Pie XII 1958 - DISCOURS A DES OUVRIERS ITALIENS


DISCOURS A LA COMMISSION INTERNATIONALE POUR L'IRRIGATION ET LE DRAINAGE

(8 mai 195S) 1


Recevant en audience spéciale les participants à la neuvième réunion du Comité directeur international de la Commission pour l'Irrigation et le Drainage, le Souverain Pontife a prononcé en anglais quelques mots d'encouragement, dont voici la traduction :


Nous sommes très heureux, Messieurs, de pouvoir répondre, ce matin, à votre demande d'audience, et de vous adresser quelques mots d'encouragement pour le travail que votre Commission ne cesse d'accomplir en faveur du prochain.

Irrigation et Drainage : voilà des mots qui semblent plutôt matériels et prosaïques ; ils signifient pourtant cette part de l'effort humain qui cherche à rendre meilleure la fécondité naturelle du sol, d'où dépend, dans une certaine mesure, la santé physique, comme le bien-être social et, partant, moral de beaucoup d'hommes. Le caractère vraiment international de votre Commission prouve assez que les problèmes dont vous vous occupez existent partout, et que partout aussi se fait sentir la nécessité de ces vastes projets techniques, que vous êtes si heureusement en train de concevoir et de réaliser.

1 Traduction française d'après le texte anglais de l'Ossertïflfore Romano, éd. quot., du 10 mai 105S.




L'art de l'irrigation, avec son complément nécessaire, le drainage, remonte à des milliers d'années, aux temps lointains où l'homme se mit à exploiter les sources d'eau, pour rendre la terre plus féconde selon le caractère du sol et les exigences d'une agriculture bien établie. Ainsi, les richesses naturelles que la Bonté infinie de Dieu a créées en si grande abondance

pour la créature raisonnable, ont pu rendre service à un plus grand nombre d'hommes ; la misère humaine s'en trouve soulagée, la vie familiale et civique, grandement facilitée. Voilà les nobles résultats auxquels peuvent prétendre les travaux de votre Commission. Que Dieu les rende fructueux ! Que ses Bénédictions enrichissent vos propres vies et la vie de ceux qui vous sont chers !


DISCOURS A DES SPÉCIALISTES DU THORAX

(12 mai 1958) 1






Le Saint-Père a reçu en audience un groupe de chirurgiens spécialistes du thorax, venus de Grande-Bretagne pour visiter quelques cliniques en Italie.

Voici la traduction française du bref discours que le Pape prononça en anglais à cette occasion :

Vous êtes les bienvenus, Messieurs, chirurgiens spécialistes venus d'Angleterre.

Une note caractéristique est toujours attachée à une audience accordée à des membres de la profession médicale. C'est comme si l'on soulevait le voile cachant les demandes quotidiennes d'un monde tourmenté et que s'ouvrait une vision universelle de souffrance et d'héroïsme, d'abandon et de générosité, de misère humaine et de dévouement personnel aux besoins de cette enveloppe mortelle qui enferme sur cette terre une âme immortelle ; et le cceur est animé d'une bienfaisante sympathie par cette vision, tandis que grandissent la confiance et la fierté pour la bonté sincère et dévouée de l'homme.

La scène évoquée est une de celles qui sont familières à l'Eglise et elle n'est jamais absente de ses pensées. Avec la sollicitude d'une mère et sous l'inspiration active de son divin Fondateur, son amour est toujours allé de façon spéciale aux malades et aux infirmes en cherchant à alléger leurs souffrances autant que les moyens humains le permettent. N'émanait-il pas de Lui une vertu qui les guérissait tous (Lc 6,19) ? Et vous lisez que les apôtres partirent et allèrent de village en village, répandant partout la bonne nouvelle et multipliant les guérisons

(Lc 9,6). Les écoles de médecine de Padoue, de Bologne et de Paris ne témoignent-elles pas de l'intérêt de l'Eglise pour le progrès de la science médicale ; et n'est-ce pas sa sollicitude anxieuse et affectueuse pour les malades qui multiplia les hôpitaux au cours des siècles à travers l'Europe ? Vous penserez à vos propres hôpitaux de Saint-Thomas et de Saint-Barthélemy avec leur magnifique service pour les malades et le progrès de la science.

En d'autres occasions, Nous avons parlé assez longuement de la dignité de votre profession, du statut juridique du patient entre vos mains et des relations qui existent entre vous et lui. Avec leurs fondements enracinés dans la loi naturelle, ces relations seront respectées scrupuleusement à la lumière des préceptes moraux de cette loi. Un sens vivant de votre responsabilité à l'égard de l'individu et de la communauté stimulera votre étude constante complétée par une expérience clinique consciencieuse. Nous sommes sûr que le progrès sera développé par vos contacts avec vos collègues, ici à Rome, et Nous espérons qu'ils vous laisseront suffisamment de temps pour profiter du printemps romain. Nous implorons pour vous et pour ceux qui vous sont chers les plus hautes bénédictions de Dieu.


DISCOURS AUX DIRIGEANTS DU «NATO DEFENCE COLLEGE»

(16 mai 1958) 1






Recevant en audience un groupe de dirigeants du « Nato Defence Collège » le Souverain Pontife prononça un bref discours en anglais, dont voici la traduction :

Ce n'est pas la première fois que Nous recevons des membres du Collège de défense de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (O. T. A. N). Serait-ce que votre Collège prend un caractère permanent ? Il est vrai que saint Pierre a élevé la voix pour nous avertir d'avoir à être sobres et vigilants parce que notre adversaire rôde autour de nous comme un lion rugissant, cherchant qui dévorer (cf. 1P 5,8). Et saint Paul recommandait aux Ephésiens de revêtir l'armure de Dieu, afin de pouvoir résister aux embûches du diable. « Car nous n'avons pas à lutter contre la chair et le sang, mais..., contre les dominateurs de ce monde de ténèbres. » (Cf. Eph. Ep 6,11-12 Eph. )

Ils pensaient à la lutte de l'homme contre les ennemis de Dieu pour le salut de son âme immortelle. Cette lutte, dans le domaine de l'esprit, continuera jusqu'à la fin des temps, et il n'y a pas un jour, pas une heure où chaque homme ne doive être individuellement en état d'alerte pour se défendre lui-même s'il ne veut pas être vaincu. Le but de votre Collège de défense est tout à fait différent. Il vise à vous enseigner comment vous prémunir contre une attaque de vos semblables dans ce monde.

1 D'après le texte anglais des A. A. S., 50, 1058, p. 369 ; traduction française de la Documentation Catholique, t. LV, col. 709.




N'est-il pas triste de penser qu'une telle défense est né-

cessaire ? Que l'on voudrait dépouiller l'homme de ces droits qui ne sont que la fleuraison naturelle de la dignité innée de sa personne, infiniment surélevée par la valeur que lui a attachée le divin Rédempteur ? Ne s'attendrait-on pas à ce que tous les membres de la vaste famille humaine soient heureux de partager en commun leur droit personnel, antérieur à tout Etat, d'accomplir leurs devoirs sacrés envers leur Créateur, aussi bien que leur droit national de développer leur culture et leur caractère, libérés du spectre de la force hostile ?

Il faut regarder la réalité en face, répondra-t-on. Cela est certain, mais il faut la regarder à la fois avec confiance et dans la raisonnable perspective optimiste que l'on travaillera à l'avènement de ce jour où la protection et la défense pourront être assurées avec un minimum de force et où la vérité et la justice égale pour tous, indiqueront le chemin que suivront sans défaillir ceux dont le grave devoir est de conduire les peuples à ce but suprême qu'est une paix durable. Vérité et justice égale pour tous, quelle chose précieuse et noble, mais aussi combien ces mots sonnent creux pour ceux qui ne croient pas en Dieu.

Puisse Dieu hâter l'aube de ce jour où tous les hommes lui rendront l'hommage de leur foi et de leur amour. Ils forgeront le maillon qui les unira les uns aux autres dans l'harmonie et la paix.

Dans la pleine confiance que vous désirez et vous proposez résolument de faire progresser la cause de cette paix authentique, Nous sommes heureux, Messieurs, d'invoquer la Bénédiction de Dieu sur vous et ceux qui vous sont chers.


DISCOURS AUX ASSISTANTES SPIRITUELLES DES FORCES ARMÉES D'ITALIE

(20 mai 1958) 1






Recevant en audience spéciale les dames patronnesses romaines de VAssistance spirituelle aux Forces armées d'Italie, le Saint-Père a prononcé un discours en italien, dont voici la traduction :

Soyez les bienvenues, chères filles, dames patronnesses de l'assistance spirituelle des Forces armées d'Italie. Votre travail, souvent silencieux et discret, mais toujours empreint d'une véritable charité chrétienne, vous conduit souvent auprès des soldats pour leur apporter tous les réconforts humains et, surtout, pour contribuer à la conservation et à l'accroissement de la grâce divine dans leurs âmes, en une période particulièrement délicate de leur vie.



L'Eglise et le problème de la guerre.

1. — Vous savez que l'Eglise n'accepte pas la doctrine de ceux qui croient que l'humanité est gouvernée par la loi du bellum omnium contra omnes, de même qu'elle rejette la théorie qui considère la force comme unique fondement des relations entre les Etats. La guerre, pour l'Eglise, n'est pas « creuset de vertus viriles » et encore moins « promotrice d'initiatives fécondes » : la guerre ne coopère pas du tout au progrès de la civilisation, même si elle est parfois une occasion et un stimulant pour le développement de la science et de la technique. La guerre n'est pas pour l'Eglise un droit juridique qui demeure





tel dans n'importe quelle hypothèse. Parce que le christianisme considère l'humanité comme une unique grande famille, il doit être fermement contraire à la guerre d'agression ; ce sera toujours une horrible nouvelle que des frères tuent leurs frères ; et celui qui l'annonce, comme celui qui l'apprend, doit nécessairement en être rempli d'effroi.

Mais si l'Eglise refuse d'admettre toute doctrine qui estime que la guerre est un effet nécessaire de forces cosmiques, physiques, biologiques ou économiques, elle est tout aussi opposée à admettre que la guerre soit toujours condamnable. Puisque la liberté humaine est capable de déclencher un conflit injuste au détriment d'une nation, il est certain que celle-ci peut, dans des conditions déterminées, se dresser en armes et se défendre.

Avec le combat de Caïn et d'Abel — deux frères, dont l'un était l'agresseur et l'autre la victime — commença l'histoire des batailles et des guerres ; histoire de sang et de larmes ; histoire de destructions et de mort.

Pour la possession d'une grotte ou d'un fleuve, pour s'emparer d'un bois ou pour le vol de têtes de bétail, les hommes des cavernes se combattirent ; puis ce furent des visées différentes et plus complexes qui causèrent les chocs ; jusqu'à l'envie effrénée de domination, jusqu'à la volonté perverse de subvertir tout ordre, de fouler aux pieds toute valeur humaine et divine. Tout d'abord ce fut une lutte d'homme à homme ; puis une bataille entre tribus ; ensuite une guerre entre diverses cités. Aujourd'hui la lutte ne se circonscrit pas aux combats entre des masses d'hommes armés, mais elle s'élargit jusqu'à devenir un conflit entre des peuples, dans lequel sont mobilisées toutes les énergies physiques et morales, toutes les ressources économiques et industrielles. Il n'y a plus de champ de bataille limité ; tout le territoire de l'Etat est territoire de guerre, et les armes prêtes à servir sont d'une puissance inimaginable. Le problème de la défense nationale prend donc une importance de plus en plus grande, égale à la complexité et à la difficulté de sa solution. C'est pour cela qu'aucune nation, qui veut pourvoir, comme c'est son droit et son devoir imprescriptibles, à la sécurité de ses frontières, ne peut se passer d'une armée proportionnée à ses besoins, à laquelle ne manque rien de ce qu'exige une action hardie, prompte et vigoureuse pour défendre la patrie, si elle était injustement menacée et attaquée.

Il n'y a point d'homme honnête qui puisse douter aujourd'hui de la volonté de paix qui anime l'Italie. Mais si tous les peuples aspirent indistinctement à la paix, ceux qui dirigent le sort de ces peuples peuvent, aujourd'hui comme hier, devenir la proie de passions aveugles et insensées et déclencher encore une fois — ce qu'à Dieu ne plaise — d'immenses conflits.

L'Italie doit donc avoir son armée, qui sera contraire à toute agression injuste, mais se tiendra prête, par son état d'esprit, par sa préparation technique et par le nombre et la qualité de ses armes, à toute action nécessaire et opportune de défense.



Le rôle délicat et nécessaire de l'aumônier à la caserne.

2. — C'est ainsi que passent dans les casernes d'Italie presque tous les jeunes gens jugés aptes, qui sont dans la pleine vigueur de leurs forces et dans la fleur de leur âge. Beaucoup d'entre eux se sont éloignés pour la première fois de leur village natal, quittant leurs demeures, leurs parents : ils se trouvent alors en des lieux lointains et portent un uniforme qui les rend tous égaux et les fait fraterniser dans les habitudes et dans la vie : une vie qui n'est certainement pas facile, parce que les sacrifices, les privations sont de chaque jour, de chaque heure. Certes, si une telle vie était vécue avec enthousiasme et pas seulement supportée d'un cceur inquiet, elle produirait de bienfaisants effets pour la santé physique et pour un développement humain complet et organique. Ainsi de nombreux jeunes gens, partis de chez eux pour ainsi dire gauches et incapables d'affronter la vie dans son activité complexe et multiforme, sont revenus après le service militaire avec une assurance de caractère, une maturité de comportement, une capacité de vivre, qui ont étonné et réjoui tous ceux qui les connaissaient et les aimaient.

Il serait toutefois inutile et même profondément nuisible de cacher une autre réalité, qu'il est permis à tous d'observer dans sa brutalité. Vous le savez mieux que d'autres, chères filles. Très souvent, quand les jeunes partent de chez eux, ils sont salués par une mère angoissée, par une soeur, peut-être même une fiancée, inquiète et en larmes. Ce jeune homme est pieux, il est simple ; il s'est conservé bon et aucune mauvaise habitude ne l'a encore enchaîné, aucun vice ne l'a enroulé dans ses anneaux. Que lui arrivera-t-il donc désormais à la caserne ? Là, tous ne sont pas pieux, tous ne sont pas purs ; là, il n'est assurément pas facile, parfois même il n'est pas possible, d'éviter la compagnie des méchants. Qu'arrivera-t-il à ce jeune homme pendant tout le temps où il sera contraint à vivre au milieu du tumulte, de l'agitation, des fausses lumières d'une ville pleine d'embûches et de tentations ?

L'affermissement de la santé physique et le développement humain devront-ils donc être acquis au prix de l'affaiblissement ou même de la perte de la vie divine ? Voilà le problème — un problème très grave et urgent — de l'assistance spirituelle des Forces armées. Voilà en premier lieu la nécessité de prêtres expérimentés qui connaissent l'esprit des soldats, leurs aspirations et exigences, leurs dangers et leurs tentations ; de prêtres paternels, pleins de compréhension humaine et, en même temps irréprochables dans leur vie et ardents dans un zèle apostolique éclairé. Voilà les aumôniers, auxquels les rigueurs de la vie militaire ne doivent pas enlever la douceur paternelle naturelle, de même que la liberté de mouvements ne leur enlève pas la réserve indispensable. Se rendre compte de la valeur de cette vie commune entre le prêtre et les jeunes gens pendant la période la plus délicate et la plus dangereuse, cela signifie être convaincu que les aumôniers militaires devront être choisis parmi les prêtres les meilleurs et préparés par tous les moyens ; cela signifie que l'on admet que leur travail, vraiment ardu, est parmi les plus urgents et les plus importants. En effet une si grande partie de la jeunesse d'Italie passe entre leurs mains et peut recevoir un bienfait de leur âme sacerdotale et de leur fervent apostolat.



Bienfaits d'une assistance maternelle aux jeunes soldats.

3. — A côté des aumôniers, il y a vous aussi, chères filles, membres du Patronage pour l'assistance spirituelle des Forces armées d'Italie. Si les aumôniers représentent en quelque sorte les curés lointains, vous tenez le rôle des mères et des soeurs. Votre collaboration s'est tant de fois révélée d'une efficacité peu ordinaire pour maintenir éveillée la flamme de la foi dans le coeur des jeunes gens appelés sous les armes ; c'est là le mérite de votre esprit d'abnégation et de votre action maternelle et fraternelle aussi discrète qu'affectueuse. Avec votre aide, des âmes jusqu'alors incrédules sont ainsi venues à la foi ; des coeurs demeurés éloignés sont revenus à la pratique. En lisant les rapports sur votre activité, Nous avons appris que des premières communions ont été reçues, des confirmations administrées ; l'accomplissement du précepte pascal organisé et rendu émouvant jusque dans sa digne simplicité. Les mariages régularisés ne manquent pas et il y a toute une floraison d'oeuvres bienfaisantes en faveur des détenus en prison, parfois aussi à l'avantage des familles de militaires, qui se sont trouvées privées de leur soutien presque unique.

Nous vous félicitons donc vivement, chères filles. Que le Seigneur vous bénisse et vous soutienne dans ce travail consolant. Nous prions afin que le nombre des dames patronnesses augmente et que grandisse de plus en plus votre esprit de dévouement maternel à l'assistance des soldats d'Italie. Cette Italie qui est bien-aimée de Dieu, et, pour cela, objet d'attaques particulières de ses ennemis. Cette Italie, qu'il faut certainement défendre contre toute attaque matérielle possible, mais aussi sauver des embûches spirituelles. Cette Italie pour laquelle Nous demandons au Seigneur prospérité et paix, lumière de foi et certitude de vie divine.


PRIÈRE POUR LES MISSIONS INTÉRIEURES

(21 mai 1958) 1






Voici la traduction française, d'après le texte original italien, d'une prière composée par le Saint-Père pour les Missions intérieures :

O Jésus, Missionnaire divin qui, brûlant de zèle pour la gloire de votre Père et la rédemption des âmes, avez daigné, au temps de votre vie mortelle, vous faire le héraut et le propagateur de ce royaume de sainteté et de grâce, qui devait être pour l'humanité une arche de miséricorde et de salut, écoutez les supplications que nous vous adressons, nous vos indignes ministres, appelés à continuer votre mission, et nous aussi, simples fidèles, désireux d'éprouver les salutaires effets de ces journées consacrées à la réconciliation et à la sanctification.

A nous, missionnaires, accordez un rayon de votre Esprit, qui nous enseigne à nous immoler sans réserve, à être compré-hensifs et paternels sans faiblesse, fermes et résolus sans dureté, discrets et prudents sans vaines craintes du monde et de ses jugements. Répandez sur nous votre lumière, afin de découvrir les besoins des hommes et des peuples ; votre ardeur et votre force, afin de ne pas reculer devant la froideur et les obstacles ; la très douce efficacité de votre grâce, afin d'émouvoir les coeurs et de les guider avec mansuétude jusqu'à vos pieds divins. A cet effet, accordez-nous avant tout le don précieux de votre amour, de cet amour pour vous, pour l'Eglise, pour les âmes, qui doit être à tout moment le motif de nos entreprises et la source principale d'énergie pour les mener à bonne fin.

1 D'après le texte italien des' A. A. S., 50, 1958, p. 490 ; traduction française de la Documentation Catholique, t. LV, col. 711.




Et à nous, fidèles, qui attendons de cette sainte mission un profond renouvellement spirituel en chacun, dans les familles et dans la société, faites que nous ne manquions pas de la véritable humilité, nécessaire pour écouter et accueillir avec soin les enseignements qui nous sont donnés ; de la sincérité, en nous les appliquant réellement à nous-mêmes ; de la droiture d'intention dans la volonté de réformer sérieusement notre vie, de manière que le lendemain soit meilleur et plus saint qu'hier et qu'aujourd'hui. Nous vous demandons, Seigneur, de nous pardonner nos péchés et de nous accorder une bénédiction qui consolide et féconde nos résolutions ; enfin de diriger si sûre-met notre vie que jamais nous ne nous éloignions de vous.

Saints, qui dans de semblables exercices spirituels vous êtes sanctifiés, venez à notre aide ! Et vous, Mère de Dieu et notre Mère, daignez être présente à chacun des actes de cette mission, pour les sublimiser par votre très douce et très puissante intercession, afin que ceux qui, à présent, vous implorent avec une confiance filiale, puissent un jour être conduits par vous devant le trône de votre divin Fils, qui avec le Père et le Saint-Esprit vit et règne durant tous les siècles des siècles.

2 Notre Saint-Père le Pape Pie XII a daigné accorder une indulgence partielle de trois ans, que peuvent gagner soit les prêtres pendant le temps des missions qu'ils prêchent, s'oit les fidèles qui assisteront à leurs sermons, chaque fois qu'ils réciteront cette prière avec contrition et dévotion.




Ainsi soit-il2.


DISCOURS AUX DAMES DE LA COLONIE AMÉRICAINE DE ROME

(22 mai 1958) 1


Le Saint-Père a reçu en audience un groupe de dames de la Colonie américaine de Rome (Association Sainte-Suzanne), et leur a adressé un discours en anglais, dont voici la traduction :

Voici donc l'Association des Dames de Sainte-Suzanne, dont chacune est accompagnée de son propre petit groupe familial, semble-t-il. Vous êtes venues avec tout un précieux bagage de bonnes oeuvres, de charité pour les nécessiteux et de zèle pour la maison de Dieu, sous la conduite de votre vénéré pasteur. Par une discrétion et une considération admirables, vous vous êtes abstenues jusqu'à présent de demander à être reçues par Nous en audience spéciale, ce qui augmente la joie avec laquelle Nous vous accueillons ce matin. La renommée de votre apostolat vous a précédées et, pour Notre part, Nous désirons que vous le sachiez, c'est toujours une profonde consolation d'apprendre qu'ici, dans Notre propre diocèse, les laïcs sont empressés et généreux à collaborer avec les pasteurs de leurs âmes.

1 D'après le texte anglais de Discorsi e radiomessaggi, XX ; traduction française de l'Osservatore Romano, du 6 juin 1958.

2 A. A. S., XXXXIX, pp. 925-926 ; cf. Documents Pontificaux 1957, pp. 571-572.




L'an dernier, en une occasion plus solennelle, Nous avons déclaré que « ce serait méconnaître la nature réelle de l'Eglise et son caractère social que de distinguer en elle un élément purement actif, les autorités ecclésiastiques, et d'autre part un élément purement passif, les laïcs. Tous les membres de l'Eglise... sont appelés à collaborer à l'édification et au perfectionnement du Corps mystique du Christ » 2. Oui, l'appel du Christ à la sainteté personnelle et à un apostolat pour l'expansion de son royaume sur la terre s'adresse à vous aussi, chers fils et filles.

C'était au laïcat que saint Pierre écrivait : « Sanctifiez dans vos coeurs le Seigneur Christ. Soyez toujours prêts à répondre à quiconque vous demanderait compte de votre espérance » (I Pierre, ni, 15). Et encore : « Conduisez-vous bien parmi les païens, afin que même sur les points où ils vous traitent calomnieusement de malfaiteurs, ils glorifient Dieu à la vue de vos bonnes oeuvres, au jour de sa visite » (ibid., 11, 12).

Dans cette leçon donnée par saint Pierre vous voyez décrit le premier pas dans votre apostolat. Il doit faire comprendre les raisons de votre foi et, ensuite, par votre conduite, rendre clair ce que ses enseignements doivent signifier pour chaque membre fidèle de l'Eglise. Et vous serez surpris d'apprendre combien le ministère sacerdotal est facilité par la vie catholique irréprochable des paroissiens. Un second pas vous sera indiqué par votre amour reconnaissant pour le divin Rédempteur, qui vous a fait le don inestimable de la foi. Il transformera les braises de votre zèle en un brûlant désir d'illuminer les vies de ceux qui sont dans la peine et dans la détresse, jusqu'à ce que leur courage soit restauré et qu'ils commencent à sentir de nouveau la douce main de leur Sauveur tendue pour les conduire hors des sombres chemins des épreuves de ce monde dans la lumière de la joie et de l'espérance pascales.

Nous sommes encore dans le temps de Pâques, aussi votre présence Nous rappelle les pieuses femmes de Jérusalem, qui furent les premières à accourir à la tombe du Christ pour rendre à son Corps l'hommage de leur profonde dévotion et affection. Le but de votre Association est de servir ce même Christ vivant maintenant dans son Corps mystique, qu'est l'Eglise. Laissez son amour éternel dégager le meilleur en vous de votre généreux dévouement à sa cause suprême pour conduire les hommes à Dieu, pour apporter Dieu aux hommes, de telle sorte que tous, unis dans le Christ, puissent vivre dans la charité, dans la paix et dans la joie.

Avec une affection reconnaissante, Nous donnons Notre Bénédiction apostolique à votre cher pasteur et à vous-mêmes, chers fils et filles, ici présents. Puisse-t-elle descendre sur tous les membres du « Ladies' Guild » et sur ceux qui vous sont chers comme un témoignage de Nos sentiments paternels et un gage de la grâce spéciale par laquelle l'amour et la puissance du Christ Notre-Seigneur puissent pénétrer et sanctifier tout votre apostolat.


LETTRE DE LA SECRÉTAIRERIE D'ÉTAT A LA Ville SEMAINE NATIONALE ITALIENNE D'INFORMATION PASTORALE (23 mai 1958)

1 Le 23 mai 1.938, par une lettre de S. Exc. Mgr Dell'Aequa, Substitut de la Secrétairerie d'Etat, le Saint-Père a fait parvenir ses directives à la VIIIe Semaine nationale italienne d'Information pastorale, qui s'est tenue en septembre de la même année, à Milan.

Voici la traduction française de ce document, rédigé en italien et adressé à S. Exc. Mgr Montini, archevêque de Milan :

La ville de Milan aura l'honneur et le mérite d'offrir l'hospitalité cette année, du 22 au 26 septembre, à la huitième Semaine nationale d'information pastorale, organisée par le Centre d'orientation pastorale en union avec l'Institut Pontifical de Pastorale de Rome.

Il était juste que le Centre d'orientation pastorale, inspirateur de ces Semaines, après avoir choisi pour elles comme sièges les principales villes d'Italie et désormais enrichi d'une longue expérience, vînt pour les sessions de cette année travailler pour ainsi dire chez lui.

1 D'après' le texte italien de l'Osservatore Romano, éd. quot., du 29 juin 1958 ; traduction française de l'Osservatore Romano, éd. hebd., du 18 juillet 1958.




D'autre part, le thème choisi pour cette VIIIe Semaine : « La communauté chrétienne et les lointains », tout en répondant à une sensibilité pastorale particulièrement vive de Votre Excellence Révérendissime, convient bien à l'archidiocèse ambro-sien, qui ne le cède à nul autre dans l'élan apostolique vers les lointains, par ses oeuvres de conquête dans les domaines les plus divers, culturel, social, missionnaire.

Il y a les lointains qui ignorent la Maison du Père parce que nés hors d'elle ; il y en a d'autres qui ont abandonné la Maison du Père ; il faut y conduire ou y ramener les uns et les autres ; c'est là l'éternelle mission conquérante de l'Eglise, son éternelle vocation missionnaire.

L'Eglise est essentiellement missionnaire.

« L'esprit missionnaire et l'esprit catholique — a dit le Souverain Pontife régnant — sont une seule et même chose. La catholicité est une note essentielle de la vraie Eglise : à un tel point qu'un chrétien n'est vraiment affectionné et dévoué à l'Eglise que s'il est également attaché et dévoué à son universalité, en désirant qu'elle enfonce ses racines et s'épanouisse dans tous les lieux de la terre. » Reprenant cette pensée d'un radio-message du 24 novembre 1946, dans la récente encyclique Fidei donum Sa Sainteté ajoutait : « Rien n'est plus étranger à l'Eglise de Jésus-Christ que la division ; rien n'est plus nocif à sa vie que l'isolement, le repli sur soi et toutes les formes d'égoïsme collectif qui font se refermer sur elle-même une communauté chrétienne particulière, quelle qu'elle soit »2.

Le danger d'un tel égoïsme est certes fort éloigné pour l'Eglise milanaise, qui pour la propagation de la foi dans le monde et les missions parmi les infidèles a donné et continue à donner tant de missionnaires. Il suffirait de rappeler, parmi les oeuvres, l'Institut Pontifical pour les Missions étrangères, à l'ombre duquel est née aussi l'Union missionnaire du clergé.

Parallèle à ce zèle missionnaire à l'égard des infidèles, il y a celui pour le retour des dissidents à l'unité de l'Eglise : la prière publique de l'Eglise ne dissocie jamais ces deux fins, en adressant à Dieu la supplication des litanies ut omnes errantes ad unitatem Ecclesiae revocare, et infideles universos ad Evangelii lumen perducere digneris 3.



Les causes de l'apostasie moderne et la nécessité d'un apostolat adapté.

2 Cf. Documents Pontificaux 1957, p. 171.

3 Litaniae Sanctorum.




C'est toutefois sur un autre plan que s'oriente le thème de la prochaine Semaine, qui concerne plutôt le retour à la Maison du Père de ceux qui y sont nés, en envisageant le problème posé par la douloureuse question de l'apostasie à l'égard du Christ et de son Eglise de la part d'une si grande fraction de la société moderne.

Les origines de cette apostasie théorique, outre que pratique, doivent être recherchées dans l'éloignerruent des courants de la pensée et des divers aspects de la culture par rapport aux vérités chrétiennes. La rupture de l'unité chrétienne en Europe, l'athéisme scientifique, le rationalisme, l'illuminisme, le laïcisme, le matérialisme 'dialectique, la franc-maçonnerie sont quelques-unes des causes de ce lent processus d'égarement intellectuel et moral, dont nous voyons aujourd'hui les conséquences ultimes. Rétablir le contact vivant de la pensée chrétienne avec la culture moderne est, aujourd'hui, une des tâches les plus graves du sacerdoce et du laïcat catholique : une tâche qui trouve même dans l'égarement extrême des intelligences une disposition favorable dans la soif inextinguible de vérité, qui rend l'esprit humain prêt à accueillir les certitudes consolantes de la synthèse chrétienne du savoir. On n'a peut-être jamais constaté autant qu'aujourd'hui la nécessité morale de la Révélation, dont parle le concile du Vatican, autant pour la recherche des vérités naturelles suprêmes que pour la sécurité du processus rationnel de la pensée humaine en quête du vrai.

Il a paru nécessaire de rappeler ce genre d'apostolat, le premier dans l'ordre logique, même s'il s'agit d'une oeuvre de longue haleine et dont les fruits ne pourront être évalués qu'à longue échéance. Toutefois, la Semaine de Milan entend orienter l'étude et la discussion surtout sur les formes d'apostolat communément entendues, c'est-à-dire sur le moyen d'atteindre les différentes catégories de personnes qui, de fait, vivent loin de l'Eglise : les indifférents plutôt que les adversaires pour lesquels il existe en général des motifs ou prétextes idéologiques. Pour ne pas demeurer dans l'abstrait, on a voulu opportunément apporter dans le développement de la question île résultat des expériences déjà faites et des statistiques d'enquêtes, examiner la « sociologie des lointains », en étudier la psychologie et enfin les projets ou plans divers de conquête, de la structure paroissiale et du rayonnement conquérant de la paroisse à l'apostolat multiple des laïcs.

Le problème social et la pratique religieuse.

Le problème social, dans sa signification précise, dépasse le thème de la Semaine ; mais on ne doit pas oublier que beaucoup de ceux qui sont hostiles et qu'un très grand nombre d'indifférents le sont par suite d'une déplorable ignorance de la doctrine sociale de l'Eglise ou d'un manque non moins déplorable d'application de ses principes dans la réalité humaine concrète. Pour la conquête des lointains, surtout « dans le monde du travail », on ne peut faire abstraction de cela.

Les problèmes qui seront étudiés à la prochaine Semaine sont si vifs, graves et urgents et la préparation de celle-ci est si sérieuse que le Saint-Père ne doute pas de son utilité et de son heureux succès, et pense déjà au grand intérêt avec lequel il examinera, en temps voulu, les Actes de la Semaine.

Enfin celle-ci est la continuation et le complètement de celle de Florence en 1957 : si c'était la charité chrétienne qui se trouvait alors au centre de l'attention, il s'agit maintenant de la charité de l'Eglise envers les lointains : dans l'un et l'autre cas, on exalte la primauté de la charité. Dans le thème de cette année se dégage mieux la volonté universelle de salut de la part de Dieu, qui omnes homines vult salvos fieri et ad agnitionem veritatis venire (1Tm 2,4) ; et s'affirme mieux la sainte inquiétude de l'appel de saint Paul : Caritas Christi urget nos (2Co 5,14).

Au-delà de la communauté chrétienne organisée, le Cceur de Jésus voit d'autres âmes à sauver : alias oves habeo, quae non sunt ex hoc ovili (Jn 10,16). Le but de l'Eglise est de conduire ou de ramener ces brebis à l'unique vrai bercail : et fiet unum ovile et unus Pastor (ibid.). Fiat, fiat !

Avec ces pensées, ces sentiments et ces voeux, le Souverain Pontife envoie, en gage et présage d'une abondante grâce divine, à Votre Excellence Révérendissime, aux organisateurs de la huitième Semaine d'information pastorale et à tous ceux qui y prendront part, la Bénédiction apostolique.







Pie XII 1958 - DISCOURS A DES OUVRIERS ITALIENS