Discours 2005-2013 31508

AU CONGRÈS INTERNATIONAL PROMU PAR LA FONDATION "CENTESIMUS ANNUS - PRO PONTIFICE" Salle Clémentine Samedi 31 mai 2008

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Monsieur le cardinal,
Vénérés frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,
Mesdames et Messieurs,

C'est avec plaisir que je vous rencontre aujourd'hui et que je vous souhaite la bienvenue. Je remercie le comte Lorenzo Rossi di Montelera, qui en qualité de président de la Fondation s'est fait l'interprète de vos sentiments, en présentant également les lignes de conduite que vous avez suivies au cours de l'année. Je salue le cardinal Attilio Nicora et NN.SS. Claudio Maria Celli et Domenico Calcagno, comme chacun d'entre vous, à qui je renouvelle l'expression de ma reconnaissance pour le service que vous rendez à l'Eglise, en offrant un apport généreux aux nombreuses initiatives du Saint-Siège au service des pauvres dans de nombreuses parties du monde. Je vous remercie, en particulier, du don que vous m'avez fait à l'occasion de cette rencontre.

Cette année, pour votre rassemblement habituel, vous avez choisi comme sujet: "Le capital social et le développement humain". Vous avez ainsi voulu réfléchir sur le besoin, qui est ressenti par beaucoup, de promouvoir un développement mondial attentif à la promotion intégrale de l'homme, en mettant en lumière également la contribution que peuvent apporter les associations de volontariat, les fondations à but non lucratif et d'autres communautés nées avec l'objectif de rendre le tissu social toujours plus solidaire. Un développement harmonieux est possible si les choix économiques et politiques mis en oeuvre tiennent compte de ces principes fondamentaux qui le rendent accessible à tous: je pense, en particulier, aux principes de subsidiarité et de solidarité. La personne, créature à l'image de Dieu et voulue par Lui pour protéger et administrer les immenses ressources de la Création, doit toujours être placée au centre de toute stratégie économique, en particulier quand on considère le réseau étendu et complexe des relations qui caractérise l'époque post-moderne. Seule une culture partagée de la participation responsable et active peut permettre à tout être humain de se sentir non pas bénéficiaire et témoin passif, mais collaborateur actif dans le processus de développement mondial.

L'homme, auquel Dieu dans la Genèse a confié la terre, a le devoir de faire fructifier tous les biens terrestres, en s'employant à les utiliser pour satisfaire les divers besoins de tous les membres de la famille humaine. Une des métaphores récurrentes dans l'Evangile est justement, en effet, celle de l'administrateur. L'homme doit donc, avec l'âme d'un administrateur fidèle, gérer les ressources que Dieu lui a confiées en les mettant à disposition de tous. En d'autres termes, il convient d'éviter que le profit soit seulement individuel ou que des formes de collectivisme oppriment la liberté personnelle. L'intérêt économique et commercial ne doit jamais devenir exclusif, parce qu'il serait amené de fait à porter atteinte à la dignité humaine. Puisque le processus de mondialisation, en acte dans le monde, pénètre toujours plus dans le domaine de la culture, de l'économie, des finances et de la politique, le grand défi d'aujourd'hui est de "mondialiser" non seulement les intérêts économiques et commerciaux, mais également les attentes de solidarité, dans le respect et dans la valorisation de l'apport de toutes les composantes de la société. Comme vous le répétez à juste titre, la croissance économique ne doit jamais être séparée de la recherche d'un développement intégral humain et social. A cet égard, l'Eglise dans sa doctrine sociale, souligne l'importance de l'apport des corps intermédiaires selon le principe de l'aide, pour contribuer librement à orienter les changements socio-culturels et les diriger vers un progrès authentique de l'homme et de la collectivité. A ce propos, j'ai réaffirmé dans l'Encyclique Spe salvi que "les structures les meilleures fonctionnent seulement si, dans une communauté, sont vivantes les convictions capables de motiver les hommes en vue d'une libre adhésion à l'ordonnancement communautaire" (n. 24).

Chers amis, alors que je vous renouvelle ma gratitude pour le généreux soutien que vous prêtez sans cesse aux activités de charité et de promotion humaine dans l'Eglise, je vous invite également à offrir la contribution de votre réflexion pour la réalisation d'un ordre économique mondial juste. A ce propos, il me plaît de reprendre une affirmation éloquente du Concile Vatican II: "Les chrétiens - lit-on dans la Constitution Gaudium et spes - ne peuvent pas former de souhait plus vif que celui de rendre service aux hommes de leur temps, avec une générosité toujours plus grande et plus efficace. Aussi, dociles à l'Evangile et bénéficiant de sa force, unis à tous ceux qui aiment et pratiquent la justice, ils ont à accomplir sur cette terre une tâche immense..." (n. 93). Continuez dans cet esprit votre action en faveur de tant de nos frères. Au dernier jour, au jour du Jugement dernier, il nous sera demandé si nous avons utilisé ce que Dieu a mis à notre disposition pour répondre aux attentes légitimes et aux besoins de nos frères, en particulier les plus petits et les plus pauvres d'entre eux.

Que la Vierge Marie, que nous contemplons aujourd'hui alors qu'elle rend visite à sa cousine plus âgée Elisabeth, obtienne pour chacun d'entre vous d'être toujours attentionné envers votre prochain. Je vous assure de mon souvenir dans la prière et je vous donne de tout coeur ma Bénédiction, à vous tous ici présents, à vos familles et à tous ceux qui collaborent avec vous dans vos diverses activités professionnelles.



CÉLÉBRATION POUR LA CLÔTURE DU MOIS DE MARIE

PAROLES Place Saint-Pierre Samedi 31 mai 2008

683 Chers frères et soeurs,

Nous concluons le mois de mai par cette suggestive rencontre de prière mariale. Je vous salue avec affection et je vous remercie de votre participation. Je salue tout d'abord le cardinal Angelo Comastri; avec lui je salue les autres cardinaux, archevêques, évêques et prêtres, qui ont participé à cette célébration vespérale. J'étends mon salut aux personnes consacrées et à vous tous, chers fidèles laïcs, qui par votre présence avez voulu rendre hommage à la Très Sainte Vierge.

Nous célébrons aujourd'hui la fête de la Visitation de la Bienheureuse Vierge et la mémoire du Coeur immaculé de Marie. Tout nous invite donc à tourner notre regard avec confiance vers Marie. Ce soir aussi, nous nous sommes adressés à Elle avec l'ancienne et toujours actuelle pieuse pratique du chapelet. Le chapelet, lorsqu'il n'est pas une répétition mécanique de formules traditionnelles, est une méditation biblique qui nous fait reparcourir les événements de la vie du Seigneur en compagnie de la Bienheureuse Vierge, en les conservant, comme Elle, dans notre coeur. Au cours du mois de mai, il existe dans de nombreuses communautés chrétiennes la belle habitude de réciter de manière plus solennelle le chapelet en famille et dans les paroisses. A présent, alors que le mois se termine, que cette bonne habitude ne cesse pas; qu'elle se poursuive même avec un plus grand zèle, afin que, à l'école de Marie, la lampe de la foi brille toujours plus dans le coeur des chrétiens et dans leurs maisons.

Aujourd'hui, en la fête de la Visitation, la liturgie nous fait entendre à nouveau le passage de l'Evangile de Luc, qui raconte le voyage de Marie de Nazareth vers la maison de sa cousine âgée Elisabeth. Imaginons-nous l'état d'âme de la Vierge après l'Annonciation, lorsque l'Ange partit de chez elle. Marie renferme en elle un grand mystère; elle savait que quelque chose d'unique et d'extraordinaire avait eu lieu; elle se rendait compte qu'avait commencé le dernier chapitre de l'histoire du salut du monde. Mais, autour d'Elle, tout était resté comme avant et le village de Nazareth ignorait complètement ce qui lui était arrivé.

Avant de se préoccuper pour elle-même, Marie pense cependant à Elisabeth qui est âgée, après avoir su qu'elle allait bientôt accoucher, et poussée par le mystère d'amour qu'elle vient d'accueillir en elle-même, elle se met en chemin "en hâte" pour aller lui porter son aide. Voilà la grandeur simple et sublime de Marie! Lorsqu'elle arrive chez Elisabeth, il se produit un fait qu'aucun peintre ne pourra jamais rendre dans la beauté et la profondeur de sa réalisation. La lumière intérieure de l'Esprit Saint enveloppe leurs personnes. Et Elisabeth, illuminée d'en-Haut, s'exclame: "Tu es bénie entre toute les femmes, et le fruit de tes entrailles est béni. Comment ai-je ce bonheur que la mère de mon Seigneur vienne jusqu'à moi? Car, lorsque j'ai entendu tes paroles de salutation, l'enfant a tressailli d'allégresse au-dedans de moi. Heureuse celle qui a cru à l'accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur" (
Lc 1,42-45).

Ces paroles pourraient nous apparaître disproportionnées par rapport au contexte réel. Elisabeth est l'une des nombreuses femmes âgées d'Israël et Marie une jeune fille inconnue d'un village perdu de Galilée. Que peuvent-elles être et que peuvent-elles faire dans un monde où comptent d'autres personnes et pèsent d'autres pouvoirs? Mais Marie nous étonne encore une fois; son coeur est transparent, totalement ouvert à la lumière de Dieu; son âme est sans péché, elle n'est pas alourdie par l'orgueil et l'égoïsme. Les paroles d'Elisabeth font naître dans son esprit un cantique de louange, qui est une lecture "théologique" de l'histoire authentique et profonde: une lecture que nous devons sans cesse apprendre de Celle dont la foi est sans ombres ni fissures. "Mon âme magnifie le Seigneur". Marie reconnaît la grandeur de Dieu. Tel est le premier et indispensable sentiment de foi; le sentiment qui donne sa sécurité à la créature humaine et la libère de la peur, même si elle se trouve au milieu des tempêtes de l'histoire.

Allant au-delà de la surface, Marie "voit" avec les yeux de la foi l'oeuvre de de Dieu dans l'histoire. C'est pourquoi elle est bienheureuse, car elle a cru: en effet, c'est à cause de sa foi qu'elle a accueilli la Parole du Seigneur et a conçu le Verbe incarné. Sa foi lui a fait voir que les trônes des puissants de ce monde sont tous provisoires, alors que le trône de Dieu est l'unique roc qui ne change pas et qui ne tombe pas. Et son Magnificat, après plusieurs siècles et plusieurs millénaires, reste l'interprétation la plus véritable et profonde de l'histoire, alors que les lectures faites par de si nombreux sages de ce monde ont été démenties par les faits au cours des siècles.

Chers frères et soeurs! Revenons chez nous avec le Magnificat dans notre coeur. Portons en nous les mêmes sentiments de louange et d'action de grâce de Marie envers le Seigneur, sa foi et son espérance, son abandon docile entre les mains de la divine Providence. Imitons son exemple de disponibilité et de générosité à servir nos frères. En effet, ce n'est qu'en accueillant l'amour de Dieu et en faisant de notre existence un service désintéressé et généreux envers notre prochain, que nous pourrons élever avec joie un chant de louange au Seigneur. Que la Vierge qui nous invite ce soir à trouver refuge dans son Coeur Immaculé nous obtienne cette grâce. Je donne à tous ma Bénédiction.

                                                           Juin 2008


À UN PÈLERINAGE ORGANISÉ PAR L'ARCHIDIOCÈSE DE TURIN Aula Paul VI Lundi 2 juin 2008

684 Messieurs les cardinaux,
Chers frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,
Chers frères et soeurs de l'archidiocèse de Turin!

J'adresse mon salut cordial à chacun de vous; soyez les bienvenus dans la maison du Successeur de saint Pierre! Je vous rencontre avec plaisir au terme de votre pèlerinage à Rome, qui couronne le chemin spirituel et pastoral accompli par votre communauté diocésaine ces dernières années. Alors que je vous accueille avec joie, j'adresse tout d'abord mon salut à votre archevêque, le cardinal Severino Poletto, en le remerciant également des aimables paroles avec lesquelles il a illustré l'itinéraire ecclésial que vous avez jusqu'ici parcouru et les perspectives missionnaires qui vous attendent à l'avenir. Je salue l'évêque auxiliaire, le cardinal Francesco Marchisano, les prêtres, les religieux et les religieuses, les catéchistes et les représentants des paroisses et des différentes institutions de votre archidiocèse. Je salue les autorités et tous ceux qui ont voulu s'unir à vous pour cette rencontre. A travers vous ici présents, je voudrais faire parvenir mon salut à toute la population de Turin, ville riche d'histoire civile et religieuse. Je me dois également d'adresser un mot de proximité spirituelle particulière et de solidarité aux populations des régions de Pignerol et de Coni, touchées ces jours derniers par les conséquences du mauvais temps. Je vous assure d'une prière particulière au Seigneur, pour qu'il accueille dans sa paix les victimes et soutienne ceux qui luttent pour faire face à cette grave catastrophe naturelle.

Chers frères et soeurs, après avoir célébré l'Eucharistie dans la basilique Saint-Paul-hors-les-Murs, c'est près de la tombe du Prince des apôtres que vous avez ce matin renouvelé ensemble votre profession de foi solennelle. Et quel lieu pouvait être mieux indiqué pour un geste aussi significatif que la Redditio fidei? Dans la basilique Saint-Pierre où tout parle de l'héroïsme des débuts du christianisme, le sang des martyrs continue à être une invitation éloquente à suivre le Christ sans compromis. Dans la basilique et dans les grottes vaticanes s'arrêtent des catholiques de toutes les parties du monde qui, même s'ils appartiennent à des cultures et des langues différentes, professent la même foi et font partie de l'unique Eglise du Christ. Vous avez également pu vous plonger dans ce climat de sainteté et de catholicité et maintenant, avant de retourner dans vos communautés, vous attendez du Pape une parole qui vous encourage à être des témoins cohérents de l'Evangile à notre époque.

Votre archevêque m'a informé du chemin que votre communauté diocésaine a parcouru depuis que, en 1999, il a été appelé par le Seigneur à en être le Pasteur et, plus encore, depuis qu'il a, en septembre 2003, entrepris sa visite pastorale, qui se conclura, si Dieu le veut, dimanche prochain. Cet itinéraire ecclésial a fait de vous les acteurs d'une grande action apostolique et missionnaire, en partant d'un mouvement spirituel intense, centré notamment sur l'Eucharistie dominicale, sur l'adoration eucharistique hebdomadaire et sur la redécouverte de l'importance du Sacrement de la Réconciliation. Animés par le souffle sincère d'une "première évangélisation renouvelée", vous vous êtes engagés à rapprocher "ceux qui sont loin", en élargissant les frontières de la charité pastorale de toutes les communautés paroissiales. En cette année pastorale, année de la Redditio fidei, votre engagement missionnaire est encore plus marqué par le partage et trouve précisément son point culminant dans la profession de foi solennelle que vous avez proclamée ensemble ce matin auprès de la tombe du Prince des apôtres.

Mais tout ne se termine pas ici: après cette pause romaine revigorante, il convient de reprendre la route où de nouveaux engagements vous attendent. En effet, vous dédierez la prochaine année pastorale à la Parole de Dieu et celle qui suivra vous verra vous orienter vers une contemplation plus attentive du mystère de la Passion du Christ. Dans ce contexte, je suis heureux de répondre à votre grande attente et d'accueillir le souhait de votre archevêque, en consentant qu'au printemps 2010 ait lieu une autre "ostension du Suaire" solennelle. Si le Seigneur me donne la vie et la santé, j'espère également venir pour cette ostension. Ce sera une occasion on ne peut plus propice - j'en suis certain - pour contempler ce mystérieux Visage, qui parle silencieusement au coeur des hommes, en les invitant à y reconnaître le visage de Dieu, qui "a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui et ne se perde pas, mais ait la vie éternelle" (
Jn 3,16).

Chers frères et soeurs, n'ayez pas peur de vous confier au Christ: Lui seul peut satisfaire les attentes plus profondes de l'âme humaine. Qu'aucune difficulté, qu'aucun obstacle ne ralentisse votre amour pour son Evangile! Si Jésus est le coeur de vos familles, de vos paroisses et de toutes les communautés, vous sentirez sa présence vivante, et l'unité et la communion entre toutes les diverses articulations du diocèse grandiront. Nourrissez toutefois constamment votre union avec le Seigneur dans la prière et à travers la pratique fréquente des Sacrements, en particulier de l'Eucharistie et de la Confession. Que la formation chrétienne continue des jeunes et des adultes soit parmi vos préoccupations pastorales. Que sur les traces de vos saints, attentifs aux exigences des jeunes et des pauvres, comme don Bosco, Murialdo, Cottolengo, Cafasso et d'autres encore - c'est vraiment une terre de saints -, brille votre diocèse par les oeuvres de charité et un effort général dans la confrontation au grand "défi de l'éducation" des nouvelles générations. Que la mère céleste du Christ, que vous invoquez comme Consolatrice et Auxiliatrice, protège les prêtres et les agents pastoraux; qu'elle obtienne pour votre communauté de nombreuses et saintes vocations au sacerdoce et à la vie consacrée; qu'elle suscite chez les jeunes garçons et les jeunes filles le désir de suivre l'idéal élevé de la sainteté; que tous connaissent réconfort et soutien, notamment les personnes âgées, les malades et les personnes souffrantes, seules et abandonnées. Alors que je vous assure de mon souvenir particulier dans la prière, je vous bénis avec affection, vous tous ici présents, et j'étends ma pensée à toutes les personnes qui vous sont chères.


AUX ÉVÊQUES DE MALAYSIA, DE SINGAPOUR ET DU BRUNEI EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM" Vendredi 6 juin 2008

Chers frères évêques,

Je suis heureux de vous accueillir à l'occasion de votre visite ad limina, alors que vous renouvelez les liens de communion dans la foi et dans l'amour entre vous, pasteurs du peuple de Dieu en Malaysia, au Brunei et à Singapour, et le successeur de Pierre sur le Siège de Rome. Je vous remercie des paroles aimables que Mgr Pakiam m'a adressées en votre nom et je vous assure tous de mes prières et de mes voeux, ainsi qu'à ceux qui sont confiés à vos soins pastoraux.

685 Par une heureuse coïncidence, votre visite dans la ville des apôtres Pierre et Paul se déroule à un moment où l'Eglise du monde entier s'apprête à fêter une année dédiée à saint Paul, le grand apôtre des nations, à l'occasion du deux millième anniversaire de sa naissance. Je prie pour que vous puissiez vous inspirer de l'exemple de cet apôtre zélé, maître exceptionnel, et témoin courageux de la foi de l'Evangile. Que par son intercession vous puissiez faire l'expérience d'un renouveau de ferveur dans la grande tâche missionnaire pour laquelle, comme saint Paul, vous avez été choisis et appelés (cf. Ga 1,15-16), celle d'annoncer l'Evangile de Jésus Christ en Malaysia, au Brunei et à Singapour. En reprenant les paroles adressées par saint Paul aux plus anciens des Ephésiens, je vous exhorte à être "attentifs à vous-mêmes, et à tout le troupeau dont l'Esprit Saint vous a établis gardiens pour paître l'Eglise de Dieu, qu'il s'est acquise par le sang de son propre fils" (Ac 20,28).

"La foi de l'Eglise en Jésus est un don reçu et un don à partager; c'est le don le plus grand que l'Eglise puisse offrir à l'Asie" (Ecclesia in Asia ). Heureusement, les peuples d'Asie font preuve d'un intense désir de Dieu (cf. ibid. n. 9). En leur transmettant le message que vous avez vous-mêmes reçu (cf. 1Co 15,3), vous plantez les semences de l'évangélisation dans une terre fertile. Si la foi devait fleurir, elle devrait cependant être profondément enracinée dans le sol asiatique de manière à ne pas être perçue comme un produit importé, étranger à la culture et aux traditions de votre peuple. En vous souvenant de la manière dont saint Paul prêcha la Bonne Nouvelle aux Athéniens (cf. Ac Ac 17,22-34), vous êtes appelés à présenter la foi chrétienne selon des modes qui rappellent le "sens spirituel inné et la sagesse morale dans l'âme asiatique" (Ecclesia in Asia ), pour que les personnes l'accueillent et la fassent leur.

En particulier, vous devez vous assurer que l'Evangile chrétien ne soit pas confondu dans leurs esprits avec les principes séculiers associés aux Lumières. Au contraire, en "vivant selon la vérité et dans la charité" (Ep 4,15) vous pouvez aider vos concitoyens à séparer le bon grain de l'Evangile de l'ivraie du matérialisme et du relativisme. Vous pouvez les aider à répondre aux défis urgents posés par les Lumières, qui sont familières au christianisme occidental depuis plus de deux siècles, mais qui commencent seulement aujourd'hui à avoir un impact significatif sur d'autres parties du monde. En résistant à la "dictature de la raison positive" qui cherche à exclure Dieu du discours public, nous devrions accueillir "les vraies conquêtes des Lumières", en particulier l'insistance sur les droits de l'homme et sur la liberté de pratiquer sa religion (cf. Discours aux membres de la Curie romaine à l'occasion de l'échange traditionnel des voeux de Noël du 22 décembre 2006). En soulignant le caractère universel des droits de l'homme, fondés sur la dignité de la personne humaine créée à l'image de Dieu, vous remplissez un important devoir d'évangélisation, car cet enseignement constitue un aspect essentiel de l'Evangile. Ce faisant, vous suivez les traces de saint Paul qui savait comment exprimer les éléments essentiels de la foi et de la pratique chrétienne d'une manière qui pouvait être assimilée par les communautés nationales auprès desquelles il était envoyé.

Cet apostolat paulinien demande un engagement au dialogue interreligieux, et je vous encourage à accomplir cette tâche importante, en explorant toutes les voies à votre disposition. Je suis conscient que tous les territoires que vous représentez n'offrent pas tous le même degré de liberté religieuse et beaucoup d'entre vous, par exemple, rencontrent de sérieuses difficultés à promouvoir l'enseignement religieux catholique dans les écoles. Ne vous découragez pas, mais continuez à proclamer avec conviction "l'insondable richesse du Christ" (Ep 3,8), afin que tous puissent venir apprendre l'amour de Dieu manifesté en Jésus. Dans le contexte d'un dialogue ouvert et honnête avec les musulmans, les bouddhistes, les hindouistes, et les croyants d'autres religions présents dans vos pays respectifs, vous aidez vos concitoyens à reconnaître et à observer la loi "inscrite en leur coeur" (Rm 2,15) en articulant clairement la vérité de l'Evangile. De cette manière, votre enseignement peut toucher un large public et aider à promouvoir une vision unifiée du bien commun. Et cela, en retour, aidera à promouvoir la liberté religieuse et une cohésion sociale plus grande entre des membres de différents groupes ethniques, ce qui ne pourra qu'apporter la paix et le bien-être de toute la communauté.

A propos des soins pastoraux que vous offrez à votre peuple, je vous encourage à porter un intérêt particulier à vos prêtres. En utilisant l'image évoquée par saint Paul écrivant au jeune Timothée, exhortez-les à rallumer le don de Dieu qui est en eux à travers l'imposition des mains (cf. 2Tm 1,6). Soyez pour eux des pères, des frères et des amis, comme Paul l'était pour Timothée et Titus. Guidez-les par l'exemple, en leur montrant la voie pour imiter le Christ, le Bon Pasteur. Saint Paul a proclamé ce passage devenu célèbre: "Ce n'est plus moi qui vis, mais le Christ qui vit en moi" (Ga 2,20). En façonnant toute votre vie et votre conduite sur le modèle du Christ, faites que vos prêtres voient ce que signifie vivre comme alter Christus au milieu de votre peuple. De cette manière, non seulement vous les inspirerez afin qu'ils consacrent leurs vies entières "en hostie vivante, sainte, agréable à Dieu" (Rm 12,1), mais encore de nombreux jeunes aspireront à cette sublime vie de service sacerdotal.

Je sais que, dans les territoires que vous représentez, il y a certaines régions où il est rare de rencontrer un prêtre et d'autres où les gens ne connaissent pas encore l'Evangile. Ceux-là réclament également vos soins pastoraux et vos prières car: "Comment croire sans d'abord l'entendre? Et comment entendre sans prédicateur?" (Rm 10,14). La formation des laïcs a dans ce cas une importance majeure, afin qu'à travers la catéchèse les fils de Dieu dispersés puissent connaître l'espoir auquel ils sont appelés, les "trésors de gloire [que] renferme son héritage" (Ep 1,18). De cette manière, ils pourront être prêts à accueillir le prêtre quand il viendra parmi eux. Dites à vos catéchistes, laïcs et religieux, que je les rappelle dans mes prières, et que j'apprécie l'immense contribution qu'ils apportent à la vie des communautés chrétiennes en Malaysia, au Brunei et à Singapour. Grâce à leur travail vital, d'innombrables hommes, femmes et enfants sont à même de connaître "l'amour du Christ qui surpasse toute connaissance" et ainsi de se trouver "dans toute la Plénitude de Dieu" (Ep 3,19).

Chers frères évêques, je prie afin que, de retour dans vos pays respectifs, vous "[restiez] toujours joyeux. Priez sans cesse. En toute condition soyez dans l'action de grâces. C'est la volonté de Dieu sur vous dans le Christ Jésus" (1Th 5,16). En vous confiant tous, ainsi que vos prêtres, vos religieux et vos fidèles laïcs, à l'intercession de Marie, Mère de l'Eglise, je vous donne de tout coeur ma Bénédiction apostolique en gage de joie et de paix dans le Seigneur.


AUX PARTICIPANTS À LA X ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE DU CONSEIL PONTIFICAL POUR LE DIALOGUE INTERRELIGIEUX Salle du Consistoire Samedi 7 juin 2008



Eminences,
Chers frères évêques,
686 Mesdames et Messieurs,

Je suis heureux d'avoir cette occasion de vous rencontrer au terme de la X Assemblée plénière du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux. J'adresse mes salutations cordiales à chacun d'entre vous qui participez à cette rencontre importante. Je remercie en particulier le cardinal Jean-Louis Tauran de ses aimables paroles.

"Dialogue in veritate et caritate: orientations pastorales" - tel est le thème de votre Assemblée plénière. J'apprends avec joie qu'au cours de ces journées, vous avez tenté de parvenir à une compréhension plus profonde de l'approche de l'Eglise catholique envers les membres des autres religions. Vous avez visé l'objectif plus large du dialogue, qui est de découvrir la vérité, et la motivation qui l'anime, qui est la charité, conformément à la mission divine confiée à l'Eglise par Notre Seigneur Jésus Christ.

Au début de mon pontificat, j'ai affirmé que "l'Eglise désire continuer à construire des ponts d'amitié avec les fidèles de toutes les religions, dans le but de rechercher le bien authentique de chaque personne et de la société dans son ensemble" (Discours aux délégués des autres Eglises et communautés ecclésiales et des autres traditions religieuses, 25 avril 2005). A travers le ministère des Successeurs de Pierre, avec le travail du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, et les efforts des évêques locaux et du peuple de Dieu dans le monde, l'Eglise continue à rencontrer les disciples de différentes religions. De cette manière, elle donne une expression à ce désir de rencontre et de collaboration dans la vérité et la liberté. Comme l'a dit mon vénéré prédécesseur, le Pape Paul VI, la principale responsabilité de l'Eglise est le service de la Vérité: "vérité sur Dieu, vérité sur l'homme et sa mystérieuse destinée, vérité sur le monde. Difficile vérité que nous recherchons dans la Parole de Dieu" (Evangelii nuntiandi ).

Les êtres humains cherchent des réponses à certaines questions existentielles fondamentales: quel est l'origine et le destin des êtres humains? Qu'est-ce que le bien et le mal? Qu'est-ce qui attend les êtres humains à la fin de leur existence terrestre? Tous ont le devoir naturel et l'obligation morale de rechercher la vérité. Une fois qu'ils l'ont connue, ils sont tenus d'y adhérer et d'ordonner leur vie selon ses exigences (cf. Nostra Aetate et Dignitatis humanae
DH 2).

Chers amis, "Caritas Christi urget nos" (2Co 5,14). C'est l'amour du Christ qui exhorte l'Eglise à rejoindre tout être humain sans distinction, au delà des frontières de l'Eglise visible. La source de la mission de l'Eglise est l'amour divin. Cet amour est révélé en Christ et rendu présent par l'action de l'Esprit Saint. Toutes les activités de l'Eglise sont imprégnées d'amour (cf. Ad gentes AGD 2-5 Evangelii nuntiandi EN 26 et Dialogue et mission, EN 9). C'est donc l'amour qui exhorte chaque chrétien à écouter l'autre et à chercher des espaces de collaboration. Il encourage les partenaires chrétiens dans le dialogue avec les disciples d'autres religions à proposer, mais pas à imposer, une foi en Jésus Christ qui est "la voie, la vérité et la vie" (Jn 14,16). Comme je l'ai dit dans ma récente Encyclique, la foi chrétienne nous a montré que "vérité, justice, amour ne sont pas simplement des idéaux, mais des réalités de très grande densité" (Spe salvi ). Pour l'Eglise: "La charité n'est pas une sorte d'activité d'assistance sociale qu'on pourrait aussi laisser à d'autres, mais elle appartient à sa nature, elle est une expression de son essence elle-même" (Deus caritas est ).

La grande multiplication de rencontres interreligieuses dans le monde aujourd'hui requiert du discernement. A cet égard, je suis heureux d'observer qu'au cours de ces journées vous avez réfléchi sur les orientations pastorales pour le dialogue interreligieux. A partir du Concile Vatican II, on a prêté attention aux éléments spirituels que les différentes religions ont en commun. Cela a contribué, de différentes manières, à bâtir des ponts de compréhension au delà des frontières religieuses. Je sais qu'au cours de vos débats, vous avez analysé certaines questions d'intérêt pratique dans les rapports interreligieux: l'identité des partenaires du dialogue, l'éducation religieuse dans les écoles, la conversion, le prosélytisme, la réciprocité, la liberté religieuse et le rôle des responsables religieux dans la société. Ce sont des questions importantes auxquelles les responsables religieux qui vivent et travaillent dans des sociétés pluralistes doivent prêter une grande attention.

Il est important de mettre en évidence la nécessité d'une bonne formation pour ceux qui promeuvent le dialogue interreligieux. Pour être authentique, ce dialogue doit être un chemin de foi. Combien il est donc nécessaire pour ses promoteurs d'être bien formés dans leurs convictions et bien informés sur celles des autres! C'est pour cette raison que j'encourage les efforts du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux à organiser des cours de formation et des programmes de dialogue interreligieux pour différents groupes chrétiens, notamment les séminaristes et les jeunes des instituts éducatifs postscolaires.

La collaboration interreligieuse offre des occasions d'exprimer les idéaux élevés de chaque tradition religieuse. Assister les malades, porter secours aux victimes des catastrophes naturelles ou de la violence, prendre soin des personnes âgées et des pauvres: voilà quelques-uns des domaines dans lesquels collaborent les personnes de religions différentes. J'encourage ceux qui sont inspirés par l'enseignement de leurs religions à aider les membres qui souffrent de la société.

Chers amis, au terme de votre Assemblée plénière, je vous remercie pour le travail que vous avez fait. Je vous demande de porter le message de bonne volonté du Successeur de Pierre à vos fidèles chrétiens et à tous vos amis d'autres religions. Je vous donne de tout coeur ma Bénédiction apostolique en tant que gage de grâce et de paix dans Notre Seigneur et Sauveur Jésus Christ.



Discours 2005-2013 31508