PieXII 1951 - DE LA S. CONGRÉGATION DES RELIGIEUX AUX SUPÉRIEURES MAJEURES DES CONGRÉGATIONS FÉMININES SUR LA PRÉPARATION TECHNIQUE DES RELIGIEUSES


ALLOCUTION AUX UNIVERSITÉS DE GRÈCE

(15 août 1951)1

Lors de l'audience accordée ce jour en son palais de Castel-Gandolfo, Pie XII s'adresse à un groupe de près de cinq cents universitaires de Grèce 2 :

Ce Nous est une grande joie de pouvoir vous recevoir si nombreux Professeurs d'Université, Etudiants et Etudiantes venus de Grèce. En vos personnes, Nous saluons affectueusement votre Patrie et votre peuple qui Nous sont si chers.

Vous appartenez déjà ou demain appartiendrez à cette classe d'intellectuels qui tiennent en mains les destinées de la Nation. Songez à vos responsabilités. Souvenez-vous de ces géants de la pensée, vos illustres ancêtres, ces génies dans l'histoire spirituelle de l'humanité ; ils reconnaissaient les droits de Dieu et défendirent ces valeurs morales fondamentales sans lesquelles ne peuvent subsister ni la dignité de la personne humaine, ni le vrai bonheur des peuples. Dans les batailles de l'esprit qui se livrent aujourd'hui, restez fidèles à ces saintes traditions !

Vous venez de célébrer par de grandioses fêtes jubilaires l'arrivée de saint Paul à Athènes et à Corinthe, il y a mille neuf cents ans3. A l'exemple du grand Apôtre des Gentils, c'est dans une foi très vive en Notre-Seigneur Jésus-Christ que vous puiserez l'indispensable vaillance au combat : foi en Jésus-Christ *.

Que la bénédiction de Dieu descende sur vous, sur vos familles, et que sa grâce vous accompagne toujours !

1 D'après le texte français de VOsservatore Romano des 16 et 17 août 1951.

2 Allocution à des journalistes grecs, 21 avril 194S (Documents Pontificaux 1948, p. 166).

3 Lettre de Mgr Montini à Mgr Spiridion, archevêque d'Athènes, 5 avril 1951 (cf. p.

4 Rom., 9, 5.

RADIOMESSAGE AU PEUPLE DE CATANE A L'OCCASION DU XVIIe CENTENAIRE DE SAINTE AGATHE

(15 août 1951) 1

Au soir de la fête de l'Assomption, le Saint-Père a adressé aux Siciliens lors des fêtes en l'honneur de sainte Agathe le message suivant :

En accomplissant le geste auquel votre piété religieuse Nous a invité pour donner plus de lustre à la solennité en l'honneur de votre glorieuse patronne sainte Agathe, ce que Notre coeur a l'intention de faire et que vous-mêmes attendez de Nous, chers fils, de la si noble et catholique Catane, n'est pas précisément l'exhibition spectaculaire d'un de ces prodiges de la science qui chantent aujourd'hui avec une nouvelle voix les admirables grandeurs de Dieu qui « a donné l'intelligence aux hommes pour qu'ils en tirent la louange de ses puissantes oeuvres » 2. Ce que vous attendez et que Nous avons hâte de vous signifier est tout autre ; c'est le contenu spirituel de ce geste symbolique par lequel l'image vénérée de votre patronne — triomphante sur l'antique colonne, comme sauvegarde de la cité et souvenir toujours présent pour les citoyens — s'est illuminée ce soir au signe que Nous avons fait et attire sur elle, comme peut-être jamais, vos regards et vos coeurs 3.

La lumière dont l'antique image rayonne ce soir sur vos fêtes, est une pâle figure qui ne peut supporter la comparaison avec la merveilleuse lumière dont cette héroïne de la profession chrétienne, cette martyre des premières persécutions, resplendit

1 D'après le texte italien des A. A. S., XXXXIII, 1951, p. 599.

2 Eccl., 38, 6.

3 Avant l'envoi de ce Message, le Saint-Père avait illuminé à distance par la voie des ondes, la statue de la vierge dominant le port de Catane.

dans les fastes des églises d'Occident et d'Orient par sort intrépide constance dans la foi, par son amour de Jésus-Christ par sa prédilection pour la vertu, révélée par Jésus-Christ comme l'unique et véritable bien des hommes 4.

Votre histoire, chers Catanais, ne compte point de mémoire qui triomphe du temps et de l'oubli comme le glorieux épisode de cette martyre, qui, après tant de siècles est vivant et présent dans les esprits, guide de votre vie, de votre foi, de vos moeurs, avec une évidence et avec une efficacité qu'il serait vain d'attendre d'autre héros de la cité terrestre, d'autres événements de l'histoire des hommes.

La face de toutes choses a changé autour de vous dans le flux de ces événements, comme elle change pour tout autre peuple, avec un rythme incessant, avec une surprenante-rapidité. Gouvernements et lois, oeuvres et institutions, courants de pensée et de culture, traditions et civilisations, tout perpétuellement surgit et disparaît, naît et meurt, s'impose et tombe dans l'oubli. Seul l'éternel reste sans changements, c'est-à-dire-le bien absolu. Et le bien absolu, l'éternel réside, ici-bas dans, les valeurs par lesquelles sainte Agathe est grande et vivante. Vivante dans le temps, comme vivante dans l'éternité.

Votre vie, chers fils, votre conduite exemplaire, vos moeurs austères, votre courageuse affirmation de cette foi par laquelle Agathe récolta dans le martyre son immortalité, voilà la mesure véritable, naturelle, appropriée au culte pour cette glorieuse martyre, que vous élevez comme un étendard de votre piété religieuse, de votre civisme et de votre patriotisme.

De même que l'antique colonne, la vénérable effigie que Nous avons illuminées ce soir, au moyen des ondes obéissant à un geste de l'homme, montrent aux yeux du monde la valeur suprême de votre civilisation, votre foi et votre piété religieuse, elles doivent pareillement être pour vous-mêmes un avertissement de cohérence, une haute, perpétuelle et persuasive invitation de cette Sagesse éternelle dont il est écrit dans les Proverbes qu'« elle crie en public et qu'elle élève sa voix sur les places » 5.

4 Sainte Agathe, originaire de Catane, y subit le martyre au Ille siècle. Ses reliques-son t conservées à Catane. 3 Proverbes I, 20.

XVHe CENTENAIRE DE SAINTE AGATHE

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A vous, c'est par la glorieuse sainte Agathe que parle cette Sagesse. Et, en vous inclinant devant l'image de votre patronne, écoutez la parole sublime qui s'élève de son sang et qui ne vieillit pas avec le temps. C'est la parole éternelle de Jésus-Christ et de son Evangile. En elle, il y a pour chacun de vous, pour vos familles, pour votre Cité, le secret, la garantie, le gage de la félicité et de la grandeur. Par elle l'esprit vivra sur la pierre solide de la vérité, le coeur dans le culte de la justice et de la paix. Vos familles vivront dans l'ordre, qui vient de la crainte de Dieu. Et une véritable civilisation fera prospère la noble Catane qui Nous est chère.

Avec ces voeux — sous la protection de la Reine des Martyrs élevée et exaltée au-dessus de tous les choeurs des Anges et de toutes les phalanges des Saints — Nous invoquons sur vous tous, sur la Hiérarchie ecclésiastique et sur les magistrats civils, sur vos familles, et en particulier sur les chers malades et sur la jeunesse aimée, la paix de Jésus-Christ et l'abondance des grâces divines en même temps que Nous donnons de tout coeur en nouveau gage de Notre bienveillance, la Bénédiction apostolique *.

6 Dans une lettre à Son Em. le Cardinal Adéodat Piazza du 30 juillet 1951, le Saint-Pire nommait celui-ci Légat aux Fêtes de Catane (A. A. S., XXXXIII, 1951, p. 593).


LETTRE A L'ÉPISCOPAT POLONAIS

(ier septembre 1951) 1

La Pologne connaît une situation de plus en plus difficile, car le gouvernement, sous l'obédience de Moscou, restreint sans cesse l'exercice de la vie religieuse.

En 1946, l'Episcopat polonais consacrait le pays au Coeur Immaculé de Marie 2, aussi, profitant du cinquième anniversaire de cet événement, Pie Xli écrivit la lettre suivante :

Cinq ans se sont maintenant écoulés, Vénérables Frères, depuis le jour où vous avez solennellement consacré au Coeur Immaculé de la Bienheureuse Vierge Marie vos fidèles et toute votre nation. Pour l'amour intense que Nous nourrissons à l'égard de la Pologne, toujours forte et fidèle, Nous vous manifestons ce qui a été depuis longtemps l'objet de Nos réflexions, afin de raviver la confiance que vous avez mise alors en la Mère de Dieu et Mère des hommes, et pour que vous demeuriez intrépides en des moments si durs.

Le Saint-Père évoque le souvenir des évêques décèdes depuis cette date :

Avant tout, Nous éprouvons, avec vous, un sentiment de douleur parce que les évêques qui participèrent à ces cérémonies sacrées inoubliées et inoubliables, ne sont plus tous encore en vie. La mort a enlevé le cardinal Auguste Hlond, eminent par sa sagesse et le prestige de ses oeuvres, qui conduisit à travers un rude chemin le troupeau confié à ses soins, forma complètement les moeurs de la Pologne nouvellement ressuscitée et prodigua sa vie pour la patrie, pour l'Eglise, pour le Vicaire du

1 D'après le texte latin des A.A.S, XXXXIII, 1951, p. 775.

2 Lettre à l'Episcopat polonais, 17 janvier 1946 (A. A. 5., 38, 1946, p. 172).

Christ, pour Dieu 3. Nous venons de pleurer la disparition du cardinal Etienne Sapieka i, ferme, vaillant, jamais effrayé devant la violence des persécutions qui « dans sa vie soutint la maison et durant ses jours affermit le temple..., eut soin de son peuple et le préserva de la ruine 5 ». Il fut « comme l'arbre planté près d'un cours d'eau6 » ; arbre chargé de fruits et bien solide, dont la présence était une cause de joie confiante non seulement pour les Polonais mais pour toute la chrétienté.

Egalement ont disparu l'évêque de Luceoria7 deux fois exilé ; l'évêque de Czenstochowa 8, « gardien et légat » de l'admirable image de Notre-Dame de Clair-Mont ; enfin l'évêque de Wladislavia9 qui, durant la guerre, avait souffert tant de graves calamités. Elevons vers Dieu de ferventes prières pour que, à tous ces pasteurs sacrés qui ont si éminemment mérité du nom catholique, soient accordées la lumière sans déclin, la paix sans fin ; pour vous, en revanche, Nous désirons vivement une vigueur accrue dans la vertu, suivant leur lumineux exemple. Comme de bons soldats du Christ, ayant l'expérience de l'adversaire, élevez votre regard, sans vous laisser jamais abattre, vers le mont d'où vous viendra l'aide opportune, vers le mont que vos pères appelèrent « Clair », vers le mont sur lequel la Mère de Dieu et votre Reine fixa sa demeure, où son image sourit maternellement aux foules suppliantes.

Le Pape regrette que les évêques de Pologne n'aient pu assister aux cérémonies romaines lors de la proclamation du dogme de l'Assomption de la Sainte Vierge.

Connaissant bien votre si ardente piété envers la Vierge Mère de Dieu, Nous imaginons combien aura été grand votre

3 Le cardinal Hlond était né en 1881. Entré chez les Salésiens, il avait été ordonné en 1905 ; élu évêque de Katowice en 1925, et transféré à Grema en 1926, il fut créé cardinal en 1927. Durant l'occupation allemande, de 1939 à 1945, il vécut exilé en France. Il mourut en 1948.

4 Le cardinal Sapieka était né en 1867 et ordonné en 1893 ; il fut élu évêque de Cra-covie en 1911 et créé cardinal en 1946. Il est mort en 1951.

5 Eccli., L. 1-4. « Ps. I, 3.

7 Mgr Szelazek (1865-1951), évêque de Luck depuis 1918, fut exilé par les nazis d'abord, par les communistes ensuite.

8 Mgr Kubina (1888-1951) évêque de Czenstochowa depuis 1925, était le gardien du fameux sanctuaire national de la Vierge Marie.

6 Mgr Radonski (1883-1951) avait été élu évêque de Wloclowek en 1927.

chagrin de n'avoir pas pu être présents à Rome quand, à la gloire du Dieu tout-puissant, pour l'honneur du Christ, pour accroître la dignité de sa Mère, et pour combler de joie toute l'Eglise, Nous avons confirmé le dogme de Marie élevée au Ciel10. Nous éprouvions alors le vif désir de vous voir, exultant à juste titre devant un tel événement, car Nous savions bien que votre si noble nation, depuis déjà mille ans, est unie par les liens les plus étroits à la Mère de Dieu élevée au Ciel, et que vous êtes animés envers elle d'une telle piété, que vous ne cédez à personne pour la ferveur de votre culte. En effet, à peine le mystère de la Croix fut-il prêché dans vos régions, aussitôt les Polonais vénérèrent avec un affectueux respect des plus suaves, comme la propre mère et patronne de leur patrie, la sublime Mère de Dieu. Le premier édifice sacré élevé à Gniezno par l'illustre prince Mieszko, avec l'approbation de Notre prédécesseur Jean XIII, fut consacré en l'honneur de Notre-Dame de l'Assomption ; cette église fut la tête et la mère d'innombrables autres églises resplendissant du même titre.

La dévotion que les Polonais ont toujours témoignée envers la Vierge Marie, cette fois encore les soutiendra :

Avec une joie très vive Nous avons vu, — et Nous sommes entretenu avec lui — Notre vénérable Frère Etienne Wynszyn-ski u, archevêque de Gniezno et Varsovie, venu à Rome vénérer les basiliques des Apôtres ; en lui, Nous vous avons tous embrassés et salués. Il Nous a exprimé la vénération pleine d'amour de la Nation polonaise et il Nous a assuré que chez elle le respect et la foi, par lesquels votre peuple, suivant l'exemple de ses ancêtres, est uni au Siège Apostolique, ne se sont en rien amoindris ou relâchés. U Nous a également informé de l'effort, — en vérité imposant et nullement affaibli par des difficultés de toutes sortes, — avec lequel, efficacement aidés par les prêtres et les fidèles, vous avez réparé les ruines

10 Lors de la proclamation du dogme de l'Assomption de la Vierge Marie, le 1er novembre 1950, les évêques polonais étaient absents, n'ayant pas reçu l'autorisation du gouvernement de se rendre à Rome.

11 Son Exc. Mgr E. Wynszynski est né en 1900 et fut ordonné en 1924. Nommé évêque de Lublin en 1946, il fut transféré au siège primatial de Gniezno et Varsovie en 1949, prenant ainsi la succession du cardinal Hlond.

de la guerre et soutenu le progrès et la dignité de la religion catholique.

L'éducation chrétienne de la jeunesse et les problèmes relatifs à une bonne solution de la question sociale, domaines où se rencontrent les plus graves difficultés et menacent les dangers les plus pernicieux, constituent sans aucun doute l'objet de vos anxiétés et de vos soins inquiets. Prenez donc courage ! Dieu sera propice aux forts et la Mère de Dieu, votre Reine, ne privera point de sa protection le peuple qui est sous sa tutelle. La Mère et Patronne céleste que depuis une longue série de siècles, avec la fervente douceur de fils aimants, vous priez dans le si doux hymne « Bogurodzika-Dziewca » (Deipara-Virgo), après les sombres orages, conduira sûrement la Nation polonaise au port tranquille. Rappelez-vous combien de fois, au cours des âges, avec l'aide évidente de la Bienheureuse Vierge, Mère du Rédempteur, votre peuple a remporté d'éclatantes victoires. L'écho n'est pour ainsi dire pas encore éteint de la bataille de Clair-Mont dans laquelle un faible nombre de moines et de chevaliers de Marie contraignirent la horde des ennemis à abandonner l'assaut du Mont sacré et à sortir des frontières de la Pologne. C'est à la même sublime Reine que se confia sur le Clair-Mont l'illustre Jean Sobieski qui, par son eminent courage, libéra la chrétienté des embûches séculaires des ennemis. Plus tard, comme s'ils prévoyaient les calamités imminentes de la Pologne, les évêques offrirent une couronne d'or à l'image prodigieuse de Clair-Mont, couronne reçue de Notre prédécesseur Clément XI, et confièrent le royaume vacillant, durant cette période orageuse, à la protection de la Mère de Dieu.

Pie Xli invite les catholiques de Pologne à nourrir en eux le courage et l'espérance :

L'illustre Vierge de l'Assomption, invoquée par des prières suppliantes, apporta à votre patrie ressuscitée, mais sous le coup de très graves menaces, aide admirable contre les efforts de l'impiété, fait dont fut témoin Notre Prédécesseur même, Pie XI12, d'heureuse mémoire. Nous-même, tandis que faisait

!2 Mgr Achille Ratti, avant d'accéder au suprême pontificat sous le nom de Pie XI, fut de 1918 à 1921 nonce à Varsovie.

rage la récente guerre Nous avons connu par de clairs indices quelle piété et quelle confiance nourrissaient les Polonais envers la Mère de Dieu. Au milieu des ruines fumantes du Mont-Cassin, après la victoire remportée, ils élevèrent un autel orné de l'image de la Sainte Vierge ; au péril de leur vie, ils préservèrent du feu et de la destruction, la Maison sacrée de Lorette, atteinte par des bombes incendiaires ; Nous avons alors décoré des insignes des Ordres Pontificaux ces vaillants soldats défenseurs du temple de Marie 13.

La bataille est encore ardente : votre « lutte n'est pas contre la chair et le sang, mais contre les princes, contre les dominateurs, contre les puissances de ce monde de ténèbres, contre les esprits mauvais répandus dans les airs » 14. Vous soutenez encore de grands assauts de l'ennemi. Mais veille sur vous la Mère de miséricorde, cause certaine de salut, et votre attente ne sera nullement déçue.

Elle, la Vierge puissante et victorieuse des forces infernales, vous procurera de brillantes victoires et conservera intact le trésor sans prix de la foi que vous avez reçu de vos aînés : elle, la Vierge vraiment digne des louanges que vous lui chantez dans un de vos hymnes : « Tu es redoutable pour l'ennemi comme une armée bien ordonnée. Sois le refuge et le port sûr des chrétiens. » La noble Pologne peut et doit donc se confier à sa sûre protection et mettre en elle, en toute confiance, l'espérance d'un avenir meilleur ; ainsi prémunis et fortifiés, « vivez en célébrant le nom du Seigneur et que ne soit pas close la bouche de ceux qui le louent »15. Vous souhaitant toutes ces choses du fond du coeur, Vénérables Frères, Nous demandons au Tout-Puissant, tout ce que vous désirez de bien pour la réalisation de vos projets et de vos initiatives 10.

13 Lors du débarquement des troupes alliées en Italie, en 1943, des régiments polonais se battirent glorieusement, notamment dans les combats autour du Mont-Cassin.

14 Eph., 6, 12.

15 Esth., 13, 17.

16 Dans une lettre de l'Episcopat polonais du 12 septembre 1950, celui-ci énumère Ie bilan de la persécution :

« Les cinq dernières années se sont signalées dans les Annales de l'Eglise catholique en Pologne par des pertes sans précédent : la rupture unilatérale du Concordat par l'Etat polonais ; le refus par le gouvernement de la République de reconnaître l'organisation ecclésiastique dans les territoires recouvrés ; l'interdiction de rétablir les associations catholiques ; la liquidation progressive et continue des écoles catholiques ; les sévères res-

En gage de cette aide suprême, à vous, à tout le clergé qui peine avec vous pour le bien des âmes, aux religieux et aux religieuses contemplatives et actives, à tous les fidèles confiés à vos soins, Nous donnons avec la plus vive affection la Bénédiction apostolique.

trictions imposées, au moyen de la censure de la presse politique, à la presse et à l'édition catholiques jusqu'à leur extinction présente ; la soustraction à l'Eglise des imprimeries diocésaines et des maisons d'édition catholiques ; la transformation de propriétés d'Eglise en sociétés hospitalières, et ensuite leur nationalisation ; les tentatives de la part des autorités administratives de s'immiscer dans la vie des confréries et associations ecclésiastiques, jusqu'à l'enregistrement obligatoire des couvents et des congrégations religieuses ; la restriction de la liberté du culte public à tel point qu'on tente de diminuer les offices religieux et les pratiques pieuses (missions, processions publiques, réunions et congrès religieux) ; la liquidation de la Caritas, organisation ecclésiastique de bienfaisance ; la nationalisation complète des biens d'Eglise ; les campagnes de presse, à l'intensité et à l'inspiration très variables contre le Saint-Siège et l'épiscopat ; la restriction des droits de la religion dans les écoles ; l'expulsion et l'exclusion des écoles de plusieurs centaines de prêtres-catéchistes ; la création d'organisations de jeunesse à l'idéologie antichrétienne ; l'appui donné à des publications outrageantes pour les mérites séculaires, l'enseignement et la vie de l'Eglise ; la propagande antireligieuse par imprimés, éditions, conférences, instructions, cours de formation ; les restrictions apportées à la liberté de conscience des membres des associations du parti, des organisations professionnelles ; la propagande antireligieuse dans les institutions préscolaires et dans les écoles, dans les colonies de vacances et dans les camps d'enfants et de jeunes gens ; les tracasseries administratives exercées par la magistrature, la police et le fisc pour faire pression sur les citoyens, y compris les prêtres et les évêques. » (La Documentation Catholique, t, XLVIII, c. 221.)

ENCYCLIQUE « SEMPITERNUS REX » PUBLIÉE A L'OCCASION DU XVe CENTENAIRE DU CONCILE DE CHALCÉDOINE

(8 septembre 1951%)

En 451 se réunissait à Chalcédoine un Concile pour affirmer la foi de l'Eglise dans le Christ ayant deux natures distinctes et réfuter les erreurs d'Eutychès 2 h ce propos z.

Pour commémorer cet événement, datant d'il y a 1500 ans, Pie Xli publie une encyclique afin de « mettre en lumière... la primauté du Pontife romain qui, dans cette très grave controverse, resplendit vivement, et la définition dogmatique de Chalcédoine, d'une si grande importance » ; puis, il lance aux hétérodoxes un appel en faveur de l'unité, ainsi qu'un avertissement contre des théories dangereuses, et, enfin une exhortation finale à une vie chrétienne cohérente 4 ;

Tout d'abord, le Pape centre son enseignement sur la Foi de l'Eglise :

Le Christ, Roi Eternel, avant de promettre à Pierre, fils de Jean, la suprématie du sacerdoce, demanda à ses

1 D'après le texte latin des A. A. S., XXXXIII, 1951, p. 625.

2 Eutyches était un moine influent de Constantinople professant que dans la personne du Christ la divinité avait « absorbé » son humanité, et par conséquent que le Christ ne nous était pas consubstantiel. (Cf. A. Bardy, Le Brigandage d'Ephèse et le Concile de Chalcédoine dans Fliche et Martin, Histoire de l'Eglise, t. IV, p. 211.)

S Dans un article de VOsservatore Romano du 14 septembre 1951, on pouvait lire : « L'Encyclique par laquelle Pie XII commémore le IVe Concile oecuménique de Chalcédoine (451) est sur le plan même de l'Encyclique Lux Veritatis, écrite par Pie XI pour rappeler la gloire et les grandeurs du Concile d'Ephèse (431). Ces deux Synodes universels sont étroitement unis entre eux ; tous les deux sont christologiques ; l'un perfectionne l'autre, en ce sens que le premier, contre l'erreur de Nestorius, enseigne que dans le Christ il n'y a qu'une seule personne, la Personne divine du Verbe ; le second, contre la fausse doctrine d'Eutychès, proclame magistralement qu'il faut admettre dans le Rédempteur deux natures distinctes et parfaites : la nature divine et la nature humaine qui subsistent dans la seule Personne du Verbe. »

4 Ibidem.

disciples ce que les hommes et eux-mêmes pensaient de lui ; et il loua magnifiquement cette foi qui devait vaincre tous les assauts et toutes les tempêtes infernales, et que l'apôtre, éclairé par la lumière du Père céleste avait professée en ces termes : « Tu es le Christ, Fils du Dieu vivant » \

Cette foi, à qui sont dus les couronnes des apôtres, les palmes des martyrs, les lis des vierges et qui est pour tout croyant la force de Dieu qui sauve, 6 a été surtout efficacement défendue et abondamment illustrée par trois Conciles OEcuméniques, celui de Nicée, celui d'Ephèse et celui de Chalcédoine dont le quinzième centenaire tombe à la fin de cette année.

Le Saint-Père demande que, dans l'Eglise, on commémore le XVe centenaire du Concile de Chalcédoine :

11 convient qu'un si joyeux événement soit célébré à Rome et dans tout le monde catholique par des solennités ; et c'est d'un coeur heureux et ému que Nous les ordonnons, en rendant grâces à Dieu, auteur de tout conseil salutaire \

De fait, les quatre premiers Conciles de Nicée (323), de Constanti-nople (381), d'Ephèse (431) et de Chalcédoine (451), formulent avec netteté l'énoncé concernant la personne du Christ.

De même qu'en l'année 1925, Notre Prédécesseur Pie XI, d'heureuse mémoire, voulut commémorer solennellement dans la Ville Eternelle le saint Concile de

5 Matth., 16, 16.

6 Rom., 1, 16.

7 De fait, à Rome eurent lieu des cérémonies importantes pour commémorer cet événement : une assemblée solennelle le 25 octobre 1951 où le cardinal Agagianian lut un discours remarquable, celui-ci suivi par un radiomessage de Pie XII (cf. p. 456) ; une messe célébrée le ier novembre 1951 en la basilique de Saint-Pierre par le cardinal Tisserant avec assistance pontificale de Pie XII.

Nicée, puis évoqua en 1931 le saint Concile d'Ephèse par l'Encyclique Lux Veritatis, ainsi tenons-Nous à rappeler par cette Lettre, avec la même vénération et le même soin, le souvenir du Concile de Chalcédoine : ayant, en effet, pour objet l'union hypostatique du Verbe Incarné, les Conciles d'Ephèse et de Chalcédoine sont indissolublement liés entre eux ; tous deux sont en grand honneur depuis les temps anciens, soit auprès des Orientaux où ils jouissent d'une commémoration liturgique, soit auprès des Occidentaux comme en témoigne Grégoire le Grand qui les exalta au même degré que les deux Conciles OEcuméniques célébrés auparavant — les Conciles de Nicée et de Constantinople — en prononçant cette célèbre sentence : Sur ces quatre pierres s'élève l'édifice de la sainte foi et réside toute vie et toute action. Quiconque ne s'appuie pas sur ce solide fondement, semblât-il lui-même un rocher, il gît hors de l'édifice 8.

L'histoire du Concile met en relief :

— le primat du Pontife romain

— la doctrine orthodoxe sur la personne du Christ :

Si l'on considère attentivement cet événement et les circonstances qui l'ont accompagné, deux faits principaux émergent, que Nous voulons autant que possible mettre en lumière : le primat du Pontife romain qui, dans cette très grave controverse christologique, resplendit vivement, et la définition dogmatique de Chalcédoine, d'une si grande importance.

Appel est fait à tous pour qu'ils reviennent à cette foi :

Qu'ils suivent les coutumes et les exemples de leurs ancêtres, et qu'ils ne tardent plus à rendre à la Primauté

1 Registrum Epistularum I, 25, al. 24, PL. 77, 478 ; ed. Ewald, 1, 36.

du Pontife romain l'hommage respectueux qui lui est dû, ceux qui, par le malheur des temps, surtout dans les pays d'Orient, se sont séparés du sein et de l'unité de l'Eglise ; que ceux qui se trouvent impliqués dans les erreurs de Nestorius et d'Eutychès, pénètrent avec des yeux purifiés le mystère du Christ, et qu'ils acceptent enfin intégralement la doctrine du Concile ; qu'ils considèrent aussi plus profondément et plus exactement cette doctrine, ceux qui, séduits par un amour excessif de la nouveauté, osent ébranler les bornes sagement et inviolablement établies dans l'étude du mystère de notre Rédemption.

Que les catholiques eux-mêmes raffermissent leur foi :

Que tous ceux qui se nomment catholiques, en soient puissamment excités à confesser et à conserver cette foi comme la perle précieuse de l'Evangile ; qu'ils l'honorent de coeur et de bouche, et surtout, qu'ils lui soient fidèles par leur conduite : qu'avec le secours de la miséricorde divine, ils écartent tout ce qui serait déréglé, inconvenant, blâmable et que resplendisse l'éclat de leurs vertus, de telle sorte qu'il leur soit donné d'être participants de la divinité de Celui qui daigna se faire participant de notre humanité.

I Le Pape décrit l'histoire du Concile :

Les premières phases de l'hérésie d'Eutychès

11 convient, pour procéder avec ordre, de reprendre dès l'origine les événements que Nous commémorons. L'auteur de toute la controverse qui fut agitée au Concile de

Chalcédoine est Eutyches, prêtre et archimandrite d'un célèbre monastère de Constantinople. Combattant avec ardeur l'hérésie de Nestorius °, qui professait deux personnes dans le Christ, il tomba dans l'erreur contraire.

« Très imprudent et trop ignorant » 10, et d'humeur ex-traordinairement obstinée, voici ce qu'il affirmait : il faut distinguer deux moments : avant l'Incarnation, il y avait deux natures du Christ, l'humaine et la divine ; mais après l'union, il n'en reste qu'une seule, le Verbe absorbant l'homme ; de la Vierge Marie est sorti le corps du Seigneur, mais celui-ci n'est pas de notre substance et de notre matière ; si ce corps est bien humain, cependant il n'est pas consubstantiel ni à nous ni à celle qui a engendré le Verbe selon la chair 11 ; aussi n'est-ce pas dans une vraie nature humaine que le Christ est né, qu'il a souffert, qu'il a été attaché à la croix et qu'il est ressuscité du tombeau.

Il est facile de réfuter la doctrine d'Eutychès :

i° Avant l'Incarnation, le Christ n'a pas de nature humaine :

En réalité, Eutyches ne remarquait pas qu'avant l'union, la nature humaine du Christ n'existait en aucune façon, puisqu'elle ne commença d'être qu'au moment précis de sa conception ;

2° Au moment de l'Incarnation, la nature humaine n'est pas absorbée par la nature divine :

Mais, après l'union, il est absurde de prétendre que de deux natures, il puisse n'en plus demeurer qu'une ; car,

s Nestorius, évêque d'Antioche, fut sacré évêque de Constantinople en 428. Celui-ci professa que, dans le Christ, il y avait deux personnes et que la Vierge n'était mère quc de la personne humaine du Christ. En En 430, Nestorius était condamné par le pape saint Célestin et le Concile d'Ephèse définissait l'unité de la personne du Christ.

10 Léo M. ad Tlavianum, Ep. 28, I ; PL. 34 ; 755 s.

U Cf. Fîavianus ad Leonem M., Ep. 26 ; PL 54, 745.

il n'y a absolument aucune raison pour que deux vraies natures distinctes puissent être ramenées à une seule, d'autant plus que la nature divine est infinie et immuable.

De fait, Eutyches élaborait une hérésie :

A considérer raisonnablement de telles opinions, on voit facilement que tout le mystère du plan divin se dissipe en ombres vaines et impalpables.

Quiconque avait le sens droit reconnut aussitôt ce que ces nouveautés avaient d'extravagant et d'absolument opposé aux oracles des Prophètes, aux textes de l'Evangile, au symbole des Apôtres, au dogme de foi défini à Nicée ; et qu'elles sortaient des officines de Valentin et d'Appolinaire 12.

Dans un Concile particulier, tenu à Constantinople et présidé par l'évêque de cette ville, saint Flavien 13, Eutyches, qui propageait largement et avec obstination ses erreurs parmi les monastères, fut ouvertement accusé d'hérésie par Eusèbe, évêque de Dorylée, et il fut condamné Il s'estima traité injustement, à cause de son zèle à combattre l'hérésie nestorienne qui renaissait, et il en appela au jugement de quelques évêques d'une autorité prééminente. Une lettre de protestation fut aussi reçue par saint Léon le Grand, évêque du Siège Apostolique dont la suite des siècles admire sans se lasser les éclatantes et solides vertus, le zèle pour la religion et pour la paix, le souci de la vérité et de la dignité de la Chaire

lî Valentin et Apollinaire, théologiens du IVe siècle qui niaient que le Christ ait deux natures,

13 Saint Flavien était évêque de Constantinople ; dès 448, il réfute les erreurs d'Eutychès et invite les évêques à proclamer leur foi dans les deux natures et l'unique personne du Christ.

14 Eusèbe, évêque de Dorylée, dénonça les erreurs d'Eutychès et provoqua la réunion d'un Concile particulier à Constantinople en 448 où Eutyches est condamné.

1!> Eutyches condamné en appelle à Rome au pape saint Léon qui confirme les décisions de Constantinople et convoque un Concile général.

romaine, la dextérité dans les affaires et pareillement l'éloquence harmonieuse. Nul n'était mieux armé ni plus, apte pour combattre l'erreur eutychéenne que ce Pontife, qui, dans ses sermons et dans ses Lettres aimait à exalter et à célébrer avec une pieuse magnificence et une magnifique piété le mystère, jamais assez proclamé, de l'unique personne et de la double nature dans le Christ : « L'Eglise catholique vit de cette foi, que dans le Christ Jésus ni l'humanité n'est crue sans la vraie divinité, ni la divinité sans la vraie humanité 16 ».

Un synode réuni à Ephèse fut saboté par les partisans d'Eutychès .-

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Le « brigandage » d'Ephèse. '|f

L'archimandrite Eutyches, désespérant d'être soutenu par le Pontife romain, eut recours à l'intrigue et à la ruse, et, par l'intermédiaire de Chrysaphe, à qui il était régulièrement uni et qui était aimé de Théodose II, il obtint de cet empereur la révision de sa cause et la convocation à Ephèse d'un autre concile que présiderait Dioscore, évêque d'Alexandrie Celui-ci était très lié avec lui et, en même temps hostile à Flavien, évêque de Constantinople. Trompé par la ressemblance des dogmes, il répétait que, comme Cyrille, son prédécesseur, avait défendu l'unité de personne dans le Christ, ainsi il défendrait de toutes ses forces l'unité de nature après l'union.

Pour rétablir la paix, Léon accepta d'envoyer à Ephèse ses légats, porteurs de deux lettres, parmi d autres : l'une adressée au Concile, et l'autre à Flavien, ou les erreurs d'Eutychès étaient réfutées par l'éclat d une doctrine parfaite et abondante. j'i',

1« 5. Leonis M-, Ep. 28, 5 (PL. 54, 777).

17 Dioscore, évêque d'Alexandrie, avait pris fait et cause en faveur d'Eutychès.

Mais à ce Synode d'Ephèse, auquel Léon donnera, à juste titre, le nom de « brigandage », Dioscore et Eutyches dominaient, et tout fut livré à la violence : on refusa aux légats apostoliques la première place dans l'assemblée ; on ne permit pas la lecture des lettres du Souverain Pontife ; on arracha les suffrages des évêques par la tromperie et la menace ; et Flavien avec d'autres, fut accusé d'hérésie, destitué de sa charge pastorale et jeté en prison, où il devait mourir. La fureur et la témérité de Dioscore allèrent à ce point qu'il osa cette impiété de lancer l'excommunication contre le suprême pouvoir apostolique.

Le Patriarche de Constantinople et d'autres évêques en appellent au Pape contre la décision du synode d'Ephèse :

Dès que Léon eut appris par le diacre Hilaire les iniquités perpétrées dans ce conciliabule criminel, il le désapprouva, ordonnant un nouvel examen de tout ce qui y avait été décidé ou accompli. Il était plein d'une grande tristesse, qui était encore accrue par l'appel que faisaient à son jugement un grand nombre d'évêques déposés.

Dignes de mémoire sont les lettres qu'écrivirent alors Flavien et Théodoret de Cyr 18 au Suprême Pasteur de l'Eglise. Voici les paroles de Flavien :

« Comme tout se déroulait contre moi, par une sorte de conspiration, après qu'il (Dioscore) eut prononcé contre moi cette sentence impie, j'en appelai au trône du Siège apostolique de Pierre, prince des apôtres et à tout le Concile heureusement soumis sous l'autorité de Votre Sainteté ; aussitôt, une multitude de soldats m'entoura, m'empêcha de me réfugier au saint autel, comme je le voulais, et s'efforça de me tirer hors de l'église » 19.

18 Théodoret de Cyr, partisan de l'orthodoxie, fut déposé par le synode.

19 Schwartz, Acta Conciliorum Oecumenicorum, 2, vol. II ; pars. prior, p. 78.

20 Theodoretus ad Leonem M., Ep. 52, 1, 5, 6 ; PL. 54, 847 et 851 ; cf. PG. 83, 1311 s. et 1315 s.

21 Théodose II est empereur de Constantinople. Pulchérie est la soeur de l'empereur et jouissait d'une grande influence.

22 Valentinien est empereur d'Occident.

Et Théodoret :

« Si Paul, héraut de la vérité, alla visiter le grand apôtre Pierre..., combien plus nous, humbles et modestes^ nous devons recourir à Votre Siège Apostolique... Avant toutes choses, je demande à apprendre de vous si je dois ou non accepter cette injuste déposition : j'attends votre sentence » 20.

Le Pape, saint Léon le Grand, convoque au milieu des difficultés un Concile :

Pour effacer une pareille tache, Léon presse Théodose et Pulchérie en de nombreuses lettres, de porter remède à un état de choses si triste ; il demande qu'un nouveau Concile soit réuni en Italie pour réparer les méfaits d'Ephèse. Entouré d'une couronne d'évêques, il accueille à l'entrée de la basilique vaticane, l'empereur Valentinien III 22, avec sa mère Galla Placidia et son épouse Eudoxie, et, gémissant et pleurant, il les persuade de remédier de tout leur pouvoir à la misère croissante de l'Eglise. L'Auguste écrivit à l'autre Auguste, les Reines aussi. Ce fut en vain ; Théodose en butte à la ruse et à la fraude, ne corrigea en rien le mal commis. Mais sa mort subite laissa le pouvoir impérial à sa soeur Pulchérie, qui épousa Marcien et l'associa à l'empire. Tous deux sont célèbres pour leur piété et leur sagesse. Aussitôt, Anatole, que Dioscore avait, en enfreignant le droit, mis à la place de Flavien, souscrivit à la lettre de Léon à Flavien sur l'Incarnation du Sauveur ; la dépouille mortelle de Flavien fut, en grande pompe, transférée à Constantinople -, les évêques chassés de leur siège furent rétablis ; enfin l'horreur generale de la contagion eutychéenne augmenta, à tel point qu'on ne voyait plus la nécessité d'un Concile d'autant plus que, par suite des incursions des Barbares, l'état de l'empire n'était pas sûr.

Toutefois le Concile eut lieu et avec le consentement du Souverain Pontife.

Le Concile s'ouvrit à Nicée, le ier septembre 431 et se transporta à Chalcédoine où les débats commencèrent le 8 octobre 431.

Chalcédoine est une ville de Bithynie près du Bosphore de Thrace, en face de Constantinople, située sur l'autre rive. C'est là que, le 8 des Ides d'octobre, dans la très vaste basilique suburbaine de Sainte Euphémie, vierge et martyre, se réunirent les Pères venus de Nicée, où avait commencé la réunion ; ils étaient près de six cents, tous Orientaux, à l'exception de deux Africains, chassés de leur résidence.

Au centre, était placé le livre des évangiles ; devant l'autel siégeaient dix-neuf procureurs de l'empereur et du sénat. La charge de Légats du Pape était remplie par des hommes très pieux : Paschasinus, évêque de Lilibée en Sicile ; Lucentius, évêque d'Ascoli, les prêtres Boni-face et Basile ; Julien, évêque de Cos, leur fut adjoint pour les aider de ses soins et de son action. Les légats Pontificaux occupent la première place parmi les évêques ; ils sont nommés les premiers, ils parlent les premiers ; ils souscrivent les premiers les actes ; de par l'autorité qui leur est déléguée, ils approuvent ou rejettent les suffrages des autres, comme ce fut le cas pour la condamnation de Dioscore, qu'au nom du Souverain Pontife, ils ratifièrent en ces termes : « Le très saint et très heureux archevêque de la grande et ancienne Rome, Léon, par notre intermédiaire et par celui du présent Saint Synode, et avec le trois fois bienheureux et digne de toute louange, l'apôtre Pierre, roc inébranlable de l'Eglise catholique, fondement de la foi orthodoxe, l'a dépouillé (Dioscore) de la dignité episcopale et l'a écarté de tout ministère sacerdotal » 23.

¦ La primauté du Pape fut nettement établie :

D'ailleurs que les Légats Pontificaux aient non seulement exercé l'autorité de présidents, mais que le droit et l'honneur de présider leur aient encore été reconnus par tous les Pères du Concile, sans exception, cela résulte clairement de la Lettre synodale envoyée à Léon : « C'est toi, disent les Pères, qui, comme la tête préside aux membres, présidais en la personne de tes délégués, montrant ainsi ta bienveillance » 2\ g

Par un abus rapidement corrigé, certains firent voter un article donnant immédiatement après le Pape, la préséance au Patriarche de Constantinople :

Nous n'avons pas à passer en revue tous les actes synodaux, mais seulement à rappeler brièvement les principaux, dans la mesure où c'est utile pour mettre en lumière la vérité et promouvoir la piété. Ainsi quand il est question de la dignité du siège apostolique, nous ne pouvons passer sous silence le canon 28 de ce Concile, par lequel le second rang d'honneur, après le Siège romain, était assigné au Siège de Constantinople, en sa qualité de cité impériale. Sans doute, il n'y avait là rien contre le divin primat de juridiction, qui était tenu pour assuré ; mais ce canon composé en l'absence des Légats Pontificaux, et contre leur volonté, et par là même clandestin

23 Mansi, Conciliorum amplissima collectio, 6, 1047, act. III ; Schwartz, 2, vol. I. pars altera, p. 29 (225), act. II.

24 Synodus Chalcedonensis ad Leonem M., Ep. 98, I ; PL. 54, 951 ; Mansi, 6, 147.

et subreptice, est destitué de toute valeur juridique, et il fut réprouvé et condamné par saint Léon dans un grand nombre de Lettres. D'ailleurs, Marcien et Pulchérie acceptèrent cette condamnation et, de même, Anatole qui, excusant l'audace commise, écrivit à saint Léon : « Quant à ce qui a été récemment décrété au Concile universel de Chalcédoine, en faveur du siège de Constantinople, que Votre Béatitude tienne pour certain que la faute n'en est pas à moi... ; mais c'est le vénérable clergé de l'église de Constantinople qui eut ce zèle... ; et toute la valeur et confirmation de ce qui avait été ainsi fait, était réservé à l'autorité de Votre Béatitude » 25.


PieXII 1951 - DE LA S. CONGRÉGATION DES RELIGIEUX AUX SUPÉRIEURES MAJEURES DES CONGRÉGATIONS FÉMININES SUR LA PRÉPARATION TECHNIQUE DES RELIGIEUSES