tribus. De robustes jeunes gens, ayant pris position devant les remparts, combattaient avec vigueur. En outre, il y avait là de grandes quantités de machines et de projectiles en réserve.
28
Après avoir invoqué le Seigneur souverain qui a le pouvoir de briser les forces ennemies, les Juifs se rendirent maîtres de la ville et abattirent environ vingt-cinq mille personnes à l'intérieur.
29
Partis de là, ils s'élancèrent vers Scythopolis, à six cents stades de Jérusalem.
30
Mais les Juifs qui s'étaient établis en ce lieu attestèrent que les habitants de Scythopolis avaient eu pour eux de la bienveillance et leur avaient réservé un accueil aimable au temps du malheur.
31
Alors, Judas et les siens les remercièrent et les encouragèrent à garder à l'avenir ces bonnes dispositions envers leur race. Puis ils rentrèrent à Jérusalem, parce que la fête des Semaines était proche.
32
Après la fête appelée Pentecôte, ils s'élancèrent contre Gorgias, gouverneur militaire de l'Idumée.
33
Celui-ci sortit à la tête de trois mille fantassins et de quatre cents cavaliers.
34
Dans la bataille qui s'engagea, un petit nombre de Juifs succombèrent.
35
Mais un certain Dosithée, parmi les soldats de Bakénor, cavalier et homme robuste, parvint à s'emparer de Gorgias. Le tenant par le manteau, il l'entraînait avec vigueur, dans l'intention de capturer vivant ce maudit. Mais un cavalier thrace, fonçant sur Dosithée, lui trancha l'épaule. Gorgias s'échappa et s'enfuit à Marissa.
36
Cependant, les hommes d'Esdrias combattaient depuis longtemps et tombaient d'épuisement. Alors Judas invoqua le Seigneur pour qu'il se montre leur allié et leur guide au combat.
37
Il se mit à pousser le cri de guerre dans la langue de ses pères et entonna des hymnes, puis se jeta à l'improviste sur les hommes de Gorgias et les mit en déroute.
38
Ensuite, Judas regroupa son armée et gagna la ville d'Odollam. Comme c'était le septième jour de la semaine, ils se purifièrent, selon la coutume, et célébrèrent le sabbat en ce lieu.
39
Le lendemain, alors qu'il était devenu grand temps de le faire, les hommes de Judas vinrent enlever les corps de ceux qui avaient succombé dans la bataille, afin de les déposer avec leurs proches dans les tombeaux de leurs pères.
40
Or, ils trouvèrent sous la tunique de chacun des morts des objets consacrés aux idoles de Jamnia, ce que la Loi interdit aux Juifs. Il fut évident pour tous que c'est pour cette raison qu'ils avaient succombé.
41
Tous bénirent donc la conduite du Seigneur, le juge impartial qui rend manifestes les choses cachées.
42
Puis, ils se répandirent en supplications pour demander que le péché commis soit entièrement effacé. Le noble Judas exhorta la troupe à se garder de tout péché, ayant sous les yeux le malheur de ceux qui avaient succombé pour avoir commis cette faute.
43
Il organisa une collecte auprès de chacun et envoya deux mille pièces d'argent à Jérusalem afin d'offrir un sacrifice pour le péché. C'était un fort beau geste, plein de délicatesse, inspiré par la pensée de la résurrection.
44
Car, s'il n'avait pas espéré que ceux qui avaient succombé ressusciteraient, la prière pour les morts était superflue et absurde.
45
Mais il jugeait qu'une très belle récompense est réservée à ceux qui meurent avec piété :
46
c'était là une pensée religieuse et sainte. Voilà pourquoi il fit ce sacrifice d'expiation, afin que les morts soient délivrés de leurs péchés.

CHAPITRE 13

13 1 En l'année 149 de l'empire grec, la nouvelle parvint à Judas et aux siens qu'Antiocos Eupator marchait sur la Judée avec une armée considérable.
2
Il était accompagné de Lysias, son tuteur, administrateur du royaume. Ils disposaient d'une armée grecque de cent dix mille fantassins, cinq mille trois cents cavaliers, vingt-deux éléphants et trois cents chars armés de faux.
3
Le grand prêtre Ménélas aussi se joignit à eux. Avec beaucoup d'habileté, il cherchait à convaincre Antiocos, non pour le salut de sa patrie, mais avec l'espoir d'être rétabli dans sa dignité.
4
Mais le Seigneur, le Roi des rois, éveilla contre ce criminel la colère d'Antiocos. En effet, Lysias ayant démontré à ce dernier que Ménélas était la cause de tous les malheurs, Antiocos ordonna de le conduire à Bérée et de l'y exécuter suivant la coutume du lieu.
5
Or, il y a en ce lieu une tour de cinquante coudées, remplie de cendre, munie d'un dispositif tournant qui, de tout autour, précipite dans la cendre.
6
C'est de là que l'on pousse, pour le supprimer, celui qui est coupable de vol sacrilège ou de quelque autre crime particulièrement grave.
7
Tel fut le supplice par lequel mourut cet homme infidèle à la Loi, ce Ménélas, qui ne reçut même pas de sépulture.
8
Et ce n'était que justice : en effet, lui qui avait commis de nombreux péchés contre l'autel, dont le feu et la cendre étaient sacrés, c'est dans la cendre qu'il trouva la mort.
9
Entre-temps, le roi avançait, ruminant les projets les plus barbares et décidé à infliger aux Juifs les pires traitements que son père leur avait fait subir.
10
Apprenant cela, Judas prescrivit au peuple d'invoquer le Seigneur jour et nuit : il espérait que maintenant encore, comme en d'autres circonstances, le Seigneur viendrait en aide
11
à ceux qui étaient menacés de perdre la Loi, la patrie et le Temple saint, et qu'il ne laisserait pas tomber aux mains des païens blasphémateurs ce peuple qui commençait seulement à reprendre haleine.
12
Tous ensemble, ils firent donc cette prière, adressant au Seigneur miséricordieux des supplications accompagnées de larmes, jeûnant et se prosternant, pendant trois jours d'affilée. Puis Judas les encouragea et leur dit de se tenir prêts.
13
Lui-même prit conseil des anciens et décida de ne pas attendre que l'armée du roi envahisse la Judée et s'empare de la ville, mais de se mettre en marche et de tenter une action décisive avec l'aide de Dieu.
14
Ayant ainsi confié le sort des armes au Créateur du monde, il exhorta ses compagnons à lutter noblement jusqu'à la mort pour les lois, le Temple, la ville, la patrie et les institutions ; puis il établit son campement aux environs de Modine.
15
Il donna aux siens pour mot d'ordre : « Victoire de Dieu ! » Il choisit les plus courageux parmi les jeunes gens, et partit de nuit attaquer les quartiers du roi. Dans le camp, il tua environ deux mille hommes et transperça le chef de file des éléphants avec son conducteur.
16
Finalement, ils remplirent le camp de frayeur et de trouble, puis se retirèrent avec un plein succès,
17
alors que déjà le jour commençait à poindre. Tout cela s'était accompli grâce à la protection dont le Seigneur couvrait Judas.
18
Ayant eu ainsi un avant-goût de la hardiesse des Juifs, le roi essaya de prendre les places fortes par des stratagèmes.
19
Il s'approcha de Bethsour, puissante forteresse des Juifs, mais il fut repoussé, revint à la charge, fut vaincu.
20
Judas fit passer aux assiégés les provisions nécessaires,
21
mais Rhodocos, un membre de l'armée juive, mit les ennemis au courant des secrets ; il fut recherché, arrêté, puis éliminé.
22
Pour la seconde fois, le roi parlementa avec les gens de Bethsour : il leur tendit la main droite en signe de paix, prit la leur, se retira.
23
Il s'attaqua aux hommes de Judas et se fit battre. Il apprit que Philippe, laissé à la tête des affaires publiques à Antioche, s'était révolté. Il en fut bouleversé. Il se mit à traiter avec les Juifs, se soumit à leurs conditions et jura de respecter toutes les mesures justes. Il conclut un accord avec eux, offrit un sacrifice, honora le Temple et fit preuve de générosité envers le Lieu saint.
24
Il fit bon accueil à Judas Maccabée et laissa Hégémonide comme gouverneur militaire depuis Ptolémaïs jusqu'au pays des Guerréniens.
25
Puis il se rendit à Ptolémaïs. Les habitants de cette ville, mécontents du traité, s'en indignaient fortement et voulaient en rejeter les clauses.
26
Alors, Lysias monta à la tribune, plaida le mieux possible, les persuada, les calma, les amena à la bienveillance. Puis il partit pour Antioche. Ainsi se déroulèrent l'offensive et la retraite du roi.

CHAPITRE 14

14 1 Trois ans plus tard, Judas et les siens apprirent que Démétrios, fils de Séleucos, avait abordé au port de Tripoli avec une puissante armée et une flotte
2
et qu'il s'était rendu maître du pays, après avoir fait disparaître Antiocos et son tuteur Lysias.
3
Or, un certain Alkime, qui avait été grand prêtre, mais qui s'était volontairement souillé au temps de la révolte contre les coutumes païennes, comprenant qu'en aucune façon il ne pourrait être sauvé, ni avoir encore accès à l'autel sacré,
4
vint trouver le roi Démétrios. C'était aux alentours de l'an 151 de l'empire grec. Il lui offrit une couronne d'or et une palme, et en outre des rameaux d'olivier qui sont les redevances habituelles du Temple. Ce jour-là, il ne fit rien de plus,
5
mais il saisit une occasion favorable à ses projets insensés lorsque Démétrios le convoqua à son conseil et l'interrogea sur les dispositions et les desseins des Juifs. Il répondit :
6
« Parmi les Juifs, ceux que l'on appelle Assidéens, dirigés par Judas Maccabée, alimentent la guerre et les émeutes, empêchant le royaume de connaître la tranquillité.
7
Aussi, ayant été dépouillé de ma dignité héréditaire – je veux dire celle de grand prêtre –, je suis venu ici,
8
tout d'abord parce que j'ai un réel souci des intérêts du roi, ensuite parce que je me préoccupe également de mes concitoyens. En effet, la déraison de ceux que je viens de nommer plonge toute notre race dans la misère, et non des moindres !
9
Toi donc, ô roi, quand tu auras pris connaissance de chacun de ces points, veille sur notre pays et notre race menacée de toutes parts, et traite-nous aussi avec cette humanité et cette bienveillance dont tu fais preuve à l'égard de tous.
10
Car tant que Judas reste en vie, la paix n'est pas possible. »
11
Dès qu'il eut parlé de la sorte, les autres amis du roi, hostiles à l'action de Judas, s'empressèrent d'enflammer plus encore la colère de Démétrios.
12
Celui-ci désigna aussitôt Nicanor, qui avait commandé la troupe des éléphants. Il le nomma gouverneur militaire de Judée et l'envoya
13
avec l'ordre de faire disparaître Judas lui-même, de disperser ceux qui étaient avec lui et d'introniser Alkime comme grand prêtre du plus grand des temples.
14
Quant aux païens de Judée qui avaient fui devant Judas, ils se rassemblèrent en masse autour de Nicanor, pensant bien que les malheurs et les revers des Juifs seraient leur propre chance.
15
Lorsqu'ils apprirent que Nicanor approchait et que les païens venaient les attaquer, les Juifs se couvrirent de poussière et implorèrent Celui qui avait constitué son propre peuple pour l'éternité et qui toujours secourait sa part d'héritage avec des signes manifestes.
16
Sur l'ordre de leur chef, ils quittèrent aussitôt le lieu où ils se trouvaient, et rencontrèrent l'ennemi près du village de Dessaou.
17
Simon, le frère de Judas, avait engagé le combat avec Nicanor mais, brusquement décontenancé devant les adversaires, il avait subi un léger échec.
18
Toutefois, apprenant quelle était la bravoure des hommes de Judas, leur ardeur dans les combats livrés pour la patrie, Nicanor eut quelque crainte de s'en remettre au jugement par le sang.
19
Aussi envoya-t-il Posidonios, Théodote et Mattathias pour tendre la main droite aux Juifs et recevoir la leur, en signe de paix.
20
Les propositions de paix furent longuement examinées, le chef les communiqua aux troupes et, comme les avis semblaient unanimes, on approuva le traité.
21
On fixa un jour où les chefs se rencontreraient en particulier. De part et d'autre, un char s'avança ; on disposa des sièges d'honneur.
22
Judas avait placé aux endroits stratégiques des hommes en armes, prêts à combattre, au cas où les adversaires tenteraient brusquement un mauvais coup. Mais l'entretien aboutit à un accord.
23
Nicanor séjourna à Jérusalem sans rien y faire de déplacé ; il renvoya même les foules de ses partisans qui s'étaient rassemblées en masse autour de lui.
24
Il avait continuellement Judas en face de lui et il éprouvait pour cet homme une profonde sympathie.
25
Il l'encouragea à se marier et à avoir des enfants. Judas se maria, jouit de la tranquillité et goûta la vie de tous les jours.
26
Mais Alkime, voyant la bonne entente de Nicanor et de Judas, se procura les clauses du traité, vint trouver Démétrios et lui dit que Nicanor avait des idées hostiles à l'État, puisqu'il avait désigné comme son successeur l'ennemi du royaume, Judas.
27
Fou de rage, exaspéré par les calomnies d'Alkime, cet être malfaisant, le roi écrivit à Nicanor, lui déclarant qu'il était fort mécontent de ce traité de paix et lui ordonnant d'envoyer sans retard Judas Maccabée, enchaîné, à Antioche.
28
Quand ces nouvelles parvinrent à Nicanor, il en fut bouleversé, car il lui en coûtait de violer ses engagements vis-à-vis d'un homme qui n'avait commis aucune injustice.
29
Mais comme il n'était pas possible de s'opposer au roi, il guettait une occasion favorable pour exécuter cet ordre au moyen d'une manœuvre trompeuse.
30
Judas Maccabée, quant à lui, s'aperçut que Nicanor se comportait avec plus de raideur à son égard et que son abord ordinaire se faisait plus rude. Pensant que ce raidissement ne présageait rien de très bon, il rassembla un grand nombre de ses partisans et se déroba à Nicanor.
31
Celui-ci se rendit compte qu'il avait été bel et bien trompé par la manœuvre de Judas. Alors, il se rendit au Temple saint, le plus grand de tous, tandis que les prêtres offraient les sacrifices habituels. Il leur ordonna de lui livrer cet homme.
32
Comme les prêtres déclarèrent sous serment ne pas savoir où se trouvait celui qu'on recherchait,
33
Nicanor étendit la main droite vers le sanctuaire, et jura ceci : « Si vous ne me livrez pas Judas enchaîné, je raserai cette enceinte consacrée à Dieu, j'abattrai l'autel et j'élèverai en ce lieu un temple splendide pour Dionysos. »
34
Sur ces paroles, il se retira. Mais les prêtres tendirent les mains vers le ciel, en invoquant Celui qui s'est toujours montré le défenseur de notre nation. Ils disaient :
35
« Toi, Seigneur, tu n'as besoin de rien au monde, mais il t'a plu d'avoir parmi nous le Temple où tu demeures.
36
Et maintenant, toi, le Saint, Seigneur de toute sanctification, préserve à jamais de la profanation cette maison qui vient d'être purifiée. »
37
Un certain Razis, parmi les anciens de Jérusalem, fut dénoncé à Nicanor. Cet homme aimait ses concitoyens et jouissait d'une excellente réputation. En raison de sa bienveillance, on l'appelait « père des Juifs ».
38
Au début de la révolte contre les coutumes païennes, il avait été inculpé de judaïsme. Il s'était en effet dépensé corps et âme, de toute sa ténacité, à la défense du judaïsme.
39
Nicanor, voulant donner la preuve de sa malveillance à l'égard des Juifs, envoya plus de cinq cents soldats pour arrêter Razis,
40
car il pensait qu'en arrêtant cet homme, il causerait le malheur de tous.
41
La troupe, sur le point de s'emparer de la tour où Razis s'était réfugié, enfonçait violemment le portail d'entrée, avec l'ordre de mettre le feu et de brûler les portes. Alors Razis, cerné de toutes parts, se jeta sur son épée,
42
préférant mourir noblement plutôt que de tomber entre des mains criminelles et de subir des outrages indignes de sa noble naissance.
43
Mais, dans l'urgence du combat, il manqua son coup. Comme la foule des soldats se ruait à l'intérieur des portes, il courut héroïquement sur la muraille et se précipita courageusement sur la foule.
44
Tous reculèrent aussitôt, laissant un espace vide, au milieu duquel il tomba.
45
Respirant encore et enflammé d'ardeur, il se releva tout ruisselant de sang et, malgré ses douloureuses blessures, il traversa la foule en courant. Enfin, debout sur une roche escarpée,
46
ayant déjà perdu tout son sang, il s'arracha les entrailles, les prit à deux mains et les jeta sur la foule, invoquant le Maître de la vie et de l'esprit afin qu'il les lui rende un jour. C'est de cette manière qu'il mourut.

CHAPITRE 15

15 1 Nicanor apprit que Judas et les siens se trouvaient dans les parages de Samarie. Il fit le projet de les attaquer en toute sécurité le jour du repos hebdomadaire.
2
Les Juifs qui le suivaient par contrainte lui dirent : « Ne va pas les faire périr d'une manière aussi cruelle et barbare ! Mais rends honneur au jour qui a été choisi de préférence et sanctifié par Celui qui voit tout. »
3
Nicanor, ce triple scélérat, leur demanda s'il y avait au ciel un souverain qui prescrivait d'observer le jour du sabbat.
4
On lui déclara : « C'est le Seigneur vivant lui-même, souverain dans le ciel, qui a ordonné de respecter le septième jour. »
5
Nicanor reprit : « Et moi, je suis souverain sur terre : je commande qu'on prenne les armes pour accomplir le service du roi. » Toutefois, il ne fut pas maître d'accomplir son funeste projet.
6
Haussant la tête avec une extrême prétention, Nicanor était décidé à dresser un monument public de la victoire qu'il remporterait sur les hommes de Judas.
7
Mais, de son côté, Judas Maccabée gardait une confiance inébranlable et le plein espoir d'obtenir la protection du Seigneur.
8
Il exhortait ses compagnons à ne pas redouter l'approche des païens, mais à garder présents à l'esprit les secours déjà reçus du Ciel et à compter maintenant aussi sur la victoire qui leur viendrait du Tout-Puissant.
9
En les encourageant par des mots de la Loi et des Prophètes, en leur rappelant aussi les combats qu'ils avaient déjà soutenus, il les remplit d'une détermination nouvelle.
10
Ayant ainsi réveillé leur ardeur, il acheva de les stimuler en leur montrant combien les païens avaient manqué à leur parole et méprisé leurs serments.
11
Il arma ainsi chacun d'eux, non pas de la sécurité que donnent les boucliers et les lances, mais du réconfort qu'on trouve dans les paroles de bon conseil. Il leur raconta en outre un songe digne de foi, une sorte de vision qui les réjouit tous.
12
Voici ce qu'il avait vu : Onias, jadis grand prêtre, cet homme noble et bon, modeste dans son abord et doux de caractère, distingué dans son langage et adonné dès l'enfance à tout ce qui concerne la vertu, étendait les mains et priait pour toute la communauté des Juifs.
13
Ensuite apparut de la même manière un homme remarquable par ses cheveux blancs et par sa dignité, dont le maintien était admirable et tout empreint de majesté.
14
Prenant la parole, Onias disait : « Cet homme est l'ami de ses frères, celui qui prie beaucoup pour le peuple et pour la Ville sainte, Jérémie, le prophète de Dieu. »
15
De la main droite, Jérémie tendit à Judas une épée d'or. En la lui donnant, il s'exprima ainsi :
16
« Reçois cette épée sainte que Dieu te donne. Par elle, tu briseras tes adversaires. »
17
Ce très beau discours de Judas eut le pouvoir d'inciter à la vertu et de donner aux jeunes une âme virile. Rassurés, les Juifs résolurent de ne pas se retrancher dans un camp, mais de prendre héroïquement l'offensive et de décider de l'issue de la bataille en se jetant dans la mêlée avec toute leur bravoure. Car c'étaient la ville, les lieux saints et le Temple qui étaient menacés.
18
En effet, la crainte qu'ils avaient pour leurs femmes et leurs enfants, ainsi que pour leurs frères et leurs proches, comptait moins que la plus grande et la première des craintes, celle qu'ils éprouvaient pour le Temple consacré.
19
L'angoisse de ceux qui avaient été laissés en ville n'était pas moins grande : ils tremblaient pour l'attaque menée en rase campagne.
20
Déjà, tous attendaient l'issue prochaine du combat, déjà les adversaires opéraient leur concentration, rangeaient leur armée en ordre de bataille, disposaient les éléphants en un point favorable et la cavalerie sur les ailes de l'armée.
21
Judas Maccabée, observant les troupes en présence, la variété de leur armement et l'aspect féroce des éléphants, tendit les mains vers le ciel et invoqua le Seigneur, auteur de prodiges. Il savait bien, en effet, que la victoire ne résulte pas de la force des armes, mais que Dieu l'accorde, comme il le juge bon, à ceux qui en sont dignes.
22
Il prononça l'invocation suivante : « Au temps d'Ézékias, roi de Judée, toi, Maître, tu as envoyé ton ange, et il a exterminé jusqu'à cent quatre-vingt-cinq mille hommes de l'armée de Sennakérib.
23
Maintenant encore, ô Souverain des cieux, envoie un bon ange en avant de nous, pour semer terreur et effroi.
24
Que, par la force de ton bras, soient frappés de crainte ceux qui, en blasphémant, marchent contre ton peuple saint ! » Et il acheva sur ces mots.
25
Alors que les hommes de Nicanor s'avançaient au son des trompettes et des chants de guerre,
26
c'est avec des invocations et des prières que les hommes de Judas affrontèrent les ennemis.
27
Combattant de leurs mains, priant Dieu de tout leur cœur, ils abattirent au moins trente-cinq mille hommes et se réjouirent grandement de cette manifestation de Dieu.
28
L'action terminée, comme ils s'en retournaient dans la joie, ils reconnurent Nicanor, tombé avec toutes ses armes.
29
Au milieu des cris et du tumulte, ils se mirent à bénir le Seigneur souverain dans la langue de leurs pères.
30
Alors Judas, lui qui de tout son être, corps et âme, avait combattu au premier rang pour ses concitoyens, lui qui avait conservé pour les gens de sa nation l'affection de sa jeunesse, ordonna de trancher la tête de Nicanor et son bras jusqu'à l'épaule, et de les porter à Jérusalem.
31
Arrivé là, il convoqua les gens de sa nation, plaça les prêtres devant l'autel et envoya chercher les occupants de la citadelle.
32
Il exposa la tête de l'infâme Nicanor et la main que ce blasphémateur avait tendue avec insolence contre la sainte Maison du Tout-Puissant.
33
Puis, il coupa la langue de l'impie Nicanor avec l'ordre de la donner aux oiseaux, morceau par morceau, et de suspendre en face du Temple son bras, pour prix de sa folie.
34
Alors, tournés vers le ciel, tous bénirent le Seigneur qui s'était manifesté. Ils disaient : « Béni soit celui qui a préservé de la profanation son Lieu saint ! »
35
Judas accrocha la tête de Nicanor à l'extérieur de la citadelle, comme un signe manifeste et visible pour tous de l'aide du Seigneur.
36
Tous décrétèrent, par un vote public, de ne laisser nullement ce jour passer inaperçu, mais de le solenniser le treizième jour du douzième mois – le mois nommé Adar en araméen –, la veille du jour dit « de Mardochée ».
37
Ainsi se déroulèrent donc les événements concernant Nicanor. Puisque la ville est demeurée depuis ce temps en possession des Hébreux, je finirai également en ce point mon récit.
38
L'ouvrage est-il bien composé et réussi ? c'est ce que je voulais. Est-il au contraire faible et médiocre ? c'est tout ce que j'ai pu obtenir.
39
De fait, il est nuisible de ne boire que du vin, tout comme il est nuisible de ne boire que de l'eau, tandis que le vin mêlé à l'eau est agréable et procure une délicieuse jouissance. De la même façon, c'est la construction du récit qui charme les oreilles de ceux qui lisent l'ouvrage. En voici donc la fin.



2Maccabées (LIT) 11