Catéchisme Eglise Cath. 2773

En bref

2773 En réponse à la demande de ses disciples (" Seigneur, apprends-nous à prier " : Lc 11,1), Jésus leur confie la prière chrétienne fondamentale du " Notre Père ".


2774 " L’Oraison dominicale est vraiment le résumé de tout l’Evangile " (Tertullien, or. 1), " la plus parfaite des prières " (S. Thomas d’A., s. th. II-II 83,9). Elle est au centre des Écritures.


2775 Elle est appelée " Oraison dominicale " parce qu’elle nous vient du Seigneur Jésus, Maître et modèle de notre prière.


2776 L’Oraison dominicale est la prière de l’Église par excellence. Elle fait partie intégrante des grandes heures de l’Office divin et des sacrements de l’initiation chrétienne : Baptême, Confirmation et Eucharistie. Intégrée à l’Eucharistie elle manifeste le caractère " eschatologique " de ses demandes, dans l’espérance du Seigneur, " jusqu’à ce qu’il vienne " (1Co 11,26).


Article 2

" Notre Père qui es aux cieux "


I. " Oser nous approcher en toute confiance "

2777 Dans la liturgie romaine, l’assemblée eucharistique est invitée à prier Notre Père avec une audace filiale ; les liturgies orientales utilisent et développent des expressions analogues : " Oser en toute assurance ", " Rends-nous dignes de ". Devant le Buisson ardent, il fut dit à Moïse : " N’approche pas. Ote tes sandales " (Ex 3,5). Ce seuil de la Sainteté divine, Jésus seul pouvait le franchir, lui qui, " ayant accompli la purification des péchés " (He 1,3), nous introduit devant la Face du Père : " Nous voici, moi et mes enfants que tu m’as donnés " (He 2,13) :

La conscience que nous avons de notre situation d’esclaves nous ferait rentrer sous terre, notre condition terrestre se fondrait en poussière, si l’autorité de notre Père lui-même et l’Esprit de son Fils ne nous poussaient à proférer ce cri : ‘Abba, Père !’ (Rm 8,15) ... Quand la faiblesse d’un mortel oserait-elle appeler Dieu son Père, sinon seulement lorsque l’intime de l’homme est animé par la Puissance d’en haut ? (S. Pierre Chrysologue, serm. 71 : PL 52, 401CD).


2778 Cette puissance de l’Esprit qui nous introduit à la Prière du Seigneur est exprimée dans les liturgies d’Orient et d’Occident par la belle expression typiquement chrétienne : parrhésia, simplicité sans détour, confiance filiale, joyeuse assurance, humble audace, certitude d’être aimé (cf. Ep 3,12 He 3,6 He 4,16 He 10,19 1Jn 2,28 1Jn 3,21 1Jn 5,14).


II. " Père ! "

2779 Avant de faire nôtre ce premier élan de la Prière du Seigneur, il n’est pas inutile de purifier humblement notre coeur de certaines fausses images de " ce monde-ci ". L’humilité nous fait reconnaître que " nul ne connaît le Père, si ce n’est le Fils, et celui à qui le Fils veut bien le révéler ", c’est-à-dire " aux tout petits " (Mt 11,25-27). La purification du coeur concerne les images paternelles ou maternelles, issues de notre histoire personnelle et culturelle, et qui influencent notre relation à Dieu. Dieu notre Père transcende les catégories du monde créé. Transposer sur lui, ou contre lui, nos idées en ce domaine serait fabriquer des idoles, à adorer ou à abattre. Prier le Père c’est entrer dans son mystère, tel qu’Il est, et tel que le Fils nous l’a révélé :

L’expression Dieu le Père n’avait jamais été révélée à personne. Lorsque Moïse lui-même demanda à Dieu qui il était, il entendit un autre nom. A nous ce nom a été révélé dans le Fils, car ce nom implique le nom nouveau de Père (Tertullien, or. 3).


2780 Nous pouvons invoquer Dieu comme " Père " parce qu’il nous est révélé par son Fils devenu homme et que son Esprit nous le fait connaître. Ce que l’homme ne peut concevoir ni les puissances angéliques entrevoir, la relation personnelle du Fils vers le Père (cf. Jn 1,1), voici que l’Esprit du Fils nous y fait participer, nous qui croyons que Jésus est le Christ et sommes nés de Dieu (cf. 1Jn 5,1).


2781 Quand nous prions le Père, nous sommes en communion avec lui et avec son Fils, Jésus-Christ (cf. 1Jn 1,3). C’est alors que nous le connaissons et le reconnaissons dans un émerveillement toujours nouveau. La première parole de la Prière du Seigneur est une bénédiction d’adoration, avant d’être une imploration. Car c’est la Gloire de Dieu que nous le reconnaissions comme " Père ", Dieu véritable. Nous lui rendons grâce de nous avoir révélé son Nom, de nous avoir donné d’y croire et d’être habités par sa Présence.


2782 Nous pouvons adorer le Père parce qu’il nous a fait renaître à sa Vie en nous adoptant comme ses enfants dans son Fils unique : par le Baptême, il nous incorpore au Corps de son Christ, et, par l’Onction de son Esprit qui s’épanche de la Tête dans les membres, il fait de nous des " christs " :

Dieu, en effet, qui nous a prédestinés à l’adoption de fils, nous a rendus conformes au Corps glorieux du Christ. Désormais donc, participants du Christ, vous êtes à juste titre appelés " christs " (S. Cyrille de Jérusalem, catech. myst. 3, 1 : PG 33, 1088A).

L’homme nouveau, qui est rené et rendu à son Dieu par la grâce, dit d’abord " Père ! ", parce qu’il est devenu fils (S. Cyprien, Dom. orat. 9 : PL 4, 525A).


2783 C’est ainsi que, par la Prière du Seigneur, nous sommes révélés à nous-mêmes en même temps que le Père nous est révélé (cf. GS 22, § 1) :

O homme, tu n’osais pas lever ton visage vers le ciel, tu baissais les yeux vers la terre, et soudain tu as reçu la grâce du Christ : tous tes péchés t’ont été remis. De méchant serviteur tu es devenu un bon fils.... Lève donc les yeux vers le Père qui t’a racheté par son Fils et dis : notre Père... Mais ne te réclame d’aucun privilège. Il n’est le Père, d’une manière spéciale, que du Christ seul, tandis que nous, il nous a créés. Dis donc toi aussi par grâce : notre Père, pour mériter d’être son fils (S. Ambroise, sacr. 5, 19 : PL 16, 450C).


2784 Ce don gratuit de l’adoption exige de notre part une conversion continuelle et une vie nouvelle. Prier notre Père doit développer en nous deux dispositions fondamentales :

Le désir et la volonté de lui ressembler. Créés à son image, c’est par grâce que la ressemblance nous est rendue et nous avons à y répondre.

Il faut nous souvenir, quand nous nommons Dieu ‘notre Père’ que nous devons nous comporter en fils de Dieu (S. Cyprien, Dom. orat. 11 : PL 4, 526B).

Vous ne pouvez appeler votre Père le Dieu de toute bonté si vous gardez un coeur cruel et inhumain ; car dans ce cas vous n’avez plus en vous la marque de la bonté du Père céleste (S. Jean Chrysostome, hom. in
Mt 7,14, PG 51, 44B).

Il faut contempler sans cesse la beauté du Père et en imprégner notre âme (S. Grégoire de Nysse, or. dom. 2 : PG 44, 1148B).


2785 Un coeur humble et confiant qui nous fait " retourner à l’état des enfants " (Mt 18,3) : car c’est aux " tout petits " que le Père se révèle (Mt 11,25) :

C’est un regard sur Dieu seul, un grand feu d’amour. L’âme s’y fond et s’abîme en la sainte dilection, et s’entretient avec Dieu comme avec son propre Père, très familièrement, dans une tendresse de piété toute particulière (S. Jean Cassien, coll. 9, 18 : PL 49, 788C).

Notre Père : ce nom suscite en nous, tout à la fois, l’amour, l’affection dans la prière, ... et aussi l’espérance d’obtenir ce que nous allons demander ... Que peut-il en effet refuser à la prière de ses enfants, quand il leur a déjà préalablement permis d’être ses enfants ? (S. Augustin, serm. Dom. 2, 4, 16 : PL 34, 1276).


III. " Notre " Père

2786 " Notre " Père concerne Dieu. Cet adjectif, de notre part, n’exprime pas une possession, mais une relation toute nouvelle à Dieu.


2787 Quand nous disons " notre " Père, nous reconnaissons d’abord que toutes ses Promesses d’amour annoncées par les Prophètes sont accomplies dans la nouvelle et éternelle Alliance en son Christ : nous sommes devenus " son " Peuple et il est désormais " notre " Dieu. Cette relation nouvelle est une appartenance mutuelle donnée gratuitement : c’est par l’amour et la fidélité (cf. Os 2,21-22 Os 6,1-6) que nous avons à répondre à " la grâce et à la vérité " qui nous sont données en Jésus-Christ (Jn 1,17).


2788 Puisque la Prière du Seigneur est celle de son Peuple dans les " derniers temps ", ce " notre " exprime aussi la certitude de notre espérance en l’ultime promesse de Dieu : dans la Jérusalem nouvelle il dira au vainqueur : " Je serai son Dieu et lui sera mon fils " (Ap 21,7).


2789 En priant " notre " Père, c’est au Père de notre Seigneur Jésus Christ que nous nous adressons personnellement. Nous ne divisons pas la divinité, puisque le Père en est " la source et l’origine ", mais nous confessons par là qu’éternellement le Fils est engendré par Lui et que de Lui procède l’Esprit Saint. Nous ne confondons pas non plus les Personnes, puisque nous confessons que notre communion est avec le Père et son Fils, Jésus Christ, dans leur unique Esprit Saint. La Trinité Sainte est consubstantielle et indivisible. Quand nous prions le Père, nous l’adorons et le glorifions avec le Fils et le Saint-Esprit.


2790 Grammaticalement, " notre " qualifie une réalité commune à plusieurs. Il n’y a qu’un seul Dieu et il est reconnu Père par ceux qui, par la foi à son Fils unique, sont renés de Lui par l’eau et par l’Esprit (cf. 1Jn 5,1 Jn 3,5). L’Église est cette nouvelle Communion de Dieu et des hommes : unie au Fils unique devenu " l’aîné d’une multitude de frères " (Rm 8,29), elle est en Communion avec un seul et même Père, dans un seul et même Esprit Saint (cf. Ep 4,4-6). En priant " notre " Père, chaque baptisé prie dans cette Communion : " La multitude des croyants n’avait qu’un seul coeur et qu’une seule âme " (Ac 4,32).


2791 C’est pourquoi, malgré les divisions des chrétiens, la prière à " notre " Père demeure le bien commun et un appel urgent pour tous les baptisés. En communion par la foi au Christ et par le Baptême, ils doivent participer à la prière de Jésus pour l’unité de ses disciples (cf. UR 8 UR 22).


2792 Enfin, si nous prions en vérité " Notre Père ", nous sortons de l’individualisme, car l’Amour que nous accueillons nous en libère. Le " notre " du début de la Prière du Seigneur, comme le " nous " des quatre dernières demandes, n’est exclusif de personne. Pour qu’il soit dit en vérité (cf. Mt 5,23-24 Mt 6,14-16), nos divisions et nos oppositions doivent être surmontées.


2793 Les baptisés ne peuvent prier " notre " Père sans porter auprès de Lui tous ceux pour qui il a donné son Fils bien-aimé. L’amour de Dieu est sans frontière, notre prière doit l’être aussi (cf. NA Na 5). Prier " notre " Père nous ouvre aux dimensions de Son amour manifesté dans le Christ : prier avec et pour tous les hommes qui ne Le connaissent pas encore, afin qu’ils soient " rassemblés dans l’unité " (Jn 11,52). Ce souci divin de tous les hommes et de toute la création a animé tous les grands priants : il doit dilater notre prière en largeur d’amour lorsque nous osons dire " notre " Père.


IV. " Qui es aux cieux "

2794 Cette expression biblique ne signifie pas un lieu [ "l’espace "], mais une manière d’être ; non pas l’éloignement de Dieu mais sa majesté. Notre Père n’est pas " ailleurs ", il est " au-delà de tout " ce que nous pouvons concevoir de sa Sainteté. C’est parce qu’il est trois fois Saint, qu’il est tout proche du coeur humble et contrit :

C’est avec raison que ces paroles ‘Notre Père qui es aux cieux’ s’entendent du coeur des justes, où Dieu habite comme dans son temple. Par là aussi celui qui prie désirera voir résider en lui Celui qu’il invoque (S. Augustin, serm. Dom. 2, 5, 17 : PL 34, 1277).

Les " cieux " pourraient bien être aussi ceux qui portent l’image du monde céleste, et en qui Dieu habite et se promène (S. Cyrille de Jérusalem, catech. myst. 5, 11 : PG 33, 1117B).


2795 Le symbole des cieux nous renvoie au mystère de l’Alliance que nous vivons lorsque nous prions notre Père. Il est aux cieux, c’est sa Demeure, la Maison du Père est donc notre " patrie ". C’est de la terre de l’Alliance que le péché nous a exilés (cf. Gn 3) et c’est vers le Père, vers le ciel que la conversion du coeur nous fait revenir (cf. Jr 3,19-4,1a ; Lc 15,18 Lc 15,21). Or c’est dans le Christ que le ciel et la terre sont réconciliés (cf. Is 45,8 Ps 85,12), car le Fils " est descendu du ciel ", seul, et il nous y fait remonter avec lui, par sa Croix, sa Résurrection et son Ascension (cf. Jn 12,32 Jn 14,2-3 Jn 16,28 Jn 20,17 Ep 4,9-10 He 1,3 He 2,13).


2796 Quand l’Église prie " notre Père qui es aux cieux ", elle professe que nous sommes le Peuple de Dieu déjà " assis aux cieux dans le Christ Jésus " (Ep 2,6), " cachés avec le Christ en Dieu " (Col 3,3), et, en même temps, " gémissant dans cet état, ardemment désireux de revêtir, par dessus l’autre notre habitation céleste " (2Co 5,2 cf. Ph 3,20 He 13,14) :

Les chrétiens sont dans la chair, mais ne vivent pas selon la chair. Ils passent leur vie sur terre, mais sont citoyens du ciel (Epître à Diognète 5, 8-9).


En bref

2797 La confiance simple et fidèle, l’assurance humble et joyeuse sont les dispositions qui conviennent à celui qui prie le " Notre Père ".


2798 Nous pouvons invoquer Dieu comme " Père " parce que le Fils de Dieu fait homme nous l’a révélé, en qui, par le Baptême, nous sommes incorporés et adoptés en fils de Dieu.


2799 La prière du Seigneur nous met en communion avec le Père et avec son Fils, Jésus Christ. Elle nous révèle en même temps à nous mêmes (cf. GS 22, § 1).


2800 Prier notre Père doit développer en nous la volonté de lui ressembler, ainsi qu’un coeur humble et confiant


2801 En disant " Notre " Père, nous invoquons la nouvelle Alliance en Jésus Christ, la communion avec la Sainte Trinité et la charité divine qui s’étend par l’Église aux dimensions du monde.


2802 " Qui es aux cieux " ne désigne pas un lieu mais la majesté de Dieu et sa présence dans le coeur des justes.. Le ciel, la Maison du Père, constitue la vraie patrie où nous tendons et à laquelle, déjà, nous appartenons.


Article 3

Les sept demandes

2803 Après nous avoir mis en présence de Dieu notre Père pour l’adorer, l’aimer et le bénir, l’Esprit filial fait monter de nos coeurs sept demandes, sept bénédictions. Les trois premières, plus théologales, nous attirent vers la Gloire du Père, les quatre dernières, comme des chemins vers Lui, offrent notre misère à sa Grâce. " L’abîme appelle l’abîme " (Ps 42,8).


2804 La première vague nous porte vers Lui, pour Lui : ton Nom, ton Règne, ta Volonté ! C’est le propre de l’amour que de penser d’abord à Celui que nous aimons. En chacune de ces trois demandes, nous ne " nous " nommons pas, mais c’est " le désir ardent ", " l’angoisse " même, du Fils bien-aimé pour la Gloire de son Père, qui nous saisit (cf. Lc 22,14 Lc 12,50) : " Que soit sanctifié ... Que vienne ... Que soit faite ... " : ces trois supplications sont déjà exaucées dans le Sacrifice du Christ Sauveur, mais elles sont tournées désormais, dans l’espérance, vers leur accomplissement final, tant que Dieu n’est pas encore tout en tous (cf. 1Co 15,28).


2805 La seconde vague de demandes se déroule dans le mouvement de certaines épiclèses eucharistiques : elle est offrande de nos attentes et attire le regard du Père des miséricordes. Elle monte de nous et nous concerne dès maintenant, en ce monde-ci : " donne-nous ... pardonne-nous ... ne nous laisse pas ... délivre-nous ". La quatrième et la cinquième demandes concernent notre vie, comme telle, soit pour la nourrir, soit pour la guérir du péché ; les deux dernières concernent notre combat pour la victoire de la Vie, le combat même de la prière.


2806 Par les trois premières demandes, nous sommes affermis dans la foi, emplis d’espérance et embrasés par la charité. Créatures et encore pécheurs, nous devons demander pour nous, ce " nous " aux mesures du monde et de l’histoire, que nous offrons à l’amour sans mesure de notre Dieu. Car c’est par le Nom de son Christ et le Règne de son Esprit Saint que notre Père accomplit son Dessein de salut, pour nous et pour le monde entier.


I. Que ton Nom soit sanctifié

2807 Le terme " sanctifier " doit s’entendre ici, non d’abord dans son sens causatif (Dieu seul sanctifie, rend saint) mais surtout dans un sens estimatif : reconnaître comme saint, traiter d’une manière sainte. C’est ainsi que, dans l’adoration, cette invocation est parfois comprise comme une louange et une action de grâces (cf. Ps 111,9 Lc 1,49). Mais cette demande nous est enseignée par Jésus comme un optatif : une demande, un désir et une attente où Dieu et l’homme sont engagés. Dès la première demande à notre Père, nous sommes plongés dans le mystère intime de sa Divinité et dans le drame du salut de notre humanité. Lui demander que son Nom soit sanctifié nous implique dans " le Dessein bienveillant qu’il avait formé par avance " pour que " nous soyons saints et immaculés en sa présence, dans l’amour " (cf. Ep 1,9 Ep 1,4).


2808 Aux moments décisifs de son Economie, Dieu révèle son Nom, mais il le révèle en accomplissant son oeuvre. Or cette oeuvre ne se réalise pour nous et en nous que si son Nom est sanctifié par nous et en nous.


2809 La Sainteté de Dieu est le foyer inaccessible de son mystère éternel. Ce qui en est manifesté dans la création et l’histoire, l’Écriture l’appelle la Gloire, le rayonnement de sa Majesté (cf. Ps 8 Is 6,3). En faisant l’homme " à son image et à sa ressemblance " (Gn 1,26), Dieu " le couronne de gloire " (Ps 8,6), mais en péchant l’homme est " privé de la Gloire de Dieu " (Rm 3,23). Dès lors, Dieu va manifester sa Sainteté en révélant et en donnant son Nom, afin de restaurer l’homme " à l’image de son Créateur " (Col 3,10).


2810 Dans la promesse faite à Abraham, et le serment qui l’accompagne (cf. He 6,13), Dieu s’engage lui-même mais sans dévoiler son Nom. C’est à Moïse qu’il commence à le révéler (cf. Ex 3,14) et il le manifeste aux yeux de tout le peuple en le sauvant des Egyptiens : " il s’est couvert de Gloire " (Ex 15,1). Depuis l’Alliance du Sinaï, ce peuple est " sien " et il doit être une " nation sainte " (ou consacrée, c’est le même mot en hébreu : cf. Ex 19,5-6) parce que le Nom de Dieu habite en lui.


2811 Or, malgré la Loi sainte que lui donne et redonne le Dieu Saint (cf. Lv 19,2, " Soyez saints, car moi, votre Dieu, je suis saint "), et bien que le Seigneur, " eu égard à son Nom ", use de patience, le peuple se détourne du Saint d’Israël et " profane son Nom parmi les nations " (cf. Ez 20 Ez 36). C’est pourquoi les justes de l’Ancienne Alliance, les pauvres revenus d’exil et les prophètes ont été brûlés par la passion du Nom.


2812 Finalement, c’est en Jésus que le Nom du Dieu Saint nous est révélé et donné, dans la chair, comme Sauveur (cf. Mt 1,21 Lc 1,31) : révélé par ce qu’il Est, par sa Parole et par son Sacrifice (cf. Jn 8,28 Jn 17,8 Jn 17,17-19). C’est le coeur de sa prière sacerdotale : " Père saint ... pour eux je me consacre moi-même, afin qu’ils soient eux aussi consacrés en vérité " (Jn 17,19). C’est parce qu’il " sanctifie " lui-même son Nom (cf. Ez 20,39 Ez 36,20-21) que Jésus nous " manifeste " le Nom du Père (Jn 17,6). Au terme de sa Pâque, le Père lui donne alors le Nom qui est au-dessus de tout nom : Jésus est Seigneur à la gloire de Dieu le Père (cf. Ph 2,9-11).


2813 Dans l’eau du Baptême, nous avons été " lavés, sanctifiés, justifiés par le Nom du Seigneur Jésus-Christ et par l’Esprit de notre Dieu " (1Co 6,11). En toute notre vie, notre Père " nous appelle à la sanctification " (1Th 4,7), et, puisque c’est " par lui que nous sommes dans le Christ Jésus, qui est devenu pour nous sanctification " (1Co 1,30), il y va de sa Gloire et de notre vie que son Nom soit sanctifié en nous et par nous. Telle est l’urgence de notre première demande.

Qui pourrait sanctifier Dieu, puisque lui-même sanctifie ? mais nous inspirant de cette parole ‘Soyez saints, parce que moi je suis Saint’ (Lv 20,26), nous demandons que, sanctifiés par le baptême, nous persévérions dans ce que nous avons commencé à être. Et cela nous le demandons tous les jours, car nous fautons quotidiennement et nous devons purifier nos péchés par une sanctification sans cesse reprise... Nous recourrons donc à la prière pour que cette sainteté demeure en nous (S. Cyprien, Dom. orat. 12 : PL 4, 526A-527A).


2814 Il dépend inséparablement de notre vie et de notre prière que son Nom soit sanctifié parmi les nations :

Nous demandons à Dieu de sanctifier son Nom, car c’est par la sainteté qu’il sauve et sanctifie toute la création... Il s’agit du Nom qui donne le salut au monde perdu, mais nous demandons que ce Nom de Dieu soit sanctifié en nous par notre vie. Car si nous vivons bien, le nom divin est béni ; mais si nous vivons mal, il est blasphémé, selon la parole de l’Apôtre : ‘Le Nom de Dieu est blasphémé à cause de vous parmi les nations’ (
Rm 2,24 Ez 36,20-22). Nous prions donc pour mériter d’avoir en nos âmes autant de sainteté qu’est saint le nom de notre Dieu (S. Pierre Chrysologue, serm. 71 : PL 52, 402A).

Quand nous disons ‘Que ton Nom soit sanctifié’, nous demandons qu’il soit sanctifié en nous, qui sommes en lui, mais aussi dans les autres que la grâce de Dieu attend encore, afin de nous conformer au précepte qui nous oblige de prier pour tous, même pour nos ennemis. Voilà pourquoi nous ne disons pas expressément : Que ton Nom soit sanctifié ‘en nous’, car nous demandons qu’il le soit dans tous les hommes (Tertullien, or. 3).


2815 Cette demande, qui les contient toutes, est exaucée par la prière du Christ, comme les six autres demandes qui suivent. La prière à notre Père est notre prière si elle est priée " dans le Nom " de Jésus (cf. Jn 14,13 Jn 15,16 Jn 16,24 Jn 16,26). Jésus demande dans sa prière sacerdotale : " Père saint, garde en ton Nom ceux que tu m’as donnés " (Jn 17,11).


II. Que ton Règne vienne

2816 Dans le Nouveau Testament, le même mot Basileia peut se traduire par royauté (nom abstrait), royaume (nom concret) ou règne (nom d’action). Le Royaume de Dieu est avant nous. Il s’est approché dans le Verbe incarné, il est annoncé à travers tout l’Evangile, il est venu dans la mort et la Résurrection du Christ. Le Royaume de Dieu vient dès la sainte Cène et dans l’Eucharistie, il est au milieu de nous. Le Royaume viendra dans la gloire lorsque le Christ le remettra à son Père :

Il se peut même que le Règne de Dieu signifie le Christ en personne, lui que nous appelons de nos voeux tous les jours, et dont nous voulons hâter l’avènement par notre attente. Comme il est notre Résurrection, car en lui nous ressuscitons, et peut être aussi le Règne de Dieu, car en lui nous régnerons (S. Cyprien, Dom. orat. 13 : PL 4, 527C-528A).


2817 Cette demande, c’est le " Marana Tha ", le cri de l’Esprit et de l’Epouse : " Viens, Seigneur Jésus " :

Quand bien même cette prière ne nous aurait pas fait un devoir de demander l’avènement de ce Règne, nous aurions de nous-mêmes poussé ce cri, en nous hâtant d’aller étreindre nos espérances. Les âmes des martyrs, sous l’autel, invoquent le Seigneur à grands cris : ‘Jusques à quand, Seigneur, tarderas-tu à demander compte de notre sang aux habitants de la terre ?’ (
Ap 6,10). Ils doivent en effet obtenir justice, à la fin des temps. Seigneur, hâte donc la venue de ton règne ! " (Tertullien, or. 5).


2818 Dans la prière du Seigneur, il s’agit principalement de la venue finale du Règne de Dieu par le retour du Christ (cf. Tt 2,13). Mais ce désir ne distrait pas l’Église de sa mission dans ce monde-ci, il l’y engage plutôt. Car depuis la Pentecôte, la venue du Règne est l’oeuvre de l’Esprit du Seigneur " qui poursuit son oeuvre dans le monde et achève toute sanctification " (MR, prière eucharistique IV).


2819 " Le Règne de Dieu est justice, paix et joie dans l’Esprit Saint " (Rm 14,17). Les derniers temps où nous sommes sont ceux de l’effusion de l’Esprit Saint. Dès lors est engagé un combat décisif entre " la chair " et l’Esprit (cf. Ga 5,16-25) :

Seul un coeur pur peut dire avec assurance : ‘Que ton Règne vienne’. Il faut avoir été à l’école de Paul pour dire : ‘Que le péché ne règne donc plus dans notre corps mortel’ (Rm 6,12). Celui qui se garde pur dans ses actions, ses pensées et ses paroles, peut dire à Dieu : ‘Que ton Règne vienne !’ (S. Cyrille de Jérusalem, catech. myst. 5, 13 : PG 33, 1120A).


2820 Dans un discernement selon l’Esprit, les chrétiens doivent distinguer entre la croissance du Règne de Dieu et le progrès de la culture et de la société où ils sont engagés. Cette distinction n’est pas une séparation. La vocation de l’homme à la vie éternelle ne supprime pas mais renforce son devoir de mettre en pratique les énergies et les moyens reçus du Créateur pour servir en ce monde la justice et la paix (cf. GS 22 GS 32 GS 39 GS 45 EN 31).


2821 Cette demande est portée et exaucée dans la prière de Jésus (cf. Jn 17,17-20), présente et efficace dans l’Eucharistie ; elle porte son fruit dans la vie nouvelle selon les Béatitudes (cf. Mt 5,13-16 Mt 6,24 Mt 7,12-13).


III. Que ta Volonté soit faite sur la terre comme au ciel

2822 C’est la Volonté de notre Père " que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité " (1Tm 2,3-4). Il " use de patience, voulant que personne ne périsse " (2P 3,9 cf. Mt 18,14). Son commandement, qui résume tous les autres, et qui nous dit toute sa volonté, c’est que " nous nous aimions les uns les autres, comme il nous a aimés " (Jn 13,34 cf. 1Jn 3 1Jn 4 Lc 10,25-37).


2823 " Il nous a fait connaître le mystère de sa Volonté, ce dessein bienveillant qu’il avait formé par avance ... ramener toutes choses sous un seul Chef, le Christ ... c’est en lui que nous avons été mis à part, selon le plan préétabli de Celui qui mène toutes choses au gré de sa Volonté ". (Ep 1,9-11). Nous demandons instamment que se réalise pleinement ce Dessein bienveillant, sur la terre comme il l’est déjà dans le ciel.


2824 C’est dans le Christ, et par sa volonté humaine, que la Volonté du Père a été parfaitement et une fois pour toutes accomplie. Jésus a dit en entrant dans ce monde : " Voici, je viens faire, ô Dieu, ta volonté " (He 10,7 Ps 40,7). Jésus seul peut dire : " Je fais toujours ce qui Lui plaît " (Jn 8,29). Dans la prière de son agonie, il consent totalement à cette Volonté : " Que ne se soit pas ma volonté qui se fasse, mais la tienne ! " (Lc 22,42 cf. Jn 4,34 Jn 5,30 Jn 6,38). Voilà pourquoi Jésus " s’est livré pour nos péchés selon la volonté de Dieu " (Ga 1,4). " C’est en vertu de cette volonté que nous sommes sanctifiés par l’oblation du Corps de Jésus Christ " (He 10,10).


2825 Jésus, " tout Fils qu’il était, apprit, de ce qu’il souffrit, l’obéissance " (He 5,8). A combien plus forte raison, nous, créatures et pécheurs, devenus en lui enfants d’adoption. Nous demandons à notre Père d’unir notre volonté à celle de son Fils pour accomplir sa Volonté, son Dessein de salut pour la vie du monde. Nous en sommes radicalement impuissants, mais unis à Jésus et avec la puissance de son Esprit Saint, nous pouvons lui remettre notre volonté et décider de choisir ce que son Fils a toujours choisi : faire ce qui plaît au Père (cf. Jn 8,29) :

En adhérant au Christ, nous pouvons devenir un seul esprit avec lui, et par là accomplir sa volonté ; de la sorte, elle sera parfaite sur la terre comme au ciel (Origène, or. 26).

Considérez comment Jésus Christ nous apprend à être humbles, en nous faisant voir que notre vertu ne dépend pas de notre seul travail mais de la grâce de Dieu. Il ordonne ici à chaque fidèle qui prie de le faire universellement pour toute la terre. Car il ne dit pas ‘Que ta volonté soit faite’ en moi ou en vous, ‘mais sur toute la terre’ : afin que l’erreur en soit bannie, que la vérité y règne, que le vice y soit détruit, que la vertu y refleurisse, et que la terre ne soit plus différente du ciel (S. Jean Chrysostome, hom. in Mt 19,5, PG 57, 280B).


2826 C’est par la prière que nous pouvons " discerner quelle est la volonté de Dieu " (Rm 12,2 Ep 5,17) et obtenir " la constance pour l’accomplir " (He 10,36). Jésus nous apprend que l’on entre dans le Royaume des cieux, non par des paroles, mais " en faisant la volonté de mon Père qui est dans les cieux " (Mt 7,21).


2827 " Si quelqu’un fait la volonté de Dieu, celui-là Dieu l’exauce " (Jn 9,31 cf. 1Jn 5,14). Telle est la puissance de la prière de l’Église dans le Nom de son Seigneur, surtout dans l’Eucharistie ; elle est communion d’intercession avec la Toute Sainte Mère de Dieu (cf. Lc 1,38 Lc 1,49) et de tous les saints qui ont été " agréables " au Seigneur pour n’avoir voulu que sa Volonté :

Nous pouvons encore, sans blesser la vérité, traduire ces paroles : ‘Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel’ par celles-ci : dans l’Église comme dans notre Seigneur Jésus Christ ; dans l’Epouse qui lui a été fiancée, comme dans l’Epoux qui a accompli la volonté du Père (S. Augustin, serm. Dom. 2, 6, 24 : PL 34, 1279).

IV. Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour

2828 " Donne-nous " : elle est belle la confiance des enfants qui attendent tout de leur Père. " Il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes " (Mt 5,45) et il donne à tous les vivants " en son temps leur nourriture " (Ps 104,27). Jésus nous apprend cette demande : elle glorifie en effet notre Père parce qu’elle reconnaît combien il est Bon au-delà de toute bonté.


2829 " Donne-nous " est encore l’expression de l’Alliance : nous sommes à Lui et il est à nous, pour nous. Mais ce " nous " le reconnaît aussi comme le Père de tous les hommes et nous le prions pour eux tous, en solidarité avec leurs besoins et leurs souffrances.


2830 " Notre pain ". Le Père, qui nous donne la vie, ne peut pas ne pas nous donner la nourriture nécessaire à la vie, tous les biens " convenables ", matériels et spirituels. Dans le Sermon sur la montagne, Jésus insiste sur cette confiance filiale qui coopère à la Providence de notre Père (cf. Mt 6,25-34). Il ne nous engage à aucune passivité (cf. 2Th 3,6-13) mais veut nous libérer de toute inquiétude entretenue et de toute préoccupation. Tel est l’abandon filial des enfants de Dieu :

A ceux qui cherchent le Royaume et la justice de Dieu, il promet de donner tout par surcroît. Tout en effet appartient à Dieu : à celui qui possède Dieu, rien ne manque, si lui-même ne manque pas à Dieu (S. Cyprien, Dom. orat. 21 : PL 4, 534A).


2831 Mais la présence de ceux qui ont faim par manque de pain révèle une autre profondeur de cette demande. Le drame de la faim dans le monde appelle les chrétiens qui prient en vérité à une responsabilité effective envers leurs frères, tant dans leurs comportements personnels que dans leur solidarité avec la famille humaine. Cette demande de la Prière du Seigneur ne peut être isolée des paraboles du pauvre Lazare (cf. Lc 16,19-31) et du jugement dernier (cf. Mt 25,31-46).


2832 Comme le levain dans la pâte, la nouveauté du Royaume doit soulever la terre par l’Esprit du Christ (cf. AA AA 5). Elle doit se manifester par l’instauration de la justice dans les relations personnelles et sociales, économiques et internationales, sans jamais oublier qu’il n’y a pas de structure juste sans des humains qui veulent être justes.


2833 Il s’agit de " notre " pain, " un " pour " plusieurs ". La pauvreté des Béatitudes est la vertu du partage : elle appelle à communiquer et à partager les biens matériels et spirituels, non par contrainte mais par amour, pour que l’abondance des uns remédie aux besoins des autres (cf. 2Co 8,1-15).


2834 " Prie et travaille " (cf. S. Benoît, reg. 20 ; 48). " Priez comme si tout dépendait de Dieu et travaillez comme si tout dépendait de vous " (Attribué à Ignace de Loyola ; cf. Pierre de Ribadeneyra, Tractatus de modo gubernandi Sancti Ignatii 6, 14). Ayant fait notre travail, la nourriture reste un don de notre Père ; il est juste de la Lui demander et de Lui en rendre grâces pour cela même. C’est le sens de la bénédiction de la table dans une famille chrétienne.


2835 Cette demande, et la responsabilité qu’elle engage, valent encore pour une autre faim dont les hommes dépérissent : " L’homme ne vit pas seulement de pain mais de tout ce qui sort de la bouche de Dieu " (Dt 8,3 Mt 4,4), c’est-à-dire sa Parole et son Souffle. Les chrétiens doivent mobiliser tout leurs efforts pour " annoncer l’Evangile aux pauvres ". Il y a une faim sur la terre, " non pas une faim de pain ni une soif d’eau, mais d’entendre la Parole de Dieu " (Am 8,11). C’est pourquoi le sens spécifiquement chrétien de cette quatrième demande concerne le Pain de Vie : la Parole de Dieu à accueillir dans la foi, le Corps du Christ reçu dans l’Eucharistie (cf. Jn 6,26-58).


2836 " Aujourd’hui " est aussi une expression de confiance. Le Seigneur nous l’apprend (cf. Mt 6,34 Ex 16,19) ; notre présomption ne pouvait l’inventer. Puisqu’il s’agit surtout de sa Parole et du Corps de son Fils, cet " aujourd’hui " n’est pas seulement celui de notre temps mortel : il est l’Aujourd’hui de Dieu :

Si tu reçois le pain chaque jour, chaque jour pour toi c’est aujourd’hui. Si le Christ est à toi aujourd’hui, tous les jours il ressuscite pour toi. Comment cela ? ‘Tu es mon Fils, moi, aujourd’hui je t’engendre’ (Ps 2,7). Aujourd’hui, c’est-à-dire : quand le Christ ressuscite (S. Ambroise, sacr. 5, 26 : PL 16, 453A).


2837 " De ce jour ". Ce mot, épiousios, n’a pas d’autre emploi dans le Nouveau Testament. Pris dans un sens temporel, il est une reprise pédagogique de " aujourd’hui " (cf. Ex 16,19-21) pour nous confirmer dans une confiance " sans réserve ". Pris au sens qualitatif, il signifie le nécessaire à la vie, et plus largement tout bien suffisant pour la subsistance (cf. 1Tm 6,8). Pris à la lettre (épiousios : " sur-essentiel "), il désigne directement le Pain de Vie, le Corps du Christ, " remède d’immortalité " (S. Ignace d’Antioche) sans lequel nous n’avons pas la Vie en nous (cf. Jn 6,53-56). Enfin, lié au précédent, le sens céleste est évident : " ce Jour " est celui du Seigneur, celui du Festin du Royaume, anticipé dans l’Eucharistie qui est déjà l’avant-goût du Royaume qui vient. C’est pourquoi il convient que la Liturgie eucharistique soit célébrée " chaque jour ".

L’Eucharistie est notre pain quotidien. La vertu propre à ce divin aliment est une force d’union : elle nous unit au Corps du Sauveur et fait de nous ses membres afin que nous devenions ce que nous recevons ... Ce pain quotidien est encore dans les lectures que vous entendez chaque jour à l’Église, dans les hymnes que l’on chante et que vous chantez. Tout cela est nécessaire à notre pèlerinage (S. Augustin, serm. 57, 7, 7 : PL 38, 389).

Le Père du ciel nous exhorte à demander comme des enfants du ciel, le Pain du ciel. (cf. Jn 6,51). Le Christ " lui-même est le pain qui, semé dans la Vierge, levé dans la chair, pétri dans la Passion, cuit dans la fournaise du sépulcre, mis en réserve dans l’Église, apporté aux autels, fournit chaque jour aux fidèles une nourriture céleste " (S. Pierre Chrysologue, serm. 71 : PL 52, 402D).



Catéchisme Eglise Cath. 2773