Discours 2005-2013 544

BENOÎT XVI ANGELUS Parvis de la Basilique Vaticane Solennité du Christ Roi de l'univers Dimanche 25 novembre 2007



Mardi prochain, à Annapolis, aux Etats-Unis, Israéliens et Palestiniens, avec l'aide de la Communauté internationale, entendent relancer le processus de négociations pour trouver une solution juste et définitive au conflit qui depuis soixante ans ensanglante la Terre Sainte, et qui a provoqué tant de larmes et de souffrances au sein de ces deux peuples. Je vous demande de vous unir à la Journée de prière d'aujourd'hui lancée par la Conférence épiscopale des Etats-Unis d'Amérique pour implorer de l'Esprit de Dieu la paix pour cette région qui nous est si chère, et les dons de la sagesse et du courage pour tous les acteurs de cette rencontre importante.

A l'issue de la célébration solennelle de ce jour, je souhaite adresser une salutation cordiale à toutes les personnes présentes, y compris toutes celles qui sont restées à l'extérieur de la Basilique. Je suis particulièrement reconnaissant aux fidèles venus de loin pour accompagner les nouveaux Cardinaux et participer à cet événement, qui manifeste de manière unique l'unité et l'universalité de l'Eglise catholique. Je renouvelle ma pensée déférente aux autorités civiles.

Je salue cordialement les pèlerins francophones, particulièrement les personnes venues accompagner les nouveaux Cardinaux qui, en ce jour où nous célébrons le Christ Roi de l'univers, ont reçu une responsabilité plus grande au service de l'Eglise. Avec eux, demandons au Christ d'établir son règne sur le monde et de fortifier notre espérance.

Nous nous préparons maintenant à réciter, comme d'habitude, la prière de l'Angelus. Dans des occasions comme celle-ci, nous ressentons encore plus vivement la présence spirituelle de la Très Sainte Vierge Marie. Comme au Cénacle de Jérusalem, Elle est aujourd'hui au milieu de nous et nous accompagne dans cette étape du chemin ecclésial. Nous voulons confier à la Vierge les nouveaux membres du Collège cardinalice afin qu'elle obtienne pour chacun d'eux, comme pour tous les ministres de l'Eglise, de toujours imiter le Christ dans le service généreux de Dieu et de son Peuple, pour participer à sa royauté glorieuse.

CONCÉLÉBRATION AVEC LES NOUVEAUX CARDINAUX ET REMISE DE L'ANNEAU CARDINALICE HOMÉLIE Dimanche 25 novembre 2007

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Basilique Vaticane Solennité du Christ Roi de l'univers


545 Messieurs les Cardinaux,
vénérés frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,
Mesdames et messieurs,
chers frères et soeurs!

Cette année la solennité du Christ Roi de l'univers, couronnement de l'année liturgique, est enrichie par l'accueil dans le Collège cardinalice de 23 nouveaux membres que j'ai invités, selon la tradition, à concélébrer l'Eucharistie avec moi. A chacun d'eux j'adresse mes salutations cordiales, les étendant avec une affection fraternelle à tous les Cardinaux présents. Par ailleurs, je suis heureux de saluer les délégations venues de différents pays et le Corps diplomatique près le Saint-Siège, les nombreux Evêques et prêtres, les religieux et les religieuses, et tous les fidèles, en particulier ceux qui proviennent des diocèses confiés à la direction pastorale de certains des nouveaux Cardinaux.

La fête liturgique du Christ Roi offre à notre célébration un fond très significatif, défini et illuminé par les lectures bibliques. Nous nous trouvons comme face à une fresque imposante composée de trois grandes scènes: au centre, la Crucifixion, selon le récit de l'évangéliste Luc; avec d'un côté, l'onction royale de David par les anciens d'Israël; de l'autre, l'hymne christologique par laquelle saint Paul introduit la Lettre aux Colossiens. La figure du Christ domine l'ensemble, l'unique Seigneur devant lequel nous sommes tous frères. Toute la hiérarchie de l'Eglise, chaque charisme et ministère, tout et tous, nous sommes au service de sa grandeur.

Nous devons partir de l'événement central: la Croix. Le Christ manifeste ici sa royauté singulière. Sur le Calvaire, deux attitudes opposées sont confrontées. Plusieurs personnages au pied de la croix, ainsi que l'un des deux larrons, s'adressent avec mépris au Crucifié: Si tu es le Christ, le Roi Messie - disent-ils -, sauve-toi toi-même et descends de la potence. Jésus, en revanche, révèle sa gloire en demeurant là, sur la Croix, comme Agneau immolé. D'une manière inattendue, l'autre larron se range de son côté et confesse implicitement la royauté du juste innocent et implore: "Souviens-toi de moi lorsque tu viendras avec ton royaume" (
Lc 23,42). Saint Cyrille d'Alexandrie commente: "Tu le vois crucifié et tu l'appelles roi. Tu crois que celui qui supporte les railleries et la souffrance parviendra à la gloire divine" (Commentaire de Luc, homélie 153). Selon l'évangéliste Jean, la gloire divine est déjà présente, bien que cachée et défigurée par la la croix. Mais dans le langage de Luc aussi le futur est anticipé dans le présent quand Jésus promet au bon larron: "Aujourd'hui tu seras avec moi dans le Paradis" (Lc 23,43). Saint Ambroise observe: "Celui-là priait pour que le Seigneur se rappelât de lui, une fois entré dans son Royaume, mais le Seigneur lui répondit: en vérité, en vérité je te le dis, aujourd'hui tu seras avec moi dans le Paradis. La vie consiste à demeurer avec le Christ, car là où est le Christ, là est le Royaume" (Démonstration de l'Evangile selon Lc 10,121). L'accusation: "Celui-là est le roi des Juifs", inscrite sur un écriteau cloué au-dessus de la tête de Jésus, devient ainsi la proclamation de la vérité. Saint Ambroise fait encore remarquer: "A juste titre l'inscription se trouve au-dessus de la croix, car bien que le Seigneur fût en croix, toutefois il resplendissait du haut de la croix avec une majesté royale" (ibid., 10, 113).

Dans les quatre Evangiles, la scène de la crucifixion constitue le moment de la vérité, lorsque le "voile du temple" se déchire et qu'apparaît le Saint des Saints. En Jésus crucifié advient la plus haute révélation possible de Dieu en ce monde, car Dieu est amour et la mort sur la croix de Jésus est le plus grand acte d'amour de toute l'histoire. Or, sur l'anneau cardinalice, que je remettrai d'ici peu aux nouveaux membres du sacré Collège, la crucifixion est précisément représentée. Ceci, chers Frères nouveaux Cardinaux, sera toujours pour vous une invitation à vous souvenir de quel Roi vous êtes les serviteurs, sur quel trône il a été élevé et de la façon dont il a été fidèle jusqu'à la fin pour vaincre le péché et la mort par la force de la miséricorde divine. Notre mère l'Eglise, épouse du Christ, vous donne ce signe en mémoire de son Epoux, qui l'a aimée et qui s'est livré lui-même pour elle (cf. Ep Ep 5,25). Ainsi, en portant l'anneau cardinalice, vous êtes constamment invités à vous souvenir de donner votre vie pour l'Eglise.

Si nous tournons maintenant notre regard vers la scène de l'onction royale de David, présentée par la première lecture, nous sommes frappés par un aspect important de la royauté, à savoir sa dimension "corporative". Les anciens d'Israël vont à Hébron, scellent un pacte d'alliance avec David, en déclarant se considérer unis à lui et ne vouloir former qu'un avec lui. Si nous rapportons cette figure au Christ, il me semble que cette même profession d'alliance se prête très bien à être faite par vous précisément, chers Frères Cardinaux. Vous aussi, qui formez le "sénat" de l'Eglise, vous pouvez dire à Jésus: "Nous sommes de tes os et de ta chair" (2S 5,1). Nous T'appartenons et nous ne voulons former qu'un avec Toi. Tu es le berger du Peuple de Dieu, Tu es le chef de l'Eglise (cf. 2S 5,2). Au cours de cette célébration eucharistique solennelle, nous voulons renouveler notre pacte avec Toi, notre amitié, car ce n'est que dans cette relation intime et profonde avec Toi, Jésus notre Roi et Seigneur, que la dignité qui nous a été conférée et la responsabilité qu'elle comporte prennent leur sens et leur valeur.

Il nous reste maintenant à admirer la troisième partie du "triptyque" devant lequel nous place la Parole de Dieu: l'hymne christologique de la Lettre aux Colossiens. Avant tout, faisons nôtre le sentiment de joie et de gratitude d'où elle jaillit, pour le fait que le royaume du Christ, le "sort des saints dans la lumière", n'est pas quelque chose de simplement entrevu de loin, mais la réalité dont nous sommes appelés à faire partie, dans laquelle nous avons été "transférés" grâce à l'oeuvre rédemptrice du Fils de Dieu (cf. Col Col 1,12-14). Cette action de grâce ouvre l'esprit de saint Paul à la contemplation du Christ et de son mystère dans ses deux dimensions principales: la création de toutes les choses et leur réconciliation. Pour le premier aspect, la grandeur du Christ consiste dans le fait que "c'est en lui qu'ont été créées toutes choses... et pour lui.... et tout subsiste en lui" (Col 1,16). La seconde dimension est centrée sur le mystère pascal: par la mort du Fils sur la croix, Dieu s'est réconcilié toute créature, il a fait la paix entre le ciel et la terre; en le ressuscitant d'entre les morts, il en a fait la prémice de la nouvelle création, "plénitude" de toute réalité et "tête du corps" mystique qu'est l'Eglise (cf. Col Col 1,18-20). Nous sommes à nouveau devant la croix, événement central du mystère du Christ. Dans la vision paulinienne, la croix est encadrée à l'intérieur de l'ensemble de l'économie du salut, où la royauté de Jésus se déploie dans toute son ampleur cosmique.

Ce texte de l'Apôtre exprime une synthèse de vérité et de foi si puissante que nous ne pouvons pas ne pas être profondément admiratifs. L'Eglise est dépositaire du mystère du Christ: elle l'est en toute humilité et sans ombre d'orgueil ou d'arrogance, car il s'agit du don le plus élevé qu'elle a reçu sans aucun mérite et qu'elle est appelée à offrir gratuitement à l'humanité de chaque époque, comme horizon de sens et de salut. Ce n'est pas une philosophie, ce n'est pas une gnose, bien qu'elle comprenne aussi la sagesse et la connaissance. C'est le mystère du Christ; c'est le Christ lui-même, le Logos incarné, mort et ressuscité, constitué Roi de l'univers. Comment ne pas éprouver un élan d'enthousiasme rempli de gratitude pour avoir été admis à contempler la splendeur de cette révélation? Comment ne pas ressentir en même temps la joie et la responsabilité de servir ce Roi, de témoigner de sa grandeur par la vie et par la parole? Tel est, de façon particulière, notre devoir, vénérés Frères Cardinaux: annoncer au monde la vérité du Christ, espérance pour chaque homme et pour la famille humaine tout entière. Dans le sillage du Concile oecuménique Vatican II, mes vénérés prédécesseurs, les Serviteurs de Dieu Paul VI, Jean-Paul I et Jean-Paul II, ont été d'authentiques hérauts de la royauté du Christ dans le monde contemporain. C'est pour moi un motif de consolation de toujours pouvoir compter sur vous, aussi bien collégialement qu'individuellement, pour mener à bien moi aussi cette tâche fondamentale du ministère pétrinien.

546 En conclusion, étroitement lié à cette mission, se trouve un aspect que je voudrais aborder et confier à votre prière: la paix entre tous les disciples du Christ, comme signe de la paix que Jésus est venu instaurer dans le monde. Nous avons écouté dans l'hymne christologique la grande nouvelle: il a plu à Dieu de "réconcilier" l'univers par la croix du Christ (cf. Col Col 1,20)! Eh bien, l'Eglise est cette portion d'humanité où se manifeste déjà la royauté du Christ, dont la paix est la manifestation privilégiée. C'est la Jérusalem nouvelle, encore imparfaite car pèlerine dans l'histoire, mais en mesure d'anticiper, en quelque sorte, la Jérusalem céleste. Ici, nous pouvons enfin nous référer au texte du Psaume responsorial, le Psaume 121: il fait partie de ce qu'on appelle les "chants des ascensions" et c'est l'hymne de joie des pèlerins qui, montant vers la cité sainte et qui arrivés à ses portes, lui adressent le salut de paix: shalom! Selon une étymologie populaire, Jérusalem était interprétée comme la "cité de la paix", cette paix que le Messie, fils de David, aurait instauré dans la plénitude des temps. En Jérusalem, nous reconnaissons la figure de l'Eglise, sacrement du Christ et de son Royaume.

Chers Frères Cardinaux, ce Psaume exprime bien le chant d'amour ardent pour l'Eglise que vous portez assurément dans votre coeur. Vous avez consacré votre vie au service de l'Eglise et vous êtes désormais appelés à assumer en elle une tâche d'une plus haute responsabilité. Les paroles du Psaume trouvent en vous une pleine adhésion: "Appelez la paix sur Jérusalem" (v. 6). Que la prière pour la paix et l'unité constitue votre première et principale mission, afin que l'Eglise soit "ferme et compacte" (v. 3), signe et instrument d'unité pour tout le genre humain (cf. Lumen gentium LG 1). Je place, plus encore, nous plaçons tous ensemble votre mission sous la protection vigilante de la Mère de l'Eglise, la Très Sainte Vierge Marie. C'est à Elle, unie à son Fils sur le Calvaire et élevée comme Reine à sa droite dans la gloire, que nous confions les nouveaux Cardinaux, le Collège cardinalice et la communauté catholique tout entière qui s'efforce de semer dans les sillons de l'histoire le Royaume du Christ, Seigneur de la vie et Prince de la paix.

HOMÉLIE Basilique Vaticane Samedi 24 novembre 2007



Messieurs les Cardinaux,
Vénérés frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,
Chers frères et soeurs!

Dans cette Basilique vaticane, coeur du monde chrétien, se renouvelle aujourd'hui un événement ecclésial significatif et solennel: le Consistoire ordinaire public pour la création de 23 nouveaux Cardinaux, avec l'imposition de la barrette et l'assignation du titre. C'est un événement qui suscite à chaque fois une émotion particulière, et pas seulement chez ceux qui, à travers ces rites, sont admis à faire partie du Collège cardinalice, mais dans toute l'Eglise, heureuse de ce signe éloquent de l'unité catholique. Dans sa structure, la cérémonie elle-même met en évidence la valeur de la tâche que les nouveaux Cardinaux sont appelés à accomplir en collaborant étroitement avec le Successeur de Pierre, et elle invite le peuple de Dieu à prier afin que, dans leur service, ces frères restent toujours fidèles au Christ, jusqu'au sacrifice de la vie si nécessaire, et qu'ils se laissent guider uniquement par son Evangile. Nous nous rassemblons donc avec foi autour d'eux et nous élevons avant tout vers le Seigneur notre prière d'action de grâce.

Chers frères, dans ce climat de joie et d'intense spiritualité, je salue avec affection chacun de vous, qui à partir d'aujourd'hui êtes membres du Collège cardinalice, choisis pour être, selon une antique institution, les plus proches conseillers et collaborateurs du Successeur de Pierre dans la direction de l'Eglise. Je salue et je remercie Mgr Leonardo Sandri, qui m'a adressé en votre nom des paroles courtoises et respectueuses, soulignant dans le même temps la signification et l'importance du moment ecclésial que nous vivons. Je désire, en outre, adresser une juste pensée au regretté Mgr Ignacy Jez, que le Dieu de toute grâce a rappelé à lui juste avant sa nomination, pour lui offrir une toute autre couronne: celle de la gloire éternelle dans le Christ. Mon salut cordial s'adresse ensuite aux Cardinaux présents et également à ceux qui n'ont pas pu être physiquement avec nous, mais qui sont unis à nous en esprit. La célébration du Consistoire est toujours une occasion providentielle pour offrir urbi et orbi, à la ville de Rome et au monde entier, le témoignage de cette singulière unité qui rassemble les Cardinaux autour du pape, Evêque de Rome. En une circonstance aussi solennelle, j'ai également à coeur d'adresser un salut respectueux et déférent aux Représentations gouvernementales et aux personnalités venues ici de toutes les parties du monde, ainsi qu'aux familles, aux amis, aux prêtres, aux religieux, aux religieuses et aux fidèles de chaque Eglise locale dont proviennent les nouveaux Cardinaux. Enfin, je salue tous ceux qui se sont rassemblés ici pour les entourer et leur exprimer leur estime et leur affection avec une joie chaleureuse.

Chers frères, la célébration d'aujourd'hui vous insère de plein droit dans la vénérable Eglise de Rome, dont le Successeur de Pierre est le Pasteur. Dans le Collège des Cardinaux revit ainsi l'antique presbyterium de l'Evêque de Rome, dont les membres, alors qu'ils exerçaient des fonctions pastorales et liturgiques dans les différentes églises, ne lui faisaient pas manquer leur précieuse collaboration en ce qui concerne l'accomplissement des devoirs liés à son ministère apostolique universel. Les temps ont changé et la grande famille des disciples du Christ est aujourd'hui présente sur chaque continent jusqu'aux lieux les plus reculés de la terre, elle parle pratiquement toute les langues du monde et des peuples de chaque culture lui appartiennent. La diversité des membres du Collège cardinalice, que ce soit en raison de leur origine géographique ou culturelle, met en relief cette croissance providentielle et souligne dans le même temps les exigences pastorales différentes auxquelles le Pape doit répondre. L'universalité, la catholicité de l'Eglise se reflète donc bien dans la composition du Collège des Cardinaux: un grand nombre d'entre eux sont pasteurs de communautés diocésaines, d'autres sont au service direct du Siège apostolique, et d'autres encore ont rendu des services méritoires dans des domaines pastoraux spécifiques.

Chers et vénérés frères qui venez d'être créés Cardinaux, chacun de vous représente donc une partie du Corps mystique articulé du Christ, qui est l'Eglise présente en chaque lieu. Je sais combien de fatigue et de sacrifice comporte aujourd'hui le soin des âmes, mais je connais la générosité qui soutient votre activité apostolique quotidienne. C'est pourquoi, en la circonstance que nous vivons, j'ai à coeur de vous réaffirmer ma sincère appréciation pour le service que vous avez fidèlement prêté au cours de tant d'années de travail dans les différents milieux du ministère ecclésial, un service qu'à présent, avec l'élévation au cardinalat, vous êtes appelés à accomplir avec une plus grande responsabilité encore, en étroite communion avec l'Evêque de Rome. Je pense à présent avec affection aux communautés confiées à vos soins et, de manière particulière, à celles qui sont le plus éprouvées par la souffrance, par les défis et les difficultés de toutes sortes. Parmi celles-ci, comment ne pas tourner le regard avec appréhension et affection, en ce moment de joie, vers les chères communautés qui se trouvent en Irak? Ces frères et soeurs dans la foi font l'expérience dans leur chair des conséquences dramatiques d'un conflit persistant et elles vivent à présent dans une situation politique plus que jamais fragile et délicate. En appelant à faire partie du Collège des Cardinaux le Patriarche de l'Eglise chaldéenne, j'ai voulu exprimer de manière concrète ma proximité spirituelle et mon affection pour ces populations. Chers et vénérés frères, nous voulons ensemble réaffirmer la solidarité de l'Eglise tout entière envers les chrétiens de cette terre bien-aimée et inviter à invoquer de Dieu miséricordieux, pour tous les peuples concernés, l'avènement de la réconciliation souhaitée et de la paix.

547 Nous venons d'entendre la Parole de Dieu qui nous aide à mieux comprendre le moment solennel que nous vivons. Dans le passage évangélique, Jésus vient de rappeler pour la troisième fois le sort qui l'attend à Jérusalem, mais l'arrivisme des disciples l'emporte sur la peur qui les avait assaillis l'espace d'un instant. Après la confession de Pierre à Césarée et la discussion le long de la route sur lequel d'entre eux était le plus grand, l'ambition pousse les fils de Zébédée à revendiquer pour eux-mêmes les meilleures places dans le royaume messianique, à la fin des temps. Dans la course aux privilèges, tous les deux savent ce qu'ils veulent, ainsi que les dix autres, malgré leur "vertueuse" indignation. Mais en réalité ils ne savent pas ce qu'ils demandent. C'est Jésus qui le leur fait comprendre, en parlant en des termes bien différents du "ministère" qui les attend. Il corrige la conception édulcorée du mérite qu'ils ont, selon laquelle l'homme peut acquérir des droits à l'égard de Dieu.

Chers et vénérés frères, l'évangéliste Marc nous rappelle que chaque véritable disciple du Christ ne peut aspirer qu'à une seule chose: partager sa passion, sans revendiquer aucune récompense. Le chrétien est appelé à assumer la condition de "serviteur" en suivant les traces de Jésus, c'est-à-dire en donnant sa vie pour les autres de manière gratuite et désintéressée. Ce n'est pas la recherche du pouvoir et du succès, mais l'humble don de soi pour le bien de l'Eglise qui doit caractériser chacun de nos gestes et chacune de nos paroles. En effet, la véritable grandeur chrétienne ne consiste pas à dominer, mais à servir. Jésus répète aujourd'hui à chacun de nous qu'Il "n'est pas venu pour être servi, mais pour servir, et donner sa vie en rançon pour une multitude" (
Mc 10,45). Voilà l'idéal qui doit orienter votre service. Chers frères, en entrant dans le Collège des Cardinaux, le Seigneur vous demande le service de l'amour et il vous le confie: amour pour Dieu, amour pour son Eglise, amour pour nos frères dans le plus grand et inconditionnel dévouement usque ad sanguinis effusionem, comme le récite la formule pour l'imposition de la barrette et comme le montre la couleur rouge des vêtements que vous portez.

Soyez les apôtres de Dieu qui est Amour et les témoins de l'espérance évangélique: c'est ce que le peuple chrétien attend de vous. La cérémonie d'aujourd'hui souligne la grande responsabilité qui, à cet égard, pèse sur chacun de vous, vénérés et chers frères, et qui trouve confirmation dans les paroles de l'apôtre Pierre que nous venons d'entendre: "Sanctifiez dans vos coeurs le Seigneur Christ, toujours prêts à la défense contre quiconque vous demande raison de l'espérance qui est en vous" (1P 3,15). Une telle responsabilité n'exempte pas des risques mais, rappelle encore saint Pierre, "mieux vaudrait souffrir en faisant le bien, si telle était la volonté de Dieu, qu'en faisant le mal" (1P 3,17). Le Christ vous demande de confesser devant les hommes sa vérité, d'embrasser et de partager sa cause; et d'accomplir tout cela "avec douceur et respect, en possession d'une bonne conscience" (1P 3,15-16), c'est-à-dire avec cette humilité intérieure qui est le fruit de la coopération avec la grâce de Dieu.

Chers frères et soeurs, demain, dans cette même basilique, j'aurai la joie de célébrer l'Eucharistie, en la solennité du Christ Roi de l'univers, avec les nouveaux Cardinaux, et je leur remettrai l'anneau. Il s'agira d'une occasion plus que jamais importante et opportune pour réaffirmer notre unité dans le Christ et pour renouveler notre volonté commune de le servir avec une totale générosité. Accompagnez-les par votre prière, afin qu'ils répondent au don reçu avec un dévouement total et constant. Nous nous adressons à présent avec confiance à Marie, Reine des Apôtres. Que sa présence spirituelle, aujourd'hui, en ce cénacle singulier, soit le gage pour les nouveaux Cardinaux et pour nous tous de la constante effusion de l'Esprit Saint qui guide l'Eglise dans son chemin à travers l'histoire. Amen!



PAROLES AU TERME DU CONSISTOIRE Parvis de la Basilique Vaticane Samedi 24 novembre 2007



Chers frères et soeurs,

bienvenus ici, sur cette place. Je vous remercie de votre présence. Nous avons craint la pluie, c'est pourquoi la célébration a eu lieu dans la Basilique. Vous êtes ici courageusement présents et vous avez prié avec nous. Je vous remercie de votre présence priante, de votre participation à ce moment important de l'Eglise catholique. Les nouveaux Cardinaux reflètent l'universalité de l'Eglise, sa catholicité: l'Eglise parle dans toutes les langues, étreint tous les peuples, toutes les cultures. Tous ensemble, nous sommes la famille de Dieu. Et, comme famille, nous sommes réunis ici et nous prions le Seigneur de bénir ces nouveaux Cardinaux qui sont au service de vous tous. Nous prions aussi la Vierge de nous accompagner pas à pas.

Je vous souhaite à tous un bon dimanche et un bon retour. Merci de votre présence. Au revoir et bonne journée!


AUX NOUVEAUX CARDINAUX ACCOMPAGNÉS DE LEURS FAMILLES ET DE LEURS AMIS Aula Paul VI Lundi 26 novembre 2007





548 Messieurs les Cardinaux,
Chers frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,
Chers amis!

Cette rencontre prolonge le climat de prière et de communion, que nous avons vécu en ces jours de fête pour la création de 23 nouveaux Cardinaux. Le Consistoire et la célébration eucharistique d'hier, solennité du Christ Roi, nous ont offert une occasion singulière pour vivre l'expérience de la catholicité de l'Eglise, bien représentée par la provenance variée des membres du Collège cardinalice, rassemblés en étroite communion autour du Successeur de Pierre. Je suis donc heureux d'adresser encore une fois mon salut cordial à ces nouveaux Cardinaux et, avec eux, je vous salue tous, familles et amis, venus pour les entourer à un moment aussi important de leur existence.

C'est tout d'abord vous que je salue, chers Cardinaux italiens. Je vous salue, Monsieur le Cardinal Giovanni Lajolo, Président de la Commission pontificale et du Gouvernorat de l'Etat de la Cité du Vatican; je vous salue, Monsieur le Cardinal Angelo Comastri, Archiprêtre de la Basilique vaticane, mon Vicaire général pour la Cité du Vatican et Président de la Fabrique de Saint-Pierre; je vous salue, Monsieur le Cardinal Raffaele Farina, Archiviste et Bibliothécaire de la Sainte Eglise romaine; je vous salue, Monsieur le Cardinal Angelo Bagnasco, Archevêque métropolitain de Gênes et Président de la Conférence épiscopale italienne; je vous salue, Monsieur le Cardinal Giovanni Coppa, ancien Nonce apostolique en République tchèque; je vous salue, Monsieur le Cardinal Angelo Betti, ancien Recteur de l'Université pontificale du Latran. Vénérés et chers frères, de nombreuses personnes qui vous sont chères, proches de vous à divers titres, se trouvent à vos côtés en cette circonstance à la foi solennelle et familiale. J'exhorte chacune d'elles à ne jamais vous faire manquer leur amitié, leur estime et leur prière, en vous aidant ainsi à continuer à servir fidèlement l'Eglise et à rendre, dans les diverses tâches et ministères que la Providence vous confie, un témoignage toujours plus généreux d'amour pour le Christ.

Je suis heureux de saluer les nouveaux membres du Collège des Cardinaux. L'Archevêque de Paris, le Cardinal André Vingt-Trois; l'Archevêque de Dakar, le Cardinal Théodore-Adrien Sarr, ainsi que leurs proches et leurs diocésains qui ont souhaité les accompagner en cette heureuse circonstance. Que les cérémonies que nous avons eu l'occasion de vivre au cours des deux journées précédentes affermissent votre foi et votre amour du Christ et de l'Eglise. Je vous invite aussi à soutenir vos pasteurs et à les accompagner de votre prière, pour qu'ils guident toujours avec soin le peuple qui leur est confié. N'oublions pas non plus de demander au Christ que des jeunes acceptent de s'engager dans la voie du sacerdoce.

J'adresse un salut cordial aux prélats anglophones que j'ai eu la joie d'élever à la dignité cardinalice lors du Consistoire de samedi dernier. Le Cardinal John Patrick Foley, Grand Maître des Chevaliers de l'Ordre équestre du Saint-Sépulcre de Jérusalem; le Cardinal Séan Baptist Brady, Archevêque d'Armagh (Irlande); le Cardinal Oswald Gracias, Archevêque de Bombay (Inde), le Cardinal Daniel DiNardo, Archevêque de Gavelston-Houston (Etats-Unis d'Amérique); le Cardinal John Njue, Archevêque de Nairobi (Kenya); le Cardinal Emmanuel III Delly, Patriarche de Babylone des Chaldéens. En outre, je suis heureux d'avoir l'opportunité de souhaiter la bienvenue à leurs familles et à leurs amis, ainsi qu'à tous les fidèles qui les ont accompagnés à Rome. Le Collège des Cardinaux, dont l'origine est liée à l'antique clergé de l'Eglise romaine, est chargé d'élire le Successeur de Pierre et de le conseiller dans les questions les plus importantes. Que ce soit dans les fonctions de la Curie ou dans leur ministère dans les Eglises locales du monde entier, les Cardinaux sont appelés à partager de manière particulière la sollicitude du Pape pour l'Eglise universelle. La couleur vive de leur vêtement est traditionnellement considérée comme un signe de leur engagement à défendre le troupeau du Christ, jusqu'à l'offrande de leur propre sang. Alors que les Cardinaux acceptent le poids de cette charge, je suis certain qu'ils seront soutenus par vos prières constantes et par votre coopération dans les efforts pour édifier le Corps du Christ dans l'unité, la sainteté et la paix.

J'adresse un salut cordial au Cardinal Paul Josef Cordes, à sa famille, à ses amis et à ses invités provenant d'Allemagne, ainsi qu'aux fidèles de son archidiocèse de Paderborn, dont il a été également l'Evêque auxiliaire. Avec vous, je remercie notre nouveau Cardinal pour le service précieux qu'il accomplit depuis de nombreuses années en tant que Président du Conseil pontifical "Cor unum" pour le Successeur de Pierre. Continuez à l'accompagner de vos prières et soutenez-le dans sa tâche importante de sollicitude concrète pour le service plein d'amour du Pape à l'égard des pauvres et des indigents. Que le Seigneur accorde à chacun de vous sa grâce!

Je salue cordialement les nouveaux Cardinaux de langue espagnole, accompagnés de leurs familles et de nombreux évêques, prêtres, religieux et laïcs venus d'Argentine, d'Espagne et du Mexique. L'Argentine exulte de joie pour le Cardinal Leonardo Sandri qui, après son service auprès du Saint-Siège comme Substitut de la Secrétairerie d'Etat, préside à présent la Congrégation pour les Eglises orientales, et également pour le Cardinal Esteban Karlic, Archevêque émérite de Paraná, qui pendant tant d'années a servi avec sollicitude et abnégation cette communauté ecclésiale. L'Eglise qui est en Espagne se réjouit pour le Cardinal Agustín García-Gasco Vicente, Archevêque de Valence, une ville que j'ai visitée l'année dernière à l'occasion de la Journée mondiale de la Famille, pour le Cardinal Lluís Martínez Sistach, Archevêque de Barcelone, qui a précédemment exercé un ministère fécond à Tortosa et à Tarragone, et également pour le Cardinal Urbano Navarrete, ancien Recteur de l'Université pontificale grégorienne, qui a consacré sa vie à l'étude et à l'enseignement du droit canonique. L'Eglise qui est en pèlerinage au Mexique se réjouit pour le Cardinal Francisco Robles Ortega, Archevêque de Monterrey, dont le dévouement pastoral constant s'est manifesté également à Toluca. Nous tournons notre pensée vers la Vierge Marie, pour laquelle vos peuples éprouvent une grande dévotion, en lui demandant d'intercéder auprès de son divin Fils pour ces Cardinaux, afin qu'il rende fécond leur service de l'Eglise.

Je salue le Cardinal Odilo Pedro Scherer, les Evêques qui ont voulu l'accompagner, ainsi que sa famille, ses amis et ses invités. Je profite de cette occasion pour rappeler mon voyage pastoral de cette année à São Paulo et pour renouveler mes remerciements pour l'accueil qui m'a été réservé dans votre archidiocèse. Je forme des voeux afin que cette élévation au cardinalat contribue à approfondir votre amour pour l'Eglise et à renforcer la foi de vos fidèles en Jésus Christ notre Sauveur et Seigneur!

Je salue le Cardinal Stanislaw Rylko et ses hôtes. Je le remercie de tout ce qu'il accomplit en faveur de la participation des laïcs à la vie de l'Eglise et je lui souhaite d'abondantes grâces. Je vous recommande tous à l'amour de Dieu et je vous bénis de tout coeur.

549 Vénérés et chers nouveaux Cardinaux, je vous renouvelle pour finir mon salut fraternel et, alors que je vous assure de ma prière, je vous demande de m'accompagner toujours de votre expérience humaine et pastorale tant appréciée. Je compte beaucoup sur votre soutien précieux, afin de pouvoir exercer au mieux mon ministère au service de tout le peuple de Dieu. J'ai besoin de ce soutien. Et vous, chers frères et soeurs qui les entourez avec affection, je vous remercie encore une fois de votre participation aux divers rites et moments du Consistoire. Continuez à prier pour eux et également pour moi, afin que la communion des pasteurs avec le Pape soit toujours solide, de manière à offrir au monde entier le témoignage d'une Eglise fidèle au Christ et prête à aller, avec un courage prophétique, à la rencontre des exigences spirituelles des hommes de notre temps. En repartant dans vos divers diocèses apportez à tous, je vous le demande, mon salut et l'assurance de mon souvenir constant auprès du Seigneur. Chers nouveaux Cardinaux, j'invoque sur vous et sur vous tous qui êtes ici présents, la protection de la Mère céleste de Dieu et des saints Apôtres Pierre et Paul. Avec ces sentiments, je vous donne de tout coeur ma Bénédiction.

                                                        Décembre 2007






Discours 2005-2013 544