Discours 2005-2013 27107

À S.E. M. FAUSTO CORDOVEZ CHIRIBOGA, NOUVEL AMBASSADEUR DE L'ÉQUATEUR PRÈS LE SAINT-SIÈGE Samedi 27 octobre 2007

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Monsieur l'Ambassadeur,

1. Je suis heureux de recevoir les Lettres qui vous accréditent comme Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République d'Equateur près le Saint-Siège. Alors que je vous souhaite une cordiale bienvenue à l'occasion de cet acte solennel, je désire exprimer une fois encore l'affection sincère que je nourris à l'égard de tous les fils et les filles de cette noble nation. Je vous remercie du salut respectueux que vous avez voulu me transmettre de la part du Président constitutionnel, M. Rafael Correa Delgado, ainsi que des expressions cordiales à l'égard de ce Siège apostolique et de ma personne, qui témoignent également des sentiments filiaux du peuple équatorien. Je vous demande donc de lui transmettre courtoisement ma sincère reconnaissance.

2. Au cours de ma visite en Equateur, en tant que Représentant du Pape Jean-Paul II en 1978, j'ai eu la joie de rencontrer un peuple pacifique, simple, accueillant, mais surtout très enraciné dans la foi chrétienne qui, comme vous l'avez souligné dans votre discours, a porté tant de fruits au cours de plusieurs générations. C'est pourquoi je désire évoquer la mémoire de sainte Marianita de Jesús, et de manière particulière celle d'une jeune laïque, la bienheureuse Narcisa de Jesús, tant aimée du peuple des fidèles, qui souhaitent qu'elle soit rapidement canonisée.

Dans leurs saints, les fidèles chrétiens découvrent le fruit mûr d'une foi qui a marqué leur histoire. Il s'agit d'un patrimoine transmis au cours des siècles, et qui, sous diverses expressions de dévotion populaire et d'art, en même temps que les valeurs morales, civiques et sociales, fait partie de leur identité en tant que nation.

3. L'humanité se trouve aujourd'hui face à de nouveaux contextes de liberté et d'espérance, souvent troublés par des situations politiques instables et par les conséquences de structures sociales faibles. En outre, l'interdépendance entre les Etats s'accroît toujours davantage. C'est pourquoi il est nécessaire et urgent de se consacrer à l'édification d'un ordre intérieur et international promouvant la coexistence pacifique, la coopération, le respect des droits de l'homme et la reconnaissance, en premier lieu, de la place centrale de la personne et de sa dignité inviolable.

Dans ce sens, et en pensant aux nombreux Equatoriens qui émigrent dans d'autres pays dans des conditions difficiles, à la recherche d'un avenir meilleur pour eux-mêmes et pour leurs familles, nous ne pouvons pas oublier que "l'amour - caritas - sera toujours nécessaire, même dans la société la plus juste. Il n'y a aucun ordre juste de l'Etat qui puisse rendre superflu le service de l'amour. Celui qui veut s'affranchir de l'amour se prépare à s'affranchir de l'homme en tant qu'homme" (Deus Caritas est ). C'est donc la charité, en tant que don généreux de soi aux autres, qui a engendré et qui continue d'engendrer ce réseau d'oeuvres éducatives, d'assistance, de promotion et de développement, qui font honneur à l'Eglise et à la société équatorienne.

4. L'Eglise catholique, qui "de par sa mission et sa nature, n'est liée à aucune forme particulière de culture, ni à aucun système politique, économique ou social" (Gaudium et spes
GS 42), offre à travers son ministère pastoral une contribution importante au bien commun du pays. Dans ce but, il est nécessaire de promouvoir et de renforcer le cadre de liberté que les textes constitutionnels et législatifs de l'Equateur lui ont reconnu. C'est pourquoi, il est également souhaitable que le nouvel ordre constitutionnel prenne en considération les garanties les plus larges pour la liberté religieuse des Equatoriens, de manière à ce que la nation puisse compter sur un cadre législatif également conforme au contexte et aux accords internationaux.

5. La liberté d'action de l'Eglise est non seulement un droit inaliénable, mais également la condition primordiale pour qu'elle puisse porter à terme sa mission au sein du peuple, notamment dans des circonstances difficiles. C'est pourquoi, "nous n'avons pas besoin d'un Etat qui régente et domine tout, mais au contraire d'un Etat qui reconnaisse généreusement et qui soutienne, dans la ligne du principe de subsidiarité, les initiatives qui naissent des différentes forces sociales" (Deus Caritas est ).

Cela ne peut d'ailleurs qu'être l'aspiration d'un gouvernement démocratique engagé à promouvoir une culture de respect et d'égalité face à la loi, ainsi qu'un exercice exemplaire de l'autorité, visant à servir le peuple tout entier. Pour tous ces motifs, le gouvernement équatorien a exprimé sa ferme volonté d'assister de manière prioritaire les plus démunis, en s'inspirant de la Doctrine sociale de l'Eglise.

Il est donc souhaitable que les citoyens puissent jouir de tous les droits, en observant les obligations correspondantes, obtenant ainsi de meilleures conditions de vie et un accès plus facile à un logement décent et au travail, à l'éducation et à la santé, dans le plein respect de la vie depuis sa conception jusqu'à son terme naturel.

535 6. Monsieur l'Ambassadeur, avant de conclure cette rencontre, je désire former mes meilleurs voeux pour le bon déroulement de votre haute mission, afin qu'elle contribue à renforcer les liens traditionnels de dialogue et de coopération entre l'Equateur et le Saint-Siège, en vous demandant de vous faire courtoisement l'interprète de mes sentiments auprès de votre gouvernement et des autres autorités nationales. Dans le même temps, je me souviens dans ma prière du bien-aimé peuple équatorien et j'implore d'abondantes bénédictions du Très-Haut sur l'Equateur, sur vous, sur votre noble famille et sur ses collaborateurs.


AUX MEMBRES DE CONGRÈS INTERNATIONAL DES PHARMACIENS CATHOLIQUES Salle du Consistoire Lundi 29 octobre 2007



Monsieur le Président,
Chers Amis,

Je suis heureux de vous accueillir, vous les membres de Congrès international des Pharmaciens catholiques, à l’occasion de votre vingt-cinquième Congrès, qui a pour thème: «Les nouvelles frontières de l’acte pharmaceutique». Le développement actuel de l’arsenal médicamenteux et des possibilités thérapeutiques qui en découlent nécessite que les pharmaciens réfléchissent sur les fonctions de plus en plus larges qu’ils sont appelés à avoir, en particulier en tant qu’intermédiaires entre le médecin et le patient; ils ont un rôle éducatif auprès des patients pour un usage juste de la prise médicamenteuse et surtout pour faire connaître les implications éthiques de l’utilisation de certains médicaments. Dans ce domaine, il n’est pas possible d’anesthésier les consciences, par exemple sur les effets de molécules ayant pour but d’éviter la nidation d’un embryon ou d’abréger la vie d’une personne. Le pharmacien doit inviter chacun à un sursaut d’humanité, pour que tout être soit protégé depuis sa conception jusqu’à sa mort naturelle, et que les médicaments remplissent véritablement leur rôle thérapeutique. D’autre part, nulle personne ne peut être utilisée, de manière inconsidérée, comme un objet, pour réaliser des expérimentations thérapeutiques; celles-là doivent se dérouler selon des protocoles respectant les normes éthiques fondamentales. Toute démarche de soin ou d’expérimentation doit avoir pour perspective un éventuel mieux-être de la personne, et non seulement la recherche d’avancées scientifiques. La poursuite d’un bien pour l’humanité ne peut se faire au détriment du bien des personnes traitées. Dans le domaine moral, votre Fédération est invitée à affronter la question de l’objection de conscience, qui est un droit qui doit être reconnu à votre profession, vous permettant de ne pas collaborer, directement ou indirectement, à la fourniture de produits ayant pour but des choix clairement immoraux, comme par exemple l’avortement et l’euthanasie.

Il convient aussi que les différentes structures pharmaceutiques, des laboratoires aux centres hospitaliers et aux officines, ainsi que l’ensemble de nos contemporains, avaient le souci de la solidarité dans le domaine thérapeutique, pour permettre un accès aux soins et aux médicaments de première nécessité de toutes les couches de la population et dans tous les pays, notamment pour les personnes les plus pauvres.

En tant que pharmaciens catholiques, puissiez-vous, sous la conduite de l’Esprit saint, puiser dans la vie de foi et dans l’enseignement de l’église les éléments qui vous guideront dans votre démarche professionnelle auprès des malades, qui ont besoin d’un soutien humain et moral pour vivre dans l’espérance et pour trouver des ressorts intérieurs qui les aideront au long des jours. Il vous revient aussi d’aider les jeunes qui rentrent dans les différentes professions pharmaceutiques à réfléchir sur les implications éthiques toujours plus délicates de leurs activités et de leurs décisions. Pour une telle démarche, il importe que se mobilisent et se rassemble l’ensemble des professionnels catholiques de la santé et les personnes de bonne volonté, pour approfondir leur formation non seulement sur le plan technique, mais aussi en ce qui concerne les questions de bioéthique, ainsi que pour proposer de telles formations à l’ensemble de la profession. L’être humain, parce qu’il est image de Dieu, doit toujours être au centre des recherches et des choix en matière biomédicale. De même, le principe naturel du devoir d’apporter des soins au malade est fondamental. Les sciences biomédicales sont au service de l’homme; si tel n’était pas le cas, elles n’auraient qu’un caractère froid et inhumain. Tout savoir scientifique dans le domaine de la santé et toute démarche thérapeutique sont au service de l’homme malade, considéré dans son être intégral, qui doit être un partenaire actif de ses soins et respecté dans son autonomie.

En vous confiant, ainsi que les malades que vous êtes amenés à soigner, à l’intercession de Notre-Dame et de saint Albert le Grand, je vous accorde, ainsi qu’à tous les membres de votre Fédération et à vos familles, la Bénédiction apostolique.




AUX PARTICIPANTS À LA RENCONTRE INTERNATIONALE "FAMILLES NOUVELLES" DU MOUVEMENT DES FOCOLARI I Salle Clémentine Samedi 3 novembre 2007

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Chers frères et soeurs!

Bienvenus et merci de votre visite. Vous venez des cinq continents et vous appartenez au Mouvement "Familles nouvelles", né il y a quarante ans dans le cadre du Mouvement des Focolari. Vous représentez donc une branche des Focolari, et vous formez aujourd'hui un réseau de 800.000 familles oeuvrant dans 182 pays, toutes engagées à faire de leur maison un "foyer" qui fasse rayonner dans le monde le témoignage d'une expérience familiale inspirée par l'Evangile. J'adresse à chacun de vous mes salutations les plus cordiales, que j'étends également à tous ceux qui ont voulu vous accompagner au cours de cette rencontre. Je salue de manière particulière vos responsables, qui se sont fait les interprètes des sentiments communs et qui m'ont présenté le style avec lequel oeuvre votre mouvement et les objectifs de celui-ci. Je remercie pour les salutations qui m'ont été transmises de la part de Chiara Lubich à laquelle j'adresse de tout coeur mes meilleurs voeux, en la remerciant afin qu'elle continue, avec sagesse et une ferme adhésion à l'Eglise, à guider la grande famille des Focolari.

Comme on vient de le rappeler, c'est précisément dans le cadre de cette vaste institution de grand mérite que vous vous placez, chers couples d'époux, au service du monde des familles à travers une action pastorale importante et toujours actuelle, orientée dans quatre directions: la spiritualité, l'éducation, la socialisation et la solidarité. En effet, votre travail d'évangélisation est silencieux et profond, et il vise à témoigner de la manière dont seule l'unité familiale, don de Dieu-Amour, peut faire de la famille un véritable nid d'amour, une maison accueillante pour la vie et une école de vertus et de valeurs chrétiennes pour les enfants. Face à un si grand nombre de défis sociaux et économiques, culturels et religieux que la société contemporaine doit affronter partout à travers le monde, votre oeuvre, véritablement providentielle, constitue un signe d'espérance et un encouragement pour les familles chrétiennes à être un "espace" privilégié où l'on proclame dans la vie de tous les jours et malgré toutes les difficultés la beauté de placer en son centre Jésus Christ et de suivre fidèlement son Evangile.

Le thème même de votre rencontre - "Une maison bâtie sur le roc. L'Evangile vécu, une réponse aux problèmes de la famille aujourd'hui" - souligne l'importance de cet itinéraire ascétique et pastoral. Le secret est précisément de vivre l'Evangile! C'est donc à juste titre que, au cours des travaux de l'assemblée de ces derniers jours, outre des interventions qui illustrent la situation où se trouve aujourd'hui la famille dans les différents contextes culturels, vous avez prévu d'approfondir la Parole de Dieu et l'écoute de témoignages qui montrent que l'Esprit Saint agit dans les coeurs et dans l'expérience familiale, même dans des situations complexes et difficiles. Pensons aux hésitations des fiancés face à des choix définitifs pour l'avenir, à la crise des couples, aux séparations et aux divorces, tout comme aux unions irrégulières, aux conditions des veuves, aux familles en difficulté, à l'accueil des mineurs abandonnés. Je souhaite de tout coeur que, également grâce à votre engagement, puissent être définies des stratégies pastorales visant à satisfaire les besoins croissants de la famille contemporaine et les multiples défis face auxquels elle se trouve, afin qu'elle ne manque pas à sa mission particulière dans l'Eglise et dans la société.

A cet égard, dans l'Exhortation apostolique post-synodale Christifideles laici mon vénéré et bien-aimé prédécesseur Jean-Paul II rappelait que l'Eglise estime que "le couple et la famille constituent le premier espace pour l'engagement social des fidèles laïcs" (n. 40). Pour réaliser sa vocation, la famille, consciente d'être la cellule primordiale de la société, ne doit pas oublier qu'elle peut puiser des forces à la grâce d'un sacrement, voulu par le Christ pour confirmer l'amour entre l'homme et la femme: un amour entendu comme don de soi, réciproque et profond. Comme l'observa également Jean-Paul II: "La famille reçoit la mission de garder, révéler et communiquer l'amour, reflet vivant et participation réelle de l'amour de Dieu pour l'humanité et de l'amour du Christ Seigneur pour l'Eglise son Epouse" (Familiaris consortio
FC 17). Selon le projet divin, la famille est donc un lieu sacré et sanctifiant et l'Eglise, qui est proche d'elle depuis toujours, la soutient dans sa mission encore davantage aujourd'hui, car de très nombreuses menaces la frappent tant de l'intérieur que de l'extérieur. Pour ne pas céder au découragement, l'aide divine est nécessaire; c'est pourquoi il faut que chaque famille chrétienne regarde avec confiance en direction de la Sainte Famille, cette "Eglise domestique" originelle au sein de laquelle "par un mystérieux dessein de Dieu, le Fils de Dieu a vécu caché durant de longues années. Elle est donc le prototype et l'exemple de toutes les familles chrétiennes" (ibid., n. 86).

Chers frères et soeurs, l'humble et sainte Famille de Nazareth, icône et modèle de toute famille humaine, ne vous fera pas manquer son soutien céleste. Mais votre recours constant à la prière, à l'écoute de la Parole de Dieu et à une vie sacramentelle intense sont indispensables, ainsi qu'un effort constant pour vivre le commandement du Christ de l'amour et du pardon. L'amour ne recherche pas son propre intérêt, il ne tient pas compte du mal qui a été reçu, mais il met sa joie dans la vérité. L'amour "excuse tout, croit tout, espère tout, supporte tout" (cf. 1Co 13,5-7). Chers frères et soeurs, poursuivez votre chemin et soyez des témoins de cet Amour, qui vous rendra toujours plus "coeur" et "levain" du Mouvement Familles nouvelles tout entier. Je vous assure de mon souvenir dans la prière, pour chacun de vous, pour vos activités et pour tous ceux que vous rencontrez dans le cadre de votre apostolat et, avec affection, je donne à tous la Bénédiction apostolique.


AUX MEMBRES DE LA FÉDÉRATION DES UNIVERSITAIRES CATHOLIQUES ITALIENS (F.U.C.I) Salle Clémentine Vendredi 9 novembre 2007

Chers jeunes amis de la FUCI,

J'apprécie tout particulièrement votre visite, que vous accomplissez au terme des célébrations du 110 anniversaire de la naissance de votre Association, la FUCI, la Fédération des universitaires catholiques italiens. J'adresse à chacun de vous mes salutations cordiales, en commençant par les présidents nationaux et par l'Assistant ecclésiastique central, et je les remercie des paroles qu'ils m'ont adressées en votre nom. Je salue Monseigneur Giuseppe Betori, Secrétaire général de la Conférence épiscopale italienne, et Mgr Domenico Sigalini, Evêque de Palestrina et Assistant ecclésiastique général de l'Action catholique italienne, qui vous ont accompagnés à cette audience et qui témoignent par leur présence du fort enracinement de la FUCI dans l'Eglise qui est en Italie. Je salue les Assistants diocésains et les membres de la fondation FUCI. Je renouvelle à tous et à chacun la reconnaissance de l'Eglise pour le travail que votre association accomplit au sein du monde universitaire au service de l'Evangile.

537 La FUCI célèbre ses 110 ans: une occasion propice pour regarder le chemin parcouru et les perspectives futures. La sauvegarde de la mémoire historique représente une valeur précieuse parce que, si l'on considère la solidité et la consistance de ses propres racines, on est plus facilement poussé à poursuivre avec enthousiasme l'itinéraire engagé. En cette heureuse circonstance, je reprends volontiers les paroles que vous adressa il y a dix ans mon vénéré et bien-aimé prédécesseur Jean-Paul II, à l'occasion de votre centenaire: "L'histoire de ces 100 ans - déclara-t-il - confirme que le parcours de la FUCI constitue un chapitre significatif dans la vie de l'Eglise en Italie, en particulier dans ce vaste et multiforme mouvement laïc dont l'Action catholique a été le pilier" (Insegnamenti de Jean-Paul II, XIX, 1 [1996], p. 1110).

Comment ne pas reconnaître que la FUCI a contribué à la formation d'entières générations de chrétiens exemplaires, qui ont su traduire dans leur vie et à travers leur vie l'Evangile, en s'engageant sur le plan culturel, civil, social et ecclésial? Je pense, en premier lieu, aux bienheureux Piergiorgio Frassati et Alberto Marvelli, qui appartiennent à votre génération; je me souviens de personnalités illustres comme Aldo Moro et Vittorio Bachelet, tous deux tués de façon barbare; et je ne peux pas non plus oublier mon vénéré prédécesseur Paul VI, qui fut un attentif et courageux Assistant ecclésiastique central de la FUCI dans les années difficiles du fascisme, ainsi que Mgr Emilio Guano et Mgr Franco Costa. Les dix dernières années ont été en outre caractérisées par le ferme engagement de la FUCI à redécouvrir sa dimension universitaire. Après de nombreux débats et des discussions animées, au milieu des années 90, a été engagée en Italie une réforme radicale du système académique, qui présente désormais une nouvelle physionomie, riche de perspectives prometteuses, avec toutefois des éléments qui suscitent une préoccupation légitime. Pour votre part, tant au cours de vos récents congrès que dans les pages de la revue Ricerca, vous vous êtes constamment préoccupés de la nouvelle configuration des études académiques, des modifications législatives relatives, du thème de la participation des étudiants et des manières dont les dynamiques globales de la communication influent sur la formation et sur la transmission du savoir.

C'est justement dans ce contexte que la FUCI peut exprimer pleinement encore aujourd'hui son charisme ancien et toujours actuel: à savoir le témoignage convaincu de l'"amitié possible" entre l'intelligence et la foi, qui implique l'effort incessant de conjuguer la maturation dans la foi avec la croissance dans l'étude et l'acquisition du savoir scientifique. Dans ce contexte prend une valeur particulière l'expression qui vous tient à coeur: "croire dans les études". En effet, pourquoi estimer que celui qui a la foi devrait renoncer à la libre recherche de la vérité, et que celui qui recherche de manière libre la vérité, devrait renoncer à la foi? Il est en revanche possible, précisément au cours des études universitaires et grâce à celles-ci, de connaître une authentique maturation humaine, scientifique et spirituelle. "Croire dans les études" veut dire reconnaître que les études et la recherche - en particulier pendant les années d'Université - possèdent une force intrinsèque d'élargissement des horizons de l'intelligence humaine, à condition que les études universitaires conservent un caractère exigeant, rigoureux, sérieux, méthodique et progressif. A ces conditions, elles représentent un avantage pour la formation globale de la personne humaine, comme le répétait souvent le bienheureux Giuseppe Tovini, observant qu'à travers les études, les jeunes ne deviendraient jamais pauvres, alors que sans études, ils ne seraient jamais devenus riches.

Les études représentent, dans le même temps, une opportunité providentielle pour avancer sur le chemin de la foi, parce que l'intelligence bien cultivée ouvre le coeur de l'homme à l'écoute de la voix de Dieu, en mettant en évidence l'importance du discernement et de l'humilité. C'est précisément à la valeur de l'humilité que je me référais lors du récent Agorà de Lorette, lorsque j'exhortais les jeunes italiens à ne pas suivre la route de l'orgueil, mais celle d'un sens réaliste de la vie ouvert à la dimension transcendante. Aujourd'hui, comme par le passé, celui qui veut être un disciple du Christ est appelé à aller à contre-courant, à ne pas se laisser attirer par les appels intéressés et insistants qui sont lancés depuis diverses chaires où sont valorisés des comportements inspirés par l'arrogance et la violence, l'abus de pouvoir et la conquête du succès par tous les moyens. On enregistre dans la société actuelle une course parfois frénétique visant à apparaître et à posséder au dépend malheureusement de l'être, et l'Eglise, maître en humanité, ne se lasse pas d'exhorter en particulier les nouvelles générations, auxquelles vous appartenez, à rester vigilantes et à ne pas craindre de choisir des voies "alternatives" que seul le Christ sait indiquer.

Oui, chers amis, Jésus appelle tous ses amis à orienter leur existence selon un mode de vie sobre et solidaire, à tisser des relations affectives sincères et gratuites avec les autres. En ce qui vous concerne, chers jeunes étudiants, il vous demande de vous engager honnêtement dans les études, en cultivant un sens mûr de la responsabilité et un intérêt partagé pour le bien commun. Les années de l'Université sont donc une école de témoignage évangélique convaincu et courageux. Et pour mener à bien cette mission, tentez de cultiver une amitié intime avec le divin Maître, en vous plaçant à l'école de Marie, Siège de la Sagesse. Je vous confie à son intercession maternelle et, tout en vous assurant de mon souvenir dans la prière, je donne de tout coeur à tous, avec affection, une Bénédiction apostolique particulière, que j'étends volontiers à vos familles et aux personnes qui vous sont chères.


AUX MEMBRES DE LA CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DU PORTUGAL EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM" Salle du Consistoire Samedi 10 novembre 2007

Monsieur le Cardinal Patriarche,
Bien-aimés Evêques portugais!

J'éprouve une grande joie à vous recevoir aujourd'hui dans la Maison de Pierre, avec la force de Dieu, solide pilier de ce pont que vous êtes appelés à être et à créer entre l'humanité et son destin suprême, la Très Sainte Trinité. Huit ans après votre dernière visite "ad limina", vous trouvez le visage de Pierre différent, mais pas son coeur ni ses bras qui vous accueillent et vous confirment dans la force de Dieu qui nous soutient et nous rend frères dans le Christ Seigneur: "Que la grâce et la paix vous soient accordées en abondance" (1P 1,2). Avec ces paroles de bienvenue, je salue chacun de vous, en remerciant le Président de la Conférence épiscopale, Mgr Jorge Ortiga, pour le tableau qu'il a tracé de la vie et de la situation de vos diocèses et pour les pieux sentiments qu'il a exprimés au nom de tous et que je restitue avec une vive affection et avec l'assurance de mes prières pour vous et pour ceux qui sont confiés à votre sollicitude pastorale.

Bien-aimés Evêques du Portugal, vous avez franchi la Porte Sainte du Jubilé de l'An 2000 à la tête du pèlerinage de vos diocésains, en les invitant à entrer et à rester dans le Christ comme dans la Maison de leurs désirs les plus profonds et authentiques, c'est-à-dire la Maison de Dieu, et à mesurer jusqu'à quel point ces désirs étaient déjà devenus réalité, c'est-à-dire jusqu'où la vie et la personne de chacun incarnent le Verbe de Dieu, selon l'exemple de la parole de saint Paul, qui disait: "Je vis, mais ce n'est plus moi, c'est le Christ qui vit en moi" (Ga 2,20). Le signe concret de cette incarnation est de faire déborder pour les autres la vie du Christ qui jaillit en moi. Car "je ne peux avoir le Christ pour moi seul: je ne peux lui appartenir qu'en union avec tous ceux qui sont devenus ou qui deviendront les siens... Nous devenons "un seul corps", fondus ensemble dans une unique existence" (Deus caritas est ). Ce "corps" du Christ qui embrasse l'humanité de tous les temps et les lieux, c'est l'Eglise. Saint Ambroise a vu sa préfiguration dans cette "terre sainte" indiquée par Dieu à Moïse: "Retire tes sandales de tes pieds car le lieu où tu te tiens est une terre sainte" (Ex 3,5); et c'est là, ensuite, qu'il lui fut ordonné: "Mais toi, tu te tiendras ici, auprès de moi" (Dt 5,30), un ordre que le saint Evêque de Milan rend actuel pour le fidèle en ces termes: "Tu restes avec moi (avec Dieu) si tu restes dans l'Eglise; reste là où je te suis apparu; là je suis avec toi. Là où se trouve l'Eglise, tu trouves le point de référence le plus stable pour ton esprit; là où je te suis apparu dans le buisson ardent, se trouve le fondement de ton âme. De fait, Je te suis apparu dans l'Eglise, comme par le passé dans le buisson ardent. Tu es le buisson; Je suis le feu; le feu dans le buisson, c'est Moi dans ta chair. C'est pourquoi Je suis le feu; pour t'illuminer, pour détruire tes épines, tes péchés et te montrer ma bienveillance" (Epistolae extra collectionem: Ep 14,41-42). Ces paroles traduisent bien la façon de vivre et l'appel laissés par Dieu aux pèlerins du Grand Jubilé.

538 En ce moment, je désire rendre grâce avec vous au Christ Seigneur pour la grande miséricorde dont il a fait preuve envers son Eglise en pèlerinage au Portugal pendant la période de l'Année Sainte et au cours des années suivantes, imprégnées par le même esprit jubilaire, qui vous a fait voir, sans crainte, les limites et les manquements qui vous ont laissés sans pain, et convaincus de devoir prendre le chemin du retour vers la Maison du Père, où le pain se trouve en abondance. De fait, on ressent le même climat que celui du Jubilé, qui se poursuit dans de nombreuses initiatives que vous avez entreprises au cours des dernières années: le recensement général de la pratique dominicale, la reprise du chemin synodal fait ou à faire, la convocation dans divers diocèses de la station eucharistique ou de la mission générale selon des modalités nouvelles ou anciennes, la réalisation au niveau national de la rencontre de mouvements et de communautés ecclésiales nouvelles et du congrès de la famille, la volonté de servir l'homme exprimée par l'Eglise et par l'Etat dans un nouveau Concordat, l'acclamation de la sainteté exemplaire dans la personne de nouveaux bienheureux... Au cours de ce long pèlerinage, la confession la plus fréquente sur les lèvres des chrétiens a été le manque de participation à la vie communautaire, en se proposant de trouver de nouvelles formes d'intégration dans la communauté. Le mot d'ordre a été, et continue d'être, d'édifier des chemins de communion. Il est nécessaire de changer le style d'organisation de la communauté ecclésiale portugaise et la mentalité de ses membres pour avoir une Eglise en harmonie avec le Concile Vatican II, dans laquelle soit bien définie la fonction du clergé et du laïcat, en tenant compte du fait que nous ne faisons qu'un, depuis que nous avons été baptisés et intégrés dans la famille des fils de Dieu, et que nous sommes tous coresponsables de la croissance de l'Eglise.

Mes bien-aimés frères, cette ecclésiologie de la communion sur le chemin ouvert par le Concile, par laquelle l'Eglise portugaise se sent particulièrement interpellée dans le sillage du Grand Jubilé, est la route sûre à suivre, sans perdre de vue d'éventuels écueils, comme l'horizontalisme à la source, la démocratisation dans l'attribution des ministères sacramentels, l'assimilation de l'Ordre conféré aux services naissants, le débat sur celui qui est le premier parmi les membres de la communauté (débat inutile dans la mesure où le Seigneur Jésus a déjà décidé qu'il s'agit du dernier). Avec tout cela, je ne veux pas dire que l'on ne doive pas débattre sur le juste ordonnancement au sein de l'Eglise et sur l'attribution des responsabilités: il y aura toujours des déséquilibres, qui exigent des corrections. De telles questions ne peuvent cependant pas nous distraire de la véritable mission de l'Eglise: celle-ci ne doit pas parler en premier lieu d'elle-même, mais de Dieu.

Les éléments essentiels du concept chrétien de "communion" se trouvent dans le texte de la première Lettre de saint Jean: "Ce que nous avons contemplé, ce que nous avons entendu, nous vous l'annonçons à vous aussi, pour que, vous aussi, vous soyez en communion avec nous" (
1Jn 1,3). Le point de départ de la communion apparaît là avec évidence: c'est l'union de Dieu avec l'homme, qui est le Christ en personne; la rencontre avec le Christ crée la communion avec Lui et, en Lui, avec le Père dans l'Esprit Saint. Nous voyons ainsi - comme je l'ai écrit dans ma première Encyclique - que "à l'origine du fait d'être chrétien il n'y a pas une décision éthique ou une grande idée, mais la rencontre avec un événement, avec une Personne, qui donne à la vie un nouvel horizon et par là son orientation définitive" (Deus caritas est ).

Nous savons que la première rencontre peut revêtir une pluralité de formes, comme le démontrent les innombrables vies de saints (leur présentation fait partie de l'évangélisation, qui doit être accompagnée par des modèles de pensée et de conduite), mais l'initiation chrétienne de la personne passe, normalement, par l'Eglise: l'économie divine du salut a besoin de l'Eglise. En raison du nombre croissant de chrétiens non pratiquants dans vos diocèses, il vaut peut-être la peine de vérifier "l'efficacité des parcours actuels d'initiation, afin que, par l'action éducative de nos communautés, le chrétien soit aidé à mûrir toujours davantage, en parvenant à donner à sa vie une authentique assise eucharistique, de sorte qu'il soit en mesure de rendre raison de son espérance d'une manière adaptée à notre temps" (Exhortation post-synodale Sacramentum caritatis, n. 18).

Bien-aimés Evêques du Portugal, il y a quatre semaines vous vous êtes réunis dans le Sanctuaire de Fatima avec le Cardinal-Secrétaire d'Etat que j'ai envoyé là-bas comme mon Légat spécial à l'occasion de la clôture des célébrations pour le 90 anniversaire des Apparitions de Notre Dame. Il me plaît de penser à Fatima comme à une école de foi dont la Vierge Marie serait comme maîtresse; Elle a élevé là sa chaire pour enseigner aux petits Voyants, et ensuite à la multitude, les vérités éternelles et l'art de prier, de croire, d'aimer. Avec l'humble attitude des élèves qui ont besoin d'apprendre la leçon, confiez chaque jour à cette si éminente Maîtresse et Mère du Christ, chacun de vous et les prêtres qui sont vos proches collaborateurs dans la direction du troupeau, les personnes consacrées, hommes et femmes, qui anticipent le Ciel sur la terre, et les fidèles laïcs qui modèlent la terre à l'image du Ciel. En implorant sur tous, avec la protection de Nossa Senhora de Fátima, la lumière et la force de l'Esprit, je vous donne ma Bénédiction apostolique.



Discours 2005-2013 27107