Pie XII 1941 - RADIOMESSAGE DE NOËL AU MONDE ENTIER


ALLOCUTION A LA GARDE NOBLE PONTIFICALE

(26 décembre 1941)1

L'allocution habituelle à la Garde noble pontificale permet au Saint-Père de souligner que la noblesse s'acquiert surtout par la vertu et le service :

Chers fils, Notre cceur paternel répond avec cette affection reconnaissante, qui pour la troisième fois en cet anniversaire solennel émeut Notre âme en votre présence, aux voeux filiaux de Noël présentés avec tant de noblesse par votre digne et cher capitaine-commandant. Parmi les corps armés pontificaux, votre bataillon est au premier rang d'honneur. Vos voeux sont pour Nous non seulement un gage manifeste de votre dévouement, mais en même temps une attestation, un témoignage de cette foi profonde où votre dévouement prend sa source, s'anime et se vivifie. Ce dévouement rend plus grande devant Dieu et devant les hommes la noblesse de votre sang et plus chaleureux les souhaits que vous présentez au ciel pour Nous, afin que sur cette mer où sévissent les tempêtes, les orages, les bourrasques humaines, la furie des vents cesse, les flots redeviennent tranquilles, afin que sur le navire rendu au calme la bonté et la probité se donnent la main et que la justice et la paix s'embrassent (Ps., lxxxiv, H)-

Oui, la foi rend plus noble votre légion, car toute noblesse vient de Dieu, l'Etre souverainement noble et la source de toutes les perfections. Tout en lui est noblesse de l'être. Lorsque Moïse, envoyé pour délivrer le peuple d'Israël du joug du pharaon, demanda à Dieu sur le mont Horeb quel était son nom pour qu'il puisse l'indiquer au peuple, le Seigneur lui dit : « Je suis Celui qui suis, ego sum qui sum. Tu parleras ainsi aux enfants d'Israël : Celui qui est m'envoie vers vous » (Ex 3,14).

Ce qu'est la noblesse.

Qu'est-ce donc que la noblesse ? « Tout ce qui est noblesse ou perfection en chaque chose, enseigne l'angélique docteur saint Thomas, se trouve dans cette chose à raison de son être et selon son être : la noblesse qui vient à l'homme de sa sagesse serait en fait nulle, si par elle il n'était en fait sage. Il en va de même des autres perfections. Par conséquent, la mesure et le genre de noblesse d'une chose correspondent à la mesure avec laquelle elle possède l'être. C'est pourquoi une chose est dite plus au moins noble, selon que son être se trouve limité dans un degré particulier plus ou moins grand de perfection. Si donc il existe quelqu'un qui possède l'être dans toute son étendue, il ne peut lui manquer aucun degré de la noblesse ou perfection qui convient à telle ou telle chose... Dès lors, Dieu qui est son être, possède l'être dans toute sa puissance. Il ne peut par conséquent être privé d'aucune noblesse ou perfection qui convienne à un être quel qu'il soit » 2.

Vous aussi vous tenez l'être de Dieu. C'est Lui qui vous a faits et non vous-mêmes qui vous êtes faits : Ipse fecit nos et non ipsi nos (Ps., ic, 3). Dieu vous a donné la noblesse du sang, la noblesse de valeur, la noblesse de vertu, la noblesse de foi chrétienne et de grâce. La noblesse de sang, vous la mettez au service de l'Eglise et la consacrez à la garde du successeur de Pierre. La noblesse des oeuvres éclatantes de vos ancêtres vous ennoblira vous-mêmes si vous avez soin d'y ajouter de jour en jour la noblesse de la vertu et celle de cette sainte valeur qui provient de l'esprit et transforme même le corps en sublime instrument de vertu. S'il est vrai, comme l'écrivait Dante Alighieri, « qu'il y a noblesse partout où il y a vertu, mais pas nécessairement vertu là où il y a noblesse », en vous doivent resplendir cette piété et cette religion qui exaltent la noblesse et, avec l'exemple qu'elles offrent, acquièrent une plus grande louange3. La noblesse jointe à la vertu apparaît tellement digne d'éloge que souvent la lumière de la vertu éclipse l'éclat de la noblesse. Dans l'histoire et dans les salons de grandes familles quel-

quefois le nom ou le renom de la vertu reste la seule et unique noblesse, comme n'hésitait pas à l'affirmer le païen Juvénal : Tota licet veteres exornent undique cerae Atria, nobilitas sola est atque unica virtus4.

Elle s'accroît surtout par la vertu...

C'est la vertu plus que les armes qui ennoblit les maisons et leurs descendances. C'est à la vertu assise sur le trône pontifical que beaucoup de familles romaines doivent une noblesse qui les rendit vénérables sur les rives du Tibre et à la face du monde : car l'Eglise, Epouse du Christ, et la suréminente paternité de son Vicaire sont aussi la source d'où sort et vient une noble grandeur, non seulement pour la hiérarchie sacrée, mais également pour le lustre des familles. Mais là où l'Eglise et le magistère pontifical forment une sublime source de noblesse, c'est dans la glorification des héros et des héroïnes de la foi et de la grâce, quand la voix de Pierre, sous la voûte du ciel de Michel-Ange (le dôme de la Basilique vaticane) exalte et proclame, au milieu de l'éclat des lumières et de l'admiration des foules, la noblesse spirituelle des bienheureux et des saints. Devant cette noblesse s'incline même la voix éminente qui la proclame ; devant elle s'inclinent tous les enfants de l'Eglise. Vous vous inclinez, vous aussi qui montez la garde près du Souverain Pontife et voyez s'accroître dans le ciel pour défendre et protéger l'Eglise et le peuple chrétien, la bienheureuse légion des saints, garde noble céleste, splendide ornement du trône éternel du Christ et très puissant rempart de son règne dans le monde ; légion la plus noble parmi les nobles légions de PEmpyrée ; légion couronnée des lauriers de toutes les vertus, victorieuse dans les combats contre le démon, le monde et la chair, légion qui vient des ermitages, des cloîtres, des amphithéâtres et des prisons, des hôpitaux, des écoles et des foyers domestiques, qui descend des gibets et des bûchers ardents, qui arrive de terres lointaines et inhospitalières, qui monte de cette vallée de larmes et de sang vers la gloire, pour être auprès du trône du Christ, notre garde, notre charitable protectrice, notre perpétuelle avocate. Voilà, chers fils, le plus noble triomphe de la vertu chrétienne ; voilà la première et la dernière noblesse de l'âme et de l'homme

4 « Quoiqu'ils ornent de partout tous les salons ou les portiques de vieux portraits de cire, vertu seule est l'unique noblesse ». (Juvénal, Satires, 8, v. 19-20).

créé pour adorer, aimer et servir Dieu, en servant de plus près aussi la personne du successeur de Pierre.

... et le service.

Elevez votre esprit en accomplissant votre noble service. Que votre foi vivante fasse grandir votre vertu ! Que votre vertu anime et accompagne chacun de vos pas ! Que chacun de ces pas soit un mérite pour le ciel ! Ne craignez pas, dans vos allées et venues, d'entrer dans la grotte lointaine et humble de Bethléem où sont présents la Vierge Mère et le gardien virginal des mystères de Dieu, où le Verbe de Dieu a daigné naître homme parmi les hommes et habiter parmi nous, Verbe de Dieu par qui l'univers a été fait et sans qui rien n'a été fait. Prosternez-vous devant ce petit enfant, souverainement beau de toute la noblesse de l'être divin. Dans ses veines coule le sang très noble de David ; dans son coeur palpite un amour immense qui embrasse toutes les nations ; dans ses yeux brille une sagesse plus grande que celle de Salomon. Il est plus qu'un prophète. Il est Celui que les prophètes attendaient. En lui s'accomplissent et s'accompliront toutes leurs prophéties. Il est la voie, la vérité et la vie ; à son berceau commence l'ère nouvelle de la Rédemption et de l'histoire du genre humain jusqu'à ce jour dernier qui jugera le monde et ses paix et ses guerres. Héritier immortel de toutes les promesses et des victoires du Fils de l'homme, son règne n'aura pas de fin et se prolongera à partir de la consommation des siècles humains dans les siècles éternels. Prosternez-vous devant Lui ; adorez-le avec sa mère et avec son père gardien et nourricier, avec les anges et avec les sages de l'Orient ; priez-le pour vous, pour Nous, pour son Eglise, pour les peuples et pour les nations, afin que la paix si désirée sourie aux hommes de bonne volonté.

Que la Bénédiction apostolique que de grand coeur Nous vous donnons, ainsi qu'à vos familles et à tous ceux que vous avez dans l'esprit et dans le coeur, comme gage des faveurs célestes les plus choisies, pour de joyeuses et saintes fêtes de Noël et en présage d'une année nouvelle moins triste et plus heureuse, soit Notre paternel remerciement pour les voeux qui Nous ont été offerts, pour votre dévouement au Siège apostolique, pour le fidèle accomplissement de votre service auprès de Notre personne.


LETTRE DE LA SECRÉTAIRERIE D'ÉTAT A M. VITTORINO VERONESE, SECRÉTAIRE DES LAURÉATS

DE L'ACTION CATHOLIQUE ITALIENNE

(26 décembre 1941J1

A l'occasion des Journées nationales des Lauréats de l'Action catholique italienne qui se sont tenues à /'«• Angélique » du 3 au 6 janvier 1942, le Saint-Père a fait adresser la lettre suivante à leur secrétaire général, Me Vittorino Veronese :

D'après le message par lequel vous avez annoncé au Saint-Père la célébration proche des Journées nationales des Lauréats catholiques, Sa Sainteté s'est réjouie de constater le sérieux des projets, la préparation appropriée et la haute conscience des responsabilités avec lesquels se disposent à participer à leur congrès annuel ces amis choisis de la culture, qui dans la lumière du Christ Jésus ont l'intention d'apporter la contribution de leurs talents et de leurs énergies les meilleurs pour l'assainissement de la société.

C'est une consolation de constater la claire vision qu'ils ont du devoir social et la foi avec laquelle ils cherchent dans les éternels principes de l'Evangile les règles de la restauration morale, à laquelle, dans le si grand désarroi des esprits, le monde sent aujourd'hui de manière plus urgente que jamais le besoin de s'appliquer pour guérir ses plaies.

Ces hommes des professions libérales et de pensée comprennent bien comment sur les chemins tracés par le magistère de Pierre leur travail possède toutes les garanties de la vérité éternelle et que leur apport est un service précieux rendu par eux dans leur amour profond et désintéressé à l'Eglise de Jésus-Christ et, par elle, à toute la famille humaine.

Leur conduite en harmonie avec leur pensée et la vie intérieure jalousement cultivée par chacun d'eux donnent à leur action le caractère de pleine conviction et d'authentique foi chrétienne, par lesquelles l'action elle-même se revêt de tous les reflets de la vérité et de toute la chaleur de la charité. Confiants dans le succès des efforts qu'ils déploient dans cette noble entreprise, ils auront conscience d'avoir bien servi leurs frères et d'avoir jeté des semences de rédemption, dont les fruits ne manqueront pas de lever à l'heure choisie par Dieu. A ce propos, ils ne doivent jamais oublier la consolante parole du Christ : « Autre est celui qui sème, autre est celui qui récolte » ; c'est pourquoi, soutenue par cette foi, leur joie au travail ne diminuera jamais et, dans les peines elles-mêmes dont leur oeuvre sera fécondée, ils tremperont leur courage chrétien, le coeur constamment tourné vers le ciel.


CONGREGATIONS ROMAINES

SUPRÊME SACRÉE CONGRÉGATION DU SAINT-OFFICE

DÉCRETS ET COMMUNICATIONS

22 février 1941

Décret condamnant et mettant à l'Index l'ouvrage de Wolfgang Stroothenke : Erbpflege und Christentum 1. A. A. S., 33, 1941, p. 69.

é? mars 1941

Note interdisant, en vertu du décret du 26 mai 1937 concernant les formes nouvelles de culte ou de dévotion (cf. A. A. S., 1937, p. 304), l'association dite La Crociata Mariana érigée primitivement dans la ville de Prato (Italie) et déjà interdite en 1937 par les évêques d'Etrurie pour les diocèses de cette région2.

A A. S., 33, 1941, p. 69.

21 mars 1941

Décret condamnant et mettant à l'Index le livre posthume de Lucien Laber-thonnière : Etudes de philosophie cartésienne et premiers écrits philosophiques, édité par L. Canet.

A. A. S., 33, 1941, p. 121.

29 mars 1941

Avertissement donné aux Ordinaires des lieux et aux supérieurs religieux au sujet de la censure préalable des livres à éditer :

Plus d'une fois, le Saint-Office a dû condamner et faire retirer du commerce des ouvrages édités avec l'autorisation préalable des Ordinaires des lieux. Les éyêques et les supérieurs compétents doivent procéder avec une extrême précaution dans l'examen des livres à éditer. Ils ne doivent accorder le Nihil obstat, ['Imprimatur (autorisation de publier) qu'après avoir obtenu l'avis favorable des censeurs idoines, diligents et vraiment compétents dans la matière, qu'ils auront désignés pour examiner l'ouvrage. A. A. S., 33, 1941, p. 121.

10 mai 1941 Réponses à des doutes concernant les cautions à fournir dans les mariages mixtes :

3

Les doutes suivants ont été soumis à la Suprême Sacrée Congrégation du Saint-Office, dans sa réunion plénière du mercredi 7 mai 1941 :

I. Doit-on regarder comme valide le mariage célébré, avec dispense de l'empêchement de disparité de culte, entre un conjoint catholique et l'autre acatholique, certainement non baptisé, lorsque seulement la partie acatholique a fourni les cautions prescrites, conformément au canon CIS 1061, § 1, n° 2 (can. CIS 1071) du Code de Droit canonique ? 4

II. Doit-on tenir pour valide le mariage célébré avec dispense de l'empêchement de disparité de culte, avant la promulgation du Code, entre une partie catholique et une partie acatholique, certainement non baptisée, lorsque la partie acatholique seule a fourni les cautions prescrites par l'Eglise ?

Et dans le cas d'une réponse négative aux deux doutes précédents :

III. Doit-on juger ces causes de nullité de mariage de la façon indiquée dans les canons 1990-1992 du Code (cas exceptionnels de procédure sommaire) ou doit-on les juger devant le tribunal collégial, selon la forme ordinaire du droit (procédure matrimoniale ordinaire) ?

Les éminentissimes et révérendissimes cardinaux chargés de veiller à l'intégrité de la foi et des moeurs, après avis des révérends consulteurs, ont décidé de répondre :

Aux premier et deuxième doutes : non, à moins que la partie catholique ait fourni au moins implicitement les cautions prescrites 5.

3 D'après le texte latin des A. A. S., 33, 1941. p. 294 ; cf. la traduction française des Actes de S. S. Pie XII, t. III, p. 269.
4 Selon le canon CIS 1061 § 1, l'Eglise ne dispense de l'empêchement de religion mixte que s'il y a des raisons graves ; si le conjoint acatholique donne la garantie d'écarter le danger de perversion du conjoint catholique, si les deux conjoints donnent celle de faire baptiser tous leurs enfants et de leur assurer la seule éducation catholique et s'il y a certitude morale que ces garanties seront exécutées. Généralement, les garanties sont demandées par écrit. L'engagement est double de la part du conjoint acatholique, unique de la part du conjoint catholique. Les engagements des deux parties sont une condition de validité de la dispense : celui qui exécute la dispense ne l'accordera pas s'il n'a pas la certitude morale que les engagements sont sincères. Ces engagements doivent être exigés même en cas de péril de mort (can. CIS 1043) ou en cas d'urgence.
Le canon CIS 1071 déclare que ce qui est statué au sujet des mariages mixtes dans les canons 1060-1064 doit également être appliqué aux mariages auxquels s'oppose l'empêchement de disparité de culte. Mais pour ces mariages, l'invalidité de la dispense entraîne l'invalidité du mariage.
5 Donc, selon cette réponse, des cautions ou engagements implicites suffisent pour que la dispense de la disparité de culte soit valide et donc le mariage. Que faut-il entendre par engagements implicites ? On l'explique sous la clausule ad mentem qui tempère la décision sur le fond et indique les raisons qui ont inspiré cette décision du Saint-Office.


Au troisième doute : non à la première partie, oui à la seconde, à moins que dans un cas particulier ne se vérifient sûrement les conditions énoncées et exigées par le canon CIS 1990«.

Et ad mentem. Voici cette pensée. Bien qu'en vertu d'une pratique immémoriale, le Saint-Siège ait exigé et exige de nos jours, d'une façon stricte, qu'il soit pourvu aux conditions à remplir dans n'importe quel mariage mixte, par une promesse formelle exigée et fournie explicitement par les deux parties contractantes (canons 1061, 1071), cependant, l'exercice du pouvoir, soit ordinaire, soit délégué de dispenser de la disparité de culte, ne peut être regardé comme invalide, si les deux parties ont fourni, au moins implicitement les cautions, c'est-à-dire, s'ils ont posé des actes d'où l'on doive conclure et d'où il puisse conster au for externe que les deux conjoints connaissaient l'obligation de remplir les conditions requises et ont manifesté leur ferme dessein de satisfaire à cette obligation.

16 mai 1941

Décret condamnant et mettant à l'Index les ouvrages allemands suivants : Georg Koepgen : Die Gnosis des Christentums ;

Matthias Laros : Das christliche Gewissen in der Entscheidung (livre imprimé mais répandu comme manuscrit) ;

Hermann Mulert : Der Katholizismus der Zukunft. A. A. S., 33, 1941, p. 331.

6 Les canons 1990-1992 traitent des cas exceptionnels soumis à des règles particulières. Ces cas doivent être jugés selon les formes de la procédure sommaire. Ils sont énumérés limitativement Par le canon 1990. Il s'agit d'hypothèses où a été violé l'un des empêchements suivants : disparité de culte, ordre sacré, voeu solennel de chasteté, lien, consanguinité, affinité. Pour que la cause de nullité invoquée soit jugée selon la procédure sommaire, il faut que l'existence de l'ernpêche-tnent et le défaut de dispense valide soient prouvés par un document certain et authentique.


SACRÉE CONGRÉGATION DE LA DISCIPLINE DES SACREMENTS

29 juin 19411

INSTRUCTION « SACRO SANCTUM » SUR LES RÈGLES A OBSERVER PAR LE CURÉ DANS L'ENQUÊTE CANONIQUE PRÉLIMINAIRE AU MARIAGE PRESCRITE PAR LE CANON 1020

CIS 1020

I. De tout temps, l'Eglise s'est soigneusement efforcée, par de sages précautions adaptées au caractère sacré du mariage — cette sainte institution établie par Dieu dès l'origine de l'humanité, élevée par Notre-Seigneur Jésus-Christ dans la Loi nouvelle à la dignité de sacrement — d'assurer sa validité et le respect qui lui est dû. L'encyclique Casti connubii, du 31 décembre 1930, du pape Pie XI d'heureuse mémoire, a mis de nouveau en lumière la dignité et la sainteté du mariage chrétien, dont elle a rappelé excellemment la vraie nature, les très nobles prérogatives et les fins importantes.

II. Nul n'ignore que ce serait, pour qui désire se marier, commettre une injure grave envers ce sacrement et, en conséquence, se souiller d'un péché grave, que de venir contracter un mariage sans avoir observé les règles soigneusement imposées par l'Eglise pour assurer sa licéité, et surtout sa validité, et le rendre capable de communiquer abondamment aux conjoints les fruits qu'il produit.

Mais les ministres de l'Eglise, eux aussi, participeraient à cette faute et à cette injure envers le sacrement, s'il leur arrivait d'admettre, ne fût-ce que par légèreté, les futurs époux à célébrer des mariages invalides ou illicites, pour avoir gravement négligé le devoir qui leur incombe de prendre soigneusement garde à ce que ces mariages ne soient pas conclus contre les prescriptions des saints canons.

C'est pour cela que l'Eglise a imposé aux évêques, pasteurs des âmes, la charge de donner à leurs curés des règles appropriées, afin que, par une enquête sérieuse, faite en temps opportun, ils recherchent si quelque obstacle s'oppose à la célébration d'un mariage ; et que, s'il existe vraiment quelque empêchement, ils s'emploient activement à le faire disparaître, ou, s'ils ne le peuvent, ils renvoient les fiancés sans procéder à la célébration du mariage.

Pareil précepte est contenu, du reste, dans le canon CIS 1020 du Code de Droit canonique, dont voici le texte :

« § 1. Le curé auquel appartient le droit d'assister au mariage, doit, auparavant et en temps opportun, rechercher avec soin si rien ne s'oppose à la célébration de ce mariage.

» § 2. Pour cela, il doit interroger et le futur et la future, même séparément et avec précaution, pour savoir s'ils ne sont pas liés par quelque empêchement, s'ils donnent librement (surtout la femme) leur consentement, et aussi — à moins que la qualité des personnes ne rende inutile cette dernière interrogation — s'ils sont suffisamment instruits dans la doctrine chrétienne.

» § 3. Il appartient à l'ordinaire du lieu de donner des règles particulières à suivre par le curé qui fait cette enquête. »

III. Personne n'ignore que les causes qui peuvent rendre les mariages invalides ou illicites se ramènent à trois chefs, à savoir :

a j un empêchement de mariage proprement dit ;

b) un vice du consentement ;

c) le défaut de la forme canonique prescrite.

But de l'Instruction

Attentive à écarter les graves atteintes à la sainteté du mariage chrétien, la Sacrée Congrégation, chargée par le canon 249 de l'ensemble de la législation touchant la discipline des sept sacrements et qui a déjà publié une instruction (celle du 4 juillet 1921) sur la preuve de l'état libre et la dénonciation du mariage célébré 2, a jugé tout à fait opportun de rédiger une autre instruction pour aider les Ordinaires à remplir le devoir qui leur incombe en vertu du § 3 du canon 1020, en mettant à leur disposition des règles appropriées pour faire subir aux fiancés un examen sérieux et conforme aux prescriptions canoniques.

Les questions à poser séparément aux fiancés se trouvent dans l'appendice de cette instruction (annexe 1) : mais l'Ordinaire conserve le droit d'en varier la formule, en retranchant ou ajoutant des articles, pour adopter le questionnaire aux cas d'invalidité ou d'illicéité qui se retrouvent le plus souvent dans son diocèse, compte tenu des circonstances de temps et de personnes.

Dispositions générales

IV. Et tout d'abord, quelques remarques sur les différents éléments de l'enquête prescrite par le canon 1020 :

1° En ce qui concerne le curé : le curé qui a le droit et la charge de faire cette enquête est celui auquel appartient le droit d'assister au mariage, c'est-à-dire (à moins d'une juste cause excusante) le curé de l'épouse (can. 1097, § 2). Cependant, même le curé du futur époux, soit de lui-même, soit sur la demande du

futur époux, soit sur la demande du curé de la future épouse, doit s'assurer de l'état libre du futur époux et, ceci fait, envoyer le plus tôt possible au curé de la future épouse le résultat de son enquête, ainsi que les autres documents nécessaires (certificat de baptême, etc.), qui existeraient aux archives de sa paroisse.

Toutefois, lorsque les curés (de l'époux et de l'épouse) appartiennent à des diocèses différents, la transmission de ces documents paroissiaux se fera toujours par l'intermédiaire de la chancellerie episcopale du diocèse du futur époux : (il appartiendra aussi à cette chancellerie de donner les lettres testimoniales de l'état libre du futur) au curé de la future épouse toutes les fois que ce dernier, conformément à la règle commune, assiste au mariage. C'est aussi l'évêché du futur époux qui doit attester l'état libre de ce dernier. Inversement, c'est par l'intermédiaire de l'évêché de la future que se fera la transmission des pièces au curé du futur époux, dans le cas exceptionnel où ce serait ce dernier qui assisterait au mariage.

Obligation du «• Nihil obstat » de l'évêché

La Sacrée Congrégation souhaite vivement que le curé ne procède pas à un mariage sans avoir obtenu de son évêché l'autorisation dite nihil obstat ; elle le prescrit lorsque les curés des futurs époux appartiennent à des diocèses différents.

Pour procéder plus sûrement en matière aussi grave, la Curie episcopale doit absolument exiger que le curé à qui doit être délivré ce nihil obstat envoie auparavant, en temps opportun, à l'évêché, toutes les pièces à produire avant ce mariage, en joignant à son envoi un exemplaire du Status documentorum rédigé conformément au modèle donné en appendice (annexe V), contenant tous les renseignements qui sont exigés dans ce texte. Cet exemplaire du Status documentorum, comme cela est prévu par lui, devra être utilisé soit par la Curie episcopale lorsqu'elle donne le nihil obstat pour la célébration d'un mariage, soit par le curé, lorsqu'il accorde à un autre prêtre (habilité par ailleurs à assister valide-ment au mariage) la permission d'assister à un mariage devant être contracté en dehors de sa paroisse (voir can. 1097, § 1, n" 3). Cette pièce doit ensuite être soigneusement conservée dans les archives de la paroisse où le mariage a été célébré.

L'enquête en général

Etant donné les graves intérêts en jeu, il y a obligation sub gravi pour le curé de procéder à l'enquête prescrite et cette obligation ne cesse pas, même s'il est moralement certain qu'il n'y a aucun obstacle à la célébration valide et licite du mariage. A moins de juste cause excusante, l'enquête doit être faite personnellement par le curé.

2° En ce qui concerne le temps de l'enquête, cette dernière doit être faite en temps opportun avant la célébration du mariage (can. 1020, § 1), c'est-à-dire avant les publications des bans ou pendant que se font ces publications.

3° Quant à l'objet de cette enquête, elle doit se faire sur tout ce qui pourrait mettre obstacle, de quelque façon que ce soit, à la célébration du mariage. Elle portera donc non seulement sur les points spécialement énumérés au canon 1020, § 2 (absence d'empêchement, liberté du consentement, instruction religieuse suffisante, dont on traitera plus en détail ci-après), mais aussi et d'abord :

a) sur la réception du baptême et de la confirmation. On demandera donc les certificats appropriés qui l'attestent. La copie de l'acte de baptême doit être récente et établie moins de six mois avant la date fixée pour le mariage : le curé y trouvera mentionnées les notifications prescrites par le droit (can. 470, § 2 et art. 225 de l'instruction ayant pour titre : Instructio servanda a tribunalibus dioecesanis du 15 août 1936, de la Sacrée Congrégation des Sacrements3), si toutes y ont été insérées *. Le curé ne doit pas se fier facilement à l'affirmation des fiancés disant, même sous serment, qu'ils n'ont pas été baptisés, à moins qu'il ne le sache par ailleurs avec certitude : mais il doit, pour éviter toute fraude en cette matière, demander au curé du lieu d'origine s'il résulte du registre des baptêmes que le fiancé (ou la fiancée) a bien été baptisé et, dans ce cas, de lui envoyer le certificat.

b) Sur la ou les paroisses auxquelles, une fois célébré, devra être notifié ledit mariage, pour y être mentionné sur les actes de baptême des futurs époux.

c) Sur l'âge des futurs époux : sont-ils majeurs ou mineurs ?

d) Sur leur religion : sont-ils l'un et l'autre catholiques ou bien l'un d'entre eux est-il acatholique, ou même tous les deux tout en étant soumis à la forme canonique du mariage, en vertu du canon 1099 ? 5

e) Le cas échéant, l'enquête portera sur la mort du précédent conjoint, sur la sentence exécutoire conformément au Droit (art. 220, 221, § 3 ; art. 226 et suivants pour les exceptés, de l'Instruction mentionnée ci-dessus) prononçant la nullité du précédent mariage, sur la dispense accordée par le Pape pour le mariage précédent légitime, mais non consommé. On se procurera pour chacun de ces cas les documents appropriés.

f) Sur la preuve de l'état libre des futurs époux : sur ce point voir plus bas l'article VI.

4° Enfin, quant au mode de l'interrogatoire, le canon 1020, § 2, prescrit au curé d'interroger séparément et prudemment chacun des futurs époux, c'est-à-dire, disent les auteurs : distincte, separatim et caste, debita prudentia et circumspectione, surtout lorsque l'interrogatoire a pour objet les empêchements et d'autres circonstances susceptibles d'atteindre la réputation ou d'effaroucher la pudeur6.

V. L'examen des futurs époux, d'après le canon 1020, doit surtout porter sur ces trois points :

a) l'absence d'empêchements,

b) la liberté du consentement,

c) la connaissance suffisante de la doctrine chrétienne.

4 Voir aussi les canons 576, § 2 ; 1011 ; 1103, § 2 ; 19S8. Les notifications à insérer dans l acte de baptême sont entre autres : la date de la confirmation, la date d'un mariage antérieur, la date du sous-diaconat, la date de la profession religieuse, la date des sentences de nullité ou de ja dispense super rato qui permettraient un nouveau mariage, l'antérieur non encore dissous par 'e décès du conjoint.

Le curé doit se renseigner auprès des futurs époux pour savoir s'ils ne sont pas liés par quelque empêchement, soit prohibant (can. 1058-1066) 7, soit surtout dirimant (can. 1067-1080), public (lien, consanguinité, affinité, etc.) ou occulte (voeu, crime, etc.). Ce sont surtout les empêchements occultes, ordinairement plus rarement connus, qu'il s'agit alors de découvrir (annexe I) 8.

a) Les principaux cas soumis à la Congrégation des Sacrements pour obtenir la convalidation simple ou la sanatio in radice des mariages concernant les mariages célébrés avec les empêchements de consanguinité ou d'affinité en ligne collatérale au second degré (cousins germains) ou, plus souvent, de consanguinité au troisième degré simple (cousins issus de germains) ou in tertio gradu secundum tangente (neveu ou nièce à la mode de Bretagne), pour lesquels on a négligé de demander dispense. Le fait arrive le plus souvent parce que les futurs époux ignoraient l'empêchement et, partant, ne l'ont pas révélé. Cette ignorance s'explique souvent par la divergence existant sur ce point entre la loi canonique et la loi civile, cette dernière ne tenant aucun compte, la plupart du temps, des empêchements établis par le Droit canon.

En cette matière, par conséquent, le curé s'informera avec soin, en examinant, entre autres, les noms des futurs et de leurs parents (ce qui permettra souvent de découvrir la consanguinité), et les actes de baptême. Il rappellera aux futurs époux quels sont les empêchements canoniques au mariage en ce qui concerne la consanguinité et l'affinité, et, s'il soupçonne de leur part de la dissimulation ou de la réticence, il complétera ses renseignements en interrogeant, sous serment, des témoins dignes de foi, conformément au canon 1031, § 1, n° 1 (annexe II).

b) Pour empêcher les erreurs qui parfois se glissent au sujet du calcul des degrés de consanguinité et d'affinité dans les suppliques adressées au Saint-Siège, pour obtenir dispense de ces empêchements, on joindra à la supplique les arbres généalogiques des futurs époux.

c) Dans ladite supplique, on évitera de désigner d'une façon équivoque les empêchements, comme ce serait le cas si, sans fournir aucune explication, on désignait des futurs époux, liés par un double empêchement de consanguinité, à savoir du deuxième degré (empêchement majeur) et du troisième degré (empêchement mineur), comme liés par un empêchement de consanguinité « du second-troisième degré » ou « du second et du troisième » sans explication ajoutée ; ces formules peuvent, en effet, indiquer non deux empêchements, mais un empêchement du troisième degré touchant le second, c'est-à-dire un seul empêchement et de degré mineur. En conséquence, la dispense obtenue à la suite de cette supplique équivoque pourrait être nulle.

Juste cause de dispense

d) En outre, pour les empêchements majeurs, une cause canonique (ou un motif juste), proportionnés à la gravité de l'empêchement, et réellement existante dans le cas, est requise pour la validité de la dispense ; on se référera en conséquence sur ce point surtout à l'instruction de la Sacrée Congrégation de la Propagande du 9 mai 1877, et à celle de la Sacrée Congrégation des Sacrements, du 1" août 1931 9, ainsi qu'aux auteurs approuvés. Cette raison canonique devra être exprimée dans la supplique adressée soit au Saint-Siège, soit à l'Ordinaire muni des pouvoirs nécessaires, en vue d'obtenir la dispense et, une fois la dispense obtenue, on devra (et ceci doit être soigneusement noté), avant d'exécuter le rescrit, avoir la certitude que cette cause existe : car autrement, la dispense serait nulle (can. 38 et 41).

e) II faut remarquer en outre que le motif aetas superadultam, âge avancé, souvent allégué pour la future épouse, lorsqu'elle n'est pas veuve, n'est réalisé que si celle-ci a 24 ans accomplis. Du reste dans les lettres testimoniales, on doit toujours mentionner l'âge des futurs tel qu'il résulte de l'acte de baptême10.

/) Enfin la Sacrée Congrégation croit devoir exhorter les curés à donner eux-mêmes en temps utile à leur peuple un enseignement catéchistique convenable sur les empêchements de mariage, soit prohibants, soit surtout dirimants (can. 1018). Ils s'efforceront de détourner leurs fidèles qui sont parents par consanguinité ou par affinité à des degrés trop rapprochés de se marier entre eux, ou du moins ils les engageront vivement, surtout les parents, à faire connaître à l'autorité ecclésiastique les empêchements existants, pour en obtenir dispense, si des circonstances particulières rendent, malgré l'empêchement, ces mariages souhaitables. Ils leur expliqueront que les taxes demandées aux futurs époux, comme sanctions pénales pour ces dispenses, sont calculées d'après les ressources des futurs époux : elles sont même très réduites quand il s'agit de pauvres.

Empêchement de lien

VI. En raison de son importance, des remarques particulières doivent être faites à propos de l'empêchement de lien. Les curés ont l'obligation de veiller très attentivement à ce que, de bonne ou de mauvaise foi, aucun nouveau mariage ne soit contracté, contrairement au droit, par ceux qui sont encore liés par un précédent mariage, même si l'on est fondé à douter de la validité de ce mariage ; bien plus, même si ce premier mariage est certainement nul.

a) Ils savent très bien, en effet, que le canon 1069, § 2, exige que la nullité de ce mariage ait été, au préalable, canoniquement établie avec certitude, c'est-à-dire qu'au terme d'une procédure judiciaire il y ait eu deux sentences judiciaires conformes reconnaissant la nullité (sans que le défenseur du lien ait fait appel de la seconde sentence) ; ou encore, que dans les cas exceptés (can. 1990-1992), la procédure régulière instituée conformément aux règles (art. 226 et ss.) indiquées dans l'instruction (du 15 août 1936) déjà mentionnée de cette Sacrée Congrégation, ait abouti à une déclaration définitive de nullité.

b) Les bans doivent être publiés même dans les localités où les futurs époux ont séjourné au moins six mois après l'âge de puberté, si l'Ordinaire le juge utile (can. 1023, § 2). On ne doit pas dispenser sans un motif légitime et prouvé de ces publications (can. 1028), ni recourir facilement, en négligeant les autres moyens de faire la preuve (voir annexes II et III), au serment supplétoire (annexe IV) à déférer aux parties (can. 1829-1830). S'il est parfois difficile de réunir en temps utile les documents nécessaires pour faire la preuve de l'état libre des futurs époux, on se conformera à l'article 3 de l'Instruction du 4 juillet 1921, en les demandant par les chancelleries des évêchés des futurs époux, mieux placés pour les obtenir (voir plus haut, n. IV) et, dans ce cas les chancelleries episcopales ne manqueront pas de diminuer la taxe légitime autorisée (voir can. 1507, § 1) s'il doit résulter quelque difficulté de ce supplément de frais11.

c) Enfin, quand il s'agit d'établir l'état libre des vagi, c'est-à-dire de ceux qui n'ont nulle part domicile ou quasi-domicile (can. 91) comme aussi des émigrés qui ont quitté leur lieu d'origine après l'âge de puberté pour des régions lointaines où ils désirent contracter mariage, il faudra procéder avec plus de précaution encore. Pour eux, on devra observer très exactement l'Instruction précitée du 4 juillet 1921, de la Sacrée Congrégation12.

Liberté du consentement

VII. En ce qui concerne la liberté du consentement, le curé demandera aux futurs époux s'ils entendent contracter mariage librement et spontanément, où s'ils y sont poussés, au contraire, par la violence ou la crainte, les prières ou les instances importunes de quelque personne. Il le demandera surtout à la future épouse qui, ainsi qu'on le constate, est plus accessible à la crainte. Même si la réponse des futurs époux est négative, il ne s'en tiendra pas là, mais il poursuivra par d'autres voies son enquête, pour s'assurer plus complètement et avec plus de certitude de la liberté du consentement. Cette enquête sera faite avec plus de soin lorsque les futurs époux sont portés à se marier pour remédier à quelque situation difficile, surtout pour éviter par là certaines peines qu'ils encourraient autrement selon la loi civile. Les curés se souviendront qu'un des principaux chefs de nullité de mariage invoqué devant les tribunaux ecclésiastiques est la violence ou la crainte (annexe I, n. 10, 11).

VIII. Le curé recherchera ensuite, à moins que la qualité des personnes ne rende cette recherche inutile, si les futurs époux ont une connaissance suffisante de la doctrine chrétienne et, avant tout, s'ils ont une idée exacte de la sainteté et de l'indissolubilité du mariage chrétien et des obligations de l'état matrimonial. S'il les trouve ignorants de la doctrine chrétienne, il leur en enseignera avec soin au moins les premiers éléments ; si cependant ils refusent de se laisser instruire, il n'y a pas, dans ce fait, une raison suffisante de refuser de les marier 13, conformément au canon 1066.

Mariages sous condition

IX. L'examen des futurs époux doit en outre avoir pour but d'écarter des mariages chrétiens ce grave fléau dont, aujourd'hui surtout, en certains lieux, les menace la malice des hommes. En effet, dans quelques régions, surtout dans les grandes villes, on trouve des gens qui, méprisant la loi de l'Eglise, ont l'audace de contracter mariage en mettant à leur union une condition (ou une intention) qui en suspende l'effet, ou qui la rende nulle, afin qu'elle leur serve plus tard de moyen d'échapper, de secouer le joug et de contracter une nouvelle union14.

C'est pourquoi, dans les lieux où l'évêque le jugera expédient, le curé insistera sur ce point dans l'interrogatoire des futurs époux, fera les recherches opportunes, en posant les questions 15 et 16 contenues dans l'interrogatoire-type (annexe I), et d'autres encore plus adaptées aux circonstances locales et à la condition des personnes.

Le curé emploiera tous ses efforts, le cas échéant, pour détourner les futurs époux de ces sortes d'intentions ou conditions et à les leur faire rétracter s'ils les avaient déjà mises à leur mariage.

Quant à l'opposition légitime d'une condition licite (de futuro, de praesenti ou de praeterito), le curé consultera l'Ordinaire et s'en tiendra à sa décision (voir la question 17 de l'interrogatoire-type, annexe I).

Respect de la forme canonique du mariage

X. En ce qui concerne enfin les mariages nuls pour non-observation de la forme canonique, les principaux cas déférés à la Sacrée Congrégation des Sacrements se ramènent au défaut de témoins ou au défaut de délégation régulière pour le prêtre assistant. Le premier cas est le plus souvent attribuable à l'inadvertance, et le second à une ignorance coupable. Que les prêtres étudient donc avec soin, avant d'assister à un mariage, les canons 1094 à 1103, relatifs aux conditions à observer pour la validité et la licéité de leur assistance aux mariages, et aussi les réponses de la Commission d'interprétation du Code des 14 juillet 1922, 20 mai 1923 et 28 décembre 1927 15.

Tenue des registres paroissiaux

XI. A titre de conclusion, la Sacrée Congrégation recommande spécialement à l'attention des Ordinaires les points suivants :

a) Dans les pays où le droit concordataire le demande (v. g. en Italie et au Portugal), ils veilleront à ce que l'acte de mariage soit transmis dans le temps fixé par les curés aux bureaux de l'état civil, pour sa transcription sur les registres de l'état civil. En général, ils presseront les curés d'observer très exactement toutes les formalités prescrites dans ce droit concordataire au sujet du mariage 16.

b) Toutes les fois qu'un mariage est célébré entre deux personnes dont l'une (ou toutes les deux) appartient à une autre paroisse, le curé qui a assisté au mariage doit transcrire l'acte de ce mariage dans ses registres de mariage, et le mentionner également en marge de l'acte de baptême du conjoint qui aurait reçu le baptême dans sa paroisse ; il doit, le plus tôt possible, notifier ce mariage aux curés (ou au curé) du lieu du baptême des deux époux ou de l'un d'entre eux. Ces curés (ou ce curé) mentionneront aussitôt la célébration de ce mariage en marge sur le registre des actes de baptême, conformément aux canons 470, § 2, et 103, § 2 ; puis ils avertiront le curé qui a assisté au mariage qu'ils ont fait cette transcription sur leurs registres. Celui-ci ne se tiendra pour quitte que lorsqu'il aura reçu ces communications, qu'il versera au dossier du mariage célébré.

c) Les Ordinaires doivent veiller soigneusement à notifier le plus tôt possible les sentences déclaratives de nullité de mariage, dès qu'elles sont devenues exécutoires, et les dispenses apostoliques super rato et non consumato (avec les interdictions de passer à d'autres noces que contiennent parfois ces documents), au curé de la paroisse où la célébration de ces mariages a été consignée dans les registres paroissiaux, afin que celui-ci fasse mention de cette sentence ou de cette dispense, et aussi de ces interdictions sur l'acte de mariage et, le cas échéant, sur les actes de baptême, au cas où les deux conjoints ou bien l'un d'eux ont été baptisés dans cette paroisse. Si les deux conjoints (ou l'un d'eux) ont été baptisés dans un autre endroit, ce même curé doit prévenir le curé du lieu du baptême, de la sentence qui a été prononcée ou de la dispense qui a été accordée avec les interdictions qui peut-être auraient été portées, afin que ce curé mentionne ces indications sur les actes de baptême des conjoints. Le curé de la paroisse dans laquelle le mariage a été célébré avertira le plus tôt possible son Ordinaire de ce qu'il aura fait.

d) Les Ordinaires veilleront à ce que le baptême conféré hors de la paroisse d'origine du baptisé soit mentionné non seulement sur le registre de la paroisse ou bien de l'église possédant jure cumulativo, selon le canon 774, § 1, des fonts baptismaux, où le baptême a été conféré, mais aussi sur celui de la paroisse d'origine. Pour cela, le curé (ou le recteur d'église) qui a fait le baptême doit prévenir le plus tôt possible le curé de la paroisse d'origine et lui fournir tous les renseignements exigés par le canon 777, pour exiger un acte de baptême régulier1T.

e) Les Ordinaires prescriront aux curés de tenir et rédiger avec beaucoup de soin les registres des mariages et des baptêmes : dans le premier, ils inscriront illico l'acte canonique de chacun des mariages célébrés dans leur propre paroisse ; dans le second, le registre des baptêmes, ils inscriront toutes les mentions prescrites par le canon 470, § 2. Les curés négligents devront être avertis et même punis, conformément au canon 2383.

f) Dans de fréquentes inspections faites chaque semestre si possible, et au moins une fois par an, soit personnellement — ce qui est souhaitable — soit par des ecclésiastiques compétents, les Ordinaires examineront avec soin si les curés rédigent suivant les prescriptions du Droit, comme il vient d'être dit au paragraphe précédent (lettre e), les registres paroissiaux, surtout ceux des mariages et des baptêmes, et s'ils les conservent, comme c'est régulier, dans les archives. Ils examineront chacun des actes de mariage et de baptême et y apposeront un signe

17 Ce paragraphe trouve son application pour les cas où le baptême est conféré dans une maternité, un hôpital, une clinique.

spécial comme preuve du contrôle qui a été fait. Toutes les fois que le mariage aura été célébré devant un prêtre ayant besoin de délégation, selon les exigences du Droit (can. 1094), les Ordinaires s'informeront avec soin pour savoir si, dans chaque cas, cette délégation nécessaire a eu lieu et si elle a été donnée conformément au Droit.

XII. La Sacrée Congrégation des Sacrements, considérant les très graves inconvénients qui résultent de mariages illicites et nuls, supplie les Ordinaires des lieux et fait appel à leur sollicitude pastorale pour qu'ils fassent connaître à leurs curés les règles qui précèdent, veillent à leur exécution et ne manquent pas d'infliger aux prêtres négligents des peines canoniques, conformément au canon 2222, § 1, même la suspense a divinis, surtout s'ils récidivent. Par là, ils assureront plus sûrement la bonne célébration des mariages et éloigneront, comme il se doit, tout danger d'offense à la dignité et à la sainteté du mariage.

Rapport annuel au Saint-Siège

Chaque année, dans un rapport spécial qui sera joint au rapport annuel antérieurement prescrit (1er juillet 1932) 18 « sur l'état des causes matrimoniales » de leur officialité, les Ordinaires des lieux rendront compte à la Congrégation des Sacrements de l'observation de la discipline canonique relative aux mariages contenue dans la présente Instruction, et particulièrement des inspections des registres paroissiaux prescrites plus haut (N° XI /).

Les Ordinaires d'Italie qui, depuis l'institution récente des tribunaux régionaux pour juger les causes matrimoniales (Motu proprio Qua cura, du 8 décembre 1938, du pape Pie XI d'heureuse mémoire 19), ne sont plus astreints au rapport annuel de tractatione causarum matrimonialium, rendront compte à la Sacrée Congrégation au début de chaque année de l'observation de la présente Instruction et des inspections qui y sont prescrites.

S. S. Pie XII, dans l'audience accordée au secrétaire de la Sacrée Congrégation des Sacrements, le 14 juin 1941, a daigné approuver la présente Instruction, déjà mûrement et soigneusement examinée par les cardinaux membres de la Congrégation dans leurs assemblées plénières.

Donné à Rome, au palais de la Sacrée Congrégation des Sacrements, le 29 juin 1941, en la fête des saints apôtres Pierre et Paul.


Pie XII 1941 - RADIOMESSAGE DE NOËL AU MONDE ENTIER