Pie XII 1939 - LETTRE DE LA SECRÉTAIRERIE D'ÉTAT A LA COMMISSION PONTIFICALE CENTRALE POUR L'ART SACRÉ


ALLOCUTION A DES MEMBRES DE LA FAMILLE RÉGNANTE

DU MYSORE

(31 juillet 1939) 1

Son Altesse le Yuvaraja du Mysore est venu présenter à Sa Sainteté Pie XII l'hommage de dévotion du Prince régnant du Mysore. Le Saint-Père a remercié par l'allocution suivante :

C'est avec un véritable plaisir que Nous voyons auprès de Nous un membre si distingué de la maison régnante du Mysore, en la personne de Votre Altesse, accompagné de votre charmante épouse, du prince héritier et des princesses.

D'ores et déjà, Nous connaissons la bienveillance que Son Altesse le Maharajah témoigne aux catholiques de son royaume. Nous savons que ceux-ci peuvent toujours compter sur sa compréhension et sur sa sympathie à l'égard de toutes leurs entreprises dans le domaine de la religion, de l'éducation et de la charité.

Nous savons aussi à quel point Votre Altesse partage les généreux sentiments du Prince régnant et comment vous en avez donné la preuve par vos actes, en plus d'une occasion.

La réception d'aujourd'hui Nous apporte encore le témoignage et la confirmation de ce fait qui honore les gouvernants de votre pays et Nous remplit Nous-même, ainsi que les sujets catholiques de Son Altesse, de satisfaction et de joie.

Nous sommes heureux de profiter de cette insigne rencontre pour vous demander de bien vouloir vous faire, lors du retour en votre lointaine résidence, le bienveillant interprète de Notre vive gratitude envers Son Altesse le Maharajah. La magnifique séance musicale que Votre Altesse vient de Nous faire donner par de véritables maîtres de leur art, a constitué pour Nous un ravissant cadeau, choisi parmi les multiples richesses d'une culture et d'un peuple qui occupent une place éminente dans l'histoire de l'humanité et dont Nous suivrons les futurs développements avec un profond intérêt.

Tandis que Nous répandons sur les catholiques de cette distinguée délégation Notre paternelle bénédiction, Nous invoquons, sur toutes les personnes ici présentes, mais particulièrement sur Votre Altesse et sa noble famille, sur le souverain de votre pays, sur tous les habitants du Mysore, la protection du Tout-Puissant. Nous appelons enfin sur vous, du plus profond de Notre coeur, un avenir heureux et paisible et une félicité toujours grandissante.






ALLOCUTION POUR LE SOUVENIR DE SON BAPTÊME

(2 août 1939) 1

A l'hommage du chapitre des saints Celse et Julien in Urbe, l'église où Eugène Pacelli fut baptisé, le Saint-Père répondit en évoquant sa jeunesse et la grande grâce du saint baptême.

Nous vous sommes particulièrement reconnaissant, chers fils, de votre visite marquée d'une exquise délicatesse. Elle Nous procure une spéciale consolation parce qu'elle Nous atteste votre dévotion et votre souvenir et parce que, en même temps, elle Nous rappelle la grâce surnaturelle et miséricordieuse avec laquelle Dieu, pour employer les expressions du psaume (Ps 42,4), réjouit Notre jeunesse, c'est-à-dire Nous rappelle le saint baptême que Nous avons reçu dans votre église des saints Celse et Julien et par lequel Nous fûmes engendré dans le royaume de la vérité et de la grâce du Christ. Elle Nous rappelle Notre maison de famille heureuse et tranquille, située sur cette paroisse, des parents profondément pieux et des prêtres zélés, sous la conduite harmonieusement conjuguée desquels Nous fûmes élevé et Nous avons grandi dans la vivante foi catholique. Nous savons pour cela quel motif Nous avons de proclamer avec une âme reconnaissante : Quid retribuam Domino pro omnibus quae retribuit mihi f Et parce que la divine Providence, sans aucun mérite de Notre part, a voulu Nous confier la suprême charge apostolique, Nous voulons faire tout ce qui est en Notre pouvoir pour qu'en faveur de la jeunesse d'aujourd'hui exposée à tant de périls dans notre Rome, dans notre Italie et dans le monde entier, affluent aussi et en abondance les sources de la vraie foi, d'une piété vive et de la sainte joie qui débouchent dans la vie éternelle.

Aidez-Nous, chers fils, de vos prières, de vos sacrifices, de votre zèle dans cette oeuvre sainte, tandis que Nous vous accordons d'un coeur et d'une âme reconnaissants, à vous et à tous ceux qui visitent l'église qui Nous est particulièrement chère des saints Celse et Julien, la Bénédiction apostolique.





LETTRE A S. EM. LE CARDINAL PIAZZA PATRIARCHE DE VENISE POUR LE XIII\2e\0 CENTENAIRE DE LA FONDATION DE L'ÉGLISE DE TORCELLO

(9 août 1939)1

C'est un projet très opportun que Nous apprenons avec joie par votre lettre que celui de célébrer solennellement le XIIIe centenaire de la construction de l'église de Torcello située près de Venise dans l'île du même nom.

Ce temple très ancien, qui fut autrefois siège de l'église cathédrale, demeure un insigne monument de la foi et de l'art chrétien. Il est dû, en effet, à la piété des fidèles qui, fuyant les invasions barbares et l'hérésie, se sont réfugiés du littoral de l'Altinum dans l'île de Torcello et ont dédié avec un amour filial une église à la sainte Mère de Dieu. Ce même temple, aggrandi et restauré aux environs de l'an 1000, resplendit à l'heure actuelle de la majesté de sa basilique et de sa décoration de marbres et de mosaïques, et garde très religieusement, parmi d'autres reliques très vénérables, la dépouille de saint Héliodore, évêque d'Altinum et compagnon de saint Jérôme.

L'histoire tout entière de Torcello, dont la prospérité est venue du progrès de ses arts et de l'activité de son commerce, atteste la foi religieuse de ses citoyens et leur union avec l'Eglise romaine, en même temps que les hauts faits accomplis par eux.

C'est pourquoi Nous avons confiance que les solennités de ce XIIIe centenaire qui doivent être célébrées prochainement rappelle-

ront à la mémoire des habitants de Venise la religion si fervente de leurs ancêtres et apporteront des fruits salutaires et abondants au troupeau de ce patriarcat.

C'est pourquoi Nous, à qui tiennent tant à coeur le bien et le progrès des âmes, non seulement Nous honorons d'une louange méritée vos projets, mais encore nous désirons prendre part à la célébration de cet heureux événement par ces lettres que Nous vous adressons avec joie. Nous vous accordons, en outre, Notre cher fils, le pouvoir de bénir en Notre nom et en vertu de Notre autorité les fidèles présents après la célébration de la messe pontificale, et de leur accorder une indulgence plénière à gagner selon les prescriptions de l'Eglise. En présage des dons célestes et en gage de Notre particulière affection, très cher Fils, Nous vous accordons très affectueusement dans le Seigneur, à vous, au clergé et au peuple confiés à votre vigilance, la Bénédiction apostolique.





LETTRE DE LA SECRÉTAIRERIE D'ÉTAT AU R. P. ARCHAMBAULT, S. J. POUR LA XVII\2e\0 SEMAINE SOCIALE DU CANADA

(11 août 1939) '

Informé de la célébration de la XVIIe Semaine sociale du Canada, le Souverain Pontife a daigné encourager cette session par une lettre qu'il fit adresser par S. Em. le cardinal Maglione, secrétaire d'Etat, au R. P. Archambault, s. j., président des Semaines sociales du Canada.



1 D'après le texte français des Actes de S. S. Pie 12, t. II, p. 318.



Le thème de la paix, par lequel l'Ecole sociale populaire annonce la célébration prochaine de la XVIIe Semaine sociale des catholiques franco-canadiens, est dicté par le moment actuel plutôt que choisi par le zèle éclairé des organisateurs d'une manifestation périodique si bien inspirée. Rien en effet n'occupe tant les esprits à l'heure présente et ne forme le sujet d'une plus grande préoccupation pour tous que le besoin de cette paix après laquelle les peuples aussi bien que les individus soupirent aujourd'hui plus que jamais.

Pleinement consciente des raisons profondes de ce trouble universel ayant ses racines dans les passions qui empêchent de voir la vérité et la justice et en sont les pires ennemis, l'Ecole sociale populaire se propose d'étudier le problème de la paix sociale aussi bien que de la paix nationale et internationale à la lumière des principes chrétiens, qui donnent la clé de la solution, et surtout à la lumière de cette grande réalité qui s'appelle l'amour, ou plutôt la charité, sans laquelle même la justice est un leurre dangereux et une cruelle duperie.

En remontant ainsi aux sources de la paix, dont la justice est la gardienne et la règle, une vérité, entre autres, apparaîtra dans toute sa lumière : la nécessité d'atteindre ces grands biens que sont la justice et la paix par la voie du sacrifice, qui vous porte tous à renoncer plutôt qu'à exiger. Ni le syndicalisme et la collaboration des classes, ni l'organisation corporative ni enfin un sain nationalisme et une parfaite éducation nationale ne peuvent réaliser, dans la justice, la paix sociale ou la paix des nations, tant que le sacrifice est exclu et que seul le droit strict cherche à triompher.

Mais s'il est vrai que la paix entre les peuples tient aujourd'hui le premier plan de l'actualité, il n'est pas moins vrai que toute paix extérieure prend sa source dans la paix intérieure de la conscience, et toute paix collective a sa racine première dans la paix individuelle, qui est le fruit spontané de la justice chrétienne. Aussi le Saint-Père voit-il avec plaisir la part très large qui est faite dans le programme de cette Semaine sociale à la paix dans l'individu et dans la famille. C'est là en effet que les valeurs morales des peuples ont leur origine ; et rien ne vaut pour le bonheur des nations comme la formation élevée de la personnalité chrétienne par l'exercice des vertus privées et familiales, et surtout par la culture profonde du sentiment religieux d'après les principes de l'Evangile. En insistant sur ce point, le travail de votre Semaine sociale va se développer sur un terrain absolument solide, puisqu'il aura surtout en vue le principe fondamental du bonheur de l'homme : « Cherchez avant tout le royaume de Dieu et sa justice », c'est-à-dire un principe dont l'oubli est la raison foncière de tous les malheurs de la société et dont la mise en pratique a toujours porté les individus et les collectivités à la possession de cette tranquillité dans l'ordre, qui est seule capable de dédommager les enfants de Dieu de beaucoup de leurs misères.

Organisé de la sorte, le travail de cette Semaine sociale vient bien à son heure pour rappeler une doctrine dont l'opportunité ne peut échapper à personne, et pour être le reflet de la pensée du Saint-Siège dans une affaire qui, à un tel degré, intéresse l'Eglise et le monde. Quels que puissent être les résultats pratiques de votre réunion solennelle, nul ne pourra l'empêcher de réveiller des idées, de susciter des réflexions, de contribuer à maintenir en toute sa vigueur dans les consciences l'enseignement de Jésus-Christ et de son représentant en une matière si grave dans toutes ses conséquences.

En attendant, Sa Sainteté élève de tout coeur sa prière à Dieu afin qu'il donne largement ses lumières aux dévoués soldats de sa parole et veuille rendre en tout point féconde, leur bonne volonté.

Elle vous remercie donc de vos généreux efforts, et formant les meilleurs voeux pour les plus heureux accroissements de l'Ecole sociale populaire, accorde volontiers à son digne directeur, à ses collaborateurs et à tous ceux qui prendront part à la XVIIe session annuelle des Semaines sociales du Canada, la Bénédiction apostolique.






LETTRE DE LA SECRÉTAIRERIE D'ÉTAT POUR LE CONGRÈS DES LAURÉATS CATHOLIQUES

(12 août 1939)1

A l'occasion de la réunion à Camaldoli du Congrès des lauréats catholiques, S. Em. le cardinal Maglione, secrétaire d'Etat, a adressé la lettre suivante à S. Exc. Mgr Bernareggi, évêque de Bergame et président de ce congrès :



Le Congrès des lauréats catholiques convoqué à Camaldoli pour le premier septembre fournit au Saint-Père l'agréable occasion de saluer avec affection cette si noble troupe qui, dans le silence ami des hauts monts consacrés par la prière et les vertus d'une austère famille religieuse, cherche l'ambiance favorable aux élévations de l'esprit et du coeur vers Dieu.

L'auguste pontife, se félicitant avec Votre Excellence révérendissime et avec le groupe qu'elle dirigera dans les voies des ascensions spirituelles d'une intention aussi louable et d'un choix aussi opportun, ne voudrait manquer de souhaiter que l'étude approfondie du beau thème, « L'Eglise », ouvrira aux âmes de lumineux horizons de vérité et leur infusera une saine douceur d'encouragements, d'où jailliront de généreuses résolutions d'apostolat.

Dans le moment historique actuel où l'Eglise est assaillie de dangereux ennemis et doit soutenir plus âprement le combat — — jamais interrompu — pour ses dogmes, pour sa doctrine morale et pour sa liberté, il est extrêmement utile que ses fils et ses militants connaissent d'une science sûre et détaillée sa nature, ses origines, sa fin, sa structure, sa vie, ses prérogatives, ses épreuves et ses triomphes.

De cela, dans les âmes des participants au congrès éclatera sincère la reconnaissance au Donateur de tous biens pour la gloire d'appartenir à la Cité et au Royaume de Dieu sur terre, comme aussi la promesse de contribuer par l'exemple et par les oeuvres à l'application toujours plus ample et plus féconde de la Rédemption opérée par le Christ.

« Mettez Jérusalem en tête de votre allégresse » (Ps 136,8), telle est la parole par laquelle Sa Sainteté veut stimuler les lauréats catholiques à tirer de leur congrès le plus riche profit pour eux et pour les autres, les bénissant en même temps avec effusion et en particulier Votre Excellence.






LETTRE DE LA SECRÉTAIRERIE D'ÉTAT AU RECTEUR DU COLLÈGE SAINT-JÉRÔME DES ILLYRIENS

(16 août 1939)1

A l'occasion de l'agrandissement du collège de Saint-Jérôme des llly-riens, de la via Tomacelli, à Rome, et de la décision prise de l'ouvrir à tous les diocèses de Yougoslavie, le Saint-Père a fait adresser par S. Em. le cardinal Maglione, secrétaire d'Etat, la lettre suivante au recteur de ce collège, Mgr Georges Magjierec.

L'auguste pontife, dans sa paternelle affection à l'égard de tous ses fils dispersés par le monde et, d'une manière particulière, à l'égard de ceux qui, dans les séminaires et les collèges, se préparent à la vie sacerdotale, ne pouvait pas ne pas s'intéresser avec un très vif plaisir à tout ce que Votre Seigneurie illustrissime et révérendissime lui a si louablement exposé au sujet du nouveau Collegium Hieronymia-num, de la via Tomacelli, qui est près d'être terminé.

Pour cette raison, il lui est bien agréable de faire parvenir ses paternels compliments à tous ceux qui, par leurs soins intelligents, ont mis en oeuvre l'amélioration aussi notable des conditions du cher collège de Saint-Jérôme des Illyriens.

La possibilité, non prévue dans la constitution originale, d'augmenter ainsi le nombre des élèves de ce collège, en en étendant l'accès à des prêtres venant d'autres diocèses de Yougoslavie, et pardessus tout leur formation romaine soignée, selon les normes si sagement réclamées par Sa Sainteté dans son allocution aux élèves du séminaire, ouvre le coeur du successeur de saint Pierre aux plus fécondes espérances.

C'est pourquoi il plaît à l'auguste pontife de tourner son regard vers cet Institut comme pour entrevoir dans un lointain avenir un nouveau et meilleur destin spirituel pour tout un pays qui lui est très cher, heureux de le voir procuré par tous ces jeunes prêtres qui, de leur collège de Rome, partiront illuminés de la vérité et enflammés de l'amour du Christ et dévoués au Saint-Siège, pour être les nouveaux apôtres de leurs compatriotes.

Dans ce but si heureux, Sa Sainteté invoque l'abondance des faveurs divines et envoie en même temps de grand coeur, en gage de particulière bienveillance, aux supérieurs et aux chers élèves la Bénédiction apostolique.






LETTRE DE LA SECRÉTAIRERIE D'ÉTAT AU CONGRÈS DES UNIVERSITAIRES D'ACTION CATHOLIQUE

(18 août 1939)1

A l'occasion du Congrès des universitaires d'Action catholique, S. Em. le cardinal Maglione, secrétaire d'Etat, a adressé la lettre suivante à S. Exc. Mgr Guido Anichini, assistant ecclésiastique central de ce groupement :

Le Saint-Père a reçu avec beaucoup de consolation le fervent hommage que, par l'agréable intermédiaire de Votre Seigneurie illustrissime et révérendissime, lui ont fait parvenir les universitaires d'Action catholique qui ont organisé leur congrès annuel à Rome pour déposer au pied de son auguste trône la fervente résolution de demeurer inconditionnellement et filialement fidèles à ses directives et de travailler avec un zèle renouvelé, sous la direction de leurs évêques, à la cause du royaume de Dieu dans le domaine de leurs études et de leur vie.

C'est là un travail qui paraît au Saint-Père très important et louable sous tous les aspects, et surtout par le but qui l'inspire qui est de faire rayonner les lumières des éternelles vérités de la foi où brillent celles des vérités scientifiques et de profiter de ce savoir humain pour mieux mettre en valeur et faire estimer le savoir qui vient de la Révélation.

Non moins dignes de considération et d'éloge paraissent les moyens qu'ils veulent employer à cette fin : en tout premier lieu celui de l'exemple d'une vie d'étudiant pure et pieuse, visant tout entière à assimiler par un effort docile et ardent les trésors de la sagesse ; puis celui de l'apostolat fraternel et joyeux de l'idée et des moeurs chrétiennes dans le milieu universitaire.

Importants par conséquent et aussi dignes de louanges sont les fruits individuels et sociaux qui peuvent légitimement être espérés d'un pareil témoignage catholique loyal et juvénile, par cette formation toujours plus élevée et plus consciente de professionnels et de croyants, qui est nécessaire à quiconque aspire aux écoles supérieures.

C'est pourquoi l'hommage qui est adressé à l'auguste pontife de la part des jeunes universitaires lui est certainement l'un des plus agréables et aussi parce qu'il lui révèle que dans le programme de leurs journées romaines d'étude et de prière apparaît leur besoin de se munir d'une connaissance toujours plus adéquate de la vérité chrétienne pour continuer et intensifier leur apostolat. Et, parce qu'ils ont récemment étudié l'Eglise en tant que Corps mystique du Christ, il est beau de voir comment en ces journées ils examineront la responsabilité et les devoirs qui leur incombent en tant que membres de ce Corps et en tireront ainsi argument et énergie pour s'occuper avec ferveur de la très noble cause des missions parmi les infidèles.

Sa Sainteté voit en outre avec satisfaction que, conformément à leur tradition, les universitaires d'Action catholique profiteront de ces journées pour appliquer leur attention à quelques questions d'actualité à la lumière de la philosophie perenne. Leur étude ne sera pas un vain exercice intellectuel, mais répondra à la profonde exigence spirituelle de mieux comprendre le problème de la vie et les invitera aussi à porter leur réflexion sur les vérités naturelles, sur leur place dans l'ordre surnaturel qui les suppose, les relève et les rend sublimes.

Le Saint-Père se félicite donc de la bonne préparation que les universitaires catholiques ont donnée à leur pèlerinage à Rome et à leur congrès national et fait des voeux pour que cette belle manifestation fortifie leur résolution de persévérer dans l'oeuvre entreprise et les prépare toujours mieux à être de vaillants collaborateurs de l'apostolat de la hiérarchie, les rendant heureux et fiers de mettre docilement au service de celle-ci les dons dont la Providence les a enrichis.

C'est dans ces sentiments que Sa Sainteté vous accorde à vous, aux autres assistants ecclésiastiques, aux braves dirigeants et à leurs collaborateurs, ainsi qu'à tous les membres de cette association la Bénédiction apostolique.





DISCOURS AUX PÈLERINS DES TROIS VÉNÉTIES A L'OCCASION DU XXV\2e\0 ANNIVERSAIRE DE LA MORT DE PIE X

(19 août 1939)1

Un important pèlerinage de 2000 personnes environ, représentant tous les diocèses des Trois Vénéties, pour commémorer le 25e anniversaire de la mort du pape Pie X, a été reçu par le Saint-Père au palais de Castel-gandolfo. A cette occasion, Pie XII rappela aux pèlerins les aspects principaux de la grande figure de ce saint pontife :

Une grande pensée de vie religieuse se manifeste à Nous dans ce pèlerinage solennel du peuple, du clergé, des illustres et dignes pasteur des Trois Vénéties, conduits par Notre Vénérable Frère, l'évê-que de Trévise, sous la présidence honoraire de l'éminentissime cardinal Piazza, patriarche de la très noble reine de la lagune, eminent et éloquent interprète de l'épiscopat et des représentants rassemblés ici, pieuse manifestation à laquelle ont voulu s'unir deux autres nobles princes de la sainte Eglise romaine dont Nous sommes particulièrement heureux de saluer ici la présence : le cardinal Salotti, préfet de la Sacrée Congrégation des Rites, ponent autorisé et très averti de la cause de béatification et de canonisation du serviteur de Dieu Pie X, et le cardinal Canali qui a maintenu si vive et si fervente la mémoire de ce pape et de son très fidèle premier ministre et collaborateur, le cardinal Merry dei Val. C'est une pensée de vie qui se dégage de l'accomplissement de ce quart de siècle qui nous sépare du pieux trépas de Notre vénéré prédécesseur, honneur et gloire de ces terres italiennes ; une pensée de vie qui exalte la mort que vous avez vue, très chers fils, sur la tombe où Pie X dort son dernier sommeil, en attendant la résurrection glorieuse, enveloppé dans l'ombre sacrée qui veille sur le sépulcre immobile du premier Pierre.

L'exemple donné par Pie X.

De cette tombe du grand fils de Riese qui fut parmi vous un très zélé prêtre, curé, évêque et patriarche, vous ressentirez cette vie et cet accroissement de vie spirituelle et religieuse qui vous ont attirés à Rome, et de Rome vous ont rassemblés ici autour de celui qui, par l'inscrutable dessein de la Providence, est l'humble et indigne héritier de son siège. A vos saints et salutaires souvenirs viennent s'unir aussi les Nôtres : il Nous semble revoir encore l'immortel pontife, rayonnant d'une bonté que ne diminuait pas l'autorité, d'une douceur imprégnée de fermeté et de force élevée jusqu'à l'universelle prudence du pasteur par trois grands amours : l'amour de la pureté de la doctrine catholique, l'amour de la liberté de l'Eglise et de la réforme du droit ecclésiastique, l'amour de la vie intérieure religieuse du clergé et du peuple chrétien.

Etant né et ayant vécu parmi le peuple, témoin des luttes modernes d'une pensée scientifique et sociale menaçant la pureté de la foi et de l'enseignement catholique, il n'hésita pas à condamner les prétentions orgueilleuses d'une science au faux nom, qui appelait progrès du savoir les errements inspirés par les songes de philoso-phies irréelles et par les métamorphoses d'une vérité variable au gré des vents, tandis qu'il ouvrait à ceux qui aspiraient à la véritable science et à l'étude de la parole inspirée les portes de l'Institut biblique.



Le défenseur de la liberté et des droits de l'Eglise.

Défenseur de la vérité, attaché à l'hommage rationnel à l'égard de la foi, Pie X apparut aussi sur le trône de Pierre comme le champion de la liberté et des droits de l'Eglise. Dans son humilité, il sentit la tiare peser sur son front ; il accepta au milieu des larmes comme une croix, ce grands poids, mais à partir de ce jour, aucune main étrangère n'osa plus intervenir dans le choix du Vicaire du Christ. Tel un géant qu'on ne renverse pas, il lutta dans la question contestée de l'élection des évêques et sacrifia à leur dignité et à la défense de l'oeuvre intangible de Jésus-Christ et de la hiérarchie divinement constituée par lui, jusqu'aux biens légitimes de l'Eglise, dons de la piété des siècles, montrant ainsi au monde par ce magnifique exemple « que l'homme doit nourrir ici-bas des préoccupations plus hautes que celles des contingences périssables de cette vie, et que la joie suprême, l'inviolable joie de l'âme humaine sur cette terre, c'est le devoir surnaturellement accompli, coûte que coûte, et, par là même, Dieu honoré, servi et aimé par-dessus tout » 2.

Il aima la justice et haït l'iniquité, c'est pourquoi il subit la contradiction, apanage des héros et des saints. Il aima l'Eglise et sa prudence juridique qui progresse avec la propagation de l'Evangile et selon les conditions changeantes des temps, et « il retira le superflu et l'inutile » (cf. 1Ch 6,12) du volume de ses lois, dont il précisa les termes pour les Congrégations, les Tribunaux et les Offices de la Curie romaine réorganisés.

2 Encyclique Une fois encore, 6 janvier 1907.



Préoccupé de la piété du peuple chrétien.

Il aima les pasteurs du troupeau du Christ, les encouragea, les réconforta dans les luttes ; il aima le clergé et les fidèles qu'il soulagea dans le malheur avec une charité inépuisable. Il infusa aux enfants sa piété eucharistique et la doctrine de la foi ; aux prêtres, la sainteté de vie, le zèle du culte divin, la sublime prière du psalmiste, les ineffables harmonies de la musique sacrée ; au peuple, la concorde des âmes et la pratique des vertus chrétiennes.

Pasteur universel du troupeau du Christ, il rechercha le bien de tous les peuples ; il aima la paix du monde, et quand il apprit l'horrible nouvelle que sur les champs de bataille de l'Europe les frères tuaient les frères, son amour se mua en douleur ; il leva les yeux vers le ciel ; il vit suspendue la balance de la justice divine ; dans son angoisse, il inclina le front résigné, et son grand coeur s'arrêta de battre.



Sa figure est grandie par les événements.

Victime de son ardent amour pour les peuples et les nations, le pieux pontife disparut à l'heure voulue de Dieu, au spectacle de l'immense et sanglante bourrasque qui bouleversait les frontières des nations, engloutissait les navires brisés au fond des mers et des océans et transformait en de nouveaux champs de carnages inhumains le domaine des vents. Depuis ce jour, un quart de siècle s'est écoulé, un quart de siècle plein d'événements et de changements qu'à d'autres époques l'oeuvre de plusieurs siècles n'aurait pas suffi à accomplir ; un quart de siècle dans lequel parmi les déroulements orageux et sombres des événements l'humanité spectatrice a facilement et vite oublié un grand nombre de ceux qui furent en première ligne dans la défense de ses intérêts et de ses biens. Aussi, pour tout coeur catholique n'est-ce pas une source de sainte joie de voir que l'ombre du rapide oubli, qui a recouvert tant d'autres souvenirs, loin d'accomplir son oeuvre de ténèbres, s'est plutôt transformée en une lumière nouvelle qui illumine celui dont la tombe est le but de votre voyage ? Non, les cinq lustres écoulés ne sont pas parvenus à rien enlever de sa force attirante et de son autorité resplendissante à la pure et lumineuse figure de Pie X. Au contraire, plus elle émerge de l'ombre et se détache enveloppée d'un éclat spirituel, plus le regard des fidèles se tourne vers elle avec ferveur, attiré par cet instinct de l'amour qui pénètre toujours davantage, devine et comprend quelle importance exceptionnelle et quelle mission extraordinaire elle revêt spécialement en un temps si orageux. A la lumière des transformations nées de la guerre mondiale et accélérées, propagées et développées par elle, en face de la marche des événements et de la fermentation des doctrines contenues dans ces changements et en jaillissant, la personne et l'oeuvre de Pie X prennent des aspects et des proportions qui seraient difficilement apparus avec autant de clarté dans une époque antérieure. Aujourd'hui, à l'heure où l'Eglise du Christ se trouve appelée à combattre contre les erreurs et les tendances condamnables du monde, luttes qu'on pourrait avec peine concevoir plus ardues et plus décisives, Nous sommes à même de mesurer plus exactement et de peser avec plus de précision la dette de reconnaissance que Nous avons envers celui qui s'employa avec une force et une sagesse constantes et vigilantes à préparer les membres du Corps mystique du Christ aux luttes futures, à aiguiser les armes spirituelles pour ces combats et à éduquer les sentiments et les coeurs des fidèles suivant l'esprit d'une sincère et ardente milice du Christ.



Aussi sa tombe est-elle particulièrement vénérée.

Quelle gloire, quelle sainte fierté pour vous, chers fils des Véné-ties, d'avoir donné à l'Eglise du Christ un pontife qui a irradié et irradie encore une telle plénitude de grâces, de rénovation et de sanctification ! Si la terre vénétienne et sa superbe métropole firent jadis un grand sacrifice, ressenti dans toutes les classes de la population, lorsqu'elles virent partir vers la Ville éternelle le patriarche aimé qu'elles ne devaient plus revoir sur la lagune de Saint-Marc , aujourd'hui que vous êtes venus déposer sur sa tombe le tribut de votre amour et de votre impérissable gratitude, vous avez vu cette tombe entourée de pieux visiteurs de diverses contrées, langues et nations, et vénérée et marquée de l'amour et de la reconnaissance d'un nombre incalculable d'âmes.

Dans ce tombeau repose le coeur du grand pontife, le coeur qui palpita pour vous, pour l'Eglise du Christ, pour le troupeau dispersé de Pierre, pour le monde sans paix.

Depuis vingt-cinq ans, ce coeur ne bat plus, mais l'amour qui l'animait est, comme son esprit, immortel devant Dieu. Cet esprit n'est pas enseveli dans les cryptes vaticanes ; la coupole de Michel-Ange ne l'emprisonne pas. Il vit en présence de Dieu, il vit dans Nos souvenirs, dans vos souvenirs et dans les souvenirs du monde entier. Ce sont des souvenirs d'amour et de piété, d'invocation et d'espérance, de désir et d'attente d'en revoir un jour l'image paternelle réapparaître resplendissante dans la lumière de la basilique vaticane. Ne sont-ce pas ces souvenirs qui vous ont amenés, Vénérables Frères et chers fils, au sépulcre qui renferme la dépouille mortelle du pontife Pie X ? Ces restes, muets et invisibles, n'ont-ils pas pour vous et des milliers d'autres coeurs, une parole qui nous donne comme l'écho des oeuvres et des vertus de l'âme d'élite qui les anima ? Ce tombeau ne vous semble-t-il pas attendre dans l'ombre une clarté de sainte prudence qui le livre à la vénération, et une main toute-puissante qui entoure d'une auréole le front du grand pontife ?



En attendant sa prochaine glorification.

Dieu seul glorifie ses serviteurs fidèles et prudents, comme il est le seul qui les choisit, les forme, les dirige, les conduit, les sanctifie et les exalte devant le monde, les anges et les hommes. Comme le triomphe des saints, Notre oeuvre aussi, Notre souhait et Notre désir sont dans ses mains ; il crée l'aube, aussi bien que l'aurore et le midi de l'honneur des autels, des grands héros de la foi et de la vertu, suscités par lui au cours des âges. Devant le regard de Dieu vit l'esprit immortel de Pie X, paré de ses vertus et de ses oeuvres qui l'ont suivi au-delà de cette vie qui n'est qu'une course vers la mort. Dieu, juste rémunérateur, aussi, s'il lui plaît, le glorifiera au sein de son Eglise militante, afin que l'exemple de son zèle sacerdotal et apostolique non seulement illustre les fastes du pontificat romain, mais encore soit un honneur et un stimulant au bien pour les fils de la lagune vénétienne, et un exemple de flamme chrétienne — ignis ardens — pour le monde entier. A cette fin, que Nos voeux et les vôtres s'élèvent vers Dieu. C'est dans la prière que résident toute Notre lumière et toute Notre force ; c'est par la prière aussi que vous traduisez également votre désir et votre affectueuse espérance. Dans de tels sentiments, Nous vous donnons à vous et à tous ceux pour lesquels vous l'avez demandée, comme une compagne secourable sur le chemin de la vie, la Bénédiction apostolique.



Son sacrifice et son appel ainsi que celui de ses successeurs en faveur la paix.

Cette bénédiction, Nous désirons, dans les circonstances actuelles, qu'elle implore avant toute chose la paix, la paix pour l'Italie, la paix pour l'Europe, la paix pour le monde. L'admirable pontife dont Nous avons évoqué ici, aujourd'hui, la sainte et chère mémoire, eut le coeur brisé par l'angoisse intime que lui causa la déclaration de guerre, comme s'il avait prévu et pressenti toutes les horreurs et les massacres du conflit mondial. Son successeur, Benoît XV, d'heureuse mémoire, aspira après la paix ; en sa faveur, il parla, pria, fit appel à cette modération des esprits qui fait oublier la lutte pour la concorde parmi les nations. Pour la paix, Notre prédécesseur immédiat, Pie XI, dont la vénérable figure se dresse en ce moment vivante devant les yeux de Notre esprit en même temps que celle de Pie X, fit à Dieu, il y a presque un an, dans un acte qui émut le monde, l'offrande de sa vie. A l'heure présente qui renouvelle avec acuité l'angoisse et la crainte des coeurs, Nous-même, dès le premier jour de Notre pontificat, Nous avons tenté et fait tout ce qui était en Notre pouvoir pour éloigner les dangers de la guerre et pour coopérer à l'obtention d'une paix solide, fondée sur la justice et qui sauvegarde la liberté et l'honneur des peuples. Nous avons même, dans les limites du possible, et pour autant que le permettaient les devoirs de Notre ministère apostolique, laissé en souffrance d'autres tâches et d'autres préoccupations qui Nous tenaient à coeur ; Nous Nous sommes imposé de prudentes réserves, afin de ne pas rendre, d'aucun côté, plus difficile ou impossible Notre action au profit de la paix, conscient de tout ce que dans ce domaine Nous devions et devons aux enfants de l'Eglise catholique et à l'humanité tout entière.

Nous ne voulons pas, et Nous n'en avons pas le coeur, même maintenant, renoncer à l'espoir que des sentiments de modération et d'objectivité suffiront à éviter un conflit qui, selon toutes les prévisions, dépasserait encore le précédent en destructions et en ruines matérielles et spirituelles. Nous ne cessons pas d'avoir la confiance que les chefs des peuples, à l'heure de la décision, se refuseront à assumer l'indicible responsabilité d'un appel à la force.

Mais au-dessus de toutes les espérances humaines basées sur le fond de bonté et les lumières de la sagesse des hommes, Notre regard se lève vers le Tout-Puissant, le Père des miséricordes et le Dieu de toutes consolations. C'est lui, qui tient dans ses mains les coeurs comme les intelligences des gouvernants, que Nous voulons — unis en cette journée mémorable à vous, Vénérables Frères et chers fils, à tous les catholiques de la terre, et ayant par ailleurs, présentes dans la prière tant d'âmes de bonne volonté qui tout en vivant hors de l'Eglise n'aspirent pas moins à la paix — c'est lui que nous voulons implorer de nouveau pour que, dans sa bonté et dans sa miséricorde infinies envers le genre humain, il mette fin à la guerre, là où elle sévit actuellement, et qu'il daigne préserver tous les hommes du fléau de nouveaux conflits sanglants encore plus atroces. Au-dessus de ce monde inquiet et troublé comme une mer en proie à la tempête, que Dieu fasse apparaître et resplendir l'arc-en-ciel de l'accalmie, de la paix, de la concorde féconde entre les peuples et les nations, et qu'avec une ferveur redoublée elle ne cesse de monter vers lui l'instante prière : Da pacem, Domine, in diebus nostris !






Pie XII 1939 - LETTRE DE LA SECRÉTAIRERIE D'ÉTAT A LA COMMISSION PONTIFICALE CENTRALE POUR L'ART SACRÉ