Ars Procès informatif 1265

TEMOIN XXI – ABBE JEAN-LOUIS BORJON – 30 mai 1864

1265 (1265) Session 143 – 30 mai 1864 à 2h de l’après-midi



(1269) Juxta primum Interrogatorium, monitus testis de vi et natura juramenti, et gravitate perjurii, praesertim in causis Beatificationis et Canonizationis, respondit :



Je connais la nature et la force du serment que je viens de faire et la gravité du parjure dont je me rendrais coupable si je ne disais pas toute la vérité.



Juxta secundum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je me nomme Jean-Louis Borjon ; je suis né à Chevroux, diocèse de Belley, le deux avril mil huit cent neuf. Mon père s’appelait François Borjon et ma mère Marie Philiberte Goujon. J’ai été curé de la paroisse d’Ambérieux près d’Ars pendant dix-sept ans. Je suis actuellement curé de St André d’Huiriat, même diocèse.



Juxta tertium Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Etant prêtre, je célèbre la messe tous les jours ; j’ai eu le bonheur de la dire ce matin.



Juxta quartum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je n’ai jamais été traduit en justice devant aucun tribunal.



Juxta quintum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je n’ai jamais encouru les censures ou les peines ecclésiastiques.



Juxta sextum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je n’ai été instruit par personne de vive voix ou par écrit de la manière dont je devais déposer. Je n’ai pas lu les Articles du Postulateur. Je ne dirai que ce que j’ai vu par moi-même ou ce que j’ai appris de personnes dignes de foi.



Juxta septimum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



J’avais pour le Serviteur de Dieu une grande estime, une grande amitié, une grande vénération. Depuis sa mort je l’invoque avec confiance, le regardant comme un saint. Je suis allé plusieurs fois à Ars ; je n’ai pas manqué d’aller prier sur sa (1270) tombe. Je désire vivement sa béatification et sa canonisation pour la plus grande gloire de Dieu et l’honneur de l’Eglise. Je ne la désire et ne l’appelle de tous mes voeux que parce que l’ayant connu de près et ayant eu avec lui de nombreuses relations, j’ai trouvé en lui les vertus qui font les grands saints. J’ai été toujours très édifié toutes les fois que j’ai eu le bonheur de le voir et jamais je ne l’ai quitté sans la consolation dans le coeur.



Et quoniam praedictus testis accitus fuit ad explicanda et confirmanda quae spectant contradictionis convicia quibus impetitus fuerit generalemque virtutum christianarum opinionem, omissis coeteris Interrogatoriis, interrogatus fuit super Interrogatorio decimo septimo, super quo ei lecto, respondit :



Je sais que le Serviteur de Dieu a été en butte à différentes contradictions ; je ne pourrais donner sur ce sujet aucun détail précis. J’affirme qu’il n’y avait pas donné occasion. Il m’est arrivé plusieurs fois de lui exprimer combien j’étais peiné d’apprendre qu’il avait des contradictions. «Ils ne sont pas coupables, me répondait-il ; ils ne croient pas faire mal ; prions le bon Dieu qu’il les éclaire ; le bon Dieu en a bien souffert davantage.»



Juxta decimum octavum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



J’affirme que le Serviteur de Dieu a pratiqué toutes les vertus chrétiennes. C’est là ma conviction profonde. Je ne crois pas qu’il soit possible de porter plus loin la pratique de certaines vertus, et en particulier de la foi, de la confiance en Dieu, de la charité envers Dieu et envers le prochain, de l’humilité et de la mortification. Je n’ai jamais entendu personne soutenir que le Serviteur de Dieu manquât d’une seule vertu en particulier. J’ai vu que l’opinion générale le regardait comme un saint.



J’ai été plusieurs fois témoin de la vivacité de sa foi soit en le voyant prier, soit en l’entendant parler en public ou en particulier.



(1271) J’ai vu qu’il ne comptait pas sur lui ; il attendait tout de Dieu ; il comptait sur la Providence qui ne lui avait jamais fait défaut.



Ses instructions semblaient des élans continuels d’amour de Dieu : il ne pouvait dire deux phrases sans avoir une exclamation d’amour de Dieu. Il était impossible de le voir prier sans reconnaître les sentiments de charité qui l’animaient et sans se sentir porté à l’imiter.



Sa charité envers le prochain n’avait point de bornes ; elle était inépuisable. Il ne calculait pas s’il lui resterait des ressources, il donnait tant qu’il avait.



Laissant de côté les autres vertus sur lesquelles je ne pourrais donner qu’une opinion générale, j’arrive de suite à la tempérance. Il prenait très peu de nourriture. Sa vie à mes yeux me paraissait un miracle continuel. J’ai vu son lit ; il se composait d’une espèce de matelas de l’épaisseur de quatre à cinq centimètres, qui recouvrait des sarments de vigne. Il se couchait vers neuf heures et se rendait à l’église vers une heure du matin ; une foule nombreuse l’attendait déjà au confessionnal.



Qua responsione accepta, omissis coeteris Interrogatoriis, Rmi Judices Delegati completum esse examen decreverunt et per me Notarium Actuarium, de mandato dominationum suarum Rmarum perlecta fuit eidem testi integra depositio ab ipso emissa, qua per ipsum bene audita et intellecta, in eadem perseveravit, illamque in omnibus confirmavit.



Quibus peractis, injunctum fuit praedicto testi, ut se subscriberet, prout ille statim, accepto calamo se subscripsit ut immediate sequitur.



Ita pro veritate deposui.



Joannes Ludovicus Borjon



TEMOIN XXII – ABBE VINCENT BESACIER – 30 mai 1864



(1265) Suite de la session 143 – 30 mai 1864 à 2h de l’après-midi


1272 (1272) Juxta primum Interrogatorium, monitus testis de vi et natura juramenti, et gravitate perjurii, praesertim in causis Beatificationis et Canonizationis, respondit :



Je connais la nature et la force du serment que je viens de prêter et la gravité du parjure dont je me rendrais coupable si je ne disais pas la vérité.



Juxta secundum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je me nomme Vincent Besacier. Je suis né à Cours, diocèse de Lyon, le vingt-six mai mil sept cent quatre-vingt-dix. Mon père se nommait Jean-Marie Besacier et ma mère Jeanne-Marie Perrat. Je suis curé de la paroisse de Lescheroux, diocèse de Belley, depuis quarante-trois ans.



Juxta tertium Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Etant prêtre, je célèbre régulièrement la sainte messe ; j’ai eu le bonheur de la dire ce matin.



Juxta quartum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je n’ai jamais comparu devant les tribunaux que pour une affaire civile.



Juxta quintum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je n’ai encouru ni censures ni peines ecclésiastiques.



(1273) Juxta sextum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Personne de vive voix ou par écrit ne m’a dit ce que j’avais à déposer. Je n’ai pas lu les Articles du Postulateur. Je ne dirais donc que ce que j’ai vu par moi-même ou ce que j’ai appris de personnes dignes de foi.



Juxta septimum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je regarde le Serviteur de Dieu comme un saint. Je partage sur ce point l’opinion générale. Aussi je désire vivement sa béatification et sa Canonisation. Je ne suis poussé à cela par aucun motif humain.



Et quoniam praedictus testis accitus fuit ad explicanda quae spectant tempus studiorum, omissis coeteris Interrogatoriis, interrogatus fuit super Interrogatoriis decimo, undecimo et duodecimo, super quibus ei lectis, respondit :



Je n’ai connu le Serviteur de Dieu qu’au grand Séminaire de Lyon et j’ai eu le bonheur de loger avec lui dans la même chambre pendant les cinq ou six mois qu’il y a passés. Il était d’une grande régularité. Je n’ai remarqué aucune infraction au règlement de la maison. De la chambre que nous habitions il n’y avait que deux pas à faire pour voir passer un régiment Suisse au service de la France et entendre sa belle musique. Plusieurs séminaristes cédaient à la tentation de voir et d’entendre ; pour lui je ne me rappelle pas qu’il se soit jamais dérangé. Il n’y avait du reste rien d’extraordinaire dans sa conduite ; il était d’une grande simplicité.



Le résultat de ses études était nul parce qu’il ne comprenait pas suffisamment la langue latine. Plusieurs fois je lui ai donné des explications qu’il ne saisissait pas. Malgré cela il paraissait s’appliquer continuellement à l’étude.



Au bout de cinq ou six mois, les directeurs (1274) croyant qu’il ne pourrait réussir le prièrent de se retirer. Il alla auprès de Mr Balley, curé d’Ecully ; là il étudia la théologie en français, et grâce aux répétitions nombreuses qu’il recevait de son maître, il acquit assez de science pour répondre d’une manière convenable à l’examen que lui fit subir Mr Courbon, alors Vicaire Général du diocèse de Lyon. Après cet examen, le Vicaire Général lui aurait même dit : «Vous en savez autant et même plus que la plupart de nos curés de campagne : aussi je vais vous délivrer les pièces nécessaires pour aller recevoir les Ordres à Grenoble.»



Depuis cette époque, je n’ai pas eu de rapport avec le Serviteur de Dieu. J’en ai entendu beaucoup parler, comme beaucoup d’autres ; mais je ne saurais rien préciser.



Qua responsione accepta, omissis coeteris Interrogatoriis completum esse examen praedicti testis, Rmi Judices Delegati decreverunt, et per me Notarium Actuarium, de mandato Dominationum suarum Rmarum perlecta fuit eidem testi integra depositio ab ipso emissa, qua per ipsum bene audita et intellecta, in eadem perseveravit, illamque in omnibus confirmavit



Quibus peractis, injunctum fuit praedicto testi, ut se subscriberet, prout ille statim, accepto calamo se subscripsit ut immediate sequitur.



(1275) Ita pro veritate deposui.



Vincentius Besacier



TEMOIN XXIII – ABBE PIERRE MILLION – 31 mai 1864

1279
(1279) Session 144 –31 mai 1864 à 10 h du matin



(1280) Juxta primum Interrogatorium, monitus testis de vi et natura juramenti, et gravitate perjurii, praesertim in causis Beatificationis et Canonizationis, respondit :



Je connais parfaitement la nature du serment que j’ai fait et la gravité du parjure dont je serais coupable si je ne disais pas la vérité.



Juxta secundum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je me nomme Pierre Millon ; je suis né à Châtillon-la-Palud, diocèse de Belley, le neuf août mil sept cent quatre-vingt-dix. Mon père se nommait Alexandre Millon et ma mère Clémence Vénard. Je suis curé de la paroisse de Bény depuis trente-deux ans.



Juxta tertium Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



J’ai le bonheur de célébrer la messe très régulièrement ; je l’ai dite ce matin.



Juxta quartum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je n’ai jamais été traduit en justice devant aucun tribunal.



Juxta quintum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je ne sache pas avoir jamais encouru les censures ou les peines ecclésiastiques.



Juxta sextum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Personne de vive voix ou par écrit ne m’a jamais suggéré ce que je devais déposer. Je n’ai lu aucun des Articles du Postulateur. Je ne dirai donc que ce que je sais par moi-même ou par des témoins dignes de foi.



Juxta septimum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



J’ai toujours conservé pour (1281) le Serviteur de Dieu beaucoup d’estime et d’affection. Je le regarde comme un saint : aussi je désire sa béatification et sa canonisation ; mais en cela je ne me propose que la gloire de Dieu.



Et quoniam praedictus testis accitus fuit ad explicanda quae spectant tempus studiorum, omissis coeteris Interrogatoriis, interrogatus fuit super Interrogatoriis decimo, undecimo et duodecimo, super quibus ei lectis, respondit :



J’ai fait à Verrières mon cours de philosophie avec le Serviteur de Dieu ; mais comme nous étions plus de deux cents et qu’il y avait deux divisions, je ne me rappelle rien de particulier. Je l’ai connu de nouveau au grand Séminaire où il venait passer un mois pour se préparer à l’ordination. Ses études de théologie se faisaient chez Mr Balley, curé d’Ecully. Il passait auprès de ses condisciples pour avoir très peu de capacité, bien que naturellement il avait du bon sens, mais ses études avaient été très incomplètes. Quant à moi, je le regardais comme très pieux. J’ai eu le bonheur de recevoir le sous-diaconat à la même ordination. Après la cérémonie il était d’usage alors de retourner de l’église Primatiale de Lyon au grand Séminaire en procession. Je me trouvais à côté de lui. Je fus frappé de l’ardeur et de la piété avec lesquelles il chantait les cantiques d’action de grâces et surtout je remarquai que sa figure paraissait toute rayonnante. Quand on chanta le verset du Benedictus : « Et tu, puer, propheta Altissimi vocaberis : praeibis enim ante faciem Domini parare vias ejus », je jetai les regards sur le Serviteur de Dieu et je lui en fis intérieurement l’application en me disant : « Il a moins de science que beaucoup d’autres et il fera de plus grandes choses dans le ministère. »



Je n’ai revu le Serviteur de Dieu qu’une seule fois à Ars ; c’était vers mil huit cent trente-neuf. (1282) Je fus frappé du grand concours de fidèles qui se faisait autour de lui. Dans notre entrevue, Mr Vianney me raconta qu’un paralytique avait été guéri par l’intercession de Sainte Philomène ; il avait promis de revenir en action de grâces au bout d’un an ; il manqua à sa promesse, il redevint paralytique. Il songea alors au pèlerinage d’Ars et revint prier Sainte Philomène ; mais cette fois il ne fut pas exaucé. Je ne sais rien autre.



Qua responsione accepta, omissis coeteris Interrogatoriis, Rmi judices delegati completum esse examen decreverunt, et per me Notarium Actuarium, de mandato Dominationum suarum Rmarum perlecta fuit eidem testi integra depositio ab ipso emissa, qua per ipsum bene audita et intellecta, in eadem perseveravit, illamque in omnibus confirmavit.



Quibus peractis, injunctum fuit praedicto testi, ut se subscriberet, prout ille statim, accepto calamo se subscripsit ut immediate sequitur.



Ita pro veritate deposui.



Petrus Millon





TEMOIN XXIV – AIME-MARIE-JOSEPH MICHEL – 31 mai 1964


(1279) Suite de la session 144 – 31 mai 1864 à 10h du matin

1282 (1282) Juxta primum Interrogatorium, monitus testis de vi et natura juramenti, et gravitate perjurii, praesertim in causis Beatificationis et Canonizationis, respondit :



Je connais la nature et la force du serment que je viens de prêter et le parjure dont je me rendrais coupable si je ne disais pas la vérité.



Juxta secundum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je me nomme Aimé-Marie-Joseph Michel ; je suis né à Fleury-la-Montagne, diocèse d’Autun, le vingt-cinq janvier mil huit cent cinq. Mon père s’appelait Antoine Michel et ma mère Marie-Françoise-Marguerite Dupont. Je suis Docteur Médecin à Coligny, diocèse de Belley. Je suis dans une honnête aisance.



Juxta tertium Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je remplis annuellement les devoirs de la confession et de la communion. Je m’approche plusieurs fois dans l’année des sacrements. J’ai communié le jeudi de la fête du St Sacrement.



Juxta quartum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je n’ai pas été recherché en justice.



Juxta quintum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je ne sache pas avoir encouru aucune censure ou peine ecclésiastique.



Juxta sextum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Personne ne m’a instruit de ce que j’avais à déposer. Je n’ai pas lu les Articles du Postulateur ; je ne dirai que ce que je sais par moi-même ou ce que j’ai appris de témoins dignes de foi.



Juxta septimum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Regardant Mr Vianney comme un saint je désire sa béatification, mais en cela je ne suis poussé par aucun motif humain.



Et quoniam praedictus testis accitus fuit ad explicanda quae spectant doemonis vexationes omissis coeteris Interrogatoriis, interrogatus fuit super Interrogatorio decimo octavo, super quo ei lecto, respondit :



D’après la manière de vivre de Mr Vianney, (1284) telle qu’elle m’est connue et telle qu’elle m’a été expliquée, je regarde sa vie comme extraordinaire et ne pouvant pas s’expliquer naturellement. Il prenait très peu de nourriture, dormait fort peu et malgré cela se livrait à des travaux très pénibles, la prédication, la confession presque continuelle, travaux qui exigeaient une dépense de forces considérable et qui ont duré de longues années. Tout ce que j’ai vu et entendu dire de Mr le Curé d’Ars me prouve qu’il avait l’entière possession de lui-même, une grande sûreté de jugement et rien ne peut m’induire à penser qu’il ait été victime d’illusions ou d’hallucinations.



Quant aux attaques du démon, j’en ai entendu parler, et si Mr Vianney les a affirmées, je crois qu’elles ont eu lieu.



Il est arrivé dans ma famille trois choses extraordinaires. 1° - J’avais un enfant qui, à la suite d’une fièvre grave datant de douze jours, était dans un état d’assoupissement permanent. Il n’y avait aucune amélioration sensible malgré les soins dont il était entouré. On écrivit pour demander une messe au Curé d’Ars ; elle devait se dire le lundi à sept heures du matin et on nous fit dire de nous unir d’intention. Une circonstance particulière força le Serviteur de Dieu de la renvoyer au mardi. Le lundi, l’état de l’enfant resta également grave. Le mardi matin à sept heures pendant que sa mère était à la messe, les personnes qui étaient restées à la maison, son père et un autre médecin, remarquèrent que l’enfant faisait attention à la conversation, regardant alternativement l’un et l’autre des interlocuteurs. Quand sa mère entra on lui dit qu’il venait de se passer quelque chose d’extraordinaire. L’enfant en voyant sa mère, se mit à pleurer et demanda à manger ; on lui donna quelque chose, mais il ne fut pas satisfait, et comme craignant quelque accident, on ne lui donnait qu’avec beaucoup de mesure, il renouvela sa demande avec larmes et avec instance pendant toute la journée. Je le traitais en convalescent et il était guéri. Le jour même ou le lendemain nous reçûmes une lettre nous annonçant que Mr Vianney n’ayant pu dire la messe le lundi l’avait dite le mardi à sept heures, heure à laquelle l’enfant fut guéri.



2° - A la suite de ses couches mon épouse avait pris un coup d’air qui détermina une névralgie extrêmement intense au globe de l’oeil avec tuméfaction et larmoiement considérable. Après quatre jours de douleurs très vives, elle appliqua sur l’oeil une image du Sacré Coeur, que Mr Vianney avait portée sur lui. A l’instant, la douleur cessa et tous les accidents qui l’accompagnaient. Mon épouse (1285) s’écria : «Je suis guérie.» La guérison a continué.



3° - Un petit enfant âgé de quatre mois, pris d’accidents intestinaux excessivement graves et marchant d’une manière suraiguë, s’éteignait à vue d’oeil. Pendant toute la nuit on cherchait à s’assurer à chaque instant s’il respirait encore ; il était froid et glacé. Vers le matin l’application de la même image enraya les accidents et dans la journée l’espérance fut rendue à la famille. La guérison a été rapide.



Nihil amplius cognoscere teste declarante, omissa sunt coetera Interrogatoria, jussu Dominationum suarum Rmarum per me Notarium Actuarium perlecta fuit eidem testi integra depositio ab ipso emissa, qua per ipsum bene audita et intellecta, in eadem perseveravit, illamque in omnibus confirmavit



Quibus peractis, injunctum fuit praedicto testi, ut se subscriberet, prout ille statim, accepto calamo se subscripsit ut immediate sequitur.



Ita pro veritate deposui.



Amatus-Maria-Joseph Michel



TEMOIN XXV – JEAN-FLEURY VERICEL – 2 juin 1864

1287 (1287) Session 145 - 2 juin 1864 à 9h du matin.



(1293) Juxta primum Interrogatorium, monitus testis de vi et natura juramenti, et gravitate perjurii, praesertim in causis Beatificationis et Canonizationis, respondit :



Je connais la nature et la force du serment que je viens de faire et le parjure dont je serais coupable si je ne disais pas la vérité.



Juxta secundum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je m’appelle Jean Fleury Véricel. Je suis né à Dardilly, diocèse de Lyon, le quatre avril mil sept cent quatre-vingt onze. Mon père se nommait Antoine Véricel et ma mère Claudine Cusset. Je possède une très modique fortune.



Juxta tertium Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je fais régulièrement mes Pâques ; je me suis confessé et j’ai communié aux Pâques dernières.



Juxta quartum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je n’ai jamais été recherché en justice.



Juxta quintum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je n’ai encouru aucune censure ou peine ecclésiastique.



Juxta sextum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je n’ai été instruit par personne de vive voix ou par écrit de ce que j’avais à dire dans cette cause. Je n’ai pas lu les Articles du Postulateur. Je ne dirai que ce que je sais pour l’avoir vu ou l’avoir entendu.



Juxta septimum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



J’ai toujours conservé pour le Serviteur de Dieu une grande estime et une grande amitié. Je le regarde comme un saint et s’il ne l’est pas, je crois qu’il n’y en aura point. Aussi pour la plus grande gloire de Dieu et sans aucun motif humain je désire qu’il soit béatifié et canonisé.



Juxta octavum Interrogatorium, testis interrogatus (1294) respondit :



Je sais que le Serviteur de Dieu est né à Dardilly. Nous étions voisins ; il y avait entre nous cinq ans de différence ; aussi j’ai beaucoup connu Mr Vianney pendant ses premières années ; mais malheureusement ne pensant pas à ce qui arriverait plus tard, je n’ai pas assez fait attention aux exemples de piété et de vertu qu’il nous donnait.



Son père se nommait Matthieu Vianney et sa mère Marie Béluse ; elle était connue sous le nom de Marie Imbert. Son père était assez pieux ; mais sa mère se faisait remarquer par une grande piété ; ils élevaient très chrétiennement leurs enfants. Sa mère affectionnait particulièrement le Serviteur de Dieu à cause des dispositions à la piété qu’elle remarquait en lui. La maison Vianney était connue dans le pays pour être très charitable. Les pauvres y affluaient en grand nombre, il y en avait tous les jours et souvent plus de dix à la fois. On les logeait ; on leur donnait la soupe. Quelquefois il n’y avait pas assez de bouillon. Le père qui faisait d’abord servir les pauvres disait : «Eh bien ! je m’en passerai.»



Le Serviteur de Dieu se fit remarquer dès son enfance par un goût prononcé pour la prière. Je sais qu’il priait souvent avec sa mère et que souvent aussi il se retirait devant des images ou des tableaux pour prier seul.



Juxta nonum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



C’est à Dardilly auprès de ses parents qu’il a passé son enfance et son adolescence. Il s’est livré pendant ce temps aux différents travaux auxquels dans la campagne on applique les enfants ou les jeunes gens. Il était obéissant à son père, à sa mère et même à ses frères. Je n’ai connu en lui aucun défaut et je n’ai remarqué en lui aucun manquement. Il jouait rarement avec nous ; ce que je me rappelle très bien, c’est qu’alors, je ne l’ai jamais vu se fâcher ou s’impatienter ; il était toujours calme et tranquille. Je me rappelle qu’un jour son frère, pour une raison très futile, se mit à gronder le Serviteur de Dieu ; au lieu de s’excuser, comme il le pouvait facilement, il a gardé le silence.



(1295) Quand il était à la maison, il s’occupait à lire ou à prier. Lorsqu’il entendait la messe, il ne levait pas les yeux et se tenait parfaitement tranquille. Si on l’envoyait aux champs garder le troupeau de son père, il se retirait dans un coin au lieu d’aller avec les autres, se mettait à genoux pour prier un moment, puis il avait l’oeil sur son troupeau et le gardait tellement qu’il ne faisait point de mal.



On m’a assuré qu’on lui avait donné une petite statue de la Ste Vierge ; on m’a pareillement assuré que lorsqu’il travaillait aux champs il la mettait devant lui. Son frère aîné, beaucoup plus fort que lui, ne put pas le surpasser dans son travail, pendant huit jours qu’ils travaillèrent ensemble à la vigne. Il s’en étonnait beaucoup. Le Serviteur de Dieu avait eu l’idée de mettre sa statue devant lui pour se soutenir et s’animer au travail, selon ce que j’ai entendu dire.



Je me rappelle que plus d’une fois nous revenions ensemble du travail ; nous étions quelquefois sept ou huit. Le Serviteur de Dieu restait en arrière afin de pouvoir prier à son aise.



Juxta decimum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je ne me rappelle pas très exactement l’âge auquel il a commencé ses études ecclésiastiques ; je crois que c’est vers dix-huit ans. C’est à Ecully auprès de Mr Balley, curé de cette paroisse qu’il les a faites. Je crois qu’il était là un peu comme domestique en même temps qu’il étudiait. Je sais qu’il continua à se faire remarquer par sa piété. Mais comme il n’était pas dans le pays, je n’ai aucun détail à donner. Son frère m’a raconté le fait suivant : « Un jour le Serviteur de Dieu revenait à Dardilly ; il rencontra une pauvre femme qui avait des enfants et qui paraissait très misérable ; il lui donna aussitôt les sept francs qu’il avait sur lui, et arrivé à la maison il me dit : Je viens de faire une belle oeuvre.»

Jean Fleury Véricel



(1296) Juxta undecimum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je sais qu’il a dû interrompre ses études à cause de la conscription militaire ; mais j’ignore les vraies circonstances qui l’ont forcé à la désertion. Lorsque son frère cadet, moyennant une avance pécuniaire de trois mille francs, eut consenti à le remplacer, il vint reprendre ses études. On m’a dit qu’il n’avait pas beaucoup de facilité et qu’il fit un pèlerinage à St Jean-François Régis pour obtenir, par l’intercession de ce saint, la grâce de mieux réussir dans ses études.



Juxta duodecimum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je n’ai rien à dire sur cet Interrogatoire.



Juxta decimum tertium Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Dès qu’il fut prêtre, il fut placé comme vicaire à Ecully où il s’attira l’estime de tout le monde par son zèle et par ses aumônes. De concert avec son curé, il menait une vie très pénitente. Après la mort de Mr Balley, son successeur, excellent prêtre du reste, ne suivait pas un régime si sévère. Mr Vianney, qui avait contracté les habitudes de la pénitence, ne voulait pas se départir de la règle qu’il s’était imposée et refusait d’aller dîner hors du presbytère. Au bout de peu de temps, il fut nommé curé d’Ars.



Juxta decimum quartum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Depuis sa nomination à la cure d’Ars, je n’ai vu le Serviteur de Dieu qu’une seule fois, c’était lorsqu’il était chez son frère à Dardilly où il passa environ trois semaines. Son frère, voyant le concours d’étrangers de tous pays qui se faisait autour de lui, m’a dit et à plusieurs autres : «S’il reste ici, je serai obligé de crier au secours : je ne serai plus maître chez moi.» Pendant ce temps Mr Vianney mangeait si peu que sa belle-soeur disait en parlant de son régime : «Il ne fait pas grande dépense.»



Je ne sais rien autre.



Qua responsione accepta, omissis coeteris Interrogatoriis (1297) completum esse examen praedicti testis, Rmi Judices Delegati decreverunt, et per me Notarium Actuarium, de mandato Dominationum suarum Rmarum perlecta fuit eidem testi integra depositio ab ipso emissa, qua per ipsum bene audita et intellecta, in eadem perseveravit, illamque in omnibus confirmavit



Quibus peractis, injunctum fuit praedicto testi, ut se subscriberet, prout ille statim, accepto calamo se subscripsit ut immediate sequitur.



Ita pro veritate deposui.



Jean Verissel



TEMOIN XXVI – MARIE FILLIAT – 2 juin 1864

1301
(1301) Session 146 – 2 juin 1864 à 3h de l’après-midi



(1302) Juxta primum Interrogatorium, monitus testis de vi et natura juramenti, et gravitate perjurii, praesertim in causis Beatificationis et Canonizationis, respondit :



Je connais le serment que je viens de faire et le parjure dont je me rendrais coupable si je ne disais pas la vérité.



Juxta secundum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je m’appelle Marie Filliat ; je suis née à Mizérieux, diocèse de Belley. J’ai cinquante-quatre ou cinquante-cinq ans. Mon père se nommait Claude Filliat et ma mère Jeanne Marbot. Je n’ai qu’une très modique fortune.



Juxta tertium Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je me confesse à peu près tous les huit jours et je communie presque tous les jours. J’ai communié ce matin.



Juxta quartum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je n’ai jamais été appelée devant les tribunaux que comme témoin.



Juxta quintum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je ne sache pas avoir encouru les censures ou les peines ecclésiastiques.



Juxta sextum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Personne ne m’a jamais instruite de ce que je devais dire dans cette cause. Je n’ai lu aucun des Articles du Postulateur. Je ne dirai que ce que je sais très bien, pour l’avoir vu ou pour l’avoir entendu.



Juxta septimum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



J’ai toujours eu pour le Serviteur de Dieu une grande estime et un grand attachement. (1303) Depuis sa mort, je l’invoque avec confiance ; tous les jours je le prie parce que je le regarde comme un grand saint. Je désire sa béatification pour la plus grande gloire de Dieu.



Et quoniam praedictus testis accitus fuit ad confirmanda vel explicanda quae spectant quantitatem et qualitatem cibi ; mortificationem et quaedam facta extraordinaria, omissis coeteris Interrogatoriis, interrogatus fuit super Interrogatorio decimo octavo super quo ei lecto, respondit :



On parlait dans ma paroisse et dans les paroisses voisines du Curé d’Ars comme d’un saint. Il venait souvent prêcher à Mizérieux, qui n’est qu’à une petite demi-heure d’Ars. Je me suis confessée à lui à l’âge de treize ans. C’est à vingt-et-un ans que je suis entrée à la Providence, comme directrice et j’y suis restée jusqu’à sa transformation, c’est-à-dire pendant dix-sept ans. Cet établissement était déjà fondé depuis six années environ. Les enfants qu’on y recevait étaient pauvres et souvent manquaient de tout. Il fallait leur donner la nourriture, le logement et jusqu’aux vêtements. Il y avait parfois jusqu’à soixante enfants. On les entretenait avec les dons qu’on recevait, avec le prix du travail auquel on appliquait les plus grandes filles et surtout avec les ressources que fournissait le Serviteur de Dieu. Il disait en riant qu’il avait le bâton de la Providence, et lorsqu’il n’avait rien, il allait faire un tour pour avoir de l’argent. Je sais que dans le commencement, l’établissement était dans la gêne ; mais tout le temps que j’y suis restée, nous n’avons manqué de rien. Cependant, nous vivions simplement et je dois dire même pauvrement, parce que le Serviteur de Dieu le voulait ainsi. Il désirait que l’on donnât le nécessaire, mais il ne fallait point de superflu.



C’est à la Providence qu’il venait prendre ses repas. Le matin il prenait pour déjeuner un peu de lait et de chocolat ; rarement il y mettait du pain ; souvent même il n’achevait pas de boire la tasse qu’on lui avait préparée. Le carême, il ne prenait absolument rien. A midi, on lui donnait souvent le lait et le chocolat qu’il (1304) n’avait pas fini de prendre le matin ; on y ajoutait une petite quantité pour qu’il ne s’en aperçût pas. On lui préparait un plat de légumes ; rarement, il voulait de la viande. Il fallait bien se garder de lui présenter deux plats. Quand nous avions le malheur de le faire, il nous disait : «Si vous me donnez deux plats, je ne mangerai rien.» Lorsqu’on voulait qu’il prît de deux mets, il fallait les préparer dans le même plat. Il ne voulait jamais de dessert. Dans le temps des fruits, nous voulions lui en faire prendre, parce que nous savions qu’il les aimait beaucoup. «Ils vous feront du bien, lui disions-nous. – C’est justement pour cela que je n’en veux point.» Il ajoutait quelquefois : « J’ai fait voeu de n’en point manger jusqu’à telle époque » qu’il indiquait. Il mettait toujours beaucoup d’eau dans son vin. Il lui arrivait bien rarement de prendre une goutte de vin pur. Le soir il ne prenait rien, à moins qu’il ne fût fatigué. Je crois qu’il ne mangeait pas plus d’une livre de pain par semaine. Lorsque Monseigneur devait venir à Ars, le Serviteur de Dieu redoublait ses mortifications.



Les dernières années par ordre du médecin, il dut adoucir un peu son régime. Ainsi, on lui servait un peu plus souvent de la viande, il buvait un peu plus de vin ; c’était du vin blanc qu’il prenait comme remède. Le soir on lui servait une petite tasse de bouillon auquel ordinairement il ne faisait que toucher.



Il m’a chargée plus d’une fois de porter ce qu’on lui avait préparé à une pauvre femme du village ; lui-même portait souvent à une pauvre aveugle. Il m’a fait porter du bois, de l’argent à de pauvres ménages. Je suis allée jusqu’à Lyon donner de sa part cent francs à une pauvre famille. Un jour il fut fâché de n’avoir pas assez donné à une femme de Saint Didier ; il me chargea de lui porter quinze francs. J’ai été plus d’une fois chargée de faire de semblables commissions dans la paroisse et dans les paroisses voisines. Il m’envoya un jour avec Marie Chanay chercher à Mizérieux le petit enfant d’une (1305) femme malade pour le mettre en nourrice à son compte. Pour lui, il donnait à tous ceux qui sollicitaient sa charité, et il donnait tant qu’il avait. Nous avions été obligées de fermer son linge et de le lui donner au fur et à mesure qu’il en avait besoin. Sans cette précaution, il ne se serait rien gardé. Il lui est arrivé de donner les draps de son lit et ses chemises. J’ai entendu dire qu’un jour il avait donné ses souliers.



Il ne s’occupait en aucune manière de son vestiaire. C’était à nous et à quelques personnes charitables d’y pourvoir. Il ne nous a jamais rien donné pour cela.



J’ai souvent touché sa discipline ; elle était bien brillante. Elle était composée de trois chaînettes en fer au bout desquelles il attachait de petites boules de même métal. A force de se frapper il finissait par détacher ces boules. J’en ai trouvé une un jour dans sa chambre. Sa discipline, il la tenait toujours cachée derrière le rideau de son lit. Il m’a chargée un jour de lui acheter une chaînette en fer d’une grosseur qu’il m’indiqua. Prévoyant l’usage auquel il la destinait, je l’achetai moins grosse. Il faisait lui-même ses disciplines avec un fil de fer assez gros.

J’ai vu après sa mort un cilice en crin tout usé par suite de l’usage qu’il en avait fait. En lavant son linge j’ai trouvé souvent des tâches de sang assez abondantes.



Son lit se composait d’une paillasse de cinq centimètres d’épaisseur. Avant de se coucher il avait soin d’écarter la paille pour mieux sentir la dureté de la planche. S’il nous arrivait d’y mettre un peu plus de paille, il la sortait et la jetait au feu.



Juxta vigesimum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Nous faisions peu attention à plusieurs choses extraordinaires qui arrivaient à Ars et en particulier à la Providence ; il y en a trois cependant qui m’ont frappée d’une manière particulière.



(1306) Un jour il ne restait plus de farine que pour faire trois ou quatre pains de dix-huit livres environ et le meunier ne pouvait pas en livrer. On consulta Mr le Curé pour savoir ce qu’il y avait à faire. «Pétrissez ce que vous avez » répondit-il. Pendant qu’on pétrissait, la pâte s’épaississait et il fallait toujours de l’eau. A la fin, le pétrin se trouva plein et l’on put faire la fournée ordinaire de dix gros pains.



J’ai entendu souvent parler à des personnes dignes de foi et par Mr le Curé lui-même de la multiplication du blé qui eut lieu au grenier de la cure. Je ne me rappelle pas assez les circonstances pour pouvoir les mentionner. Je me rappelle seulement que le meunier avait pris cent mesures de blé, et qu’il fut tout étonné de voir que le grenier remplissait la même quantité lorsqu’il vint chercher une seconde mouture. «Vous avez donc acheté du blé ? – Non », lui fut-il répondu.



Mr le Curé vint nous avertir un jour qu’un tonneau de vin se répandait dans la cave. J’y courus de suite avec ma soeur. Il ne restait plus dans le tonneau qu’une quinzaine de litres ; nous pûmes recueillir à terre à peu près la même quantité. Nous mîmes tout ce vin dans un tonneau vide de deux cent dix litres. Nous y ajoutâmes cinquante litres qui restaient dans un petit tonneau. Après cette opération, je ne sais pourquoi, je m’avisai de mettre le doigt dans la bonde. «Oui, regarde, me dit ma soeur en riant, tu vas toucher le vin. - Mais oui, repris-je, je le touche, vois toi-même ». Le tonneau était réellement plein. En rentrant à la Providence nous dîmes, en riant, à Mr le Curé : «Nous avons fait un miracle. – Ah ! oui, dit-il. Vous avez trouvé plus de vin que vous ne pensiez.»



Un jour maigre, avant de mettre le riz dans la marmite, je remarquai avec étonnement de petits morceaux de viande. Je jetai le tout, lavai soigneusement la marmite et remis de l’eau. Avant de remettre le riz, je m’aperçus encore qu’il y avait de la viande. Je versai de nouveau ce qui était dans la marmite, la lavai avec soin ; je remis de l’eau, mais cette fois je n’aperçus les morceaux de viande que lorsque je voulus servir la soupe. N’ayant pas le temps de recommencer, je courus à Mr le Curé (1307) qui me dit : «C’est le démon qui fait cela ; faites manger la soupe telle qu’elle est. » Le fait ne s’est plus reproduit.



Qua responsione accepta, omissis coeteris Interrogatoriis completum esse examen praedicti testis, qui aliunde ut circa quaedam facta Servi Dei deponeret inductus fuerat, Rmi Judices Delegati decreverunt, et per me Notarium Actuarium, de mandato Dominationum suarum Rmarum perlecta fuit eidem testi integra depositio ab ipso emissa, a principio usque ad finem, qua per ipsum bene audita, illam in omnibus confirmavit.



Quibus peractis, injunctum fuit praedicto testi, ut se subscriberet, prout ille statim, accepto calamo se subscripsit ut immediate sequitur.



Ita pro veritate deposui.



Marie Filliat






Ars Procès informatif 1265