Pie XII 1941 - 29 juin 1941


DISCOURS AUX JEUNES ÉPOUX

(2 juillet 1941)1

L'efficacité de la prière.

Que de choses, chers jeunes époux, vous avez à demander à Dieu en ces jours où vous visitez les grands sanctuaires de Rome ! Ces visites sont comme autant de pieux pèlerinages, tout comme la vie d'ici-bas est un pèlerinage vers Dieu, dans l'alternance de la joie et de la douleur. Vous cheminez maintenant dans l'aurore de la joie. Devant les saints autels, vous avez prié pour vous-mêmes, pour le foyer que vous venez de fonder, pour les enfants qui viendront l'égayer et vous réjouir. La terre où vous avez mis le pied est une terre bien connue que des milliers de peuples, des millions de pèlerins ont foulée de leurs pieds au cours des siècles : tels les martyrs que vous avez vénérés aux catacombes, dans les basiliques et les églises, et que l'apôtre saint Jean entendit crier d'une voix forte : « Jusques à quand, ô Maître saint et véritable, ne ferez-vous pas justice et ne redemanderez-vous pas notre sang à ceux qui habitent sur la terre ? » Alors on leur répondit de se tenir en repos encore un peu de temps, jusqu'à ce que fût complet le nombre de leurs compagnons de service et de leurs frères (cf. Apoc. Ap 6,10). Eux aussi prient ; mais pour Dieu l'heure de les exaucer n'est pas encore arrivée. Ils ont une confiance inébranlable dans la promesse de Dieu : ils seront certainement exaucés, comme ils le furent lors du triomphe de leur foi en face des tyrans.

Vous aussi, vous avez prié ; et maintenant vous voyez exaucées les prières que vous avez, il y a longtemps peut-être, adressées au ciel, pour obtenir la grâce de contracter cette sainte union, qui était alors l'objet de vos désirs, et qui est maintenant le foyer de votre bonheur.

Rien, en effet, ne nous aide tant à prier que notre expérience personnelle de l'efficacité de nos prières, lorsque l'amoureuse Providence nous a donné en réponse largement, pleinement, ce que nous lui demandions. Mais souvent la Providence nous dit, comme aux martyrs de l'Apocalypse, de nous tenir en repos encore un peu de temps, le temps fixé par elle.

Ne jamais perdre confiance si Dieu tarde à exaucer nos prières

Que Dieu tarde à exaucer leurs prières, beaucoup sentent leur confiance ébranlée ; beaucoup ne savent point se tenir en repos, lorsque la Providence semble fermer l'oreille à toutes leurs supplications.

Non, ne perdez jamais votre confiance en ce Dieu qui vous a créés, qui vous a aimés avant que vous fussiez capables de l'aimer, qui a fait de vous ses amis. N'est-ce pas le propre de l'amitié, que l'ami brûle de remplir le désir de son ami et qu'il veuille son bien et sa perfection ? Qu'est-ce donc qu'aimer, sinon vouloir du bien à quelqu'un ? Et le bien de la créature ne découle-t-il pas en entier de la bonté divine ? 2

Ayez confiance en Dieu : ses grâces, selon le mot de Pétrarque 3, ne furent jamais lentes. Et pourtant, parmi ceux qui prient, il y en a, et même beaucoup, qui trouvent que les grâces divines tardent trop. Ce qu'ils demandent à Dieu leur semble bon, utile, nécessaire, bon non seulement pour le corps, mais aussi pour leur âme, et pour les âmes de ceux qui leur sont chers : avec ferveur, ils prient durant des mois, et ils constatent qu'il n'ont encore rien obtenu. La santé nécessaire pour s'occuper de sa famille n'a pas encore été accordée à telle mère. Ce fils, cette fille, qui par leur conduite mettent en péril leur salut éternel, ne sont pas encore revenus à de meilleurs sentiments. Ces soucis matériels au milieu desquels ces parents s'agitent et s'inquiètent, ne font que croître et devenir plus durs et plus menaçants. L'Eglise entière et tous les peuples avec elle multiplient les prières pour obtenir la fin des calamités qui jettent la grande famille humaine dans la douleur, et elle tarde encore, cette paix selon la justice, objet des désirs, des invocations, des soupirs et des instmces de l'Eglise, cette paix qui semble si nécessaire au bien de tou: et au bien même des âmes.

2 Cf. S. Thomas, Somme contre les Gentils, 1. 3, c. 95.
3 Trionfo dell'Eternità, 13.

... car ses promesses ne manquent point.

Sous le poids de telles pensées, beaucoup regardent surpris vers les saints autels où l'on prie ; ils demeurent peut-être scandalisés et perplexes, à entendre la sainte liturgie rappeler sans cesse et proclamer les promesses du divin Sauveur : « Tout ce que vous demanderez avec foi dans la prière, vous l'obtiendrez... » (Mt 21,22). « Demandez, et vous recevrez... Quiconque demande, reçoit... » (Mt 7,7). « Tout ce que vous demanderez au Père en mon nom, il le fera. En vérité, en vérité, je vous le dis, tout ce que vous demanderez au Père en mon nom, il vous l'accordera » (Jn 14,13 Jn 15,16 Jn 16,23). Les promesses du divin Sauveur pouvaient-elles être plus explicites, plus claires, plus solennelles ? Quelques-uns ne seront-ils pas tentés, en présence du silence de Dieu, d'y voir peut-être une amère dérision ?

Mais Dieu n'exerce pas toujours selon nos désirs.

Mais Dieu ne ment ni ne peut mentir ; ce qu'il a promis, il le tiendra ; ce qu'il a dit, il le fera. Elevez vos esprits, bien-aimés fils et filles, et écoutez ce qu'enseigne le grand Docteur saint Thomas d'Aquin4, lorsqu'il explique pourquoi Dieu n'exauce pas toujours les prières. « Dieu exauce les désirs de la créature raisonnable pour autant qu'elle désire le bien. Or, elle désire parfois quelque chose qui n'est pas un vrai bien, mais seulement un bien apparent, ou plutôt un vrai mal. Partant, Dieu ne saurait exaucer pareille prière. Aussi l'Ecriture sainte dit-elle : « Vous demandez, et vous ne recevez pas, parce que vous demandez mal » (Jc 4,3). Vous désirez, vous demandez une chose qui vous semble un bien ; mais Dieu voit plus loin que vous, il voit bien au-delà de l'objet que vous demandez. Il arrive, ajoute le même saint Docteur, que quelqu'un refuse par amitié telle chose à son ami parce qu'elle lui serait nuisible, ou que le contraire de cette chose lui sera plus avantageux, comme le médecin refuse parfois ce que le patient lui demande, à la pensée que cela ne contribuerait pas à le guérir. Ainsi, c'est l'amour qu'il porte à la créature raisonnable qui pousse Dieu à exaucer les prières, et il ne faut donc point s'étonner qu'il lui arrive de ne pas exaucer les prières de ceux qu'il aime d'un amour spécial, car c'est pour leur accorder ce qui leur est en réalité le plus utile. Aussi, bien que l'apôtre lui en eût fait par trois fois la demande, il n'enleva pas à saint Paul l'écharde enfoncée dans sa chair (2Co 12,7) — il s'agissait très probablement d'une infirmité corporelle — et cela pour le maintenir dans l'humilité. De la sorte, le grand apôtre ne fut point exaucé ad voluntatem, selon sa volonté, puisqu'il ne fut pas libéré de cette misère qui l'affligeait ; mais il fut exaucé selon son salut, ad salutem, puisque Dieu l'exauça encore plus parfaitement en lui promettant le réconfort de sa grâce, moyen d'atteindre avec plus de mérite le but désiré 5.

* Somme contre les Gentils, 1. 3, c. 96.
5 Cf. S. Augustin, In Epist. Joannis ad Parthos, tract. VI, n. 6-7 ; Migne, P. L., t. 35. coï. 2023. « S. Augustin, In Joannis Evang., tract. LXXIII, n. 3-4 j Migne, P. L., t. 35, col. 1825-1826.

Nécessité de prier au nom de Jésus.

Veille donc, homme de foi, avertit saint Augustin, et écoute avec vigilance ce qu'enseigne le divin Maître : quand vous demandez ce que vous désirez, ne le demandez point d'une façon quelconque, mais en mon nom, in nomine meo. Et quel est son nom ? Jésus-Christ. Christ signifie roi, Jésus signifie Sauveur. Evidemment, ce n'est pas un roi quelconque qui nous sauvera, mais le Roi Sauveur. Et lorsque nous demandons une chose contraire à notre salut, nous ne la demandons point au nom du Sauveur. Or, il est notre Sauveur aussi bien lorsqu'il n'exauce pas nos prières que lorsqu'il fait ce que nous lui demandons, car, en n'exauçant pas les prières qui tourneraient contre notre salut, il agit en véritable Sauveur. N'est-il point le divin médecin du salut éternel ? Il sait, lui, ce qui nous est utile, et ce qui ne l'est pas... Il n'est pas seulement le Sauveur, mais encore le bon Maître : afin de faire ce que nous lui demanderions, il a, dans la prière qu'il nous a lui-même enseignée, indiqué ce que nous devons demander ; et par là encore, il nous avertit que ce que nous lui demandons en dehors de la règle qu'il nous a tracée, nous ne le demandons point au nom du Maître. Sauveur et Maître à la fois, Jésus connaît le temps favorable, le temps du salut, et, même lorsque nous lui demandons quelque chose en son nom, il n'exauce pas toujours notre prière tout de suite : il l'exauce à son heure, il diffère, mais ne refuse point de nous exaucer 6.

C'est donc au nom de Jésus que nous devons offrir à Dieu nos prières ; car il n'est point sur terre d'autre nom où nous puissions trouver le salut (Ac 4,12). C'est le nom de Jésus qui rend nos aspirations puissantes et efficaces auprès de Dieu ; c'est ce nom qui fait que nos bons désirs soient la cause de ce que Dieu, dans sa Providence, a disposé que nous obtiendrions par la prière ; car la prière ne change point l'ordre immuable établi par Dieu, mais elle l'accomplit, en tant que dans cet ordre providentiel Dieu a lié l'octroi des biens que nous lui demandons aux prières que nous lui offrons. De là, cette parole de saint Alphonse de Liguori, que qui prie se sauve, qui ne prie point se damne 7 ; et affirmer qu'il n'est pas nécessaire, puisque l'ordre de sa Providence est immuable, de prier pour obtenir une grâce de Dieu, ce serait affirmer, observe le Docteur angélique saint Thomas, qu'il n'est point nécessaire de marcher pour arriver à tel point, ni de manger pour se nourrir : assertions évidemment absurdes 8.

Ainsi vous voyez, chers jeunes époux, comment l'efficacité de la prière se lie à sa nécessité, et comment les prières qui se présentent à Dieu ne sont pas toutes faites au nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ et, partant, ne sont pas toutes exaucées.

Redites donc au Sauveur avec les apôtres : « Seigneur, apprenez-nous à prier », Domine, doce nos orare (Lc 11,1). Que vos prières s'élèvent vers lui comme l'encens, et vos mains comme l'offrande du soir (Ps., cxli, 2). Et que la grâce de Dieu descende sur vous et vos nouvelles familles, pareille à la rosée de l'Hermon qui descend sur les sommets de Sion (Ps., cxxxm, 3).

Del gran mezzo délia preghiera, in fine. Somme contre les Gentils, 1. 3, c. 96.


DISCOURS AUX JEUNES ÉPOUX

(9 juillet 1941) 1

Encore l'efficacité de la prière.

Ce Nous est toujours une grande consolation de Nous voir entouré d'un si beau nombre de jeunes époux chrétiens venus de toutes parts avec le désir d'ajouter à la bénédiction de leur union par le prêtre la bénédiction du Père commun de la famille chrétienne. Que de foyers, que de pieux enfants Nous voyons en vous ! Que d'espérances l'Eglise, la patrie, le ciel mettent en vous ! Nous levons le regard vers le ciel, et il Nous semble que sur vous, jeunes mariés à la foi et à la piété si vives, descend cette haute et puissante bénédiction que le Seigneur accorde à ceux qui le craignent. La crainte de Dieu n'est-elle pas le commencement de la sagesse, qui édifie le foyer, non point sur les fragiles arcs-boutants du monde, mais sur les sept colonnes des vertus théologales et morales ? Ce foyer qui devient comme un sanctuaire où règne le sacrifice de l'affection et de la patience réciproques, de la concorde et de la fidélité ; où les parents deviennent les maîtres de leurs enfants, pour leur montrer un Père et une Mère dans les cieux ; où la prière, qui console les peines et raffermit les espérances, ouvre la journée et la clôt.

La prière fut le thème de Notre allocution de mercredi passé : Nous y avons parlé de son efficacité et de sa nécessité ; Nous y avons montré comment les prières adressées à Dieu ne sont point toutes faites au nom de Jésus-Christ, et par là ne sont point toutes exaucées. Ce que Nous avons dit alors, Nous désirons le reprendre et le compléter aujourd'hui en peu de mots. Ainsi la pensée et le souvenir de la prière vous accompagnera dans toute votre vie ; elle sera le guide de votre chemin et la lampe de votre maison, la bénédiction

1 D'après le texte italien de Discorsi e Radiomessaggi, t. III, p. 149 ; cf. la traduction française des Discours aux jeunes époux, t. II, p. 39.

de vos joies et le réconfort de vos soucis, l'inébranlable soutien de votre confiance en Dieu.

ier pour demander des biens profitables à notre salut

Nulle part Notre-Seigneur n'a promis de nous rendre infailliblement heureux en ce monde ; il a promis, lisons-nous dans l'Evangile, de nous exaucer comme le père qui ne donne point en nourriture à son fils, même s'il le lui demandait, une pierre, ou un serpent, ou un scorpion, mais le pain, le poisson, l'oeuf, qui le nourriront et le feront grandir (cf. Luc, Lc 11,11-13). Ce que Jésus notre Sauveur s'est engagé à nous accorder infailliblement comme fruit de nos prières, ce ne sont point ces faveurs que les hommes demandent souvent par ignorance de ce qui sert réellement à leur salut, mais cet « esprit bon », ce pain des dons surnaturels nécessaires ou utiles à nos âmes ; ce poisson symbolique que le Christ ressuscité offrit en nourriture aux apôtres sur les rives du lac de Tiberiade ; cet oeuf — aliment de dévotion et de piété pour les petits — que souvent les hommes ne distinguent point des cailloux extrêmement dangereux à leur salut spirituel, des cailloux que leur offre le Tentateur. Le grand Apôtre confessait aux Romains : « Nous ne savons pas ce que nous devons, selon nos besoins, demander dans nos prières. Mais l'Esprit lui-même prie pour nous par des gémissements ineffables ; et Celui qui sonde les coeurs connaît quels sont les désirs de l'Esprit ; il sait qu'il prie selon Dieu pour les saints » (Rm 8,26-27). Les hommes sont souvent comme des enfants ignorant ce qui leur est bon et ce qu'il leur convient de demander ; souvent malhabiles sont les prières qu'ils adressent au Père céleste. Mais le Saint-Esprit, qui par sa grâce agit dans nos âmes et nous inspire nos gémissements, sait donner à nos prières leur vrai sens et leur vraie valeur ; et au Père qui lit au fond des coeurs apparaît en pleine lumière ce qu'à travers nos prières et nos désirs demande pour nous son divin Esprit, et il exauce sans aucun doute ces demandes qui montent du plus intime de nous-mêmes.

avec persévérance

Ne voyez-vous pas dans cet Esprit qui opère en vous l'inébranlable fondement de votre confiance dans la prière, le lien vigoureux qui enchaîne la prière à sa réalisation ? Vous savez, vous croyez de toute votre âme, qu'aucune de vos prières ne reste sans effet et

que, lorsque vous ne recevez pas exactement la faveur spéciale que vous demandiez, vous devez ou reconnaître votre ignorance touchant votre vrai bien ou penser que Dieu vous accordera cette grâce à l'heure qu'il a marquée ; car certaines grâces ne sont point refusées, mais simplement différées à un temps opportun, et en attendant vous recevez mieux, beaucoup mieux : cela même que l'Esprit-Saint a demandé en vous par les gémissements qu'il vous inspirait. Voilà la conviction et la sagesse du chrétien ; voilà le guide, le soutien et la lumière de votre prière au milieu des obscurités de la foi. Cette lumière, vous ne la laisserez pas s'éteindre, ni lorsque Dieu tardera ou refusera de vous exaucer, ni lorsque les infortunes et les angoisses tourmenteront votre esprit, et elle vous donnera la force de persévérer dans la prière.

Pourquoi donc, peut-on se demander encore, pourquoi donc arrive-t-il si souvent que vous n'obteniez pas l'objet de vos prières ? Parce que, tandis que le Saint-Esprit continue à vous pousser à la prière, vous cessez de suivre son inspiration et le mouvement qu'il a suscité en vous : vous cessez de prier, il vous manque la persévérance, et votre prière n'obtient point l'effet désiré. Notre-Seigneur a dit et répété que la prière persévérante est infailliblement exaucée. La persévérance est cette insistance qui fait violence au coeur de Dieu et qui triomphe. Lui qui voit de plus haut et de plus loin que nous les faits de notre vie et leur enchaînement, lui qui contemple tout le bien que vos âmes retirent des prières prolongées et des désirs confiants, de vos humiliations devant lui et de votre foi courageuse et constante, il n'a pas voulu promettre de vous exaucer immédiatement. Et pourquoi donc ? Parce qu'il a un coeur plus tendre que celui d'une mère, et qu'une mère prudente n'hésite pas à faire attendre son enfant, quitte même à le laisser pleurer un peu, quand elle sait que le lait qu'il voudrait tout de suite lui sera plus profitable dans quelques instants.

. et piété.

Prier, c'est donc demander ce qui est bon pour nos âmes, le demander avec persévérance, mais aussi le demander avec piété : c'est, selon l'enseignement de saint Thomas, la troisième des quatre conditions de la prière efficace — pro se, necessaria ad salutem, pie et perseveranter 2. La prière pieuse, qu'est-ce donc ? Ce n'est point

S. Theol., II» II*e, q. 83, a. 15 ad 2.

la prière qui consiste à prononcer des paroles avec un esprit et un cceur distraits et avec des yeux qui se promènent partout. C'est la prière recueillie qui s'anime envers Dieu tout entière de confiance filiale, qui s'illumine de foi vive, qui s'imprègne d'amour pour lui et le prochain ; c'est la prière toujours faite en état de grâce, toujours méritoire par conséquent de la vie éternelle, toujours humble dans sa confiance ; c'est la prière qui, lorsque vous vous agenouillez devant les autels, ou devant l'image du Crucifié et de la Sainte Vierge à votre foyer, ne connaît point l'arrogance de ce pharisien qui se vantait d'être meilleur que les autres hommes, c'est la prière qui fera sentir à votre cceur, comme celle du pauvre publicain, que tout ce que vous recevrez ne sera que pure miséricorde de Dieu à votre égard (cf. Lc 18,9-14).

Efficacité de la prière que nous faisons pour les autres.

Pieuse, persévérante, surnaturelle, la prière que vous ferez pour vous-mêmes sera toujours exaucée, assure le Docteur angélique3 ; mais la prière que vous ferez pour les autres ? Pour ceux dont le salut vous est si cher et que vous désirez pour compagnons dans la béatitude éternelle, votre époux ou votre épouse, votre fils ou votre fille, votre père ou votre mère, vos amis et les personnes de votre connaissance ? Que vaut pour eux votre prière ? Quelle est son efficacité auprès du trône de Dieu ? Ici, sans doute, intervient la terrible possibilité inhérente au libre arbitre de l'homme, la possibilité de résister aux grâces puissantes et de forme si variée que vos prières auront obtenues à ces âmes ; mais la toute-puissante miséricorde de Dieu est un mystère insondable à notre pensée, un mystère infini qui permet à toutes les mères de prendre pour elles-mêmes cette parole d'un pieux évêque à sainte Monique, alors qu'elle implorait son aide avec d'abondantes larmes pour la conversion de son fils Augustin : « Le fils de tant de larmes, lui disait-il, ne saurait se perdre » 4.

Et quand même il ne vous serait point donné en cette vie de voir de vos yeux le triomphe de la grâce dans les âmes pour lesquelles vous avez prié et pleuré si longtemps, votre coeur ne devrait jamais renoncer à l'espérance : en ces instants mystérieux où, dans le silence de l'agonie d'un mourant, le Créateur se dispose à rappeler à lui une âme, oeuvre de ses mains, peut-être que son immense amour a finalement remporté, loin de vos regards, la victoire pour laquelle votre reconnaissance le bénira là-haut à tout jamais.

Ainsi que toute vie humaine, cette vie à deux que vous commencez rencontrera des heures dures et difficiles, des moments de désolation et d'amertume : levez alors les yeux au ciel. Le premier de vos réconforts, le plus ferme de vos soutiens sera la prière confiante ; et vous ne douterez jamais de l'amour de Dieu pour vous, sachant bien que nulle de vos prières ne restera vaine, que Dieu les exaucera toutes, sinon à l'heure et de la manière que souhaitaient les rêves de votre esprit, du moins au moment le plus opportun pour vous et de cette manière infiniment plus heureuse que savent disposer la prévoyante sagesse et la puissance du coeur de Dieu.

Nous demandons avec ferveur que le Seigneur garde en vos âmes cette vive confiance et Nous vous donnons avec une paternelle affection la Bénédiction apostolique.


3 Idem, ibid.
4 S. Augustin, Confessions, 1. III, c. 12.



LETTRE AU PRÉSIDENT DE LA FÉDÉRATION DES TRAVAILLEURS CHRÉTIENS-SOCIAUX DE SUISSE

(11 juillet 1941 )1

Cette lettre a été adressée à M. Joseph Scherrer, président de la Fédération des travailleurs chrétiens-sociaux de Suisse, qui avait envoyé au Saint-Père un télégramme à l'occasion de la célébration à Einsiedeln par cette Fédération du 50e anniversaire de l'encyclique «• Rerum novarum » :

A l'occasion du jubilé d'or de l'encyclique Rerum novarum, vous Nous avez envoyé, cher fils, au nom de la Fédération des travailleurs chrétiens-sociaux suisses, une adresse d'hommage pour remercier avec chaleur et éloquence la sainte Eglise de ses sûres directives religieuses et morales en matière sociale.

Avec joie Nous aurions salué au Vatican Nos chers fils et filles militants dans votre mouvement, si le malheur des temps n'avait point ruiné votre projet d'un pèlerinage à Rome. Votre message ne Nous a pas moins rempli de consolation et de joie, et c'est de grand coeur que Nous saisissons l'occasion de'vous remercier, comme le fit jadis Notre prédécesseur Benoît XV, de vos efforts et de vos entreprises pour réaliser les directives sociales de Léon XIII. En vous s'est vérifié ce que disait Notre prédécesseur immédiat, Pie XI, lorsqu'il relevait dans Quadragesimo anno les heureux fruits de l'encyclique Rerum novarum : « Nombre d'ouvriers furent confirmés dans leurs bonnes dispositions et efficacement prémunis contre les leurres des organisations socialistes qui se prétendaient effrontément les seuls champions des intérêts des prolétaires et des déshérités.»

1 D'après le texte italien de l'Osservatore romano, du 24 septembre 1941 ; cf. la traduction française des Actes de S. S. Pie XII, t. III, p. 149. L'original est rédigé en langue allemande.

Vous vous êtes efforcés de « réaliser intégralement le programme de Léon XIII », de former dans l'ouvrier l'homme tout entier, d'éveiller parmi les travailleurs chrétiens la conscience de leur valeur et de leur dignité, comme aussi de leurs droits et de leurs devoirs ; de maintenir très pur en eux le sens de la justice et de la collaboration avec les autres classes sociales.

Vous avez travaillé à renouveler la société par l'esprit chrétien ; aussi avez-vous considéré comme votre tâche principale et mis en tête de votre programme le perfectionnement moral et religieux de vos membres.

Il faut hautement reconnaître — c'est une justice à rendre à votre mouvement — la bonne volonté, la noblesse et le désintéressement tout surnaturel qui caractérisent votre action et vos succès. Notre gratitude s'adresse à l'admirable activité sociale de plusieurs générations de prêtres zélés. Nous avons Nous-même conféré la consécration episcopale à l'un d'entre eux, Aloïs Scheiwiler, l'évê-que défunt du diocèse de Saint-Gall, un des animateurs de votre mouvement.

Notre reconnaissance va ensuite à d'innombrables laïques, hommes d'études et hommes d'action, militants fidèles et désintéressés du mouvement chrétien-social. Pour vous, cher fils, Nous vous devons ici des paroles d'éloge et de gratitude pour votre activité toute dévouée à l'Eglise et au Christ. Ce que vous avez fait et continuez de faire, c'est, au meilleur sens du mot, la collaboration du laïque à l'apostolat hiérarchique.

Nous disons enfin Notre gratitude à tous les chrétiens-sociaux pour leur sincère docilité à la conduite et aux directives des pasteurs placés par l'Eglise pour vous diriger.

Mais par-dessus tout Nos actions de grâces montent vers la Providence divine, pour la remercier des bénédictions que par votre mouvement elle a fait descendre sur les masses laborieuses et sur tout le peuple suisse.

Votre patrie, dont souvent il Nous fut donné d'admirer les beautés naturelles et les richesses culturelles, a conservé, au travers de vicissitudes de toute sorte, le bien précieux de la paix pendant la Grande Guerre, et a réussi au prix de grands sacrifices à la maintenir dans le conflit actuel. Vous en savez gré à Dieu et vous le remerciez également comme d'un don exceptionnel de sa Providence de pouvoir promouvoir et défendre librement dans votre pays la doctrine catholique.


TRAVAILLEURS CHRÉTIENS-SOCIAUX DE SUISSE

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Conscients des devoirs que vous impose pareille situation privilégiée, vous avez voué vos forces et votre mouvement au progrès économique et social de votre patrie, en harmonie avec les messages sociaux de Léon XIII et de Pie XI, qui indiquent le retour de la société à l'esprit et à la loi du Christ comme le principe et la fin de tout ordre social. Aussi vous êtes-vous proposé comme tâche principale de ramener au Christ les individus et la société, la vie privée et la vie publique.

Avec satisfaction, Nous acceptons ces promesses qui sont les vôtres. C'est dire que vous maintiendrez et, dans la mesure du possible, développerez vos institutions et activités actuelles. Plus s'étendent dans le monde contemporain les ravages de la déchristianisation, plus doit s'intensifier la lutte de l'Eglise et de ses fidèles pour les droits de Dieu et du Christ. La durée du combat ne doit point éteindre l'ardeur des militants.

Votre tâche à vous est de mener parmi les masses laborieuses cette campagne de rechristianisation. L'Eglise aujourd'hui compte d'autant plus sur toute la force de votre collaboration que vous avez mission, vous le savez bien, de transmettre aux temps nouveaux qui s'ouvrent son précieux héritage de doctrine et d'activité sociales.

Vous considérez comme un honneur le fait que la croix symbole de l'esprit, de la loi et de l'oeuvre du Christ, est, depuis six cent cinquante ans, le signe de ralliement et d'union de la Confédération suisse. Si pour d'autres ce signe a perdu son sens religieux, vous, vous avez la vocation de travailler, avec la foi vigoureuse et sincère d'un bienheureux Nicolas de Flue, à redresser dans les coeurs ce symbole et tout ce qu'il représente, afin que la justice sociale et la paix du Christ animent toute la vie de votre peuple et toute l'activité de vos magistrats.

Comme gage de l'assistance divine dans votre haute et noble entreprise, Nous vous accordons avec effusion, à vous, cher fils, aux membres de votre Fédération et à leurs familles, à votre peuple et à votre patrie, la Bénédiction apostolique.

v LETTRE AU PRÉSIDENT ET AUX MEMBRES DU CONSEIL FÉDÉRAL SUISSE A L'OCCASION DU 650e ANNIVERSAIRE


DE LA FONDATION DE LA CONFÉDÉRATION HELVÉTIQUE

(12 juillet 1941) 1

C'est le 1er août 1291 que les délégués des cantons d'Uri, Schwyz et Unterwald conclurent au Grûtli, près du lac des Quatre-Cantons, une alliance perpétuelle pour se soustraire à la domination des Habsbourg.

Félicitations du Saint-Père pour l'exemple d'union donné par la Suisse, et pour l'aide qu'elle apporte aux victimes de la guerre

Nous avons appris dernièrement que la Confédération helvétique va célébrer dans la joie, au début du prochain mois d'août, le 650e anniversaire de son heureuse fondation. De très grand cceur, Nous prenons part, Nous aussi, à la joie de la chère nation helvétique, dont un groupe d'élite de citoyens veille, depuis tant de siècles, avec une fidélité non seulement constante mais parfois héroïque, sur la personne du pontife romain. Votre Etat, illustrissimes Messieurs, dans la multiple diversité des langues et des institutions, offre le plus bel exemple d'union étroite et fraternelle ; cet exemple est capable, avec le secours divin, de pousser fortement les autres peuples à un amour mutuel et à la concorde. A la vérité, dans votre pays, la charité chrétienne est en très grand honneur. Elle fait que votre République qui n'est ennemie de personne s'efforce de venir en aide même aux citoyens des autres nations, à ceux en particulier qui souf-


CONSEIL FÉDÉRAL SUISSE

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frent davantage des calamités de cette horrible guerre. Nous vous félicitons donc de nouveau et avec vous Nous avons rendu et rendons grâces à la divine bonté qui, jusqu'ici, vous a protégés d'une façon spéciale. Nous vous adressons aussi publiquement, illustrissimes Messieurs, Nos félicitations pour la paix et la concorde qui, grâce aux hommes de bonne volonté, régnent aujourd'hui dans vos cantons, Nos félicitations pour la sagesse et le soin avec lesquels vous-mêmes, au milieu de tant de périls actuels, vous gouvernez ce peuple et vous vous efforcez — ce qui est le principal et Nous tient le plus à coeur — d'arriver à ce que les droits et les obligations de la religion soient conservés sains et saufs.

et pour le respect officiel que son gouvernement témoigne à Dieu.

En outre, il Nous plaît de rappeler que les autorités ou les gouvernants de la Suisse n'omettent pas dans leurs discours publics de prononcer avec confiance et respect le nom de Dieu et, suivant une coutume fort honorable, de toujours se confier, eux et leurs concitoyens, à la protection divine, chaque fois qu'ils font des communications officielles. Ainsi, vous suivez tout à fait les traces de vos ancêtres qui, au début du mois d'août 1291, renouvelèrent « au nom du Seigneur » une alliance perpétuelle entre eux. Exprimant le souhait que vos concitoyens pensent et agissent dans le même sens que le bienheureux Nicolas de Flue, qui s'est fait remarquer et par la ferveur de sa piété chrétienne et par son zèle pour la Confédération helvétique, Nous formons pour votre nation les voeux chaleureux pour que le règne du Christ se consolide de plus en plus dans ses fils, qu'elle puisse, dans une prospérité générale accrue, remplir mieux de jour en jour la mission que Dieu lui a assignée. Enfin, en cet anniversaire solennel de la fondation de la Confédération, Nous prions Dieu instamment de protéger toujours l'illustre Helvétie, d'écarter d'elle les maux et les dangers de tout genre, de vouloir bien enrichir amplement des biens célestes ses gourvernants et tout son peuple.


ALLOCUTION A L'AMBASSADEUR DU PÉROU

(17 juillet 1941 j1

En réponse au nouvel ambassadeur du Pérou, M. Diomède Arias Schrei-ber, venu lui présenter ses lettres de créance, le Saint-Père a prononcé cette allocution :

C'est avec la plus grande satisfaction que Nous voyons occupé aujourd'hui le poste que la disparition prématurée du regretté comte de Minbela, après dix années de fructueuse et continuelle activité, avait laissé vacant.

Les paroles que Votre Excellence a prononcées, en Nous présentant les lettres par lesquelles S. Exc. M. le président de la République du Pérou l'accrédite comme ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire, ont exprimé avec éloquence les sentiments et les principes qui vont lui servir d'inspiration et de guide au moment où elle assume cette honorable fonction.

Le catholicisme péruvien.

Ces paroles respirent le noble et serein amour dont a fait preuve le peuple péruvien, héritier et représentant de deux civilisations qui ont inscrit dans les annales de l'humanité des pages ineffaçables. Elles traduisent l'affirmation, basée sur la gratitude, de la vocation chrétienne et catholique de ce peuple si cher à Notre cceur ; affirmation qui concerne non seulement le passé, mais vise encore l'avenir comme une fière et consciente continuation des traditions dont les colons espagnols ont fait la base fondamentale du patrimoine spirituel de la nation.

Ce catholicisme traditionnel a donné de lumineuses preuves de sa force profonde et de sa vigueur indomptable, même aux époques où, par suite de l'influence d'autres courants, l'action de l'Eglise eut à souffrir de douloureuses restrictions. Fécondée par la sueur de ses apôtres, arrosée du sang de ses martyrs et ennoblie par les héroïques vertus de ses saints, l'Eglise du Pérou s'est toujours montrée, même aux temps d'épreuve, digne de son passé et, aujourd'hui encore, elle trouve dans les sentiments religieux de la nation une nouvelle impulsion pour se dévouer davantage à sa fin élevée qui est de promouvoir le progrès spirituel et culturel de ce peuple confié à ses sages et maternelles sollicitudes.

Les déclarations que vous venez de faire, Monsieur l'ambassadeur, sont pour Nous l'heureux témoignage que S. Exc. M. le président de la République et son gouvernement voient dans le maintien des relations fécondes et confiantes avec le Siège apostolique le meilleur et le plus sûr moyen de rendre efficace, au profit du bien public et privé, les principes et les valeurs de la religion catholique, montrant ainsi toujours davantage la grande utilité de l'harmonieuse concorde entre l'Eglise et l'Etat pour la réalisation des différentes tâches devant lesquelles, aujourd'hui plus que jamais, se trouvent ceux qui dirigent les destinées des peuples.

problème de la justice sociale.

Mais plus imposant et plus vaste qu'en d'autres temps se présente aujourd'hui devant la responsabilité des gouvernements et les aspirations des masses le problème de la justice sociale, problème auquel — ainsi que Votre Excellence l'a rappelé dans de nobles paroles — Notre sage prédécesseur Léon XIII s'efforça, il y a maintenant cinquante ans, de donner une place d'honneur dans la conscience humaine et chrétienne de ses contemporains.

L'esprit de l'encyclique Rerum novarum est un esprit d'évolution pacifique, ordonnée et systématique de sentiments et de réalisations sociaux. Mais c'est aussi un esprit de décision ferme, de progrès créateur en faveur des plus pauvres parmi les pauvres, un esprit dont la détermination résolue ne peut admettre les subterfuges, les demi-mesures ou le vide silencieux. Tandis que la vie économique et sociale est sujette à des variations, l'édifice fondamental de la doctrine de l'Eglise demeure immuable, tels les sommets vertigineux des Cordillères qui se dressent au-dessus des flots écumeux du Pacifique. La lumière que réfléchit le message historique du grand pontife

et qui brille sur tous les hommes de bonne volonté émane des collines éternelles d'où doit venir notre salut ; le sens social qui vibre en ce document est né de la contemplation du Père céleste, dont les fils doivent nécessairement faire preuve dans la pratique d'un esprit sincèrement fraternel.

Le droit international.

Lorsque, ensuite, Monsieur l'ambassadeur, Votre Excellence a fait, en termes particulièrement émouvants, allusion à la position de votre pays et de votre peuple à l'égard du droit international qui, tout en sauvegardant la parfaite souveraineté de chaque Etat, pose comme postulat de la conception juridique naturelle et chrétienne, la reconnaissance du principe « la paix dans la justice », elle a mis le doigt sur une plaie vive, dont l'humanité tourmentée attend la guérison, l'âme fiévreuse et le coeur angoissé.

Le bruit tumultueux de la violence belliqueuse, dont le monde actuel est à la fois le témoin ému et l'infortunée victime, l'oeuvre de destruction matérielle et morale que le recours à la violence sème sur sa route sanglante invitent à la réflexion et à la pondération ceux-là même qui pourraient se sentir portés à faire passer parfois les considérations utilitaires et intéressées avant les principes de la morale.

Aujourd'hui, la question de la moralisation du droit international, de sa préservation des déviations égoïstes, de la nécessité de l'établir une fois encore sur une base morale solide et appuyée sur le droit, apparaît comme un problème vital pour toutes les nations, et tout spécialement pour les peuples qui sont le moins pourvus des moyens extérieurs de force. Et bien qu'à l'heure actuelle il soit toujours difficile d'espérer que de telles idées, éminemment humaines, chrétiennes et sociales, puissent s'imposer dans l'ardeur de la lutte, il est cependant consolant de noter que de nombreuses voix autorisées s'expriment dans ce sens et laissent entendre que le résultat d'une victoire militaire ne peut faire abstraction du respect des principes moraux qui sont seuls capables d'assurer la stabilité et la fermeté des bases fondamentales du droit des gens.

Votre haute mission, Monsieur l'ambassadeur, commence en un moment où la terre d'Europe, et pas seulement d'Europe, tremble sous la secousse terrible de la guerre. Les conséquences économiques et spirituelles de cette dernière se font sentir toujours plus durement, jusque sur les rivages étendus, dans les vallées fécondes, parmi les gigantesques chaînes de montagne de votre lointaine patrie ; à une heure où tous les membres de la grande famille humaine prennent davantage conscience de la communauté de leur destinée, dans le bonheur ou dans le malheur.

Que Votre Excellence, Monsieur l'ambassadeur, soit l'interprète auprès de S. Exc. M. le président et des membres du gouvernement de Nos voeux cordiaux pour leur bonheur personnel et pour l'efficacité de leur tâche, doublement ardue en des temps si difficiles. Qu'elle soit certaine que, dans l'accomplissement de sa mission, elle trouvera toujours en Nous cette confiance et cette aide bienveillante qui correspond à l'importance de sa charge et à ses intentions d'un idéal élevé non moins qu'à la cordialité des relations heureusement existantes entre le Saint-Siège et la République du Pérou.

Dans ces sentiments, accueillant de tout coeur la prière de Votre Excellence, Nous implorons la protection du ciel sur votre patrie bien-aimée ; Nous prions pour sa prospérité et son pacifique progrès, et lui donnons, ainsi que tout particulièrement à Votre Excellence, Notre paternelle et affectueuse Bénédiction apostolique.


Pie XII 1941 - 29 juin 1941