Discours 2005-2013 185

185 En vous souhaitant de poursuivre votre réflexion de manière fructueuse, j'invoque sur vous et sur votre travail la lumière de l'Esprit Saint et je vous donne à tous, en gage de ma confiance et de mon affection, la Bénédiction apostolique.

Mai 2006




VISITE AU SANCTUAIRE ROMAIN DE LA MADONE DU DIVIN AMOUR


AU TERME DE LA RÉCITATION DU ROSAIRE Lundi 1 mai 2006

Chers frères et soeurs,

C'est pour moi un motif de réconfort de me trouver aujourd'hui avec vous pour réciter le Saint Rosaire, en ce Sanctuaire de la Madone du Divin Amour, où s'exprime la pieuse affection à l'égard de la Vierge Marie, enracinée dans l'âme et dans l'histoire du peuple de Rome. Une joie particulière naît de la pensée de renouveler ainsi l'expérience de mon bien-aimé prédécesseur le Pape Jean-Paul II qui, il y a exactement 27 ans, le premier jour du mois de mai 1979, accomplit sa première visite en tant que Souverain Pontife à ce Sanctuaire.

Je salue avec affection le Recteur, Mgr Pasquale Silla, et je le remercie des paroles chaleureuses qu'il m'a adressées. Je salue également les autres prêtres Oblats Fils de la Madone du Divin Amour et les Soeurs Filles de la Madone du Divin Amour, qui se consacrent avec joie et générosité au service du Sanctuaire et de toutes ses multiples oeuvres de bien. Je salue le Cardinal Vicaire Camillo Ruini et l'Evêque auxiliaire du Secteur Sud, Mgr Paolo Schiavon, ainsi que vous tous, chers frères et soeurs, qui êtes ici si nombreux.

Nous avons récité le Saint Rosaire en parcourant les cinq mystères "joyeux", qui font revivre devant les yeux de notre coeur le début de notre salut, allant de la conception de Jésus par l'oeuvre de l'Esprit Saint dans le sein de la Vierge Marie, jusqu'à ce qu'on le retrouve, ayant atteint désormais l'âge de douze ans, dans le Temple de Jérusalem, alors qu'il écoutait et interrogeait les Docteurs. Nous avons répété et fait nôtres les paroles de l'Ange: "Je te salue Marie pleine de grâce, le Seigneur est avec toi", et également les phrases avec lesquelles sainte Elisabeth accueillit la Vierge, qui s'était rendue au plus tôt chez elle pour l'aider et la servir: "Tu es bénie entre toutes les femmes, et Jésus le fruit de tes entrailles est béni". Nous avons contemplé la foi docile de Marie, qui se fie sans réserve à Dieu et qui se remet totalement entre ses mains. Nous nous sommes nous aussi sentis, avec les pasteurs, proches de l'Enfant Jésus qui est couché dans une mangeoire et nous avons reconnu et adoré en Lui le Fils éternel de Dieu devenu, par amour, notre frère et ainsi également notre unique Sauveur. Nous sommes entrés nous aussi, avec Marie et Joseph, dans le Temple pour offrir l'Enfant à Dieu et accomplir ainsi le rite de la purification: c'est là que nous a été anticipé, à travers les paroles du vieux Siméon, en même temps que le salut, la contradiction et la croix, et cette épée qui, sous la croix du Fils, transpercera l'âme de la Mère et la rendra ainsi non seulement la Mère de Dieu mais également notre Mère commune.

Chers frères et soeurs, dans ce Sanctuaire nous vénérons la Très Sainte Vierge Marie sous le titre de la Madone du Divin Amour. C'est ainsi qu'est placé en pleine lumière le lien qui unit Marie à l'Esprit Saint, dès le début de son existence, lorsqu'au moment de sa conception l'Esprit, l'Amour éternel du Père et du Fils, établit sa demeure en Elle et la préserva de toute ombre du péché; puis, quand ce même esprit fit naître en son sein le Fils de Dieu; et aussi tout au long de sa vie, au cours de laquelle, avec la grâce de l'Esprit, s'est accomplie en plénitude la parole de Marie: "Me voici, je suis la servante du Seigneur"; et enfin lorsque, dans la puissance de l'Esprit Saint, Marie a été élevée avec toute son humanité concrète aux côtés de son Fils dans la gloire de Dieu le Père.

"Marie - ai-je écrit dans l'Encyclique Deus caritas est - est une femme qui aime [...] Comme croyante qui, dans la foi, pense avec les pensées de Dieu et veut avec la volonté de Dieu, elle ne peut être qu'une femme qui aime" (n. 41). Oui, chers frères et soeurs, Marie est le fruit et le signe de l'amour que Dieu a pour nous, de sa tendresse et de sa miséricorde. C'est pourquoi, avec nos frères dans la foi de chaque époque et de chaque lieu, nous nous adressons à Elle pour nos besoins et plaçons en elle nos espérances, dans les événements heureux et douloureux de la vie. En ce moment, ma pensée se tourne avec un profond sentiment de participation vers les familles de l'île d'Ischia frappée par la catastrophe qui a eu lieu hier.

Au cours du mois de mai se multiplie le nombre de ceux qui, des paroisses de Rome mais également de tant d'autres villes, viennent ici en pèlerinage pour prier, ainsi que pour profiter de la beauté et de la sérénité reposante de ces lieux. D'ici, de ce Sanctuaire du Divin Amour, nous attendons donc une aide et un soutien spirituel importants pour le diocèse de Rome, pour moi qui suis son Evêque et pour les autres Evêques qui sont mes collaborateurs, pour les prêtres, pour les familles, pour les vocations, pour les pauvres, les personnes qui souffrent, les malades, pour les enfants et les personnes âgées, pour toute la bien-aimée nation italienne. Nous attendons en particulier l'énergie intérieure pour accomplir le voeu prononcé par les Romains le 4 juin 1944, lorsqu'ils demandèrent solennellement à la Madone de Divin Amour que cette ville soit préservée des horreurs de la guerre et qu'ils furent exaucés: il s'agissait du voeu et de la promesse de corriger et d'améliorer leur conduite morale, pour la rendre plus conforme à celle du Seigneur Jésus. Aujourd'hui aussi, il est nécessaire de se convertir à Dieu, à Dieu Amour, pour que le monde soit libéré des guerres et du terrorisme. C'est ce que nous rappellent malheureusement les victimes, comme les militaires tombés jeudi dernier à Nassiriya, en Irak, que nous confions à l'intercession maternelle de Marie, Reine de la paix.

Chers frères et soeurs, de ce Sanctuaire de la Madone du Divin Amour je renouvelle donc l'invitation que j'ai formulée dans l'Encyclique Deus caritas est (n. 39): vivons l'amour et faisons de cette manière entrer la lumière de Dieu dans le monde. Amen!

SALUT AUX PARTICIPANTS À LA MARCHE COMMÉMORATIVE À L'OCCASION DU V CENTENAIRE DE LA GARDE SUISSE PONTIFICALE Place Saint-Pierre Jeudi 4 mai 2006

40506

Je suis heureux de vous adresser à tous mes salutations cordiales, chers amis, anciens Gardes Suisses et participants à la "marche" organisée à l'occasion du 500 anniversaire de la venue à Rome des 150 premiers "Gwardiknechte". En suivant le même itinéraire que celui parcouru il y a cinq cents ans, et en traversant Milan, Fidenza, Lucques, Sienne et Acquapendente, vous avez rejoint Rome et vous voici à présent sur cette Place Saint-Pierre que vous connaissez bien. Et c'est le Successeur du Pape Jules II, dont le nom est indissociablement lié au bien-aimé Corps de la Garde Suisse pontificale, qui vous accueille et vous présente ses salutations.

Chers anciens Gardes Suisses, à travers cette initiative significative, qui a débuté le 7 avril à Bellinzona et se termine aujourd'hui à Rome, vous avez voulu rendre hommage à vos prédécesseurs et dans le même temps, vous avez pu rendre grâce au Seigneur pour avoir personnellement appartenu au Corps de la Garde Suisse et vous avez ainsi renforcé également le lien qui vous unit à cette "famille" même à la fin de votre service. Vous avez voulu entreprendre ce long voyage comme un "pèlerinage" en suivant la célèbre "via Francigena", une voie suivie au Moyen-âge par les pèlerins qui de France se rendaient à Rome. Pendant votre voyage, au cours duquel vous avez parcouru à pied environ 720 km, vous avez pu traverser de nombreux villages et villes et informer les habitants sur votre histoire et leur faire ainsi connaître l'esprit qui anime le Corps de la Garde Suisse. D'une certaine manière, vous avez pu partager les sentiments des 150 premiers Gardes Suisses qui, le 21 janvier 1506, arrivèrent dans la Ville éternelle, revêtirent immédiatement les uniformes jaune et rouge, les couleurs de la famille Della Rovere, et le lendemain, en passant par la Porte du Peuple, traversèrent Campo de' Fiori et atteignirent la colline du Vatican. C'était le 22 janvier 1506, le jour de la création de la Garde Suisse pontificale.

Chers amis, je me réjouis avec vous de cette belle initiative qui rappelle à notre mémoire le courage de ces 150 citoyens suisses qui, avec une vaillante générosité, défendirent jusqu'à la mort la personne du Souverain Pontife, écrivant par leur sacrifice une page importante de l'histoire de l'Eglise. Embrassant du regard l'ensemble de ces cinq siècles, nous rendons grâce à Dieu pour le bien accompli par vos prédécesseurs et pour l'apport précieux que la Garde Suisse pontificale continue d'offrir au Saint-Siège encore aujourd'hui. Tandis que nous confions ceux qui sont morts à la miséricorde divine, nous invoquons sur ceux qui composent votre grande et méritante Association des Anciens Gardes la constante protection du Seigneur. Qu'il continue à guider vos pas et à soutenir de sa grâce toutes vos actions et qu'il anime de son Esprit les nombreuses initiatives que vous avez prises pour perpétuer et rendre féconde l'expérience particulière que vous avez faite dans la Cité éternelle, au service du Siège apostolique.

Avec ces sentiments, je donne à chacun de vous ici réunis, ainsi qu'aux personnes qui vous sont chères, une Bénédiction apostolique particulière.


AUX MEMBRES DE LA "PAPAL FOUNDATION" Salle Clémentine Vendredi 5 mai 2006



Chers amis dans le Christ,

En ce temps de joie où nous offrons nos actions de grâce et nos prières à Dieu pour la victoire du Christ sur le péché et sur la mort, je suis heureux de vous saluer, chers membres de la "Papal Foundation", à l'occasion de votre pèlerinage annuel à Rome. "A vous grâce et paix de par Dieu notre Père et le Seigneur Jésus Christ!" (Ph 1,2).

Notre foi pascale nous donne l'espérance que le Seigneur ressuscité transformera véritablement le monde. Dans sa résurrection, nous reconnaissons l'accomplissement de la promesse de Dieu au peuple d'Israël en exil: "Voici que j'ouvre vos tombeaux; je vais vous faire remonter de vos tombeaux, mon peuple, et je vous ramènerai sur le sol d'Israël" (Ez 37,12). En vérité, le Seigneur ressuscité donne une espérance et une force renouvelée à de très nombreuses personnes dans notre monde actuel, qui souffrent de l'injustice et des privations et aspirent à pouvoir vivre dans la liberté et la dignité des enfants de Dieu.

Le Christ a promis d'envoyer l'Esprit Saint pour enflammer les coeurs des croyants, en les poussant à aimer leurs frères et soeurs comme le Christ les a aimés, et à témoigner à travers leur action de charité de l'amour du Père pour toute l'humanité (cf. Deus caritas est ). L'on perçoit clairement le fruit de ce don de l'Esprit à travers l'assistance que la "Papal Foundation" accorde au nom du Christ aux pays en voie de développement, sous la forme de projets d'assistance, de subventions et de bourses d'étude. Je suis très reconnaissant de votre soutien et de l'aide que vous m'apportez dans l'accomplissement de ma mission en vue de prendre soin du troupeau du Christ partout à travers le monde.

187 Je vous assure que votre amour pour l'Eglise et votre dévouement dans la pratique de la charité chrétienne est profondément apprécié. Tandis que nous nous préparons à célébrer la grande effusion de l'Esprit de la Pentecôte, je vous encourage à poursuivre votre engagement généreux, afin que la flamme de l'amour divin continue de brûler et de briller dans les coeurs des croyants partout dans le monde. En vous confiant à l'intercession de la Bienheureuse Vierge Marie, Mère de l'Eglise, je vous donne de tout coeur ma Bénédiction apostolique, ainsi qu'à vos familles, en gage de joie et de paix dans le Sauveur Ressuscité.


AUX ÉVÊQUES DE LA RÉGION ECCLÉSIASTIQUE DU QUÉBEC EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM" Salle Clémentine Jeudi 11 mai 2006



Messieurs les Cardinaux,
Chers Frères dans l’Épiscopat,

Je suis heureux de vous accueillir, Pasteurs de l’Église dans la région ecclésiastique du Québec, venus accomplir votre visite ad limina et partager vos soucis et vos espérances avec le Successeur de Pierre et ses collaborateurs. Notre rencontre est une manifestation de la communion profonde qui unit chacun de vos diocèses avec le Siège de Pierre. Je remercie Mgr Gilles Cazabon, Président de l’Assemblée des Évêques catholiques du Québec, pour la présentation du contexte, parfois difficile, dans lequel se déroule votre ministère pastoral. À travers vous, je voudrais aussi saluer chaleureusement vos diocésains, prêtres, diacres, religieux, religieuses, laïcs, appréciant la part que de nombreuses personnes prennent à la vie de l’Église. Que Dieu bénisse les efforts généreux accomplis pour que la Bonne Nouvelle du Seigneur Ressuscité soit annoncée à tous !

Avec les trois autres groupes d’Évêques de votre pays, j’aurai l’occasion de poursuivre ma réflexion sur des thèmes significatifs pour la mission de l’Église dans la société canadienne, marquée par le pluralisme, le subjectivisme et un sécularisme croissant.

En 2008, alors que Québec célébrera le quatrième centenaire de sa fondation, votre région accueillera le Congrès eucharistique international. Aussi, voudrais-je tout d’abord inviter vos diocèses à un renouveau du sens et de la pratique de l’Eucharistie, par une redécouverte de la place essentielle que doit tenir dans la vie de l’Église «l’Eucharistie, don de Dieu pour la vie du monde». En effet, dans vos rapports quinquennaux, vous avez souligné la diminution notable de la pratique religieuse au cours des dernières années, relevant notamment que les jeunes sont peu nombreux dans les assemblées eucharistiques. Les fidèles doivent être convaincus du caractère vital de la participation régulière à l’Assemblée dominicale, pour que leur foi puisse grandir et s’exprimer de façon cohérente. En effet, l’Eucharistie, source et sommet de la vie chrétienne, nous unit et nous conforme au Fils de Dieu. Elle construit aussi l’Église, la consolide dans son unité de Corps du Christ; aucune communauté chrétienne ne peut s’édifier si elle n’a pas sa racine et son centre dans la célébration eucharistique. Malgré les difficultés de plus en plus grandes que vous connaissez, il est du devoir des Pasteurs d’offrir à tous la possibilité effective de satisfaire au précepte dominical et de les y inviter. Rassemblés en Église pour célébrer la Pâque du Seigneur, les fidèles puisent dans ce sacrement lumière et force afin de vivre pleinement leur vocation baptismale. De plus, le sens du sacrement ne s’épuise pas dans le moment de la célébration. «En recevant le Pain de vie, les disciples du Christ se disposent à aborder, avec la force du Ressuscité et de son Esprit, les tâches qui les attendent dans leur vie ordinaire» (Dies Domini, n. 45). Après avoir vécu et proclamé la présence du Ressuscité, les fidèles auront à coeur d’être évangélisateurs et témoins dans leur vie quotidienne.

Cependant, la diminution du nombre des prêtres, qui rend parfois impossible la célébration de la messe dominicale en certains lieux, met en cause de manière préoccupante la place de la sacramentalité dans la vie de l’Église. Les nécessités de l’organisation pastorale ne doivent pas compromettre l’authenticité de l’ecclésiologie qui s’y exprime. Le rôle central du prêtre qui, in persona Christi capitis, enseigne, sanctifie et gouverne la communauté, ne doit pas être minimisé. Le sacerdoce ministériel est indispensable à l’existence d’une communauté ecclésiale. L’importance du rôle des laïcs, dont je salue la générosité au service des communautés chrétiennes, ne doit jamais occulter le ministère absolument irremplaçable des prêtres pour la vie de l’Église. Ainsi, le ministère du prêtre ne peut être confié à d’autres personnes sans nuire de fait à l’authenticité de l’être même de l’Église. De plus, comment des jeunes pourraient-ils avoir envie de devenir prêtres si le rôle du ministère ordonné n’est pas clairement défini et reconnu?

Il faut toutefois relever comme un réel signe d’espérance la soif d’un renouveau qui se fait sentir chez les fidèles. Les Journées mondiales de la Jeunesse de Toronto ont eu un impact positif chez de nombreux jeunes canadiens. La célébration de l’Année de l’Eucharistie a permis un réveil spirituel, notamment par le développement de l’adoration eucharistique. Le culte rendu à l’Eucharistie en dehors de la Messe, étroitement relié à la célébration, est aussi d’une très grande valeur pour la vie de l’Église, car il tend à la communion sacramentelle et spirituelle. Comme l’a écrit le Pape Jean-Paul II, «si, à notre époque, le christianisme doit se distinguer surtout par ‘l’art de la prière’, comment ne pas ressentir le besoin renouvelé de demeurer longuement, en conversation spirituelle, en adoration silencieuse, en attitude d’amour, devant le Christ présent dans le Saint-Sacrement?» (Ecclesia de Eucharistia EE 25). De cette expérience, on ne peut que recevoir force, consolation et soutien.

La vie de prière et de contemplation, fondée sur le mystère eucharistique, se trouve aussi au coeur de la vocation des personnes consacrées, qui ont choisi la voie de la sequela Christi pour se donner au Seigneur avec un coeur sans partage, dans une relation toujours plus intime avec lui. Par leur attachement sans détour à la personne du Christ et à son Église, elles ont la mission particulière de rappeler à tous la vocation universelle à la sainteté.

188 Chers frères dans l’Épiscopat, l’Église est reconnaissante aux Instituts de vie consacrée de votre pays pour l’engagement apostolique et spirituel de leurs membres. Cet engagement s’exprime de bien des manières, notamment à travers la vie contemplative, qui fait monter vers Dieu une incessante prière de louange et d’intercession, ou encore dans le généreux service de l’activité catéchétique et caritative de vos diocèses, et par la proximité avec les personnes les plus défavorisées de la société, manifestant ainsi la bonté du Seigneur pour les petits et les pauvres. C’est dans cet engagement quotidien que se mûrit la recherche de la sainteté que veulent vivre les personnes consacrées, notamment à travers un mode de vie différent de celui du monde et de la culture ambiante. Toutefois, à travers ces engagements, il est primordial que, en ayant une vie spirituelle intense, les personnes consacrées proclament que Dieu seul suffit pour donner la plénitude à l’existence humaine.

Pour aider les personnes consacrées à vivre leur vocation spécifique dans une authentique fidélité à l’Église et à son magistère, je vous invite donc à porter une attention particulière à l’affermissement de relations confiantes avec elles et avec leurs Instituts. La vie consacrée est un don de Dieu au bénéfice de toute l’Église et au service de la vie du monde. Il est donc nécessaire qu’elle se développe dans une solide communion ecclésiale. Les défis auxquels la vie consacrée doit faire face ne peuvent être affrontés qu’en manifestant une unité profonde entre ses membres et avec l’ensemble de l’Église et de ses Pasteurs. J’invite donc les personnes consacrées, hommes et femmes, à faire grandir leur sens ecclésial et leur souci de travailler en relation toujours plus étroite avec les Pasteurs, accueillant et diffusant la doctrine de l’Église dans son intégrité et son intégralité. La communion ecclésiale, qui est fondée sur la personne même de Jésus Christ, exige aussi la fidélité à la doctrine de l’Église, notamment par une juste interprétation du Concile Vatican II, à savoir, comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, «dans une herméneutique de la réforme, du renouveau dans la continuité de l’unique sujet-Église, que le Seigneur nous a donné» (Discours à la Curie romaine, 22 décembre 2005). En effet, si nous lisons et recevons ainsi le Concile, «il peut être et devenir toujours davantage une grande force pour le renouveau, toujours nécessaire, de l’Église» (ibid.).

Le renouveau des vocations sacerdotales et religieuses doit aussi être un souci permanent pour l’Église dans votre pays. Une véritable pastorale vocationnelle trouvera sa force dans l’existence d’hommes et de femmes qui témoignent d’un amour passionné pour Dieu et pour leurs frères, dans la fidélité au Christ et à l’Église. Et l’on ne saurait oublier la place essentielle d’une prière confiante, pour créer une nouvelle sensibilité dans le peuple chrétien, qui permette aux jeunes de répondre aux appels du Seigneur. C’est pour vous et pour toute la communauté chrétienne un devoir primordial de transmettre sans peur l’appel du Seigneur, de susciter des vocations et d’accompagner les jeunes sur la voie du discernement et de l’engagement, dans la joie de se donner dans le célibat. Dans cet esprit, il vous revient d’être attentifs à la catéchèse dispensée aux enfants et aux jeunes, pour leur permettre de connaître en vérité le mystère chrétien et d’accéder au Christ. À ce sujet, j’invite donc l’ensemble de la communauté catholique du Québec à porter une attention renouvelée à son attachement à la vérité de l’enseignement de l’Église, en ce qui concerne la théologie et la morale, deux aspects inséparables de l’être chrétien dans le monde. Les fidèles ne peuvent pas, sans perdre leur identité propre, souscrire aux idéologies qui parcourent aujourd’hui la société.

Chers Frères dans l’épiscopat, à la fin de notre rencontre, je voudrais vous encourager vivement dans votre ministère au service de l’Église au Canada. Que le Christ ressuscité vous donne joie et paix pour guider les fidèles sur les chemins de l’espérance, afin qu’ils soient dans la société canadienne d’authentiques témoins de l’Évangile. À tous, je donne de grand coeur la Bénédiction apostolique.


À L'OCCASION DU XXV ANNIVERSAIRE DE LA FONDATION DE L'INSTITUT PONTIFICAL JEAN-PAUL II POUR LES ÉTUDES SUR LE MARIAGE ET LA FAMILLE Salle des Bénédictions Jeudi 11 mai 2006



Messieurs les Cardinaux,
vénérés frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,
chers frères et soeurs!

C'est avec une grande joie que je vous rencontre à l'occasion du XXV anniversaire de la fondation, au sein de l'Université pontificale du Latran, de l'Institut Jean-Paul II pour les études sur le mariage et la famille. Je vous salue tous avec affection et je vous remercie de la grande affection que vous m'avez démontrée. Je remercie de tout coeur Mgr Livio Melina pour ses aimables paroles et également pour le fait qu'il a abrégé son discours. Nous pourrons lire ce qu'il voulait nous dire, tout en ayant à présent davantage de temps pour nous manifester notre affection.

Les origines de votre Institut remontent à un événement très particulier: précisément le 13 mai 1981, Place Saint-Pierre, mon bien-aimé prédécesseur Jean-Paul II fit l'objet du grave attentat que l'on connaît lors de l'Audience au cours de laquelle il devait annoncer la création de votre Institut. Ce fait revêt une importance particulière dans la commémoration actuelle, que nous célébrons un peu plus d'un an après sa mort. Vous avez voulu le souligner à travers l'initiative opportune d'un Congrès sur: "L'héritage de Jean-Paul II sur le mariage et la famille: aimer l'amour humain". Vous sentez à juste titre comme vôtre cet héritage tout à fait particulier, car vous êtes les destinataires et les successeurs de la vision qui constitua l'un des axes portants de sa mission et de ses réflexions: le dessein de Dieu sur le mariage et la famille. Il s'agit d'un héritage qui ne constitue pas simplement un ensemble de doctrines ou d'idées, mais avant tout un enseignement doté d'une unité lumineuse sur le sens de l'amour humain et de la vie. La présence de nombreuses familles à cette audience - et donc pas seulement les étudiants actuels et du passé, mais surtout les étudiants de l'avenir - représente un témoignage particulièrement éloquent de la façon dont l'enseignement de cette vérité a été accueilli et a porté ses fruits.

189 L'idée d'"enseigner à aimer" accompagna déjà le jeune prêtre Karol Wojtyla et par la suite l'enthousiasma, lorsque, jeune Evêque, il affronta les moments difficiles qui suivirent la publication de l'Encyclique prophétique et toujours actuelle de mon prédécesseur Paul VI, Humanae vitae. Ce fut en cette circonstance qu'il comprit la nécessité d'entreprendre une étude systématique de ce thème. Cela constitua le fondement de l'enseignement qui fut ensuite offert à toute l'Eglise dans ses inoubliables Catéchèses sur l'amour humain. Ainsi étaient soulignés deux éléments essentiels, que vous avez tenté d'approfondir au cours des années et qui représentent la nouveauté même de votre Institut en tant que réalité académique ayant une mission spécifique au sein de l'Eglise.

Le premier élément est que le mariage et la famille sont enracinés dans le noyau le plus intime de la vérité sur l'homme et sur son destin. L'Ecriture Sainte annonce que la vocation à l'amour fait partie de l'image authentique de Dieu que le Créateur a voulu imprimer dans sa créature, l'appelant à devenir semblable à lui précisément dans la mesure où elle est ouverte à l'amour. La différence sexuelle qui caractérise le corps de l'homme et de la femme n'est donc pas une simple donnée biologique, mais revêt une signification bien plus profonde: elle exprime la forme de l'amour à travers laquelle l'homme et la femme, devenant - comme le dit l'Ecriture Sainte - une seule chair, peuvent réaliser une communion authentique de personnes ouvertes à la transmission de la vie et coopèrent ainsi avec Dieu à la génération de nouveaux êtres humains. Un deuxième élément caractérise la nouveauté de l'enseignement de Jean-Paul II sur l'amour humain: sa façon originale de lire le dessein de Dieu précisément dans la convergence de la révélation divine avec l'expérience humaine. En effet, dans le Christ, plénitude de la révélation d'amour du Père, se manifeste également la pleine vérité de la vocation à l'amour de l'homme, qui ne peut se retrouver totalement que dans le don sincère de soi.

Dans ma récente Encyclique, j'ai voulu souligner que précisément à travers l'amour, s'illumine "l'image chrétienne de Dieu, ainsi que l'image de l'homme et de son chemin, qui en découle" (Deus caritas est ). En d'autres termes, Dieu s'est servi de la voie de l'amour pour révéler le mystère intime de sa vie trinitaire. En outre, le rapport étroit qui existe entre l'image de Dieu Amour et l'amour humain nous permet de comprendre que "à l'image du Dieu du monothéisme correspond le mariage monogamique. Le mariage fondé sur un amour exclusif et définitif devient l'icône de la relation de Dieu avec son peuple et réciproquement: la façon dont Dieu aime devient la mesure de l'amour humain" (Ibid., n. 11). Cette indication demeure encore en grande partie à explorer. Voilà alors qu'apparaît le devoir que l'Institut pour les études sur le mariage et la famille possède au sein des structures académiques: illuminer la vérité de l'amour comme chemin de plénitude de toute forme d'existence humaine. Le grand défi de la nouvelle évangélisation, que Jean-Paul II a proposé avec un tel élan, a besoin d'être soutenu par une réflexion véritablement approfondie sur l'amour humain, dans la mesure où cet amour est précisément une voie privilégiée que Dieu a choisie pour se révéler lui-même à l'homme et que c'est dans cet amour qu'il l'appelle à une communion dans la vie trinitaire. Cette approche nous permet également de surmonter une conception reléguant l'amour à la sphère privée, aujourd'hui si diffuse. Le véritable amour se transforme en une lumière qui guide toute la vie vers sa plénitude, créant une société habitable pour l'homme. La communion de vie et d'amour qu'est le mariage se présente ainsi comme un bien authentique pour la société. Eviter la confusion avec d'autres types d'union fondées sur un amour faible apparaît aujourd'hui avec une urgence particulière. Seul le roc de l'amour total et irrévocable entre l'homme et la femme est capable de fonder la construction d'une société qui puisse devenir une maison pour tous les hommes.

L'importance que le travail de l'Institut revêt dans la mission de l'Eglise explique sa configuration: en effet, Jean-Paul II avait approuvé un seul Institut dans différents sièges présents sur les cinq continents, afin de pouvoir offrir une réflexion qui révèle la richesse de l'unique vérité dans la pluralité des cultures. Cette unité de vision dans la recherche et dans l'enseignement, malgré la diversité des lieux et des sensibilités, représente une valeur que vous devez protéger, en développant les richesses enracinées dans chaque culture. Cette caractéristique de l'Institut s'est révélée particulièrement adaptée à l'étude d'une réalité comme celle du mariage et de la famille. Votre travail peut montrer de quelle façon le don de la création vécu dans les différentes cultures a été transformé en grâce de rédemption par le Christ.

Pour pouvoir réaliser au mieux votre mission de fidèles héritiers du Fondateur de l'Institut, le bien-aimé Jean-Paul II, je vous invite à contempler la Très Sainte Vierge Marie, la Mère du Bel Amour. L'amour rédempteur du Verbe incarné doit se convertir pour chaque mariage et dans chaque famille en une "source d'eau vive au milieu d'un monde assoiffé" (Deus caritas est ). A vous tous, très chers professeurs, étudiants d'hier et d'aujourd'hui, employés, ainsi qu'à toutes les familles qui s'adressent votre Institut, je transmets mes voeux les plus cordiaux, que j'accompagne d'une Bénédiction apostolique particulière.


À LA COMMUNAUTÉ DU COLLÈGE "SANTA MARIA DELL'ANIMA" À L'OCCASION DU VI CENTENAIRE DE SON ÉRECTION CANONIQUE Vendredi 12 mai 2006



Chers confrères dans le sacerdoce,
chers membres du Collège "Santa Maria dell'Anima",
chers frères et soeurs!

La commémoration de l'érection canonique de Santa Maria dell'Anima, qui a eu lieu il y a 600 ans, vous conduit aujourd'hui dans la maison du Pape. Je vous souhaite donc à tous une cordiale bienvenue ici, au Vatican, et je salue en particulier le Recteur et les responsables de cet Institut pontifical. Ce qui a été commencé en 1406 avec la Bulle Piae postulatio de mon prédécesseur Innocent VII a porté des fruits abondants au cours des siècles: l'Institut Santa Maria dell'Anima était et reste la demeure des catholiques de langue allemande à Rome, de ceux qui visitent la Ville éternelle, et, surtout, d'un grand nombre constant de fidèles chrétiens de langue allemande qui vivent et travaillent ici. De même, le nom Anima évoque le collège des prêtres, dont les résidents étudient dans l'une des écoles supérieures pontificales de l'Urbs, et oeuvrent au sein de la Curie romaine au service de l'Eglise universelle. Je vous adresse à tous un "salut" cordial, ainsi que mes remerciements pour votre fidélité au Successeur de Pierre, que vous désirez renforcer à travers cette rencontre!

Dès le début, l'Institut "Santa Maria dell'Anima" a été caractérisé par deux signes distinctifs: la vénération de la Mère de Dieu, Marie, et l'union particulière avec le Saint-Siège, dont il dépend. Le fait que dans votre Institut et dans votre communauté, la Sainte Vierge soit vénérée sous le titre rare de "Santa Maria dell'Anima", mère des âmes, souligne deux aspects: Marie pose sa main précieuse sur l'âme des pèlerins, qui parcourent nombreux le chemin de la vie et pour lesquels Rome est devenue une étape importante et, dans de nombreux cas, déterminante. Dans le même temps, ce titre de Marie nous rappelle les défunts que, dans notre langue, nous appelons "pauvres âmes" et dont le souvenir nous rend conscients de notre mortalité et de notre destination éternelle à une vie dans la lumière et dans l'amour infinis de Dieu. Que Marie, notre Mère céleste, conserve sa main protectrice sur la vie paroissiale de la Communauté de "Santa Maria dell'Anima" et des membres du Collège!


Discours 2005-2013 185