Discours 2005-2013 28516

CÉRÉMONIE DE CONGÉ Cracovie 28 mai 2006

28516

Monsieur le Président de la République de Pologne,
Monsieur le Cardinal métropolitain de Cracovie,
bien-aimés frères et soeurs!

Le temps est venu pour moi de prendre congé de la Pologne. Pendant quatre jours, j'ai parcouru en pèlerin votre terre, en visitant des lieux particulièrement importants pour votre identité historique et spirituelle. Varsovie, Jasna Góra, Cracovie, Wadowice, Kalwaria Zebrzydowska, Lagiewniki, Oswiecim - combien de souvenirs ces noms évoquent-ils! Quelle richesse de signification ont-ils pour les Polonais!

Lorsqu'il y a quatre ans, en saluant sa patrie pour la dernière fois, mon bien-aimé prédécesseur Jean-Paul II exhorta la nation polonaise à se laisser toujours guider par des sentiments de miséricorde, de solidarité fraternelle, de dévouement au bien commun, il exprima sa ferme confiance que, de cette manière, non seulement elle trouverait une place appropriée au sein de l'Europe unie, mais qu'elle enrichirait également de sa tradition ce continent et le monde entier. Aujourd'hui, alors que votre présence dans la famille des Etats d'Europe se consolide toujours davantage, je souhaite de tout coeur répéter ces paroles d'espérance. Je vous prie de rester de fidèles gardiens du dépôt chrétien, et de le transmettre aux générations à venir.

Chers Polonais! Je voudrais vous confier que ce pèlerinage, au cours duquel j'ai visité des lieux particulièrement chers au grand Jean-Paul II, m'a rapproché encore plus de vous, ses concitoyens. Je vous remercie de la prière dont vous m'avez entouré dès le moment de mon élection. Lors des rencontres avec vous, à l'occasion des Audiences au Vatican, j'ai ressenti plusieurs fois ce lien d'intense prière et de sympathie spontanée. Je voudrais que vous continuiez à vous rappeler de moi dans vos prières, en demandant au Seigneur d'accroître mes forces dans le service de l'Eglise universelle.

Je remercie monsieur le Président de la République polonaise et l'épiscopat pour leur invitation. Je remercie Monsieur le Premier ministre pour la fructueuse collaboration du gouvernement avec les représentants de l'Eglise dans la préparation de cette visite. J'exprime ma gratitude aux Autorités, à tous les niveaux pour leur engagement, avant même le début de ma visite et au cours de son déroulement. Je remercie les représentants des médias du travail intense qu'ils ont accompli pour retransmettre d'amples informations sur ce pèlerinage. Ma reconnaissance et mes remerciements vont également aux services d'ordre, à l'armée, à la police, aux pompiers, au service médical, et à tous ceux qui ont contribué à faire de cette rencontre du Pape avec la Pologne et avec ses habitants un succès.

Je veux conclure ma visite avec les paroles de l'Apôtre Paul qui ont accompagné mon pèlerinage en terre polonaise: "Veillez, demeurez fermes dans la foi, soyez des hommes, soyez forts. Que tout se passe chez vous dans la charité" (
1Co 16,13-14). A tous, je donne ma Bénédiction.





AUX PARTICIPANTS À LA III RÉUNION DU XI CONSEIL ORDINAIRE DU SYNODE DES ÉVÈQUES Jeudi 1er juin 2006

10606
Vénérés et chers frères dans l'épiscopat!

Je vous adresse à tous, membres du XI Conseil ordinaire du Secrétariat général du Synode des Evêques, un salut fraternel, qui est en particulier destiné à Mgr Nikola Eterovic, Secrétaire général, auquel je suis également reconnaissant de s'être fait l'interprète de vos sentiments. Votre présence me rappelle à l'esprit l'expérience vécue lors de l'Assemblée synodale sur le thème: "Eucharistie, source et sommet de la vie et de la mission de l'Eglise", qui a eu lieu à l'automne 2005. Je vous remercie à présent de tout coeur pour le travail que vous accomplissez afin de recueillir et de classer les propositions qui ont été formulées au cours de la dernière Assemblée synodale. En outre, la rencontre d'aujourd'hui représente une occasion propice pour mettre encore une fois en lumière l'importance de la charité dans l'activité des pasteurs de l'Eglise. Je dois dire qu'au cours des visites "ad limina", des Evêques me demandent souvent: "Mais quand le texte post-synodal sera-t-il finalement prêt?" Et je leur réponds: "Ils y travaillent. Et ils n'en ont certainement plus pour très longtemps". Je vois ici réunies de si nombreuses compétences que je ne peux qu'espérer, d'ici peu, voir et pouvoir apprendre moi-même de ce texte, qui pourra ensuite être publié pour être utilisé par toute l'Eglise qui l'attend réellement.

Est amoris officium pascere dominicum gregem: cette admirable intuition de l'Evêque Augustin (In Io Ev. tract. 123, 5: PL 35, 1967) constitue encore aujourd'hui un profond encouragement pour nous, Evêques, engagés dans le soin du troupeau qui ne nous appartient pas, mais qui appartient au Seigneur. En accomplissant son mandat, nous cherchons à protéger le troupeau, à le nourrir et à le conduire à Lui, le véritable Bon Pasteur qui désire le salut de tous. Nourrir le troupeau du Seigneur est donc un ministère d'amour attentif, qui exige un dévouement total jusqu'à l'épuisement des forces et, si nécessaire, au sacrifice de la vie. L'Eucharistie est surtout la source et le secret de l'élan permanent de notre mission. En réalité, l'Evêque configure dans son existence ecclésiale l'image du Christ qui nous nourrit de sa chair et de son sang. C'est de l'Eucharistie que le Pasteur tire sa vigueur pour exercer cette charité pastorale particulière qui consiste à dispenser au peuple chrétien la nourriture de la vérité. Et le texte qui est en préparation constituera l'une de ces interventions pour nourrir le peuple de Dieu avec la nourriture de la vérité, pour l'aider à croître dans la vérité et surtout pour faire connaître le mystère de l'Eucharistie, et pour inviter à une intense vie eucharistique.

Si nous parlons de vérité, nous ne pouvons taire en particulier la vérité de l'Amour, car elle est l'essence même de Dieu. La prêcher sur les toits (cf.
Mt 10,27) est non seulement amoris officium, mais un message nécessaire pour l'homme de chaque époque. La vérité de l'amour évangélique concerne chaque homme et tout l'homme, et engage le pasteur à la proclamer sans craintes ni réticences, en ne cédant jamais aux conditionnements du monde: à temps et à contretemps (cf. Tm 4, 2).

Chers frères dans l'épiscopat, à une époque comme la nôtre, marquée par le phénomène croissant de la mondialisation, il devient toujours plus nécessaire de transmettre à tous avec vigueur et clarté la vérité du Christ et son Evangile de salut. Les domaines dans lesquels proclamer et témoigner avec amour de la vérité sont innombrables; de nombreuses personnes en sont assoiffées et ne peuvent être laissées dans l'attente à la recherche de nourriture (cf. Lm Lm 4,4). Telle est, chers et vénérés frères, notre mission! Que l'Esprit du Seigneur, que nous nous disposons à accueillir lors de la prochaine solennité de la Pentecôte, descende sur vous, par l'intercession de Marie, et vous transforme en pasteurs toujours plus disponibles aux exigences du coeur de Dieu. Avec ces sentiments, je vous bénis tous, ainsi que ceux qui sont confiés à vos soins pastoraux.



AUX "PATRONS OF THE ARTS" DES MUSÉES DU VATICAN Salle Clémentine Jeudi 1er juin 2006

10616
Eminences,
Excellences,
Chers amis,

Je suis heureux de vous saluer, "Patrons of the Arts" des Musées du Vatican, au cours de votre pèlerinage à Rome à l'occasion du cinq centième anniversaire de la fondation des Musées du Vatican.

Dans le même temps, je vous remercie de votre intérêt constant, qui est motivé non seulement par le souci de la mise en valeur du patrimoine culturel incomparable des Musées du Vatican, mais également par un engagement généreux à la mission évangélisatrice de l'Eglise. En tout temps, les chrétiens ont cherché à exprimer la vision de la foi en ce qui concerne la beauté et l'ordre de la création de Dieu, la noblesse de notre vocation en tant qu'hommes et femmes faits à son image et ressemblance, et la promesse d'un univers racheté et transfiguré par la grâce du Christ. Les trésors artistiques qui nous entourent ne sont pas simplement des monuments impressionnants du passé lointain. Au contraire, pour les centaines de milliers de visiteurs qui les contemplent, année après année, ils représentent un témoignage éternel de la foi immuable de l'Eglise en Dieu Trine qui, à travers la célèbre phrase de saint Augustin, est lui-même "une Beauté toujours ancienne, toujours nouvelle" (Confessions, X, 27).

Chers amis, puisse votre soutien aux Musées du Vatican apporter d'abondants fruits spirituels dans vos vies et promouvoir la mission de l'Eglise en vue de conduire tous les peuples à la connaissance et à l'amour de Jésus Christ, "Image du Dieu invisible" (
Col 1,15), dans l'Esprit éternel duquel toute la création est réconciliée, restaurée et renouvelée. A vous, à vos familles et à vos associés, je donne cordialement ma Bénédiction apostolique en signe de joie et de paix durables dans le Seigneur.


AUX SUPÉRIEURS ET AUX ÉLÈVES DE L'ACADÉMIE PONTIFICALE ECCLÉSIASTIQUE Vendredi 2 juin 2006

20606
Monsieur le Président,
chers élèves de l'Académie pontificale ecclésiastique!

Je suis heureux de vous rencontrer aujourd'hui et d'adresser à chacun de vous et à votre communauté tout entière une salutation cordiale; une salutation qui s'adresse en premier lieu à votre Président, Monseigneur Justo Mullor García. Je le remercie de s'être fait l'interprète courtois de vos sentiments dévoués et filiaux. Votre visite m'offre l'opportunité de vous assurer de l'attention avec laquelle je suis votre Académie: vous vous y préparez avec sérieux et dévouement à cette manière particulière d'exercer le ministère sacerdotal qui est le service au Saint-Siège. C'est un service important, car il vise à faire parvenir aux Eglises particulières et aux nations du monde entier le témoignage de la sollicitude du Successeur de Pierre.

Chers élèves, pour une préparation adaptée à la mission qui vous attend, vous êtes appelés avant tout à être une communauté de prière, dans laquelle la relation avec Dieu soit constante, fidèle, intense et devienne pour chacun la sève qui anime toute votre existence. Que l'Eucharistie que vous célébrez quotidiennement soit le centre vital, la source et la racine de toutes vos activités au cours de ces années et à l'avenir lorsque vous accomplirez le ministère sacerdotal au service du Saint-Siège dans les divers pays. Votre action, en effet, sera efficace dans la mesure où vous vous efforcerez d'être des témoins du Christ, vérité qui éclaire et oriente le chemin des peuples. Devenez donc les annonciateurs de son Evangile d'amour, capable de renouveler les coeurs et de rendre pleinement humaine la coexistence au sein de toute société. Ce n'est qu'en étant fidèles à votre vocation que vous pourrez rendre un service valable au Siège apostolique.

En plus d'une école de prière, votre Académie veut continuer à être une école d'authentique formation humaine et théologique. Le ministère pastoral auquel vous vous préparez exige une formation attentive et des compétences spécifiques. Aujourd'hui, plus que jamais, est indispensable une solide culture qui prévoit, à côté de la formation théologique nécessaire, un approfondissement de la doctrine éternelle de l'Eglise et des lignes directrices de l'activité du Saint-Siège au niveau ecclésial et international. Tirez profit des opportunités didactiques qui vous sont offertes durant cette période d'études, et continuez à l'avenir à mettre à jour vos connaissances à travers un travail d'étude personnel et sérieux.

Votre académie compte désormais trois siècles d'histoire et, dans la continuité avec son passé, elle doit demeurer un lieu de communion. La possibilité de résider à Rome, où l'on perçoit d'une manière unique la catholicité de l'Eglise, et le fait que vous proveniez de divers continents, constituent une précieuse opportunité de nourrir l'esprit d'unité et de communion. A l'avenir, vous aurez l'occasion d'entrer en contact avec des populations différentes par la langue et la civilisation; vous exercerez le ministère sacerdotal dans des Eglises particulières souvent culturellement différentes de celles dont vous provenez. Vous devrez alors être en mesure de comprendre, d'aimer, de soutenir et d'encourager toute communauté chrétienne pour être partout les fidèles serviteurs du charisme de Pierre, qui est un charisme d'unité et de cohésion pour toute la famille ecclésiale. Voilà pourquoi vous êtes à juste titre encouragés à vivre avec un esprit de véritable fraternité sacerdotale votre séjour à l'Académie, de manière à faire mûrir votre sens pastoral de la communion et de l'unité. Par conséquent, ouvrez toujours davantage les horizons de votre esprit et de votre coeur à l'universalité de l'Eglise, afin de surmonter toute tentation de particularismes et d'individualismes.

Enfin, que ne manque pas dans votre itinéraire de formation une dévotion filiale et authentique à la Vierge Marie. Qu'Elle vous aide à grandir dans l'amour pour le Christ et pour l'Eglise et à tendre toujours à la sainteté, aspiration suprême et imprescriptible de notre existence chrétienne et sacerdotale. Avec ces sentiments et ces voeux, j'invoque sur vous l'abondance des dons de l'Esprit Saint, tout en donnant avec affection à chacun de vous, ainsi qu'aux personnes qui vous sont chères, une Bénédiction apostolique particulière.


AUX DIRECTEURS, JOURNALISTES ET TECHNICIENS D'AVVENIRE, DE SAT2000, DE LA STATION DE RADIO InBlu ET DE L'AGENCE SIR Salle des Bénédictions Vendredi 2 juin 2006

20616
Monsieur le Cardinal,
vénérés frères dans l'épiscopat,
chers frères et soeurs dans le Seigneur!

Je suis heureux de rencontrer aujourd'hui au Vatican le personnel du quotidien catholique Avvenire, de la chaîne de télévision Sat2000, de la station de radio InBlu et de l'agence Sir. Il s'agit d'une réalité médiatique significative, liée à la Conférence épiscopale italienne, qui est représentée ici par son Président, le Cardinal Camillo Ruini, auquel j'adresse en premier lieu mon salut déférent. Je salue également avec affection chacun de vous, et je remercie le Directeur d'Avvenire et de Sat2000 des paroles aimables qu'il m'a adressées au nom des personnes présentes. Chers amis, vous accomplissez une fonction véritablement importante: en effet, c'est également grâce à votre contribution que l'engagement des catholiques italiens pour apporter l'Evangile du Christ dans la vie de la nation se poursuit. Je suis heureux de rappeler que, au cours des années qui ont immédiatement suivi le Concile, Paul VI a fortement voulu la naissance d'Avvenire, comme quotidien catholique national. Une décision courageuse a suivi, en vue d'étendre votre engagement au domaine de la diffusion radiotélévisée, en utilisant les technologies les plus modernes, comme le souhaite le Décret conciliaire Inter Mirifica (nn. 13-14). Vous êtes ainsi devenus l'un des instruments pour la diffusion du message chrétien en Italie.

Pour saisir la pleine signification du travail auquel vous consacrez votre attention chaque jour, une brève réflexion peut être utile sur les rapports entre foi et culture, et sur la façon dont ils se sont développés aux cours des dernières décennies. La culture européenne, comme vous le savez, s'est formée à travers les siècles grâce à la contribution du christianisme. Puis, à partir du siècle des Lumières, la culture de l'Occident s'est éloignée de ses fondements chrétiens à une vitesse croissante. En particulier au cours de la période la plus récente, le déclin de la famille et du mariage, les atteintes à la vie humaine et à sa dignité, la réduction de la foi à une expérience subjective et la sécularisation de la conscience publique qui a suivi, nous révèlent avec une dramatique clarté les conséquences de cet éloignement. Il existe toutefois dans diverses parties d'Europe des expériences et des modalités de culture chrétienne qui s'affirment ou qui émergent à nouveau avec un élan croissant. En particulier, la foi catholique est encore sensiblement présente dans la vie du peuple italien et les signes de sa vitalité renouvelée sont visibles à tous. Dans votre travail de communicateurs qui s'inspirent de l'Evangile, il est donc nécessaire de faire preuve d'un discernement constant. Comme vous le savez bien, les Pasteurs de l'Eglise qui est en Italie font preuve d'une sollicitude particulière pour conserver les formes chrétiennes qui proviennent de la grande tradition du peuple italien et qui forment la vie communautaire, l'actualisant et la purifiant là où cela est nécessaire, mais surtout la renforçant et l'encourageant. Votre devoir consiste également à soutenir et à promouvoir les nouvelles expériences chrétiennes qui apparaissent et à les aider à développer une conscience toujours plus claire de leur enracinement ecclésial et du rôle qu'elles peuvent jouer dans la société et dans la culture de l'Italie.

Chers amis, tout cela fait partie de votre tâche quotidienne, d'un travail à accomplir non pas de façon abstraite ou purement intellectuelle, mais en étant attentifs aux mille aspects de la vie concrète d'un peuple, à ses problèmes, à ses besoins et à ses espérances. Que dans cette tâche, vous soutienne et vous encourage la certitude que la foi chrétienne est ouverte à tous ce qu'"il y a de vrai, de noble, de juste, de pur, d'aimable, d'honorable" dans la culture des peuples, comme l'enseignait l'Apôtre Paul aux Philippiens (cf. 4, 8). Allez donc de l'avant dans votre travail avec cet esprit et cette attitude, en apportant vous-mêmes un témoignage lumineux de profonde vie chrétienne et en demeurant pour cela toujours fermement unis au Christ, pour pouvoir regarder le monde avec les mêmes yeux que Lui. Soyez heureux d'appartenir à l'Eglise et d'introduire dans le grand circuit de la communication sa voix et ses idées. Ne vous lassez pas d'édifier des ponts de compréhension et de communication entre l'expérience ecclésiale et l'opinion publique. Vous pourrez ainsi être les protagonistes d'une communication non pas superficielle, mais amie, au service de l'homme d'aujourd'hui.

Je souhaite de tout coeur que les catholiques et tous les Italiens soucieux des valeurs authentiques apportent leur attention et leur soutien à cette communication. Pour ma part, je vous assure de ma constante proximité et, afin que votre travail porte des fruits toujours plus grands, je vous donne avec affection, à vous et à vos familles, la Bénédiction apostolique, propitiatoire de la lumière et de la force que seul Dieu peut diffuser dans l'âme de ses fils.


AUX PARTICIPANTS AU CONGRÈS ECCLÉSIAL DU DIOCÈSE DE ROME Basilique de Saint-Jean-de-Latran Lundi 5 juin 2006

50606
Chers frères et soeurs,

Je suis heureux d'être à nouveau parmi vous pour introduire à travers ma réflexion ce nouveau Congrès diocésain, consacré à un thème d'une grande beauté et d'une importance pastorale fondamentale: la joie qui provient de la foi et son rapport avec l'éducation des nouvelles générations. Nous reprenons ainsi, et nous développons de façon plus détaillée, dans une optique qui concerne plus directement les jeunes, le discours commencé il y a un an, à l'occasion du précédent Congrès diocésain, au cours duquel nous nous sommes occupés du rôle de la famille et de la communauté chrétienne dans la formation de la personne et dans la transmission de la foi. Je salue avec affection chacun de vous, Evêques, prêtres, diacres, religieux et religieuses, laïcs, engagés à témoigner de notre foi. Je vous salue en particulier, vous les jeunes, qui voulez unir à votre itinéraire personnel de formation l'engagement d'une responsabilité ecclésiale et missionnaire à l'égard d'autres enfants et jeunes. Je remercie de tout coeur le Cardinal-Vicaire des paroles qu'il m'a adressées en votre nom à tous.

Avec ce Congrès et avec l'année pastorale qui s'inspirera de ses contenus, le diocèse de Rome poursuit le long itinéraire qu'il a commencé, il y a désormais dix ans, avec la Mission dans la Ville voulue par mon bien-aimé prédécesseur Jean-Paul II. L'objectif, en effet, est toujours le même: raviver la foi dans nos communautés et chercher à la réveiller ou bien la susciter, chez toutes les personnes et les familles de cette grande ville, où la foi a été prêchée et où l'Eglise a été implantée dès la première génération chrétienne, et en particulier par les Apôtres Pierre et Paul. Au cours des trois dernières années, votre attention s'est concentrée en particulier sur la famille, pour consolider à travers la vérité de l'Evangile cette réalité humaine fondamentale, sur laquelle pèse malheureusement aujourd'hui de graves dangers et menaces, et pour l'aider à remplir sa mission irremplaçable dans l'Eglise et dans la société. En plaçant à présent au premier plan l'éducation à la foi des nouvelles générations, nous n'abandonnons certainement pas l'engagement pour la famille, à laquelle appartient en premier lieu la responsabilité éducative. Nous répondons au contraire à une préoccupation diffuse dans de nombreuses familles croyantes, qui, dans le contexte social et culturel d'aujourd'hui, craignent de ne pas réussir à transmettre le précieux héritage de la foi à leurs enfants.

En réalité, découvrir la beauté et la joie de la foi est un chemin que chaque nouvelle génération doit parcourir par elle-même, car dans la foi est mis en jeu ce que nous avons de plus personnel et de plus intime, notre coeur, notre intelligence, notre liberté, dans un rapport profondément personnel avec le Seigneur qui oeuvre en nous. Mais la foi est, de façon tout aussi radicale, un acte et une attitude communautaire, elle est le "nous croyons" de l'Eglise. La joie de la foi est donc une joie qui doit être partagée: comme l'affirme l'Apôtre Jean, "Ce que nous avons vu et entendu [le Verbe de la vie] nous vous l'annonçons, afin que vous aussi soyez en communion avec nous [...] Tout ceci nous vous l'écrivons pour que notre joie soit complète" (
1Jn 1,3-4). C'est pourquoi éduquer les nouvelles générations à la foi est un devoir important et fondamental qui touche la communauté chrétienne tout entière. Chers frères et soeurs, vous touchez du doigt combien ce devoir est devenu aujourd'hui particulièrement difficile sous de nombreux aspects, mais précisément pour cette raison d'autant plus important et plus que jamais urgent. Il est en effet possible d'identifier deux orientations fondamentales de l'actuelle culture sécularisée, clairement interdépendantes l'une de l'autre, qui poussent dans une direction opposée à celle de l'annonce chrétienne, et qui ne peuvent manquer d'avoir une répercussion sur les personnes qui sont en train de développer leurs propres orientations et choix de vie. L'une de celles-ci est l'agnosticisme qui jaillit lorsque l'intelligence humaine est réduite à une simple raison calculatrice et fonctionnelle, et qui tend à étouffer le sens religieux inscrit au plus profond de notre nature. L'autre est le processus de relativisme et de déracinement qui ronge les liens les plus sacrés et les sentiments les plus dignes de l'homme, avec pour résultat de rendre les personnes fragiles, et nos relations réciproques précaires et instables.

Précisément dans cette situation, nous avons tous besoin, et en particulier nos enfants, nos adolescents et nos jeunes ont besoin de vivre la foi comme une joie, de goûter la profonde sérénité qui naît de la rencontre avec le Seigneur. J'ai écrit dans l'Encyclique Deus caritas est: "Nous avons cru à l'amour de Dieu, c'est ainsi que le chrétien peut exprimer le choix fondamental de sa vie. A l'origine du fait d'être chrétien, il n'y a pas une décision éthique ou une grande idée, mais la rencontre avec un événement, avec une Personne, qui donne à la vie un nouvel horizon et par là son orientation décisive" (n. 1). La source de la joie chrétienne est la certitude d'être aimés de Dieu, aimés personnellement par notre Créateur, par Celui qui tient entre ses mains l'univers tout entier et qui aime chacun de nous et toute la grande famille humaine d'un amour passionné et fidèle, un amour plus grand que nos infidélités et péchés, un amour qui pardonne. Cet amour "est si grand qu'il retourne Dieu contre lui-même" comme cela apparaît de façon définitive dans le mystère de la Croix: "Dieu aime tellement l'homme que, en se faisant homme lui-même, il le suit jusqu'à la mort et il réconcilie de cette manière justice et amour" (Deus caritas est ).

Chers frères et soeurs, cette certitude et cette joie d'être aimés de Dieu doit être rendue d'une certaine façon tangible et concrète pour chacun de nous, et en particulier pour les jeunes générations qui entrent dans le monde de la foi. En d'autres termes: Jésus a déclaré être le "chemin" qui conduit au Père, outre la "vérité" et la "vie" (cf. Jn 14,5-7). La question qui se pose est donc: comment nos enfants et nos jeunes peuvent-ils trouver en Lui, dans la pratique et dans leur existence, ce chemin de salut et de joie? Telle est précisément la grande mission au service de laquelle l'Eglise existe, comme famille de Dieu et compagnie d'amis dans laquelle nous sommes introduits à travers le Baptême déjà en tant que petits enfants, et dans laquelle doivent croître notre foi et notre joie, ainsi que la certitude d'être aimés du Seigneur. Il est donc indispensable - et telle est la mission confiée aux familles chrétiennes, aux prêtres, aux catéchistes, aux éducateurs, et aux jeunes eux-mêmes à l'égard des jeunes de leur âge, à nos paroisses, associations et mouvements, et en fin de compte à la communauté diocésaine tout entière - que les nouvelles générations puissent faire l'expérience de l'Eglise comme d'une compagnie d'amis véritablement fiable, proche dans tous les moments et toutes les circonstances de la vie, que ceux-ci soient heureux et gratifiants, ou difficiles et sombres, une compagnie qui ne nous abandonnera pas même dans la mort, car elle porte en elle la promesse de l'éternité. A vous, chers enfants et jeunes de Rome, je voudrais vous demander de vous confier à votre tour à l'Eglise, de l'aimer et d'avoir confiance en elle, car en elle le Seigneur est présent, et parce qu'elle ne recherche rien d'autre que votre véritable bien.

Celui qui sait être aimé est à son tour sollicité à aimer. C'est précisément ainsi que le Seigneur, qui nous a aimés en premier, nous demande de mettre à notre tour au centre de notre vie l'amour pour Lui et pour les hommes qu'il a aimés. En particulier, les adolescents et les jeunes, qui ressentent fortement en eux le rappel de l'amour, ont besoin d'être libérés du préjugé commun selon lequel le christianisme, avec ses commandements et ses interdits, place trop d'obstacles à la joie de l'amour et en particulier empêche de goûter pleinement au bonheur que l'homme et la femme trouvent dans leur amour réciproque. Au contraire, la foi et l'éthique chrétienne ne veulent pas étouffer, mais rendre l'amour sain, fort et véritablement libre: tel est précisément le sens des dix Commandements, qui ne sont pas une série de "non", mais un grand "oui" à l'amour et à la vie. En effet, l'amour humain a besoin d'être purifié, de mûrir et également de se dépasser, pour pouvoir devenir pleinement humain, pour être le principe d'une joie véritable et durable, pour répondre ainsi à la demande d'éternité qu'il porte en lui et à laquelle on ne peut renoncer sans se trahir soi-même. Tel est le motif principal pour lequel l'amour entre l'homme et la femme ne se réalise pleinement que dans le mariage.

Dans tout le travail d'éducation, dans la formation de l'homme et du chrétien, nous ne devons donc pas, par peur ou par embarras, laisser de côté la grande question de l'amour: si nous le faisions, nous présenterions un christianisme désincarné, qui ne peut intéresser sérieusement le jeune qui s'ouvre à la vie. Toutefois, nous devons également introduire à la dimension intégrale de l'amour chrétien, où amour pour Dieu et amour pour l'homme sont unis de façon indissoluble et où l'amour du prochain est un engagement véritablement concret. Le chrétien ne se contente pas de paroles, encore moins d'idéologies trompeuses, mais il répond aux nécessités de son frère en se mettant véritablement en jeu, sans se contenter de quelque bonne action sporadique. Proposer aux enfants et aux jeunes des expériences pratiques de service au prochain le plus démuni fait donc partie d'une authentique et pleine éducation à la foi. Avec le besoin d'aimer, le désir de vérité appartient à la nature même de l'homme. C'est pourquoi, dans l'éducation des nouvelles générations, la question de la vérité ne peut donc certainement pas être éludée: elle doit au contraire occuper une place centrale. En posant la question de la vérité, nous élargissons en effet l'horizon de notre rationalité et nous commençons à libérer la raison des limites trop étroites dans lesquelles elle est enfermée lorsque l'on ne considère comme rationnel que ce qui peut faire l'objet d'une expérimentation et d'un calcul. C'est précisément ici qu'a lieu la rencontre de la raison avec la foi: dans la foi, nous accueillons en effet le don que Dieu fait de lui-même en se révélant à nous, créatures faites à son image; nous accueillons et nous acceptons cette Vérité que notre esprit ne peut comprendre totalement et ne peut posséder, mais qui, précisément pour cela, étend l'horizon de notre connaissance et nous permet de parvenir au Mystère dans lequel nous sommes plongés et de retrouver en Dieu le sens définitif de notre existence.

Chers amis, nous savons bien qu'il n'est pas facile d'accepter de surmonter les limites de notre raison. C'est pourquoi la foi, qui est un acte humain très personnel, demeure un choix de notre liberté, qui peut également être refusé. Mais ici se fait jour une seconde dimension de la foi, celle de se confier à une personne: non pas à n'importe quelle personne, mais à Jésus Christ et au Père qui l'a envoyé. Croire signifie établir un lien très personnel avec notre Créateur et Rédempteur, en vertu de l'Esprit Saint qui oeuvre dans nos coeurs, et faire de ce lien le fondement de toute la vie. En effet, Jésus Christ est "la Vérité faite Personne" qui attire le monde à Lui [...] toute autre vérité est un fragment de la vérité qu'Il est et renvoie à Lui" (Discours à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi CDF 10 février 2006). Ainsi, Il remplit notre coeur, l'élargit et le comble de joie, Il pousse notre intelligence vers des horizons inexplorés, offre à notre liberté son point de référence décisif, la libérant des limites étroites de l'égoïsme et la rendant capable d'un amour authentique.

Dans l'éducation des nouvelles générations, nous ne devons donc pas craindre de comparer la vérité de la foi avec les véritables conquêtes de la connaissance humaine. Les progrès de la science sont aujourd'hui très rapides et sont souvent présentés comme contraires aux affirmations de la foi, provoquant la confusion et rendant plus difficile l'accueil de la vérité chrétienne. Mais Jésus Christ est et demeure le Seigneur de toute la création et de toute l'histoire: "Tout a été créé par lui et pour lui [...] et tout subsiste en lui" (Col 1,16 Col 1,17). C'est pourquoi le dialogue entre foi et raison, s'il est conduit avec sincérité et rigueur, offre la possibilité de percevoir de façon plus efficace et convaincante le bien-fondé de la foi en Dieu - non pas en n'importe quel Dieu, mais dans le Dieu qui s'est révélé en Jésus Christ - et également de montrer qu'en Jésus Christ lui-même, se trouve l'accomplissement de toute authentique aspiration humaine. Chers jeunes de Rome, avancez donc avec confiance et courage sur la voie de la recherche de ce qui est vrai. Et vous, chers prêtres et éducateurs, n'hésitez pas à promouvoir une véritable "pastorale de l'intelligence" et, plus largement, de la personne, qui prenne au sérieux les questions des jeunes - tant les questions existentielles que celles qui naissent de la comparaison avec les formes de rationalité aujourd'hui diffuses - pour les aider à trouver des réponses chrétiennes valables et pertinentes et finalement à s'approprier la réponse décisive qu'est le Seigneur Jésus Christ.

Nous avons parlé de la foi comme d'une rencontre avec Celui qui est Vérité et Amour. Nous avons également vu qu'il s'agit d'une rencontre à la fois communautaire et personnelle qui doit avoir lieu dans toutes les dimensions de notre vie, à travers l'exercice de l'intelligence, les choix de la liberté, le service de l'amour. Il existe toutefois un espace privilégié dans lequel cette rencontre se réalise de façon plus directe, se renforce et s'approfondit, et devient ainsi véritablement en mesure d'imprégner et de caractériser toute l'existence: cet espace est la prière. Chers jeunes, un grand nombre d'entre vous étaient certainement présents à la Journée mondiale de la Jeunesse, à Cologne. Là, ensemble, nous avons prié le Seigneur, nous l'avons adoré à travers sa présence dans l'Eucharistie, nous avons offert son saint Sacrifice. Nous avons médité sur cet acte décisif d'amour à travers lequel Jésus, dans la dernière Cène, anticipe sa mort, l'accepte au plus profond de son être et la transforme en acte d'amour, dans cette révolution qui, seule, est véritablement capable de renouveler le monde et de libérer l'homme, en l'emportant sur la puissance du péché et de la mort. Je vous demande, chers jeunes, et à vous tous, chers frères et soeurs ici présents, et je demande à toute la bien-aimée Eglise de Rome, en particulier aux âmes consacrées, provenant notamment des monastères de clôture, d'être assidus dans la prière, spirituellement unis à Marie, notre Mère, d'adorer le Christ vivant dans l'Eucharistie, de l'aimer toujours plus, Lui, qui est notre frère et véritable ami, l'Epoux de l'Eglise, le Dieu fidèle et miséricordieux qui nous a aimés en premier. Ainsi, vous, chers jeunes, serez prêts et disponibles à accueillir son appel, s'Il vous veut entièrement pour lui, dans le sacerdoce ou dans la vie consacrée.

218 Dans la mesure où nous nous nourrissons du Christ, et que nous l'aimons, nous ressentons également en nous l'incitation à conduire les autres vers Lui: en effet, nous ne pouvons pas garder pour nous la joie de la foi, nous devons la transmettre. Ce besoin devient encore plus pressant et urgent en présence de cet étrange oubli de Dieu qui existe aujourd'hui dans diverses parties du monde, et dans une certaine mesure également ici, à Rome. Cet oubli donne lieu à beaucoup de bruit éphémère, à beaucoup de contestations inutiles, mais également à une grande insatisfaction et à un sentiment de vide. C'est pourquoi, chers frères et soeurs, dans notre humble service de témoins et de missionnaires du Dieu vivant, nous devons être porteurs de cette espérance qui naît de la certitude de la foi: nous aiderons ainsi nos frères et nos concitoyens à retrouver le sens et la joie de leur vie. Je sais que vous oeuvrez avec application dans les divers domaines de la pastorale: je m'en réjouis et je rends grâce avec vous au Seigneur. En particulier au cours de ma première année de Pontificat, j'ai pu déjà faire l'expérience et apprécier la vivacité de la présence chrétienne parmi les jeunes et les universitaires de Rome, ainsi que parmi les enfants qui font leur première Communion. Je vous demande de continuer avec confiance, en approfondissant toujours plus votre lien avec le Seigneur et en rendant ainsi plus efficace votre apostolat. Dans cet engagement, ne négligez aucun aspect de la vie; car le Christ est venu pour sauver l'homme tout entier, au plus profond des consciences ainsi que dans les expressions de la culture et dans les relations sociales.

Chers frères et soeurs, je vous confie ces réflexions dans un esprit d'amitié, comme contribution à votre travail au cours des soirées du Congrès, et ensuite tout au long de la prochaine année pastorale. Que mon affection et ma Bénédiction vous accompagnent aujourd'hui et à l'avenir.

Merci de votre attention!



Discours 2005-2013 28516