Pie XII 1954


RADIOMESSAGE AUX FIDÈLES DE BRETAGNE

(26 juillet 1954)1


Le 26 juillet, en la fête de sainte Anne, alors que des milliers de pèlerins bretons étaient assemblés au sanctuaire d'Auray, Pie XII envoya le message que voici :

Au moment où le très vénéré et très digne Cardinal Archevêque de Rennes se dispose à lire la consécration qui renouvellera le don de vous-mêmes, de vos familles, de vos malades, de vos écoles, de vos paroisses, au Coeur Immaculé de Marie, le Père de tous les fidèles se rend attentif à cette grande action, il vient vous encourager et vous bénir. S'il Nous est permis de reprendre à Notre Saint Prédécesseur Pie X les paroles qu'il adressait en 1906 au Cardinal Labouré, Nous voudrions vous dire, en cette circonstance solennelle, qu' « au milieu des haines dont la foi catholique est l'objet », c'est particulièrement de vous que « Nous attendons... la meilleure part de Notre joie ».

La Bretagne, Nous le savons, a toujours été une Terre de Marie, et elle veut le demeurer. Les signes de votre dévotion à la Très Sainte Vierge sont innombrables ; dans vos diocèses, combien d'églises lui sont dédiées ; dans les sanctuaires de vos pays, combien de Vierges couronnées reçoivent chaque jour l'hommage de vos prières; dans vos familles, combien ont reçu au saint baptême le nom de Marie ! Oh ! portez-le tous dans le coeur ce nom béni de la Mère de Dieu ! Honorez-le par votre piété, honorez-le plus encore par votre vie !

Que la consécration solennelle d'aujourd'hui soit pour vous un rempart contre les tentations, un motif de confiance dans la

prière, un stimulant dans la lutte de tous les jours au service de Dieu. Quiconque s'est consacré à Marie lui appartient de façon spéciale. Il est devenu comme un sanctuaire de la Très Sainte Vierge ; l'image de Marie l'aide à écarter avec énergie toute pensée mauvaise ; l'amour de Marie lui donne le courage d'entreprendre de grandes choses, de vaincre le respect humain, de secouer l'égoïsme, de servir et d'obéir patiemment. Le regard fixé intérieurement sur elle, il s'affectionne à la pureté, à l'humanité, à la charité, dont l'âme de la Vierge était rayonnante ; il prend en haine le péché, il le combat en lui-même et lui fait la guerre de toutes ses forces. Quand il voit l'Immaculée fouler aux pieds le serpent infernal, quand il contemple la Mère de Dieu qui élève entre ses bras son divin Fils, sa volonté ne peut plus avoir aucune complaisance pour le mal ; au contraire, il est fier d'appartenir à Jésus et à Marie, il sait aussi que Marie le presse de faire tout ce que Jésus commande ou désire.

Mettez-vous donc avec confiance sous le manteau qu'elle ouvre de ses deux bras maternels pour accueillir tous ses enfants ; que tous les fils de Bretagne se retrouvent unis sous son patronage ; qu'ils lui fassent une cour et une garde d'honneur et se montrent partout et toujours de dignes fils d'une telle Mère.

Les exemples ne manquent pas, dans votre histoire, d'extraordinaire et très féconde dévotion à Marie. Nous n'en citerons qu'un seul, le plus remarquable sans doute, celui de saint Louis-Marie Grignion de Montfort, que Nous avons eu le bonheur d'élever aux honneurs suprêmes de l'Eglise le 20 juillet 1047. Recevant le lendemain les nombreux pèlerins bretons, vendéens et poitevins venus à Rome en cette occasion, Nous déclarions : « Tous les saints, assurément, ont été grands serviteurs de Marie, et tous lui ont conduit les âmes ; il (saint Louis-Marie) est incontestablement un de ceux qui ont travaillé le plus ardemment et le plus efficacement à la faire aimer et servir ». Aujourd'hui, Nous adressant à tous ceux qui entendent faire de leur consécration au Coeur Immaculé de Marie un acte important et définitif, Nous leur disons : à l'imitation de saint Louis-Marie Grignion de Montfort et de tous les saints bretons, faites aimer et servir Marie.

Cela suppose avant tout que vous pratiquerez vous-mêmes les vertus de Marie : la délicatesse de son Coeur Immaculé ; le recueillement et l'esprit de prière, dont parle l'Evangile, quand il rappelle par deux fois 2 qu'elle conservait dans son coeur le souvenir des grâces de Dieu et des actions de l'Enfant Jésus ; l'amour de Dieu, humble, ardent et joyeux, qui éclate dans le Magnificat ; l'amour des autres également, de tous les autres, de ses parents, de ses amis, de tous les hommes, cette charité incomparable qui la fait voler au service de sa cousine Elisabeth dès qu'elle apprend sa prochaine maternité, qui la rend attentive à la gêne des époux quand le vin vient à manquer aux noces de Cana, qui l'unit enfin de façon si douloureuse et si profonde aux souffrances de son divin Fils pour le salut du genre humain. Oui, la Très Sainte Vierge, dont la condition fut si humble, dont l'Evangile ne rapporte que si peu de choses, dont le silence remplit presque toute la vie, la Sainte Vierge a vu Dieu accomplir en elle les plus grandes choses sans perdre cette étonnante modestie qui remplit d'admiration. Et c'est pourquoi elle reste le modèle de tous les chrétiens. Avec le Sauveur lui-même elle est demeurée cachée à Nazareth, unie à Lui dans la douceur et l'humilité, dans l'accomplissement du devoir quotidien et des travaux domestiques, dans la patience et la prière. On ne connaît d'elle aucun miracle, aucune action extraordinaire, mais elle a aimé Dieu de tout son coeur, de toute son âme, de tout son esprit et de toute sa force. C'est là le premier commandement. Et elle a aimé le prochain comme soi-même. « De plus grand que ceux-là il n'est aucun autre commandement. » 3

Toutefois, les fidèles qui ressentent pour la Très Sainte Vierge une dévotion spéciale, veulent souvent mettre toute leur vie à son service et s'unir à d'autres pour propager son culte. Il existe depuis des siècles dans l'Eglise des Associations placées sous le patronage de Marie qui ont joué dans la sanctification personnelle de nombreux chrétiens et dans l'exercice du zèle apostolique un rôle providentiel maintes fois loué par Nos Prédécesseurs et par Nous-même. Nous voulons parler, entre autres, de ces Congrégations Mariales, que Nous avons appelées l'Action Catholique dans l'esprit de la Très Sainte Vierge et dont la Constitution Apostolique Bis saeculari du 27 septembre 19484 a défini la nature et l'esprit. Nous avons appris avec joie qu'elles

Luc, H, 19 ; II, 51. Marc, 12, 30-31.

Cf. Documents Pontificaux 194s, p. 336.

ont de fervents promoteurs en Bretagne, et Nous souhaitons qu'elles trouvent dans ce pays de la Vierge un terrain fécond, d'où sortiront des légions d'âmes ferventes et apostoliques. Ce qu'elles accomplissent dans les nations les plus diverses et les plus éloignées de la chrétienté, pourquoi ne le feraient-elles pas dans cette chère Bretagne dont la foi ancestrale connut de si brillantes époques, de si ardents renouveaux ?

Vous seriez étonnés, chers fils et filles de Bretagne, si aujourd'hui, en cette fête de sainte Anne, et ici, à Auray, où elle est vénérée d'une manière si émouvante, Nous n'avions un souvenir pour celle que vous appelez à si juste titre la Bonne Mère. Aimez-la bien, cette bonne Sainte Anne. Continuez à placer vos foyers sous sa protection. En mettant Marie au monde, elle a donné à l'humanité la plus merveilleuse des créatures, la plus sainte des femmes, le chef-d'oeuvre de Dieu. N'est-ce pas assez pour que vous l'aimiez et l'honoriez d'une manière unique ?

Implorant donc l'intercession de Sainte Anne et de la Très Sainte Vierge, Nous appelons sur vous tous, sur vos foyers, vos écoles, vos paroisses, vos diocèses, sur toute la Bretagne, l'effusion la plus abondante des grâces de Dieu, et du fond du coeur Nous vous en accordons pour gage Notre paternelle Bénédiction apostolique.

Et le Pape termina par ces mots en breton : Revo mélet Kalon Glan Mari !

Revo mélet Santez Anna Patronez vaà er Vretoned !5.





DÉCRET



DE LA S. CONGRÉGATION DU SAINT-OFFICE POUR L'ÉGLISE ORIENTALE

(27 juillet 1954) 1


Le nombre d'Orientaux résidant en France justifie la création d'un Ordinariat qui les prenne spécialement en charge2. C'esf pourquoi Son Em. le Cardinal Tisserant signa le décret suivant :

La France, noble nation, inspirée par l'esprit chrétien, s'est toujours montrée hospitalière à l'égard de ceux qui, au cours des siècles, en raison de vicissitudes diverses, abandonnant leur propre pays, cherchaient un nouveau lieu de résidence et de travail. C'est ainsi qu'actuellement un assez grand nombre de fidèles de rite oriental vit en France, avec l'intention d'y demeurer, et chacun des Ordinaires des lieux veille à leur soin spirituel avec un zèle qui mérite tous les éloges.

Pour parvenir à une plus grande unité administrative, après mûre réflexion, il a paru très opportun à cette Sacrée Congrégation de proposer l'érection d'un Ordinariat pour tous les fidèles de rite oriental vivant en France, gouverné par un Ordinaire spécial avec des facultés fixées par le droit.

C'est pourquoi, dans l'audience du 16 juin de cette année, après que l'Excellentissime Pro-Secrétaire d'Etat pour les Af-



1 D'après le texte français de la Documentation Catholique, t. LI, c. 1173.

2 II y a en France environ 300.000 Orientaux. Ce nombre se décompose comme suit :

— catholiques, entre 60.000 et 70.000 ;

— non-catholiques, entre 230.000 et 240.000.

Parmi les catholiques, les groupes principaux sont formés d'Ukrainiens et d'Arméniens ; parmi les non-catholiques : Russes, Arméniens et Grecs.

Les lieux de résidence se trouvent dans les régions de Paris, Lyon, Marseille, les bassins industriels du Centre, de l'Est et du Nord. Il faut y ajouter de nombreux travailleurs agricoles dispersés.

faires ecclésiastiques extraordinaires lui en eut fait un rapport, Sa Sainteté Pie XII, Pape, a daigné constituer et ériger un Ordinariat pour tous les fidèles de tout rite oriental vivant en France, régi par un Ordinaire spécial.

Sa Sainteté, pour remplir cette charge d'Ordinaire propre, a nommé Son Em. Révérendissime le Cardinal Feltin, archevêque de Paris, lui donnant la faculté de désigner un ou plusieurs vicaires généraux.

Le pouvoir de juridiction de l'Ordinaire sur les susdits fidèles de rite oriental devra s'exercer cumulativement avec le pouvoir des Ordinaires des lieux, qui, pourtant, n'agiront selon leur droit propre qu'en second lieu et tiendront au courant l'Ordinaire des fidèles de rite oriental des décisions importantes qu'ils auront prises au regard de ces fidèles.

L'Ordinaire des fidèles de rite oriental en France veillera soigneusement, après avis des Ordinaires des lieux, à constituer des paroisses et construire des églises, à réunir et former dans les Séminaires des jeunes gens ayant entendu l'appel de Dieu, à maintenir les rites dans toute leur pureté ainsi que la discipline ecclésiastique, à procurer des prêtres aux fidèles, à encourager toutes les oeuvres ecclésiastiques, sociales, scolaires, et tout ce qu'il jugera prudemment dans le Seigneur devoir être entrepris.

Dans les lieux où manquerait une paroisse pour les fidèles d'un rite oriental, le curé du lieu, de rite latin, pourvoira lui-même au bien spirituel de ces fidèles, en ayant reçu les pouvoirs soit de l'Ordinaire de ces fidèles, soit de l'Ordinaire du lieu.

L'Ordinaire susdit veillera à envoyer tous les cinq ans, à la Sacrée Congrégation pour l'Eglise orientale, un rapport sur la situation de l'Ordinariat.

Le présent décret entrera en vigueur le 1er novembre 1954.





LETTRE


AU CONGRÈS MARIAL DE BOLIVIE


(13 août 1954) 1


Le g septembre le Congrès Mariai de Bolivie était clôturé ; c'esf ce jour que Son Excellence Monseigneur José-Clément Maurer, archevêque de Sucre, donna lecture de la lettre de Pie XII :

La dévotion du peuple bolivien envers la Très Sainte Vierge a réuni dans votre ville historique de Sucre les fidèles de la nation, sous la présidence de leurs prélats, pour célébrer le IIe Congrès Mariai National et rendre ainsi un solennel hommage à la Reine du Ciel en cette année qui Lui est consacrée.

Depuis que Nous avons annoncé le désir de commémorer la définition dogmatique du mystère de l'Immaculée Conception de Marie, Nous avons exhorté Nos fils à considérer la grandeur de ce privilège qui présente la Mère de Jésus toujours pleine de grâce et comme un modèle des plus hautes vertus, afin que, conquis par la splendeur d'une si grande beauté, ils s'efforcent de l'imiter fidèlement. Aussi ce congrès convoqué pour stimuler la dévotion mariale dans ce cher pays, est-il la réponse à Notre paternel appel et un motif d'intime satisfaction, car Nous voyons en lui la promesse des fruits qui doivent être retirés de cette Année Mariale.

Le dogme de l'Immaculée Conception, en montrant Marie exempte de la faute originelle, jamais victime du péché, est un affectueux encouragement à suivre, dans la mesure du possible, ce haut exemple pour conserver l'âme toujours pure. Lorsqu'elle a été régénérée par les eaux du baptême, celle-ci se trouve revêtue d'une candide blancheur, mais avec les mau

vaises actions elle s'écarte du droit chemin et se macule de nouveau. Si la faute est grave, elle perd la grâce de Dieu et mérite le châtiment éternel. Existe-t-il un plus grand malheur que celui-ci ? Il est capital pour le chrétien de ne pas offenser Dieu, de ne pas pécher, de faire en sorte que l'âme vive toujours dans la grâce. Les vrais fils de Marie désirent être semblables à une si sainte Mère et pour cela ils doivent lutter contre les passions, contre les tentations du monde, contre tout ce qui peut induire au péché. Ainsi apprécieront-ils le grand don de la filiation divine et vivront-ils en tout moment une fervente vie chrétienne.

Mais si le péché cause de tels maux aux individus, quand il se commet au sein de la famille, ses conséquences sont encore pires. Une des plus grandes nécessités du monde actuel est de rendre au foyer le caractère sacré et chrétien qu'il a en dans nos peuples en d'autres temps. La fidélité conjugale, la concorde et l'aide mutuelle des époux, l'éducation religieuse des enfants sont la base de la félicité de la société domestique et les fautes contre ces trois biens produisent des maux énormes. Marie, dans son existence à Nazareth, est un modèle de vertus familiales et tous doivent apprendre d'Elle les règles de vie auxquelles ils sont tenus. Autrefois, la famille se réunissait à la fin de la journée et honorait la Reine du Ciel par la récitation du chapelet ; la vie chrétienne du foyer et la piété qui était inculquée aux enfants faisaient germer les vocations sacerdotales et religieuses : l'esprit chrétien de sacrifice enseignait la manière de supporter les adversités et les douleurs. Si l'on imite Marie, la famille sera une source de vertus et la paix y régnera toujours.

Dans le monde d'aujourd'hui, plein d'embûches et de périls, nombreux sont ceux qui luttent avec hardiesse pour répandre l'erreur parmi les fidèles. Une propagande audacieuse, ouverte ou sournoise, s'infiltre parmi les catholiques dans le but de les éloigner de la fidélité due au Christ et à la véritable Eglise, et en même temps d'arracher la foi de leurs âmes. Malheureusement à côté de ceux qui défendent courageusement leurs croyances, nombreux sont ceux qui les abandonnent. Combien ces déceptions doivent-elles être pénibles au Coeur de Marie ! Elle qui nous donna l'auteur de notre rédemption, Jésus-Christ, veillera sur la fermeté de la foi des fidèles et les nluminera pour qu'ils reconnaissent les ruses de l'ennemi.

Réunis dans cette ville et formant un seul coeur et une seule âme, élevez, chers fils, vos prières vers le Très-Haut pour que, par l'intercession de la Reine du Ciel, de nombreux et abondants bienfaits naissent de ce Congrès. Demandez que cette année soit une année de renouvellement et de pénitence, de pureté et de sainteté ; que la famille resplendisse par ses moeurs saines et chrétiennes ; que se conserve toujours intact le patrimoine spirituel de votre peuple enraciné dans les glorieuses traditions chrétiennes de vos ancêtres ; que l'Eglise dispose de moyens nécessaires — surtout de prêtres nombreux et zélés — afin qu'elle puisse apporter jusqu'aux confins de votre patrie son action bienfaisante et apostolique.

Que la Sainte Vierge étende sur ce cher pays sa protection maternelle. Et Elle qui, aussi bien à Sucre qu'à La-Paz, à San-ta-Cruz comme à Potosi, à Tarija comme à Oruro, reçoit la sincère vénération de ses fils, qu'Elle fasse descendre sur le Vénérable Episcopat et le Clergé, sur les autorités et sur tous les fidèles les miséricordes divines, dont sera le gage la Bénédiction apostolique que Nous vous envoyons de tout coeur.




RADIOMESSAGE AU CONGRÈS MARIAL DU CANADA

(15 août 1954) 1


Au Cap de la Madeleine se terminait ce jour le Congrès Mariai du Canada. — Vie Xll dit d'abord en français :

« Le Seigneur a rendu votre nom si glorieux que la bouche des hommes ne cessera de vous louer » 2. Ces mots par lesquels l'Eglise dans sa liturgie salue la Vierge Mère de Dieu, Nous viennent spontanément à l'esprit, à l'instant où Nous vous rejoignons par la pensée, chers fils du Canada, à la fin de votre mémorable Congrès Mariai. Mieux encore que par la pensée, Nous sommes réellement présent parmi vous en la personne de Notre très digne Légat, qui apporte à votre Evê-que bien-aimé, à toute la hiérarchie et à son troupeau, Notre salut paternel et affectueux. Mais vous avez demandé quelque chose de plus ; vous avez désiré recevoir un message de Nos propres lèvres, entendre Notre voix par delà les mers, et Nous sommes heureux de pouvoir vous satisfaire par ce bref discours.

La bouche des hommes ne cessera de vous louer, ô Vierge Marie ! Certes ces paroles ont trouvé leur accomplissement d'année en année chez les enfants loyaux et dévoués de l'Eglise au Canada. Vous êtes précisément en ce moment rassemblés dans un des lieux les plus sacrés de la tradition mariale, au confluent de trois rivières, où les héroïques missionnaires venus de la France catholique dédièrent leur première chapelle permanente à l'Immaculée Conception de Marie. C'est en 1634 que Jérôme Lalement écrivait: « A la fête de la Conception de la Sainte Vierge, se firent les seconds baptêmes de seize personnes ... Il semble que nous avons tout sujet de reconnaître et de remarquer ce saint jour, destiné à la mémoire et à l'honneur de la première grandeur de cette Sainte Vierge, pour celui de la Naissance de cette nouvelle Eglise et du commencement du bonheur et de la bénédiction du pays. Nous avons bien raison de croire que celle-, en honneur de laquelle est consacrée cette Fête, a mis la main à cet ouvrage, et l'a conduit depuis, au point. . . que nous voyons de nos yeux, avec une consolation qui ne se peut expliquer » 3.

C'est votre partage, chers fils, de mesurer pleinement l'abondance de ces bénédictions qui dépasse tout ce qu'avaient jamais rêvé les glorieux fondateurs de votre Eglise. Bénédictions d'une foi qui n'a jamais défailli au cours des siècles ; d'une vie de famille, où les voix des nombreux enfants remplissent de joie la maison ; bénédictions d'un labeur probe, soutenu par la fidélité à la Messe et aux sacrements ; des vocations sacerdotales et religieuses qui sont le témoignage tangible d'un noble esprit de sacrifice et la garantie que l'oeuvre divine de la rédemption commencée par le Christ continuera, avec le secours de sa grâce, dans votre patrie et en terre de missions.

Votre beau pays, doté par le Créateur de ressources inestimables, terrain de rencontre où deux grandes cultures harmonisent leurs caractères propres, peut regarder avec confiance l'avenir. De même que chacun de vous a conscience de contribuer par son travail à la prospérité de sa patrie, quelles responsabilités ne portez-vous pas devant Dieu et l'Eglise ! A l'évolution rapide de la société et de ses institutions, doit correspondre sur le plan religieux un effort parallèle. Il importe que le chrétien soit présent là où s'exerce pour le bien une influence décisive. Attentif à suivre le mouvement des idées, il intervient à temps pour défendre et promouvoir les principes de la saine morale, appuyée et prolongée par les lumières de la Révélation ; dans la législation, les associations et mouvements professionnels et culturels, les moyens d'information, il veille à sauvegarder pleinement les droits et les prérogatives de la personne humaine vis-à-vis de sa destinée temporelle et éternelle.



1 Daprès le texte français et anglais des A. A. S., XXXXVI, I954, p. 49s * Epist. m feste Septem. Dolor B. M. V. - Ex. libr. Judith, 13, \,



Relations, Ed. Thwaites, vol. XVII, p. 33-34.

La Vierge Marie vous aidera dans cette tâche importante. Il vous suffira de la regarder, de la contempler longuement et de laisser jaillir de votre coeur les sentiments de louange et d'admiration que tout naturellement Elle inspire.

Le Pape poursuivit en langue anglaise :

Elevez donc vos âmes, chers fils, et que le Canada, d'une côte à l'autre et au-dessus des terres glacées du Nord répète comme un écho la louange et la prière de vos coeurs reconnaissants et aimants pour grossir le chant de vénération qui monte depuis trois siècles vers Celle que le Christ mourant nous donna comme mère. Elevez vos yeux pendant un moment de cette terre où croît le péché pour contempler la vraie et lumineuse pureté de la vie ; arrachez-vous un bref moment à la faiblesse de la nature humaine et rappelez-vous que chez un être, cette nature n'a jamais vacillé dans son ardent amour de Dieu, n'a jamais faibli dans sa complète union avec Jésus-Christ. La sainteté du Fils est inconcevablement au-delà et au-dessus de la sainteté de Sa mère : mais le développement de sa sainteté dépassa de si loin toutes les autres saintetés créées qu'elle s'isole en des hauteurs inaccessibles de splendeur devant les regards éblouis des saints et des anges.

Oh ! âme sans péché, pure et pleine de grâce ! Quand les hommes apprendront-ils à évaluer à leur juste valeur les dons de ce monde éphémère ; à comprendre que la Vérité est un bien beaucoup plus précieux que la richesse ; qu'une âme sanctifiée par l'amour de Dieu est un trésor plus grand que des empires ; qu'un monde hostile à Dieu a perdu son droit d'espérer en une paix durable, parce que la justice sans Dieu est un non-sens ?

Oh ! Marie, Vierge Mère de Dieu et notre Mère, acceptez l'hommage d'affection et de vénération que le Congrès des Trois-Rivières apporte à votre trône, au nom de tous les fidèles du Canada. Montrez-leur toujours le chemin qui conduit à l'union avec votre divin Fils ; protégez-les contre les esprits du mal qui sont aux aguets le long de la route, de sorte qu'un jour ils puissent rejoindre leur mère et toute la cour des cieux dans l'adoration du seul véritable Dieu pour toujours.

Le Pape acheva en langue française :

Que cette prière porte à la Vierge les souhaits que Nous formulons au terme de votre Congrès. Tandis que Nous invoquons les bénédictions du Ciel sur vous, Vénérables Frères, sur tous les prêtres, les religieux et les religieuses et sur tous les fidèles du Canada, Nous vous en donnons pour gage, dans toute l'effusion de Notre coeur paternel, Notre Bénédiction apostolique 4.


















LETTRE



DE LA SACRÉE CONGRÉGATION DU CONCILE SUR LA MODESTIE DU VÊTEMENT

(15 août 1954) 1


Cette lettre est adressée aux Evêques et traite de l'immodestie du vêtement.

Quand l'Auguste Pontife édicta qu'une Année Mariale serait célébrée par toute la terre, dans l'Encyclique pour le centenaire de la définition du dogme de l'Immaculée Conception de la Bienheureuse Vierge Marie 2, il exhorta les Evêques, tout le clergé et l'ensemble du peuple chrétien à travailler de plus en plus ardemment au renouveau des moeurs chrétiennes, sous la conduite et le patronage de la très aimante Mère de Dieu et de nous tous, pour que tous reproduisent, avec le plus grand zèle, en regardant filialement en elle, son image dans leur vie, chacun selon sa condition. Il proclama qu'il faut en premier lieu presser vivement « la jeunesse généreuse et inexpérimentée à grandir pure et intacte, et à ne pas laisser la fleur éclatante de son âge se corrompre, s'imprégner du souffle du siècle, se faner dans les vices ; à diriger et régler convenablement ses penchants déréglés et ses passions envahissantes, et — dans l'éloi-gnement de tous les pièges — à se détourner de ce qui est dommageable et mauvais, pour s'élever vers tout ce qui est saint, aimable, noble » 3.

Or, si ces exhortations du Pasteur Suprême ont provoqué des résultats salutaires non négligeables, il n'en faut pas moins déplorer qu'elles n'aient pas produit, en ce qui concerne les moeurs privées et publiques, tous les résultats souhaités par le Souverain Pontife.

Personne en effet n'ignore que surtout en cette période estivale se voient ça et là des spectacles qui ne peuvent pas ne pas offenser les yeux et les âmes de ceux qui n'ont pas négligé ou totalement méprisé la vertu chrétienne et la pudeur humaine. Non seulement sur les plages, non seulement dans les centres de tourisme à la campagne, mais presque partout, même par les rues de la ville ou du village, dans les lieux privés et publics, et assez fréquemment même dans les édifices consacrés à Dieu, s'est répandue une mode vestimentaire indigne et impudente ; et c'est surtout l'âme de la jeunesse, facilement infléchie au vice, qui se trouve en très grave péril de perdre son innocence, ornement le plus grand et le plus beau de l'âme et du corps. La parure féminine, si on peut l'appeler une parure, les vêtements des femmes « si on doit les appeler vêtements, car il n'y a rien en eux qui puisse protéger le corps ou même la pudeur »4, sont parfois tels qu'ils semblent plutôt rechercher l'impudeur que la pudeur.

Il s'y ajoute que tout ce qui se fait et se montre de mal et de honteux en privé et en public, les journaux, revues et brochures de toutes sortes le rapportent effrontément, les spectacles cinématographiques dans leurs salles très fréquentées le présentent sous les yeux de tous, dans l'éclat de la lumière mouvante, au point de troubler profondément par des séductions malsaines non seulement la jeunesse impressionnable et présomptueuse, mais aussi l'âge avancé. Il n'est personne qui ne voie combien grands sont les maux qui s'ensuivent, quels dangers considérables menacent les moeurs publiques. C'est pourquoi il est nécessaire et que la beauté de la chasteté mise en pleine lumière soit recommandée à tous, et que les séductions et attraits des vices soient réprimés et empêchés autant qu'on le peut, et enfin que tous soient rappelés aux bonnes moeurs avec la sévérité nécessaire ; car, comme le dit le plus grand orateur Romain : « Souvent nous voyons vaincus en chasteté ceux qui ne seraient vaincus d'aucune (autre) manière » 5.



1 D'après le texte latin des A. A. S., XXXXVI, 1954, p. 458.

2 Cf. Lettre Encyclique Fulgens Corona, A. A. S., XXXXV, 1953, p. 577 ; D< Pontificaux 2953, p. 371.

3 lbid., p. 588 ; Documents Pontificaux 1953, p. 385.



Il s'agit, comme chacun le voit, d'une question très grave, à laquelle est unie le plus intimement non seulement la vertu chrétienne, mais aussi la santé du corps, la force également et le progrès de la société humaine. C'est très justement qu'un très ancien poète a dit à ce sujet : « C'est le commencement de la débauche de dévêtir les corps en public » 6. On voit donc facilement qu'une affaire de cette importance n'intéresse pas seulement l'Eglise, mais aussi ceux qui tiennent le gouvernail de l'Etat, car eux aussi doivent désirer que les forces du corps, que les énergies de la vertu ne soient pas affaiblies et brisées.

Mais c'est à vous surtout « que le Saint-Esprit a placés comme Evêques pour conduire l'Eglise de Dieu » 7 qu'il appartient de considérer attentivement le mal et de procurer et favoriser de toutes vos forces tout ce qui concerne la protection de la pureté et le progrès des moeurs chrétiennes. « Puisque le Saint-Esprit introduit et consacré en nous a fait de nous tous le temple de Dieu, le gardien de son temple est la chasteté, qui ne permettra pas que rien d'impur ou d'impie y soit porté, pour que Dieu qui l'habite n'abandonne pas, offensé, une demeure souillée » 8. Or, tout le monde le voit aisément, la manière actuelle de se vêtir, surtout des femmes et jeunes filles, offense gravement la pudeur, cette « compagne de la pureté et dont la présence rend la chasteté plus sûre » '. Il est donc absolument nécessaire, d'avertir et exhorter toutes les catégories de citoyens, surtout la jeunesse, de la manière que vous jugerez la plus apte, d'éviter les occasions de ces dommages qui totalement contraires à la vertu chrétienne et civique, peuvent la mettre en très grave péril. « Combien belle est la pudeur et quelle splendide perle de vertu 10. » Qu'on ne l'offense donc pas, ni ne la viole par des séductions et agréments des vices qui suivent ce laisser-aller vestimentaire, ou par d'autres manières d'agir analogues rappelées plus haut et que tous les hommes de bien ne peuvent que déplorer.

L'Auguste Pontife souhaite vivement que cette entreprise soit commencée avec zèle surtout pendant l'Année Mariale en cours, et que particulièrement les Evêques ne négligent absolument aucun moyen de guérir ce mal ; que sous leur conduite éclairée, l'ensemble du clergé travaille, avec prudence, ardeur et persévérance, chacun dans son milieu, à cet heureux résultat ; que les pères et mères de famille par leur exemple d'abord, ensuite par des conseils opportuns, venant comme il convient chez des chrétiens d'une force d'âme austère, écartent leurs enfants de ces périls et ne se jugent satisfaits qu'à la vue de l'éclat brillant de la pureté aux fronts de leurs fils.

Que les militants de l'Action Catholique eux aussi se chargent comme d'une tâche principale de cette salutaire entreprise. Qu'ils veillent surtout à ce que tous ceux qui vivent dans leur intimité ou sont de quelque manière en relations avec eux, puissent voir resplendir dans leur manière de se vêtir et d'agir la beauté des moeurs chrétiennes ; que leurs yeux brillent de l'innocence intérieure de leur âme ; que leurs paroles et leurs actions répandent l'odeur de la vertu : alors seulement ils pourront en effet porter plus aisément les autres par leurs conseils persuasifs à se vêtir dignement et convenablement et à bien agir.

Puisse nous exaucer tous la Très Bienheureuse Vierge Marie, qui fut dès son origine exempte de la tache de tout péché, qui dans tout le cours de sa vie l'emporta sur tous par sa haute sainteté, et qui est notre Mère très aimante à tous.

Et que nous les obtienne de Dieu, la Bénédiction apostolique, gage des faveurs célestes et témoignage de paternelle bienveillance, accordée par le Très Saint-Père aux Evêques, à tout le clergé et l'ensemble du peuple chrétien, à ceux surtout qui donneront leur travail à cette oeuvre salutaire.



« Ennius, dans Cicerón : Tuse, 4, 33.

7 Act. Ap., 20, 28.

8 Tcrlullien, De cultu ferri., 2, i ; Migne, P. L., t. I, 1316.
' S. Ambroise, De off., 1, 20 ; Migne, P. L., t. XVI, 48.

»0 S. Bernard, Serm. LXXXVI, in Cani. ; Migne, P. L., t. CLXXXIII, p. 135.





















CONSTITUTION APOSTOLIQUE CRÉANT LA MISSION DE FRANCE

(25 août 1954) 1


Une Constitution Apostolique « Omnium ecclesiarum » fixe le statut de la Mission de France :

Le souci de toutes les Eglises qui Nous presse en vertu de Notre charge apostolique, Nous demande de promouvoir par les moyens les plus efficaces tout ce qui peut contribuer à l'extension de la religion catholique et au salut des âmes.

Aussi, poussé par les responsabilités de Notre ministère, Nous occupons-Nous des pays les plus lointains encore privés de la lumière de l'Evangile pour en confier le soin à des missionnaires, sans négliger pour autant l'ensemble des nations chrétiennes, faisant au contraire tous Nos efforts pour que chez elles demeure intègre et sans dommage la profession de la foi chrétienne.

Parmi ces nations, il Nous est agréable aujourd'hui de nommer la France à cause de sa noblesse et de la très profonde affection que Nous portons à cette Fille aînée de l'Eglise : alors que Nous n'avions pas encore été porté au suprême pontificat, dans un discours prononcé lors d'une légation solennelle, nous avons célébré les mérites singuliers que la France s'est acquis au cours des siècles dans le progrès de la foi catholique 2.

Ces mérites, Nous sommes heureux de les rappeler à nouveau au cours de l'Année Mariale. Quand Nous pensons au privilège unique de l'Immaculée Conception de la Bienheureuse Vierge

Marie, en ce centenaire, Notre esprit et Notre Coeur se tournent vers Lourdes où, quatre années après la définition du dogme, l'Immaculée Vierge elle-même a confirmé par des apparitions, des entretiens et des miracles la déclaration du Pontife suprême.

Et pourtant Notre inquiétude est profonde quand Nous réfléchissons à certaines circonstances qui affectent la religion en France, circonstances qui, déjà dans le passé, avaient fortement ému Nos Prédécesseurs. Qu'il suffise, à ce propos, de rappeler le nom immortel de Léon XIII et celui de Pie X que, avec un si grand bonheur et aux applaudissements du monde catholique, Nous avons inscrit au catalogue des saints.

En plusieurs documents des plus célèbres, ces Pontifes suprêmes ont abondamment loué le clergé français pour sa compétence et son zèle, surtout au moment où de grandes difficultés accablaient l'Eglise et qu'elle était affligée d'injustes angoisses.

Pour que la persévérance et le courage dans la défense des droits de l'Eglise ne diminuent d'aucune façon et pour que les fidèles ne dévient pas du droit chemin, les Pontifes suprêmes déjà nommés ont donné aux évêques de France des conseils pleins de sagesse qui, dans les circonstances actuelles, demeurent de la plus haute importance.

Il Nous plaît de rappeler les conseils paternels que Léon XIII, d'heureuse mémoire, dans une lettre écrite en français, le 8 septembre 1899, adressa avec beaucoup de sagesse aux prêtres de France préoccupés des intérêts de leurs contemporains 3.

Nous ne pouvons pas davantage passer sous silence les exhortations que le saint évêque de Rome, Pie X, animé d'un profond désir de tout renouveler dans le Christ, adressait dans un esprit quasi prophétique aux archevêques et évêques de France réunis à l'occasion du IIe Congrès des missions diocésaines :

« Nous ne voulons pas manquer de vous adresser les encouragements de Notre coeur paternel, persuadé qu'ils vous inciteront à redoubler de zèle pour une oeuvre dont les débuts ont déjà été très féconds pour la plus grande gloire de Dieu et le salut des âmes . . . Ayez donc profondément à coeur d'accroître le nombre des apôtres destinés à cette charge, si bien qu'aucune paroisse de vos diocèses ne soit trop longtemps privée de leur ministère. Nous n'ignorons certes pas qu'ils sont loin de manquer en France les hommes qui, à l'exemple des apôtres, occupés à l'oraison et au ministère de la parole, se dévouent tout entiers à la perfection des saints et à l'édification du Corps du Christ. Mais ils sont trop peu nombreux, vous le savez bien, pour parcourir toutes les paroisses et y instaurer les règles de l'Evangile. Aussi voudrions-Nous encore recommander avec instance à votre activité pastorale que chaque diocèse possède régulièrement instituée et munie comme il convient de tous les secours de la piété et de la doctrine, l'oeuvre si salutaire et si indispensable de formation et de direction des missionnaires diocésains.

» Certes, une telle entreprise n'est pas exempte des difficultés dues, soit au défaut des prêtres, soit au manque de ressources. Mais il s'agit, vous vous en rendez bien compte, d'une oeuvre si utile pour former les âmes à la piété qu'elle doit être votre oeuvre de prédilection 4. »

Les difficultés des circonstances, la malice des temps et des hommes, la diminution du nombre des prêtres et d'autres causes importantes et graves empêchèrent de mettre en pratique, autant qu'on l'aurait désiré, les conseils du Pontife suprême.

Aussi éprouvons-Nous encore aujourd'hui la douleur et le regret de voir tant d'hommes — et notamment parmi ceux qui gagnent leur pain de chaque jour dans les usines, les ateliers et les champs — trompés par les enseignements des matérialistes, abandonner presque entièrement les observances et les moeurs chrétiennes.

Or, il faut mener vite à l'unique bercail du Christ ces brebis qui s'égarent imprudemment.

Ce sera le principal travail des ministres sacrés qui ont des aptitudes et une préparation à ce ministère qui ressemble beaucoup au ministère des Missions ; qu'ils soient excellents dans la science comme dans la vertu requises, convenablement instruits des principes qui régissent les questions sociales, principes si souvent et si clairement enseignés par Nous comme par Nos Prédécesseurs et que, dépassant tous les intérêts terrestres, ils se donnent de tout leur coeur à cette haute fonction de l'apos-tolat.

Nous savons, certes, quelles grandes choses ont réalisées Nos vénérables Frères les archevêques et évêques de France, quelles épreuves ils ont eu à supporter et Nous connaissons leur compétence pastorale : aussi profitons-Nous de l'occasion qui Nous est offerte pour les en féliciter.

Ils sont résolument attachés aux dispositions qui ont toujours réglé l'exercice du saint ministère non moins qu'aux méthodes d'apostolat qui ont été approuvées. Pourtant, ils s'efforcent de mettre en pratique des remèdes et des moyens aussi nouveaux qu'adaptés et ils expérimentent des entreprises difficiles et variées plus en rapport avec les moeurs de la vie moderne et les nécessités du temps.

Telles sont les raisons pour lesquelles l'Association de clercs appelée « La Mission de France », a été fondée par les cardinaux et archevêques de ce pays et érigée en France il y a quelques années selon une formule que des Sacrées Congrégations Romaines, chacune selon sa compétence propre, ont approuvée ad experimentum, en accordant à cette Mission le droit de s'agréger des clercs et de les promouvoir aux Ordres sacrés, au titre particulier de « La Mission de France ».

L'expérience a porté ses fruits et leur qualité, mise en rapport avec le peu de temps écoulé, prouve l'utilité de la Mission ; mais l'expérience a aussi suggéré la nécessité de lui donner une Constitution juridique plus ferme qui réponde avec plus de précision aux principes et aux lois communes du droit d'où les institutions ecclésiastiques tirent leur solidité et leur progrès.

Sur la demande récente de Nos vénérables Frères dans l'é-piscopat déjà nommés, si profondément unis à Notre personne et à ce Siège apostolique, pour que rien ne manque de ce que Nous pouvons faire en vue de mieux pourvoir à la discipline des clercs et au salut des âmes Nous avons confié ce travail à Notre Sacrée Congrégation Consistoriale.

La proposition Nous ayant été faite par Notre Vénérable Frère Adéodat Jean Piazza, Cardinal de la Sainte Eglise, évêque de Sabine et Poggio Mirteto, secrétaire de cette Sacrée Congrégation Consistoriale, d'ériger et de constituer l'Association de clercs réguliers que l'on appelle « La Mission de France », en prélature nullius, ayant son propre territoire et son prélat Ordinaire, Nous avons, après mûre réflexion, approuvé ce projet et ordonné de le réaliser.



* A. A. S., 3, îoii, p. 268.

C'est pourquoi, agréant avec bienveillance les demandes que Nous avait présentées Notre cher Fils Achille Liénart, Cardinal de la Sainte Eglise romaine, évêque de Lille, président du Conseil ou Commission épiscopale préposé à la direction de « La Mission de France », après avoir reçu le voeu favorable de Notre Vénérable Frère Paul Marella, archevêque titulaire de Doclée, Notre Nonce en France, et avec le consentement de Notre Vénérable Frère Frédéric, Edouard-Camille Lamy, archevêque de Sens, suppléant au consentement de toutes les personnes qui auraient ou présumeraient avoir quelque droit à intervenir dans cette affaire, désirant très vivement que cela soit bon, heureux et salutaire, et soit profitable au salut des âmes et à « La Mission de France », Nous décrétons et ordonnons ce qui suit :


Pie XII 1954