Discours 2005-2013 21805

RENCONTRE AVEC LES ÉVÊQUES ALLEMANDS "Piussaal" (Salle Pie) du Séminaire de Cologne Dimanche 21 août 2005

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Chers et vénérés confrères!

Je désire avant tout exprimer ma grande joie que nous ayons encore eu la possibilité de nous voir et de passer encore un peu de temps ensemble après de belles journées, mais qui furent chargées, et d'avoir donc le bonheur de nous rencontrer. Bien que je ne sois, en réalité, qu'un ancien membre de la Conférence épiscopale allemande, je me sens encore uni à vous tous dans une union fraternelle, qui ne peut faire défaut.

Je désire ensuite remercier le Cardinal Lehmann pour ses paroles cordiales et les souligner dans l'esprit de ce que moi aussi j'ai dit aujourd'hui au terme de cette Célébration eucharistique: c'est-à-dire exprimer une fois de plus le grand "remerciement" que nous avons tous dans notre âme. Nous savons tous que tout le travail de préparation, les grandes choses qui ont été faites, ne suffisent pas à rendre possible tout cela, qui doit donc nécessairement être un don. Etant donné que personne ne peut simplement créer l'enthousiasme des jeunes, personne ne peut créer des jours entiers cette union dans la foi et dans la joie de la foi. Et, jusqu'aux conditions météorologiques, tout a été véritablement un don pour lequel nous rendons grâce au Seigneur et que nous interprétons également comme un devoir à faire notre part de travail afin que cet enthousiasme perdure et devienne une force pour la vie de l'Eglise dans notre pays. Je désire remercier à nouveau le Cardinal Meisner et ses collaborateurs pour le grand travail de préparation qu'ils ont accompli. Je désire en outre remercier le Cardinal Lehmann, ses collaborateurs et vous tous, car tous les diocèses ont coopéré à la réalisation de cet événement. Toute l'Allemagne a accueilli les pèlerins, s'est mise en route avec la Vierge et la Croix et a pu ainsi recevoir ce don. Je remercie également vivement pour cette statue, qui a encore besoin d'un peu de temps pour atteindre, pour ainsi dire, sa forme définitive. Mais je suis très content que saint Boniface se trouve à présent également chez moi et exprime ainsi de façon visible, à mon intention également, ce qui lui tenait particulièrement à coeur, c'est-à-dire l'union entre l'Eglise d'Allemagne et Rome. De même qu'il a guidé l'Eglise d'Allemagne vers l'unité avec le Successeur de Pierre, il me guide à présent moi aussi vers la communion fraternelle durable avec les Evêques d'Allemagne, avec l'Eglise qui est en Allemagne.

Le Saint-Père Jean-Paul II, le génial promoteur des Journées mondiales de la Jeunesse - une intuition que je considère être une inspiration - a montré que les deux parties donnent et reçoivent. Non seulement nous avons fait notre part de travail de la meilleure façon possible, mais les jeunes également, avec leurs questions, avec leurs espérances, avec leur joie dans la foi, avec leur enthousiasme à renouveler l'Eglise, nous ont donné quelque chose. Nous rendons grâce pour cette réciprocité et nous espérons qu'elle se poursuive, c'est-à-dire que les jeunes, avec leurs questions, leur foi et leur joie dans la foi, continuent à être pour nous un encouragement à vaincre notre pusillanimité et notre fatigue et nous pousse, à notre tour, avec l'expérience de la foi qui nous est donnée, à travers l'expérience du ministère pastoral, par la grâce du Sacrement dans lequel nous nous trouvons, à leur indiquer la route, afin que leur enthousiasme suive également un ordre juste. De même qu'une source doit être canalisée afin de pouvoir distribuer son eau de façon utile, ainsi, cet enthousiasme doit être également d'une certaine manière toujours façonné de nouveau dans sa forme ecclésiale.

Ici, en Allemagne, nous sommes habitués, et moi en particulier en tant que professeur, à voir surtout les problèmes. Toutefois, je considère que nous devrions admettre que tout cela a été possible parce qu'en Allemagne, en dépit de tous les problèmes de l'Eglise, en dépit de tous les aspects discutables qu'il peut y avoir, il existe véritablement une Eglise vivante, une Eglise qui possède de nombreux aspects positifs, dans laquelle tant de personnes sont prêtes à s'engager pour leur foi et à consacrer leur temps libre, également à donner de l'argent et un peu de leurs biens simplement pour y contribuer par leur existence. Il me semble que cela est devenu à nouveau visible pour nous: combien de personnes en Allemagne, en dépit de toutes les difficultés dont nous nous plaignons, sont croyantes aujourd'hui encore, constituent une Eglise vivante et rendent possible de cette façon qu'un événement comme les JMJ ait son propre contexte, son propre humus, dans lequel croître et prendre sa propre forme.

Je pense que nous devrions nous rappeler des nombreux prêtres, religieux et laïcs qui, fidèles à leur service, oeuvrent dans des conditions pastorales difficiles. Et il n'est pas besoin que je souligne la générosité, connue dans le monde entier, des catholiques allemands; une générosité qui n'est pas seulement matérielle, dans la mesure où il existe également de nombreux prêtres allemands "Fidei donum".

Je le constate dans les visites "ad limina": même en Papouasie-Nouvelle Guinée, dans les Iles Salomon et dans des régions auxquelles on ne penserait pas, oeuvrent des prêtres allemands qui répandent la semence de la Parole, qui s'identifient avec les personnes, et qui, dans ce monde menacé, dans lequel une grande part de choses négatives proviennent également de l'Occident, diffusent ainsi la grande force de la foi et avec elle, tout ce qu'il y a de positif dans ce qui nous est donné.

Le travail accompli par les nombreuses institutions caritatives est remarquable: de Misereor, Adveniat, Missio, Renovabis jusqu'aux Caritas diocésaines et paroissiales. L'oeuvre éducative des écoles catholiques et des autres institutions et organisations catholiques en faveur de la jeunesse est vaste, elle aussi. Je ne voudrais pas faire une liste exhaustive de tout ce qu'il y a de positif à dire, mais seulement y faire allusion, afin que ces aspects ne soient pas oubliés et nous donnent toujours courage et joie. Outre les aspects positifs, qu'il est important, je pense, de ne pas oublier et pour lesquels il faut toujours être reconnaissants, nous devons également admettre que sur le visage de l'Eglise universelle, comme de l'Eglise qui est en Allemagne, ne manquent pas, malheureusement, des rides et des ombres qui en obscurcissent la splendeur. Par amour et avec amour, nous voulons les évoquer, elles aussi, en ce moment de fête et d'action de grâce. Nous savons que sécularisation et déchristianisation continuent de progresser, que le relativisme s'accroît, que l'influence de l'éthique et de la morale catholiques est toujours moindre. Beaucoup de personnes abandonnent l'Eglise ou, si elles y restent, acceptent seulement une partie de l'enseignement catholique, choisissant uniquement certains aspects du christianisme. La situation religieuse demeure préoccupante à l'Est, où, comme nous le savons, la majorité de la population n'est pas baptisée et n'a aucun contact avec l'Eglise, et souvent, ne connaît ni le Christ, ni l'Eglise. Nous reconnaissons dans ces réalités autant de défis. Vous-mêmes, chers confrères, avez affirmé dans votre Lettre pastorale du 21 septembre 2004, à l'occasion du Jubilé de saint Boniface: "Nous sommes devenus une terre de mission". Cela vaut pour de vastes parties de l'Allemagne. C'est pourquoi je considère que dans toute l'Europe, et pas moins en France, en Espagne et ailleurs, nous devrions réfléchir sérieusement sur la façon dont nous pouvons réaliser aujourd'hui une véritable évangélisation, non seulement une nouvelle évangélisation, mais souvent une véritable première évangélisation. Les personnes ne connaissent pas Dieu, ne connaissent pas le Christ. Il existe un nouveau paganisme et il ne suffit pas de s'efforcer de conserver le troupeau existant, même si cela est très important; une grande question s'impose: qu'est-ce qu'est réellement la vie? Je crois que nous devons tous ensemble essayer de trouver de nouvelles façons de ramener l'Evangile dans le monde actuel, d'annoncer de nouveau le Christ et d'établir la foi.

Ce panorama que la Journée mondiale de la Jeunesse ouvre devant nous et que je n'ai indiqué qu'à grands traits, nous invite à projeter notre regard vers l'avenir. Les jeunes constituent pour l'Eglise, et en particulier pour nous pasteurs, pour les parents et pour les éducateurs, un appel vivant à la foi. Je voudrais dire encore une fois qu'il me semble que cela a été une grande inspiration de la part du Pape Jean-Paul II d'avoir choisi pour ces JMJ le thème "Nous sommes venus l'adorer" (
Mt 2,2). Parfois, nous sommes tellement oppressés, à juste titre oppressés, par les immenses nécessités sociales du monde, par tous les problèmes d'organisation et les problèmes structurels qui existent, qu'il peut arriver que l'adoration soit mise de côté comme quelque chose à reporter à plus tard. Le Père Delp a affirmé un jour que rien n'est plus important que l'adoration. Il l'a dit dans le contexte de son époque, lorsqu'il était évident que la destruction de l'adoration détruisait l'homme. Toutefois, dans le nouveau contexte de l'adoration perdue, et donc du visage perdu de la dignité humaine, c'est à nouveau à nous qu'il revient de comprendre la priorité de l'adoration et de rendre les jeunes, nous-mêmes et nos communautés conscientes du fait qu'il ne s'agit pas d'un luxe de notre époque confuse, que l'on ne pourrait peut-être pas se permettre, mais au contraire d'une priorité. Là où il n'y a plus d'adoration, là où l'hommage à Dieu n'est plus rendu comme priorité, les réalités de l'homme ne peuvent pas non plus évoluer. Nous devons donc tenter de rendre visible le visage du Christ, le visage du Dieu vivant, afin que nous nous trouvions spontanément, tout comme les Rois Mages, à nous prosterner et à l'adorer. Certes, avec les Mages, deux choses ont lieu: d'abord, ils cherchèrent, puis il trouvèrent et adorèrent. De nombreuses personnes aujourd'hui sont à la recherche. Nous aussi, nous le sommes. Au fond, dans une dialectique différente, il faut toujours qu'il y ait les deux choses. Nous devons respecter la recherche de l'homme, la soutenir, lui faire sentir que la foi n'est pas simplement un dogmatisme complet en soi qui éteint la recherche, la grande soif de l'homme, mais qui projette au contraire le grand pèlerinage vers l'infini; qu'en tant que croyants, nous sommes toujours en même temps ceux qui cherchent et ceux qui trouvent. Dans son commentaire aux Psaumes, saint Augustin interprétait l'expression "Quaerite faciem eius semper", "Cherchez toujours son visage" de façon si splendide, que, dès mes années d'étudiant, ses paroles demeurèrent gravées dans mon coeur. Cela ne vaut pas seulement pour cette vie, mais pour l'éternité; ce visage devra continuellement être redécouvert; plus nous entrons dans la splendeur de l'amour divin, plus les découvertes seront grandes, plus il sera beau d'aller de l'avant et de savoir que la recherche n'a pas de fin et que trouver est donc sans fin et signifie éternité - la joie de chercher et de trouver. Nous devons soutenir les personnes dans leur recherche comme collaborateurs de leur recherche, et leur donner dans le même temps également la certitude que Dieu nous a trouvés et que nous pouvons donc également le trouver. Nous voulons être une Eglise ouverte à l'avenir, riche de promesses pour les nouvelles générations. Il ne s'agit pas d'une feinte jeunesse, ce qui est au fond ridicule, mais d'une jeunesse authentique, qui coule de la source de l'éternité, qui est toujours nouvelle, qui découle de la transparence du Christ dans son Eglise: c'est de cette façon qu'Il nous donne la lumière pour aller de l'avant. C'est dans cette lumière que nous pouvons trouver le courage d'affronter avec confiance les questions les plus difficiles qui se posent aujourd'hui à l'Eglise qui est en Allemagne. Comme je l'ai déjà dit, d'un côté, nous devons accueillir la provocation de la jeunesse, de l'autre, toutefois, nous devons à notre tour éduquer les jeunes à la patience, sans laquelle on ne peut rien trouver; nous devons les éduquer au discernement, à un réalisme sain, à la capacité d'être définitifs. L'un des chefs d'Etat m'ayant récemment rendu visite, m'a dit que sa principale préoccupation concernait l'incapacité diffuse de prendre des décisions définitives de peur de perdre sa propre liberté.

En réalité, l'homme devient libre lorsqu'il se lie, lorsqu'il trouve des racines, car alors il peut croître et mûrir. Eduquer à la patience, au discernement, au réalisme. Mais sans faux compromis, pour ne pas diluer l'Evangile!

L'expérience de ces vingt dernières années nous a enseigné que chaque Journée mondiale de la Jeunesse constitue, en un sens, un nouveau commencement pour la pastorale des jeunes du pays qui l'a accueillie. La préparation de l'événement mobilise déjà des personnes et des ressources. Nous l'avons bien vu ici, en Allemagne: une véritable "mobilisation" a envahi le pays, activant des énergies. Enfin, la célébration elle-même apporte avec elle un vent d'enthousiasme, qu'il faut soutenir et, pour ainsi dire, rendre définitif. C'est un potentiel énorme d'énergie, qui peut davantage s'accroître en se répartissant sur le territoire. Je pense aux paroisses, aux associations, aux mouvements. Je pense aux prêtres, aux religieux, aux catéchistes, aux animateurs engagés avec les jeunes. Je pense qu'en Allemagne on sait combien de personnes se sont engagées pour cet événement. Je prie pour que cela puisse marquer, pour chacun de ceux qui ont collaboré, une authentique croissance dans l'amour pour le Christ et pour l'Eglise, et je les encourage tous à poursuivre ensemble, avec un esprit de service renouvelé, le travail pastoral parmi les nouvelles générations. Nous devons apprendre à nouveau la disponibilité au service et la transmettre.

La majorité des jeunes allemands vit dans de bonnes conditions sociales et économiques. Toutefois, nous savons que les situations difficiles ne manquent pas. Dans toutes les catégories sociales, et en particulier celles aisées, le nombre des jeunes provenant de familles éclatées augmente. Le chômage des jeunes en Allemagne s'est malheureusement accru. En outre, beaucoup de garçons et de filles se retrouvent dans la confusion, privés de réponses valables aux demandes sur le sens de la vie et de la mort, sur leur présent et sur leur avenir. Beaucoup de propositions de la société moderne débouchent sur le vide et, malheureusement, bien des jeunes finissent dans les "sables mouvants" de l'alcool et de la drogue, ou dans la spirale de groupes extrémistes. Une partie des jeunes allemands, surtout à l'Est, n'a jamais connu personnellement la Bonne Nouvelle de Jésus Christ. Même dans les zones traditionnellement catholiques, l'enseignement de la religion et la catéchèse ne réussissent pas toujours à faire naître des liens durables entre les jeunes et la Communauté ecclésiale, et pour cela, vous êtes tous ensemble engagés - je le sais - à chercher des chemins nouveaux pour rejoindre les jeunes, et la Journée mondiale de la Jeunesse a été - comme le disait le Pape Jean-Paul II - une sorte de "laboratoire" dans ce sens.

Je pense que nous réfléchissons tous - et dans les autres pays occidentaux il en est de même - sur la façon de rendre la catéchèse plus efficace. J'ai lu sur le HERDER-Korrespondenz que vous avez publié un nouveau document catéchétique que je n'ai malheureusement pas pu voir encore, mais je suis heureux de pouvoir constater combien ce problème vous tient à coeur. En effet, il est préoccupant pour nous tous de constater qu'en dépit de l'enseignement de la religion reçu par le passé, les connaissances religieuses sont très limitées et que de nombreuses personnes ignorent des choses souvent simples et élémentaires. Que pouvons-nous faire? Je ne le sais pas. Peut-être, d'une part, devrait-il exister une sorte de pré-catéchèse d'accès pour les non-croyants qui ouvre avant tout à la foi - et cela est également le contenu de nombreuses tentatives catéchétiques - mais d'autre part, il faut avoir également toujours de nouveau le courage de transmettre le mystère lui-même dans sa beauté et dans sa grandeur et de rendre possible l'élan à le contempler, à apprendre à l'aimer, puis à le connaître: voilà ce que c'est! Aujourd'hui, dans mon homélie, j'ai souligné que le Pape Jean-Paul II nous a donné deux instruments exceptionnels: le Catéchisme de l'Eglise catholique et son Compendium, qu'il a également désiré. Nous avons fait en sorte que la traduction allemande soit prête à l'occasion de la Journée mondiale de la Jeunesse. En Italie, un demi-million d'exemplaires ont déjà été vendus. Il se vend chez les marchands de journaux, cela suscite donc la curiosité des personnes: Qu'est-ce qu'il y a là-dedans? Que dit l'Eglise catholique? Je crois que nous devrions avoir le courage de soutenir également cette curiosité et de tenter d'introduire précisément ces livres, qui représentent le contenu du mystère, dans la catéchèse afin que, en accroissant la conscience de notre foi, la joie qui jaillit d'elle augmente également.

Deux autres aspects me tiennent également beaucoup à coeur. L'un d'entre eux est constitué par la pastorale des vocations. Je pense que la récitation des Vêpres dans l'église Saint-Pantaléon nous a également donné le courage d'aider les jeunes et de le faire d'une façon juste, de façon à ce qu'ils puissent entendre l'appel du Seigneur et se demander: "Me veut-il?" et que puisse à nouveau croître la disponibilité à se faire appeler et à entendre un tel appel. L'autre aspect auquel je tiens beaucoup est la pastorale familiale. Nous voyons les menaces pour la famille; dans le même temps, les instances laïques reconnaissent elles aussi qu'il est important que la famille vive en tant que cellule fondamentale de la société, que les enfants puissent grandir dans un climat de communion entre les générations, afin que demeure la continuité entre le présent, le passé et le futur, et que dure également la continuité des valeurs, afin qu'augmente la capacité à rester et vivre ensemble: c'est cela qui permet d'édifier un pays dans la communion.

J'ai voulu affronter précisément ces trois aspects: catéchèse, pastorale des vocations et pastorale familiale.

Dans le monde des jeunes, comme nous l'avons vu, les associations et les mouvements, qui constituent une richesse indubitable, jouent un rôle important. L'Eglise doit mettre en valeur ces réalités et en même temps, elle doit les guider avec une sagesse pastorale, afin qu'elles contribuent le mieux possible, avec leurs divers dons, à l'édification de la communauté, ne se mettant jamais en concurrence les unes avec les autres - en construisant, pour ainsi dire, chacune leur petite église -, mais en se respectant et en collaborant ensemble en faveur de l'unique Eglise - de la paroisse unique comme Eglise du lieu - pour susciter chez les jeunes la joie de la foi, l'amour pour l'Eglise et la passion pour le Règne de Dieu. Je pense que cela représente précisément un autre aspect important: cette communion authentique, d'une part, entre les divers mouvements, où toute forme d'exclusivisme doit être éliminée, et, de l'autre, entre les Eglises locales et ces mouvements, de façon à ce que les Eglises locales reconnaissent cette particularité, qui semble étrangère à de nombreuses personnes, et l'accueillent en leur sein comme une richesse, comprenant que dans l'Eglise, il existe de nombreuses voies et que toutes ensemble, elles forment une symphonie de la foi. Les Eglises locales et les mouvements ne sont pas en opposition entre eux, mais constituent une structure vivante de l'Eglise.

Chers confrères, si Dieu le veut, nous aurons d'autres occasions d'approfondir les questions qui interpellent notre sollicitude pastorale commune. J'ai voulu cette fois-ci, de façon certes brève et non exhaustive, recueillir brièvement le message laissé par le grand pèlerinage des jeunes. Il me semble qu'au terme de cet événement, la demande que les jeunes nous adressent pourrait se résumer ainsi: "Oui, nous sommes venus l'adorer. Nous l'avons rencontré. Aidez-nous maintenant à devenir ses disciples et ses témoins". C'est un appel exigeant, mais consolant pour le coeur d'un Pasteur. Que le souvenir des journées vécues à Cologne sous le signe de l'espérance soutienne notre service commun! Je vous laisse mon affectueux encouragement, qui est en même temps une fervente demande fraternelle: de marcher et de travailler dans l'unité, en vous fondant sur une communion qui a dans l'Eucharistie son sommet et sa source intarissable. Je vous confie tous à Marie, Mère du Christ et de l'Eglise, et de tout coeur j'accorde à chacun de vous et à vos Communautés ma Bénédiction apostolique. Merci.


CÉRÉMONIE DE DÉPART À L'AÉROPORT DE COLOGNE Dimanche 21 août 2005

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Monsieur le Président,
chers jeunes amis,
mesdames et messieurs,

Au terme de ma première visite en terre allemande comme Evêque de Rome et Successeur de Pierre, je ressens encore une fois le désir d'exprimer ma vive reconnaissance pour l'accueil qui m'a été réservé, ainsi qu'à mes collaborateurs et aux nombreux jeunes venus à Cologne de tous les continents, à l'occasion de la Journée mondiale de la Jeunesse. Le Seigneur m'a appelé à succéder au bien-aimé Pape Jean-Paul II, génial initiateur des Journées mondiales de la Jeunesse. Avec crainte, mais également avec joie, j'ai recueilli cet héritage et je remercie Dieu qui m'a permis de vivre avec de nombreux jeunes cette nouvelle étape de leur pèlerinage spirituel de continent en continent, en suivant la Croix du Christ.

Je remercie toutes les personnes qui se sont engagées avec efficacité, pour que toutes les étapes et tous les moments de cette rencontre extraordinaire se déroulent de manière ordonnée et avec sérénité. Les journées que nous avons passées ensemble ont permis à de nombreux jeunes, garçons et filles provenant du monde entier, de mieux connaître l'Allemagne. Nous sommes tous conscients du mal venu de notre patrie au vingtième siècle, et nous le reconnaissons avec honte et douleur. Mais en ces jours, grâce à Dieu, on a pu découvrir amplement qu'existait et existe aussi l'autre Allemagne - un pays aux ressources humaines, culturelles et spirituelles singulières. Je souhaite que ces ressources, grâce aussi à l'événement de ces jours, se répandent de nouveau dans le monde! Maintenant les jeunes du monde entier peuvent repartir dans leurs pays, enrichis par les contacts et par l'expérience de dialogue et de fraternité qu'ils ont eus dans diverses régions de notre Patrie. Je suis certain que leur séjour, marqué par l'enthousiasme propre à leur âge, laisse aux populations qui les ont accueillis avec générosité un souvenir agréable, et que cela représente également pour l'Allemagne un signe d'espérance. En effet, on peut dire que, au cours de ces journées, l'Allemagne a été le centre du monde catholique. Les jeunes de tous les continents et de toutes les cultures, se serrant avec foi autour de leurs Pasteurs et du Successeur de Pierre, ont rendu visible une Eglise jeune, qui, avec imagination et courage, veut dessiner le visage d'une humanité plus juste et plus solidaire. En suivant l'exemple des Mages, les jeunes se sont mis en route pour rencontrer le Christ, comme le rappelle le thème de la Journée mondiale de la Jeunesse. Maintenant, ils repartent pour leurs contrées et pour leurs villes, afin de témoigner de la lumière, de la beauté et de la force de l'Evangile, dont ils ont fait l'expérience.

Avant de partir, j'éprouve la nécessité de remercier toutes les personnes qui ont ouvert leur coeur et leurs maisons à ces innombrables jeunes pèlerins. Je remercie les Autorités gouvernementales, les Responsables politiques et les différentes administrations civiles et militaires, ainsi que les services de sécurité et les multiples Organisations de volontaires qui, avec un grand dévouement, ont travaillé pour la préparation et pour le bon déroulement de toutes les initiatives et de toutes les manifestations de cette Journée mondiale. Je remercie toutes les personnes qui ont organisé les rencontres de réflexions et de prière, de même que les célébrations liturgiques, dans lesquelles nous ont été offerts des exemples éloquents de la vitalité joyeuse de la foi qui anime les jeunes de notre temps. En outre, je voudrais exprimer ma gratitude aux responsables des autres Eglises et communautés ecclésiales, ainsi qu'aux représentants des autres Religions qui ont voulu être présents à cette importante rencontre, je souhaite que s'intensifie l'engagement commun pour transmettre aux jeunes générations les valeurs humaines et spirituelles qui se révèlent indispensables pour construire un avenir de liberté véritable et de paix.

Mon plus vif remerciement va au Cardinal Joachim Meisner, Archevêque de Cologne, diocèse qui a accueilli cette Rencontre mondiale, à l'épiscopat allemand, guidé par son Président, le Cardinal Karl Lehmann, aux prêtres, aux religieux et aux religieuses, aux communautés paroissiales, aux associations de laïcs et aux mouvements qui se sont mobilisés pour rendre le séjour des jeunes spirituellement fructueux. Un remerciement spécial et affectueux va aux jeunes allemands, qui, de différentes manières, se sont rendus disponibles pour accueillir les jeunes de leur âge et qui, avec eux, ont partagé des moments de foi que l'on peut qualifier de mémorables. Mon souhait est que cet événement ecclésial reste gravé dans la vie des catholiques d'Allemagne et qu'il soit un encouragement pour un nouvel élan spirituel et apostolique! Que l'Evangile soit accueilli dans son intégralité et témoigné avec passion par tous les disciples du Christ, pour qu'il se révèle ainsi comme un ferment de renouveau authentique de toute la société allemande, grâce aussi au dialogue avec les différentes communautés chrétiennes et avec les membres des autres religions!

Mon salut déférent et mes remerciements vont enfin aux Autorités politiques, civiles, diplomatiques, qui ont voulu être présentes à ce rassemblement. A vous, Monsieur le Président, j'exprime en particulier ma reconnaissance pour l'attention que vous m'avez réservée, en m'accueillant personnellement au début de ma visite et en participant à présent à la cérémonie de départ. Merci de tout coeur! A travers vous, je remercie les membres du gouvernement et tout le peuple allemand, dont les nombreux représentants m'ont manifesté leur grande affection au cours de ces intenses moments de communion. Le coeur rempli d'émotion et des souvenirs de ces journées, je m'apprête à retourner à Rome, invoquant sur tous l'abondance des Bénédictions divines, pour un avenir de sereine prospérité, de concorde et de paix.



À S.E. M. IVÁN GUILLERMO RINCÓN URDANETA, NOUVEL AMBASSADEUR DU VENEZUELA PRÈS LE SAINT-SIÈGE Jeudi 25 août 2005

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À L'OCCASION DE LA PRÉSENTATION DES LETTRES DE CRÉANCE

Monsieur l'Ambassadeur,

1. Je suis heureux de recevoir les Lettres qui vous accréditent comme Ambassadeur de la République bolivarienne du Venezuela près le Saint-Siège, à l'occasion de cette rencontre qui m'offre également l'heureuse opportunité de vous souhaiter la plus cordiale bienvenue, au moment où vous assumez les fonctions dont votre gouvernement vous a chargé.

Je désire également vous exprimer ma sincère reconnaissance pour vos paroles courtoises, ainsi que pour le salut respectueux du Président de la République, M. Hugo Rafael Chávez Frías, dont vous vous êtes fait l'interprète, en vous priant de lui faire parvenir mes remerciements, ainsi que mes sentiments sincères de proximité et d'affection pour le peuple vénézuélien, pour lequel je prie le Tout-Puissant afin que, dans la situation actuelle de sa vie sociale et économique, il recherche avec ténacité les solutions les plus appropriées pour parvenir à des objectifs toujours plus élevés de justice, de solidarité et de progrès, selon l'esprit chrétien qui a tant contribué à forger votre identité nationale.

2. Comme vous l'avez rappelé dans vos paroles, votre pays possède une antique et profonde tradition catholique - comme l'a dit avec emphase le libérateur Simon Bolivar - et il se caractérise par une grande estime et vénération à l'égard du Successeur de Pierre. Il ne faut pas non plus s'étonner de l'importance que le gouvernement a accordée au deuil lors de la disparition de mon vénéré prédécesseur, le Pape Jean-Paul II, ainsi que des délégations envoyées en cette circonstance et également à l'occasion du début solennel de mon Pontificat. Pour sa part, le Saint-Siège suit de très près les événements de cette chère "terre de grâce", et il en a donné la preuve en de nombreuses occasions.

C'est pourquoi, je vous exprime mes meilleurs voeux afin que, au cours du déroulement de votre importante mission, les relations traditionnelles et historiques entre le Venezuela et le Saint-Siège soient renforcées dans un esprit de collaboration loyale et constructive.

3. La terre vénézuélienne a été dotée de manière prodigieuse de ressources naturelles par le créateur, ce qui implique la responsabilité de protéger et de cultiver les dons reçus (cf. Gn
Gn 2,15) pour que tous ses habitants aient la possibilité de mener une vie en accord avec la dignité qui revient à chaque être humain.

Dans cette tâche, personne ne peut se sentir exempté de collaborer activement, en particulier face au phénomène de la pauvreté ou de l'exclusion sociale. Le travail constant de l'Eglise au Venezuela, réalisé parfois dans des conditions précaires de ressources humaines et matérielles, s'est concrétisé dans de nombreuses activités de promotion humaine en faveur de la vie dès sa conception et de la famille, ainsi que dans des projets d'assistance pour consolider les institutions de base de la société, comme l'éducation, l'assistance médicale et les structures d'assistance, que ce soit en milieu urbain, avec une action appréciable en faveur des plus pauvres, ou dans des zones géographiquement plus isolées du pays, au sein des populations autochtones.

C'est pourquoi l'action en matière d'éducation et d'assistance sociale de l'Eglise continue à apporter des bénéfices à toute la société. Cela est particulièrement évident dans le cas des écoles catholiques, qui ont toujours apporté et continuent d'apporter une immense contribution à l'éducation des enfants et des jeunes vénézuéliens, s'inspirant des valeurs humaines et spirituelles selon le désir et le libre choix de leurs parents, qui sont les premiers éducateurs des enfants et à qui revient le droit naturel et légal de choisir le type d'éducation qu'ils désirent pour eux.

C'est pourquoi, je suis conscient de l'importance que les Autorités publiques vénézuéliennes accordent à ces aspects, vitaux pour le développement harmonieux du pays, à travers les divers programmes d'alphabétisation, d'éducation ou de soins médicaux. Il s'agit d'activités qui demandent une contribution généreuse et concertée de la part de tous les citoyens et des diverses institutions, en développant une attitude généralisée de solidarité qui, en même temps qu'un ordre social juste et équilibré, constitue la meilleure garantie pour parvenir à un résultat durable, en ne se limitant pas à des initiatives partielles ou temporaires. C'est pourquoi, le dialogue loyal et respectueux entre toutes les groupes sociaux, comme moyen pour parvenir à un consensus sur les aspects concernant le bien commun, est incontournable.

4. L'Eglise catholique, qui a été présente et qui accompagne le peuple vénézuélien à toutes les étapes de son histoire, partage également actuellement vos préoccupations et vos espérances d'un avenir meilleur. Dans l'accomplissement de sa mission, elle annonce l'Evangile, proclame le pardon et la réconciliation qui, offert et reçu de tout coeur, est l'unique façon de parvenir à une entente stable, sans que les oppositions légitimes en arrivent à se transformer en affrontements agressifs. Elle invite à développer les valeurs de base de toute la société, telles que l'amour et la vérité, le respect de la justice, l'honnêteté dans l'exercice des propres responsabilités ou la généreuse disponibilité à servir le bien de tous les citoyens avant les intérêts personnels.

De plus, on sait bien que la situation sociale ne s'améliore pas en appliquant exclusivement des moyens techniques, c'est pourquoi il faut prêter attention en particulier à la promotion des valeurs, en respectant la dimension éthique propre à la personne, à la famille et à la vie sociale. De cette façon, il sera plus facile d'assurer un développement intégral de tous les membres de la communauté nationale, fondé sur le respect de leurs droits et de leurs libertés fondamentales, comme il est propre à un Etat de droit.

L'Eglise, qui ne peut cesser de proclamer et de défendre la dignité de la personne humaine dans son intégrité et son ouverture à la transcendance divine, réclame de pouvoir disposer, de façon stable, de l'espace indispensable et des moyens nécessaires pour accomplir sa mission et son service à l'humanité. C'est pourquoi, tout en respectant les compétences respectives, il existe de nombreux domaines dans lesquels il apparaît utile d'établir diverses formes de collaboration féconde entre l'Etat et l'Eglise, dans le but de prêter un meilleur service au développement de la personne et de promouvoir un esprit de coexistence dans la liberté et dans la solidarité, qui sera profitable à tous.

5. Monsieur l'Ambassadeur, vous avez rappelé la valeur indiscutable de la liberté, un grand bien qui permet à l'être humain de se réaliser pleinement. L'Eglise a besoin de cette liberté pour exercer sa mission, choisir ses pasteurs et accompagner ses fidèles. Les Successeurs de Pierre se sont toujours efforcés de défendre cette liberté. D'autre part, les gouvernements des Etats ne doivent pas craindre l'action de l'Eglise, qui dans l'exercice de sa liberté ne cherche qu'à mener à bien sa propre mission religieuse et à contribuer au progrès spirituel de chaque pays.

Jean-Paul II, dans le discours au Corps diplomatique près le Saint-Siège, au début de cette année, affirmait: "On ne doit pas craindre que la juste liberté religieuse limite les autres libertés ou nuise aux relations au sein de la société. Bien au contraire, grâce à la liberté religieuse, se développe et s'épanouit toute autre liberté: parce que la liberté est un bien indivisible, qui appartient en propre à la personne humaine et à sa dignité [...] L'Eglise sait bien distinguer comme il est de son devoir, ce qui est à César et ce qui est à Dieu (cf. Mt 22,21); elle coopère activement au bien commun de la société, parce qu'elle réprouve le mensonge et éduque à la vérité, condamne la haine et le mépris, et invite à la fraternité; elle promeut partout et toujours, comme cela est facile à reconnaître à partir de l'histoire, les oeuvres de charité, les sciences et les arts. Elle demande seulement la liberté, pour pouvoir offrir un service efficace de collaboration avec toute les instances publiques et privées qui sont préoccupées par le bien de l'homme".

En reprenant ces paroles, je souhaite de tout coeur que s'aplanissent les difficultés actuelles dans les relations Eglise-Etat et que l'on revienne à une collaboration féconde, en continuité avec la noble tradition vénézuélienne.

6. Monsieur l'Ambassadeur, en conclusion de cette rencontre, je vous renouvelle mon salut cordial et ma bienvenue, avec mes meilleurs voeux pour le déroulement de la haute mission qui vous est confiée, en espérant vivement que les relations du Venezuela avec le Saint-Siège se renforcent et se développent. Vous pouvez compter sur l'accueil et le soutien nécessaires pour transformer en une réalité cette intention si importante.

Je désire également que votre séjour à Rome soit enrichissant pour vous et votre famille, contribuant ainsi à accroître la sensibilité des nombreux Vénézuéliens qui aiment profondément votre patrie et qui, dans le même temps, peuvent se sentir des citoyens du monde et des fils très chers de l'Eglise.

Je confie tous ces sentiments et ces espérances à Notre-Dame de Coromoto, que j'invoque avec ferveur pour qu'elle intercède auprès de son Fils divin pour le peuple vénézuélien, sur lequel j'implore d'abondantes Bénédictions du Très-Haut.

BENOÎT XVI




Discours 2005-2013 21805