Discours 2005-2013 727


LE PAPE REÇOIT LE TITRE DE CITOYEN D'HONNEUR

DE LA VILLE DE BRESSANONE EN ITALIE

PAROLES Samedi 9 août 2008



Votre Excellence,
Monsieur le président de la Région,
Monsieur le maire,
Messieurs les conseillers municipaux,
Mesdames et Messieurs!

L'honneur que me fait la Ville de Bressanone en me conférant le titre de citoyen d'honneur est pour moi une grande joie, que j'accueille avec une profonde gratitude et qui m'accompagnera à présent dans les prochaines étapes de ma vie. Je suis ainsi à présent chez moi à Bressanone non seulement - pour ainsi dire - avec le coeur, mais d'une certaine manière également d'un point de vue juridique: j'appartiens à la communauté des citoyens. Même lorsque je ne pourrais pas venir, je serai en quelque sorte juridiquement présent. Je ne pense pas qu'il me soit nécessaire de vous dire que je suis souvent ici avec le coeur. Je vous remercie très cordialement! Et je remercie également le choeur, qui a confirmé et concrétisé les belles paroles que vous avez prononcées sur Bressanone et sur la musique.

Lorsque, par le passé, je venais du Nord, par la route du Brenner, à Bressanone, je me rappelle que c'était toujours pour moi un moment de grande émotion lorsque la vallée s'ouvrait devant mes yeux et qu'apparaissaient les tours de Bressanone - cette ville entourée de vignes et de vergers, posée entre les montagnes, si riche d'histoire et de beauté. Alors je me disais: ici l'on est bien! Alors je me disais: j'ai choisi le bon endroit et je pourrai ensuite retourner avec des forces nouvelles à mes devoirs.

728 Comme je l'ai déjà dit, c'est à Bressanone que j'ai écrit un grand nombre de mes livres, je m'y suis reposé, j'y ai noué des amitiés; surtout, à Bressanone, je me suis fait des souvenirs que j'emporterai avec moi. Et c'est cela le plus beau: je peux me promener dans le paysage de mes souvenirs et, une fois rentré à Rome, mes promenades dans le paysage de mes souvenirs passeront souvent par Bressanone, et je serai de nouveau ici et je pourrai de nouveau me reposer et reprendre des forces.

Bressanone a pris pour moi une importance particulière également parce que - comme vous l'avez dit, Monsieur le maire, en des termes beaux et profonds - c'est un lieu de rencontre, de rencontre entre les cultures: dans les trois langues en effet - italien, allemand et dialecte ladin - les cultures se rencontrent, et la rencontre entre les cultures, dont nous avons tant besoin aujourd'hui, a une histoire propre à Bressanone. Nous savons que ce n'est pas toujours facile, mais que cela est toujours fructueux et riche en dons, cela aide chacun et nous rend plus riches, plus ouverts, plus humains.

Bressanone est pour moi un lieu de rencontres: rencontre entre les cultures; rencontre également entre une saine laïcité et une foi catholique joyeuse; rencontre d'une grande histoire avec le présent et l'avenir. Et nous voyons que cette histoire, qui est ici vraiment présente et tangible, n'empêche pas la formation, le dynamisme, la vitalité du présent et de l'avenir, mais au contraire est une source d'inspiration et de dynamisme. Et c'est également une rencontre entre les racines chrétiennes et l'esprit de la modernité, qui ensemble seulement peuvent construire une société réellement digne de ce nom, une société réellement humaine.

Selon moi, en ce sens, Bressanone est également un modèle européen, une vraie ville européenne: les racines chrétiennes, l'identité, l'identité chrétienne de notre culture est présente; celle-ci ne nous enferme pas en nous-mêmes, au contraire, elle nous ouvre aux autres, elle nous donne la communion de la rencontre et nous donne également les critères et les valeurs selon lesquels vivre.
Je vous remercie tous cordialement, et je demande surtout pour vous la Bénédiction de Dieu. Que le Seigneur continue de protéger cette belle ville et l'aide à construire un avenir grand, beau et humain. Merci encore!

La cérémonie de remise du titre de citoyen d'honneur a commencé à 18h00 et s'est déroulée en présence de tout le conseil municipal de Bressanone. Après un chant interprété par le choeur local Vocal Art, l'évêque du diocèse, Mgr Wilhelm Emil Egger, puis le maire M. Albert Pürgstaller, ont adressé un salut au Pape à cette occasion. Un parchemin a ensuite été remis à Benoît XVI indiquant les raisons de de titre honorifique.

SALUTATION AU PERSONNEL DE LA SÉCURITÉ DE BRESSANONE LORS DU DÉPART DE LA VILLE Grand séminaire de Bressanone Lundi 11 août 2008





Je ne peux que vous remercier de votre présence et de la discrétion avec laquelle vous avez travaillé pour moi.

Ce n'est que maintenant que je vois quelle armée "d'anges gardiens" m'a entouré, m'a assuré ce temps de paix et de joie. Réellement, je pouvais vivre dans une île de paix, voir la beauté de la nature et, en même temps, savoir que beaucoup s'activaient pour moi, m'aidaient à bien vivre dans cette île de paix.

J'espère que cela a été pour vous aussi un peu une occasion de profiter de ce grand air et pas seulement un temps de travail, mais aussi un peu un temps de repos dans cette beauté de la nature, dans cette belle petite ville, pleine d'histoire et avec un présent beau et vivant.

729 Les paroles me manquent pour en dire plus. Je vous souhaite à tous les bénédictions de Notre Seigneur, la joie et toutes les belles choses que vous désirez pour vos familles, pour chacun d'entre vous. Que le Seigneur vous bénisse toujours. Espérons que ces journées soient dans notre mémoire des journées qui nous aident également par la suite à croire dans la beauté de la vie et à avoir confiance dans l'avenir.

Merci à vous tous!



CONGÉ DE LA VILLE DE BRESSANONE

PAROLES Grand séminaire de Bressanone Lundi 11 août 2008

Chers amis, Monsieur le Maire, chers citoyens de Bressanone, dont je fais désormais aussi partie en qualité de citoyen d'honneur! Toutes les belles choses ont une fin et il en est ainsi pour mes vacances à Bressanone. Mais je peux vous le dire: c'était formidable! Et même si ces journées sont matériellement finies, il me reste cependant un trésor de souvenirs que j'emporte avec moi et au travers desquels je pourrai continuer à être avec vous. Et je veux rester avec vous surtout grâce au pont de la prière. Nous serons ainsi unis et, grâce au Seigneur, nous resterons en contact et éprouverons de la joie ensemble et essaierons de faire ce qui est juste pour aujourd'hui et pour demain.

Chers amis, merci pour tout! Ces jours se finissent mais j'emporte avec moi un trésor de souvenirs; nous demeurons surtout unis grâce au pont de la prière. Mes meilleurs voeux à vous tous, que le Seigneur vous bénisse toujours!

Je vous souhaite à tous de tout coeur la bénédiction du Seigneur et mes prières vous accompagneront. Je conclus par la bénédiction:

Sit nomen Domini benedictum! ...


Merci beaucoup! Au revoir!


À LA DÉLÉGATION DU "BAYERISCHER RUNDFUNK" Castelgandolfo Jeudi 14 août 2008



Monsieur Mandlig,
730 Mesdames et Messieurs!

Cela n'était pas simplement un film, mais un pèlerinage. Le Bayerischer Rundfunk nous a fait participer au pèlerinage de nombreuses personnes à la Vierge: jeunes et personnes âgées, hommes et femmes, toutes les générations, et les diverses facettes de notre pays se sont révélées à nous. Ce qui les a tous réunis, toutefois, fut d'être en chemin vers Marie et que la confiance dans la Mère du Seigneur les conserve et les conduit tous sur ce chemin.

Nous avons pu ressentir la foi des personnes qui en ont témoigné dans la simplicité de leur pensée et de leur être et pour cette raison avec la crédibilité de celui qui ne feint pas mais est spontané. Et à travers la foi nous avons vu Marie elle-même, la Mère de Dieu: en elle se reflète la bonté de Dieu.

Cher Monsieur Mandlig, je vous remercie de ce don, ainsi que tout vos collaborateurs et le Bayerischer Rundfunk; je souhaite et j'espère qu'en regardant ce film un grand nombre de personnes s'impliquent personnellement dans le pèlerinage à la Vierge Mère et au Seigneur. Mais je ne veux pas oublier d'adresser un cordial "Vergelt's Gott" aux citoyens d'Oberaudorf, qui m'avait déjà salué de manière extraordinaire à Munich avec le "Gott grüße Dich" et qui sont venus à présent jusqu'à nous et nous ont fait entendre à nouveau la beauté de la musique populaire bavaroise. Que Dieu vous comble de ses bienfaits!

REMISE DU TITRE DE CITOYEN D'HONNEUR

DE LA COMMUNE DE CASTELGANDOLFO

À MGR GEORG RATZINGER

PAROLES Salle des Suisses dans le Palais apostolique de Castelgandolfo Jeudi, 21 août 2008



Eminences, Excellences, Autorités, chers amis,

C'est pour moi un motif de profonde joie que mon frère appartienne désormais à l'illustre collège des citoyens d'honneur de cette belle ville. Castelgandolfo devient ainsi, si c'est encore possible, plus chère, plus proche de mon coeur. Par conséquent, merci de ce geste, de ma part également.

Depuis le début de ma vie, mon frère a toujours été pour moi plus qu'un compagnon, mais aussi un guide digne de confiance. Il a été pour moi un point d'orientation et de référence par la clarté, la détermination de ses décisions. Il m'a toujours montré la route à prendre, même dans les situations difficiles.

Monsieur le Maire, par vos belles paroles, vous m'avez fait repenser aux années passées à Ratisbonne, où la belle musique écoutée dans la cathédrale, dimanche après dimanche, a vraiment été pour moi un réconfort, une consolation, une joie intime, reflet de la beauté de Dieu.

Mon frère a évoqué le fait qu'entretemps nous sommes arrivés à la dernière étape de notre vie, à la vieillesse. Les journées qu'il nous reste à vivre se réduisent progressivement. Mais, même dans cette étape, mon frère m'aide à accepter avec sérénité, avec humilité et courage le poids de chaque jour. Je le remercie.

731 Je remercie la commune de Castelgandolfo pour ce geste, qui est vraiment gratifiant pour moi aussi. Concluons cette belle cérémonie par la bénédiction.

CONCERT DONNÉ EN HONNEUR DU SAINT-PÈRE

PAROLES Salle des Suisses du palais pontifical de Castelgandolfo Dimanche 24 août 2008



Messieurs les cardinaux,
Vénérés frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,
Chers amis,

Nous avons passé une belle soirée, au cours de laquelle il nous a été donné de réentendre certains extraits musicaux célèbres qui ont suscité en nous des émotions et des suggestions spirituelles profondes. Avec des sentiments de cordialité sincère, j'adresse mon salut à vous tous ici réunis, et j'exprime ma vive gratitude à ceux qui ont organisé cet événement musical. Je suis sûr de me faire l'interprète des sentiments de tous en exprimant une appréciation reconnaissante et admirative à Mlle Yvonne Timoianu et à M. Christoph Cornaro, qui ont respectivement joué du violoncelle et du piano avec un talent digne d'éloges. Grâce à leur exécution magistrale nous avons pu goûté la richesse multiforme du langage musical qui caractérise les extraits proposés. J'ai plaisir à rappeler que je connais M. Cornaro depuis qu'il a été ambassadeur d'Autriche près le Saint-Siège. Je suis très heureux de le retrouver aujourd'hui comme pianiste.

Ce concert nous a donné l'occasion de voir l'heureux rapprochement de la poésie de Wilhelm Müller avec la musique de Franz Schubert dans un genre mélodique qui lui est cher. On compte en effet plus de six cents Lieder dans le répertoire de Schubert: le grand compositeur, pas toujours compris de ses contemporains, fut, comme chacun sait, le "prince du Lied". Comme son épitaphe le dit, "il fit résonner la poésie et parler la musique". Nous avons ainsi pu goûter le chef-d'oeuvre des Lieder schubertiens: Die Winterreise (Le Voyage d'hiver). Vingt-quatre Lieder composés sur des poèmes de Wilhelm Müller, à travers lesquels Schubert exprime une atmosphère intense de solitude triste, qu'il éprouvait particulièrement étant donné l'état d'âme de prostration causé par sa longue maladie et la succession de nombreuses désillusions sentimentales et professionnelles. C'est un voyage tout intérieur que le célèbre compositeur autrichien écrivit en 1827, une année seulement avant sa mort prématurée à l'âge de 31 ans.

Quand Schubert fait entrer un texte poétique dans son univers sonore, il l'interprète à travers une trame mélodique qui pénètre dans l'âme avec douceur, en amenant également celui qui l'écoute à éprouver le même regret déchirant que celui qu'éprouve le musicien, le même rappel de la vérité du coeur qui va au-delà de tout raisonnement. Naît alors une fresque qui parle de la banalité du quotidien, de nostalgie, d'introspection, d'avenir. Tout remonte à la surface au long du parcours: la neige, le paysage, les objets, les personnes, les événements, dans un flux déchirant de souvenirs. En particulier, cela a été pour moi une expérience neuve et belle d'écouter cette oeuvre dans la version qui nous a été proposée, c'est-à-dire avec le violoncelle au lieu de la voix humaine. Nous n'entendions pas les paroles de la poésie, mais leur reflet et les sentiments qu'elles contiennent exprimés par la "voix" presque humaine du violoncelle.

En présentant Le Voyage d'hiver à ses amis, Schubert dit: "Je vous chanterai un cycle de Lieder qui m'ont absorbé plus que jamais auparavant. Ce sont mes préférés, et ils vous plairont également". Ce sont des paroles auxquelles nous pouvons également donner notre assentiment, après les avoir écoutées dans la lumière de l'espérance de notre foi. Le jeune Schubert, spontané et exubérant, a réussi à nous communiquer à nous aussi ce soir ce qu'il a vécu et dont il a fait l'expérience. La reconnaissance qui est universellement attribuée à cet illustre génie de la musique est entièrement méritée, lui qui honore la civilisation européenne et la grande culture et spiritualité de l'Autriche chrétienne et catholique.

Intérieurement confortés par la splendide expérience musicale de ce soir, nous renouvelons nos remerciements à ceux qui l'ont organisée et magnifiquement réalisée. J'adresse de nouveau mon salut cordial aux personnes présentes et j'adresse à tous avec affection ma Bénédiction.

À L'OCCASION DE LA MESSE AVEC SES ANCIENS ÉLÈVES DU RATZINGER SCHÜLERKREIS DANS LA CHAPELLE DU CENTRE MARIAPOLI À CASTELGANDOLFO Dimanche 31 août 2008

31808

Chers frères et soeurs,

Dans la lecture d'aujourd'hui, saint Paul nous dit que nous avons besoin d'un renouveau de l'esprit pour pouvoir reconnaître la volonté de Dieu. Ce renouveau, ce n'est pas nous qui pouvons le réaliser, nous ne pouvons pas nous le donner à nous mêmes, mais nous devons être renouvelés. Ce renouveau est la mort et la résurrection. Il ne peut avoir lieu que dans la nouveauté opérée par Dieu lui-même, dans l'abandon dans le Christ, qui nous attire à Lui dans la sainte Eucharistie et qui, à travers le Baptême, nous a fait participer de sa mort et de sa résurrection. Ainsi, à partir de ce texte de saint Paul, devient aujourd'hui compréhensible également ce que le Seigneur dit dans l'Evangile, c'est-à-dire que nous pouvons seulement prendre notre croix et le suivre. Il ne s'agit pas d'une ascèse limitée, mais on parle d'une nouveauté que nous ne pouvons recevoir que dans la communion avec sa mort et sa résurrection.

Au début de cette Messe, nous désirons prier le Seigneur pour qu'il emporte tout ce qu'il y a de vieux en nous, pour qu'il abatte nos vieux enfermements sur nous-mêmes et notre autosuffisance, pour qu'il nous rende nouveaux.

Septembre 2008


AUX ÉVÊQUES DE NICARAGUA

EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM" Samedi 6 septembre 2008



Chers frères dans l'épiscopat,

Vous recevoir tous ensemble, pasteurs de l'Eglise qui est au Nicaragua, au cours de votre visite ad limina Apostolorum, suscite en moi une grande joie et m'offre l'occasion de vous dire ma proximité à l'égard de vos engagements apostoliques ainsi que des aspirations et des inquiétudes du peuple nicaraguayen, dont vous m'avez fait part ces jours-ci. Je remercie Mgr Leopoldo José Brenes Solórzano, archevêque de Managua et président de la Conférence épiscopale, pour les paroles cordiales qu'il m'a adressées en votre nom à tous, manifestant votre désir de renforcer davantage les liens d'unité, d'amour et de paix avec le Successeur de Pierre (cf. Lumen gentium LG 22), ainsi que la communion entre vous dans la "charge apostolique comme des témoins du Christ devant tous les hommes" (Christus Dominus CD 11).

Je connais vos efforts pour porter le message de l'Evangile dans tous les domaines de la vie du Nicaragua, avec la généreuse collaboration de vos prêtres et des instituts religieux présents dans le pays. Vous recevez également souvent une aide précieuse des catéchistes et des délégués de la pastorale, qui sont un canal au travers duquel le don de la foi grandit chez les enfants et éclaire les différentes étapes de la vie dans des lieux reculés où la présence stable d'un prêtre qui guide la communauté est pratiquement impossible. L'Eglise doit beaucoup à ces personnes qui présentent la Bonne Nouvelle et la doctrine chrétienne dans un esprit fraternel, en personne, jour après jour et de vive voix, comme c'est le propre d'un message que l'on porte en profondeur et qui est destiné à se transformer en une vie nouvelle chez ceux qui le reçoivent. Aussi est-il absolument nécessaire que ces généreux serviteurs et collaborateurs dans la mission évangélisatrice de l'Eglise reçoivent l'encouragement de leurs pasteurs, suivent une formation religieuse approfondie et constante, et conservent une fidélité irréprochable à la doctrine de l'Eglise. Ils doivent être de manière particulière d'excellents "disciples" qui apprennent des "maîtres authentiques" qui enseignent avec l'autorité du Christ (cf. Lumen gentium LG 25), et qui inculquent chez ceux qui les écoutent la nostalgie du Maître et de ses ministres, qui le rendent réellement présent à travers les sacrements, notamment l'Eucharistie, pour constituer de cette manière une communion chrétienne vraie et entière réunie autour du Seigneur et présidée par un de ses prêtres (cf. Sacramentum caritatis, n. 75).

Le besoin d'un clergé bien préparé du point de vue spirituel, intellectuel et humain, vous a récemment amenés à revoir l'organisation des séminaires dans votre pays, avec l'espoir de pouvoir ainsi offrir une meilleure formation aux séminaristes de vos diocèses, une formation toujours nécessaire et qui demande une proximité et une attention scrupuleuse de la part de tous les évêques, en prenant bien soin de discerner les candidats, et de ne pas négliger les exigences rigoureuses nécessaires pour devenir des prêtres exemplaires et pleins d'amour pour le Christ et l'Eglise. De cette manière, on pourra nourrir de nouvelles espérances de pouvoir assister pastoralement et de manière adaptée des secteurs aussi importants que la catéchèse systématique, pertinente et organisée pour les enfants et les jeunes, pour lesquels vous avez préparé un catéchisme spécifique pour la confirmation et promu l'"enfance missionnaire". Il est également souhaitable que l'assistance religieuse dans les hôpitaux s'améliore, ainsi que dans les centres de détention et d'autres institutions.
Il ne faut, à ce propos, jamais oublier que l'on doit toujours planter la semence de l'Evangile, à toutes les époques, dans toutes les générations, afin qu'elle croisse vigoureusement et que sa fleur ne se flétrisse pas. Même la religiosité populaire, si enracinée dans votre peuple et qui est pour lui une grande richesse, doit être davantage qu'une simple tradition reçue passivement, en la revitalisant continuellement par une action pastorale qui fasse resplendir la profondeur des gestes et des signes, en indiquant le mystère insondable de salut et d'espérance auquel ils se réfèrent et auquel Dieu nous a fait participer, en éclairant notre esprit, en comblant notre coeur et en engageant notre vie.

Un des grands défis que vous devez affronter est justement la solide formation religieuse de vos fidèles, en oeuvrant pour que l'Evangile reste profondément ancré dans leur esprit, dans leur vie et dans leur travail, de manière qu'ils soient le ferment du Royaume de Dieu par leur témoignage dans les différents milieux de la société et qu'ils contribuent à ce que les questions temporelles soient ordonnées selon la justice et se conforment à la vocation totale de l'homme sur la terre (cf. Apostolicam actuositatem AA 7).

733 Cela est particulièrement important dans une situation où de fortes inégalités sociales et une radicalisation politique, attestée notamment ces dernières années, s'ajoutent à la pauvreté et à l'émigration. J'observe avec satisfaction que, en tant que pasteurs, vous partagez les vicissitudes de votre peuple et, en respectant scrupuleusement l'autonomie de la gestion publique, vous vous efforcez de créer un climat de dialogue et de détente, sans renoncer à défendre les droits fondamentaux de l'homme, à dénoncer les situations d'injustice et à favoriser une conception de la politique qui, plus qu'une ambition pour le pouvoir et le contrôle, soit un service généreux et humble au bien commun. Je vous encourage sur cette voie, en vous exhortant en même temps à promouvoir et à suivre les nombreuses initiatives de charité et de solidarité envers les plus pauvres dans vos Eglises, afin que ne manquent ni l'aide aux familles en difficulté ni l'aide spirituelle généreuse de nombreux laïcs qui, parfois de manière anonyme, s'efforcent de fournir le pain quotidien à leurs frères les plus pauvres.

En cela, comme dans de nombreux autres domaines, il ne faut pas oublier le dynamisme, le dévouement et la créativité des religieux et des religieuses, un trésor pour la vie ecclésiale au Nicaragua. Ils sont les témoins du fait que "plus on vit dans le Christ, mieux on peut le servir dans les autres, en se portant jusqu'aux avant-postes de la mission, et en prenant les plus grands risques" (Vita consecrata
VC 76). Que ne leur manquent ni la reconnaissance des pasteurs ni l'encouragement à rester fidèles à leur charisme et à la mission spécifique de l'Eglise!

Les institutions éducatives méritent une mention particulière, surtout les écoles catholiques, où se rendent la plupart des étudiants nicaraguayens, et qui assurent ainsi, au milieu de grandes difficultés et sans l'aide qui leur est due, une mission essentielle de l'Eglise et un inestimable service à la société. Le service des éducateurs est digne d'éloges, eux qui, parfois au prix de grands sacrifices, se dévouent à une formation intégrale qui ouvre aux jeunes les portes d'un avenir prometteur. Un pays qui désire se développer et une Eglise qui veut être plus dynamique doivent concentrer leurs efforts sur eux, sans leur cacher la grandeur que possède pour l'être humain la dimension transcendante et religieuse. Aussi, je vous exhorte à encourager les éducateurs et à vous efforcer de protéger les droits de tous les parents à former leurs enfants selon leurs convictions et croyances.

Au terme de cette rencontre, je souhaite renouveler mes remerciements et mon estime pour votre oeuvre zélée de pasteurs, en encourageant l'esprit missionnaire dans vos Eglises particulières. Je vous demande de transmettre mes salutations au cardinal Miguel Obando Bravo, aux évêques émérites, aux prêtres et aux séminaristes, aux nombreuses communautés religieuses et, de manière particulière, aux soeurs contemplatives de votre pays, aux catéchistes et à ceux qui vous aident à diffuser continuellement l'Evangile au Nicaragua. Tandis que je confie votre travail à la Vierge Marie, Notre Dame de la Très Pure Conception, je vous donne de tout coeur la Bénédiction apostolique.

VISITE PASTORALE À CAGLIARI (SARDAIGNE)

RENCONTRE AVEC LES JEUNES SUR LA PLACE YENNE

Dimanche 7 septembre 2008



Chers jeunes,

Avant de m'adresser à vous, chers jeunes de Cagliari et de Sardaigne, j'ai le devoir et le plaisir d'adresser un salut particulier au président de la région sarde, M. Renato Soru, ainsi qu'à toutes les autorités régionales, qui par leur contribution et leur soutien généreux ont permis la réussite de ma visite pastorale. Merci, Monsieur le président: les jeunes ici présents se rappelleront cette journée, eux qui sont l'avenir de cette région, que vous administrez avec compétence.

Je me tourne à présent vers vous, chers jeunes. C'est une grande joie pour moi de vous rencontrer au terme de ce bref mais intense séjour sur votre belle île. Je vous salue tous avec affection et je vous remercie de cet accueil chaleureux. Je remercie en particulier ceux qui, en votre nom, m'ont exprimé les sentiments fervents qui vous animent. Je sais que certains d'entre vous ont participé à la Journée mondiale de la jeunesse à Sydney, et je suis certain qu'il ont tiré avantage d'une expérience ecclésiale aussi extraordinaire. Comme j'ai moi-même pu le constater, les Journées mondiales de la jeunesse constituent de singulières occasions pastorales qui permettent aux jeunes du monde entier de mieux se connaître, de partager leur foi et leur amour envers le Christ et son Eglise, de confirmer leur engagement commun à tout mettre en oeuvre pour bâtir un avenir de justice et de paix. Nous avons aujourd'hui une Journée non pas mondiale, mais sarde, de la jeunesse. Et nous faisons l'expérience de la beauté d'être ensemble.

Aussi, je vous salue vraiment avec affection chers jeunes: vous constituez l'avenir plein d'espérance de cette région, en dépit des difficultés que nous connaissons tous. Je connais votre enthousiasme, les désirs que vous nourrissez et les engagements que vous prenez pour les réaliser. Et je n'ignore pas les difficultés et les problèmes que vous rencontrez. Je pense, par exemple - et nous avons ressenti cela - à la plaie du chômage et du travail précaire, qui mettent en danger vos projets: je pense à l'émigration, à l'exode des forces les plus fraîches et les plus entreprenantes, avec le déracinement de leur milieu qui s'ensuit, qui comporte parfois des dommages psychologiques et moraux, en plus des dommages sociaux. Que dire ensuite du fait que, dans l'actuelle société de consommation, l'argent et le succès sont devenus les nouvelles idoles devant lesquelles beaucoup se prosternent? On est amené, en conséquence, à accorder de la valeur uniquement à celui qui - comme l'on dit - "a fait fortune" et a atteint une certaine "notoriété", et non pas à celui qui doit se battre chaque jour pour vivre. La possession des biens matériels et les applaudissements des gens ont remplacé cet intense travail sur soi qui sert à tremper l'esprit et à former une personnalité authentique. On risque d'être superficiels, de prendre des raccourcis dangereux à la recherche du succès, en livrant ainsi sa vie à des expériences qui suscitent des satisfactions immédiates, mais sont en elles-mêmes précaires et trompeuses. La tendance à l'individualisme grandit, et quand on se concentre seulement sur soi-même on devient inévitablement fragile; on perd la patience de l'écoute, phase indispensable pour comprendre l'autre et travailler avec lui.

Le 20 octobre 1985, le cher Pape Jean-Paul II, en rencontrant ici à Cagliari les jeunes de toute la Sardaigne, voulut proposer trois valeurs importantes pour construire une société fraternelle et solidaire. Ce sont des orientations on ne peut plus actuelles aujourd'hui aussi, que je reprends volontiers en soulignant en premier lieu la valeur de la famille, à protéger - disait le Pape - comme "un héritage ancien et sacré". Vous faites tous l'expérience de l'importance de la famille, en tant qu'enfants et frères; mais la capacité d'en former une nouvelle ne peut être tenue pour acquise. Il convient de s'y préparer. Dans le passé, la société traditionnelle aidait davantage à former et à protéger une famille. Il n'en est plus ainsi aujourd'hui, ou alors seulement "sur le papier", mais une mentalité différente domine dans les faits. D'autres formes de vie de couple sont admises; on utilise parfois le terme de "famille" pour des unions qui, en réalité, ne sont pas des familles. Dans notre contexte en particulier, la capacité des conjoints à défendre le noyau familial au prix de grands sacrifices s'est beaucoup réduite. Réappropriez-vous, chers jeunes, la valeur de la famille; aimez-la non seulement par tradition, mais par un choix mûri et conscient: aimez votre famille d'origine et préparez-vous à aimer également celle qu'avec l'aide de Dieu vous formerez vous-mêmes. Je dis: "préparez-vous" parce que l'amour vrai ne s'improvise pas. L'amour est fait, par delà les sentiments, de responsabilité, de constance et également d'un sens du devoir. Tout cela s'apprend par l'exercice prolongé de la vertu chrétienne de la confiance, de la pureté, de l'abandon à la Providence, de la prière. Dans cet engagement de croissance vers un amour mûr, la communauté chrétienne vous soutiendra toujours, parce que la famille trouve en elle sa plus haute dignité. Le Concile Vatican II l'appelle "la petite Eglise" parce que le mariage est un sacrement, autrement dit un signe saint et efficace de l'amour que Dieu nous donne dans le Christ à travers l'Eglise.

L'autre valeur que j'aimerais souligner est étroitement liée à cette première valeur dont j'ai voulu parler: la formation intellectuelle et morale sérieuse, indispensable pour concevoir et construire votre avenir et celui de la société. Celui qui à cet égard vous fait des "réductions" ne veut pas votre bonheur. Comment pourrait-on en effet concevoir sérieusement l'avenir, si on néglige le désir naturel de savoir et de débattre qui est en vous? La crise d'une société débute quand elle ne sait plus transmettre son patrimoine culturel et ses valeurs fondamentales aux nouvelles générations. Je ne me réfère pas simplement au seul système scolaire. La question est plus vaste. Nous le savons, il y a une urgence éducative qui exige, pour y répondre, des parents et des formateurs capables de partager ce qu'ils ont expérimenté et vécu de bon et de vrai par eux-mêmes. Elle demande des jeunes intérieurement ouverts, curieux d'apprendre et de tout ramener aux exigences et aux évidences originelles du coeur. Soyez vraiment libres, c'est-à-dire passionnés par la vérité. Le Seigneur Jésus a dit: "La vérité vous libérera" (Jn 8,32). Le nihilisme moderne en revanche prêche le contraire, autrement dit que c'est la liberté qui vous rend vrais. Il y a même ceux qui soutiennent qu'il n'existe aucune vérité, ouvrant ainsi la voie à l'appauvrissement des concepts de bien et de mal, les rendant même interchangeables. On m'a rapporté ce proverbe de la culture sarde: "Mieux vaut que le pain manque plutôt que la justice". Un homme peut en effet supporter et dépasser les souffrances de la faim, mais il ne peut pas vivre là où la justice et la vérité sont bannies. Le pain matériel ne suffit pas, il n'est pas suffisant pour vivre humainement en plénitude; il faut une autre nourriture dont on est toujours affamé, dont se nourrir pour sa croissance personnelle et pour celle de sa famille et de la société.

734 Cette nourriture - et c'est la troisième valeur - est une foi sincère et profonde qui doit devenir la substance de votre vie. Quand le sens de la présence et de la réalité de Dieu se perd, tout "s'aplatit" et se réduit à une seule dimension. Tout est "écrasé" sur le plan matériel. Quand chaque chose est considérée pour sa seule utilité, on ne perçoit plus l'essence de ce qui nous entoure, et surtout des personnes que nous rencontrons. Une fois le mystère de Dieu perdu, on perd également le mystère de tout ce qui existe: les choses et les personnes m'intéressent dans la mesure où elles satisfont mes besoins, non pour elles-mêmes. Tout cela constitue un fait culturel, que l'on respire depuis la naissance et qui produit des effets intérieurs permanents. La foi, en ce sens, avant d'être une croyance religieuse, est une manière de voir la réalité, une manière de penser, une sensibilité intérieure qui enrichit l'être humain en tant que tel. Eh bien, chers amis, le Christ est en cela aussi le Maître, parce qu'il a partagé notre humanité en toutes choses et qu'il est contemporain de l'homme de toutes les époques. Cette réalité typiquement chrétienne est une grâce merveilleuse! En étant avec Jésus, en le fréquentant comme un ami dans l'Evangile et dans les Sacrements, vous pouvez apprendre, d'une manière nouvelle, ce que la société n'est plus en mesure de vous donner, autrement dit le sens religieux. Et justement parce que c'est une chose neuve, la découvrir est merveilleux.

Chers jeunes, comme le jeune Augustin avec les problèmes qu'il rencontra sur sa route difficile, chacun de vous ressent l'appel symbolique de chaque créature vers le haut; chaque belle créature renvoie à la beauté du Créateur, qui est comme concentrée sur le visage de Jésus Christ. Quand elle en fait l'expérience, l'âme s'exclame: "Je t'ai aimée tardivement, beauté si ancienne et si neuve, tardivement je t'ai aimée!" (Conf.x, 27-38). Que chacun d'entre vous puisse redécouvrir Dieu en tant que sens et fondement de toutes les créatures, lumière de vérité, flamme de charité, lien d'unité, comme le chante l'hymne de l'Agorà des jeunes italiens. Soyez dociles à la force de l'Esprit! Ce fut Lui, l'Esprit Saint, le protagoniste de la Journée mondiale de la Jeunesse de Sydney; Il fera de vous des témoins du Christ. Pas en paroles, mais par les faits, avec un nouveau genre de vie. Vous n'aurez plus peur de perdre votre liberté, parce que vous la vivrez pleinement en la donnant par amour. Vous ne serez plus attachés aux biens matériels, parce que vous sentirez en vous la joie de les partager. Vous ne serez plus tristes de la tristesse du monde, mais vous éprouverez de la douleur pour le mal et de la joie pour le bien, en particulier pour la miséricorde et le pardon. Et s'il en est ainsi, si vous découvrez réellement Dieu dans le visage du Christ, vous ne penserez plus à l'Eglise comme à une institution externe à vous-mêmes, mais comme à votre famille spirituelle, comme nous la vivons maintenant, en ce moment. C'est cela la foi que vous ont transmis vos pères. Vous êtes appelés à vivre cette foi aujourd'hui, à une époque bien différente.

Famille, formation et foi. Voilà, chers jeunes de Cagliari et de toute la Sardaigne, moi aussi, comme le Pape Jean-Paul ii, je vous laisse ces trois mots, trois valeurs à faire vôtres avec la lumière et la force de l'Esprit du Christ. Que Notre-Dame de Bonaria, très grande Patronne et douce Reine des Sardes, vous guide, vous protège et vous accompagne toujours! Je vous bénis avec affection, en vous assurant d'un souvenir quotidien dans la prière.

Discours 2005-2013 727