Ars Procès informatif 617

TEMOIN IX - GUILLAUME VILLIER – 28 juillet 1863

617 (617) Session 64 - 28 juillet 1863 à 8h du matin



618 Juxta primum Interrogatorium, monitus testis de vi et natura juramenti et gravitate perjurii, praesertim in causis Beatificationis et Canonizationis, respondit:

Je connais parfaitement la nature et la force du serment que je viens de faire et la gravité du parjure dont je me rendrais coupable si je ne disais toute la vérité.



Juxta secundum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

Je m'appelle Guillaume Villier; je suis né à Ars le vingt-six Décembre mil sept cent quatre-vingt dix-neuf. Mon père se nommait François Villier et ma mère Suzanne Bernard. Je suis propriétaire cultivateur, jouissant d'une modeste fortune.



Juxta tertium Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

Je remplis toutes les années le précepte de la confession et de la communion; je suis dans l'habitude de m'approcher encore des sacrements à Noël; je n'ai pas communié depuis Pâques.



Juxta quartum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

Je n'ai jamais été traduit en justice devant aucun tribunal.



Juxta quintum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

Je n'ai jamais encouru de censures ni d'autres peines ecclésiastiques.



Juxta sextum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

Je n'ai été instruit par personne de la manière dont je devais déposer dans cette cause. Je n'ai pas lu les Articles rédigés par le Postulateur. Je ne dirai que ce que je sais par moi-même, ou ce que j'ai appris par des témoins dignes de foi.



(619) Juxta septimum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

J'ai une grande affection et vénération pour le Serviteur de Dieu Jean Marie Baptiste Vianney. Je désire sa Béatification et sa Canonisation; mais en cela, je ne me propose que la gloire de Dieu et l'honneur de l'Église.



Juxta octavum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

Je ne connais pas exactement le jour et l'année de la naissance du Serviteur de Dieu. Je sais qu'il est né à Dardilly, paroisse du diocèse de Lyon, de parents chrétiens qui élevaient leurs enfants dans la pratique de la piété. Je regarde comme certain qu'il a été baptisé et confirmé; mais j'ignore l'époque où il a reçu ces sacrements.



Juxta nonum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

Je tiens de personnes dignes de foi que Mr Vianney a passé son enfance et son adolescence à Dardilly auprès de ses parents. Il était occupé à garder les troupeaux de son père, et se livrait aux divers travaux de la campagne. Il se faisait dès lors remarquer par sa piété. Je tiens ces détails des bruits publics répandus dans la paroisse d'Ars et suffisamment confirmés par les personnes qui sont fréquemment venues ici de Dardilly. Je n'ai pas entendu dire qu'on ait eu à lui reprocher aucun de ces défauts qui sont si communs à cet âge.



Juxta decimum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

Je ne sais pas à quel âge il a commencé ses études; il fut obligé de les interrompre à cause de la conscription militaire. J'ignore les circonstances qui concernent cette époque de sa vie.



Juxta undecimum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

J'ai entendu dire qu'il avait toujours persévéré dans son dessein d'embrasser la carrière ecclésiastique, et que, pendant tout le cours de ses études, il avait constamment donné des marques d'une grande piété.



Juxta duodecimum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

Je sais qu'il a été ordonné prêtre, mais je ne puis donner aucun détail.



(620) Juxta decimum tertium Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

Je ne pourrais dire dans quelle paroisse il fut placé vicaire après son ordination à la prêtrise. J'ai seulement entendu dire que son curé était très pieux et que Mr Vianney ne lui cédait en rien sous ce rapport.



Juxta decimum quartum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

Mr Vianney fut nommé Curé d'Ars au mois de Février mil huit cent dix-huit. Cette paroisse ressemblait aux paroisses environnantes; les pratiques de piété y étaient peu suivies; il y avait quelques danses; cette paroisse n'était cependant pas irréligieuse.



Juxta decimum quintum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

Le Serviteur de Dieu avait trouvé établie la Confrérie du St Sacrement; mais il lui donna une nouvelle impulsion. Il fonda celle du saint Rosaire; je me rappelle très bien qu'avant Mr Vianney on ne disait jamais le chapelet publiquement à l'église, sauf une fois par an le vingt-cinq Mars; mais dès l'arrivée de Mr Vianney, on se mit à le dire tous les dimanches après Vêpres. Plus tard il établit l'Archiconfrérie du Saint Coeur de Marie pour la conversion des pécheurs. Afin de procurer aux jeunes filles une éducation chrétienne, il fonda la Providence et en confia la direction à quelques pieuses filles de la localité. Sur les instances de son Évêque, qui désirait en assurer l'avenir, il céda cet établissement aux soeurs de St Joseph. Il travailla aussi à l'éducation des jeunes garçons en faisant venir dans sa paroisse des frères de la Ste Famille de Belley. Ces différentes institutions ont fait beaucoup de bien et fortement contribué à l'amélioration religieuse d'Ars.



Juxta decimum sextum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

J'atteste que Mr Vianney a rempli tous les commandements de Dieu et de l'Église, les obligations auxquelles il était tenu comme prêtre, curé, fondateur ou directeur des institutions dont je viens de parler. Il a persévéré jusqu'à la mort dans le fidèle accomplissement de tous ses devoirs: c'est du moins ma conviction profonde. Les absences qu'il a pu faire de sa paroisse ont toujours eu pour but la gloire de Dieu, le salut des âmes ou sa propre sanctification. Quand il était en mission, il revenait chaque Dimanche dans sa paroisse pour faire les offices de l'Église.

(621) Avant de partir, il avait bien soin de recommander chaque fois de recourir, s'il en était besoin, aux prêtres du voisinage. Je ne crois pas qu'il y ait jamais eu nécessité de le faire.

Je ne sais pas bien au juste quels ont été les motifs de ses fuites; mais d'après ce que j'ai entendu dire et ce que j'ai vu, je présume que la première a été déterminée par quelques difficultés qui s'étaient élevées dans la commune, par quelques contestations qui avaient eu lieu entre les voituriers et les logeurs. En quittant Ars, il se proposait, je crois, de rétablir la paix et la bonne harmonie dans la paroisse. Son absence ne dura que quelques jours. Avec lui disparurent tous les pèlerins; après son retour ils revinrent. Quand il rentra ce fut une grande joie à Ars; on sonna les cloches; les paroissiens accoururent sur son passage; pour lui, au lieu d'aller se reposer au presbytère, comme il aurait dû le faire après une très longue marche, il se rendit à l'église et après avoir adoré le St Sacrement, il retourna se renfermer dans son confessionnal.



Juxta decimum septimum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

Je sais que le Curé d'Ars a été critiqué dans les paroisses voisines, qu'on l'accusait d'ambition, d'avarice, qu'on plaisantait les habitants d'Ars de ce qu'ils étaient trop dévots; j'ai remarqué que ces accusations, qui du reste n'avaient point de fondement, avaient cessé vers la fin de sa vie. Je ne me suis jamais aperçu qu'il se soit plaint de toutes ces choses ni en public, ni en particulier.



Juxta decimum octavum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

J'atteste que Mr Vianney a pratiqué toutes les vertus chrétiennes et qu'il y a persévéré jusqu'à la mort. J'en ai pour garant toute sa conduite, dont j'ai été témoin pendant toute la durée de son séjour à Ars, n'ayant jamais moi-même, pendant tout ce temps-là, quitté la paroisse.



Quoad Fidem, testis interrogatus respondit:

Ma conviction est que le Curé d'Ars a eu une grande foi. J'ai toujours entendu dire ici qu'étant encore bien jeune, il aimait à s'instruire des vérités de la religion, qu'il écoutait avec empressement les leçons de sa mère et qu'il trouvait son plaisir dans 622 la prière. J'ai appris qu'un jour on le croyait perdu; sa mère inquiète le cherchait partout et elle finit par le trouver à genoux dans un coin de l'étable, devant une crèche et occupé à prier le bon Dieu. Quand il gardait ses troupeaux, il priait souvent tout seul devant une petite statue de la Ste Vierge qu'on lui avait donnée; souvent aussi il réunissait ses compagnons et les engageait à faire de même. Devenu un peu plus grand et capable de travailler aux champs, il plaçait sa petite statue à quelques pas devant lui, et lorsqu'il l'atteignait, il se mettait à genoux, et puis courait la placer plus loin, se remettant ensuite avec une ardeur toujours nouvelle à son travail. J'ai entendu très fréquemment répéter ces détails à Ars, et je crois qu'ils avaient pour auteurs les gens de Dardilly, qui y sont venus en pèlerinage.

Lorsque Mr Vianney fit sa première entrée dans la paroisse, il nous parut plein de bonté, de gaîté et d'affabilité; mais jamais nous ne l'aurions cru si profondément vertueux. Nous remarquâmes qu'il allait souvent à l'église et qu'il y restait longtemps. Le bruit ne tarda pas à se répandre qu'il menait une vie très austère. Il n'avait point de servante, n'allait pas dîner au château d'Ars comme le faisait son prédécesseur, n'allait pas visiter ses confrères et ne les recevait pas chez lui. Ce qui nous frappait aussi beaucoup, c'est qu'on s'aperçut tout d'abord qu'il ne gardait rien; nous étions ravis d'une conduite aussi peu commune, et nous nous disions dès lors: notre curé n'est pas comme les autres; c'est un saint.

Il semblait avoir choisi l'église pour son domicile; si l'on voulait le trouver, c'est là qu'il fallait aller le chercher. Quand il disait son office, nous remarquions que de temps en temps il regardait avec bonheur le tabernacle. J'ai entendu dire que dès le commencement de son séjour à Ars, il priait beaucoup pour la conversion des pécheurs; ce que je sais bien, c'est qu'il ne cessait de nous recommander de prier à cette même intention. Il nous exhortait fortement à visiter le plus souvent possible le St Sacrement; peu à peu il a amené ses paroissiens à cette pieuse dévotion et à la communion fréquente. Avant lui, on se contentait généralement de faire ses pâques.

Je crois qu'il a commencé peu de temps après son arrivée à faire tous les soirs la prière publique à l'église. Il vint à bout d'enrôler beaucoup de monde dans les confréries qu'il avait établies, ou comme renouvelées. Quoique les offices fussent déjà passablement fréquentés les dimanches et les fêtes, il amena ses paroissiens à les fréquenter encore davantage et à y assister presque tous. 623 Il fit aussi à peu près cesser le travail du Dimanche. Je dois faire remarquer néanmoins, pour dire l'exacte vérité, que les travaux les jours défendus n'étaient pas très communs avant l'arrivée de Mr Vianney. Ils n'avaient guère lieu qu'à certaines époques de l'année, particulièrement au moment des récoltes. Lorsque le pèlerinage fut établi, la sanctification du Dimanche était si bien observée, que les voitures amenant les étrangers n'arrivaient pas et ne partaient pas ce jour-là.





(625) Session 65 - 28 juillet 1863 à 3h de l'après-midi



Et prosequendo decimum octavum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

Un autre désordre que Mr Vianney vint à bout de faire disparaître, ce fut la danse. Il menaçait de quitter la paroisse, si l'on continuait à se livrer à ce divertissement dangereux. Les pères et les mères surtout entendirent la voix de leur pasteur et retinrent leurs enfants. 626 Il est arrivé au Serviteur de Dieu de donner de l'argent au ménétrier pour l'empêcher de jouer à certains jours de fête. Il a fait la même chose à l'égard du cabaretier.

Mr Vianney ayant renouvelé sa paroisse, se rendit à l'invitation de ses confrères pour donner des missions dans les paroisses environnantes. Il y montra un tel zèle et un tel esprit de foi, qu'il produisit des fruits abondants de salut. Son confessionnal était assiégé et il confessait plus à lui seul que tous les autres. Ce qui attirait surtout la confiance des fidèles, c'était sa vie austère et mortifiée. Les missions auxquelles il prit part devinrent l'occasion qui donna naissance au pèlerinage, les personnes qu'il avait dirigées revenant à Ars pour réclamer ses conseils. C'est ce qu'on commença à remarquer surtout après la mission de Trévoux, qui eut lieu en mil huit cent vingt-trois.

La foi de Mr Vianney lui inspirait un grand zèle pour tout ce qui tenait au culte divin. C'est ainsi que lui, si simple et si pauvre pour tout ce qui tenait à sa personne, avait à coeur d'avoir pour son église les plus beaux ornements. Rien ne saurait égaler la joie qu'il éprouva lorsqu'il reçut de Mr d'Ars un dais magnifique, de riches bannières, de superbes chasubles et un grand ostensoir en vermeil. Il faisait beaucoup de dépenses pour son église. Un marchand d'ornements de Lyon disait: Il y a en Bresse un petit curé, qui semble ne rien avoir, qui achète plus que tous les autres, qui veut tout ce qu'il y a de plus beau et qui paye toujours comptant. Ce curé était le Curé d'Ars. Sa foi éclatait plus vive qu'à l'ordinaire pour la fête du St Sacrement, soit lorsqu'il faisait préparer les reposoirs, soit surtout lorsqu'à la procession il portait Notre Seigneur entre les mains. Sa figure enflammée et la vivacité de ses regards exprimaient l'ardeur de sa foi. Je l'ai vu plusieurs fois verser des larmes en célébrant le saint sacrifice de la messe. Par moments, il était tellement touché que les fidèles pouvaient s'en apercevoir. Un tel feu brillait dans ses regards que l'on aurait dit qu'il voyait le bon Dieu. C'était d'ailleurs une opinion fort répandue dans la paroisse que cela lui arrivait parfois réellement.

(627) Sa foi ne se manifestait pas moins dans sa manière d'instruire les fidèles, dans ses catéchismes, dans ses instructions. Il parlait souvent de la présence réelle de Notre Seigneur dans l'Eucharistie, et il le faisait avec un tel accent de conviction que ses paroles allaient à l'âme de ses auditeurs et leur faisaient une impression profonde. Lui-même était vivement ému; quelquefois la respiration lui manquait et il demeurait comme en suspens. On était touché en le voyant porter le saint viatique aux malades. Ses exhortations respiraient alors les sentiments de la foi la plus vive.

Il éprouvait un très grand respect envers les prêtres, et il revenait souvent dans ses instructions sur la grandeur du sacerdoce. Il disait: Le prêtre ne se comprendra bien que dans le Ciel... Si l'on rencontrait un prêtre et un ange, il faudrait d'abord saluer le prêtre.

J'ai remarqué que dans ses catéchismes et ses instructions, il citait beaucoup de traits de la vie des saints; il le faisait avec un tel charme qu'il intéressait vivement ses auditeurs. Il avait quelques sujets de prédilection sur lesquels il revenait souvent. C'est ainsi qu'il parlait fréquemment de l'amour de Dieu, de sa présence, de la nécessité de lui demeurer uni pour sanctifier ses actions, du bonheur et des joies du paradis, de la beauté de l'âme en état de grâce, des bienfaits du St Esprit, de la nécessité de la prière, des avantages des croix. Quand il parlait sur le péché et sur le malheur des pauvres pécheurs, il versait des larmes abondantes.

Mr Vianney m'a paru agir toujours et en toute circonstance uniquement par esprit de foi et jamais par des motifs ou des considérations humaines. Le seul but qu'il se proposait était de plaire à Dieu. Cet esprit de foi était si apparent qu'il frappait beaucoup les étrangers qui venaient à Ars. Après l'un de ses catéchismes, j'ai entendu à côté de moi un prêtre, qui y avait assisté, dire: Quelle foi en cet homme-là! Je crois vraiment qu'il voit le bon Dieu.



Quoad spem, testis interrogatus respondit:

Mr Vianney n'a pas moins pratiqué la vertu d'Espérance que celle de la Foi; 628 elle a brillé en lui sans se démentir jamais pendant tout le cours de sa vie.

Il comptait avec la plus ferme espérance sur les biens à venir; c'est à cause de cela que dans toutes ses instructions, il parlait si fréquemment du Ciel, ainsi que je l'ai déclaré précédemment. Ce bonheur qu'il désirait pour lui-même, il ne le désirait pas moins pour les autres. Il nous disait fréquemment: Oh! mes frères, cherchons à aller tous en paradis; là, nous verrons Dieu; que nous serons heureux!... Nous irons tous en procession, si la paroisse est sage, et votre curé sera à votre tête. C'est ce même désir de procurer le Ciel aux âmes, qui lui faisait multiplier dans sa paroisse les missions, les jubilés, les divers exercices spirituels; c'est encore ce même désir qui lui inspirait une si grande horreur du péché, qui prive du Ciel et conduit en enfer les malheureux pécheurs, et qui le faisait pleurer amèrement lorsqu'il parlait du péché et de ses suites funestes. Je lui ai entendu dire en chaire, à la suite de sa première maladie, que c'était un bien grand malheur de se trouver à l'article de la mort quand on n'était pas prêt à paraître devant Dieu; que pour lui, pendant cette maladie, il avait encore quelque chose qui l'embarrassait; mais que maintenant il ne craignait plus rien.

Il ne comptait sur lui-même, ni pour se sauver, ni pour sauver les autres, mais uniquement sur la grâce de Dieu. Dans ses besoins, ses peines, ses embarras, il mettait en lui toute sa confiance. C'est par là qu'il eut le courage d'entreprendre l'amélioration de sa paroisse et la constance de l'accomplir. Il comptait tellement sur la grâce de Dieu, que cette confiance lui faisait regarder le salut comme facile. Il nous disait souvent qu'il y avait moins de peine pour se sauver que pour se damner. Il avait un don particulier pour communiquer cette confiance aux autres et pour consoler les âmes dans leurs afflictions. Cette confiance néanmoins ne lui faisait pas négliger de prendre les moyens nécessaires pour travailler à son propre salut et à celui des autres, ainsi qu'il est facile de s'en convaincre par sa vie pénitente et par son zèle qui s'est maintenu toute sa vie.

Son abandon à la divine Providence était sans bornes. Il ne s'inquiétait jamais. Et lorsque les ressources lui manquaient pour sa Providence ou diverses autres entreprises, il se tenait toujours pour assuré que Dieu lui viendrait en aide. J'ai su qu'il avait été plusieurs fois en butte aux assauts du démon. Au commencement, ne sachant pas encore à quoi s'en tenir sur ce sujet, il en fut un peu effrayé et engagea quelques jeunes gens à coucher dans sa cure; mais bientôt, instruit par l'expérience, il les renvoya, et dès lors, il n'eut jamais plus aucune crainte du démon.

L'Espérance des biens éternels avait inspiré à Mr Vianney un profond mépris pour tous les biens de ce monde. Il n'y attachait de prix qu'autant qu'il pouvait les rapporter aux biens spirituels. Sa constance dans les peines et les souffrances ne s'est jamais démentie.

Je sais qu'il craignait les jugements de Dieu, qu'il parlait quelquefois de sa pauvre vie, qu'il désirait aller pleurer dans la solitude; mais je ne crois pas que pour cela il ait manqué de confiance. Il n'avait pas peur de la mort.



Quoad caritatem, testis interrogatus respondit:

Ma conviction profonde est que Mr Vianney a, pendant toute sa vie, aimé le bon Dieu de toute son âme, de toutes ses forces, que toutes ses pensées, tous ses sentiments, toutes ses actions ont eu Dieu pour objet, et que cet amour, loin de diminuer avec les années, n'a fait que s'accroître jusqu'à sa mort.

J'ai entendu dire que dès l'âge de trois ou quatre ans, il se mettait à genoux, joignait ses petites mains pour prier le bon Dieu, ou bien les mettait entre les mains de sa mère afin de prier avec elle. 630 J'ai raconté précédemment que tout petit enfant, il s'était retiré dans une écurie afin de vaquer plus facilement à la prière. J'ai déjà dit précédemment le peu que je savais avant son arrivée à Ars, ce qu'il a fait dans les premières années de son séjour dans cette paroisse et l'impression de piété qu'il a laissée dans l'esprit de ses paroissiens. Je suis profondément convaincu que l'amour de Dieu a été le principe et le mobile de toutes ses actions et de toutes les oeuvres qu'il a entreprises à Ars.

Son amour pour Dieu se manifestait cependant d'une manière plus particulière quand il disait la sainte messe, quand il donnait la communion ou la bénédiction du très saint Sacrement, quand il prononçait le saint nom de Jésus, ou qu'il parlait de l'amour de Notre Seigneur envers les hommes. Je crois qu'il n'a jamais perdu l'union de son âme avec Dieu, même au milieu de la foule qui l'assiégeait; il était toujours égal à lui-même, toujours bon, agréable, gracieux; jamais il ne se fâchait. Quand on lui parlait des choses de ce monde, il semblait n'être plus dans son élément, et ramenait, autant qu'il le pouvait, la conversation sur les choses de Dieu. A mon avis, s'il a cherché plusieurs fois à se retirer dans la solitude, c'était afin d'aimer le bon Dieu davantage et de mieux se conduire tout seul. Je sais que son coeur était si plein de l'amour de Dieu qu'il le communiquait facilement aux autres, en chaire, au confessionnal et même dans ses conversations particulières. L'amour de Dieu était l'un des sujets les plus habituels de ses prédications, et alors il était tellement pénétré qu'il faisait une vive impression sur ses auditeurs. Il en était de même lorsqu'il parlait de la Ste Eucharistie. 631 Lorsque je me suis adressé à lui au tribunal de la pénitence, j'ai été bien touché des paroles qu'il m'adressait sur l'amour de Dieu et la fuite du péché. Je sais qu'il en était de même pour les autres.





(633) Session 66 - 29 juillet 1863 à 8h du matin



Et prosequendo decimum octavum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

Je ne doute pas que Mr Vianney n'ait montré toute sa vie une grande charité envers le prochain. Il semblait avoir puisé cet amour dans le coeur de ses parents. La maison Vianney jouissait de la réputation d'être très bonne pour les pauvres. 634 Je ne sais rien de bien spécial jusqu'à l'arrivée du Serviteur de Dieu dans la paroisse d'Ars.

Dès les commencements, il s'y livra à toutes les oeuvres spirituelles et corporelles de miséricorde. Ainsi il visitait de temps en temps ses paroissiens; cependant ce n'était pas fréquemment; presque jamais il ne s'asseyait. Personne ne songeait à s'en formaliser parce qu'on savait qu'il était très occupé et qu'il faisait de longues prières. Il commençait, dans ces visites, à demander des nouvelles de la famille, et de tout ce qui pouvait l'intéresser; puis insensiblement il passait aux choses spirituelles. Quoique ce dernier sujet allât davantage à son coeur, il ne se refusait pas néanmoins à s'entretenir des choses temporelles. Il était bienveillant et affable pour tous ses paroissiens, les saluait toujours le premier, et il était bien difficile de pouvoir jamais le prévenir. Je me rappelle qu'étant jeune, lorsque nous étions dans les champs et que nous le voyions venir de loin, nous prenions bien nos précautions pour le saluer les premiers et que rarement nous avons pu en venir à bout; il était encore à quatre ou cinq cents pas de nous que déjà il nous avait levé son chapeau. Son aménité et sa bienveillance, non moins que sa piété, lui avaient attiré l'affection de ses paroissiens.

Mr Vianney ne négligeait rien pour procurer le bien spirituel des âmes. On le voyait s'appliquer à toutes les oeuvres qu'un zélé curé sait entreprendre.

J'ai entendu dire que le jour, il offrait ses peines pour la conversion des pécheurs, et, la nuit, pour le soulagement des âmes du purgatoire. Il gémissait continuellement sur le sort des pauvres pécheurs. Que de fois nous l'avons entendu en chaire faire la peinture de leur malheur... Je sais qu'il a fondé des messes pour demander à Dieu leur conversion. Il priait fréquemment pour eux et nous engageait beaucoup à prier pour la même intention. C'est son amour pour le salut des âmes qui l'a porté à fonder un si grand nombre de missions, surtout dans les paroisses voisines. 635 C'est pour le même motif qu'il avait un grand attachement pour les missionnaires qui se consacrent à cette oeuvre.

Poussé toujours par ce même amour des âmes, il se rendait très volontiers aux invitations de ses confrères, qui réclamaient son concours, soit pour les missions, soit pour les jubilés. Lorsque les curés des paroisses voisines étaient infirmes ou absents, on s'adressait plus volontiers à lui qu'à tout autre pour la visite des malades ou les autres fonctions du saint ministère. Il fut même chargé pendant quelque temps du soin d'une paroisse qui manquait de prêtre. Il y allait très volontiers, malgré la distance et la fatigue, toutes les fois qu'on l'appelait. Il fit ces choses jusqu'à l'établissement du pèlerinage.

Ainsi que je l'ai dit, il y a eu à Ars dès le commencement de son séjour des personnes étrangères venant se confesser au Serviteur de Dieu. Après la mission de Trévoux le nombre augmenta d'une manière considérable et alla toujours croissant d'années en années. Aussitôt que le pèlerinage fut établi, il fut obligé de se confiner entièrement dans sa paroisse. Dès lors sa vie tout entière ne fut plus consacrée qu'au bien des âmes. Il en passait la plus grande partie au confessionnal. Le matin, il se levait de très bonne heure, à deux heures, quelquefois plus tôt; il se rendait à l'église, confessait jusqu'à sept heures, disait la messe, rentrait au confessionnal, à onze heures faisait un catéchisme, à midi sortait, prenait son modeste repas, visitait les missionnaires ou, avant leur arrivée, la Providence, traversait la place et rentrait à l'église, où il se remettait pour la troisième fois au confessionnal; il y restait jusqu'à la prière du soir; vers les neuf heures il rentrait à la cure pour prendre son repos. Je sais qu'il y donnait très peu de temps. Malgré le temps considérable qu'il donnait ainsi chaque jour aux confessions, jamais il ne suffisait à entendre toutes les personnes qui se présentaient. Il eût passé sa vie tout entière au confessionnal, qu'il eût été sans cesse occupé. 636 Il était tellement assiégé par la foule qu'il fallait attendre quelquefois des journées entières avant de pouvoir être admis; il est arrivé maintes fois que des personnes ont donné de l'argent à de pauvres gens afin de faire retenir leur place; il fallait pour cela quelquefois passer la nuit sous le vestibule de l'église.

Quelque assiégé qu'il fût par le grand nombre de pèlerins, il entendait la confession de ses paroissiens dès qu'ils se présentaient. Ils jouissaient du privilège qu'il avait accordé aussi aux ecclésiastiques de les faire passer les premiers.

Tel était son zèle pour le salut des âmes, qu'il y trouvait le mobile de tout son ministère sacerdotal. J'en puis citer un exemple: lorsqu'après quelques mois de séjour à Ars, il fut nommé, conformément à ses désirs, curé de Salles, il refusa lorsqu'on lui apprit qu'il y avait beaucoup de danses dans cette paroisse.

Il ne laissait échapper aucune occasion pour pratiquer les oeuvres corporelles de miséricorde. Il était bon, affectueux pour les pauvres et il recevait avec empressement les misérables qui venaient à lui. Il ne gardait rien pour lui-même, il vendit même son patrimoine pour faire des bonnes oeuvres dans sa paroisse. Une de ses oeuvres les plus remarquables fut l'établissement de sa Providence. Il se proposa d'y recevoir et d'y faire élever de petites filles abandonnées; il y adjoignit une école pour l'instruction des jeunes filles de la paroisse. Cet établissement prit bientôt un développement considérable; le nombre des orphelines s'éleva jusqu'à cinquante ou soixante; il en venait non seulement des lieux environnants, mais un peu de partout; Mr le Curé en reçut autant qu'il en pouvait tenir dans la maison. Lui-même s'était aidé (* sic) à construire le local qui les abritait; il ne négligea rien pour leur créer des ressources; il fut souvent réduit à une grande détresse; mais Dieu vint toujours à son aide, et quelquefois, à ce qu'on dit, d'une manière merveilleuse. 637 Lui-même pourvoyait à tout, achetait les provisions, payait toujours comptant, et quoiqu'il ne marchandât jamais, on abusa rarement de sa confiance.

J'ai entendu dire qu'il payait beaucoup de loyers, particulièrement pour des pauvres honteux. Il alla jusqu'à donner les draps de son lit ou autres objets les plus indispensables à son service. Il était très pauvrement habillé, particulièrement avant le pèlerinage. Après que celui-ci fût établi, il était un peu mieux vêtu parce que des personnes charitables prenaient soin de son vestiaire. Il lui arriva pendant la mission Trévoux (sic) de donner à un pauvre un haut de chausses, que ses confrères lui avaient acheté par cotisation; et comme, à quelques jours de là, ils lui en demandaient des nouvelles: Je l'ai prêté, dit-il, à fonds perdu, à un pauvre que j'ai rencontré. J'ai entendu dire que pendant la même mission, ayant rencontré un pauvre à un endroit, dit les Grandes Balmes, le long d'une pente abrupte et verglacée, il lui donna le bras, l'aida à marcher, se chargea de sa besace et le conduisit ainsi jusqu'aux portes de la ville. Il y avait tout près de l'église d'Ars une pauvre vieille aveugle, nommé la mère Bichet. Il lui portait très fréquemment des provisions, les déposait doucement dans son tablier, sans se faire connaître, et la bonne vieille, croyant que c'était une voisine, lui disait: Merci, ma mie. Lorsqu'on lui demandait l'aumône à la porte de la cure, il descendait de sa chambre, donnait lui-même de sa propre main et adressait quelques bonnes paroles. Il avait toujours dans sa poche de l'argent destiné à ses aumônes, le distribuait sans regarder. Il arrivait bien quelquefois que l'on abusait de sa charité; on lui en faisait des observations; il se contentait de répondre: Quand on fait l'aumône, il ne faut pas regarder au pauvre, mais à Notre Seigneur. 638 On lui portait souvent dans sa chambre différentes provisions, mais elles ne tardaient pas à disparaître au profit des indigents.



Quoad Prudentiam, testis interrogatus respondit:

Mr Vianney a pratiqué la prudence chrétienne. Je puis l'attester au moins pour tout le temps qu'il a passé à Ars. Nous l’avons toujours vu prendre les moyens les plus propres à assurer son salut; il avait pour cela embrassé une vie très pénitente; il mettait un soin exact à remplir tous ses devoirs, à fuir l'apparence même, du mal.

Cette vertu le porta à prendre les moyens les plus efficaces pour procurer le salut de ses paroissiens ou des personnes qui lui confiaient la direction de leurs âmes. Il s'occupa, ainsi que je l'ai dit, dès le commencement, à faire refleurir la piété. Avant d'entreprendre les oeuvres dont j'ai parlé ou de détruire les abus dont il gémissait, il s'adressa à Dieu par la prière; il fit pénitence; puis il ne craignit pas de dire du haut de la chaire ce qu'il pensait. Quoiqu'il mît dans ses paroles beaucoup de force, il sut tellement allier la douceur au zèle de la gloire de Dieu, qu'il ne blessa personne, et qu'il obtint tout ce qu'il avait en vue. J'ai mentionné plus haut ce qu'il a fait ; j'ai toujours remarqué que tout avait été conduit selon les règles de la prudence. On venait lui demander conseil de tous les côtés. Je ne sache pas que personne ait eu à se repentir d'avoir fait ce qu'il avait conseillé.

Nous avons toujours remarqué qu'il était très prudent dans toutes les fonctions de son ministère. Au confessionnal, il accueillait tout le monde avec bonté; il semblait cependant avoir des prédilections pour les pauvres pécheurs; il n'était pas sévère pour eux; lorsqu'une personne était plus avancée dans la voie de la vertu, il demandait davantage d'elle, afin de la conduire dans les voies de la perfection. On disait que s'il demandait peu des grands pécheurs, il se chargeait lui-même de faire pénitence pour eux. 639 Je me rappelle très bien qu'à la suite d'un jubilé, quelques personnes étant demeurées sans en profiter, il les pressait vivement, dans une instruction à l'église, de s'approcher des sacrements, et nous disait: Si elles veulent venir, je me charge de faire pénitence pour elles.





(641) Session 67 - 29 juillet 1863, 3h de l'après-midi



Et prosequendo decimum octavum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

J'atteste que Mr Vianney a pratiqué avec une grande perfection la vertu de justice, aussi bien par rapport à Dieu que par rapport aux hommes. Non seulement il a été très exact, pendant toute sa vie, à tous ses devoirs d'obligation dans le service de Dieu, mais encore il a été très fidèle observateur des conseils évangéliques. Je ne connais rien où il ait jamais été en défaut. Avec le prochain, il était d'une bonté, d'une bienveillance extrême, il avait pour tous des soins, des prévenances, des attentions délicates. Sa politesse était exquise, comme je l'ai déclaré plus haut. En toutes choses, il s'oubliait entièrement lui-même pour ne penser qu'aux autres, pour ne s'occuper que des autres. Il était plein de respect pour tout le monde; on le décidait difficilement à s'asseoir en présence des personnes devant lesquelles il se trouvait; lui au contraire, lorsqu'on se levait à son arrivée, insistait vivement pour faire asseoir ceux qui lui rendaient cet honneur. Sa bonté était accompagnée d'une certaine familiarité et d'un certain abandon. Il avait quelque chose qui ressemblait à la candeur et à l'ingénuité d'un enfant. Il ne faisait aucune acception de personnes; je l'ai toujours trouvé très bien pour tout le monde. J'ai néanmoins toujours vu en lui beaucoup de respect et d'affection pour les pauvres. Il savait témoigner sa reconnaissance pour les moindres services qu'on lui rendait. Lorsque nous lui menions du bois, du blé, etc., pour sa Providence, il nous recevait et nous traitait très bien; lui-même nous servait à boire et mettait beaucoup d'amabilité et d'instances à nous faire accepter ses politesses. Il trinquait volontiers avec nous, mais ne buvait pas.

Sur la vertu de Justice ainsi que sur quelques autres, je ne puis dire que des choses générales, n'ayant jamais vécu moi-même dans l'intimité avec Mr Vianney.



Quoad obedientiam, testis interrogatus respondit:

Je ne sais rien de particulier sur cette vertu; ma conviction est qu'il l'a pratiquée aussi bien que toutes les autres. S'il y avait eu quelque manquement, on n'aurait pas manqué d'en parler dans la paroisse; je n'ai jamais rien entendu dire.



Quoad Religionem, testis interrogatus respondit:

(643) J'affirme sans aucune hésitation que Mr Vianney a parfaitement rempli tous les devoirs de la vertu de Religion; j'en ai déjà donné des preuves en parlant de sa foi et de son amour pour Dieu. Rien dans sa conduite, pendant tout le temps de son séjour à Ars, ne me permet de croire qu'il se soit démenti un seul instant sous ce rapport. Il avait la plus grande estime pour tout ce qui tient au culte divin et aux objets consacrés à la religion, tels que les vases sacrés, les croix, les images, les reliques des saints. Les reliques surtout lui étaient très chères et il en avait fait une abondante provision. Il aimait la parole de Dieu et l’écoutait volontiers. J'ai dit plus haut tout ce qu'il avait fait pour la décoration de son église, pour la pompe et l'éclat des cérémonies.

Sa dévotion particulière me paraît avoir été celle au saint Sacrement. J'en ai déjà parlé; sa tenue, en face de la divine Eucharistie, témoignait de l'amour qui était dans son coeur; j'ai souvent remarqué comme un sourire de bonheur sur sa figure. Il récitait volontiers son bréviaire à l'église, à genoux, sans s'appuyer. Quand il prononçait le nom de Jésus, il y avait quelque chose dans son accent qui respirait la dévotion la plus vive; sa seule manière de faire le signe de la croix faisait impression.

Après sa dévotion au Saint Sacrement, ce qui m'a le plus frappé en lui, c'est sa dévotion envers la Ste Vierge. Il avait érigé une statue sur le fronton de son église à Marie Immaculée avant même la définition du dogme; il lui avait consacré sa paroisse; il distribuait beaucoup de chapelets, d'images, disait le samedi, autant qu'il le pouvait, la messe de la Ste Vierge, récitait le soir à la prière le chapelet de l'Immaculée Conception. A l'époque de la définition du dogme, il acheta un bel ornement pour témoigner sa joie et sa reconnaissance. Lorsque l'heure sonnait, il récitait un Ave Maria; il demeurait fidèle à cette pratique en toute circonstance, même en prêchant; il s'arrêtait, disait sa petite prière et continuait ensuite son instruction. Il en faisait tout autant pendant ses catéchismes; si l'heure venait à sonner pendant qu'il récitait le chapelet, il ajoutait un Ave Maria à la dizaine commencée. 644 La dévotion qu'il avait pour la Ste Vierge, il l'avait communiquée à ses paroissiens. Tous ou presque tous avaient dans leur maison, des images ou des statues de Marie, bénies par leur Curé. Pour moi, je conserve précieusement dans ma maison une image encadrée, au-dessous de laquelle sont écrits les noms de ma famille. Elle a reçu la bénédiction de Mr Vianney. Je sais que plusieurs habitants d'Ars ont un objet semblable chez eux. C'est Mr Vianney lui-même qui nous avait inspiré cette dévotion.

En mil huit cent vingt-trois, le six du mois d'Août, jour la (sic) fête patronale de la paroisse, il nous a conduits en procession à Notre Dame de Fourvières. J'ai pris part à cette procession et j'en puis parler comme témoin oculaire. Le motif de Mr le Curé fut, par cet acte solennel, de témoigner sa reconnaissance pour les beaux ornements qu'il avait reçus de Mr le Vicomte d'Ars. Deux curés du voisinage nous accompagnaient, Mr Martin, Curé de Savigneux, et Mr Robert, Curé de Ste Euphémie. Ce dernier était âgé de près de quatre-vingts ans. Nous partîmes d'Ars après minuit. Je pense que les deux tiers de la paroisse étaient du pèlerinage. Nous allâmes en procession jusqu'à Trévoux, précédés de trois belles bannières, chantant des cantiques, des hymnes, récitant le chapelet. Au jour, nous étions à Trévoux; nous nous y embarquâmes sur deux bateaux. Nous prîmes terre à Lyon un peu au dessus de Valse, et nous nous dirigeâmes processionnellement sur Fourvières. Mr le Curé d'Ars y célébra la Ste Messe, que nous entendîmes avec piété; plusieurs d'entre nous reçurent la Ste Communion de sa main. Nous descendîmes ensuite dans le même ordre avec lequel nous étions montés. Les gens se pressaient sur notre passage et manifestaient leur étonnement. Mr Vianney, lorsque nous fûmes arrivés à nos bateaux, s'embarqua l'un des premiers avec un certain nombre de ses paroissiens; mais comme les autres tardaient un peu d'arriver, les mariniers, hommes durs et grossiers, se mirent à proférer des jurements; 645 Mr le Curé sortit alors incontinent du bateau avec un petit nombre de personnes qui le suivirent, et il s'en alla à pied jusqu'à Neuville; c'est là que quelques heures après nous le rejoignîmes, ayant nous-mêmes accompli notre retour par la Saône. De Neuville, nous revînmes à Ars en procession. Nous n'étions rentrés qu'à la nuit close.

Je sais que Mr Vianney avait aussi une dévotion particulière pour les saints, spécialement pour St Jean-Baptiste son patron, St Pierre, St Joseph, St François-Régis, St Louis de Gonzague, Ste Catherine de Sienne, Ste Thérèse; ces noms et quelques autres revenaient souvent dans ses instructions. Sa Sainte de prédilection était Ste Philomène. Il l'honorait d'un culte tout spécial, l'appelait familièrement sa petite sainte; il avait fait construire une chapelle en son honneur; c'est à elle qu'il attribuait toutes les grâces extraordinaires qui étaient reçues à l'occasion du pèlerinage d'Ars. Et afin qu'on ne soupçonnât pas qu'il pouvait y être pour quelque chose, il la priait de guérir les malades, ou d'opérer les divers prodiges ailleurs.

Mr Vianney avait une tendre dévotion pour les âmes du purgatoire. Il célébrait chaque année l'octave des morts et nous engageait, pendant ce temps-là, à offrir pour elles nos prières, nos souffrances et nos bonnes oeuvres. J'ai dit déjà que lui-même était dans l'habitude d'offrir à leur intention toutes ses souffrances de la nuit.



Quoad Orationem, testis respondit:

Je crois que Mr Vianney était toujours uni à Dieu et qu'il ne perdait pas de vue sa présence.



Quoad Fortitudinem, testis respondit:

Mr Vianney a toujours montré une force extraordinaire et qui ne pouvait avoir pour cause qu'une assistance surnaturelle; de là son inaltérable confiance et sa constance à toute épreuve jusqu'à la fin de sa vie.



Quoad Patientiam, testis interrogatus respondit:

Mr Vianney a eu à souffrir de très grandes douleurs, surtout dans les dernières années de sa vie; il était tourmenté par une toux continuelle. 646 Mais quelle que fût la violence du mal, jamais il n'a manqué de patience. Rien dans ses paroles, ni dans ses gestes, ni dans les traits de sa figure ne manifestait ce qu'il avait à souffrir intérieurement. On ne s'en apercevait que lorsque les forces venaient à lui manquer, et qu'il succombait d'épuisement et de fatigue. Je l'ai vu plusieurs fois le dimanche après Vêpres, au sortir de l'église, se rendre à la cure, n'en pouvant plus. Ses paroissiens attendris s'empressaient de le suivre pour lui porter secours; mais lui ouvrait sa porte, entrait rapidement, puis fermait et demeurait seul. Je sais qu'il dormait peu, qu'il vivait d'une mauvaise et insuffisante nourriture, qu'en toute chose, il était dur à son corps, qu'il appelait son cadavre. Il a été très patient à l'égard des pèlerins qui le harcelaient sans cesse et partout, qui le pressaient, le bousculaient, lui coupaient ses cheveux, sa soutane. Jamais en toutes ces choses et beaucoup d'autres semblables, le moindre signe d'impatience. Je crois qu'il avait en cela d'autant plus de mérite qu'il était naturellement d'un tempérament vif et impétueux, comme il était facile de s'en apercevoir à la vivacité de ses démarches, de ses mouvements, de son regard.



Quoad Temperantiam, testis interrogatus respondit:

Ma conviction est que Mr Vianney a pratiqué la vertu de Tempérance au suprême degré. C'est même, ce me semble, cette vertu qui constitue le caractère le plus extraordinaire de sa vie. Je crois qu'il a plus souffert encore avant l'époque du pèlerinage, que lorsque le pèlerinage eut été établi. Pendant cette première période, il était presqu'entièrement livré à lui-même, ne préparait rien pour ses repas, se contentait pour son dîner d'une ou deux pommes de terre, de deux ou trois matefaims de blé noir, d'un bassin d'eau; enfin se faisait souffrir de toute manière. Après l'établissement du pèlerinage, quoique sa vie fût toujours extrêmement dure, il y avait au moins quelques personnes qui avaient soin de lui, soit pour la nourriture, soit pour le vêtement. 647 Il n'a jamais eu de personnes du sexe à son service; j'ai entendu dire qu'il couchait sur un mauvais lit, quelquefois sur une planche ou des fagots. Il achetait le pain des pauvres pour s'en nourrir. Une personne qui le servait m'a assuré qu'il ne mangeait pas une livre de pain par semaine; et cela à l'époque même du pèlerinage.





649 Session 68 - 30 juillet 1863 à 8h du matin



Et prosequendo decimum octavum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

Quand on lui préparait quelque chose de plus pour ses repas, il réprimandait les personnes qui se proposaient ainsi de le soulager un peu. Un jour on lui disait: Mr le Curé, vous avez bien grondé Catherine, (il s'agissait de Catherine Lassagne, qui le servait plus habituellement, et qui s'obstinait à lui apprêter pour ses repas une nourriture un peu plus soignée.) - Ah! répondit-il, c'est qu'elle est bien patiente. Il ne mangeait guère que pour s'empêcher de mourir. Il ne se mettait jamais en peine du lendemain. Pendant le pèlerinage, il se contentait souvent pour son repas d'une tasse de lait avec un peu de chocolat; il le prenait debout, presque sans s'arrêter, quelquefois même dehors en traversant la place. J'ai entendu dire qu'il portait sur lui des instruments de pénitence. Toutefois, je ne sais rien de particulier à ce sujet, si ce n'est qu'un jour il commanda une chaîne au maréchal du village. Celui-ci m'en parla et me dit que sa pensée était que Mr le Curé avait commandé cette chaîne pour se faire souffrir. C'était aussi la mienne.

Il craignait beaucoup le froid et néanmoins il s'habillait peu pendant l'hiver, surtout dans les premiers temps de son séjour à Ars. Je l'ai vu à l'église, transi de froid, tremblant de tous ses membres; souvent quand il montait en chaire, il grelottait très fort. Dans ses longues séances au confessionnal, pendant l'hiver, il ne prenait aucune précaution pour se réchauffer; en vain essaya-t-on de lui mettre un réchaud sous les pieds; il le repoussa toujours, en prétextant que cela lui faisait mal. On essaya de remplacer le réchaud par une bouillotte d'eau chaude; la bouillotte lui faisait encore mal. On parvint cependant, pendant un hiver, à glisser sous le plancher de son confessionnal une bouillotte. Il s'en trouva très bien, sans se douter de la cause d'où cela provenait. Le bon Dieu est bien bon, disait-il à ce sujet; je ne sais pas comment cela s'est fait; mais je n'ai pas du tout souffert du froid cet hiver.



Quoad Paupertatem, testis interrogatus respondit:

Mr Vianney a aimé et pratiqué toute sa vie la pauvreté; c'est encore là une de ses vertus spéciales. J'ai souvent vu sa chambre; rien de plus pauvre: un mauvais lit, quelques chaises plus que modestes, une petite table, quelques livres, point d'assiettes, un petit pot pour manger sa soupe ou toute autre nourriture, point de rideaux à la fenêtre; telle était sa misérable cellule. Elle était d'ailleurs propre et constamment balayée.

651 L'habillement répondait au logement; avant le pèlerinage, sa soutane était toujours d'un drap grossier, toujours la même en été et en hiver, souvent raccommodée; il la portait jusqu'à ce qu'elle fut complètement usée. Ses souliers étaient ceux des paysans; il ne les cirait jamais; mais il les tenait propres néanmoins en les humectant avec de l'huile. Habituellement, il ne portait point de chapeau, ni de bonnet, ni de calotte. Lorsque dans les premiers temps de son séjour, il sortait de sa paroisse, il tenait son chapeau sous son bras; je pense que c'était par respect pour le bon Dieu et pour faire ses prières.

Quoiqu'il reçût beaucoup d'argent, il n'y tenait en aucune manière et ne l'envisageait que comme un moyen de faire du bien. Il avait le plus grand mépris pour tous les biens de la terre; cependant lorsqu'il était avec nous, il nous parlait avec complaisance et bonté de l'état de notre fortune, de nos récoltes; mais on voyait que c'était par un effet de sa grande charité et il tâchait toujours d'y mêler quelques paroles qui pussent nous porter au bon Dieu.



Quoad Humilitatem, simplicitatem et modestiam, testis interrogatus respondit:

Je ne pense pas qu'il soit possible de trouver un homme plus simple, plus modeste et plus humble que Mr Vianney. Ces trois vertus reluisaient dans toute sa personne et dans toutes ses actions, elles ne se sont jamais démenties. Ce sont elles qui lui donnaient cet air bienveillant, gracieux, plein d'abandon et d'ingénuité, qui le rendaient si aimable. Il s'intéressait à tout le monde, s'oubliant constamment lui-même; il avait même fréquemment de charmantes réparties, mais constamment tempérées par son humilité et une douce charité, qui faisait qu'elles n'offensaient jamais personne. Après l'établissement du pèlerinage, lorsque des foules d'étrangers de toute condition arrivaient chaque jour à Ars et se pressaient autour de lui avec les sentiments du plus profond respect, il n'avait pas l'air de s'apercevoir qu'il fût lui-même l'objet de cette pieuse vénération. Il la recevait absolument comme si elle se fût adressée à un autre.

Je n'ai remarqué qu'il parlât de lui, ni en bien ni en mal; seulement, en chaire, lorsqu'il nous disait combien nous étions pécheurs, il se mettait toujours du nombre.

Les premières fois qu'il vit son portrait suspendu à la devanture des boutiques d'Ars, il en fut très affligé; il voulut même le faire enlever et disparaître; les marchands le supplièrent très instamment de le leur laisser vendre; c'était un moyen, lui disaient-ils, de gagner leur pauvre vie. Le bon Curé se laissa toucher. 162 Combien vendez-vous ce portrait? leur demanda-t-il. - Deux sous, Mr le Curé. - Ah! c'est bien assez cher pour ce misérable carnaval, répliqua-t-il. Eh! bien, faites donc. Et après il n'eut presque plus l'air de s'apercevoir de rien.

Je sais que Mr Vianney a reçu souvent la visite de grands personnages; il n'avait pas l'air d'en être ému le moins du monde; c'était pour lui comme toute autre chose.

Il nous parlait fréquemment, dans ses instructions, de l'humilité et s'élevait vivement contre l'orgueil, qu'il nous montrait comme un très mauvais vice.

Je sais qu'il a été très humilié quand on lui donna le camail, et qu'il eût mieux aimé qu'on le donnât à son confrère.



Quoad Castitatem, testis respondit:

Je suis pleinement convaincu que Mr Vianney a toujours pratiqué la chasteté de la manière la plus exemplaire, et avec la conscience la plus délicate. Dans les commencements de la Providence, il y a eu quelques propos tenus par quelques mauvais sujets étrangers à la paroisse, mais jamais personne n'y a fait la moindre attention. La conviction universelle a toujours été que Mr Vianney était inattaquable sur ce point. J'ai dit, du reste, ailleurs qu'il n'avait jamais eu régulièrement des personnes du sexe à son service.



Interrogatus demum an sciat vel dici audiverit, servum Dei unquam aliquid gessisse virtutibus supradictis quoquo modo contrarium, testis respondit:

Je ne sais absolument rien qui puisse ternir l'éclat des vertus sur lesquelles je viens de déposer.



Juxta decimum nonum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

J'affirme que Mr Vianney a pratiqué toutes les vertus dont je viens de parler au degré héroïque: c'est là ma conviction profonde. Par vertu héroïque, j'entends une vertu supérieure à celle qu'on rencontre, même dans les bons chrétiens. J'atteste qu'il a pratiqué la vertu de cette manière pendant toute sa vie et jusqu'à sa mort, sans se démentir jamais. Je crois en avoir, dans ma déposition, fourni des preuves suffisantes.



Juxta vigesimum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

N'ayant pas eu des relations fréquentes et directes avec Mr Vianney, je ne puis rien dire de précis sur les dons extraordinaires que Dieu lui a accordés. Presque tout ce que j'en sais, c'est par ouï-dire. 653 Je suis cependant convaincu que Dieu a opéré par lui bien des choses extraordinaires; on m'a répété souvent qu'il devinait quelquefois ce qui se passait dans les coeurs à distance. Je l'ai vu souvent pleurer à l'église; cela arrivait surtout lorsqu'il parlait du péché ou du malheur des pécheurs; mais il arrivait souvent aussi qu'après avoir parlé sur ce sujet en versant des larmes abondantes, il nous entretenait du Ciel; aussitôt la joie se peignait sur sa figure et il était subitement tout transformé. L'opinion publique dans la paroisse a été qu'il y avait eu dans le grenier de la cure une multiplication de blé; on a aussi parlé d'une multiplication de farine à la Providence; mais on ne s'est pas beaucoup occupé dans la paroisse de constater ces faits, parce que 1° il était difficile de pénétrer à la Providence ou à la cure, 2° parce que l'opinion de sainteté qu'on avait de Mr Vianney était telle qu'il ne paraissait pas extraordinaire que Dieu eût opéré des prodiges en sa faveur. On trouvait pareilles choses toutes naturelles.



Juxta vigesimum primum Interrogatorium, testis respondit:

Je ne sais rien sur cet interrogatoire.



Juxta vigesimum secundum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

Je sais que le Serviteur de Dieu est mort à Ars, le quatre Août mil huit cent cinquante-neuf. Je pense qu'il est mort d'une maladie d'épuisement. Je sais qu'il a reçu les sacrements de l'Église; j'ignore s'il les a demandés lui-même. Je l'ai vu dans son lit, le dernier jour de sa vie; il était calme et tranquille comme un ange. Je ne sais rien autre de particulier à ce sujet.



Juxta vigesimum tertium Interrogatorium, testis respondit:

Son corps a été exposé, pendant deux jours, dans une chambre du rez-de-chaussée de la cure, où il est demeuré jusqu'à la cérémonie des funérailles. Il y a eu une grande affluence de monde pour faire toucher à son corps toute espèce d'objets de piété; on cherchait à avoir de ses cheveux ou des choses qui lui avaient appartenu. Ce concours était attiré par la haute idée qu'on avait de la sainteté du Serviteur de Dieu.



Juxta vigesimum quartum Interrogatorium, testis respondit:

Une foule immense a assisté à ses funérailles; on dit généralement à Ars qu'il y avait trois cents prêtres et six mille fidèles; on remarquait des personnes de toutes conditions. Je ne sache pas qu'aucun fait extraordinaire ait eu lieu. Le corps est resté pendant quelques jours à l'église, sans que je puisse préciser au juste combien de jours. On l'a descendu ensuite dans un caveau préparé à cette fin. Ce caveau est au milieu de l'église et recouvert d'une pierre en marbre noir posée à fleur du sol et portant une modeste inscription. Il vient, depuis sa mort, beaucoup de monde à son tombeau et le nombre des visiteurs ne fait qu'augmenter d'année en année. Je n'ai rien vu qui ressemblât à un culte public.



Juxta vigesimum quintum Interrogatorium, testis respondit:

L'opinion que l'on a du Serviteur de Dieu est celle que l'on a ordinairement d'un saint. J'entends par réputation l'opinion publique et générale sur des faits ou des personnes. L'origine de cette réputation de sainteté ne peut être attribuée qu'à la sainteté même du Serviteur de Dieu. Elle est commune aux personnes de toutes les classes. Parmi elles, il s'en trouve beaucoup de très éclairées, comme des prêtres, des Évêques, etc. Depuis sa mort, sa réputation de sainteté s'est étendue au loin; je crois qu'elle est répandue dans le monde entier; ce qui me le fait croire, c'est qu'on le dit généralement et qu'on voit venir à Ars des gens de tous les pays. On demande avec empressement le moindre objet lui ayant appartenu. Cette opinion ne s'est jamais affaiblie; au contraire elle semble s'accroître de jour en jour. Quant à moi personnellement, je regarde Mr Vianney comme un grand saint.



Juxta vigesimum sextum Interrogatorium, testis respondit:

Il n'est pas en ma connaissance que personne ait jamais attaqué d'une manière sérieuse la sainteté du Serviteur de Dieu, soit pendant sa vie, soit après sa mort.



Juxta vigesimum septimum Interrogatorium, testis respondit:

J'ai entendu dire que, depuis sa mort, il s'est opéré plusieurs miracles par l'intercession du Serviteur de Dieu; mais je ne suis pas en état de témoigner quelque chose de positif.



Juxta vigesimum octavum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:

Je n'ai rien à ajouter à ma déposition.



Et expleto examine super Interrogatoriis, deventum est ad Articulos, super quibus testi lectis, dixit, se tantum scire, quantum supra deposuit ad Interrogatoria, ad quae se retulit.

Sic completo examine, integra depositio jussu Rmarum Dominationum suarum perlecta fuit a me Notario a principio ad finem testi supradicto alta et intelligibili voce. Qua per ipsum bene audita et intellecta respondit se in eandem perseverare, et illam iterum confirmavit. Sequentia tamen addidit:

Lorsqu'il allait visiter les malades dans les paroisses voisines, chemin faisant, s'il avait à dire son bréviaire, avant de commencer et en finissant, il se mettait toujours à genoux, quel que fût le temps et l'état du lieu où il se trouvait.



Quibus peractis, injunctum fuit praedicto testi, ut se subscriberet, prout ille statim, accepto calamo scribere nesciens signum crucis fecit, ut sequitur.




Ars Procès informatif 617