Pie XII 1953 - ALLOCUTION AU PERSONNEL ENSEIGNANT


ALLOCUTION AUX PAROISSIENS DE MARSCIANO

(4 juin 1953) 1


Recevant environ joo fidèles de cette paroisse du diocèse de Pérouse, le Pape dit :

Votre présence devant Nous, chers fils et chères filles, est un don des plus agréables que le Sacré-Coeur de Jésus a voulu Nous faire en cette suave fête de Son Très Saint Corps.

Pour le rendre encore plus agréable vous avez conduit à la Maison du Père commun une compagnie d'enfants innocents fleurs blanches et encore odorantes de la divine caresse de la première rencontre avec Jésus.

Soyez les bienvenus de votre terre d'Ombrie, qui en ce mois est tout un enchantement de verdure et de fleurs et où la nature séduisante semble n'être jamais lasse d'élever l'hymne de la louange vers le Créateur. Soyez les bienvenus de l'Ombrie, terre d'artistes et de saints.

Quand le vénéré Pasteur de l'archidiocèse de Pérouse répondit à l'exhortation du 10 février 1952 2, Nous avons appris que votre cité industrieuse devait tenter une expérience sur la base de la paroisse. Nous en fûmes particulièrement heureux, persuadé comme Nous le sommes que dans cette chose, comme dans toute autre, l'exemple pourrait convaincre les sceptiques, fortifier les découragés et les entraîner — Dieu le veuille — sur le même chemin, vers le même but.

Le temps écoulé depuis le début de votre travail est déjà suffisant pour démontrer que l'expérience non seulement a été possible, mais a donné et continue à donner des résultats supérieurs à toute prévision. En parlant à la paroisse de Saint-Sabas, à Rome, Nous disions que les vrais fidèles se voient au pied de l'autel, quand le prêtre distribue « le pain vivant descendu du ciel » 3.

Or, à Marsciano, comme il Nous a été rapporté, au pied de l'autel, on voit chaque mois plus d'un millier de personnes, tandis que croît sans cesse davantage le nombre des âmes, spécialement des jeunes, qui communient chaque jour.

Cela a été possible parce que à la grâce de Dieu et à la puissante intercession de Marie ont répondu le zèle ingénieux des prêtres, la généreuse collaboration des catholiques militants et la bonne volonté et la docilité de la plupart des fidèles. Il y a bien des âmes encore éloignées, et ne manquent pas ceux qui s'obstinent à être des ennemis de Dieu ; mais il y a tout un esprit et comme un visage changés ; il y a toute une ferveur de renouveau et comme une joie plus intense de vivre chrétiennement.

Toutefois, chers fils, vous ne reviendriez pas contents à vos maisons si, à l'expression de Notre satisfaction, Nous n'ajoutions pas une parole paternelle d'exhortation qui vous rende sans cesse plus fermes dans la voie où vous vous êtes engagés pour un courageux renouvellement spirituel. En construisant le monde d'aujourd'hui, certains théoriciens qui nient Dieu ou qui ne tiennent pas compte de Lui, ont conçu les hommes comme ne relevant que d'eux-mêmes, sans aucune interdépendance naturelle entre eux ; d'autres en revanche ont cherché à s'abriter dans la conception de la « masse » agglutinée, où l'individu disparaît entièrement. De ces deux formules, la première est encore préférée par certains égoïstes auxquels il semble que l'absence de toute solidarité entre les hommes puisse tourner à leur propre avantage. La seconde, au contraire, continue à séduire la multitude de ceux qui croient être abandonnés de tous : ceux-ci affirment en pratique, qu'ils préfèrent une vie pour ainsi dire d'esclaves, plutôt que de mourir de faim dans la solitude et l'abandon.

En face de ces foules si tristes parce que si anti-humaines, l'enseignement de Jésus est sans cesse plus clair et plus lumineux. Les hommes ne sont pas seulement des créatures de Dieu, mais, participant, par sa bonté infinie, de sa propre vie, ils




1 D'après le texte italien de VOsservatore Romano des 5 et 6 juin 1953. * Cf. Documente Pontificaux 1952, p. 43.



s'appellent et sont ses propres fils. Il y a donc un Père commun dans les cieux et tous sont ou doivent être les véritables frères d'une même grande famille.

Dans votre paroisse, voulez-vous vous mettre à l'oeuvre pour faire de Marsciano un lieu où nul n'est étranger aux autres ; où, autant que possible, la joie et la douleur de chacun deviennent la joie et la douleur de tous ? Voulez-vous faire de votre petite ville comme une unique grande famille, où le prêtre est le père représentant Dieu, et où vous soyez frères ?

Alors, en premier lieu, il est nécessaire que vous cherchiez à être réellement les fils de Dieu, participant à sa vie. Loin donc la mort de l'âme, mais, au contraire, résolution absolue de conserver à tout prix la grâce sanctifiante en vous-mêmes. A tout prix, chers fils : au prix de ne plus fréquenter certains spectacles, de supprimer certaines lectures, d'abandonner certaines compagnies, de rompre certaines amitiés, au prix de mettre un plus grand frein à sa langue ; de supporter les plaisanteries et les menaces, d'immoler, si c'était nécessaire, même sa vie.

En second lieu, il faut que vous vous sentiez vraiment des frères, il ne s'agit pas d'une simple apparence ; vous êtes vraiment les fils de Dieu, donc vous êtes réellement des frères entre vous.

Or les frères ne naissent ni ne demeurent tous égaux ; certains sont forts ; certains sont faibles ; certains sont intelligents, d'autres incapables ; parfois l'un d'eux est anormal ou devient même indigne. Une certaine inégalité matérielle, intellectuelle, morale est donc inévitable dans une même famille. Mais comme rien, — ni les événements, ni l'usage du libre-arbitre, — ne pourra détruire la paternité ni la maternité, de même doit demeurer intangible et agissante, dans les limites du juste et du possible, la fraternité entre les enfants d'un même père et d'une même mère.

Appliquez cela à votre paroisse que Nous désirons voir transformée en une véritable grande famille. Prétendre à l'égalité absolue entre tous serait comme vouloir donner une fonction identique à divers membres du même organisme. Ceci posé, il est nécessaire de rendre agissante entre vous votre fraternité, car alors seulement les hommes reconnaîtront que vous êtes une paroisse renouvelée chrétiennement si vous vous aimez les uns les autres.

Il est alors indispensable de supprimer toute inimitié et de faire régner au milieu de vous tous la paix. Une diversité d'opinion (quand un bien commun supérieur ne réclame pas le renoncement) oui ; désapprobation de certaines actions, avertissements et quand c'est nécessaire, châtiments, oui encore ; mais la haine jamais. Même le méchant qui se trouve justement en prison est votre frère, et le visitant, vous visiterez Jésus.

De toute façon, il faudra que vous vous aimiez toujours mutuellement, en souhaitant et procurant aux autres également par le sacrifice personnel tout le bien possible. Et là, par la pensée, Nous voyons devant Nos yeux les pauvres qui n'ont pas de pain ; les malades qui n'ont pas de remèdes ou qui manquent du réconfort d'une bonne parole chrétienne ; les découragés, qui ont vu s'écrouler au cours des années quelque chose qu'il semble impossible de reconstruire désormais. Nous pensons, en ce moment aux enfants orphelins, aux vieillards déclinants, aux veuves affligées. Nous pensons enfin à ceux à qui rien ne manque de ce qui concerne la vie terrestre, mais qui sont morts dans l'âme et ont ainsi, dans leurs maisons, la plus terrible des misères. Aucune larme ne doit vous laisser indifférents ; de même tout rayon de lumière qui entre dans une famille doit éclairer par son reflet également les autres.

Voilà, chers fils et filles, l'enseignement que Nous avons voulu vous donner ; voici l'engagement que Nous avons désiré vous proposer. Offrez à Marie, notre si tendre Mère, vos coeurs. Elle en fera un seul coeur, modelé sur Son Coeur maternel et sur le Coeur divin de Jésus.

Avec ce souhait, Nous donnons à vous tous et à tous ceux qui vous sont chers la Bénédiction apostolique. Nous voulons également bénir particulièrement les patronages naissants, masculins et féminins, où votre jeunesse trouvera refuge et salut. Puis vous retournerez à vos demeures avec la certitude que si Marsciano devient sans cesse meilleur, la vie de vous tous sera plus prospère et heureuse et plus abondantes seront les faveurs célestes que le Seigneur répandra sur votre peuple.


ALLOCUTION AU SIXIÈME CONGRÈS DES PRODUCTEURS AGRICOLES

(10 juin 1953) 1


Recevant en audience les membres de ce Congrès, le Saint-Père dit :

La sixième Assemblée Générale de la Fédération Internationale des Producteurs Agricoles, qui se tient actuellement à Rome, Nous donne l'occasion de saluer en vous, Messieurs, un de ces grands organismes nés depuis le dernier conflit mondial en vue de donner aux relations économiques internationales une orientation conforme aux réalités d'aujourd'hui.

Les activités qu'elle a déjà déployées portent sur de vastes domaines. Se tenant au courant du travail des diverses associations qui la constituent, elle fournit d'abord à ses membres une information intérieure, afin que chacun d'eux profite des études, de l'expérience et des initiatives des autres. Suivant également l'évolution des institutions intergouvernementales, elle s'efforce de coordonner, pour les leur présenter, les points de vue des organisations d'exploitants agricoles du monde entier. Elle émet des recommandations et publie des études portant sur l'organisation des marchés mondiaux et la place qu'y tient l'agriculture. Elle s'intéresse au développement des pays insuffisamment développés, aux mouvements de migration et aux réformes agraires. Un Comité Européen pour la Reconstruction Economique collabore activement à une meilleure intégration de l'économie européenne. Les problèmes de la Coopération agricole tiennent enfin une part importante dans ses préoccupations et ont donné lieu à des études et des initiatives fructueuses. Ce simple coup d'oeil sur les questions qui relèvent de son programme, montre suffisamment l'importance de la Fédération Internationale des Producteurs Agricoles. Elle groupe désormais bon nombre des grandes associations nationales d'une trentaine de pays, et son influence croît d'année en année. Un travail considérable a été fourni et des résultats sérieux obtenus.

Peut-elle se flatter toutefois d'avoir déjà atteint des objectifs importants ? Bien peu sans doute, étant donné la complexité des problèmes à résoudre et l'ampleur des réformes souhaitées. Les quelques années d'existence de votre Fédération suffiraient à enseigner, s'il en était besoin, la lenteur avec laquelle cheminent les idées les plus fécondes, quand elles se heurtent à des intérêts contraires. L'expérience l'a maintes fois prouvé : pour faire prévaloir des solutions rationnelles, la seule raison ne suffit pas. Il y faut une grande énergie et un grand dévouement. Celui qui représente les intérêts des autres, celui qui travaille pour eux, doit être dominé par la volonté de servir. Il doit croire au bien-fondé de son action et se donner sans calcul à une grande oeuvre.

Qu'il Nous suffise d'évoquer à nouveau le noble but de votre Fédération : servir ceux qui tirent de la terre leurs moyens de vivre. Défendre les intérêts d'une partie importante de l'humanité, de cette partie de l'humanité qui fournit aux autres le soutien essentiel de la vie, n'est-ce pas une cause digne d'un dévouement désintéressé ? L'Eglise a toujours déploré — en parfait accord d'ailleurs avec votre organisation et avec les hommes de bonne volonté — la situation actuelle anormale : d'une part, la production agricole menace d'être limitée par son manque de rentabilité, tandis que, d'autre part, on constate chez des peuples entiers la sous-alimentation et la disette la plus aiguë. Le remède, il faut le chercher dans la direction d'une stimulation nouvelle et d'une stabilisation rationnelle des relations économiques des peuples, et cela ne vaut pas seulement dans le domaine de l'agriculture. Mais on peut aussi, en restant dans l'esprit de la doctrine sociale de l'Eglise, dénoncer une erreur essentielle du développement économique depuis l'apparition de l'industrialisme moderne : le secteur agricole est devenu, de façon tout à fait anormale, une simple annexe du secteur industriel et surtout du marché. Un certain nombre d'économies nationales n'ont pas réussi à développer harmonieusement les possibilités de production que la nature leur a données. Nous ne pouvions omettre d'attirer votre attention sur cette question qui est une des bases de toutes les relations internationales. Ceci supposé, une fédération internationale comme la vôtre peut normalement exercer une influence de portée mondiale, contribuer à une meilleure organisation des marchés, à une intensification du commerce, à une élévation du niveau de vie de la grande famille des cultivateurs.

Tel est le but que vous vous proposez, Messieurs, tel est aussi le voeu que Nous formons, en vous encourageant à le poursuivre avec constance et fermeté. Et pour attirer sur vous-mêmes, sur vos travaux, vos familles et vos associations, la toute-puissante intervention de Dieu, Nous vous donnons' de grand coeur Notre Bénédiction apostolique.





ALLOCUTION AU PREMIER CONGRÈS LATIN D'OPHTALMOLOGIE

(12 juin 1953) 1




Le Pape adressa aux Congressistes les paroles suivantes :

Répondant au vif désir qui Nous a été exprimé, Nous sommes heureux, Messieurs, d'accueillir les membres du premier Congrès Latin d'Ophtalmologie, qui se tient actuellement à Rome. La naissance de nouveaux Organismes internationaux de recherche scientifique Nous réjouit toujours, car Nous aimons saluer et encourager la collaboration pacifique et bienfaisante de tous ceux qui se dévouent à la science et au service des hommes.

Nous voyons aujourd'hui devant Nous un groupe important d'éminents spécialistes venus non seulement des pays latins d'Europe, mais aussi de plusieurs autres des vastes régions de l'Amérique, qui aiment à s'appeler latines. Cette communauté de culture vous conviait à Rome de préférence, foyer toujours vivant d'une civilisation deux fois millénaire. Nous formons les voeux les plus sincères pour le plein succès de vos travaux, auxquels Nous portons le plus grand intérêt.

Parmi les branches de la science médicale, l'ophtalmologie est une des plus délicates et des plus complexes à cause même de son objet, l'oeil humain. De tout temps le merveilleux fonctionnement de cet organe a excité l'admiration ; mais la science médicale empirique des anciens demeurait généralement impuissante devant les infirmités de l'oeil. C'est pourquoi l'on s'adressait avec plus de confiance aux dieux qu'aux hommes pour obtenir la guérison : dans l'antique temple d'Esculape à Epidaure, les inscriptions concernant les yeux étaient innombrables. D'après les Livres Saints de l'Ancien Testament et du Nouveau, la



guérison des yeux malades passait pour tout à fait extraordinaire. Dans le livre de Tobie, la guérison du vieil aveugle tient une place importante et fait l'objet d'un récit fort pittoresque. De même peut-on lire dans les Evangiles plusieurs détails précis concernant l'attitude de Notre-Seigneur envers les malades privés de la lumière.



Le Pape précise ainsi le rôle médical joué par le Christ.

Les gestes de Notre-Seigneur ne relevaient évidemment pas de la médecine, et s'il jugea bon de déployer une certaine mise en scène, c'était sans doute pour témoigner son affection envers les malades et souligner ainsi son rôle de médecin des âmes. On peut en effet remarquer chez lui l'habitude constante de faire passer des réalités matérielles aux réalités spirituelles, de la lumière du corps à la lumière de l'âme. Cela ne veut pas dire qu'il se désintéressait des maladies du corps ; bien des fois au contraire les Evangélistes ont noté qu'il était ému de compassion devant les souffrances et que ses interventions miraculeuses avaient pour point de départ une misère à soulager.

t Le Pape décrit les troubles de la vue.

Nous faisions allusion, il y a un instant, à la délicatesse et à la complexité de votre science. Si les organes des sens supposent en général un groupement particulièrement dense de tissus spécialisés, de vaisseaux et de nerfs, l'oeil est sans doute le plus riche de tous, et d'autre part sa mobilité dans l'orbite complique extraordinairement ses relations avec le reste de l'organisme. Le nombre de conditions requises simultanément pour le bon exercice de la vue multiplie les risques de perturbation et par conséquent les maux auxquels l'ophtalmologie doit s'efforcer de remédier.

Ce sont, semble-t-il, les défauts d'accommodation, de réfraction, de convergence, qui motivent les recours les plus fréquents à l'oculiste. Grâce à Dieu, les progrès des méthodes d'observation et le perfectionnement des instruments d'optique permettent un examen toujours plus complet et plus exact de la vue et fournissent des remèdes toujours plus adéquats. Mais là ne s'arrête p.as, il s'en faut, la spécialité de l'ophtalmologiste. Même si l'appareil dioptrique de l'oeil fonctionne normalement, l'état des enveloppes externes peut à lui seul causer un mal profond. Ici prennent place toutes les affections de la conjonctive et de la cornée. Si les tissus intérieurs sont atteints, on se trouve devant les diverses formes d'uvéite, généralement graves et difficiles à traiter. L'hypertension oculaire constitue le glaucome aigu ou chronique, qui nécessite souvent l'intervention chirurgicale, les déchirures et les décollements de la rétine demandent presque toujours des opérations, où la dextérité et l'ingéniosité des chirurgiens modernes s'exercent avec succès. De la chirurgie également relève l'extraction fréquemment nécessaire d'un cristallin devenu opaque. Le système lacrymal lui-même, qui pourrait sembler accessoire, est au contraire absolument nécessaire, et son mauvais état demande parfois des interventions délicates.

Devant tant de maux divers, qui risquent d'atteindre l'oeil humain, on ne peut qu'admirer le fonctionnement extraordinaire de cet organe si complexe, de cet instrument d'analyse incomparable, dont l'Auteur de la lumière a doué sa créature.

Plus la science se développe, plus nombreux sont les problèmes qui se posent au spécialiste, et il suffit de parcourir un ouvrage récent d'ophtalmologie pour constater la multitude de questions discutées, d'hypothèses et de solutions provisoires. C'est pourquoi l'on ne saurait trop se féliciter de Congrès comme le vôtre, Messieurs, qui peuvent mettre en commun le résultat de recherches méthodiques encore inédites, et favoriser, par la rencontre de praticiens renommés, l'acquisition de progrès, dont l'humanité entière pourra bénéficier.



Toutefois l'ophtalmologiste doit être aussi expert en médecine générale.

La spécialité qui vous occupe requiert non seulement une connaissance très approfondie de l'organe et des conditions de la vue, mais elle est si vaste et ses connexions avec la médecine générale si nombreuses et si étroites qu'il faut en quelque sorte être médecin deux fois pour devenir un excellent ophtalmologiste.

Dans l'oeil en effet le réseau vasculaire est si riche, les tissus si variés, que les affections des principaux organes s'y répercutent facilement et y suscitent des accidents souvent graves. Les maladies fonctionnelles du foie et du rein, les invasions microbiennes, héréditaires ou acquises, les infections bacillaires,


créent des troubles de la vue, qu'il faut savoir rattacher à leur vraie cause. Les anomalies de la circulation sanguine, les lésions du système nerveux général ou local sont autant de causes possibles d'un désordre ophtalmique. Il semble vraiment qu'on ne puisse fixer de limites aux relations qui existent entre l'oeil et l'ensemble de l'organisme. Et tel est le vaste domaine de vos recherches, le champ de vos activités cliniques, médicales et chirurgicales.



L'oeil exprime encore l'âme.

Tout se reflète dans l'oeil : non seulement le monde visible, mais aussi les passions de l'âme. Un observateur, même superficiel, y découvre l'expression des sentiments les plus variés . colère, peur, haine, affection, joie, confiance, sérénité. Le jeu des divers muscles du visage se trouve en quelque sorte concentré et résumé dans l'oeil comme dans un miroir.



La technique se perfectionne sans cesse.

Mais le regard du spécialiste va plus loin. Il lui suffit parfois de la seule inspection extérieure pour déceler les maux, dont Nous parlions à l'instant : affection du foie, du coeur, des reins, de l'appareil digestif. Il dispose d'ailleurs d'instruments, qui lui permettent d'observer avec une précision extraordinaire l'intérieur même de l'oeil. Depuis la découverte de Helmholtz, géniale dans sa simplicité, des lampes spéciales sont venues éclairer les régions les plus difficilement accessibles à l'examen, et il ne se passe pas d'années que la technique ne fournisse, soit pour l'observation, soit pour la médication, soit pour la chirurgie, des secours nouveaux. Il arrive même que certaines opérations plus spectaculaires défraient la chronique des journaux, par exemple la chérotoplastie avec greffe de la cornée transparente sur des yeux aveugles ou presque.



Il y a de réelles paraboles de l'oeil.

Le langage populaire de tous les pays a créé un grand nombre de métaphores tirées du sens de la vue. Peut-être un oculiste en comprend-il plus aisément la profondeur, et Nous voudrions pour finir vous proposer cette pensée tirée de l'Evangile : « Si ton oeil est sain, tout ton corps sera éclairé ; mais si ton oeil est gâté tout ton corps sera dans les ténèbres » 2. De même qu'on ne peut recevoir correctement la lumière d'ici-bas, quand toutes les conditions posées par le Créateur ne sont pas réalisées, à plus forte raison la lumière d'en haut, qui éclaire tout homme venant en ce monde3, suppose-t-elle, pour être perçue, non pas un oeil sain, mais un coeur pur, une intention droite. Tel est l'oeil dont parle Notre-Seigneur dans la sentence, que nous venons de citer. Elle formule en d'autres termes la sixième des huit béatitudes évangéliques : « Bienheureux les coeurs purs, car ils verront Dieu » 4. Ils verront Dieu dès ici-bas dans le miroir de leur conscience, si la vue de leur âme n'est troublée par aucun égoïsme, par aucune passion désordonnée. Quel homme pourrait se vanter de n'opposer aucune opacité, aucune résistance à la lumière d'en haut ? Nous avons tous besoin de répéter à Notre-Seigneur, comme l'aveugle qui se tenait au bord de la route : « Seigneur, faites que je voie » 5. Faites que je voie toujours plus clairement votre toute-puissance, votre immense sagesse, votre très sainte volonté. Tel est le souhait que Nous formons pour vous tous, Messieurs, et pour implorer du Maître des lumières son abondante réalisation, Nous vous donnons, à vous-mêmes et à tous ceux qui vous sont chers, Notre Bénédiction apostolique.



Pie XII poursuit en espagnol

A ce que Nous venons de dire, Messieurs, dans cette langue française que Nous employons généralement aux audiences de caractère international, Nous désirons ajouter quelques brèves paroles en sonore et vigoureux castillan.

Nous y sommes incité, en premier lieu par le fait que vous représentez la partie principale, quant au nombre, dans le monde dit latin, vous les ophtalmologistes de langue espagnole ; mais Nous y sommes également incité par la qualité de votre représentation, car il n'y a personne qui ne sache que l'ophtalmologie compte parmi vous des noms de premier plan, auxquels rend justice l'appréciation universelle.

Si Nous pouvions Nous exprimer ainsi, Nous dirions que vous savez parfaitement « avec quels bons yeux » le Pape considère tout ce grand bloc de nations qui prie en castillan et qui veut sans cesse se distinguer par son adhésion à notre Sainte Mère l'Eglise, par son amour pour le Vicaire du Christ. Dans Notre coeur de Père la juste correspondance à ces sentiments si filiaux et sincères ne fait jamais défaut. Et lorsque, comme en la circonstance présente, elle peut se manifester de manière spéciale en comprenant votre compétence scientifique et professionnelle, vous savez avec combien de plaisir votre Père, le Vicaire du Christ, profite de l'occasion pour le faire.

Que le Seigneur vous bénisse dans vos travaux, dans vos familles, dans vos désirs et dans tout ce que, en ce moment, vous portez dans votre pensée et dans votre coeur.



Et le Pape termine en portugais :

Un mot aussi dans la langue de Camoëns et de Vieira, pour ceux d'entre vous qui la parlent, et qui sont venus soit des terres bénies de Santa-Cruz, soit du « jardin d'Europe planté sur le bord de la mer ».

Vous n'avez pas besoin que Nous vous disions combien Nous est agréable votre présence ici, dans la Maison paternelle, au milieu de cet illustre Congrès, dont la science, selon la phrase de l'Ecriture, rend célèbres ceux qui la possèdent et procure aux hommes la santé pour qu'ils voient et admirent mieux les merveilles du Créateur 8.

Nous élevons vers le Ciel les meilleurs voeux, afin qu'il vous éclaire toujours dans vos recherches et vos travaux scientifiques et pour qu'il bénisse avec vous vos collaborateurs et amis, vos familles, et tous ceux qu'en ce moment vous avez présents à l'esprit.





ALLOCUTION AUX MEMBRES DU QUATRIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE CHIRURGIE

(14 juin 1953)1




L'International Collège of Surgeons ayant tenu un Congrès à Rome, un groupe de participants fut reçu en audience.

En une époque où l'industrie et les arts mécaniques peuvent enregistrer un progrès qui appelle l'attention du monde, il Nous est vraiment agréable de noter que la science de la médecine et en particulier la chirurgie est loin de rester en arrière. C'est à cette science que toute l'humanité est redevable de ce qui est précieux au-delà du confort et de l'avantage matériel, et Nous sommes sûr que le Congrès auquel vous avez participé marquera encore un nouveau pas en avant.

C'est une noble profession que la vôtre ; votre responsabilité envers la société est grave, comme est grave aussi votre responsabilité envers Dieu, le Créateur et Maître suprême de la vie qui est entre vos mains. L'esprit d'un dévouement prompt et altruiste aux intérêts des autres est une caractéristique de votre profession ; il est important que vous et les autres vous ne perdiez jamais de vue le fait que les intérêts éternels passent avant ceux de ce temps éphémère et que les principes fondamentaux de la morale et de la religion doivent sans cesse guider et régler l'exercice de la médecine.

Nous sommes heureux de vous féliciter et de vous offrir Nos voeux cordiaux pour votre succès. Nous élèverons une fervente prière pour que Dieu, le Médecin divin, vous récompense de votre charité et que Sa loi éclaire le chemin sur lequel vous avancez.




• Eccli. xxxvm.




LE DIOCESE DE STOCKHOLM



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CONSTITUTION APOSTOLIQUE ÉRIGEANT LE DIOCÈSE DE STOCKHOLM (HOLMIA)

(29 juin 1953) 1


Le culte catholique fut interdit en Suède jusqu'en 1783 ; à cette date, un Edit de tolérance permit aux étrangers seuls la pratique d'une religion autre que le luthéranisme ; le 23 octobre 1860, un arrêté royal, puis en 1870^ et 1872 des lois abrogent en grande partie les lois d'exception : à partir de 18 ans, un Suédois pourra changer de religion ; Mgr Studach, vicaire apostolique depuis 1833 (jusqu'en 1874) parvient à construire deux nouvelles églises : cependant peu de conversions. Sur presque sept millions d'habitants, la Suède ne comptait guère en 1950 que 50 prêtres et 5.000 catholiques, auxquels on doit ajouter 5800 étrangers et peut-être 10.000 réfugiés ; Mgr Jean-Eric Müller, né en 1877, était vicaire apostolique depuis 1923 ; il fut le premier évêque consacré par Mgr Pacelli — plus tard Pape^ sous le nom de Pie XII - alors Nonce à Munich. Il devient le premier évêque de Stockholm.

Le Vicariat Apostolique de Suède, déjà renommé pour ses travaux et son culte de l'humanisme et des beaux-arts, a beaucoup progressé dans la religion et l'ardeur des oeuvres, au point d'y voir luire la douce espérance que l'Eglise catholique y retrouvera son ancienne splendeur. Et Nous, à qui le Père éternel des hommes a confié sur terre le soin de son Royaume, Nous Nous réjouissons vivement parce que le moment Nous semble venu d'y régler l'administration de la religion sous une forme et une nature qui correspondent et conviennent mieux à l'état de choses actuel. C'est pourquoi Nous avons l'intention d'élever le dit Vicariat de Suède à la dignité de diocèse ; les exemples de piété, de zèle et de sagacité qui ont été ici racontés surtout par les prêtres séculiers qui ont en charge le Vicariat, méritent grandement en effet cette faveur destinée à encourager ce clergé à poursuivre des résultats plus considérables et à affermir la constance des fidèles. Ratifiant donc tout ce que la Sacrée Congrégation de la Propagande a proposé, et donnant en outre notre consentement à l'avis de ceux qui jugent pour quelque motif que cette affaire leur importe, ayant très attentivement considéré la question et donc en pleine connaissance de l'acte que Nous allons poser, en vertu de Notre pouvoir apostolique, Nous décidons ce qui suit. Nous élevons le Vicariat Apostolique de Suède au rang et à la dignité de diocèse, qui s'appellera désormais diocèse de Stockholm et sera soumis directement à Nous et au Siège Apostolique. L'Evêque de cette Eglise aura ses siège et domicile dans la ville capitale de Stockholm et placera en outre sa chaire épiscopale dans le beau temple de saint Eric, qui existe en cette ville et qui servait jusqu'ici de cathédrale. A cette Eglise ainsi érigée pour sa nouvelle dignité, et à ses évêques selon le temps, Nous attribuons tous les droits et privilèges, charges et obligations qui honorent et lient les autres Sièges épiscopaux et les autres Evêques de même rang. En ce qui concerne le Chapitre de Chanoines, l'Evêque de Stockholm veillera très bien à sa constitution ; mais jusqu'à ce que les circonstances et les lieux le permettent, Nous accordons qu'en leur lieu des Con-sulteurs diocésains soient nommés pour assister fidèlement l'Evêque de leur prudence et de leur diligence. En outre, comme le plus sûr moyen de pourvoir à la solidité de tout diocèse est la formation des enfants que le divin Pasteur des âmes aura appelés au ministère sacerdotal, Nous voulons qu'un séminaire soit fondé au plus tôt. La mense épiscopale, comme on l'appelle, sera constituée des biens du Vicariat de Suède, s'il en existe, ou des ressources qui parviendront à la Curie du nouveau diocèse ou enfin des subsides de la Sacrée Congrégation de la Propagande et des fidèles. Pour la réalisation de Nos décisions, Nous choisissons Notre Vénérable Frère Jean Evangéliste Eric Mùller, évêque titulaire de Loviensis, jusqu'ici Vicaire Apostolique de Suède et créé ce même jour premier Evêque de Stockholm. Nous lui accordons donc tous les pouvoirs nécessaires à cette fin, subdélégables en cas de besoin à tout dignitaire ecclésiastique. Nous voulons en outre que le même vénérable Frère consigne par écrit la réalisation de cette affaire, dont il enverra au plus tôt des exemplaires dignes de foi à la Sacrée Congrégation de la Propagande.


LE DIOCESE D'OSLO



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CONSTITUTION APOSTOLIQUE ÉRIGEANT LE DIOCÈSE D'OSLO

(29 juin 1953) 1


La sainte messe fut célébrée publiquement pour la première fois en Norvège depuis la réforme en 1843 ; deux ans après, le roi accordait la liberté religieuse ; cependant il y eut peu de progrès au XLX" siècle. En 1-953 il y a environ 5000 catholiques, une cinquantaine de prêtres, dont 13 Norvégiens et 300 religieux. De sérieux progrès se sont fait jour depuis quelques années.

Chose faste pour la religion divine, il arrive qu'en Norvège, région qui brille par ses exploits et sa culture, le catholicisme a progressé au point de faire luire la douce espérance que la Sainte Eglise y obtiendra son ancien éclat. Et Nous, à qui le Souverain Père des deux a confié sur cette terre le soin de son Royaume, Nous Nous réjouissons grandement de ce fait, et en outre Nous estimons opportun de régler l'administration religieuse sous une forme et d'une manière qui correspondent mieux à la situation actuelle. C'est pourquoi Nous amenons le Vicariat Apostolique d'Oslo à la dignité de diocèse ; les témoignages de vertu, de piété et de sagacité qui Nous ont été rapportés de la part surtout des prêtres séculiers auxquels a été confiée la charge du Vicariat, méritent d'être justement récompensés, afin que ces mêmes prêtres y prennent encore plus de courage pour atteindre des résultats plus abondants et que s'affermisse la constance des fidèles. C'est pourquoi, ratifiant toutes les propositions de la Sacrée Congrégation de la Propagande ; et entrant dans les vues de ceux qui jugent que la chose les intéresse pour quelque motif ; après un examen très attentif de la question et donc en pleine connaissance de Nos décisions, en vertu de Notre pouvoir apostolique, Nous décidons ce qui suit : Nous élevons le Vicariat Apostolique d'Oslo à la dignité de diocèse, qui prendra désormais le nom d'Oslo, et Nous le soumettons directement à Notre autorité et à celle du Siège apostolique. L'Evêque d'Oslo aura donc son siège et son domicile dans la ville d'Oslo, qui donne son nom au nouveau diocèse, et il placera sa chaire épiscopale dans le beau temple de saint Olaf, établi en la même ville et qui remplissait jusqu'ici les fonctions de cathédrale. A cette église nouvellement érigée, pour sa nouvelle dignité, et à ses évêques selon le temps, Nous attribuons tous les droits et privilèges, charges et obligations, dont les autres Sièges épis-copaux et les autres évêques de même rang sont habituellement investis et tenus. En ce qui concerne le Chapitre de Chanoines, l'Evêque d'Oslo devra constituer ce collège ; mais, jusqu'à ce que les circonstances et les lieux le permettent, Nous concédons qu'en leur lieu des Consulteurs diocésains soient choisis pour assister fidèlement l'Evêque de leur prudence et de leur zèle. Comme en outre le meilleur moyen de procurer la stabilité des diocèses est de former les enfants qui, par un divin attrait, aspirent aux fonctions sacerdotales, Nous voulons qu'un séminaire soit fondé au plus tôt. Quant à la mense épiscopale, comme on l'appelle, elle sera constituée des biens du Vicariat d'Oslo, s'il en existe ; ou des ressources qui surviendront à la nouvelle Curie, ou enfin des subsides de la Sacrée Congrégation de la Propagande et des fidèles. Pour la réalisation des décisions de Notre présente Lettre, Nous choisissons Notre vénérable Frère, Jacques Mangers, Evêque titulaire de Seliensis, jusqu'ici Vicaire apostolique d'Oslo et qui aujourd'hui même en a été nommé le premier Evêque. Nous lui accordons donc tous les pouvoirs nécessaires et utiles à cette fin, subdélégables à tout dignitaire dans le saint sacerdoce. Nous ordonnons en outre que le même vénérable Frère consigne par écrit la réalisation de cette affaire et qu'il en envoie au plus tôt des exemplaires dignes de foi à la Sacrée Congrégation de la Propagande.





Pie XII 1953 - ALLOCUTION AU PERSONNEL ENSEIGNANT