Discours 2005-2013 13906

BÉNÉDICTION DU NOUVEL ORGUE DE LA "ALTE KAPELLE" de Ratisbonne Mercredi 13 septembre 2006

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Chers amis,

Cette vénérable maison de Dieu, la Basilique "Notre-Dame de l'Ancienne Chapelle", a été restaurée de façon splendide - nous le voyons - et elle est dotée aujourd'hui d'un nouvel orgue qui, à présent, sera béni et destiné solennellement à son but: la glorification de Dieu et l'édification de la foi.

Ce fut un chanoine de cette collégiale, Carl Joseph Proske, qui suscita au XIX siècle des élans essentiels pour le renouveau de la musique sacrée. Le chant grégorien et l'antique polyphonie vocale classique furent intégrés dans le déroulement de la liturgie. L'attention à la musique sacrée liturgique dans l'"Ancienne Chapelle" avait une importance qui s'étendait bien au-delà des limites de la région et qui faisait de Ratisbonne un centre du mouvement de la réforme de la musique sacrée, dont l'influence se fait sentir jusqu'à aujourd'hui.

Dans la Constitution sur la Sainte Liturgie du Concile Vatican II (Sacrosanctum Concilium), il est souligné que "le chant sacré, uni aux paroles, fait partie nécessaire ou intégrante de la liturgie solennelle" (
SC 112). Cela signifie que la musique et le chant sont plus qu'un embellissement (peut-être même superflu) du culte; en effet, ils font partie du déroulement de la Liturgie, et ils sont eux-mêmes Liturgie. Une musique sacrée solennelle, avec choeur, orgue, orchestre et chant du peuple, n'est donc pas un surplus qui accompagne et agrémente la liturgie, mais une façon importante de participer de façon active à l'événement cultuel. L'orgue est considéré depuis toujours et à juste titre comme le roi des instruments musicaux, car il reprend tous les sons de la création et - comme on l'a dit il y a peu - il fait résonner la plénitude des sentiments humains, de la joie à la tristesse, de la louange aux pleurs. En outre, en transcendant comme toute musique de qualité la sphère simplement humaine, il renvoie au divin. La grande variété des timbres de l'orgue, du piano jusqu'à l'impétueux fortissimo, en fait un instrument supérieur à tous les autres. Il est en mesure de faire résonner tous les domaines de l'existence humaine. Les multiples possibilités de l'orgue nous rappellent d'une certaine façon l'immensité et la magnificence de Dieu.

Le Psaume 150, que nous venons d'écouter et de suivre intérieurement, parle de cor et de flûtes, de harpes et de cithares, de cymbales et de tambours: tous les instruments musicaux sont appelés à apporter leur contribution à la louange du Dieu trinitaire. Dans un orgue, les nombreux tuyaux et les registres doivent former une unité. Si, ici ou là, quelque chose se bloque, si un tuyau est désaccordé, dans un premier temps, cela n'est sans doute perceptible que par une oreille exercée. Mais si plusieurs tuyaux ne sont pas correctement accordés, cela donne alors lieu à des fausses notes, et le tout commence à devenir insupportable. Les tuyaux de cet orgue sont eux aussi exposés à des changements de température, et à des facteurs d'usure. Cela est une image de notre communauté dans l'Eglise. De même que, dans l'orgue, une main experte doit toujours reconduire les discordances à une juste consonance, ainsi, nous devons également dans l'Eglise, dans la variété des dons et des charismes, trouver toujours à nouveau, à travers la communion dans la foi, l'accord dans la louange de Dieu et dans l'amour fraternel. Plus nous nous laissons transformer dans le Christ à travers la Liturgie, plus nous serons capables de transformer également le monde, en faisant rayonner la bonté, la miséricorde et l'amour pour les hommes du Christ.

A travers leur musique, les grands compositeurs voulaient, chacun à sa façon, glorifier Dieu. Jean-Sébastien Bach, sur le titre d'un grand nombre de ses partitions, a écrit les lettres S.D.G.: Soli Deo Gloria - uniquement à la gloire de Dieu. Anton Bruckner plaçait également au début les paroles: "Dédié au Bon Dieu". Que tous les visiteurs de cette magnifique Basilique, à travers la grandeur de l'édifice et à travers la liturgie enrichie par l'harmonie du nouvel orgue et par le chant solennel, soient guidés vers la joie de la foi! Tel est mon voeu en ce jour de l'inauguration de ce nouvel orgue.


RENCONTRE AVEC LES PRÊTRES ET LES DIACRES PERMANENTS DE LA BAVIÈRE Cathédrale de Freising Jeudi 14 septembre 2006

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Chers confrères dans le ministère épiscopal et le sacerdoce,
chers frères et soeurs!

C'est pour moi un moment de joie et de profonde gratitude - gratitude pour tout ce que j'ai pu vivre et recevoir au cours de cette visite pastorale. Tant de cordialité, tant de foi, tant de joie en Dieu - une expérience qui m'a frappé profondément et qui m'accompagnera comme source de vigueur renouvelée. Gratitude également en particulier pour le fait qu'à présent, j'ai pu enfin retourner dans la Cathédrale de Freising et j'ai pu la voir sous son nouvel et splendide aspect. Merci au Cardinal Wetter, merci aux deux autres Evêques bavarois, merci à tous ceux qui ont collaboré, merci à la Providence qui a permis la restauration de la Cathédrale qui se présente aujourd'hui dans sa nouvelle beauté! Maintenant que je me trouve dans cette cathédrale, reviennent à nouveau au plus profond de moi de nombreux souvenirs à la vue des anciens compagnons et des jeunes prêtres qui transmettent le message et le flambeau de la foi. Il me revient à la mémoire les souvenirs de mon ordination, que le Cardinal Wetter a évoquée: lorsque j'étais ici, prosterné sur le sol, comme enveloppé par la Litanie de tous les saints, par l'intercession de tous les saints, je me rendais compte que sur ce chemin, nous ne sommes pas seuls, mais que la foule des saints marche avec nous, et que les saints encore vivants, les fidèles d'aujourd'hui et de demain, nous soutiennent et nous accompagnent. Puis il y eut le moment de l'imposition des mains... et, enfin, lorsque le Cardinal Faulhaber nous dit: "Iam non dico vos servos, sed amicos" - "Je ne vous appelle plus serviteurs, mais amis", - alors j'ai perçu l'ordination sacerdotale comme l'initiation dans la communauté des amis de Jésus, qui sont appelés à demeurer avec Lui et à annoncer son message.

Puis le souvenir qu'ici, j'ai pu moi-même ordonner des prêtres et des diacres, qui sont à présent engagés dans le service à l'Evangile et qui, pendant de nombreuses années - désormais des décennies -, ont transmis le message et le transmettent encore. Et je pense naturellement également aux processions de saint Corbinien. Il était encore de coutume, alors, d'ouvrir le reliquaire. Et comme l'Evêque était placé derrière l'urne, je pouvais voir directement le crâne de saint Corbinien, et me voir ainsi dans la procession des siècles qui parcourt le chemin de la foi - je pouvais voir que, dans la procession des temps, nous pouvons marcher nous aussi, en faisant en sorte qu'elle avance vers l'avenir, ce qui devenait clair lorsque le cortège passait dans le cloître près des très nombreux enfants rassemblés, sur le front desquels je pouvais tracer le signe de la bénédiction de la croix. En ce moment, nous faisons encore cette expérience, c'est-à-dire que nous sommes en procession, dans le pèlerinage de l'Evangile, que nous pouvons être à la fois pèlerins et guides de ce pèlerinage, et que, à la suite de ceux qui suivirent le Christ, nous Le suivons avec eux, et nous entrons ainsi dans la lumière.

Alors que je dois à présent commencer l'homélie, je voudrais m'arrêter sur deux points uniquement. Le premier est relatif à l'Evangile qui vient d'être proclamé - un passage que nous avons tous déjà tant de fois écouté, interprété et médité dans notre coeur. "La moisson est abondante" dit le Seigneur. Et lorsqu'il dit: "...est abondante", il ne se réfère pas seulement à ce moment-là, et aux chemins de la Palestine sur lesquels il était en pèlerinage au cours de sa vie terrestre; c'est une parole qui vaut également aujourd'hui. Cela signifie: dans le coeur des hommes croît une moisson. Cela signifie, encore une fois: au plus profond d'eux, il y a l'attente de Dieu; l'attente d'une directive qui soit lumière, qui indique la voie. L'attente d'une parole qui soit plus qu'une simple parole. L'espérance, l'attente de l'amour qui, au-delà de l'instant présent, nous soutienne et nous accueille éternellement. La moisson est abondante et attend des ouvriers parmi toutes les générations. Et dans toutes les générations, bien que de façon différente, vaut toujours également l'autre parole: les ouvriers sont peu nombreux.

"Priez le maître de la moisson d'envoyer des ouvriers!". Cela signifie: la moisson est là, mais Dieu veut se servir des hommes, afin qu'elle soit apportée dans le grenier. Dieu a besoin d'hommes. Il a besoin de personnes qui disent: Oui, je suis disposé à devenir ton ouvrier pour la moisson, je suis disposé à apporter mon aide afin que cette moisson qui mûrit dans le coeur des hommes puisse véritablement entrer dans les greniers de l'éternité et devenir communion divine éternelle de joie et d'amour. "Priez le maître des moissons!". Cela veut dire également: nous ne pouvons pas simplement "produire" des vocations, celles-ci doivent venir de Dieu. Nous ne pouvons pas, comme c'est peut-être le cas pour d'autres professions, à travers une propagande bien ciblée, à travers, pour ainsi dire, des stratégies adaptées, simplement recruter des personnes. L'appel, partant du coeur de Dieu, doit toujours trouver la voie du coeur de l'homme. Et toutefois: précisément afin qu'il parvienne au coeur des hommes, notre collaboration est également nécessaire. Le demander au maître des moissons signifie certainement avant tout prier pour cela, secouer notre coeur et dire: "Fais-le, s'il te plaît! Réveille les hommes! Allume en eux l'enthousiasme et la joie pour l'Evangile! Fais-leur comprendre que c'est le trésor plus précieux que tous les autres trésors, et que celui qui l'a découvert doit le transmettre!".

Nous ébranlons le coeur de Dieu. Mais prier Dieu ne se réalise pas seulement à travers des prières; cela implique également une transformation de la parole en action, afin que de notre coeur en prière jaillisse également l'étincelle de la joie en Dieu, de la joie pour l'Evangile, et qu'elle suscite en d'autres coeurs la disponibilité à prononcer leur "oui". En tant que personnes de prière, emplies de Sa lumière, nous atteignons les autres et, en les faisant participer à notre prière, nous les faisons entrer dans le rayon de la présence de Dieu, qui agira ensuite. Dans ce sens, nous voulons toujours prier à nouveau le maître de la moisson, secouer son coeur et, avec Dieu, toucher dans notre prière également le coeur des hommes, afin que, selon sa volonté, Il y fasse mûrir le "oui", la disponibilité; la constance, à travers toutes les confusions de l'époque, à travers la chaleur de la journée mais également l'obscurité de la nuit, de persévérer fidèlement dans le service, tirant constamment précisément de lui la conscience que, - bien que laborieux - cet effort est beau, il est utile, car il conduit à l'essentiel, c'est-à-dire à obtenir que les hommes reçoivent ce qu'ils attendent: la lumière de Dieu et l'amour de Dieu.

Le second point dont je voudrais traiter est une question pratique. Le nombre de prêtres a diminué, même si en ce moment, nous pouvons constater que toutefois, nous sommes véritablement présents, qu'aujourd'hui également, il y a des prêtres jeunes et âgés et qu'il existe des jeunes qui s'acheminent vers le sacerdoce. Mais les fardeaux sont devenus plus lourds: gérer deux, trois, quatre paroisses ensemble, et cela avec toutes les nouvelles fonctions qui se sont ajoutées, est quelque chose qui peut sembler décourageant. Souvent on me demande, et chacun se demande d'ailleurs à soi-même et à ses confrères: mais comment pouvons-nous y arriver? N'est-ce pas une profession qui nous consume, dans laquelle, à la fin, nous ne pouvons plus ressentir de joie en voyant que, en dépit de tous nos efforts, cela ne suffit jamais? Tout cela nous épuise!

Que peut-on répondre? Naturellement, je ne peux pas donner de recettes infaillibles; je voudrais toutefois transmettre certaines indications fondamentales. Je tire la première de la Lettre aux Philippiens (cf. 2, 5-8), où saint Paul dit à tous - et naturellement de façon particulière à tous ceux qui travaillent dans la vigne de Dieu - que nous devons "avoir en nous les sentiments de Jésus Christ". Ses sentiments étaient tels que, face au destin de l'homme, il ne supporta presque plus son existence dans la gloire, mais dut descendre et assumer l'incroyable, la pleine misère de la vie humaine jusqu'à l'heure de la souffrance sur la croix. Tel est le sentiment de Jésus Christ: se sentir poussé à apporter aux hommes la lumière du Père, à les aider afin qu'à travers eux, et en eux, se forme le Royaume de Dieu. Et le sentiment de Jésus Christ consiste dans le même temps dans le fait qu'Il demeure toujours profondément enraciné dans la communion avec le Père, plongé en elle. Nous le voyons, pour ainsi dire, de l'extérieur dans le fait que les évangélistes nous rapportent à plusieurs reprises qu'Il se retire sur la montagne, seul, pour prier. Son action naît du fait qu'il est plongé dans le Père: précisément parce qu'il est plongé dans le Père, il doit sortir et parcourir tous les villages et toutes les villes pour annoncer le Royaume de Dieu, c'est-à-dire sa présence, son "existence" parmi nous; afin que le Royaume devienne présent en nous et, à travers nous, transforme le monde; afin que sa volonté soit faite sur la terre comme au ciel, et que le ciel arrive sur la terre. Ces deux aspects font partie des sentiments de Jésus Christ. D'une part, connaître Dieu de l'intérieur, connaître le Christ de l'intérieur, être avec Lui; ce n'est que si cela se réalise que nous découvrons véritablement le "trésor". D'autre part, nous devons également aller vers les hommes. Nous ne pouvons plus garder le "trésor" pour nous-mêmes, mais nous devons le transmettre.

Je voudrais expliquer plus encore et de façon concrète cette indication fondamentale sous ses deux aspects: il faut qu'il y ait un ensemble de zèle et d'humilité, c'est-à-dire de reconnaissance de ses propres limites. D'une part, le zèle: si nous rencontrons véritablement le Christ toujours à nouveau, nous ne pouvons pas le garder pour nous. Nous nous sentons poussés à aller vers les pauvres, les personnes âgées, les plus faibles et ainsi également vers les enfants et les jeunes, vers les personnes dans la plénitude de leur vie; nous nous sentons poussés à être "annonciateurs", apôtres du Christ. Mais pour que ce zèle ne devienne pas vide et usant pour nous, il doit aller de pair avec l'humilité, la modération, l'acceptation de nos limites. Combien de choses devraient être faites - je vois que je n'en suis pas capable. Cela vaut pour les curés - du moins j'imagine, dans quelle mesure - cela vaut également pour le Pape: il devrait faire tant de choses! Et mes forces ne suffisent tout simplement pas. Ainsi, je dois apprendre à faire ce que je peux et laisser le reste à Dieu et à mes collaborateurs et dire: "En définitive, c'est Toi qui dois le faire, car l'Eglise est à Toi. Et Toi, tu me donnes seulement l'énergie que je possède. Qu'elle te soit donnée, car elle vient de Toi; je laisse le reste, précisément, à Toi". Je crois que l'humilité d'accepter cela - "c'est ici que finissent mes énergies, je Te laisse le soin, Seigneur, de faire le reste" - cette humilité est décisive. Et avoir également confiance: Il me donnera également les collaborateurs qui m'aideront et qui feront ce que je n'arrive pas à faire.

Et encore, "traduit" à un troisième niveau, cet ensemble de zèle et de modération signifie également l'ensemble du service dans toutes ses dimensions et l'intériorité. Nous ne pouvons servir les autres, nous ne pouvons donner que si, personnellement, nous recevons également, si nous ne nous vidons pas nous-mêmes. Et pour cela, l'Eglise nous propose des espaces de liberté qui, d'une part, sont des espaces pour une nouvelle "expiration" et "inspiration" et, d'autre part, deviennent centre et source du service. Il y a avant tout la célébration de la Messe: ne la célébrons pas comme quelque chose de routinier, que, d'une certaine façon, "je dois faire", mais célébrons-la "de l'intérieur"! Identifions-nous avec les mots, les actions, avec l'événement qui là, devient réalité! Si nous célébrons la Messe en priant, si les paroles que nous prononçons: "Ceci est mon Corps", naissent véritablement de la communion avec Jésus Christ qui nous a imposé les mains et nous a autorisés à parler avec son Moi lui-même, si nous accomplissons l'Eucharistie avec une intime participation dans la foi et dans la prière, alors, elle ne se réduit pas à un devoir extérieur, alors l'"ars celebrandi" vient de lui-même, car il consiste précisément à célébrer en partant du Seigneur et en communion avec Lui, et ainsi de façon juste également pour les hommes. Alors nous aussi en tirons toujours à nouveau un grand enrichissement et, dans le même temps, nous transmettons aux hommes plus que ce qui est à nous, c'est-à-dire: la présence du Seigneur.

L'autre espace libre que l'Eglise, pour ainsi dire, nous impose, et ainsi, nous libère également en nous le donnant, est la Liturgie des Heures. Efforçons-nous de la réciter comme une véritable prière, une prière en communion avec l'Israël de l'Ancienne et de la Nouvelle Alliance, une prière en communion avec les personnes en prière de tous les siècles, une prière en communion avec Jésus Christ, une prière qui s'élève du Moi le plus profond, du sujet le plus profond de ces prières. Et en priant ainsi, nous faisons participer à cette prière également les autres hommes, qui n'en n'ont pas le temps, ou l'énergie, ou encore la capacité. Nous-mêmes, en tant que personnes de prière, nous prions pour représenter les autres, accomplissant ainsi un ministère pastoral de premier degré. Il ne s'agit pas de se retirer dans le privé, mais c'est une priorité pastorale, une action pastorale dans laquelle nous-même devenons à nouveau prêtres, nous sommes à nouveau remplis par le Christ, nous incluons les autres dans la communion de l'Eglise en prière et, dans le même temps, nous laissons émaner la force de la prière, la présence de Jésus Christ dans ce monde.

La devise de ces jours-ci était: "Celui qui croit n'est jamais seul".Cette parole vaut et doit valoir précisément également pour les prêtres, pour chacun de nous. Et elle vaut à nouveau sous un double aspect: celui qui est prêtre n'est jamais seul, car Jésus Christ est toujours avec lui. Il est avec nous; nous sommes nous aussi avec Lui! Mais cela doit valoir également dans l'autre sens: celui qui devient prêtre est introduit dans un presbyterium, dans une communauté de prêtres avec l'Evêque. Et il est prêtre en étant en communion avec ses confrères. Engageons-nous afin que cela ne demeure pas uniquement un précepte théologique et juridique, mais devienne une expérience concrète pour chacun de nous. Ouvrons-nous réciproquement cette communion, ouvrons-la en particulier à ceux dont nous savons qu'ils souffrent de solitude, qu'ils sont opprimés par des interrogations et des problèmes, peut-être par des doutes et des incertitudes! Ouvrons-nous réciproquement cette communion, et alors, nous ferons l'expérience en étant avec l'autre, avec les autres, plus encore et de façon plus joyeuse également de la communion avec Jésus Christ! Amen.


CÉRÉMONIE DE CONGÉ Aéroport international Franz Joseph Strauss, Munich Jeudi 14 septembre 2006

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Monsieur le Ministre-Président,
Illustres membres du gouvernement,
Messieurs les Cardinaux
et vénérés frères dans l'épiscopat,
Mesdames et Messieurs!

Au moment de quitter la Bavière pour retourner à Rome, je souhaite adresser à vous tous, ici présents, et à travers vous, à tous les citoyens de ma patrie, un salut cordial, ainsi qu'un mot de remerciement venant véritablement du fond du coeur. Je garde imprimées de façon indélébile dans mon âme les émotions suscitées par l'enthousiasme et par l'intense religiosité de vastes multitudes de fidèles, qui se sont recueillis avec dévotion dans l'écoute de la Parole de Dieu et dans la prière et qui m'ont salué le long des routes et sur les places. J'ai pu me rendre compte de combien de personnes, en Bavière, s'efforcent aujourd'hui encore de marcher sur les chemins de Dieu en communion avec leurs pasteurs en s'engageant à témoigner de leur foi dans le monde sécularisé d'aujourd'hui et à la rendre présente dans celui-ci comme une force formatrice. Grâce à l'inlassable dévouement des organisateurs, tout a pu se dérouler dans l'ordre et la tranquillité, dans la communion et dans la joie. Mon premier mot, dans ce discours de congé, se doit d'exprimer ma gratitude à l'égard de tous ceux qui ont oeuvré afin de parvenir à ce résultat. Je ne peux que dire de tout coeur: "Que Dieu vous le rende!".

Naturellement, ma pensée se tourne tout d'abord vers vous, Monsieur le Ministre-Président, que je remercie des paroles que vous avez prononcées, à travers lesquelles vous avez rendu un grand témoignage en faveur de notre foi chrétienne en temps que force formatrice de notre vie publique. Je vous en remercie de tout coeur! Je remercie les autres personnalités civiles et ecclésiastiques ici réunies, en particulier celles qui ont contribué au succès de cette visite, au cours de laquelle j'ai pu rencontrer partout des personnes de cette terre qui me témoignaient leur joyeuse affection et auxquelles mon coeur reste également très profondément lié. Ce furent des journées intenses, et j'ai pu revivre dans le souvenir de très nombreux événements du passé qui ont marqué mon existence. Partout, j'ai reçu un accueil plein d'égards et d'attentions, je dirais même plus, un accueil à l'enseigne de la plus grande cordialité. Cela m'a profondément touché. Je peux, dans une certaine mesure, imaginer les difficultés, les préoccupations, les efforts que l'organisation de ma visite en Bavière a comportés; de nombreuses personnes y ont participé, appartenant à la fois à des organismes de l'Eglise, à des structures publiques tant de la Région que de l'Etat, et surtout un grand nombre de volontaires. J'adresse à tous un "Que Dieu vous le rende" du plus profond du coeur, que j'accompagne de l'assurance de ma prière pour vous tous.

Je suis venu en Allemagne, en Bavière, pour reproposer à mes concitoyens les vérités éternelles de l'Evangile comme des vérités et des forces actuelles et pour confirmer les croyants dans leur adhésion au Christ, Fils de Dieu, qui s'est fait homme pour notre salut. J'ai la certitude dans la foi que c'est en Lui, dans sa parole, que se trouve la voie non seulement pour parvenir au bonheur éternel, mais également pour construire un avenir digne de l'homme déjà sur notre terre. Animée par cette conscience, l'Eglise, sous la conduite de l'Esprit, a toujours trouvé à nouveau dans la Parole de Dieu les réponses aux défis émergents au cours de l'histoire. C'est ce qu'elle a essayé de faire, en particulier, également pour les problèmes qui se sont manifestés dans le contexte de ce qu'on a appelé la "question ouvrière", notamment à partir de la seconde moitié du XIX siècle. Je le souligne en cette circonstance parce que précisément aujourd'hui, le 14 septembre, est célébré le 25 anniversaire de la publication de l'Encyclique Laborem exercens, par laquelle le grand Pape Jean-Paul II a indiqué dans le travail "une dimension fondamentale de l'existence de l'homme sur la terre" (n. 4) et il a rappelé à tous que, je cite, "le premier fondement de la valeur du travail est l'homme lui-même" (n. 6). Par conséquent, notait-il, le travail est "un bien de l'homme", parce qu'à travers lui, "non seulement l'homme transforme la nature en l'adaptant à ses propres besoins, mais encore, il se réalise lui-même comme homme et même, en un certain sens, "il devient plus homme"" (n. 9). Sur la base de cette intuition fondamentale, le Pape indiquait dans l'Encyclique plusieurs orientations qui conservent aujourd'hui encore toute leur actualité. Je voudrais renvoyer également les citoyens de ma patrie à ce texte, empreint d'une valeur prophétique, avec la certitude que de son application concrète pourront dériver de grands avantages également pour la situation sociale actuelle en Allemagne.

Et à présent, en prenant congé de ma bien-aimée patrie, je confie le présent et l'avenir de la Bavière et de l'Allemagne à l'intercession de tous les saints qui ont vécu sur le territoire allemand en servant fidèlement le Christ et en faisant l'expérience dans leur existence de la vérité de ces paroles qui ont accompagné comme un leitmotiv les différentes étapes de ma visite: "Celui qui croit n'est jamais seul". L'auteur de notre hymne bavarois a assurément fait lui aussi cette expérience. Avec ses mots, avec les mots de notre hymne, qui sont également une prière, je suis heureux d'adresser de nouveau un voeu pour ma patrie: "Que Dieu soit avec toi, pays des Bavarois, terre allemande, patrie! / Que sur tes vastes territoires repose sa main bénissante! / Qu'il protège ta campagne et les édifices de tes villes / et qu'il conserve pour toi les couleurs de son ciel blanc et bleu!".

J'adresse à tous un cordial "Vergelt's Gott" et "Au revoir", si Dieu le veut.







RENCONTRE AVEC LES COLLABORATEURS DE LA SECRÉTAIRERIE D'ÉTAT À L'OCCASION DE LA CÉRÉMONIE DE CONGE DE LA CHARGE DU SECRÉTAIRE D'ÉTAT DU CARDINAL ANGELO SODANO

ET DE LA NOMINATION COMME SECRÉTAIRE D'ÉTAT DU CARDINAL TARCISIO BERTONE - Salle des Suisses, Palais pontifical de Castelgandolfo Vendredi 15 septembre 2006

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Eminences,
Excellences,
Chers collaborateurs et collaboratrices,

Je ne peux pas terminer cette rencontre sans ajouter encore une fois une parole qui, en cet instant, me vient du coeur. C'est un moment, dans un certain sens, de tristesse; mais c'est surtout un moment de profonde gratitude. Eminence, vous avez travaillé avec de nombreux Papes, puis avec moi, en tant que Secrétaire d'Etat, avec le dévouement, la compétence, la volonté de servir dont j'ai déjà parlé. En m'associant à votre discours, je voudrais étendre ces remerciements à tous les collaborateurs et collaboratrices, et aux Représentations pontificales dans le monde. Je comprends toujours mieux que seul ce grand réseau de collaboration rend possible de répondre au mandat du Seigneur: "Confirma fratres tuos in fide". Ce n'est qu'en vertu de l'union de toutes ces compétences, ce n'est qu'en vertu de l'humilité d'un engagement appliqué et très compétent de nombreuses personnes, que peut naître à la fin cette "confirmation des frères", dans laquelle le Pape obéit au Seigneur. Il peut accomplir de manière appropriée sa mission grâce à cette vaste collaboration.

Ce n'est que ces dernières années, en tant que Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, que j'ai toujours mieux compris combien de compétences, combien de dévouement, combien d'humilité et combien de volonté de servir réellement le Seigneur dans son Eglise sont ici présents. Ce travail de Curie est, en réalité, un travail pastoral dans un sens éminent, parce qu'il aide réellement à guider le peuple de Dieu sur les verts pâturages - comme le dit le Psaume - où la Parole de Dieu est présente et nous nourrit pour toute notre vie.

Eminence, j'ai réfléchi ces dernières semaines sur quel signe de ma gratitude j'aurais pu vous donner en ce moment. J'ai eu la joie que vous m'accompagniez au cours de mon Voyage en Bavière. Nous avons visité des Sièges épiscopaux importants - Munich, Ratisbonne et l'ancien Siège de Freising - et nous avons visité notre Sanctuaire national, pour ainsi dire, Altötting, qui est appelé depuis des siècles le "coeur" de la Bavière. Il est le véritable "coeur" de ce pays, car là, en trouvant la Mère, nous trouvons le Seigneur. Là, dans toutes les vicissitudes de l'histoire, ainsi que dans toutes les difficultés du présent, nous retrouvons à nouveau, en même temps que la protection de la Mère, la joie de la foi. Là se renouvelle notre peuple.

Monsieur le Cardinal, vous avez été témoin du fait que l'Evêque de Passau m'a remis en éternel souvenir une copie du tableau du XV siècle de la Vierge, qui attire toujours à nouveau les pèlerins qui désirent partager l'amour de notre Mère à tous. J'ai pu obtenir une copie fidèle - il existe des copies moins précieuses - de la Vierge d'Altötting. Et je pense que cette Vierge d'Altötting pourrait être non seulement le signe de mon éternelle reconnaissance, mais également le signe de notre dialogue dans la prière. Que la Vierge soit toujours à vos côtés, qu'Elle vous protège toujours, qu'Elle vous guide. Telle est l'expression de ma sincère gratitude.



À S.E. M. IVAN REBERNIK AMBASSADEUR DE SLOVÉNIE PRÈS LE SAINT-SIÈGE Palais pontifical de Castelgandolfo Samedi 16 septembre 2006

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À L'OCCASION DE LA PRÉSENTATION DES LETTRES DE CRÉANCE


Monsieur l'Ambassadeur,

L'acte cordial et solennel de la présentation des Lettres qui vous accréditent comme Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de Slovénie près le Siège apostolique, rappelle les relations millénaires entre le Successeur de Pierre et le bien-aimé peuple que vous représentez ici. Soyez le bienvenu, Monsieur l'Ambassadeur. Je suis certain que les sentiments que vous évoquez à travers les paroles que vous m'avez adressées reflètent les convictions intimes de vos compatriotes à l'égard du Pape. Je prends acte avec une sincère satisfaction de ces sentiments authentiques, en exprimant aux Autorités qui vous accréditent, et en particulier au Président de la République S.E. M. Janez Drnovsek, ma reconnaissance et mon appréciation. La République de Slovénie, dans sa liberté originelle, cultive un dialogue fécond et constructif avec les instances ecclésiales présentes sur le territoire, en reconnaissant leur contribution décisive à la vie de la nation. Cela confirme le fait que les traditions catholiques, qui caractérisent depuis toujours le peuple slovène, constituent un trésor précieux auquel puiser pour exprimer l'identité elle-même la plus profonde et véritable de cette noble terre.

C'est dans ce cadre que se sont développées de façon féconde les relations cordiales entre les Slovènes et le Siège de Pierre: celles-ci sont exprimées aujourd'hui encore par les bonnes relations bilatérales que vous avez voulu à juste titre évoquer. Depuis les premiers siècles du christianisme, la force de l'Evangile a oeuvré en terre slovène, comme le révèle la présence de saints comme saint Victorin et saint Maximilien, dont le témoignage a contribué à l'affirmation de la foi chrétienne parmi les peuples qui, au VII siècle, se sont installés dans l'actuelle Slovénie. Comment ne pas penser également à la figure d'un Evêque comme le bienheureux Anton Martin Slomsek qui, à une époque plus récente, a encouragé le réveil national en accomplissant une oeuvre précieuse en tant que formateur du peuple slovène? Le christianisme et l'identité nationale sont étroitement liés. Il est donc naturel qu'il existe une profonde estime entre l'Evêque de Rome et le noble peuple qui trouve ici en Vous son représentant et sa voix.

Le fruit de ce dialogue intense et constructif, qui n'a pas été interrompu par les tristes événements du siècle qui vient de s'écouler, est l'Accord entre la République de Slovénie et le Saint-Siège sur des questions juridiques, en date du 14 décembre 2001. Il s'agit d'une entente importante, dont l'application fidèle ne pourra que renforcer les relations réciproques et la collaboration pour la promotion de la personne et du bien commun (cf. art. 1), dans le respect de la laïcité légitime de l'Etat. Toutefois, comme vous l'avez souligné à juste titre, il existe des questions encore ouvertes, qui attendent d'être affrontées et de trouver une solution opportune. Connaissant l'estime et l'affection des Slovènes pour le Pape, je suis certain que leurs représentants au niveau politique sauront interpréter leurs traditions, leur sensibilité, leur culture. En effet, le peuple slovène a le droit d'affirmer et de faire valoir l'âme chrétienne, qui en a façonné l'identité et l'a inscrit dans le contexte de l'Europe, dont les racines les plus profondes tirent leur force de la semence évangélique qui oeuvre sur le continent depuis presque deux millénaires.

265 Le devoir auquel doivent faire face les responsables actuels est d'identifier les méthodes opportunes pour transmettre aux nouvelles générations la connaissance et l'appréciation des valeurs du passé, en les rendant capables d'apporter, dans le millénaire qui vient de commencer, le riche patrimoine dont ils ont hérité. Celles-ci doivent donc être en mesure de parvenir à la connaissance concrète et spécifique des fondements culturels, éthiques et religieux sur lesquels la nation s'est édifiée au cours des siècles. Ce serait en effet une stratégie véritablement aveugle que de ne pas favoriser l'ouverture des jeunes à la connaissance des racines historiques dont s'écoule la sève nécessaire pour assurer à la nation de nouvelles saisons riches de fruits. Dans ce sens, la question de leur instruction, notamment en ce qui concerne les valeurs religieuses partagées par la majorité de la population, ne doit pas être éludée, si l'on ne veut pas risquer d'égarer progressivement les caractéristiques les plus spécifiques de la physionomie nationale. Ce qui est en jeu est le respect de la liberté même des citoyens, sur laquelle la République de Slovénie veille avec attention et que le Siège apostolique désire également promouvoir dans l'esprit de l'Accord susmentionné. Il en est de même, par ailleurs, de l'expérience d'autres peuples du continent, en particulier des peuples slaves qui, conscients de l'importance du christianisme pour leur identité sociale et de la contribution précieuse que l'Eglise peut offrir dans ce sens, ne se sont pas exemptés du devoir d'assurer, notamment au niveau législatif, que le riche patrimoine éthique et religieux continue de porter des fruits aux jeunes générations.

Puisse le dialogue instauré dans ce domaine entre les Autorités civiles et religieuses en Slovénie conduire - c'est le souhait que j'exprime volontiers en cette circonstance - à l'entente juste et sincère dont nous avons tant besoin! Cela ne manquera pas de bénéficier aux personnes auxquelles, bien que dans une perspective différente, l'Etat et l'Eglise se sentent engagés à rendre un service nécessaire. Je peux assurer que l'Eglise catholique ne manquera pas de collaborer avec l'Etat de façon sincère et cordiale sans exiger aucun privilège pour elle, mais en soumettant des propositions qui, selon son jugement, peuvent contribuer au progrès commun de la nation.

Tandis que je souhaite que les relations cordiales entre la Slovénie et le Saint-Siège continuent de se développer sur les solides bases qui les ont guidées jusqu'à présent, je confirme mon estime et mon soutien personnel, ainsi que ceux de mes collaborateurs de la Curie Romaine, dans l'accomplissement de la haute mission qui vous a été confiée, et j'accompagne ces sentiments de l'invocation d'abondantes Bénédictions divines sur vous et sur les personnes qui vous sont chères.



Discours 2005-2013 13906