Angelus Benoit XVI 177


VOYAGE APOSTOLIQUE

À SYDNEY (AUSTRALIE) À L'OCCASION

DE LA XXIII JOURNÉE MONDIALE DE LA JEUNESSE

(12-21 JUILLET 2008)



Hippodrome de Randwick

Dimanche 20 juillet 2008

Chers jeunes,

Nous nous apprêtons maintenant à réciter ensemble la belle prière de l’Angélus. Nous y réfléchirons sur Marie, jeune femme s’entretenant avec l’ange qui l’invite, au nom de Dieu, à un don particulier d’elle-même, de sa propre vie, de son avenir de femme et de mère. Nous pouvons imaginer ce que Marie ressentit à ce moment-là : étant toute bouleversée, totalement dépassée par la proposition qui lui était faite.

L’ange comprit son inquiétude et s’efforça aussitôt de la rassurer : « Sois sans crainte, Marie (…) l’Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre » (Lc 1, 30, 35). C’est l’Esprit Saint qui lui a donné la force et le courage de répondre à l’appel du Seigneur. C’est l’Esprit qui l’aide à comprendre le grand mystère qui est en train de s’accomplir à travers elle. C’est l’Esprit qui l’enveloppe de son amour et la rend capable de concevoir dans ses entrailles le Fils de Dieu.

Cette scène constitue sans aucun doute le moment central de l’histoire de la relation de Dieu avec son peuple. Dans l’Ancien Testament, Dieu s’était révélé de façon partielle et de manière graduelle, comme nous le faisons tous dans nos relations personnelles. Il fallait un certain temps au peuple élu pour approfondir sa relation avec Dieu. L’Alliance avec Israël a été comme un temps de séduction, de longues fiançailles. Le moment définitif arriva donc, le moment du mariage, la réalisation de la nouvelle et éternelle alliance. À ce moment-là, devant le Seigneur, Marie représente toute l’humanité. Dans le message de l’ange, c’était Dieu qui faisait une proposition de mariage avec l’humanité. Et, en notre nom, Marie dit son « oui ».

Dans les fables, les récits s’achèvent ainsi : et tous « vécurent alors heureux et contents ». Dans la vie réelle, ce n’est pas aussi facile. Marie dut faire face à de nombreuses difficultés pour affronter les conséquences de ce « oui » dit au Seigneur. Syméon prophétisa qu’une épée lui transpercerait le coeur. Lorsque Jésus eut douze ans, elle connut les pires cauchemars que tout parent éprouve quand, pendant trois jours, elle dut affronter la disparition de son Fils. Et après l’activité publique de Jésus, elle souffrit l’agonie, étant présente à sa crucifixion et à sa mort. Dans ses différentes épreuves, elle resta toujours fidèle à sa promesse, soutenue par l’Esprit de force. Et elle en fut récompensée par la gloire.

Chers jeunes, nous aussi nous devons rester fidèles au « oui » par lequel nous avons accueilli l’offre d’amitié que le Seigneur nous a faite. Nous savons qu’Il ne nous abandonnera jamais. Nous avons qu’Il nous soutiendra toujours par les dons de l’Esprit. Marie a accueilli la « proposition » du Seigneur en notre nom. Tournons-nous alors vers elle et demandons-lui de nous guider dans les difficultés pour rester fidèles à cette relation vitale que Dieu a établie avec chacun de nous. Marie nous inspire, elle est notre modèle. Elle intercède pour nous auprès de son Fils et, avec son amour maternel, elle nous protège des dangers.

Après l'Angelus

Chers amis,

178 Le moment est venu maintenant de nous dire adieu, ou plutôt au revoir ! Je vous remercie tous d’avoir participés à la Journée Mondiale des Jeunes 2008, ici, à Sydney, et j’espère vous revoir dans trois ans. La Journée Mondiale des Jeunes 2011 se déroulera à Madrid, en Espagne. Jusque-là, prions les uns pour les autres, et, devant le monde, rendons un témoignage joyeux au Christ ! Que Dieu vous bénisse tous !



Palais apostolique de Castelgandolfo

Dimanche 27 juillet 2008


Chers frères et soeurs,

Je suis rentré lundi dernier de Sydney, en Australie, où s'est déroulée la XXIII Journée mondiale de la Jeunesse. J'ai encore devant les yeux et dans le coeur cette expérience extraordinaire au cours de laquelle il m'a été donné de rencontrer le visage jeune de l'Eglise: c'était comme une mosaïque multicolore, formée de garçons et de filles provenant de toutes les régions du monde, tous réunis par l'unique foi en Jésus Christ. "Young pilgrims of the world - les jeunes pèlerins du monde": c'est ainsi que les appelaient les gens, avec cette belle expression qui résume l'essentiel de ces journées internationales lancées par Jean-Paul II. Ces rencontres constituent en effet les étapes d'un grand pèlerinage à travers la planète, pour montrer que la foi dans le Christ fait de nous tous des enfants de l'unique Père qui est dans les cieux, et des bâtisseurs de la civilisation de l'amour.

La prise de conscience de la place centrale de l'Esprit Saint, protagoniste de la vie de l'Eglise et du chrétien, a été une caractéristique de la rencontre de Sydney. Le long chemin de préparation dans les Eglises particulières avait suivi comme thème la promesse faite par le Christ aux apôtres: "Vous allez recevoir une force, celle de l'Esprit Saint qui descendra sur vous. Vous serez alors mes témoins" (Ac 1,8). Les 16, 17 et 18 juillet, dans les églises de Sydney, les nombreux évêques présents ont exercé leur ministère, en proposant des catéchèses dans les différentes langues: ces catéchèses sont des moments de réflexion et de recueillement indispensables pour que cet événement ne reste pas seulement une manifestation extérieure, mais laisse une marque profonde dans les consciences. La veillée du soir, au coeur de la ville, sous la Croix du sud, a été une invocation chorale à l'Esprit Saint; et, enfin, durant la grande célébration eucharistique de dimanche dernier, j'ai conféré le sacrement de la confirmation à 24 jeunes de divers continents, dont 14 Australiens, en invitant toutes les personnes présentes à renouveler les promesses de leur baptême. Cette Journée mondiale s'est ainsi transformée en une nouvelle Pentecôte, de laquelle est repartie la mission des jeunes, appelés à être les apôtres des jeunes de leur âge, comme tant de saints et de bienheureux, en particulier le bienheureux Pier Giorgio Frassati, dont les reliques, placées dans la cathédrale de Sydney, ont été vénérées par un pèlerinage ininterrompu de jeunes. Chaque garçon et chaque fille a été invité à suivre leur exemple, à partager l'expérience personnelle de Jésus, qui transforme la vie de ses "amis " par la force de l'Esprit Saint, l'Esprit de l'amour de Dieu.

Je voudrais aujourd'hui à nouveau remercier les évêques d'Australie, en particulier l'archevêque de Sydney, le cardinal Pell, pour le grand travail de préparation et pour l'accueil chaleureux qu'ils m'ont réservé, ainsi qu'à tous les autres pèlerins. Je remercie les autorités civiles australiennes pour leur précieuse collaboration. Je remercie spécialement tous ceux qui, dans chaque partie du monde, ont prié pour cet événement, assurant son succès. Que la Vierge Marie récompense chacun avec les plus belles grâces. Je confie également à Marie le temps de repos que je prendrai à partir de demain à Bressanone, dans les montagnes du Haut-Adige. Demeurons unis dans la prière!

Après l'Angelus

Je vous salue cordialement, chers pèlerins francophones! A la question de Salomon qui demandait à Dieu quel était le véritable trésor, le Christ répond par les trois paraboles de l'Evangile d'aujourd'hui. Elles décrivent l'absolue nécessité de la recherche de Dieu et la richesse de son abondance de grâces et de bénédictions. Durant ce temps des vacances, je vous invite à faire tout votre possible pour chercher Dieu et pour faire de Lui le centre de votre vie. Avec la Bénédiction apostolique.



Bressanone

Dimanche 3 août 2008


179 Chers frères et soeurs, une cordiale bienvenue à tous!

Je voudrais tout d'abord dire une parole de profonds remerciements, en premier lieu à vous, cher Mgr Egger: vous avez rendu possible ici cette fête de la foi. Vous avez fait en sorte que je puisse encore une fois revenir en quelque sorte en arrière dans mon passé et dans le même temps aller de l'avant vers mon avenir; passer encore une fois mes vacances dans la belle ville de Bressanone, cette terre où l'art, la culture et la bonté des habitants sont liés les uns aux autres: un remerciement sincère pour tout cela! Et je remercie naturellement tous ceux qui, avec vous, ont contribué à faire en sorte que je puisse passer ici des jours de paix et de sérénité: merci à tous ceux qui ont organisé ensemble cette fête! Je remercie de tout coeur les autorités de la ville, de la région et de l'Etat pour ce qu'elles ont accompli pour l'organisation; les volontaires qui offrent leur aide, les médecins, les très nombreuses personnes qui ont été nécessaires, en particulier aussi les Forces de l'ordre; je remercie pour la collaboration de tous... J'ai certainement oublié beaucoup de monde! Que le Seigneur vous rende grâce à tous; vous êtes tous dans ma prière. Tel est l'unique manière que j'ai de vous remercier. Et naturellement je rends grâce surtout au bon Dieu, qui nous a offert cette terre et qui nous a donné aussi ce dimanche inondé de soleil. Et nous voici ainsi arrivé à la Liturgie du jour. La première Lecture nous rappelle que les choses plus grandes que notre vie ne peuvent pas être acquises ni payées, parce que les choses les plus importantes et élémentaires de notre vie peuvent uniquement nous être données: le soleil et sa lumière, l'air que nous respirons, l'eau, la beauté de la terre, l'amour, l'amitié, la vie même. Tous ces biens essentiels et centraux nous ne pouvons pas les acheter, mais ils nous sont donnés. La seconde Lecture ajoute ensuite que cela signifie qu'il y a aussi des choses que personne ne peut nous ôter, qu'aucune dictature, aucune force destructrice ne peut nous voler. Etre aimés de Dieu, qui en Christ connaît et aime chacun de nous; personne ne peut nous le dérober et tant que nous avons cela, nous ne sommes pas pauvres, mais riches. L'Evangile ajoute une troisième étape. Si nous recevons de Dieu des dons si importants, nous aussi nous devons donner: dans le domaine spirituel en donnant de la bonté, de l'amitié et de l'amour, mais aussi dans le domaine matériel - l'Evangile parle de la division du pain. Ces deux choses doivent aujourd'hui pénétrer notre âme; nous devons être des personnes qui donnons, parce que nous sommes des personnes qui recevons; nous devons transmettre aux autres le don de la bonté, de l'amour et de l'amitié, mais dans le même temps à tous ceux qui ont besoin de nous et que nous pouvons aider, nous devons donner également des dons matériels et chercher ainsi à rendre la terre plus humaine, c'est-à-dire plus proche de Dieu.

A présent chers amis, je vous invite à évoquer avec moi la pieuse et filiale mémoire du Serviteur de Dieu, le Pape Paul VI, dont nous commémorerons dans trois jours le trentième anniversaire de la mort. C'était en effet dans la soirée du 6 août 1978 qu'il rendit son esprit à Dieu; le soir de la fête de la Transfiguration de Jésus, mystère de lumière divine qui exerça toujours une fascination singulière sur son esprit. En tant que suprême Pasteur de l'Eglise, Paul VI conduisit le peuple de Dieu à la contemplation du visage du Christ, Rédempteur de l'homme et Seigneur de l'histoire. Et l'orientation pleine d'amour de l'esprit et du coeur vers le Christ fut l'un des fondements du Concile Vatican II, une attitude fondamentale que mon vénéré prédécesseur Jean-Paul II hérita et relança lors du grand Jubilé de l'an 2000. Au centre de toute chose, se trouve toujours et uniquement le Christ: au centre des Saintes Ecritures et de la Tradition, au coeur de l'Eglise, du monde et de l'univers tout entier. La Divine Providence appela Giovanni Battista Montini de la Chaire de Milan à celle de Rome au moment le plus délicat du Concile - lorsque l'intuition du bienheureux Jean XXIII risquait de ne pas prendre forme. Comment ne pas rendre grâce au Seigneur pour sa féconde et courageuse action pastorale? Au fur et à mesure que notre regard sur le passé s'élargit et devient plus conscient, le mérite de Paul VI apparaît toujours plus grand, presque surhumain, à présider l'assemblée conciliaire, à la conduire avec succès à son terme et à gouverner la phase mouvementée de l'après-Concile. Nous pourrions véritablement dire, avec l'apôtre Paul, que la grâce de Dieu en lui "n'a pas été vaine" (cf. Co 15, 10): il a mis en valeur ses dons très aigus d'intelligence et son amour passionné pour l'Eglise et pour l'homme. Tout en rendant grâce à Dieu pour le don de ce grand Pape, nous nous engageons à mettre à profit ses enseignements.

Au cours de la dernière période du Concile, Paul VI voulut rendre un honneur particulier à la Vierge Marie en la proclamant "Mère de l'Eglise". C'est à elle, à la Mère du Christ, à la Mère de l'Eglise, à notre Mère, que nous nous adressons à présent avec la prière de l'Angelus.

Après l'Angelus

Vendredi prochain, 8 août, s'ouvriront à Pékin les XXIX Jeux Olympiques. Je suis heureux d'adresser au pays hôte, aux organisateurs et aux participants, en premier lieu aux athlètes, mes salutations cordiales, avec le souhait que chacun puisse donner le meilleur de lui-même, dans l'authentique esprit olympique. Je suis avec une profonde sympathie cette grande rencontre sportive - la plus importante et la plus attendue au niveau mondial - et je souhaite vivement qu'elle offre à la Communauté internationale un précieux exemple de coexistence entre personnes d'origines les plus diverses, dans le respect de la dignité commune. Puisse encore une fois le sport être un gage de fraternité et de paix entre les peuples!

Je salue cordialement les personnes de langue française venues pour cette prière mariale. Mercredi prochain, nous commémorerons le trentième anniversaire de la mort du Pape Paul VI qui a mené a bien le Concile Vatican II, commencé par le bienheureux Jean XXIII. Rendons grâce à Dieu pour le don qu'il nous a fait de ce grand Pape et apprenons de lui son amour passionné de l'Eglise et de l'homme. Que Marie, qu'il a proclamée Mère de l'Eglise, nous obtienne d'être fidèles à ses enseignements et à son témoignage de sainteté. Avec ma Bénédiction apostolique!

Je salue avec affection chacun de vous ici présents et toute la communauté de Bressanone; je salue les groupes de jeunes et les familles, je bénis les enfants et les personnes âgées. Merci encore de votre accueil cordial et à bientôt!

Enfin, encore un salut cordial à toutes les personnes présentes de langue allemande! Ma bénédiction et ma prière vont à vous tous et à vos proches! Je souhaite à tous un bon dimanche, une bonne semaine et de bonnes vacances - si Dieu le veut! Merci encore à tous!



Bressanone, Dimanche 10 août 2008



Chers frères et soeurs,

180 Il y un point de l'Evangile de Marc où il raconte qu'après plusieurs jours de stress, le Seigneur a dit à ses disciples: "Venez avec moi dans un lieu isolé et reposez-vous un peu" (cf. 6, 31). Et comme la Parole du Christ n'est jamais liée au seul moment où elle est prononcée, j'ai appliqué à moi-même cette invitation aux disciples et je suis venu dans ce lieu beau et tranquille pour me reposer un peu. Je dois remercier Mgr Egger et tous ses collaborateurs, toute la ville de Bressanone et la région, parce qu'ils m'ont préparé ce lieu tranquille, où au cours de ces deux semaines j'ai pu me détendre, penser à Dieu et penser aux hommes et récupérer ainsi de nouvelles forces. Dieu vous en rende grâce!

Je devrais remercier un grand nombre de gens personnellement, mais je ferai une chose plus simple: je vous recommande tous à la bénédiction de Dieu. Il connaît chacun de vous par son nom et Sa bénédiction touchera chacun personnellement. Je demande cela de tout coeur, et que cela soit mon remerciement pour tous.

L'Evangile de ce dimanche nous reconduit, depuis ce lieu de repos, à la vie quotidienne. Il raconte comment, après la multiplication des pains, le Seigneur va sur la montagne pour demeurer avec le Père. Entre temps, les disciples sont sur le lac et, avec leur frêle embarcation, ils s'efforcent en vain de tenir tête au vent contraire. Peut-être déjà cet épisode est-il apparu à l'évangéliste comme une image de l'Eglise de son temps: comme cette petite barque, qui était l'Eglise d'alors, et qui se trouvait dans le vent contraire de l'histoire et il semblait que le Seigneur l'avait oubliée. Nous aussi nous pouvons y voir une image de l'Eglise de notre temps, qui en de nombreux lieux de la terre se trouve en difficulté pour avancer malgré les vents contraires et il semble que le Seigneur soit très loin. Mais l'Evangile nous donne la réponse, le réconfort et l'encouragement et dans le même temps il nous indique la voie. Il nous dit en effet: oui, c'est vrai, le Seigneur est auprès du Père, mais c'est précisément pour cela qu'il n'est pas loin, mais qu'il voit chacun, parce qu'il est auprès de Dieu, il ne part pas, mais il est auprès de notre prochain. Et en réalité le Seigneur les voit et, au moment propice, vient vers eux. Et lorsque Pierre, allant au-devant de lui, risque de se noyer, il le prend par la main et il le ramène à l'abri, sur la barque. A nous aussi le Seigneur tend constamment la main: il le fait à travers la beauté d'un dimanche, il le fait à travers la liturgie solennelle, il le fait dans la prière par laquelle nous nous adressons à lui, il le fait dans la rencontre avec la Parole de Dieu, il le fait dans de multiples situations de la vie quotidienne - il nous tend la main. Et ce n'est qu'en prenant la main du Seigneur, en nous laissant guider par lui, que notre route sera juste et bonne.

C'est pourquoi nous voulons le prier, afin de réussir à toujours de nouveau trouver sa main. Et cela implique dans le même temps une exhortation: qu'en son nom, nous tendions notre main aux autres, à ceux qui en ont besoin, pour les conduire à travers les eaux de notre histoire.

Ces derniers jours, chers amis, j'ai encore repensé à l'expérience vécue à Sydney, où j'ai rencontré les visages joyeux de si nombreux jeunes garçons et filles de tous les lieux du monde. Ainsi a mûri en moi une réflexion sur cet événement que je voudrais partager avec vous. Dans la grande métropole de la jeune nation australienne ces jeunes ont été un signe de joie authentique, parfois bruyante, mais toujours pacifique et positive. Malgré leur nombre, il n'ont pas créé de désordres ni fait de dégâts. Pour être joyeux, ils n'ont pas eu besoin de recourir à des manières grossières et violentes, à l'alcool et à des stupéfiants. Il y avait en eux la joie de se rencontrer et de découvrir ensemble un monde nouveau. Comment ne pas faire de rapprochement avec les jeunes de leur âge qui, à la recherche de fausses évasions, font des expériences dégradantes qui débouchent souvent sur des tragédies bouleversantes? Voilà un produit typique de l'actuelle soi-disant "société du bien-être" qui, pour combler un vide intérieur et l'ennui qui l'accompagne, conduit à tenter des expériences nouvelles, plus chargées d'émotions, plus "extrêmes". Même les vacances risquent ainsi de se dissiper en une vaine recherche de mirages de plaisirs. Mais de cette manière, l'esprit ne se repose pas, le coeur n'éprouve pas de joie et ne trouve pas de paix, au contraire il finit par être encore plus las et triste qu'auparavant. J'ai évoqué les jeunes, parce qu'ils sont les plus assoiffés de vie et d'expériences nouvelles et courent pour cette raison davantage de risques. Mais cette réflexion vaut pour tous: la personne humaine ne se régénère véritablement que dans la relation avec Dieu, et on rencontre Dieu en apprenant à écouter sa voix dans la sérénité intérieure et dans le silence (cf.
1R 19,12).

Prions pour que dans une société où l'on est toujours pressé, les vacances soient des jours de détente véritable au cours desquels on sache trouver des moments pour le recueillement et la prière, indispensables en vue de se retrouver profondément soi-même et les autres. Nous le demandons par l'intercession de la Très Sainte Vierge Marie, Vierge du silence et de l'écoute.

Après l'Angelus

Les nouvelles, toujours plus dramatiques des tragiques événements qui ont lieu en Géorgie et qui, à partir de la région de l'Ossétie du Sud, ont déjà causé de nombreuses victimes innocentes et contraint un grand nombre de civils à abandonner leurs maisons, sont une source d'angoisse profonde.

Mon souhait le plus vif est que cessent immédiatement les actions militaires et que l'on s'abstienne, également au nom de l'héritage chrétien commun, de conflits supplémentaires et de rétorsions violentes, qui peuvent dégénérer en un conflit d'une portée encore plus grande; il faut en revanche reprendre résolument le chemin de la négociation et du dialogue respectueux et constructif, en évitant ainsi des souffrances supplémentaires et déchirantes à ces populations bien-aimées.

J'invite par ailleurs la Communauté internationale et les pays les plus influents dans la situation actuelle à accomplir tous les efforts pour soutenir et promouvoir des initiatives visant à parvenir à une solution pacifique et durable, en faveur d'une coexistence ouverte et respectueuse.

Avec nos frères orthodoxes, nous prions intensément pour ces intentions, que nous remettons avec confiance à l'intercession de la Très Sainte Vierge Marie, Mère de Jésus et de tous les chrétiens.

181 Je salue également les journalistes et les professionnels des médias qui m'ont suivi pendant mon séjour. Chers amis, je vous remercie de votre travail et je vous assure de mes prières pour vos intentions familiales et professionnelles. Merci!



SOLENNITÉ DE L'ASSOMPTION DE LA BIENHEUREUSE VIERGE MARIE



Palais apostolique de Castelgandolfo

15 août 2008




Chers frères et soeurs!

Au coeur de celles que les latins appelaient "feriae Augusti", vacances d'août - d'où le mot italien de "ferragosto" - l'Eglise célèbre aujourd'hui l'Assomption de la Vierge Marie au Ciel, corps et âme. Dans la Bible, la dernière référence à sa vie terrestre se trouve au début des Actes des Apôtres, qui présente Marie recueillie en prière avec les disciples au Cénacle dans l'attente de l'Esprit Saint (Ac 1,14). Plus tard, une double tradition - à Jérusalem et à Ephèse - atteste de sa "dormition", comme disent les orientaux, autrement dit qu'elle s'est "endormie" en Dieu. Ce fut l'événement qui précéda son passage de la terre au Ciel, confessé par la foi ininterrompue de l'Eglise. Au VIII siècle par exemple, Jean Damascène, grand docteur de l'Eglise orientale, en établissant un rapport direct entre la "dormition" de Marie et la mort de Jésus, affirme explicitement la vérité de son assomption corporelle. Il écrit dans une célèbre homélie: "Il fallait que celle qui avait porté le Créateur dans son sein quand il était enfant habitât avec Lui dans les tabernacles du ciel" (Homélie II sur la dormition, 14, B). Comme chacun sait, cette ferme conviction de l'Eglise a trouvé son couronnement dans la définition dogmatique de l'Assomption, prononcée par mon vénéré prédécesseur Pie XII en 1950.

Comme l'enseigne le Concile Vatican II, la Très Sainte Vierge Marie est toujours liée au mystère du Christ et de l'Eglise. Dans cette perspective, "tout comme dans le ciel où elle est déjà glorifiée corps et âme, la Mère de Jésus représente et inaugure l'Eglise en son achèvement dans le siècle futur, de même sur cette terre, en attendant la venue du jour du Seigneur (cf. 2P 3,10), elle brille déjà comme un signe d'espérance assurée et de consolation devant le peuple de Dieu en pèlerinage" (Constitution Lumen gentium LG 68). Du Paradis la Sainte Vierge ne cesse de veiller, particulièrement dans les moments difficiles d'épreuve, sur ses enfants, que Jésus lui-même Lui a confiés avant de mourir sur la Croix. Combien rencontre-t-on de témoignages de cette sollicitude maternelle en visitant les sanctuaires qui Lui sont dédiés! Je pense de manière particulière en cet instant à cette citadelle mondiale de la vie et de l'espérance qu'est Lourdes, où, à Dieu ne plaise, je me rendrai dans un mois pour célébrer le 150 anniversaire des apparitions mariales qui y ont eu lieu.

L'Assomption de Marie au ciel nous montre la dernière étape de notre pèlerinage terrestre. Elle nous rappelle que tout notre être - esprit, âme et corps - est destiné à la plénitude de la vie; qui est que celui qui vit et meurt dans l'amour de Dieu et du prochain sera transfiguré à l'image du corps glorieux du Christ ressuscité; que le Seigneur renverse les puissants et élève les humbles (cf Lc 1,51-52). C'est ce que proclame éternellement la Sainte Vierge à travers le mystère de son Assomption. O Vierge Marie, sois toujours louée! Prie pour nous le Seigneur.

Après l'Angelus

Je salue cordialement les pèlerins de langue française, en particulier les jeunes de la famille marianiste, en ce jour où nous célébrons l'Assomption de la Vierge Marie. Alors que je me prépare à visiter la France, dont Marie en son Assomption est la Patronne, je vous invite à vous laisser guider par elle dans votre marche vers son Fils Jésus. Que "celle qui a cru à l'accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur" vous aide à grandir dans la foi et vous donne de vivre dans l'espérance! Bonne fête de l'Assomption!

Je vous souhaite à tous de passer dans la joie cette fête mariale solennelle et populaire. Bonne fête.



Castelgandolfo

182
Dimanche 17 août 2008



Chers frères et soeurs,

En ce XX dimanche du temps ordinaire, la liturgie propose à notre réflexion les paroles du prophète Isaïe: "Les fils d'étrangers, attachés à Yahvé pour le servir (...) je les mènerai à ma sainte montagne, je les comblerai de joie dans ma maison de prière (...) car ma maison sera appelée maison de prière pour tous les peuples" (
Is 56,6-7). L'apôtre Paul fait lui aussi référence à l'universalité du salut dans la seconde lecture, tout comme la page évangélique qui raconte l'épisode de la femme cananéenne, une étrangère pour les juifs, exaucée par Jésus pour sa grande foi. La parole de Dieu nous offre ainsi la possibilité de réfléchir sur l'universalité de la mission de l'Eglise, constituée par des peuples de toutes les races et de toutes les cultures. C'est justement de là que provient la grande responsabilité de la communauté ecclésiale, appelée à être une maison accueillante pour tous, signe et instrument de communion pour toute la famille humaine.

Il est très important, surtout à notre époque, que chaque communauté chrétienne approfondisse davantage cette conscience, afin d'aider également la société civile à dépasser toute tentation possible de racisme, d'intolérance et d'exclusion et à s'organiser par des choix respectueux de la dignité de tout être humain! En effet, une des grandes conquêtes de l'humanité est justement le dépassement du racisme. Toutefois, malheureusement, on enregistre dans différents pays de nouvelles manifestations préoccupantes de ce dernier, souvent liées à des problèmes sociaux et économiques, qui ne peuvent cependant jamais justifier le mépris et la discrimination raciale. Prions pour que partout grandisse le respect de toutes les personnes, ainsi que la conscience responsable que ce n'est que dans l'accueil réciproque de tous qu'il est possible de construire un monde marqué par une justice authentique et une paix véritable.

Je voudrais aujourd'hui proposer une autre intention de prière, au vu des nouvelles qui nous arrivent, particulièrement à cette période, de nombreux et graves accidents de la route. Nous ne devons pas nous habituer à cette triste réalité! Le bien de la vie humaine est en effet trop précieux; et mourir ou se retrouver handicapé pour des raisons qui, dans la plupart des cas, pourraient être évitées est indigne de l'homme. Il faut assurément un sens de la responsabilité plus grand. Avant tout de la part des automobilistes, parce que les accidents sont souvent dus à une vitesse excessive et à des comportements imprudents. Conduire un véhicule sur les routes publiques exige un sens moral et un sens civique. Pour la promotion de ce dernier, le travail constant de prévention, de surveillance et de répression de la part des autorités compétentes est indispensable. En tant qu'Eglise, en revanche, nous nous sentons directement interpellés sur le plan éthique: les chrétiens doivent avant tout faire un examen de conscience personnel sur leur propre conduite en tant qu'automobilistes; de plus, les communautés doivent enseigner à tous à considérer la conduite comme un domaine où défendre la vie et exercer concrètement l'amour du prochain.

Nous confions les problèmes sociaux que j'ai rappelés à l'intercession maternelle de Marie, que nous invoquons ensemble avec la récitation de l'Angelus.

Après l'Angelus

Je continue de suivre avec attention et inquiétude la situation en Géorgie et je me sens particulièrement proche des victimes du conflit. Alors que j'élève une prière spéciale d'intention pour les défunts et que j'exprime de sincères condoléances à toutes les personnes en deuil, je lance un appel à améliorer avec générosité les conditions de graves difficultés des réfugiés, notamment des femmes et des enfants, qui vont jusqu'à manquer du nécessaire pour survivre. Je demande l'ouverture, sans délais, de couloirs humanitaires entre la région de l'Ossétie du Sud et le reste de la Géorgie, de manière à ce que les morts encore abandonnés puissent recevoir une sépulture digne, que les blessés soient convenablement soignés et que soit permis à ceux qui le désirent de rejoindre leurs proches. Que soient en outre garanties aux minorités ethniques impliquées dans le conflit la sécurité et ces droits fondamentaux qui ne peuvent jamais être bafoués. Je souhaite, enfin, que la trêve actuelle, obtenue grâce à la contribution de l'Union européenne, puisse être consolidée et transformée en paix stable, tandis que j'invite la Communauté internationale à continuer à offrir son soutien pour obtenir une solution durable, à travers le dialogue et la bonne volonté commune.

Je vous adresse un cordial salut, chers pèlerins de langue française, en particulier les pèlerins du Gabon! En cette période de vacances, je vous invite à prendre du temps pour aller à la rencontre du Seigneur dans la prière, avec l'assurance confiante qui fut celle de la Cananéenne dont nous parle le texte de l'Evangile d'aujourd'hui. N'ayez pas peur de vous tourner vers Dieu qui est un père plein d'amour et de miséricorde! Avec ma Bénédiction apostolique.

Je vous souhaite à tous un bon dimanche et une bonne semaine. Merci de votre présence et de votre foi.



Castelgandolfo

183
Dimanche 24 août 2008



Chers frères et soeurs,

La liturgie de ce dimanche nous adresse à nous, les chrétiens, mais en même temps à tout homme et toute femme, la double question que Jésus posa un jour à ses disciples. Tout d'abord, il leur a demandé: "Au dire des gens, qu'est le Fils de l'homme?". Ils répondirent que, pour les uns, il était un nouveau Jean-Baptiste, pour d'autres Elie, Jérémie ou l'un des prophètes. Alors le Seigneur interpella directement les Douze: "Pour vous, qui suis-je?" Au nom de tous, avec élan et décision, ce fut Pierre qui prit la parole: "Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant". Une profession de foi solennelle que depuis lors l'Eglise continue de répéter. Nous aussi, aujourd'hui, nous voulons proclamer avec une intime conviction: Oui, Jésus, tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant! Nous le faisons avec la conscience que c'est le Christ le vrai "trésor" pour lequel il vaut la peine de tout sacrifier; c'est Lui l'ami qui ne nous abandonne jamais, parce qu'il connaît les attentes les plus intimes de notre coeur. Jésus est le "Fils du Dieu vivant", le Messie promis, venu sur la terre pour offrir à l'humanité le salut et pour satisfaire la soif de vie et d'amour qui habite en chaque être humain. Quel bénéfice tirerait l'humanité d'accueillir cette annonce qui porte en elle la joie et la paix!

"Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant": à cette profession de foi inspirée, de Pierre, Jésus réplique: "Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise et les Portes de l'Hadès ne tiendront pas contre elle. Je te donnerai les clefs du Royaume des cieux". C'est la première fois que Jésus parle de l'Eglise, dont la mission est la mise en oeuvre du dessein grandiose de Dieu de rassembler dans le Christ l'humanité entière dans une unique famille. La mission de Pierre et de ses successeurs est justement celle de servir cette unité de l'unique Eglise de Dieu formée par les juifs et les païens de tous les peuples; son ministère indispensable est de faire en sorte qu'elle ne s'identifie jamais avec une seule nation, avec une seule culture, mais que ce soit l'Eglise de tous les peuples, pour rendre présentes parmi les hommes, marqués par des divisions et des oppositions innombrables, la paix de Dieu et la force rénovatrice de son amour. Servir donc l'unité intérieure qui vient de la paix de Dieu, l'unité de ceux qui, en Jésus Christ sont devenus frères et soeurs: voilà la mission particulière du Pape, évêque de Rome, et successeur de Pierre.

Devant l'énorme responsabilité de cette tâche, je ressens toujours davantage l'engagement et l'importance du service à l'Eglise et au monde que le Seigneur m'a confié. C'est pourquoi je vous demande, chers frères et soeurs, de me soutenir par votre prière, afin que fidèles au Christ, nous puissions ensemble annoncer sa présence dans notre temps et lui rendre témoignage. Que Marie nous obtienne cette grâce, elle que nous invoquons avec confiance, en tant que Mère de l'Eglise et Etoile de l'évangélisation.

Après l'Angelus
Appel à la paix et à la justice dans un contexte international difficile


La situation internationale connaît ces dernières semaines un crescendo de tension vivement préoccupant. Nous devons constater, avec amertume, le risque d'une détérioration progressive de ce climat de confiance et de collaboration entre les nations qui devrait au contraire en caractériser les rapports. Comment ne pas mesurer, dans les circonstances actuelles, toute la difficulté de l'humanité pour former cette conscience commune d'être la "famille des Nations" que le Pape Jean-Paul II avait indiquée comme un idéal à l'Assemblée générale des Nations unies? Il faut approfondir la conscience d'avoir en commun un même destin, qui, en dernière instance, est un destin transcendant (cf. Message pour la Journée mondiale de la paix, 1 janvier 2006, n. 6), pour conjurer le retour à des oppositions nationalistes qui ont engendré, à d'autres périodes de l'histoire, des conséquences si tragiques. Les événements récents ont affaibli chez beaucoup l'assurance que de telles expériences soient définitivement reléguées dans le passé. Mais il ne faut pas céder au pessimisme! Il faut plutôt s'engager activement afin que soit repoussée la tentation d'affronter des situations nouvelles avec de vieux systèmes. La violence doit être rejetée! La force morale du droit, des négociations équitables et transparentes, pour vaincre les controverses, à partir de celles qui sont liées au rapport entre l'intégrité territoriale et l'autodétermination des peuples, la fidélité à la parole donnée, la recherche du bien commun: voilà quelques-unes des voies principales à suivre, avec ténacité et créativité, pour construire des relations fécondes et sincères et pour assurer aux générations présentes et à venir des temps de concorde et de progrès moral et civique! Transformons ces pensées et ses voeux en prière, afin que tous les membres de la Communauté internationale et en particulier ceux qui détiennent de plus hautes responsabilités, agissent avec générosité pour rétablir les raisons supérieures de la paix et de la justice. Marie, Reine de la paix, intercède pour nous!

En m'adressant à vous, je désire vous assurer que je continue à prier pour le repos éternel de ceux qui ont péri dans le tragique accident d'avion qui a eu lieu mercredi dernier à l'aéroport de Madrid, ainsi que pour les blessés. Que le Seigneur accorde force, réconfort et espérance à leurs familles, auxquelles je désire réitérer ma vive affection et ma proximité spirituelle. Que Dieu vous bénisse!

Je vous salue, chers pèlerins de langue française, venus prier l'Angelus avec le successeur de Pierre. Le premier des Apôtres, à qui le Seigneur a confié les clefs du Royaume, a reçu la mission d'être le fondement sur lequel le Seigneur bâtirait son Eglise. Merci à vous qui m'accompagnez de votre prière et de votre affection dans le ministère qui est le mien. Que le Seigneur fortifie notre foi et nous fasse toujours vivre et agir selon les pensées de Dieu. Avec ma Bénédiction apostolique.

Je vous souhaite à tous un bon dimanche et une bonne semaine. Merci et meilleurs voeux.





Castelgandolfo

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Dimanche 31 août 2008



Chers frères et soeurs,

L'apôtre Pierre apparaît aujourd'hui à nouveau au premier plan dans l'Evangile, comme dimanche dernier déjà. Mais, alors que dimanche dernier nous l'avons admiré pour sa foi pure en Jésus qu'il proclame Messie et Fils de Dieu, cette fois, dans l'épisode qui suit, il fait preuve d'une foi encore immature et trop liée à la "mentalité du monde" (cf. Rm
Rm 12,2). En effet, lorsque Jésus commence à parler ouvertement du destin qui l'attend à Jérusalem, c'est-à-dire qu'il devra beaucoup souffrir, être tué, puis ressusciter, Pierre proteste en disant: "Dieu t'en garde, Seigneur! cela ne t'arrivera pas" (Mt 16,22). Il est évident que le Maître et son disciple suivent deux manières de penser opposées. Suivant une logique humaine, Pierre est convaincu que Dieu ne permettrait jamais à son Fils de finir sa mission en mourant sur la croix. Jésus, en revanche, sait que, dans son immense amour pour les hommes, son père l'a envoyé donner sa vie pour eux, et que si cela comporte la passion et la croix, il est juste que cela ait lieu. D'autre part, il sait aussi que le dernier mot sera la résurrection. Même si la protestation de Pierre est prononcée avec bonne foi et motivée par un amour sincère pour son Maître, Jésus la voit comme une tentation, une invitation à se sauver, alors que ce n'est qu'en perdant sa vie qu'Il la recevra nouvelle et éternelle pour nous tous.

Si, pour nous sauver, le Fils de Dieu a dû souffrir et mourir crucifié, ce n'est certainement pas à cause d'un dessein cruel du Père céleste. C'est à cause de la gravité de la maladie dont il devait nous guérir: un mal tellement sérieux et mortel qu'il réclamait tout son sang. C'est en effet par sa mort et sa résurrection que Jésus a vaincu le péché et la mort, en rétablissant la seigneurie de Dieu. Mais le combat n'est pas terminé: le mal existe et résiste, à chaque génération, de nos jours également, comme nous le savons. Que sont les horreurs de la guerre, la violence contre les innocents, la pauvreté et l'injustice qui s'acharnent sur les faibles, sinon l'opposition du mal au royaume de Dieu? Et comment répondre à tant de méchanceté sinon avec la force désarmée et désarmante de l'amour qui vainc la haine, de la vie qui ne craint pas la mort? C'est cette même force mystérieuse que Jésus utilisa, et qui lui valut d'être incompris et abandonné par nombre des siens.

Chers frères et soeurs, pour accomplir pleinement l'oeuvre de salut, le Rédempteur continue d'associer à lui-même et à sa mission des hommes et des femmes disposés à prendre leur croix et à le suivre. Comme pour le Christ, pour les chrétiens aussi, porter sa croix n'est donc pas facultatif. C'est une mission à embrasser avec amour. Dans notre monde actuel, où semblent dominer les forces qui divisent et détruisent, le Christ ne cesse de proposer à tous son invitation claire: celui qui veut être mon disciple doit renier son égoïsme et porter la croix avec moi. Invoquons l'aide de la Sainte Vierge, qui la première, et jusqu'au bout, a suivi Jésus sur le chemin de la croix. Qu'Elle nous aide à suivre résolument le Seigneur, pour faire d'ores et déjà l'expérience, même dans l'épreuve, de la gloire de la résurrection.

Après l'Angelus

Ces dernières semaines, les médias ont fait part d'une augmentation des épisodes d'immigration irrégulière venant d'Afrique. Il n'est pas rare que la traversée de la Méditerranée vers le continent européen, vu comme un havre d'espérance pour fuir des situations précaires et souvent insoutenables, se transforme en tragédie; celle qui s'est déroulée il y a quelques jours semble avoir dépassé les précédentes en raison du nombre important de victimes. Le phénomène des migrations existe depuis le début de l'histoire de l'humanité et a par conséquent toujours caractérisé les relations entre les peuples et les nations. Aujourd'hui, cependant, il s'est transformé en une situation d'urgence qui nous interpelle. Il fait appel à notre solidarité mais exige en même temps des réponses politiques efficaces. Je sais que de nombreuses institutions régionales, nationales et internationales s'occupent de la question des migrations irrégulières: je les félicite et je les encourage, afin qu'elles poursuivent leur action méritoire avec un sens de responsabilité et un esprit humanitaire. Les pays d'origine doivent également faire preuve d'un sens de responsabilité, non seulement parce qu'il s'agit de leurs concitoyens mais aussi pour éradiquer les causes des migrations irrégulières et pour extirper à la racine toutes les formes de criminalité qui y sont liées. Quant à eux, les pays européens, et en tout cas les pays qui sont des destinations de migrations, sont appelés à développer, d'un commun accord, des initiatives et des structures toujours plus adaptées aux nécessités des migrants irréguliers. Il faut également les sensibiliser à la valeur de la vie qui représente un bien unique, toujours précieux, à préserver face aux risques très graves auxquels s'exposent ces personnes dans la recherche d'une amélioration de leurs conditions de vie, et au devoir de la légalité qui s'impose à tous. Comme Père de tous, je ressens le devoir profond de rappeler l'attention de chacun sur ce problème et de faire appel à la généreuse collaboration de personnes individuelles et d'institutions pour y faire face et trouver des solutions. Que le Seigneur nous accompagne et fasse fructifier nos efforts!

Je vous salue, chers pèlerins francophones, qui êtes venus saluer et prier avec moi la Mère du Christ, en particulier les jeunes de Chiry-Ourscamp. A quelques jours de la rentrée scolaire, je désire tout spécialement confier à la Vierge Marie les élèves et les professeurs qui s'apprêtent à vivre ensemble une nouvelle année de découvertes, d'apprentissages et d'efforts. Que le Seigneur donne à chacun de faire fructifier les talents qui sont en lui pour le bien et la joie de tous. Avec ma Bénédiction apostolique.

Je souhaite à tous un bon dimanche.



Angelus Benoit XVI 177