Discours 2005-2013 93

À UNE DÉLÉGATION DU "SIMON WIESENTHAL CENTER" DES ETATS UNIS D'AMÉRIQUE Lundi 14 novembre 2005



Chers amis,

Je vous souhaite la bienvenue au Vatican, représentants du Simon Wiesenthal Center.

Cette année marque le 40 anniversaire de la Déclaration du Concile Vatican II, Nostra Aetate, qui a formulé les principes qui ont orienté les efforts de l'Eglise en vue de promouvoir une meilleure compréhension entre les juifs et les catholiques. Après une histoire difficile et douloureuse, les relations entre nos deux communautés prennent désormais une nouvelle orientation plus positive. Nous devons continuer d'avancer sur la voie du respect mutuel et du dialogue, inspirés par notre héritage spirituel commun et engagés en vue d'une coopération toujours plus efficace au service de la famille humaine.

Les chrétiens et les juifs peuvent faire beaucoup pour permettre aux générations de vivre en harmonie et dans le respect de la dignité que chaque être humain a reçue du Créateur. J'exprime l'espérance, partagée par les hommes et les femmes de bonne volonté partout dans le monde, que ce siècle puisse voir notre monde sortir de la spirale des conflits et de la violence, et semer les germes d'un avenir de réconciliation, de justice et de paix. J'invoque sur vous tous une abondance de Bénédictions divines.


À L'OCCASION DE L'AVANT-PREMIÈRE DU FILM "JEAN-PAUL II" Jeudi 17 novembre 2005

Messieurs les Cardinaux,
chers frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,
94 Mesdames et Messieurs!

Je suis heureux d'adresser à tous ma pensée affectueuse, au terme de l'avant-première mondiale du film sur le Pape Jean-Paul II, réalisé par "Lux Vide" et par la RAI en collaboration avec d'autres chaînes de télévision européennes et la CBS des Etats-Unis d'Amérique. Je remercie le Directeur de la RAI et le Président de "Lux Vide", ainsi que les représentants des autres sociétés de production, qui nous ont offert la projection d'aujourd'hui extrêmement impressionnante. J'étends ma gratitude aux interprètes et à tous ceux qui, de diverses manières, ont collaboré à la réalisation de ce long-métrage qui rend hommage à la mémoire de mon illustre et bien-aimé prédécesseur. J'adresse également un salut cordial à tous ceux qui ont voulu prendre part à cette soirée.

Dans le contexte médiatique actuel, l'oeuvre que nous venons de voir rend un service important, en conjuguant les exigences de la vulgarisation avec celles de l'approfondissement. En effet, tout en répondant à une demande diffuse dans l'opinion publique, elle offre une reconstitution historique et biographique qui, même dans les limites du canal de communication, contribue à offrir aux personnes une meilleure connaissance et une conscience plus profonde, en encourageant également des réflexions et quelquefois de profondes interrogations. Le film débute par l'attentat sur la Place Saint-Pierre et, après une ample rétrospective sur les années en Pologne, se poursuit avec le long pontificat. Cela m'a rappelé ce que Jean-Paul II écrivait dans son testament, à propos de l'attentat du 13 mai 1981: "la Divine Providence m'a sauvé de façon miraculeuse de la mort. Celui qui est l'unique Seigneur de la vie et de la mort Lui-même a prolongé cette vie, d'une certaine façon, il me l'a donnée à nouveau. Depuis ce moment, elle appartient encore davantage à Lui" (Testament du Saint-Père Jean-Paul II, 17.III.2000). La vision de ce film a renouvelé en moi, et je pense en tous ceux qui ont eu le don de le connaître, un sentiment de profonde gratitude à Dieu pour avoir offert à son Eglise et au monde un Pape d'une stature humaine et spirituelle aussi élevée.

Toutefois, au-delà de tout jugement particulier, je trouve que ce film constitue une confirmation supplémentaire, parmi tant d'autres, de l'amour que les personnes nourrissent, que nous nourrissons tous pour le Pape Wojtyla et du profond désir de se souvenir, de le revoir, de le sentir proche. Au-delà des aspects les plus superficiels et émotifs de ce phénomène, on y trouve assurément une intime dimension spirituelle, qu'ici, au Vatican, nous constatons chaque jour, en voyant la foule des pèlerins qui vont prier, ou même rendre seulement un rapide hommage, sur sa tombe dans les Grottes vaticanes. Ce lien affectif et spirituel avec Jean-Paul II, qui s'est extrêmement resserré au cours des jours de son agonie et de sa mort, ne s'est pas interrompu. Il ne s'est plus délié, parce que c'est un lien entre les âmes: entre la grande âme du Pape et celles des innombrables croyants; entre son coeur de père et les coeurs des innombrables hommes et femmes de bonne volonté qui, en lui, ont reconnu l'ami, le défenseur de l'homme, de la vérité, de la justice, de la liberté, de la paix. Partout dans le monde, de très nombreuses personnes ont surtout admiré en lui le témoin de Dieu cohérent et généreux.

Avec ces sentiments, je forme les meilleurs voeux pour la diffusion du film et je donne de tout coeur à chacun de vous ici présents et aux personnes qui vous sont chères la Bénédiction apostolique.


AUX ÉVÊQUES DE LA CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DE LA RÉPUBLIQUE TCHÈQUE EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM" Vendredi 18 novembre 2005

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Monsieur le Cardinal,
Vénérés frères!

L'un des moments les plus intenses de communion ecclésiale et de partage fraternel du ministère épiscopal est la visite "ad limina Apostolorum". En cette occasion, chacun peut, devant le Seigneur, s'arrêter pour réfléchir de concert avec ses autres confrères sur la vie de sa propre communauté, dans la perspective de la relation intime qui lie les Eglises particulières à l'Eglise universelle. Avec le Successeur de Pierre, vous voulez rendre un témoignage de pleine adhésion au Christ et de généreuse disponibilité à l'égard des fidèles du troupeau qui vous a été confié. Très chers amis, soyez les bienvenus à ce Siège romain, qui est également un point de référence spirituel pour les catholiques de toutes les parties du monde.

Lors des rencontres avec chacun de vous, j'ai eu l'occasion de connaître une Eglise très vivante, qui se sent appelée à jouer le rôle de levain dans une société sécularisée, mais dans le même temps attirée, souvent avec nostalgie, par le message libérateur, bien qu'exigeant, de l'Evangile. Vous avez souligné le nombre croissant de vos concitoyens qui déclarent n'appartenir à aucune Eglise, mais vous avez noté, dans le même temps, l'intérêt avec lequel la société civile suit l'activité de l'Eglise catholique et ses programmes. Je pense que les dévastations matérielles et spirituelles du régime précédent ont laissé chez vos concitoyens, à présent qu'ils ont recouvré leur pleine liberté, le désir de récupérer le temps perdu, en se projetant vers l'avenir, sans peut-être réserver une attention suffisante à l'importance des valeurs spirituelles qui donnent leur force et leur consistance aux conquêtes civiles et matérielles. Cela ouvre toutefois un vaste domaine à la mission de la communauté chrétienne. Comme le petit grain de sénevé, une fois développé, devient un grand arbuste qui offre l'hospitalité aux oiseaux du ciel, ainsi, vos Eglises peuvent offrir leur accueil à ceux qui cherchent des motivations valables pour leur vie et leurs choix existentiels. Vos communautés, profondément unies et ferventes, et également sensibles au thème de la charité universelle, offrent déjà un solide témoignage qui attire de nombreuses personnes, également dans le monde de la culture. C'est un signe d'espérance pour la formation d'un laïcat mûr, sachant assumer de manière juste ses propres responsabilités ecclésiales.

Chers frères, je sais que vous êtes engagés à suivre avec une affection fraternelle vos prêtres et les communautés consacrées. Ils représentent les dons que le Christ Bon Pasteur, à travers votre ministère, offre au Peuple tchèque. Vous m'avez décrit de manière positive le clergé et les religieux, en présentant leurs membres comme des personnes actives et travailleuses, disciplinées et unies. J'exprime avec vous ma vive gratitude au Seigneur pour cette présence si significative pour l'Eglise. Cette situation, qui offre de nombreux motifs de réconfort, ne doit cependant pas faire oublier les autres aspects qui suscitent des préoccupations. Tout d'abord le manque de prêtres: il s'agit d'un fait qui vous incite à juste titre à consacrer une attention particulière à la pastorale des vocations. De ce point de vue également, l'engagement pour la formation de solides familles chrétiennes se révèle d'une importance particulière pour la vie de l'Eglise, car c'est précisément de la famille que dépend la possibilité de compter sur de nouvelles générations saines et généreuses, ainsi que de leur présenter la beauté d'une vie entièrement consacrée au Christ et à ses frères. Vous avez donc, à juste titre, choisi comme aspect prioritaire de votre engagement, l'attention aux familles, qu'il s'agisse de celles en formation ou de celles déjà formées, et peut-être en difficulté. La famille, qui sur le plan naturel est la cellule de la société, représente sur le plan surnaturel une école fondamentale de formation chrétienne. C'est à juste titre que le Concile Vatican II l'a présentée comme "Eglise domestique", notant qu'en celle-ci, "les parents doivent être pour leurs enfants les premiers hérauts de la foi, au service de la vocation propre de chacun et tout spécialement de la vocation sacrée" (Lumen gentium
LG 11).

En corrélation avec ce point du programme de votre engagement pastoral, vous avez porté votre attention sur cette "famille élargie" qu'est la paroisse, tout en étant bien conscients que c'est dans ce cadre que le croyant fait l'expérience de l'Eglise comme corps mystique du Christ et apprend à vivre la dimension sociale de la foi. De ce point de vue, l'insertion des laïcs dans l'activité paroissiale et leur participation à une vie liturgique riche et saine est très importante. La communauté chrétienne est une réalité de personnes ayant ses règles propres, un corps vivant qui, en Jésus, est présent dans le monde pour témoigner de la force de l'Evangile. Il s'agit donc d'un ensemble de frères et de soeurs qui n'ont pas d'objectifs de pouvoir ou des intérêts égoïstes, mais qui vivent dans la joie la charité de Dieu, qui est Amour.

Dans ce contexte, l'Etat ne devrait pas avoir de difficultés à reconnaître dans l'Eglise une contrepartie qui ne porte aucun préjudice à ses fonctions au service des citoyens. En effet, l'Eglise développe son action dans le domaine religieux, pour permettre aux croyants d'exprimer leur foi, sans toutefois envahir le domaine de compétence de l'autorité civile. A travers son engagement apostolique et également sa contribution caritative, médicale et scolaire, celle-ci promeut le progrès de la société dans un climat de grande liberté religieuse. Comme on le sait, l'Eglise ne recherche pas de privilèges, mais elle souhaite seulement pouvoir accomplir sa mission. Lorsque ce droit lui est reconnu, c'est en réalité toute la société qui y trouve son avantage.

Vénérés frères, voici quelques réflexions que je voulais partager avec vous, lors de cette première rencontre. Je suis spirituellement proche de vous dans l'exercice de votre ministère pastoral, et je vous exhorte en particulier à poursuivre avec confiance le dialogue oecuménique. Je sais que celui-ci est intense, de même qu'il existe un intense dialogue avec tous vos concitoyens, dans le domaine culturel, sur les valeurs fondamentales sur lesquelles repose aujourd'hui toute coexistence civile. Que le Seigneur soutienne de sa grâce, par l'intercession de sa Mère Immaculée, vos efforts pastoraux. Je les accompagne de ma cordiale Bénédiction apostolique, que je vous donne, ainsi qu'à vos prêtres, aux personnes consacrées et à tous les fidèles laïcs qui font partie du troupeau que la Divine Providence vous a confié.


AUX PARTICIPANTS À LA XX CONFÉRENCE INTERNATIONALE SUR LE GÉNOME HUMAIN Samedi 19 novembre 2005

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Monsieur le Cardinal,
vénérés frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,
Mesdames et messieurs!

J'adresse à tous un salut cordial, avec une pensée de gratitude particulière à l'égard du Cardinal Javier Lozano Barragán, pour les aimables paroles de salut qu'il a prononcées au nom des personnes présentes. Je salue de façon particulière les Evêques et les prêtres qui prennent part à cette Conférence, ainsi que les rapporteurs, qui ont assurément offert ces jours-ci une contribution de qualité sur les problèmes soulevés: leurs réflexions et leurs propositions feront l'objet d'un examen attentif de la part des instances ecclésiales compétentes.

En me plaçant dans l'optique pastorale propre au Conseil pontifical qui a organisé cette Conférence, je suis heureux de souligner qu'aujourd'hui, en particulier dans le domaine des nouvelles contributions de la science médicale, a été offerte à l'Eglise une possibilité supplémentaire d'accomplir une oeuvre précieuse d'illumination des consciences, pour faire en sorte que chaque nouvelle découverte scientifique puisse servir au bien intégral de la personne, dans le respect constant de la sa dignité. En soulignant l'importance de ce devoir pastoral, je voudrais avant tout prononcer une parole d'encouragement à tous ceux qui sont chargés de le promouvoir. Le monde actuel est caractérisé par un processus de sécularisation qui, à travers des événements culturels et sociaux complexes, a non seulement revendiqué une juste autonomie de la science et de l'organisation sociale, mais a également souvent effacé le lien existant entre les réalités temporelles et leur Créateur, parvenant également à oublier la protection de la dignité transcendante de l'homme et le respect de sa vie elle-même. Aujourd'hui toutefois, cette sécularisation, sous sa forme de sécularisme radical, ne satisfait plus les esprits les plus conscients et attentifs. Cela signifie que des espaces possibles et peut-être nouveaux s'ouvrent en vue d'un dialogue bénéfique avec la société, et non seulement avec les fidèles, en particulier sur des thèmes importants comme ceux liés à la vie.

Cela est possible car parmi les populations de longue tradition chrétienne, les semences d'un humanisme demeurent présentes, qui n'ont pas encore été touchées par les débats de la philosophie nihiliste, des semences qui tendent, en réalité, à se renforcer au fur et à mesure que les défis deviennent plus graves. Le croyant, du reste, sait bien que l'Evangile possède une harmonie intrinsèque avec les valeurs inscrites dans la nature humaine. L'image de Dieu est si profondément ancrée dans l'âme de l'homme que la voix de la conscience peut difficilement être totalement réduite au silence. A travers la parabole du semeur, Jésus, dans l'Evangile, nous rappelle qu'il existe toujours un terrain fertile dans lequel la semence s'enracine, germe et porte du fruit. Même les hommes qui ne se reconnaissent plus comme membres de l'Eglise ou qui ont même perdu la lumière de la foi, demeurent quoi qu'il en soit attentifs aux valeurs humaines et aux contributions positives que l'Evangile peut apporter au bien personnel et social.

Il est facile de s'en rendre compte en particulier en réfléchissant sur ce qui constitue l'objet de votre Conférence: les hommes de notre temps, rendus encore plus sensibles par les terribles événements qui ont assombri le XX siècle et le début même du nouveau siècle, sont en mesure de bien comprendre la façon dont la dignité de l'homme ne s'identifie pas avec les gènes de son ADN, et ne diminue pas à cause de l'éventuelle présence de différences physiques ou de défauts génétiques. Le principe de "non discrimination", sur la base de facteurs physiques ou génétiques, est profondément entré dans les consciences et il est formellement énoncé dans les Chartes sur les droits de l'homme. Ce principe trouve son fondement le plus authentique dans la dignité inscrite dans chaque homme en vertu du fait d'être créé à l'image et à la ressemblance de Dieu (cf. Gn
Gn 1,26). D'ailleurs, l'analyse sereine des données scientifiques conduit à reconnaître la présence de cette dignité dans toutes les phases de la vie humaine, en commençant par le premier moment de la fécondation. L'Eglise annonce et propose ces vérités non seulement avec l'autorité de l'Evangile, mais également à travers la force qui découle de la raison, et précisément pour cela, elle sent le devoir de faire appel à tous les hommes de bonne volonté, dans la certitude que l'accueil de ces vérités ne peut que bénéficier aux personnes et à la société. En effet, il faut éviter le danger d'une science et d'une technologie qui se prétendraient totalement autonomes à l'égard des principes moraux inscrits dans la nature de l'être humain.

Les Organismes professionnels et les Académies capables d'évaluer les nouveautés dans le domaine scientifique, en particulier dans le domaine de la biomédecine ne manquent pas dans l'Eglise; il existe également des Organismes doctrinaux destinés de façon spécifique à identifier les valeurs morales à préserver et à formuler les normes nécessaires pour leur protection efficace; il existe, enfin, des dicastères pastoraux, tels que le Conseil pontifical pour la Pastorale des Services de la Santé, auxquels il revient d'élaborer les méthodes opportunes pour assurer une présence incisive de l'Eglise sur le plan pastoral. Ce troisième moment est précieux non seulement en ce qui concerne une humanisation toujours plus adéquate de la médecine, mais également pour assurer une réponse opportune aux attentes, de la part des personnes, d'une aide spirituelle plus efficace. Il faut donc donner un nouvel élan à la pastorale de la santé. Cela nécessite un renouveau et un approfondissement de la proposition pastorale elle-même, qui tienne compte du volume accru de connaissances diffusées par les médias dans la société et du plus haut niveau d'instruction des personnes auxquelles elles s'adressent. On ne peut négliger le fait que, toujours plus souvent, sur des problèmes complexes et difficiles également au niveau scientifique, non seulement les législateurs mais les citoyens eux-mêmes, sont appelés à exprimer leur point de vue. En l'absence d'une instruction adéquate, et même une formation adéquate des consciences, de fausses valeurs ou des informations trompeuses peuvent facilement prévaloir dans l'orientation de l'opinion publique.

Adapter la formation des pasteurs et des éducateurs, pour les rendre capables d'assumer leurs responsabilités de façon cohérente avec leur foi, et dans un dialogue respectueux et loyal avec les non-croyants, tel est le devoir incontournable d'une pastorale renouvelée de la santé. En particulier dans le domaine des applications de la génétique, les familles peuvent aujourd'hui manquer d'informations adaptées et rencontrer des difficultés à maintenir l'autonomie morale nécessaire pour demeurer fidèles à leurs choix de vie. C'est pourquoi, dans ce secteur, une formation claire et approfondie des consciences est nécessaire. Les découvertes scientifiques actuelles touchent la vie des familles, les engageant dans des choix imprévus et délicats, qu'il faut affronter avec responsabilité. La pastorale dans le domaine de la santé a donc besoin de conseillers correctement formés et compétents. Cela laisse entrevoir combien la gestion de ce secteur difficile est aujourd'hui complexe et exigeante.

Face à ces exigences accrues de la pastorale, l'Eglise, tout en continuant à avoir confiance dans la lumière de l'Evangile et dans la force de la Grâce, exhorte les responsables à étudier les méthodes adéquates pour apporter son aide aux personnes, aux familles et à la société, en alliant fidélité et dialogue, approfondissement théologique et capacité de médiation. Dans ce but, elle compte en particulier sur la contribution de tous ceux qui, comme vous tous réunis ici pour prendre part à cette Conférence internationale, ont à coeur les valeurs fondamentales sur lesquelles s'appuie la coexistence humaine. Je profite volontiers de cette circonstance pour exprimer à tous mon appréciation et ma gratitude pour votre contribution dans un secteur si important pour l'avenir de l'humanité. Avec ces sentiments, j'invoque du Seigneur une abondance de lumière pour votre travail et, en signe de témoignage, d'estime et d'affection, je donne à tous ma Bénédiction apostolique.


AUX MEMBRES DES ACADEMIES PONTIFICALES DES SCIENCES ET DES SCIENCES SOCIALES Lundi 21 novembre 2005

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Mesdames et Messieurs,

Je désire transmettre mes salutations affectueuses à tous les participants à cette importante rencontre. Je souhaite remercier de façon particulière le Professeur Nicola Cabibbo, Président de l'Académie pontificale des Sciences, et le Professeur Mary Ann Glendon, Présidente de l'Académie pontificale des Sciences sociales, pour leurs paroles de bienvenue. Je suis également heureux de saluer le Cardinal Angelo Sodano, Secrétaire d'Etat, le Cardinal Carlo Maria Martini et le Cardinal Georges Cottier, qui s'est toujours consacré avec un grand dévouement au travail des Académies pontificales.

Je suis particulièrement heureux que l'Académie pontificale des Sciences sociales ait choisi "le concept de la personne dans les sciences sociales" comme thème d'étude de cette année. La personne humaine se situe au coeur de tout l'ordre social et, par conséquent, au coeur même de votre domaine d'études. Comme l'affirment les paroles de saint Thomas d'Aquin, la personne humain "est ce qu'il y a de plus parfait dans la nature" (S.Th., I, 29, 3). Les êtres humains font partie de la nature; toutefois, en tant que sujets libres ayant des valeurs morales et spirituelles, ils transcendent la nature. Cette réalité anthropologique fait partie intégrante de la pensée chrétienne, et répond directement aux tentatives visant à abolir la frontière entre les sciences humaines et les sciences naturelles, souvent proposées par la société contemporaine.

Correctement comprise, cette réalité offre une réponse profonde aux questions posées aujourd'hui en ce qui concerne le statut de l'être humain. Il s'agit d'un thème qui doit continuer à appartenir au dialogue avec la science. L'enseignement de l'Eglise est fondé sur le fait que Dieu a créé l'homme et la femme à son image et à sa ressemblance et leur a accordé une dignité supérieure et une mission commune à l'égard de la création tout entière (cf. Gn
Gn 1 et 2).

Selon le dessein de Dieu, les personnes ne peuvent pas être séparées de la dimension physique, psychologique ou spirituelle de la nature humaine. Bien que les cultures changent dans le temps, supprimer ou ignorer la nature qu'ils affirment "cultiver" peut avoir de graves conséquences. De même, les personnes ne trouveront un accomplissement authentique que si elles acceptent les éléments authentiques de la nature qui les constituent en tant que personnes.

Le concept de personne continue d'offrir une compréhension profonde du caractère unique et de la dimension sociale de chaque être humain. Cela est particulièrement vrai dans les Institutions juridiques et sociales, où la notion de "personne" est fondamentale. Parfois, toutefois, même lorsque cela est reconnu dans les déclarations internationales et les statuts juridiques, certaines cultures, en particulier celles qui ne sont pas imprégnées profondément de l'Evangile, demeurent fortement influencées par des idéologies de groupes ou par des visions individualistes et séculières de la société. La doctrine sociale de l'Eglise catholique, qui place la personne humaine au coeur et à la base de l'ordre social, peut apporter une contribution d'une grande valeur à la réflexion contemporaine sur des thèmes sociaux.

Il est providentiel que nous discutions du thème de la personne tandis que nous rendons un hommage particulier à mon vénéré prédécesseur, le Pape Jean-Paul II. D'une certaine façon, sa contribution indéniable à la pensée chrétienne a été comprise comme une profonde méditation sur la personne. Il a enrichi et étendu cette conception dans ses Encycliques et autres écrits. Ces textes représentent un patrimoine à accueillir, à conserver et à assimiler avec soin, en particulier par les Académies pontificales.

97 C'est donc avec gratitude que je profite de cette occasion pour inaugurer cette sculpture du Pape Jean-Paul II, portant deux inscriptions commémoratives. Celles-ci nous rappellent l'intérêt particulier du Serviteur de Dieu pour le travail de vos Académies, en particulier l'Académie pontificale des Sciences, qu'il a fondée en 1994. Elles soulignent également sa disponibilité éclairée à établir un dialogue de salut avec le monde de la science et de la culture, un désir qui a été confié de façon particulière aux Académies pontificales. Je prie pour que vos activités continuent de produire un échange fructueux entre l'enseignement de l'Eglise sur la personne humaine et les sciences et les sciences sociales que vous représentez. Sur toutes les personnes présentes en cette occasion importante, j'invoque une abondance de Bénédictions divines.


AUX PARTICIPANTS À LA 33 CONFÉRENCE DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES POUR L’ALIMENTATION ET L’AGRICULTURE (FAO)


Jeudi 24 novembre 2005



Messieurs les Premiers ministres,
Monsieur le Président,
Monsieur le Directeur général,
Mesdames et Messieurs!

Je suis heureux de souhaiter la bienvenue aux représentants des Etats-membres, à l'occasion de la 33 Conférence de l'Organisation des Nations unies pour l'Alimentation et l'Agriculture. Il s'agit de notre première rencontre et cela me permet de voir de près vos efforts au service d'un grand idéal: celui de libérer l'humanité de la faim. J'adresse à tous mes salutations respectueuses, en particulier au Directeur général, M. Jacques Diouf. Je le remercie pour ses aimables paroles au nom de toutes les personnes présentes, et je lui présente mes sincères meilleurs voeux au début de son nouveau mandat.

La réunion d'aujourd'hui représente une occasion propice pour exprimer mon appréciation sincère pour les programmes que la FAO, à travers ses diverses agences, accomplit depuis soixante ans, défendant avec compétence et professionnalisme la cause de l'homme, en commençant précisément par le droit fondamental de chaque personne à être "libérée de la faim". L'humanité vit en ce moment un paradoxe préoccupant: à côté des progrès toujours plus nouveaux et positifs accomplis dans le domaine de l'économie, de la science et de la technologie, nous assistons à un accroissement constant de la pauvreté. Je suis certain que l'expérience que vous avez accumulée au cours de ces années peut contribuer à développer une méthode appropriée en vue de combattre la faim et la pauvreté, une méthode fondée sur le réalisme concret qui a toujours caractérisé le travail de votre éminente Organisation. Au cours de ces dernières années, la FAO a oeuvré en vue d'une plus grande coopération et a identifié dans le "dialogue des cultures" un moyen spécifique d'assurer un meilleur développement et de garantir l'accès à l'alimentation. Aujourd'hui plus que jamais, des instruments concrets et efficaces sont nécessaires pour éliminer la possibilité de conflits entre les différentes visions culturelles, ethniques et religieuses. Il faut fonder les relations internationales sur le respect pour la personne et sur les principes centraux de la coexistence pacifique, de la fidélité aux engagements pris et de l'accueil réciproque des peuples qui composent l'unique famille humaine. De plus, il faut reconnaître que le progrès technique, bien que nécessaire, n'est pas suffisant. Le véritable progrès est uniquement celui qui protège de façon intégrale la dignité de l'être humain et qui permet à chaque peuple de partager ses ressources spirituelles et matérielles au bénéfice de tous.

Je désire mentionner ici l'importance d'aider les communautés autochtones, qui font trop souvent l'objet de mesures inadaptées visant au profit, comme votre Organisation l'a souligné à juste titre dans ses Directives sur le Droit à l'Alimentation. De plus, il ne faut pas oublier que, tandis que certaines régions sont soumises à des mesures et à des contrôles internationaux, des millions de personnes sont condamnées à la faim, et même à mourir de faim, dans des régions où ont lieu de violents conflits, des conflits que l'opinion publique tend à négliger car ils sont considérés comme internes, ethniques ou tribaux. Pourtant, ces conflits ont conduit à l'élimination systématique de vies humaines, tandis que des populations ont été déracinées de leur terre et parfois obligées, pour fuir une mort certaine, de quitter leurs installations précaires dans les camps de réfugiés.

Un signe encourageant est constitué par l'initiative de la FAO de réunir ses Etats-membres afin de discuter de la réforme agraire et du développement rural. Il ne s'agit pas d'un domaine nouveau, mais d'un domaine pour lequel l'Eglise a toujours manifesté un intérêt particulier, en raison de sa préoccupation particulière pour les petits exploitants agricoles qui représentent une part importante de la population active, en particulier dans les pays en voie de développement. L'une des actions possibles pourrait consister à garantir que les populations rurales aient accès aux ressources et aux outils dont elles ont besoin, en commençant par l'éducation et la formation, ainsi qu'aux structures d'organisation capables de préserver les petites entreprises agricoles familiales et les coopératives (cf. Gaudium et spes GS 71).

Dans quelques jours, un grand nombre des participants à cette Conférence se réuniront à Hong-Kong pour des négociations sur le commerce international, en particulier en ce qui concerne les produits agricoles. Le Saint-Siège est certain qu'un sens de responsabilité et de solidarité à l'égard des plus défavorisés prévaudra, afin que les intérêts égoïstes et la logique du pouvoir soient mis de côté. Il ne faut pas oublier que la vulnérabilité des régions rurales a des répercussions importantes sur les capacités de subsistance des petits exploitants agricoles et de leurs familles, si on leur nie l'accès au marché. Une action importante consisterait dans la reconnaissance du rôle essentiel de la famille rurale comme gardienne des valeurs et instrument naturel de la solidarité dans les relations entre les générations. Par conséquent, un soutien devrait également être apporté au rôle des femmes vivant en milieu rural et dans le même temps, aux enfants pour lesquels il faut assurer non seulement l'alimentation, mais également une éducation de base.

Mesdames et messieurs, conscient de la grande complexité de votre travail, je soumets néanmoins ces réflexions à votre considération, car je suis convaincu que les coeurs de tous doivent être toujours plus ouverts aux nombreuses personnes dans notre monde qui sont privées du pain quotidien. Le travail de cette Conférence montrera la force de la conviction croissante selon laquelle une lutte courageuse contre la faim est nécessaire. Puisse Dieu tout-puissant illuminer vos débats et vous accorder la force de persévérer dans vos efforts indispensables en vue de servir le bien commun. Je renouvelle à tous mes meilleurs voeux pour le plein succès du travail de votre Conférence.




À L'OCCASION DE L'INAUGURATION DE L'ANNÉE ACADÉMIQUE À L'UNIVERSITÉ CATHOLIQUE DU SACRÉ COEUR Vendredi 25 novembre 2005

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Recteur Magnifique,
Illustres doyens et professeurs,
Messieurs et Mesdames les médecins et les auxiliaires,
Chers étudiants!

Je suis très heureux de vous rendre visite à ce siège romain de l'Université catholique du Sacré-Coeur pour inaugurer officiellement l'Année académique 2005-2006. En ce moment, ma pensée se tourne vers les autres sièges de l'Université: vers le siège central de Milan, près de la belle basilique Saint-Ambroise, vers ceux de Brescia, Piacenza-Cremona et Campobasso. Je voudrais qu'en ce moment, la famille tout entière de la "Cattolica" se sente unie, sous les yeux de Dieu, au début d'une nouvelle étape du chemin de son engagement scientifique et de la formation. Avec nous, se trouvent présents spirituellement le Père Gemelli et de nombreux autres hommes et femmes qui, par leur dévouement éclairé, ont écrit l'histoire de cette Université. Nous ressentons également la proximité des Papes, de Benoît XV jusqu'à Jean-Paul II, qui ont toujours entretenu un lien particulier avec cette Université. En effet, ma visite d'aujourd'hui s'inscrit dans la continuité de celle que mon vénéré Prédécesseur accomplit, il y a cinq ans, à ce même siège, en la même circonstance. J'adresse un salut cordial au Cardinal Dionigi Tettamanzi, Président de l'Institut Toniolo, et au Recteur Magnifique, le Professeur Lorenzo Ornaghi, les remerciant tous les deux des paroles aimables qu'ils m'ont adressées au nom de toutes les personnes présentes. Mon salut s'étend également de façon respectueuse aux autres illustres personnalités religieuses et civiles présentes, en particulier au Sénateur Emilio Colombo, qui pendant 48 ans, a été membre du Comité permanent de l'Institut Toniolo, puis l'a présidé de 1986 à 2003. Je lui adresse mes vifs remerciements pour ce qu'il a fait au service de l'Université.

Illustres et chers amis, nous trouvant réunis ici ensemble, nous ne pouvons que nous rappeler des moments chargés d'attente et d'émotion que nous avons vécus au cours des dernières hospitalisations de Jean-Paul II dans cette Polyclinique. Au cours de ces journées, de toutes les parties du monde, la pensée des catholiques, mais pas uniquement d'eux, était tournée vers le "Gemelli". De sa chambre d'hôpital, le Pape a dispensé à chacun un enseignement inégalable sur le sens chrétien de la vie et de la souffrance, témoignant personnellement de la vérité du message chrétien. Je désire donc renouveler l'expression de ma satisfaction reconnaissante, ainsi que celle d'innombrables personnes, pour les soins attentifs prodigués au Saint-Père. Qu'il obtienne pour chacun les récompenses célestes.

L'Université catholique du Sacré-Coeur, dans ses cinq sièges et ses quatorze facultés, compte aujourd'hui environ quarante mille étudiants inscrits. On pense spontanément: quelle responsabilité! Des milliers et des milliers de jeunes passent par les salles de cours de la "Cattolica". Comment en sortent-ils? Quelle culture ont-ils rencontrée, assimilée, élaborée? Voilà le grand défi qui concerne tout d'abord l'équipe de direction de l'Université, le Corps enseignant, et enfin les étudiants eux-mêmes: donner vie à une authentique Université catholique, qui excelle par la qualité de la recherche et de l'enseignement et, dans le même temps, par la fidélité à l'Evangile et au Magistère de l'Eglise. A ce propos, il est providentiel que l'Université catholique du Sacré-Coeur soit structurellement liée au Saint-Siège à travers l'Institut Toniolo d'études supérieures, dont la tâche était et continue à être de garantir la poursuite des objectifs institutionnels de l'Université des catholiques italiens. Cette orientation originelle, toujours confirmée par mes prédécesseurs, assure de manière collégiale un ancrage profond de l'Université à la Chaire de saint Pierre et au patrimoine de valeurs laissé en héritage par les Fondateurs. J'adresse mes remerciements sincères à tous les membres de cette Institution digne d'éloges.

Revenons donc à la question: quelle culture? Je me réjouis que le Recteur, dans son discours d'introduction, ait placé l'accent sur la "mission" originelle et toujours actuelle de l'Université, c'est-à-dire celle d'effectuer de la recherche scientifique et des activités didactiques selon un projet culturel et formateur cohérent, au service des nouvelles générations et du développement humain et chrétien de la société. A cet égard, le Pape Jean-Paul II a laissé un patrimoine d'enseignement très riche, qui a atteint son sommet dans la Constitution apostolique Ex corde Ecclesiae de 1990. Il a toujours démontré que le fait d'être "catholique" ne pénalise en rien l'Université, mais la valorise plutôt au maximum. En effet, si la mission fondamentale de toute université est "la quête continuelle de la vérité à travers la recherche, la préservation et la communication du savoir pour le bien de la société" (ibid., n. 30), une communauté académique catholique se distingue par l'inspiration chrétienne des individus et de la communauté elle-même, par la lumière de foi qui éclaire la réflexion, par la fidélité au message chrétien tel qu'il est présenté par l'Eglise et par l'engagement institutionnel au service du peuple de Dieu (cf. ibid., n. 13).

L'Université catholique est donc un grand laboratoire où, selon les diverses disciplines, on élabore sans cesse de nouveaux parcours de recherche dans une confrontation stimulante entre la foi et la raison qui vise à retrouver la synthèse harmonieuse atteinte par Thomas d'Aquin et par les autres grandes figures de la pensée chrétienne, une synthèse malheureusement contestée par des courants importants de la philosophie moderne. La conséquence de cette contestation a été que, comme critère de rationalité, s'est affirmé de manière toujours plus exclusive celui de la démonstrabilité à travers l'expérimentation. Les questions fondamentales de l'homme - comment vivre et comment mourir - apparaissent ainsi exclues du domaine de la rationalité et sont laissées à la sphère de la subjectivité. La conséquence est qu'à la fin disparaît la question qui a donné origine à l'université - la question de la vérité et du bien - qui est remplacée par la question de ce qui est faisable. Voilà alors le grand défi des Universités catholiques: placer la science dans l'horizon d'une rationalité véritable, différente de celle aujourd'hui largement dominante, selon une raison ouverte à la question de la vérité et aux grandes valeurs inscrites dans l'être lui-même, et donc ouverte au transcendant, à Dieu.

Or, nous savons que cela est possible précisément à la lumière de la révélation du Christ, qui a uni en lui Dieu et l'homme, l'éternité et le temps, l'esprit et la matière: "Au commencement était le Verbe" - le Logos, la raison créative. - "Et le Verbe s'est fait chair" (
Jn 1,1 Jn 1,14). Le Logos divin, la raison éternelle, est à l'origine de l'univers et en Christ, il s'est uni une fois pour toutes à l'humanité, au monde et à l'histoire. A la lumière de cette vérité capitale de la foi et, dans le même temps, de la raison, il est à nouveau possible, en 2000, de conjuguer foi et science. C'est sur cette base, voudrais-je dire, que se déroule le travail quotidien d'une Université catholique. N'est-ce pas une aventure enthousiasmante? Oui, sans aucun doute car, en agissant à l'intérieur de cet horizon de sens, on découvre l'unité intrinsèque qui relie les diverses branches du savoir: la théologie, la philosophie, la médecine, l'économie, chaque discipline, jusqu'aux technologies les plus spécialisées, car tout est lié. Choisir l'Université catholique signifie choisir cette orientation qui, malgré les limites historiques inévitables, caractérise la culture de l'Europe, à la formation de laquelle les Universités nées historiquement "ex corde Ecclesiae" ont apporté une contribution fondamentale.

C'est pourquoi, chers amis, avec une passion renouvelée pour la vérité et pour l'homme, jetez les filets au large, dans la haute mer du savoir, en ayant confiance dans la parole du Christ, même lorsqu'il vous arrive de connaître la fatigue et la déception de n'avoir rien "pêché". Dans la vaste mer de la culture, le Christ a toujours besoin de "pêcheurs d'hommes", c'est-à-dire de personnes conscientes et bien préparées qui mettent leurs compétences professionnelles au service du bien, et donc au service du Royaume de Dieu. Le travail de recherche au sein de l'Université, s'il est accompli dans une perspective de foi, fait déjà partie de ce service au Royaume et à l'homme! Je pense à toute la recherche qui est effectuée dans les multiples Instituts de l'Université catholique: celle-ci est destinée à la gloire de Dieu et à la promotion spirituelle et matérielle de l'humanité. En cet instant, je pense en particulier à l'Institut scientifique que votre Université voulut offrir au Pape Jean-Paul II le 9 novembre 2000, à l'occasion de sa visite à ce siège pour inaugurer de manière solennelle l'année académique. Je tiens à affirmer que l'"Institut scientifique international Paul VI de recherche sur la fertilité et l'infertilité humaine pour une procréation responsable" me tient également à coeur. En effet, celui-ci, en raison de ses finalités institutionnelles, se présente comme un exemple éloquent de cette synthèse entre la vérité et l'amour qui constitue le centre vital de la culture catholique. L'Institut, né pour répondre à l'appel lancé par le Pape Paul VI dans l'Encyclique Humanae vitae, se propose de donner une base scientifique sûre à la régulation naturelle de la fertilité humaine, ainsi qu'à l'engagement pour surmonter de manière naturelle l'infertilité éventuelle. Faisant mienne l'appréciation reconnaissante de mon vénéré Prédécesseur pour cette initiative scientifique, je souhaite que celle-ci puisse trouver le soutien nécessaire afin de poursuivre son importante activité de recherche.

Illustres professeurs et chers étudiants, l'Année académique que nous inaugurons aujourd'hui est la 85 de l'histoire de l'Université catholique du Sacré-Coeur. Les leçons commencèrent en effet à Milan, en décembre 1921, avec cent étudiants inscrits dans les facultés de sciences sociales et de philosophie. Alors que je rends grâce avec vous au Seigneur pour le long et fécond chemin accompli, je vous exhorte à demeurer fidèles à l'esprit des débuts, ainsi qu'aux Statuts qui sont à la base de cette Institution. Vous pourrez ainsi réaliser une synthèse harmonieuse et féconde entre l'identité catholique et la pleine insertion dans le système universitaire italien, selon le projet de Giuseppe Toniolo et du Père Agostino Gemelli. Tel est le souhait que je vous adresse aujourd'hui à tous: continuez à édifier, jour après jour, avec enthousiasme et avec joie, l'Université catholique du Sacré-Coeur. C'est un engagement que j'accompagne de ma prière et d'une Bénédiction apostolique spéciale.



Discours 2005-2013 93