Discours 2005-2013 837

À S.E. M. TIMOTHY ANDREW FISCHER NOUVEL AMBASSADEUR D'AUSTRALIE PRÈS LE SAINT-SIÈGE Salle Clémentine Jeudi 12 février 2009



Monsieur l'Ambassadeur,

C'est avec un plaisir particulier que je vous accueille au Vatican, et que j'accepte les Lettres qui vous accréditent en tant qu'Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire d'Australie près le Saint-Siège. Je vous prie de bien vouloir transmettre au gouverneur général, Mme Quentin Bryce, ainsi qu'au gouvernement et au peuple de votre nation, ma gratitude pour leurs salutations. Gardant encore le souvenir vivant de ma récente visite dans votre beau pays, je vous assure de mes prières pour le bien-être du pays et, en particulier, je désire transmettre mes condoléances aux personnes et aux familles en deuil à Victoria, après avoir perdu leurs proches dans les récents incendies de forêt.

Votre Excellence, votre nomination en tant que premier Ambassadeur résidant de l'Australie près le Saint-Siège inaugure une nouvelle étape positive dans nos relations diplomatiques et représente une occasion d'approfondir la compréhension réciproque et d'élargir notre collaboration déjà importante. L'engagement de l'Eglise au sein de la société civile est enraciné dans sa conviction selon laquelle le progrès humain - que ce soit en tant qu'individu ou que communauté - dépend de la reconnaissance de la vocation surnaturelle propre à chaque personne. C'est de Dieu que les hommes et les femmes reçoivent leur dignité essentielle (cf. Gn Gn 1,27) et la capacité de rechercher la vérité et la bonté. Dans cette vaste perspective, nous pouvons lutter contre les tendances au pragmatisme et à l'arrogance, si prédominantes aujourd'hui, qui ne s'intéressent qu'aux symptômes et aux effets des conflits, à la rupture sociale, à l'ambiguïté morale, plutôt qu'à leurs racines. Lorsque la dimension spirituelle de l'humanité est mise en lumière, le coeur et l'esprit des personnes sont attirés vers Dieu et vers les merveilles de la vie humaine: être soi-même, la vérité, la beauté, les valeurs morales, et les autres personnes. De cette façon, il est possible de trouver un fondement solide pour unir la société et promouvoir une vision d'espérance.

838 La Journée mondiale de la jeunesse a été un événement d'une importance particulière pour l'Eglise universelle et pour l'Australie. Des échos de reconnaissance continuent de retentir au sein de votre nation et à travers le monde. Par dessus tout, chaque Journée mondiale de la jeunesse représente un événement spirituel: un temps où les jeunes, qui ne sont pas tous étroitement unis à l'Eglise, rencontrent Dieu au cours d'une expérience intense de prière d'apprentissage et d'écoute, arrivant ainsi à vivre la foi dans l'action. Les habitants de Sydney eux-mêmes, comme Votre Excellence l'a observé, ont été inspirés par la joie manifeste des pèlerins. Je prie pour que cette jeune génération de chrétiens en Australie et dans le monde canalise son enthousiasme pour tout ce qui est vrai et bon en créant des liens d'amitié qui dépassent les divisions, ainsi que des lieux de foi vivante dans et pour notre monde, des lieux d'espérance et de charité concrète.

Monsieur l'Ambassadeur, la diversité culturelle apporte une grande richesse au tissu social de l'Australie aujourd'hui. Pendant des décennies, cette riche mosaïque a été obscurcie par les injustices endurées de façon si douloureuse par les populations autochtones. A travers la demande de pardon formulée l'an dernier par le premier ministre M. Rudd, un profond changement d'attitude a été affirmé. A présent, renouvelés dans un esprit de réconciliation, tant les organismes gouvernementaux que les anciens aborigènes peuvent affronter avec résolution et compassion la multitude de défis qui se présentent. Un exemple supplémentaire du désir de votre gouvernement de promouvoir le respect et la compréhension parmi les cultures est son effort louable en vue de faciliter le dialogue interreligieux et la coopération à la fois dans le pays et dans la région. De telles initiatives contribuent à préserver les héritages culturels, alimenter la dimension publique de la religion et raviver les valeurs mêmes sans lesquelles le coeur de la société civile s'affaiblirait bien vite.

L'activité diplomatique de l'Australie dans le Pacifique, l'Asie, et plus récemment, en Afrique, est diversifiée et en pleine croissance. Le soutien actif de la nation aux Objectifs de développement pour le millénaire, aux nombreux partenariats régionaux, et aux initiatives en vue de renforcer le traité de non-prolifération nucléaire, ainsi que sa préoccupation pour un développement économique équitable, sont bien connus et respectés. Et tandis que les ombres et les lumières de la mondialisation enveloppent notre monde de façons toujours plus complexes, votre nation se révèle être prête à répondre à une variété croissante de défis, d'une façon inspirée par des principes, mais aussi de manière responsable et innovatrice. L'un de ces défis les plus importants sont les graves menaces à la création de Dieu elle-même à travers le changement climatique. Sans doute aujourd'hui plus que jamais dans notre histoire humaine, la relation fondamentale entre le Créateur, la Création et la Créature a besoin d'être repensée et respectée. A partir de cette reconnaissance, nous pouvons découvrir un code commun d'éthique, qui consiste dans des normes enracinées dans le droit naturel inscrit par le Créateur dans le coeur de chaque être humain.

Dans mon message de cette année pour la Journée mondiale de la paix, j'ai attiré une attention particulière sur le besoin d'une approche éthique à la création de collaborations positives entre les marchés, la société civile et les Etats (cf. n. 12). A cet égard, je note avec intérêt la détermination du gouvernement australien en vue d'établir des relations de coopération fondées sur les valeurs de la justice, de la bonne gouvernance, et du sens de proximité régionale. Une position authentiquement éthique est au coeur de toute politique de développement responsable, respectueuse et d'intégration au niveau social. C'est l'éthique qui rend impératif le devoir d'apporter une réponse solidaire et généreuse à la pauvreté; c'est elle qui rend urgent le sacrifice d'intérêts protectionnistes au bénéfice de l'accès équitable des pays pauvres aux marchés des pays développés, de même que c'est elle qui justifie l'insistance des pays donateurs en ce qui concerne la responsabilité et la transparence de l'utilisation de l'aide financière de la part des pays bénéficiaires.

Pour sa part, l'Eglise possède une longue tradition dans le domaine de la santé, dans lequel elle place au premier plan l'approche éthique concernant tout besoin particulier des personnes. Dans les pays les plus pauvres en particulier, les ordres religieux et les organisations ecclésiales - y compris les nombreux missionnaires australiens - financent un vaste réseau d'hôpitaux et de cliniques, en fournissant également un personnel, dans des régions souvent reculées, où les Etats ne peuvent pas servir leur propre population. L'assistance médicale aux familles représente une préoccupation particulière, y compris l'assistance obstétrique de haute qualité pour les femmes. Il est toutefois paradoxal que certains groupes, à travers des programmes d'assistance, promeuvent l'avortement comme forme de "santé" maternelle, en éliminant une vie, sous le prétexte d'améliorer la qualité de la vie!

Votre Excellence, je suis certain que votre accréditation renforcera encore plus les liens d'amitié qui existent déjà entre l'Australie et le Saint-Siège. Tandis que vous entamez vos nouvelles responsabilités, soyez assuré de la disponibilité des divers bureaux de la Curie romaine, pour vous assister dans l'accomplissement de votre mission. Sur vous et votre famille, tout comme sur vos concitoyens, j'invoque cordialement une abondance de Bénédictions de Dieu tout-puissant.


AUX MEMBRES DE LA CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS DES PRINCIPALES ORGANISATIONS JUIVES AMÉRICAINES Salle du Consistoire Jeudi 12 février 2009



Chers amis,

Je suis heureux de vous accueillir tous aujourd'hui, et je remercie le rabbin Arthur Schneier et M. Alan Solow pour les salutations qu'ils m'ont adressées en votre nom. Je me souviens bien des diverses occasions, lors de ma visite aux Etats-Unis l'an dernier, au cours desquelles j'ai pu rencontrer certains d'entre vous à Washington d.c. et à New York. M. le rabbin Schneier, vous m'avez aimablement reçu à la "Park East Synagogue", quelques heures seulement avant votre célébration de la Pesah. A présent, je suis heureux d'avoir cette occasion de vous offrir l'hospitalité ici, chez moi. De telles rencontres nous permettent de manifester notre respect réciproque. Je veux que vous sachiez que vous êtes tous les bienvenus ici aujourd'hui dans la maison de Pierre, la maison du Pape.

C'est avec gratitude que je me souviens des diverses opportunités que j'ai eues pendant plusieurs années de passer du temps en compagnie de mes amis juifs. Mes visites à vos communautés à Washington et à New York, malgré leur brièveté, ont été des expériences d'estime fraternelle et d'amitié sincère. C'est le cas également de ma visite à la synagogue de Cologne, la première visite de ce genre de mon pontificat. Ce fut très émouvant pour moi de passer ces moments avec la communauté juive dans la ville que je connais si bien, la ville qui accueillit les premiers établissements juifs en Allemagne, et dont les racines remontent à l'époque de l'Empire romain.

839 Un an plus tard, en mai 2006, j'ai visité le camp d'extermination d'Auschwitz-Birkenau. Quels mots peuvent exprimer de façon adaptée cette expérience profondément bouleversante? En franchissant le portail d'entrée de ce lieu de l'horreur, qui fut le théâtre de tant d'indicibles souffrances, j'ai médité sur les innombrables prisonniers, dont un si grand nombre étaient juifs, qui ont parcouru le même chemin vers la captivité à Auschwitz et dans tous les autres camps de prisonniers. Ces fils d'Abraham, accablés par la douleur et l'humiliation, n'avaient guère pour les soutenir que leur foi dans le Dieu de leurs pères, une foi que nous chrétiens partageons avec vous, nos frères et soeurs. Comment pouvons-nous ne serait-ce que commencer à saisir l'énormité de ce qui a eu lieu dans ces prisons infâmes? La race humaine tout entière ressent une honte profonde envers la brutalité sauvage exercée contre votre peuple à cette époque. Permettez-moi de rappeler ce que j'ai dit en cette triste occasion: "Les potentats du Troisième Reich voulaient écraser le monde juif tout entier; l'éliminer du nombre des peuples de la terre. Alors les paroles du Psaume: "On nous massacre tout le jour, on nous traite en moutons d'abattoir" se vérifièrent de façon terrible".

Notre rencontre aujourd'hui a lieu dans le contexte de votre visite en Italie, conjointement avec votre "Leadership Mission" annuelle à Israël. Je me prépare également à me rendre en visite à Israël, une terre qui est sainte pour les chrétiens comme pour les juifs, étant donné que les racines de notre foi se trouvent là-bas. En effet, l'Eglise tire sa subsistance des racines de cet olivier franc, qui est le peuple d'Israël, sur lequel ont été greffées les branches d'olivier sauvage des Gentils (cf.
Rm 11,17-24). Depuis les débuts du christianisme, notre identité et tous les aspects de notre vie et de notre culte ont été intimement liés à l'ancienne religion de nos pères dans la foi.

L'histoire de deux mille ans de la relation entre le judaïsme et l'Eglise est passée par de nombreuses étapes, dont certaines d'entre elles sont douloureuses à rappeler. A présent que nous pouvons nous rencontrer dans un esprit de réconciliation, nous ne devons pas permettre aux difficultés du passé de nous empêcher de nous tendre la main de l'amitié l'un vers l'autre. En effet, quelle famille n'a pas été agitée par des tensions de quelque sorte que ce soit? La Déclaration du Concile Vatican ii Nostra aetate a marqué une pierre milliaire sur le parcours vers la réconciliation, et a clairement souligné les principes qui ont régi depuis l'attitude de l'Eglise à l'égard des relations entre chrétiens et juifs. L'Eglise est profondément et irrévocablement engagée à rejeter tout antisémitisme et à continuer d'édifier de bonnes et durables relations entre nos deux communautés. S'il existe une image particulière qui symbolise cet engagement, c'est le moment où mon bien-aimé prédécesseur Jean-Paul II s'est tenu devant le mur des Lamentations de Jérusalem, en implorant le pardon de Dieu pour toutes les injustices que le peuple juif a dû subir. A présent, je fais mienne sa prière: "Dieu de nos pères, tu as choisi Abraham et sa descendance pour que ton Nom soit apporté aux peuples: nous sommes profondément attristés par le comportement de ceux qui, au cours de l'histoire, les ont tant fait souffrir, eux qui sont tes fils, et, en te demandant pardon, nous voulons nous engager à vivre une fraternité authentique avec le peuple de l'Alliance" (26 mars 2000).

La haine et le mépris contre les hommes, les femmes et les enfants qui a été manifesté lors de la Shoah était un crime contre Dieu et contre l'humanité. Cela devrait être clair à tous, en particulier à ceux qui suivent la tradition des Ecritures Saintes, selon lesquelles chaque être humain est créé à l'image et à la ressemblance de Dieu (Gn 1,26-27). Il ne fait aucun doute que toute négation ou minimisation de ce crime terrible est intolérable et totalement inacceptable. Récemment, au cours d'une audience publique, j'ai réaffirmé que la Shoah doit être "un avertissement contre l'oubli, contre la négation ou le réductionnisme, car la violence contre un seul être humain est une violence contre tous" (28 janvier 2009).

Ce terrible chapitre de notre histoire ne doit jamais être oublié. La mémoire - dit-on à juste titre - est memoria futuri, un avertissement qui nous est adressé pour l'avenir, et un appel à rechercher activement la réconciliation. Se rappeler signifie faire tout ce qui est en notre pouvoir afin d'empêcher toute répétition d'une telle catastrophe au sein de la famille humaine en édifiant des ponts d'amitié durable. Je forme la prière fervente que le souvenir de ce crime abominable renforce notre détermination à guérir les blessures qui pendant trop longtemps ont souillé les relations entre les chrétiens et les juifs. Je désire sincèrement que l'amitié qui nous lie à présent se renforce toujours davantage, afin que l'engagement irrévocable de l'Eglise en vue d'établir des relations respectueuses et harmonieuses avec le peuple de l'Alliance apporte des fruits abondants.

CONCERT POUR LES 80 ANS

DE L'ÉTAT DE LA CITÉ DU VATICAN

PAROLES Salle Paul VI Jeudi 12 février 2009



Messieurs les cardinaux,
vénérés frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,
Mesdames et Messieurs,

Au terme de cette belle soirée, je suis heureux d'adresser un salut cordial à vous tous, qui avez pris part au concert organisé à l'occasion du 80 anniversaire de la fondation de l'Etat de la Cité du Vatican. Je salue les autorités religieuses, civiles et militaires, les personnalités illustres, avec une pensée spéciale pour les prélats de la Curie romaine et les collaborateurs des différents bureaux du gouvernorat du Vatican réunis ici pour commémorer, également à travers cette initiative, un événement aussi significatif. Je désire surtout manifester ma vive gratitude au cardinal Giovanni Lajolo, président de la Commission pour l'Etat de la Cité du Vatican, à qui je suis également reconnaissant des paroles d'affection et de dévouement, qu'il m'a adressées au début du concert. J'étends mon salut au secrétaire général, Mgr Renato Boccardo, et aux autres responsables du gouvernorat, et j'exprime naturellement ma reconnaissance à tous ceux qui ont coopéré de diverses manières à l'organisation et à la réalisation de cet événement musical.

840 Certain d'interpréter les sentiments de toutes les personnes présentes, je désire adresser une parole spéciale de remerciement et d'appréciation aux membres de la "rte Concert Orchestra" (Orchestre de la radiotélévision irlandaise), aux membres du choeur de la Our Lady's Choral Society, de Dublin, au directeur Proinnsias O Duinn, au maître du choeur Paul Ward, et aux solistes. Je désire adresser un salut particulier à la délégation importante de fidèles de Dublin, venus accompagner la chorale de leur ville.

L'exécution de passages du célèbre oratorio Messiah de Georg Friedrich Haendel qui nous a été offerte a créé une atmosphère spirituelle intense grâce à une riche anthologie de textes sacrés de l'Ancien et du Nouveau Testament, qui constituent comme la trame de toute la partition musicale. L'orchestre et le choeur ont également réussi à évoquer admirablement la figure du Messie, du Christ, à la lumière des prophéties messianiques de l'Ancien Testament. La richesse du contrepoint musical et l'harmonie du chant nous ont ainsi aidés à contempler l'intense et profond mystère de la foi chrétienne. Encore une fois, il apparaît évident que la musique et le chant, grâce à leur habile mélange avec la foi, peuvent revêtir une valeur pédagogique élevée dans le domaine religieux. La musique en tant qu'art peut être une manière particulièrement grande d'annoncer le Christ, car elle réussit à en rendre perceptible le mystère avec une éloquence toute particulière.

Ce concert, à travers lequel on a voulu célébrer un anniversaire significatif pour l'Etat de la Cité du Vatican, s'inscrit dans le programme du Congrès organisé pour la circonstance sur le thème: "Un petit territoire pour une grande mission". Ce n'est certainement pas ici le lieu de faire un discours sur cet événement historique, sur lequel plusieurs experts offrent au cours du Congrès la contribution de leur compétence sous de multiples aspects. Du reste, j'aurai l'occasion de rencontrer les participants à ces journées d'étude samedi et de leur adresser un discours. Je tiens également, en cette circonstance, à remercier ceux qui ont contribué à apporter une certaine solennité à une célébration aussi significative pour l'Eglise catholique. En commémorant les 80 ans de la Civitas Vaticana, on ressent le besoin de rendre hommage à ceux qui ont été et qui sont les acteurs de ces huit décennies d'histoire d'une petite portion de territoire. En premier lieu, je voudrais rappeler le principal acteur, mon vénéré prédécesseur Pie xi. En annonçant la signature des Accords du Latran et surtout la constitution de l'Etat de la Cité du Vatican, il voulut faire référence à saint François d'Assise. Il dit que la nouvelle réalité souveraine était pour l'Eglise comme pour le Poverello, "ce peu de corps qui suffisait pour garder l'âme unie" (cf. Discours du 11 février 1929). Nous demandons au Seigneur qui guide fermement le destin de la "Barque de Pierre" parmi les événements parfois tourmentés de l'histoire, de continuer à veiller sur ce petit Etat. Demandons-lui surtout d'assister avec la puissance de son Esprit Celui qui se trouve à la barre de la Barque, le Successeur de Pierre, afin qu'il puisse accomplir avec fidélité et de manière efficace son ministère à la base de l'unité de l'Eglise catholique, qui trouve au Vatican son centre visible et qui s'étend jusqu'aux confins du monde. Je confie cette prière à l'intercession de Marie, Vierge Immaculée et Mère de l'Eglise, et, alors que je renouvelle au nom des personnes présentes mes remerciements cordiaux aux promoteurs de cette soirée, aux musiciens professionnels de l'orchestre, aux chanteurs, en particulier aux solistes, j'assure chacun de mon souvenir dans la prière et j'implore sur tous la Bénédiction de Dieu.


AUX ÉVÊQUES DU NIGERIA EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM" Salle du Consistoire Samedi 14 février 2009



Chers frères évêques,

C'est avec une grande joie que je vous souhaite la bienvenue, chers évêque du Nigeria, à l'occasion de votre visite "ad limina" sur les tombes des Apôtres Pierre et Paul. En tant que Successeur de Pierre, je me réjouis de cette rencontre qui renforce notre lien de communion et d'amour fraternel et nous permet de renouveler ensemble la sainte responsabilité que nous exerçons dans l'Eglise. Je remercie Mgr Job des paroles courtoises qu'il m'a adressées en votre nom. Pour ma part, je suis heureux de vous exprimer mes sentiments de respect et de gratitude, ainsi qu'à tous les fidèles du Nigeria.

Chers frères, depuis votre dernière visite ad limina, Dieu tout-puissant a béni l'Eglise de votre pays d'une croissance généreuse. Cela est particulièrement visible dans le nombre de nouveaux chrétiens qui ont reçu le Christ dans leurs coeurs et acceptent dans la joie l'Eglise comme "colonne et support de la vérité" (1Tm 3,15). L'abondance des vocations sacerdotales et religieuses est également un signe clair de l'oeuvre de l'Esprit au milieu de vous. Je rends grâce à Dieu pour ces dons et je vous exprime ma satisfaction, ainsi qu'à vos prêtres, aux religieux et aux catéchistes qui ont travaillé dans la vigne du Seigneur.

La croissance de l'Eglise exige une attention particulière dans les programmes diocésains et la formation de personnes à travers des activités permanentes en vue de faciliter l'approfondissement nécessaire de la foi de votre peuple (cf. Ecclesia in Africa ). D'après vos rapports, je constate que vous êtes bien conscients des étapes fondamentales que cela comporte: apprendre l'art de la prière, encourager la participation dans la liturgie et les sacrements, prêcher de manière sage et appropriée, assurer l'enseignement du catéchisme et apporter une orientation spirituelle et morale. Sur cette base, la foi se développe en vertu chrétienne et suscite des paroisses vivantes et un service généreux à l'ensemble de la communauté. Vous êtes vous-mêmes appelés, avec vos prêtres, à guider avec humilité, détachement des ambitions du monde, la prière, l'obéissance à la volonté de Dieu et la transparence dans votre gouvernement. De cette manière, vous deviendrez les signes du Christ Bon Pasteur.

La célébration de la liturgie est une source privilégiée de renouveau dans la vie chrétienne. Je vous soutiens dans vos efforts pour conserver un juste équilibre entre les temps de contemplation et les gestes extérieurs de participation et de joie dans le Seigneur. A cette fin, on doit prêter attention à la formation liturgique des prêtres et éviter les excès inutiles. Poursuivez sur ce chemin, en gardant à l'esprit que le dialogue d'amour et de vénération pour le Seigneur est largement amélioré par la pratique de l'adoration eucharistique dans les paroisses, les communautés religieuses et les autres lieux qui s'y prêtent (cf. Sacramentum caritatis, n. 67).

Le prochain synode des évêques pour l'Afrique abordera entre autres sujets le thème des conflits ethniques. L'image merveilleuse de la Jérusalem céleste, le rassemblement d'innombrables hommes et femmes de toutes les tribus, toutes les langues, tous les peuples et toutes les nations qui ont été rachetés par le sang du Christ (cf. Ap Ap 5,9), vous encourage à relever le défi des conflits ethniques où qu'il apparaisse, même au sein de l'Eglise. Je félicite ceux d'entre vous qui ont accepté la mission pastorale en dehors des limites de leur propre groupe régional ou linguistique et je remercie les prêtres et les personnes qui vous ont accueillis et soutenus. Votre disponibilité à vous adapter aux autres est le signe éloquent que, en tant que nouvelle famille de toux ceux qui croient dans le Christ (cf. Mc 3,31-35), il n'y a pas de place dans l'Eglise pour aucun type de division. Il faut enseigner aux catéchumènes et aux néophytes à accepter cette vérité lorsqu'ils prononcent leur engagement à suivre le Christ et à suivre une vie d'amour chrétien. Tous les croyants, en particulier les séminaristes et les prêtres, grandiront en maturité et en générosité en permettant au message de l'Evangile de purifier et de surmonter toute étroitesse de vue liée aux conditions locales.

841 Une sélection sage et effectuée avec discernement des séminaristes est vitale pour le bien-être spirituel de votre pays. Leur formation personnelle doit être assurée à travers une direction spirituelle régulière, la réconciliation sacramentelle, la prière et la méditation des Saintes Ecritures. Dans la Parole de Dieu, les séminaristes et les prêtres trouveront les valeurs qui distinguent le bon prêtre qui est consacré au Seigneur corps et âme (cf. 1Co 7,34). Ils apprendront à servir avec détachement personnel et charité pastorale ceux qui sont confiés à leurs soins, forts dans la grâce qui est le Christ Jésus (cf. Tm 2, 1).

Je voudrais insister sur la tâche de l'évêque en vue de soutenir la réalité sociale et ecclésiale importante du mariage et de la vie de famille. Avec la coopération de prêtres et de laïcs bien préparés, d'experts et de couples mariés, vous exercerez avec zèle et responsabilité votre sollicitude dans ce domaine de priorité pastorale (cf. Familiaris consortio FC 73). Des cours pour les fiancés, un enseignement catéchétique général et spécifique sur la valeur de la vie humaine, le mariage et la famille donneront à vos fidèles davantage de force pour relever les défis qui se présentent à eux avec les changements de la société. De la même manière, ne manquez pas d'encourager les associations et les mouvements qui assistent de façon efficace les couples mariés dans leur vie de foi et les engagements du mariage.

Rendant un important service à la nation, vous avez montré votre engagement dans le dialogue interreligieux, en particulier avec l'islam. Avec patience et persévérance, des relations fortes de respect, d'amitié et de coopération concrète ont été forgées avec d'autres groupes religieux. Grâce à vos efforts de promoteurs de bonne volonté diligents et inlassables, l'Eglise deviendra un signe et un instrument plus clairs de la communion avec Dieu et de l'unité de toute la famille humaine (cf. Lumen gentium LG 1).

Votre application à tirer des principes catholiques des commentaires éclairés sur les problèmes nationaux actuels est grandement appréciée. La loi naturelle, inscrite par le créateur dans le coeur de tout être humain (cf. Message pour la Journée mondiale de la jeunesse 2009, n. 8), et l'Evangile, compris et appliqués de manière correcte aux réalités civiles et politiques, ne limite en aucun cas la gamme d'options politiques valables. Au contraire, ils constituent une garantie offerte à tous les citoyens d'une vie de liberté, dans le respect de leur dignité en tant que personnes, et une protection contre les manipulations idéologiques et les abus fondés sur la loi du plus fort (cf. Discours à l'assemblée plénière de la Commission théologique internationale, 5 décembre 2008). Avec confiance dans le Seigneur, continuez à exercer votre autorité épiscopale dans la lutte contre les injustices et la corruption et contre toutes les causes et les formes de discrimination et de criminalité, en particulier les traitements dégradants infligés aux femmes et la pratique déplorable des enlèvements. En promouvant la doctrine sociale catholique, vous apportez une contribution loyale à votre pays et vous aidez à la consolidation d'un ordre national fondé sur la solidarité et une culture des droits humains.

Mes chers frères évêques, je vous exhorte avec les mots de l'apôtre Paul: "Veillez, demeurez fermes dans la foi, soyez des hommes, soyez forts. Que tout se passe chez vous dans la charité" (1Co 16,13-14). Je vous prie de transmettre mes salutations à votre peuple bien-aimé, en particulier aux nombreux fidèles qui apportent un témoignage au Christ dans l'espérance à travers la prière et la souffrance (cf. Spe salvi et 36). Mon affection sincère va également à tous ceux qui prêtent leur service aux familles, dans les paroisses et dans les missions, dans l'éducation, le monde de la santé et d'autres domaines de la charité chrétienne. Tout en vous recommandant, ainsi que ceux qui sont confiés à vos soins pastoraux, aux prières du bienheureux Cyprian Michael Iwene Tansi et à la protection maternelle de Marie, Mère de l'Eglise, je vous donne de tout coeur ma Bénédiction apostolique.


AUX PARTICIPANTS AU CONGRÈS D'ÉTUDE PROMU POUR LE 80 ANNIVERSAIRE DE LA FONDATION DE L'ÉTAT DE LA CITÉ DU VATICAN Salle Clémentine Samedi 14 février 2009



Messieurs les cardinaux,
vénérés frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,
Mesdames et Messieurs!

C'est avec un véritable plaisir que j'adresse un salut cordial à chacun de vous, intervenants et participants au Congrès d'étude promu pour célébrer le 80 anniversaire de la fondation de l'Etat de la Cité du Vatican. "Un petit territoire pour une grande mission" est le thème sur lequel s'est arrêtée votre attention, en réfléchissant ensemble sur la valeur spirituelle et civile que revêt ce petit Etat souverain, placé entièrement au service de la grande mission confiée par Jésus Christ à l'apôtre Pierre et à ses successeurs. Je remercie le cardinal Giovanni Lajolo non seulement pour le salut qu'il m'a adressé en votre nom, mais également pour l'engagement dont il a fait preuve avec ses collaborateurs du gouvernorat pour célébrer de façon solennelle l'événement des quatre-vingts ans d'existence et d'activité de l'Etat du Vatican.

842 J'exprime ma profonde satisfaction pour les célébrations et pour les diverses initiatives commémoratives de ces jours-ci, qui visent à approfondir et à mieux faire connaître l'histoire et la physionomie de la Civitas Vaticana. Celle-ci, quatre-vingts ans après sa fondation, constitue une réalité acquise de façon pacifique, même si elle n'est pas toujours bien comprise dans ses raisons d'être et dans les multiples devoirs qu'elle est appelée à accomplir. Ceux qui oeuvrent quotidiennement au service du Saint-Siège et qui vivent dans l'Urbs considèrent comme un fait établi qu'il existe au coeur de Rome un petit Etat souverain, mais tous ne savent pas que celui-ci est le fruit d'un processus historique quelque peu tourmenté, qui en a rendu possible la constitution, motivée par des idéaux élevés de foi et par la conscience clairvoyante des finalités qu'il devait satisfaire. Nous pourrions ainsi dire que la célébration qui explique notre rencontre d'aujourd'hui, invite à regarder avec une conscience plus vive ce que signifie et ce qu'est l'Etat de la Cité du Vatican.

Lorsque l'on revient en mémoire au 11 février 1929, on ne peut manquer de repenser avec une profonde reconnaissance à celui qui fut le premier et principal artisan et protagoniste des Accords du Latran: mon vénéré prédécesseur Pie XI: il fut le Pape de mon enfance, à l'égard duquel nous avons nourri une si grande vénération et amour. Au cours de ces derniers jours, son nom a retenti à juste titre à plusieurs reprises, parce qu'il fut avec une clairvoyance lucide et une volonté inébranlable le véritable fondateur et le premier bâtisseur de l'Etat de la Cité du Vatican. D'ailleurs, toutes les études encore en cours sur son pontificat nous font toujours ressentir la grandeur du Pape Achille Ratti, qui guida l'Eglise dans les années difficiles entre les deux guerres mondiales. D'une main ferme, il apporta un profond élan à l'action ecclésiale sous ses multiples formes: pensons à l'expansion missionnaire, au soin pour la formation des ministres de Dieu, à la promotion de l'activité des fidèles laïcs dans l'Eglise et dans la société, à l'intense relation avec la communauté civile. Au cours de son pontificat, le "Pape bibliothécaire" dut se mesurer aux difficultés et aux persécutions que l'Eglise subissait dans des pays comme le Mexique et l'Espagne, et à la lutte qu'avaient engendrée les régimes totalitaires - le national-socialisme et le fascisme - qui étaient apparus et s'étaient consolidés au cours de ces années-là. En Allemagne, son Encyclique Mit brennender Sorge est restée dans les mémoires comme un profond avertissement contre le nazisme. On ressent une véritable admiration face à l'oeuvre sage et forte de ce Souverain Pontife, qui ne voulut pour l'Eglise que la liberté qui lui permettait d'accomplir intégralement sa mission. L'Etat de la Cité du Vatican, apparu à la suite des Accords du Latran, et en particulier du Traité, fut lui aussi considéré par Pie XI comme un instrument pour garantir l'indépendance nécessaire à l'égard de tout pouvoir humain, pour donner à l'Eglise et à son Pasteur Suprême la possibilité de remplir pleinement le mandat reçu par le Christ Seigneur. A quel point cette réalité statutaire petite, mais complète, fut utile et bénéfique pour le Saint-Siège, pour l'Eglise mais aussi pour Rome et le monde entier, on le constata à peine dix ans plus tard, lorsqu'éclata la Deuxième Guerre mondiale, une guerre dont les violences et les souffrances arrivèrent jusqu'aux portes du Vatican.

On peut alors affirmer que tout au long des huit décennies de son existence, l'Etat du Vatican s'est révélé un instrument souple, et toujours à la hauteur des exigences que lui imposaient tant la mission du Pape que les besoins de l'Eglise et les conditions toujours changeantes de la société. C'est précisément pour cela que, sous la direction de mes vénérés prédécesseurs - du Serviteur de Dieu Pie XII au Pape Jean-Paul II - s'est réalisée et se réalise aujourd'hui encore sous les yeux de tous, une adaptation constante des règles, des structures et des moyens de cet Etat particulier, édifié autour du tombeau de l'apôtre Pierre. L'anniversaire significatif que nous commémorons ces jours-ci est donc un motif de profonde action de grâce au Seigneur, qui guide le destin de l'Eglise dans les flots parfois agités de l'océan de l'histoire, et assiste son Vicaire sur terre dans l'accomplissement de sa fonction de Christianae religionis summus Antistes. Ma gratitude s'étend à tous ceux qui ont été par le passé et sont aujourd'hui encore protagonistes de la vie de l'Etat de la Cité du Vatican, dont certains sont connus, mais beaucoup d'autres inconnus et qui accomplissent un service humble et précieux. Ma pensée va vers les membres de l'actuelle communauté de vie et de travail du gouvernorat et des autres structures de l'Etat, interprétant ainsi les sentiments de tout le peuple de Dieu. Dans le même temps, je voudrais encourager tous ceux qui oeuvrent dans les divers bureaux et services du Vatican à accomplir leur fonction non seulement avec honnêteté et compétence professionnelle, mais également avec une conscience toujours plus vive que leur travail constitue un service précieux à la cause du Royaume de Dieu.

La Civitas Vaticana est en vérité un point presque invisible sur la carte de la géographie mondiale, un Etat minuscule et sans défense, sans armée puissante, apparemment sans importance dans les grandes stratégies géopolitiques internationales. Pourtant, cet instrument visible de l'indépendance absolue du Saint-Siège, a été et est encore le centre de rayonnement d'une action constante en faveur de la solidarité et du bien commun. Et n'est-il pas vrai que précisément pour cette raison, on regarde cette petite portion de territoire avec une grande attention? L'Etat du Vatican, qui contient en lui des trésors de foi, d'histoire et d'art, est le gardien d'un patrimoine précieux pour l'humanité tout entière. De son coeur, où, auprès du tombeau de saint Pierre, habite le Pape, s'élève un message constant de véritable progrès social, d'espérance, de réconciliation et de paix. A présent, notre Etat, après avoir solennellement commémoré le 80 anniversaire de sa fondation, reprend son chemin avec un élan apostolique plus vigoureux. Puisse la Cité du Vatican être toujours davantage une véritable "cité sur la colline", lumineuse grâce aux convictions et au dévouement généreux de ceux qui y oeuvrent au service de la mission ecclésiale du Successeur de Pierre. Avec ce souhait, tandis que j'évoque la protection maternelle de Marie, l'intercession des saints Pierre et Paul et des autres martyrs, qui à travers leur sang, ont rendu ce sol sacré, je donne volontiers ma Bénédiction apostolique à vous tous ici réunis, en l'étendant avec affection à la grande famille de l'Etat de la Cité du Vatican.





Discours 2005-2013 837