PieXII 1951 - LETTRE A L'ÉPISCOPAT POLONAIS


II

Le Concile de Chalcédoine manifeste une tradition déjà solidement ancrée concernant les articles de foi :

Mais il faut enfin venir au coeur de toute l'affaire, c'est-à-dire à la solennelle définition de la foi catholique, par laquelle l'erreur coupable d'Eutychès fut répudiée et condamnée. A la quatrième session de ce saint Synode, comme les magistrats impériaux demandaient qu'on rédigeât un nouveau symbole de la foi, le Légat Pascha-sinus, interprétant le sentiment commun, répondit qu'il n'y avait pas à le faire : il existait déjà assez de symboles et de canons reçus dans l'Eglise, et sur le sujet présent, il y avait en premier lieu la lettre de Léon à Flavien : « En troisième lieu, (c'est-à-dire après les symboles de Nicée et de Constantinople, et l'explication qu'en avait donnée saint Cyrille au Concile d'Ephèse), les écrits du bienheureux et apostolique Léon, pape de l'Eglise universelle, qui condamnent l'hérésie de Nestorius et d'Euty

25 Anatolius ad Leonem M., Ep. 132, 4 ; PL. 54, 1084 ; Mansi, 6, 278 s.

chès, ont exposé ce que contient la vraie foi. C'est cette même foi que le Saint Synode professe et observe » 26.

Il convient de rappeler ici que cette lettre d'une importance capitale de Léon à Flavien sur l'Incarnation du Verbe fut lue dans la troisième session du Concile. A peine le lecteur eut-il achevé, que tous les Pères présents, d'un seul coeur et d'une seule voix, s'écrièrent : « Telle est la foi de nos pères, telle est la foi des apôtres. Ainsi nous croyons tous, ainsi croient les orthodoxes. Ana-thème à qui ne croit pas ainsi. C'est Pierre qui a parlé


L, 27

eon » .

Après cela, tous d'un commun accord, convinrent que le document de l'évêque de Rome s'accordait aisément et parfaitement avec les symboles de Nicée et de Constantinople. Toutefois, à la cinquième session synodale, sur les instances répétées de Marcien et du Sénat, une commission élue d'évêques de diverses régions, réunie dans l'oratoire de la basilique de Sainte-Euphémie, formula une nouvelle définition, qui comprend un prologue, les symboles de Nicée et de Constantinople, (celui-ci étant ainsi promulgué pour la première fois), et une condamnation solennelle de la doctrine eutychéenne. Cette règle de foi fut approuvée à l'unanimité par les Pères du Concile.

Analysant le texte du Pape saint Léon, on y lit la réfutation d'Eutychès :

Et maintenant, Vénérables Frères, il convient que nous nous arrêtions un instant à considérer le document du Pontife romain, glorieux défenseur de la foi catholique. Tout d'abord, contre Eutyches, disant : « Je confesse que Notre-Seigneur fut de deux natures avant

2« Mansi, 7, 147.

2' Schwartz. II, vol. I ; pars altera, p. 81 (277), act. III ; Mansi, 6, 971, act. II.

l'union, mais après l'union, je confesse une seule nature » 28, le saint évêque oppose et non sans indignation, cette vérité lumineuse et éclatante : « Je m'étonne qu'une formule aussi absurde et aussi perverse n'ait été réprimandée par aucun des juges... alors qu'il y a autant d'impiété à dire que l'unique Fils de Dieu fut de deux natures avant l'Incarnation qu'il n'y a d'iniquité à lui attribuer une seule nature après que le Verbe s'est fait chair » 28.

Ensuite la réfutation de Nestorius :

Avec non moins d'ardeur, il combat Nestorius, qui va à l'opposé dans l'erreur : « A cause donc de cette unité de personne à admettre, dans les deux natures, nous lisons d'une part, que le Fils de l'Homme est descendu du ciel quand le Fils de Dieu a pris chair de cette Vierge dont il est né et d'autre part, le Fils de Dieu est dit crucifié et enseveli, alors qu'il a souffert cela non dans la divinité, par laquelle le Fils unique est coéternel et consubstantiel au Père, mais dans l'infirmité de la nature humaine. C'est pourquoi nous confessons tous dans le symbole l'Unique Fils de Dieu crucifié et mis au tombeau » 30.

Le document de saint Léon donnait les précisions dogmatiques

suivantes :

Outre la distinction des deux natures, dans le Christ, la distinction des propriétés et opérations de ces deux natures est clairement démontrée dans cette lettre : « Laissant intacte la propriété des deux natures, se rapprochant

28 S. Leonis M., Ep. 28, 6 ; PL. 54, 777.

29 Ibid.

30 Ep. 28, 5 ; PL. 54, 771 ; cf. Augustinus, Contra sermonem Arianorum, c. 8, PL. 42,

dans l'unité de personne, l'humilité a été prise par la majesté, l'infirmité par la force, la mortalité par l'éternité » 31. Et encore : « Chacune des deux natures retient sans diminution ce qui lui est propre » 3\

Toutefois la double série de ces propriétés et de ces opérations est attribuée à l'unique personne du Verbe, car « Un seul... et le même est vraiment Fils de Dieu et vraiment fils de l'homme » 3\ C'est pourquoi : « Chaque forme, en parfaite communion avec l'autre, opère ce qui lui est propre : le Verbe opérant ce qui est du Verbe et la chair exécutant ce qui est de la chair » On voit là employée ce qu'on appelle la communication des idiomes que Cyrille défendit à bon droit contre Nestorius, en vertu de cet axiome que les deux natures subsistent dans l'unique personne du Verbe, du Verbe engendré par le Père avant les siècles, selon la divinité, et né de Marie dans le temps selon l'humanité.

La définition même du Concile de Chalcédoine reprend la doctrine énoncée par saint Léon le Grand :

Cette haute doctrine puisée dans l'Evangile, en accord avec ce qui avait été décrété au Concile d'Ephèse, condamne Eutyches, sans épargner Nestorius. Avec elle est absolument et parfaitement harmonisée la définition dogmatique du Concile de Chalcédoine, qui, semblable-ment prononce avec clarté et précision qu'il y a dans le Christ deux natures distinctes et une seule personne ; voici en quels termes : « Le saint, grand et universel Concile condamne aussi ceux qui imaginent deux natures dans le Seigneur avant l'union, et une seule après l'union. Aussi, suivant les saints Pères, nous enseignons tous una-

31 Ep. 28, 3 ; PL. 54, 763. Cf. S. Leonis M., Serm. 21, 2, PL. 54, 192.

32 Ep. 28, 3 ; PL. 54, 765 ; cf. Serm. 23, 2, PL. 54, 201.

33 Ep. 28, 4, PL. 54, 767.

34 Ibid.

nimement un seul et même fils, Notre-Seigneur Jésus-Christ, complet quant à la divinité, et complet quant à l'humanité, vraiment Dieu et vraiment homme, composé d'une âme raisonnable et d'un corps, consubstantiel au Père selon la divinité, et consubstantiel à nous selon l'humanité semblable à nous en tout hormis le péché ; engendré du Père avant les siècles selon la divinité, et, selon l'humanité, né pour nous et pour notre salut dans les derniers temps, de la Vierge Marie, Mère de Dieu ; un seul et même Christ, Fils, Seigneur, Fils unique, en deux natures, sans mélange, sans transformation, sans division, sans séparation : car l'union n'a pas supprimé la différence des natures : chacune a conservé sa manière d'être propre, et s'est rencontrée avec l'autre dans une unique personne et subsistance : non point séparé et divisé en deux personnes, mais un seul et même Fils unique, Dieu, Verbe, Seigneur Jésus-Christ » 3\

La formule dogmatique est remarquable par sa précision :

Si l'on demande comment il se fait que, pour combattre l'erreur, les formules du Concile de Chalcédoine ont tant d'éclat et d'efficacité, cela vient surtout, croyons-nous, de l'extrême propriété des termes employés, toute ambiguité étant évitée. En effet, dans la définition de la foi, de Chalcédoine, les mots de personne et d'hypostase (ncpôocunov ùnàoTaots) ont le même sens ; tandis que le mot de nature (<pàcrts) a un autre sens, pour lequel on n'emploie jamais les premiers mots.

Les définitions d'Ephèse et de Chalcédoine se complètent mutuellement :

Aussi est-ce faussement qu'autrefois Nestoriens et Eutychéens, et aujourd'hui encore quelques historiens,

35 Mansi, 7, 114 et 115.

sont allés répétant que le Concile de Chalcédoine avait corrigé ce qui avait été défini à Ephèse.

Bien plutôt un Concile complète l'autre, de telle sorte cependant que la doctrine christologique apparaisse plus puissante dans les second et troisième Conciles de Constantinople.

Aujourd'hui encore, il y a des monophysites, c'est-à-dire des hérétiques qui professent que le Christ n'a qu'une nature 3e.

Il est donc regrettable que certains anciens adversaires du Concile de Chalcédoine, appelés eux aussi monophysites, aient rejeté une foi aussi pure, si sincère, si intègre, par attache à des expressions des anciens mal comprises.

Sans doute, ils ne suivaient pas Eutyches et ses absurdes propos sur le mélange des natures, mais ils s'attachèrent avec obstination à la fameuse formule : « Une seule nature du Verbe incarnée », qu'avait employée saint Cyrille d'Alexandrie, la croyant de saint Athanase, et d'ailleurs, en un sens, orthodoxe, puisque, par nature, il entendait la personne elle-même. Les Pères de Chalcédoine avaient supprimé tout ce que les mots représentaient de caduc et d'incertain : donnant aux termes de la théologie trinitaire le même sens qu'à ceux employés pour parler de l'Incarnation du Seigneur, ils identifièrent d'une part nature et essence ouata, et d'autre part personne et hypostase, distinguant absolument ces derniers mots des premiers, tandis que les dissidents font la nature équivalente à la personne et non à l'essence. Selon le langage traditionnel et exact, il faut donc dire qu'il y a en Dieu une nature et trois personnes, et dans le Christ une personne et deux natures.

86 Aujourd'hui, il y a encore des monophysites. Les patriarches d'Alexandrie persévèrent dans l'erreur d'Eutychès et une hiérarchie dissidente fut organisée et des Eglises monophysites-syriennes furent fondées. De même, des groupes des Eglises d'Arménie et d'Ethiopie se rangèrent du côté monophysite.

Pour la raison que nous venons de donner, aujourd'hui encore, plusieurs groupes de chrétiens dissidents, en Egypte, en Syrie, en Arménie et ailleurs, ne s'écartent du droit chemin que dans les mots, quand ils exposent la doctrine de l'Incarnation du Seigneur : ce que l'on peut déduire de leurs livres liturgiques et théologiques.

Il semble cependant que cette théorie est surtout dans les mots et non dans la croyance proprement dite. Pourquoi donc ne pas se dégager d'une formule inadéquate et revenir à l'unité de l'Eglise romaine ?

Déjà, en fait, au douzième siècle, un écrivain qui jouissait auprès des Arméniens d'une très grande autorité, déclarait ouvertement ce qu'il pensait à ce sujet : « Nous disons que le Christ est une seule nature non point par confusion, comme Eutyches, ni par diminution comme Apollinaire, mais comme Cyrille d'Alexandrie, qui dans son ouvrage des Scholies contre Nestorius dit : « Une est la nature du Verbe incarné, comme ont enseigné les Pères... C'est ce que nous disons, nous aussi, selon la tradition des saints, et nous n'introduisons nullement dans l'union du Christ, comme font les hérétiques, ni confusion, ni changement, ni altération ; nous affirmons une seule nature pour signifier l'hypostase que vous aussi admettez dans le Christ : ce qui est juste et nous l'admettons, et cela a tout à fait le même sens que notre formule : une seule nature... Et nous ne refusons pas de dire « deux natures » pourvu que ce ne soit pas par division, comme Nestorius, mais pour montrer l'absence de confusion, contre Eutyches et Apollinaire » 31.

Si le comble de la joie et la parfaite allégresse se trouvent dans l'accomplissement de cette parole du

37 Ita Nerses IV (-f- 1173), in Libello confessionis fidei, ad Alextum supremum exercitus bvzantini Ducem : I. Cappelletti, S. Narsetis Claiensis, Armenorum Catholici, opera, I ; Venetiis, 1833, pp. i8z, 183.

psaume : « Voyez comme il est bon et agréable d'habiter ensemble comme des frères » 38 ; si la gloire de Dieu, unie au meilleur bien de tous, resplendit quand les brebis du Christ sont unies par la pleine vérité et la pleine charité ; qu'ils voient donc, ceux dont nous avons parlé plus haut avec amour et tristesse, qu'ils voient s'il est juste et profitable, surtout pour une certaine ambiguité de termes survenue au commencement, de se tenir séparé de l'Eglise une et sainte, fondée sur les saphirs "\ c'est-à-dire sur les prophètes et les apôtres, et sur la suprême pierre angulaire, le Christ-Jésus 40.


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Des erreurs récentes sont apparentées à l'erreur ancienne d'Eutychès : i° certains théologiens anglicans ont imaginé la théorie dite kénotique :

Très opposée à la foi de Chalcédoine, est aussi une opinion assez répandue hors des frontières de la religion catholique, à laquelle un passage de l'apôtre Paul aux Philippiens témérairement et faussement interprété, a donné occasion avec un semblant d'apparence : on l'appelle la doctrine kénotique. Elle imagine une limitation de la divinité du Verbe dans le Christ : invention détestable, aussi condamnable que son contraire le docétisme et qui réduit tout le mystère de l'Incarnation et de la Rédemption à de vains et pâles fantômes. « Dans une nature intègre et parfaite d'homme véritable, enseigne magnifiquement Léon le Grand, est né un Dieu véritable, tout entier en ce qui est sien, tout entier en ce qu"i est notre » .

36 Ps. CXXXII, i.

39 Cf. Is., 1IV, 11.

40 Cf. Eph., 2, 20.

41 Philip., II, 7.

42 EP. 28, 3 ; PL. 54, 763. Cf. Serm. 23, 2, PL. 54, 201.

2° certains psychologues catholiques ont exagéré l'autonomie de la nature humaine du Christ, la considérant comme un individu humain placé à côté du Verbe 43 :

Bien que rien n'interdise de scruter profondément l'humanité du Christ, même selon les principes et les méthodes de la psychologie, il en est cependant, qui, dans des recherches délicates de ce genre, abandonnent plus que de raison les positions anciennes pour en édifier de nouvelles, et utilisent mal l'autorité et la définition du Concile de Chalcédoine pour appuyer leurs propres idées.

Ils parlent de telle façon de l'état et de la condition de la nature humaine du Christ, que celle-ci semble être un sujet sui juris, au moins psychologiquement, comme si elle ne subsistait pas dans la personne du Verbe lui-même. Mais le Concile de Chalcédoine, pleinement d'accord avec celui d'Ephèse, affirme que l'une et l'autre natures de Notre Rédempteur s'unissent dans « une seule personne et subsistance, » et défend d'admettre deux individus dans le Christ, de telle sorte qu'à côté du Verbe, soit placé un « homo assumptus » jouissant d'une entière autonomie.

Dans son document, saint Léon prouve que sa pensée est puisée aux sources de la Révélation :

Non seulement, saint Léon retient la même doctrine

mais il indique et montre la source d'où il tire ses clairs

principes : « Tout ce que nous avons écrit, dit-il, est

démontré venir de la doctrine apostolique et evanui- 44 gelique » .

En effet, dans les premiers temps, l'Eglise, dans les documents écrits, dans les sermons, dans les prières liturgiques, professe ouvertement et absolument que le Fils

43 C'est pour ce motif qu'un article du R. P. Seiller fut mis à l'index (cf. p. 295).

44 Ep. 352, PL. 54, 1123.

unique de Dieu, né de la substance du Père, Notre-Seigneur Jésus-Christ, Verbe incarné, est né sur la terre, a souffert, a été attaché au bois de la croix, et après être ressuscité du tombeau, est monté aux cieux. Outre cela, les pages des Saintes Ecritures attribuent à l'unique Christ, Fils de Dieu, des propriétés humaines et au même Fils de l'homme des propriétés divines.

Jean l'Evangéliste déclare, en effet : « Le Verbe s'est fait chair » 45 ; Paul écrit aussi de Lui : « Lui qui, possédant la nature divine, s'est humilié Lui-même en se faisant obéissant jusqu'à la mort » 46 ; ou bien : « lorsque les temps ont été révolus, Dieu envoya son Fils, qui est né d'une femme » 47 ; mais le divin Rédempteur déclare Lui-même avec certitude : « Mon Père et moi, nous sommes un » 48 ; et encore : « Je suis sorti du Père et venu en ce monde » 49. L'origine céleste de notre Rédempteur resplendit encore dans ce passage de l'évangile : « Je suis descendu du ciel, non pour faire ma volonté, mais la volonté de celui qui m'a envoyé » 50. Et encore dans cet autre : « Celui qui est descendu c'est celui-là même qui est remonté au plus haut des cieux » 51. Paroles que saint Thomas illustre par ce commentaire : « Celui qui descend est celui même qui monte. En cela est signifiée l'unité de personne du Dieu-Homme. Il est descendu, en effet... le Fils de Dieu en prenant la nature humaine ; et le fils de l'homme est monté selon la nature humaine à la sublimité de la vie immortelle. Et ainsi le même est le Fils de Dieu qui descend et le fils de l'homme qui monte » 5".

45 Jean, 1, 14. 4« Philip., 2, 6-8. 47 Gal., 4, 4.

46 Jean, 10, 30.

49 Jean, 16, 28.

50 Jean, 6, 38.

51 Eph., 4, 10.

5* S. Thomas, Comm. in Ep. ad Ephesios, c. IV ; lect. III circa finem.

Notre Prédécesseur Léon le Grand énonçait cette même doctrine, dans les termes suivants : « Puisqu'à la justification des hommes concourt principalement le fait que le Fils Unique de Dieu a daigné être aussi le Fils de l'homme, de telle sorte que celui qui est Dieu : consubstantiel (ôptooùacos) au Père, c'est-à-dire de la même substance que le Père, fut aussi véritablement homme et consubstantiel à sa Mère, selon la chair, nous jouissons de l'une et de l'autre puisque nous ne nous sauvons qu en vertu de toutes les deux, ne séparant d'aucune façon le visible de l'invisible ; le corporel de l'incorporel ; celui qui peut souffrir de celui que ne peut pas souffrir ; celui que l'on peut, de celui qu'on ne peut pas toucher ; la nature de serviteur de la nature de Dieu : parce que, s'il est vrai que l'une dure l'éternité et que l'autre a commencé dans le temps, il reste que, s'étant unies, elles ne peuvent plus avoir ni séparation ni fin » M.

Le mystère de la Rédemption ne s'éclaire d'ailleurs qu'en évoquant doctrine professée au Concile de Chalcédoine :

C'est seulement en croyant d'une foi sainte et sans tache qu'il y a dans le Christ une seule personne, celle du Verbe, en qui s'unissent les deux natures, la divine et l'humaine, vraiment distinctes l'une de l'autre, avec leurs propriétés et opérations diverses, que se manifestent la magnificence et la bonté de notre rédemption telles qu'on ne pourra jamais assez les exalter.

O sublimité de la miséricorde et de la justice de Dieu, qui est venu au secours des coupables et en a fait ses fils ! O cieux qui se sont abaissés, pour que les brumes de l'hiver se dissipent et que les fleurs apparaissent sur notre terre54, et que nous devenions des hommes nouveaux, une

53 S. Leonis M., Sertn. 30, 6, PL. 54, 233, s.

54 Cf. Cant. II, 11, s.

création nouvelle, une nouvelle formation, une nation sainte, une progéniture céleste ! Le Verbe a vraiment souffert dans sa chair, il a versé son sang sur la croix, et il a payé pour nous au Père céleste le prix surabondant de la satisfaction : d'où il résulte qu'un espoir certain de salut brille pour ceux qui adhèrent à Lui par une foi sincère et une charité active, et qui par le secours de la grâce qu'il leur donne, produisent des fruits de justice.


III

Le Concile de Chalcédoine se caractérise par la présence presque exclusive d'évêques orientaux. Pie XU déplorant qu'aujourd'hui, les successeurs de ces mêmes évêques soient séparés de Rome, lance un appel nouveau à l'unité :

Le souvenir de ces nobles et glorieuses annales de l'Eglise fait que spontanément, par la nature des choses, Nous tournons Nos pensées vers les Orientaux, avec un sentiment plus affectueux de Notre coeur paternel. Le Concile oecuménique de Chalcédoine est en effet, pour eux, un monument insigne de gloire qui durera certainement à travers tous les siècles ; c'est là que sous la conduite du Siège Apostolique, par une assemblée de près de six cents évêques d'Orient, l'unité du Christ, en l'unique personne de qui s'unissent deux natures, la divine et l'humaine, restant distinctes et sans confusion, après qu'une violence impie l'avait niée, fut défendue avec soin et admirablement définie.

Mais, hélas ! un grand nombre dans ces régions d'Orient se sont misérablement séparés depuis de longs siècles de l'unité du Corps mystique du Christ, dont l'union hypostatique est le modèle éclatant. N'est-ce pas chose sainte, salutaire, conforme à la volonté de Dieu, que tous enfin reviennent à l'unique bergerie du Christ ?

Le Pape ne veut pas la guerre, mais la paix :

En ce qui Nous regarde, Nous voulons qu'ils aient présent à l'esprit que Nos pensées sont de paix et non d'affliction 65.

Le Pontife romain n'a pas de vues ambitieuses, mais il se glorifie des triomphes du Christ :

Il est d'ailleurs assez manifeste que Nous l'avons montré par les actes ; que si la nécessité Nous oblige à Nous en glorifier, c'est dans le Seigneur que Nous Nous glorifions en Lui, l'auteur de toute bonne volonté.

Pie XII énumère ce qu'il a fait à son tour en faveur des Eglises d'Orient :

En effet, sur la trace de Nos Prédécesseurs, Nous Nous sommes efforcé de rendre aux Orientaux plus facile le retour à l'Eglise catholique : Nous avons protégé leurs rites légitimes ; Nous avons promu des études qui les concernent ; Nous avons promulgué des lois bienfaisantes pour eux ; Nous avons entouré d'une grande sollicitude la Sacrée Congrégation établie dans la curie romaine pour l'Eglise orientale ! Nous avons honoré de la pourpre romaine le Patriarche d'Arménie.

De même, le Saint-Père a multiplié l'octroi de secours envers tous : orientaux comme occidentaux :

Lorsque récemment sévissaient les fureurs de la guerre et les maux qu'elle engendre, la misère, la famine, les maladies, Nous n'avons fait aucune distinction entre eux et ceux qui ont coutume de Nous donner le nom de Père, et Nous avons cherché à alléger partout le poids du malheur ; Nous Nous sommes efforcé de secourir les veuves,

« Cf. Jerem., 29, 11.

les enfants, les vieillards, les malades ; heureux, si Nous avions pu égaler Nos ressources à Nos désirs. ^

Qu'à l'imitation de ceux qui prirent part au Concile de Chalcédoine,. tous prennent à coeur d'adhérer au Siège de Pierre : ify]

Qu'ils se hâtent donc ceux que l'iniquité des temps en a séparé, de rendre l'hommage qui est dû à ce Siège Apostolique, pour qui présider, c'est servir, à ce rocher de la vérité que Dieu a dressé inébranlable ; qu'ils aient devant les yeux et qu'ils imitent Flavien, ce nouveau Jean Chrysostome, souffrant pour la justice, qu'ils imitent les Pères du Concile de Chalcédoine, membres insignes du Corps mystique du Christ, et Marcien, prince énergique, doux et sage, et Pulchérie, lis éclatant de royale et pure beauté. De ce retour à l'unité de l'Eglise, Nous prévoyons que découlera une abondante effusion de biens pour l'avantage commun du monde chrétien. H,

ï Il faut prier pour que cette unité des chrétiens se réalise : ';

Certes, Nous n'ignorons pas qu'une foule de préjugés invétérés s'opposent tenacement à ce qu'elle ait son heureux effet, la prière que le Christ, à la dernière Cène, adresse au Père Eternel pour les disciples de l'Evangile : « Qu'ils soient tous un » 56. Mais Nous savons aussi que la puissance des prières est si grande, quand, du saint assaut des priants, elles s'élèvent ferventes, avec une foi assurée et une conscience pure, qu'elle peut soulever une montagne et la jeter dans la mer Nous souhaitons donc et Nous désirons que tous ceux qui ont à coeur le chaleureux appel à embrasser l'unité chrétienne — et aucun de ceux qui appartiennent au Christ ne peut sous-estimer une si grande cause — Nous souhaitons qu'ils adressent des

56 Jean, 17, 21. 67 Cf. Marc, 11, 25.

prières et des supplications à Dieu, de qui procèdent l'ordre, l'unité, la beauté, afin que les louables voeux des meilleurs soient bientôt accomplis.

La recherche tranquille et sans colère et sans parti-pris, par laquelle aujourd'hui plus qu'autrefois, on reconstitue et considère les faits du passé, contribue certainement à aplanir la route qui conduit au but.

D'ailleurs, l'assaut livré actuellement par les forces du mal exige plus impérieusement encore que tous les chrétiens s'unissent :

Il y a toutefois un autre motif qui demande instamment que, sous l'unique signe du nom de chrétien, les rangs se serrent le plus vite possible pour le combat contre les violents assauts de l'ennemi infernal. Qui n'est effrayé de la haine et de la cruauté avec lesquelles les ennemis de Dieu, dans de nombreuses régions de la terre, menacent de supprimer, ou s'efforcent d'arracher tout ce qui est divin et chrétien ? Contre les bataillons réunis de ces hommes, il est impossible que continuent à rester désunis et dispersés ceux qui, marqués du caractère sacré du baptême, ont, par devoir, à combattre les bons combats du Christ.

Il y a d'ailleurs aujourd'hui, des martyrs de la foi dont le sang nous crie la nécessité du retour à l'unité de tous les chrétiens :

Les chaînes, les supplices, les tortures, les gémissements, le sang de ceux qui, connus, et inconnus, en multitudes innombrables, ont récemment souffert et souffrent encore aujourd'hui pour la constance de leur vertu et pour la profession de leur foi chrétienne, sont comme une voix chaque jour plus puissante, qui est pour tous un appel pressant à embrasser la sainte unité de l'Eglise.

L'espérance du retour de frères et de fils, depuis longtemps séparés de ce Siège Apostolique, est affermie par la croix plus cruelle et ensanglantée par les martyres de tant d'autres frères et fils : que personne ne fasse obstacle à l'oeuvre salutaire de Dieu, que personne ne la néglige.

Pie XII fait appel spécialement aux nestoriens et aux monophysites du XXe siècle, afin qu'ils reviennent à l'unité de la foi : ai

Aux bienfaits et aux joies de cette unité, Nous appelons aussi avec une pressante et paternelle exhortation ceux qui suivent les erreurs de Nestorius 58 et du monophysisme. Qu'ils soient persuadés que Nous estimerions recevoir une des perles les plus précieuses de la couronne de Notre apostolat, s'il Nous était donné de combler de charité et d'honneur ceux qui Nous sont d'autant plus chers qu'une plus longue séparation Nous les fait désirer davantage.

Et que tous les catholiques restent fermement attachés à la foi très pure telle qu'elle fut énoncée au Concile de Chalcédoine :

Nous formons enfin le voeu que la commémoration du sacro-saint Concile de Chalcédoine, que vous ferez avec ardeur, Vénérables Frères, presse chacun d'adhérer avec une foi très ferme au Christ, notre Rédempteur et notre Roi. Que personne, séduit par les déviations d'une humaine philosophie, ou trompé par les détours du langage, n'ébranle par des doutes, ou ne corrompe par des innovations le dogme défini à Chalcédoine, à savoir que dans le Christ sont deux vraies et parfaites natures, la divine et l'humaine, qu'elles sont unies, non confondues, et qu'elles subsistent dans l'unique personne du Verbe. Unis plutôt d'un lien étroit, avec l'auteur de notre salut, qui est « Voie d'une sainte conduite, Vérité de la doctrine divine et Vie de l'éternelle béatitude » M, que tous en Lui aiment leur nature réparée, qu'ils honorent leur liberté rachetée,

58 II y a encore des nestoriens ; en effet, des disciples de Nestorius installèrent en Perse une Eglise dissidente qui compte encore des adeptes.

59 5. Leonis M., Serm. 72, 1, PL. 54, 390.

et que, secouant la folie d'un monde sénile, ils passent avec joie à la sagesse de l'enfance spirituelle qui ne vieillit jamais.

Que le Dieu un et trine, dont la nature est bonté et dont la volonté est puissance, agrée ces voeux ardents, par l'intercession de la Vierge Marie, Mère de Dieu, des saints Apôtres Pierre et Paul, d'Euphémie de Chalcédoine, vierge et martyre triomphante. Et vous, vénérables Frères, joignez pour cela vos prières aux Nôtres et faites connaître au plus grand nombre possible ce que Nous avons écrit. Nous vous en remercions déjà et, à vous, à tous les prêtres et fidèles, au bien spirituel desquels vous consacrez vos soins, Nous accordons de tout coeur la Bénédiction apostolique. Qu'elle vous aide à accepter plus joyeusement le joug du Christ, qui est léger et doux, et à devenir toujours plus semblables dans l'humilité à Celui dont vous voulez partager la gloire.

1 D'après le texte italien des A. A. S , XXXXIII, 1951, p. 673.


RADIOMESSAGE "

AU XIIIe CONGRÈS EUCHARISTIQUE ITALIEN

(g septembre 1951) 1 ï'

Lors de la clôture du XIIIe congrès eucharistique national italien qui se tenait à Assise, le 9 septembre 1951, le Pape envoya — par la voie des ondes — le message suivant :

Présent, dans la ville de l'esprit et de l'humble amour, au triomphe eucharistique avec lequel l'Italie catholique reprend la série de ses plus imposants congrès, Nous invitons non seulement les foules qui acclament, en ce moment, Celui qui donne la vie au monde et avec sa chair la vie aux âmes, mais aussi les coeurs et les esprits de tous les catholiques italiens, à se prosterner — veneremur cernui — devant la sainte Hostie, en faisant avec Nous, plus que jamais en cette heure solennelle, un seul coeur et une seule âme.

Christum Regem adoremus ! Adorons !

Humbles croyants, à qui suffit la foi — soZa fides sufficit — pour adhérer au mystère d'amour qui rend stupéfaits les hommes et les anges, nous voulons, dans l'adoration, rendre au Christ Roi des siècles, l'hommage public, collectif, solennel qui Lui est dû à Lui par un peuple, par une nation chrétienne et catholique, devant le don inestimable de la foi et de tout ce qui dans sa vie et dans son histoire est grand et glorieux.

De même que le flot des biens de Jésus ne descend pas seulement dans l'intimité des coeurs, ainsi le culte de sa Personne divine ne veut pas être seulement secret en chaque fidèle, mais ouvert et commun. Si, en effet, le bienfait est manifeste et à tous, la gratitude doit être également de tous et exprimée en plein jour.

Et nous devons affirmer celle-ci avec d'autant plus de ferveur que sont davantage insidieuses l'hostilité contre Lui et la négation de sa Personne de la part du monde, persécuteur du Christ dans son Eglise et dans ses membres et visant uniquement à en combattre et en rendre vaine l'action dans tous les domaines de la vie individuelle et sociale.

L'Italie catholique, présente en cette heure à la glorification eucharistique d'Assise avec ses plus hautes autorités religieuses, politiques et civiles, avec les représentants de l'Episcopat, du gouvernement, de la culture, de la science, des arts, des forces armées, de toutes les catégories du peuple ; resserrée comme un seul être autour de Jésus, sainte Hostie vivante en une activité perpétuelle de bien pour cette douce terre qui lui appartient particulièrement ; l'Italie catholique, disons-Nous, droite dans son Credo, mais humblement prosternée dans la plus éloquente signification de sa glorieuse foi, accomplit en cette heure, aux pieds de Jésus caché sous les formes eucharistiques, le plus haut, le plus saint de ses devoirs. Elle adore avec reconnaissance son Dieu, le Fils de Dieu fait homme et Pain mystique pour la rédemption, la justice, pour notre justification, pour notre salut et notre paix, qui appartiennent au temps comme à l'éternité.

Si, dans les limites étroites de ce Congrès eucharistique, la foi et la science, la culture, l'éloquence, l'art, l'histoire ont apporté en une fraternelle concorde, don agréable à Jésus Eucharistie, le tribut reconnaissant du génie humain, quoique fort inégal à l'objet de ses spéculations et de son culte aux manifestations multiformes ; bien plus et bien mieux font, ce soir, la savante théologie, la profonde philosophie, l'art de la pensée, de la parole, du chant, en se prosternant en une muette adoration devant Dieu caché, pour exalter dans la foi de l'humble croyant le don inestimable de l'Eucharistie.

Le don, c'est Lui-même — Jésus-Christ personnellement présent pour opérer en nous, si nous secondons son amour, les merveilles de la vie chrétienne, c'est-à-dire d'une vie qui, ordonnée selon l'Evangile, maintienne chez ses fils, même les plus tièdes, l'estime de la vertu, la conscience du bien et du mal, et les empêche d'être définitivement emportés par l'avalanche des erreurs et des corruptions qui dominent dans le monde.

Jésus est présent dans le Sacrement pour donner, Pain mystique du Ciel, la vie supérieure à notre pauvre monde, en perpétuant le miracle des vierges et des chastes, le miracle de ceux qui n'ont rien et possèdent tout, les miracles de cette charité fraternelle, qui supporte tous les maux et toutes les offenses avec une fermeté sereine et pense n'avoir rien fait tant qu'il reste devant elle quelque chose à accomplir.

Ce sont là les prodiges de l'Eucharistie, qui, en conséquence, se révèle à nous telle qu'elle fut annoncée par Jésus dans sa grande promesse, réalité centrale de sa religion, de la vie et de la piété chrétiennes, du fait qu'il a proclamé : « Si vous ne mangez pas la chair du Fils de l'homme et si vous ne buvez pas son sang, vous n'aurez pas la vie en vous. Qui mange ma chair et boit mon sang, a la vie éternelle et je le ressusciterai le dernier jour » 2.

Et de même que chaque membre, l'Eucharistie nourrit la vie de tout le Corps mystique au milieu des vicissitudes de son douloureux pèlerinage, le purifie, l'enrichit dans tous les domaines, en réalisant avec la sanctification des membres l'exaltation et la gloire finale du Corps tout entier, destiné à triompher du monde et de l'enfer par la vertu de Celui qui l'a racheté.

Triomphe des justes, triomphe de l'Eglise de Dieu, infailliblement garanti par le glorieux, par le tout-puissant, par l'éternel Verbe incarné, qui s'est fait notre nourriture sous les espèces du pain !

Triomphe de l'Eucharistie, déconcertant le monde de l'incrédulité par le criant contraste, insensé pour la sagesse humaine, entre l'objet honoré, l'humble et inerte hostie à peine visible au milieu des ors, des lumières, de la magnificence qui l'entourent, et cette foule accourue de tous les côtés, des monts et des plaines, pour l'acclamer, en un irrésistible élan d'enthousiasme qui n'a pas de comparaison.

Dans cette minuscule blancheur éthérée qui semble si peu de chose, l'Italie catholique, dont les trophées de science, de culture, d'art, d'histoire ne valent pas les gloires de sa foi, reconnaît, contemple son Dieu, le Fils de Dieu fait homme, son Rédempteur et le Bienfaiteur de l'humanité, l'Auteur de ses espérances immortelles. Et agenouillée devant cette Hostie

2 lean, 6, 53-54.

adorable, elle prie avec ardeur : Christum Regem adoremus dominantem gentibus !

Cependant, très chers fils, ce légitime hommage d'adoration et d'amour rendu par tout un peuple croyant à la Majesté voilée de Dieu caché, la triomphale exaltation de la divine Eucharistie qui, ce soir, à la clôture de votre Congrès, vous émeut et vous enflamme, de même qu'il est aux yeux du monde surtout l'expression solennelle de votre foi, ainsi aux yeux de Dieu il doit être la solennelle affirmation de votre volonté de la victoire. C'est la victoire que Jésus a remportée sur le monde même et sur l'enfer ; victoire dont II nous a enseigné les lois dans son Evangile et nous a donné le gage dans la Sainte Eucharistie.

En acclamant en Jésus le vainqueur, vous entendez faire vôtre sa victoire. Vous voulez et vous devez vaincre le monde et les puissances de l'enfer, par une vie où ne règne pas le péché, et dont la loi suprême soit la Charité, c'est-à-dire l'amour effectif du prochain, sous le signe de Dieu. Vie d'amour fraternel, élevé, noble et désintéressé, qui vous désigne à l'attention du monde, en excluant chez vous, du fait de votre foi, toute note sans sincérité. C'est là le triomphe. Et c'est le grand, le véritable triomphe de l'Eglise, qui triomphe du monde, du mal, du péché par quoi ses fils triomphent de ces forces hostiles. Gardez-vous du monde corrupteur, supprimez le mal, éloignez le péché de vous, de vos familles, et vous aurez préparé, en ce qui vous concerne, le triomphe de la société chrétienne sur celle du paganisme renaissant, souhaitée par les ennemis de Dieu, de Jésus-Christ et de son oeuvre. Vous aurez contribué à établir une société non plus négatrice, au moins de fait, de Dieu et de sa loi, mais dirigée d'une façon stable par la crainte de Dieu dans la personne de ses gouvernants, de ses magistrats, de ses maîtres, de ses dirigeants de toutes sortes. Vous aurez travaillé pour le destin de cette chère Italie qui ne peut, qui ne doit en aucune manière abandonner son caractère de nation chrétienne et catholique et manquer à sa mission de civilisation spirituelle assignée à son histoire par la divine Providence.

Tel est le fruit que Nous attendons de ce Congrès eucharistique, tenu sous les auspices du grand saint François d'Assise, Patron de l'Italie, et si parfaite image du Christ.

Avec ces sentiments, avec le coeur reconnaissant à Dieu et avec une pleine confiance en une Italie catholique de nouveau retrempée dans sa foi et dans sa piété envers l'auguste sacrement, Nous clôturons ce XIIIe Congrès eucharistique. Et, en même temps que Nous implorons la grâce fécondante de l'Esprit, afin que restent lumineux le souvenir, et stable l'avantage individuel et social d'un si heureux événement, aux présents à Assise, aux participants lointains et à l'écoute, particulièrement aux malades et à ceux qui regardent avec perplexité sur tant de chemins divers et ne sont pas encore en route vers le Père qui les attend, Nous donnons de tout coeur en gage de bienveillance, en promesse d'amour et de paix, la Bénédiction apostolique s.

8 On lira la Lettre du 2 août 1951 au Cardinal Schuster, archevêque de Milan, le nommant Légat au Congrès d'Assise, dans A. A. S., XXXXIII, 1951, p. 672.


PieXII 1951 - LETTRE A L'ÉPISCOPAT POLONAIS